Nations Unies

E/C.12/SVK/CO/3

Conseil économique et social

Distr. générale

14 novembre 2019

Français

Original : anglais

Comité des droits économiques, sociaux et culturels

Observations finales concernant le troisième rapport périodique de la Slovaquie *

1.Le Comité a examiné le troisième rapport périodique de la Slovaquie (E/C.12/SVK/3) à ses 46e et 47e séances (voir E/C.12/2019/SR.46 et 47), les 9 et 10 octobre 2019, et adopté les présentes observations finales à sa 60e séance, le 18 octobre 2019.

A.Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le troisième rapport périodique de l’État partie, ainsi que les renseignements complémentaires fournis dans les réponses écrites à la liste de points (E/C.12/SVK/Q/3/Add.1). Il se félicite du dialogue constructif qu’il a eu avec la délégation de l’État partie.

B.Aspects positifs

3.Le Comité accueille avec satisfaction les mesures législatives et institutionnelles et de politique générale, mentionnées dans les présentes observations finales, que l’État partie a prises pour améliorer la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels sur son territoire. Il prend note en particulier des efforts faits pour modifier la loi sur le Centre national slovaque pour les droits de l’homme en vue de le rendre davantage conforme aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris), et des politiques qui ont contribué à maintenir un faible niveau d’inégalités dans le pays tout au long de la période considérée.

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Application interne

4.Le Comité note avec regret qu’en dépit de la primauté du Pacte sur le droit interne, le nombre d’affaires dans lesquelles celui-ci a été appliqué par les juridictions nationales reste à ce jour limité (art. 2, par.1).

5.Le Comité réitère la recommandation formulée dans ses observations finales de 2012 (E/C.12/SVK/CO/2, par. 6) invitant l’État partie à prendre les mesures appropriées pour faire mieux connaître le Pacte aux juges, avocats et procureurs afin de s’assurer que ses dispositions puissent être prises en considération dans les décisions rendues par les cours et tribunaux internes. Le Comité recommande également à l’État partie d’adopter des mesures propres à sensibiliser les membres du pouvoir judiciaire et la population au Pacte et à la justiciabilité des droits économiques, sociaux et culturels. Il appelle l’attention de l’État partie sur son observation générale nº 9 (1998) concernant l’application du Pacte au niveau national.

Institution nationale des droits de l’homme

6.Le Comité prend note des efforts faits par l’État partie pour renforcer son institution nationale des droits de l’homme, le Centre national slovaque pour les droits de l’homme, mais constate avec regret que bien que l’État partie soit un pays à revenu élevé qui adhère à tous les principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, ce centre conserve le statut B. Le Comité juge préoccupantes les informations selon lesquelles le Centre serait doté de fonds insuffisants, ne serait pas pleinement indépendant et serait dépourvu de procédures de nomination transparentes (art. 2, par. 1).

7. Conformément à son observation générale n o 10 (1998) sur le rôle des institutions nationales de défense des droits de l’homme dans la protection des droits économiques, sociaux et culturels, le Comité recommande à l’État partie :

a) De redoubler d’efforts pour accroître les fonds alloués au Centre national slovaque pour les droits de l’homme ;

b) De renforcer l’indépendance du Centre conformément aux Principes de Paris ;

c) De prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir que les procédures de recrutement soient appliquées en toute transparence pour tous les membres du Centre ;

d) De faire en sorte que toutes les institutions qui veillent à la promotion et à la protection des droits de l’homme, y compris le Centre, le Défenseur public des droits, le Commissaire aux droits des personnes handicapées et le Commissaire à l’enfance, travaillent ensemble, dans un cadre global.

Corruption

8.Le Comité apprécie les efforts faits par l’État partie pour lutter contre la corruption, notamment l’adoption récente de la loi no 315/2016, parue au Recueil des lois (R. L.), sur le registre des partenaires du secteur public, ainsi que les mesures prises pour protéger les lanceurs d’alerte et la condamnation de certains hauts responsables, mais demeure préoccupé par le fait que le niveau de corruption reste élevé dans l’État partie, et note avec regret que les renseignements sur les enquêtes, les poursuites et les condamnations témoignant des effets transversaux de la corruption sur les droits de l’homme sont jusqu’ici limités (art. 2, par.1).

9.Le Comité recommande à l’État partie d’accroître encore le nombre d’enquêtes, de poursuites et de condamnations dans les affaires de corruption, y compris les affaires de corruption scandaleuses impliquant des hauts fonctionnaires, et de prendre des mesures énergiques pour empêcher tout nouveau cas de corruption.

