Nations Unies

E/C.12/58/D/13/2016

Conseil économique et social

Distr. générale

20 juillet 2016

Français

Original : espagnol

Comité des droits économiques, sociaux et culturels

Communication no 13/2016 *

Décision adoptée par le Comité à sa cinquante-huitième session (tenue du 6 au 24 juin 2016)

P résentée par :

E. C. P. et consorts (représentés par Antonio Álvarez‑Ossorio Gálvez, avocat)

Au nom de :

Les auteurs

État partie :

Espagne

Date de la communication :

29 mai 2015

Date d’adoption de la décision :

20 juin 2016

Objet :

Prestations sociales complémentaires prévues par une convention collective

Questions de fond :

Droit de jouir de conditions de travail justes et favorables ; droit à la sécurité sociale

Questions de procédure :

Soumission de la communication dans un délai d’un an après épuisement des recours internes ; compétence ratione temporis du Comité ; compétence ratione materiae du Comité

Article(s) du Pacte :

7 et 9

Article(s) du Protocole facultatif  :

2 et 3 (par. 2 a) et b))

Décision concernant la recevabilité

1.1Les auteurs de la communication sont MM. E. C. P., J. I. C. G. et C. G. M., tous de nationalité espagnole et majeurs. Les auteurs affirment que l’État partie a violé les droits qu’ils tiennent des articles 7 et 9 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Ils affirment en outre que l’État partie a violé les droits consacrés aux articles 12 1) et 26 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Les auteurs sont représentés par un conseil.

1.2Le 10 février 2016, le Groupe de travail des communications, agissant au nom du Comité, a décidé qu’il n’avait pas besoin que l’État partie présente ses observations pour se prononcer sur la recevabilité de la communication. La présente communication n’a donc pas été transmise à l’État partie, conformément au paragraphe 1 de l’article 6 du Protocole facultatif.

Rappel des faits présentés par les auteurs

2.1Les auteurs ont travaillé dans un établissement bancaire (ci-après « la banque ») pendant plusieurs décennies, la relation de travail ayant débuté à différentes dates entre 1967 et 1976. La banque a licencié M. E. C. P. le 28 juillet 1994. MM. J. I. C. G. et C. G. M. ont demandé leur départ volontaire le 22 mai 1988 et le 22 avril 1991, respectivement.

2.2Aux dates d’extinction de la relation de travail des auteurs, la banque maintenait en faveur de ses employés un régime de prévoyance découlant des conventions collectives successives du secteur de la banque privée. Toutes ont été publiées au Journal officiel de l’État partie en temps opportun. En vertu de ces conventions, la banque s’engageait à compléter les prestations de sécurité sociale perçues par ses employés ou leurs ayants droit en cas de maladie, d’incapacité permanente, de départ à la retraite ou de décès d’un membre du personnel. La banque a constitué une provision comptable (fonds interne global non individualisé) pour garantir le versement de ces prestations complémentaires.

2.3Les auteurs indiquent que, conformément au décret royal no 1588/1999, la banque a souscrit une assurance collective auprès de compagnies d’assurance entre 2001 et 2002 afin de garantir les prestations complémentaires en question à ses employés en activité. Les auteurs sont demeurés bénéficiaires de cette assurance selon les conditions établies dans les certificats individuels d’assurance.

2.4Par la suite, les auteurs ont demandé à la banque de récupérer la provision mathématique correspondant aux engagements de retraite pris à leur égard. La banque n’a pas accédé à leur demande.

2.5Le 5 décembre 2008, les auteurs ont engagé une procédure contre la banque devant le Tribunal des affaires sociales no 24 de Madrid (ci-après « le Tribunal no 24 ») et ont demandé la reconnaissance de leur droit au recouvrement, au transfert ou à la mobilisation de la dotation individuelle dont ils étaient bénéficiaires, à concurrence du montant constitué dans le fonds interne de la banque à la date de la cessation de la relation de travail.