Aide au développement

10.Le Comité salue l’intention de l’État partie d’accroître l’aide publique au développement, mais demeure préoccupé par le fait que le montant actuel de cette aide reste faible (art. 2, par. 1).

11. Le Comité recommande à l’État partie d’augmenter le montant de l’aide publique au développement en vue d’atteindre l’objectif fixé à cet égard pour les pays à revenu élevé, à savoir 0,7 % du revenu national brut.

Non-discrimination

12.Le Comité prend note de la législation antidiscrimination de l’État partie, à savoir la loi antidiscrimination de 2004, et est conscient que l’État partie a élaboré un Plan d’action pour la prévention de toutes les formes de discrimination (2016-2019). Il reste toutefois préoccupé par l’absence de recours judiciaire effectif pour les victimes, notamment les groupes qui font souvent l’objet de discrimination, tels que les Roms, les migrants et les demandeurs d’asile, et les personnes handicapées, et regrette l’absence de reconnaissance juridique de l’intersectionnalité. Le Comité relève également avec préoccupation que dans la législation de l’État partie, seul est défini comme discriminatoire à l’égard des personnes handicapées dans le contexte de l’emploi le fait de ne pas procéder à des aménagements raisonnables (art. 2, par. 2).

13. Le Comité recommande à l’État partie :

a) De modifier la loi antidiscrimination de 2004 de manière à interdire clairement toute forme de discrimination directe, indirecte et transversale, et à reconnaître officiellement et sans équivoque que le refus d’aménagement raisonnable constitue une forme de discrimination ;

b) De lever les obstacles qui empêchent les personnes victimes de discrimination d’accéder à un recours judiciaire effectif au titre de ladite loi, notamment en menant des activités de sensibilisation auprès des groupes minoritaires, des femmes, des migrants et des demandeurs d’asile, et des personnes handicapées afin de leur faire connaître leurs droits et les mécanismes de plainte disponibles ;

c) De continuer de former les magistrats aux normes juridiques relatives à la non-discrimination et d’étendre cette formation à d’autres professionnels du droit et aux fonctionnaires ;

d) De veiller à renouveler le plan d’action national de lutte contre la discrimination en y abordant les droits économiques, sociaux et culturels, et d’allouer les ressources financières et techniques nécessaires à sa mise en œuvre effective sur tout le territoire.

Discrimination fondée sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre

14.Le Comité note avec préoccupation la discrimination fondée sur l’identité de genre et l’orientation sexuelle et constate avec regret que, faute de reconnaissance du mariage entre personnes de même sexe, il n’existe pas d’institution juridique telle que le partenariat enregistré ou l’union civile, qui assure aux partenaires de même sexe une protection équivalente à celle que confère le mariage (art. 2, par. 2).

15.Le Comité recommande à l’État partie d’élaborer et de mettre en œuvre des dispositions juridiques, des politiques et des programmes spécifiques qui garantissent une protection contre la discrimination fondée sur l’identité de genre et l’orientation sexuelle. Il recommande en outre à l’État partie de mener des campagnes de sensibilisation et de consultation du public pour éliminer la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle, et de mettre en place une institution juridique, telle que le partenariat enregistré ou l’union civile, qui assure aux partenaires de même sexe une protection équivalente à celle que confère le mariage.

Désinstitutionnalisation des personnes handicapées

16.Le Comité note avec préoccupation que l’approche globale du handicap adoptée par l’État partie n’a pas permis d’éliminer la discrimination et l’exclusion structurelles. Il note avec regret que la majorité des adultes et enfants handicapés n’ont pas accès à un accompagnement à la vie autonome et sont très souvent placés en institution (art. 2).

17. Le Comité recommande à l’État partie d’accélérer les progrès sur la voie de la désinstitutionnalisation des personnes handicapées et de mettre au point une méthode d’évaluation complète et des services d’accompagnement adaptés aux capacités et aux besoins des personnes, pour faciliter l’autonomie de vie.

Égalité de droits des hommes et des femmes

18.Le Comité constate les efforts et les réalisations de l’État partie dans le domaine de la lutte contre les inégalités entre hommes et femmes, notamment la mise œuvre d’une stratégie et de plans d’action nationaux en faveur de l’égalité des sexes, certaines améliorations en matière de représentation des femmes à des postes de direction politique et le nombre croissant d’hommes qui prennent un congé de paternité, mais est préoccupé par la lenteur des progrès d’ensemble accomplis vers la réalisation de la pleine égalité. Le Comité s’inquiète tout particulièrement de l’insuffisance des progrès réalisés pour améliorer véritablement l’accès des femmes aux postes de responsabilité au sein des différentes institutions politiques, sociales et économiques et pour lutter contre la répartition très inégale des tâches domestiques et familiales non rémunérées entre femmes et hommes, ce qui constitue des obstacles importants à l’égalité. Il est également préoccupé par la persistance des stéréotypes sur les femmes et sur leur rôle dans la société et la famille (art. 3 et 7).

19. Le Comité recommande à l’État partie :

a) D’examiner et de modifier toutes les lois, réglementations, normes et pratiques discriminatoires à l’égard des femmes et d’élaborer des politiques et des programmes, y compris des mesures temporaires spéciales, pour parvenir à l’égalité effective entre les sexes dans tous les domaines des droits économiques, sociaux et culturels ;

b) De prendre des mesures globales pour éliminer les stéréotypes sur le rôle des femmes et des hommes, notamment au moyen de campagnes dans les médias et de consultations avec des leaders d’opinion, et en sensibilisant le grand public au partage égal des droits et des responsabilités entre hommes et femmes dans la famille et dans la société ;

c) De poursuivre les efforts visant à accroître le nombre d’hommes qui prennent un congé de paternité ;

d) De reconnaître et de valoriser le travail domestique non rémunéré, et de réduire les incidences de celui-ci sur l’emploi des femmes, comme énoncé au paragraphe 23 ci-après.

Chômage

20.Le Comité prend note des efforts et des réalisations de l’État partie dans le domaine de la lutte contre le chômage, mais demeure préoccupé par la persistance du chômage de longue durée, en particulier au sein des groupes minoritaires. Le chômage des jeunes et les importantes disparités régionales sur le marché du travail requièrent une plus grande attention. Le Comité est en outre préoccupé par le fait que les migrants, les réfugiés et les demandeurs d’asile se heurtent à des obstacles dans l’accès à l’emploi (art. 6, par. 1).

21.Le Comité recommande à l’État partie de poursuivre les efforts faits pour lutter contre toutes les formes de chômage, en tenant compte de la nécessité de réduire les disparités régionales sur le marché du travail. Il devrait sans délai supprimer l’obligation faite aux réfugiés et aux demandeurs d’asile d’attendre neuf mois avant de chercher un emploi. À cet égard, le Comité invite l’État partie à se référer à sa déclaration de 2017 intitulée « Devoirs des États envers les réfugiés et les migrants au titre du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels ».

Discrimination fondée sur le genre dans l’emploi

22.Le Comité regrette la persistance de nombreux obstacles à la participation pleine et égale des femmes au monde du travail, notamment la répartition inégale des tâches domestiques et familiales qui les empêchent d’accéder au marché du travail. Le Comité note avec préoccupation la ségrégation horizontale, la discrimination salariale et l’absence de pratiques de promotion équitables et transparentes, qui pénalisent les femmes de manière disproportionnée (art. 3 et 7).

23. Le Comité recommande à l’État partie :

a) D’élaborer et d’appliquer des lois, des politiques et des programmes visant à éliminer les obstacles à l’égalité des femmes et des hommes dans l’emploi ;

b) De veiller à ce que les mesures visant le marché du travail et les autres politiques sociales pertinentes reconnaissent et valorisent le travail non rémunéré et réduisent les incidences de celui-ci sur l’emploi des femmes ;

c) De sensibiliser davantage les inspecteurs du travail aux violations des droits des femmes ;

d) De faciliter l’accès des femmes à des recours utiles pour chaque violation des droits au travail constatée.

Droit à des conditions de travail justes et favorables

24.Le Comité note les mesures prises par l’État partie pour garantir des conditions de travail justes et favorables, notamment l’augmentation des salaires, les améliorations apportées à l’inspection du travail et le programme visant à mieux concilier vie de famille et obligations professionnelles. Il demeure néanmoins préoccupé par les violations des droits au travail, notamment le non-paiement des salaires et la discrimination salariale, dont sont victimes de manière disproportionnée les travailleurs migrants, les demandeurs d’asile et les réfugiés, en particulier ceux qui sont recrutés par les agences de placement. Le Comité s’inquiète que la rémunération de certains travailleurs soit inférieure au salaire minimum, notamment parmi les travailleurs peu qualifiés et les travailleurs migrants, et les femmes (art. 2, 3 et 7).