2.6Le 4 juin 2009, le Tribunal no 24 a débouté les auteurs de leur demande. Il a considéré que la convention collective établissait un droit à prestation en faveur des travailleurs (prestations complémentaires) une fois survenu le fait ouvrant droit à cette prestation ; qu’aucune disposition des conventions n’instituait de droit au recouvrement du montant correspondant si l’extinction du contrat de travail précédait la survenance du fait ouvrant droit à prestation ; que, dès lors, tant que ce fait ne s’était pas produit, le travailleur n’avait que l’expectative d’un droit. Le 24 juillet 2009, les auteurs ont formé un recours en appel devant le Tribunal supérieur de justice de Madrid.

2.7Le 30 mars 2010, le Tribunal supérieur de justice de Madrid a débouté les auteurs en appel et a confirmé le jugement du Tribunal no 24.

2.8Le 8 octobre 2010, les auteurs se sont pourvus en cassation devant le Tribunal suprême de justice aux fins d’harmonisation de la jurisprudence. Le pourvoi a été rejeté le 15 mars 2011.

2.9Le 11 octobre 2011, les auteurs ont saisi la Cour européenne des droits de l’homme en invoquant la violation des droits qu’ils tiennent des articles 6.1 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (Convention européenne des droits de l’homme), de l’article premier du Protocole additionnel à la Convention (Protocole no 1) et de l’article premier du Protocole no 12 à la Convention. Le 13 février 2014, la Cour européenne des droits de l’homme a jugé la plainte irrecevable au motif qu’elle ne satisfaisait pas aux critères de recevabilité établis aux articles 34 et 35 de la Convention. Le 11 juillet 2014, les auteurs ont demandé à la Cour européenne des droits de l’homme d’indiquer les motifs pour lesquels leur demande avait été déclarée irrecevable. Ils indiquent avoir soumis la communication au Comité en l’absence d’une réponse de la Cour européenne des droits de l’homme et font valoir que la date à retenir pour le calcul du délai d’une année prévu à l’alinéa a) du paragraphe 2 de l’article 3 du Protocole facultatif est le 11 juillet 2014.

Teneur de la plainte

3.1Les auteurs affirment que l’État partie a violé les droits qu’ils tiennent des articles 7 et 9 du Pacte. L’État partie aurait aussi, d’après les auteurs, enfreint leurs droits prévus au paragraphe 1 de l’article 12 et à l’article 26 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

3.2Les auteurs demandent au Comité de constater la violation des articles précités et d’ordonner le versement de dommages-intérêts et le remboursement des frais de procédure.

Délibérations du Comité

Examen de la recevabilité

4.1Avant d’examiner toute plainte soumise dans une communication, le Comité doit, conformément à l’article 9 de son règlement intérieur provisoire relatif au Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (E/C.12/49/3), déterminer si la communication est recevable en vertu du Protocole facultatif.

4.2Le Comité est compétent ratione materiae pour examiner les allégations de violation de tout droit économique, social ou culturel visé par le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. En conséquence, le Comité déclare irrecevables les plaintes des auteurs relatives au paragraphe 1 de l’article 12 et à l’article 26 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, conformément à l’alinéa d) du paragraphe 2 de l’article 3 du Protocole facultatif.

4.3Le Comité rappelle que le Protocole facultatif est entré en vigueur pour l’État partie le 5 mai 2013 et que, conformément à l’alinéa b) du paragraphe 2 de l’article 3 du Protocole facultatif, le Comité doit déclarer irrecevable toute communication portant sur des faits antérieurs à la date d’entrée en vigueur du Protocole facultatif à l’égard de l’État partie intéressé, à moins que ces faits ne persistent après cette date. En l’espèce, le Comité constate que les faits sur lesquels porte la communication, y compris l’ensemble des décisions judiciaires des autorités nationales concernant l’affaire, se sont produits avant le 5 mai 2013. Il ne ressort pas des informations fournies par les auteurs que des faits susceptibles de constituer en tant que tels une violation du Pacte aient persisté après l’entrée en vigueur du Protocole facultatif. Par conséquent, le Comité se considère empêché ratione temporis d’examiner la présente communication et estime que celle-ci est irrecevable conformément à l’alinéa b) du paragraphe 2 de l’article 3 du Protocole facultatif.

5.En conséquence, le Comité décide :

a)Que la communication est irrecevable conformément aux alinéas b) et d) du paragraphe 2 de l’article 3 du Protocole facultatif ;

b)Que la présente décision sera communiquée à l’État partie et aux auteurs.