25. Le Comité recommande à l’État partie :

a) De veiller à ce que les services d’inspection du travail assurent une couverture géographique et sectorielle complète et soient dotés de ressources financières et techniques suffisantes pour continuer d’accroître le nombre d’inspections ;

b) De garantir l’accès à des recours utiles à toutes les victimes de violations des droits au travail, y compris une indemnisation et des garanties de non-répétition ;

c) De poursuivre les efforts faits pour réglementer et contrôler les activités des agences de placement ;

d) De continuer de garantir un calcul et des revalorisations réalistes du salaire minimum ;

e) D’éliminer tous les obstacles à la syndicalisation et de veiller au plein respect des droits de tous les travailleurs à cet égard.

Pauvreté

26.Le Comité note la diminution du nombre de personnes en situation de grave précarité matérielle et du nombre de personnes exposées au risque de pauvreté, mais demeure préoccupé par le taux d’extrême pauvreté qui se situe au-dessus de la moyenne de l’Union européenne, et par la pauvreté en général qui touche de manière disproportionnée les groupes minoritaires, en particulier les Roms (art. 2, 9 et 11).

27. Le Comité recommande à l’État partie d’intensifier les efforts visant à lutter contre la pauvreté, en particulier l’extrême pauvreté, en adoptant un plan d’action national contre la pauvreté qui repose sur une approche fondée sur les droits de l’homme. Il recommande en outre à l’État partie de veiller à ce que les prestations de sécurité sociale offrent une protection appropriée contre toutes les formes de pauvreté et soient spécifiquement adaptées aux besoins des personnes les plus à risque.

Violence à l’égard des femmes

28.Le Comité note avec préoccupation les renseignements fournis sur l’ampleur de la violence à l’égard des femmes, y compris le harcèlement sexuel, le harcèlement obsessionnel et la violence familiale, dans l’État partie. Il s’inquiète en outre qu’il n’existe pas de loi spécifique contre la violence à l’égard des femmes et que l’État partie n’ait pas encore ratifié la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (Convention d’Istanbul) (art. 3, 10 et 12).

29. Le Comité recommande à l’État partie :

a) D’élaborer des lois spécifiques contre la violence à l’égard des femmes ;

b) De ratifier la Convention d’Istanbul ;

c) D’assurer la pleine protection des victimes de violence à l’égard des femmes ;

d) D’assurer la collecte systématique de données ventilées en vue de mieux comprendre la nature et l’ampleur de la violence à l’égard des femmes sur le territoire ;

e) D’améliorer l’accès des femmes à la justice quelle que soit la forme de violence à l’égard des femmes dont elles sont victimes.

Droit à un logement convenable

30.Le Comité est préoccupé par les informations selon lesquelles les Roms se heurteraient à de multiples obstacles dans la réalisation de leur droit à un niveau de vie suffisant. Parmi ces obstacles figurent notamment l’expulsion forcée des campements roms, l’absence de solution de relogement dans certains cas d’expulsion et le fait que les logements des Roms sont séparés du reste de la société. En outre, les logements proposés sont parfois d’une qualité insuffisante et sont éloignés des infrastructures essentielles et des possibilités d’emploi. Le Comité note également avec préoccupation que l’État partie ne collecte pas d’informations sur l’ampleur du sans-abrisme et s’inquiète du manque de logements sociaux accessibles (art. 2 et 11).

31. Le Comité recommande à l’État partie :

a) D’empêcher l’expulsion forcée des campements roms, notamment en faisant appliquer les sanctions pénales prononcées en cas de condamnation pour expulsion illégale ;

b) Si l’expulsion a effectivement lieu dans le respect des garanties de procédure, de fournir un hébergement de remplacement à toutes les victimes ;

c) De veiller à ce que tous les logements des Roms soient intégrés au sein des villes, soient de bonne qualité et permettent l’accès aux infrastructures et à l’emploi ;

d) De fournir des logements sociaux adéquats à un coût abordable ;

e) De veiller à ce que la stratégie nationale visant à prévenir et régler le problème du sans-abrisme prévoie l’élaboration de statistiques de manière à suivre l’évolution du phénomène et à cibler les solutions de logement social en conséquence.

32.Le Comité renvoie l’État partie à son observation générale no 7 (1997) sur les expulsions forcées.

Accès à l’eau

33.Le Comité constate avec préoccupation l’insuffisance des progrès réalisés en ce qui concerne la distribution d’eau à toute la population à la suite de la recommandation qu’il a formulée en 2012 sur cette question (E/C.12/SVK/CO/2, par. 21). Il est profondément préoccupé par le fait que, dans un pays à revenu élevé, un grand nombre de Roms, en particulier ceux qui vivent dans les communautés soumises à la ségrégation, ne bénéficient pas d’un accès permanent à l’eau salubre (art. 2, 11, par. 1, et 12, par. 1).

34.Le Comité réitère sa recommandation précédente invitant l’État partie à prendre les mesures nécessaires pour fournir à tous les membres de sa population, y compris dans les zones rurales, une eau adéquate et salubre ainsi que des services d’assainissement. Il appelle l’attention de l’État partie sur son observation générale nº 15 (2002) sur le droit à l’eau.

Accès aux soins de santé

35.Le Comité relève avec préoccupation certaines faiblesses systémiques en matière de soins de santé, notamment la mauvaise qualité des infrastructures due au manque d’investissements, les capacités limitées en termes de dépistage, les disparités géographiques constatées pour certains services de santé et le manque de médecins et d’infirmières dans certaines régions (art. 12).

36. Le Comité recommande à l’État partie de poursuivre et d’intensifier l’effort d’investissement dans le système de santé afin de permettre à tous les membres de sa population de jouir du meilleur état de santé possible.

Obésité et consommation de drogues et d’alcool

37.Le Comité prend acte des mesures prises pour encourager des modes de vie sains, mais est préoccupé par les informations selon lesquelles l’obésité, la toxicomanie et l’alcoolisme demeurent élevés dans l’État partie, de même que les maladies résultant de comportements à risque. Le Comité relève en outre que les efforts faits pour encourager des modes de vie sains et réglementer la commercialisation de l’alcool, ou celle des aliments et boissons destinés aux enfants sont insuffisants. Il est également préoccupé par les disparités importantes constatées en matière de santé entre les personnes qui ont suivi un enseignement universitaire et celles qui n’en ont pas reçu (art. 12).

38.Le Comité recommande à l’État partie d’investir dans des campagnes de santé publique à des fins de prévention et de prendre des mesures ciblées en faveur des groupes et personnes présentant de graves problèmes de santé ou exposés à des risques importants. L’État partie devrait également améliorer la réglementation de la commercialisation de l’alcool, ainsi que celle des aliments et boissons destinés aux enfants, conformément à l’Ensemble de recommandations sur la commercialisation des aliments et des boissons non alcoolisées destinés aux enfants (2010) de l’Organisation mondiale de la S anté.

Santé mentale

39.Le Comité note que l’État partie s’est engagé à mettre fin à la pratique consistant à utiliser des lits-cages comme moyen de contention de manière prioritaire, mais s’inquiète des informations selon lesquelles ces lits seraient toujours utilisés dans les établissements de soins de santé mentale, notamment pour les enfants. Il est également préoccupé par le fait que les nombreuses exceptions prévues à l’interdiction de ces pratiques dans la loi de 2009 sur les services sociaux exposent les patients placés dans ce type d’établissements à des risques de violations de leur droit de jouir du meilleur état de santé possible (art. 12).

40.Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour honorer effectivement son engagement de trouver des solutions de remplacement à l’utilisation des lits-cages dans les établissements de soins de santé mentale. L’État partie devrait réviser la loi de 2009 sur les services sociaux en vue de supprimer les exceptions prévues à leur interdiction.

Santé sexuelle et procréative

41.Le Comité note avec une profonde préoccupation que, dans l’État partie, les femmes sont confrontées à de multiples obstacles pour accéder aux services de santé sexuelle et procréative, y compris l’avortement médicalisé et la contraception, et que leurs droits dans ce domaine seront encore plus limités dans le cas où les projets de loi présentés dernièrement au Parlement seraient adoptés (art. 2 et 12).

42. Le Comité recommande à l’État partie :

a) De garantir l’accès à différentes méthodes de contraception et à l’avortement, en toutes circonstances, dans le cadre du régime national d’assurance maladie ;

b) D’interdire la diffusion auprès des femmes d’informations orientées ou médicalement non valables sur les dangers de l’avortement en vue de les empêcher d’accéder aux services de santé sexuelle et procréative ;

c) De dispenser une formation aux droits de l’homme à tous les professionnels de la santé sur les droits des femmes, y compris les femmes roms, en matière de procréation ;

d) De garantir la protection totale de la vie privée des femmes tout au long de la procédure d’avortement ;

e) D’éviter toute nouvelle régression s’agissant des droits des femmes en matière de santé sexuelle et procréative ;

f) De mettre en place une éducation obligatoire et adaptée à l’âge dans le domaine de la santé sexuelle et procréative à tous les niveaux.

43. À cet égard, le Comité appelle l’attention de l’État partie sur son observation générale n o 22 (2016) sur le droit à la santé sexuelle et procréative.

Santé sexuelle et procréative des femmes roms

44.Le Comité est profondément préoccupé par les informations selon lesquelles les femmes roms qui sollicitent des soins de santé maternelle seraient confrontées à la ségrégation dans les services de maternité, seraient victimes de harcèlement, d’humiliations, de négligence et soumises à des mesures de contrainte physique et à des mauvais traitements pendant leur accouchement, et par les informations selon lesquelles l’obligation d’obtenir leur consentement éclairé en ce qui concerne les traitements médicaux ne serait pas respectée. Le Comité constate en outre avec préoccupation que des femmes roms ont subi une stérilisation forcée dans l’État partie, et est profondément préoccupé par le fait que les victimes ne bénéficient pas d’un accès adéquat à des voies de recours (art. 2 et 12).

45. Le Comité recommande à l’État partie :

a) D’interdire complètement la pratique de la ségrégation des femmes roms dans les maternités, ainsi que les violences verbales, physiques et psychologiques à l’encontre des femmes roms qui sollicitent des soins de santé maternelle ;

b) De veiller à ce que des enquêtes approfondies, indépendantes et transparentes soient menées sur les cas de stérilisation forcée de femmes roms, y compris sur la complicité de tout agent de l’État, et de faire appliquer les sanctions disciplinaires et pénales, s’il y a lieu ;

c) De faire en sorte que toutes les victimes de stérilisation forcée disposent en temps utile de moyens de recours proportionnés et efficaces, y compris de mesures d’indemnisation et de garanties de non-répétition.

Santé sexuelle et procréative des migrantes

46.Le Comité est préoccupé par le fait que de nombreuses migrantes sans papiers n’ont pas accès aux soins de santé maternelle pendant leur grossesse et leur accouchement car elles sont confrontées à divers obstacles juridiques, politiques et financiers du fait qu’elles ne remplissent pas les critères leur permettant de bénéficier du système public d’assurance maladie. La totalité du coût des soins prénatals qu’elles reçoivent pendant leur grossesse, y compris les soins d’urgence est donc à leur charge (art. 2 et 12).

47. Le Comité recommande à l’État partie de supprimer les lois et les politiques qui restreignent l’accès des femmes migrantes sans papiers aux soins obstétricaux d’urgence et aux soins prodigués par du personnel qualifié pendant le travail et l’accouchement.

Éducation préscolaire

48.Le Comité est préoccupé par le faible taux d’enfants inscrits dans l’enseignement préscolaire. Celui-ci s’explique par la faiblesse des investissements dans l’éducation préscolaire, le soutien limité proposé aux familles et la persistance des stéréotypes sur le rôle des hommes et des femmes. Le Comité rappelle à l’État partie qu’il est important de lutter contre les stéréotypes et d’investir dans la petite enfance afin de préparer la réussite scolaire des enfants (art. 10 et 13).

49. Le Comité recommande à l’État partie :

a) De veiller à la mise en œuvre effective des plans visant à améliorer le taux d’inscription dans l’enseignement préscolaire ;

b) D’examiner, en consultation avec les parties prenantes concernées, y compris des familles habitant différentes zones géographiques et appartenant à différents groupes ethniques et socioéconomiques, de solutions pour équilibrer les moyens alloués au congé parental, à l’investissement dans l’éducation préscolaire et à l’aide proposée aux familles pour leur permettre de concilier vie familiale et responsabilités professionnelles ;

c) De lutter efficacement contre les stéréotypes sur le rôle des hommes et des femmes.

Ségrégation des Roms dans le secteur de l’éducation

50.Le Comité note avec préoccupation que les enfants roms continuent d’être victimes de la ségrégation, puisqu’un grand nombre d’entre eux sont toujours scolarisés dans des écoles spéciales ou des classes spéciales au sein d’établissements d’enseignement primaire et secondaire ordinaire, que la qualité de l’enseignement dans ces écoles et dans ces classes est souvent moindre, et que la ségrégation concerne tous les aspects de la vie scolaire − les enfants roms mangent par exemple dans des espaces séparés et leurs menus sont différents de ceux servis aux autres enfants. Le Comité prend acte des modifications introduites par l’État partie dans loi sur l’école en vue d’interdire le placement d’enfants dans des écoles spéciales sur le seul critère de leurs origines socioéconomiques, mais note avec regret la faible application de ces dispositions à ce jour, la persistance des préjugés encore profondément ancrés dans les mentalités et la stigmatisation des enfants roms qui entraîne leur exclusion scolaire et sociale (art. 2 et 13, par. 1 et par. 2 a) à c)).

51. Le Comité recommande à l’État partie :

a) De prendre des mesures immédiates pour accroître l’intégration dans l’enseignement ordinaire des enfants roms actuellement scolarisés dans des écoles ou des classes spéciales ;

b) De collaborer avec les autorités éducatives locales pour lutter contre l’exclusion totale des enfants roms dans tous les aspects de la vie scolaire ;

c) De veiller à ce que des mécanismes de contrôle soient en place pour surveiller la mise en œuvre effective des modifications apportées à la loi sur l’école ;

d) De prendre des mesures pour lutter activement contre la stigmatisation et les préjugés à l’égard des communautés roms et des enfants roms.

Ségrégation des enfants handicapés dans le secteur de l’éducation

52.Le Comité note avec préoccupation la forte proportion d’enfants handicapés scolarisés dans des écoles spéciales et regrette l’absence d’aménagements raisonnables pour les enfants handicapés dans l’enseignement ordinaire (art. 2 et 13, par. 1, par. 2 a) à c) et par. 3).

53. Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures pour assurer l’accès des enfants handicapés à une éducation inclusive et pour procéder à des aménagements raisonnables, et de faire en sorte que les familles aient le droit de choisir la forme d’enseignement de leurs enfants et puissent demander le transfert de leur enfant scolarisé dans une école ou une classe spéciale vers l’enseignement ordinaire.

Enseignement supérieur et deuxième cycle de l’enseignement secondaire professionnel

54.Le Comité prend acte de plusieurs points positifs, notamment le taux de participation élevé dans le deuxième cycle de l’enseignement secondaire professionnel, les mesures prises pour faciliter les stages, la mise en place de services d’orientation professionnelle et l’augmentation du nombre de jeune adultes ayant suivi un enseignement supérieur, mais note avec préoccupation que l’enseignement supérieur dans l’État partie ne correspond pas suffisamment aux besoins sur le marché du travail et que les jeunes diplômés de l’enseignement supérieur ont davantage de difficultés à trouver un emploi que leurs aînés (art. 6 et 13, par. 1 et 2).

55. Le Comité recommande à l’État partie de continuer à investir dans l’amélioration et la réforme du système d’enseignement supérieur afin de mieux accompagner les jeunes adultes dans leur recherche d’emploi et dans les débuts de leur vie professionnelle.

Diversité culturelle

56.Le Comité salue les efforts faits par les autorités pour promouvoir la compréhension interculturelle et interethnique entre différents groupes, et le fait qu’un agent de l’État ait eu dernièrement à rendre des comptes pour des propos haineux à l’égard de groupes minoritaires. Il s’inquiète cependant de la persistance d’un climat d’hostilité générale à l’égard des personnes considérées comme différentes de la population majoritaire, notamment les groupes minoritaires tels que les Roms, les musulmans et les migrants, et des multiples discours de haine prononcés. Il note avec préoccupation que ce climat risque d’affaiblir la tolérance vis-à-vis de ces groupes et de favoriser les violations des droits de l’homme des minorités et des groupes vulnérables (art. 2, par. 2 et art. 15, par. 1 a)).

57. Le Comité recommande à l’État partie :

a) De réprimer toutes les formes d’intolérance et d’hostilité, et d’appliquer des sanctions appropriées ;

b) De concevoir et mener des campagnes de sensibilisation du public et de prendre d’autres mesures, notamment des mesures globales ciblant la population majoritaire, afin de promouvoir le respect et la compréhension interculturelle entre les différents groupes qui composent la société ;

c) De fournir aux agents de l’État une formation aux droits de l’homme sur la non-discrimination et le respect de la diversité culturelle et des différences ;

d) D’adopter une stratégie pour contrer la montée du sentiment anti- R oms et antiminorités dans le débat public et de prendre l’initiative de renforcer le respect et le goût de la diversité.

Langues minoritaires

58.Le Comité note que l’État partie a pris des mesures pour appuyer l’enseignement de certaines langues minoritaires, dans ces langues. Il s’inquiète toutefois des disparités existant dans l’accès à l’enseignement dans toutes les langues minoritaires, le point le plus préoccupant étant que l’enseignement du romani est proposé uniquement comme matière optionnelle. Il est préoccupé par les informations selon lesquelles les modifications apportées à la loi sur l’école ont entraîné la fermeture de certaines petites écoles qui dispensaient un enseignement dans des langues minoritaires (art. 2, 13 et 15, par. 1 a)).

59. Le Comité recommande à l’État partie de mettre en place, dans la mesure du possible et si la demande est suffisante, l’enseignement du romani, en romani, en tant que langue minoritaire, et de veiller à ce que toute réforme du système éducatif susceptible d’être menée n’ait pas d’effets préjudiciables sur l’accès à l’enseignement dans les langues minoritaires, et faire en sorte que l’enseignement des langues minoritaires dans les langues minoritaires ne soit pas touché par ces réformes.

Droit de bénéficier du progrès scientifique et de ses applications

60.Le Comité est préoccupé par le fait que la loi régissant les procédures de procréation assistée (fécondation in vitro et transfert d’embryons) − loi no 577/2004 (R. L.) sur les soins de santé pris en charge par l’assurance maladie publique et le remboursement des services liés aux soins de santé fournis, telle que modifié par le Règlement no 777/2004 Coll. − prévoit le remboursement des frais pour trois cycles maximum au titre de l’assurance maladie publique, pour les femmes de moins de 39 ans, uniquement sous certaines conditions, et que l’accès à ces procédures est réservé aux couples hétérosexuels qui déclarent avoir des relations intimes (art. 2, 12 et 15, par. 1 b)).

61. Le Comité recommande à l’État partie, sur la base de considérations éthiques et d’informations scientifiques à jour, de réexaminer les dispositions de la loi susmentionnée et d’offrir au titre de l’assurance maladie publique un accès égal, sans discrimination, à la fécondation in vitro et au transfert d’embryons, dans le cadre d’une médecine de la procréation de qualité, et de manière à respecter le droit qu’a chaque individu de bénéficier du progrès scientifique et de ses applications.

D.Autres recommandations

62. Le Comité recommande à l’État partie de ratifier le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

63.Le Comité recommande à l’État partie de tenir pleinement compte des obligations que lui impose le Pacte et de garantir le plein exercice des droits qui y sont énoncés dans la mise en œuvre au niveau national du Programme de développement durable à l’horizon 2030, avec l’aide et la coopération de la communauté internationale en cas de besoin. La réalisation des objectifs de développement durable serait grandement facilitée si l’État partie établissait des mécanismes indépendants pour suivre les progrès réalisés et s’il considérait que les bénéficiaires des programmes publics étaient détenteurs de droits qu’ils peuvent faire valoir. La mise en œuvre des objectifs dans le respect des principes de participation, de responsabilité et de non-discrimination permettrait de garantir que nul n’est laissé à l’écart. À cet égard, le Comité appelle l’attention de l’État partie sur la déclaration qu’il a faite concernant l’engagement de ne laisser personne de côté (E/C.12/2019/1).

64. Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures pour mettre au point et appliquer progressivement des indicateurs appropriés à la mise en œuvre des droits économiques, sociaux et culturels, et faciliter ainsi l’évaluation des progrès réalisés pour se conformer aux obligations que lui impose le Pacte pour diverses catégories de la population. À cet égard, il renvoie au cadre conceptuel et méthodologique concernant les indicateurs des droits de l’homme mis au point par le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (voir HRI/MC/2008/3).

65. Le Comité prie l’État partie de diffuser largement les présentes observations finales à tous les niveaux de la société, aux échelons national, provincial et municipal, en particulier auprès des parlementaires, des fonctionnaires et des autorités judiciaires, et de l’informer dans son prochain rapport périodique des mesures prises pour y donner suite. Il l’encourage à associer le Centre national slovaque pour les droits de l’homme, les organisations non gouvernementales et d’autres membres de la société civile, au suivi des présentes observations finales et au processus de consultation nationale avant la soumission de son prochain rapport périodique.

66. Conformément à la procédure de suivi des observations finales adoptées par le Comité, l’État partie est prié de fournir, dans un délai de vingt-quatre mois à compter de l’adoption des présentes observations finales, des renseignements sur la mise en œuvre des recommandations formulées par le Comité aux paragraphes 12 (non-discrimination), 45 (santé sexuelle et procréative des femmes roms) et 51 (ségrégation des Roms dans le secteur de l’éducation).

67. Le Comité prie l’État partie de lui soumettre, le 31 octobre 2024 au plus tard, son quatrième rapport périodique, qui sera établi conformément aux directives concernant les rapports que le Comité a adoptées en 2008 (voir E/C.12/2008/2). Il l’invite aussi à mettre à jour son document de base commun conformément aux directives harmonisées pour l’établissement des rapports à présenter en vertu des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme (voir HRI/GEN/2/Rev.6, chap. I).