Nations Unies

E/C.12/DEU/CO/5

Conseil économique et social

Distr. générale

12 juillet 2011

Français

Original: anglais

Comité des droits économiques, sociaux et culturels

Quarante-sixième session

Genève, 2-20 mai 2011

Examen des rapports présentés par les États parties conformément aux articles 16 et 17 du Pacte

Observations finales du Comité des droits économiques, sociaux et culturels

Allemagne

1.Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a examiné le cinquième rapport périodique de l’Allemagne sur l’application du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (E/C.12/DEU/5) à ses 9e à 11e séances (E/C.12/2011/SR.9 à 11), tenues les 6 et 9 mai 2011, et a adopté à sa 29e séance, le 20 mai 2011, les observations finales ci-après.

A.Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le cinquième rapport périodique de l’État partie, qui fournit des informations sur l’application des recommandations précédentes du Comité. Il se félicite également des réponses écrites à sa liste des points à traiter (E/C.12/DEU/Q/5/Add.1), ainsi que des données statistiques détaillées qui y figurent.

3.Le Comité se réjouit de l’occasion qui lui a ainsi été offerte de dialoguer avec l’État partie, représenté par une délégation de haut niveau composée de représentants des ministères compétents.

B.Aspects positifs

4.Le Comité prend note avec satisfaction de la ratification de la Convention relative aux droits des personnes handicapées et du Protocole facultatif s’y rapportant (24 février 2009) ainsi que de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées (24 septembre 2009). Il se félicite aussi de la ratification du Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (4 décembre 2008) ainsi que des deux Protocoles facultatifs à la Convention relative aux droits de l’enfant, à savoir le Protocole facultatif concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés (13 décembre 2004) et le Protocole facultatif concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants (15 juillet 2009).

5.Le Comité accueille avec satisfaction un certain nombre de mesures prises par l’État partie en vue d’améliorer l’exercice des droits sociaux, économiques et culturels, en particulier:

a)Les réformes du marché du travail, qui ont permis de faire tomber le chômage à son plus bas niveau depuis vingt ans;

b)L’adoption d’objectifs visant à garantir la bonne exécution du Plan national d’intégration;

c)La mise en place de la couverture maladie universelle dans le cadre de la réforme de santé de 2007;

d)La mise en œuvre du Plan national de lutte contre la violence à l’égard des femmes de 2007;

e)Les mesures prises pour protéger les enfants contre les maltraitances et la violence, notamment le réseau de lignes téléphoniques d’urgence, les services fournis par les centres de protection de l’enfance, ou encore les services de conseil gratuits pour enfants et adolescents;

f)La politique de promotion et de soutien de la prise en charge à domicile des personnes nécessitant des soins de longue durée.

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

6.Le Comité est profondément préoccupé par le fait qu’un grand nombre des recommandations qu’il avait adoptées à l’issue de l’examen des troisième et quatrième rapports périodiques de l’État partie n’ont pas été appliquées, comme il est indiqué plus loin.

Le Comité engage vivement l ’ État partie à prendre toutes les mesures nécessaires pour donner suite à ses recommandations précédentes qui sont de nouveau formulées dans les présentes observations finales.

7.Le Comité demeure préoccupé par le fait que les dispositions du Pacte n’ont pas été invoquées devant les tribunaux nationaux de l’État partie.

Le Comité engage instamment l ’ État partie à prendre toutes les mesures appropriées pour assurer l ’ applicabilité effective du Pacte devant les tribunaux nationaux, notamment en sensibilisant à cette obligation les responsables de l ’ application des lois tels que les juges, les magistrats et les fonctionnaires, et en leur faisant mieux connaître les dispositions du Pacte. À cet égard, le Comité invite l ’ État partie à se reporter à ses Observations générales n o  3 (1990) et n o  9 (1998), portant respectivement sur la nature des obligations des États parties et sur l ’ application du Pacte au niveau national.

8.Le Comité regrette que l’État partie n’ait pas donné suite à sa précédenterecommandation tendant à élargir la compétence de l’Institut allemand des droits de l’homme de façon à y inclure le pouvoir d’examiner les plaintes.

Tout en notant l ’ existence d ’ autres voies de recours, y compris judiciaires, le Comité recommande à l ’ État partie d ’ élargir la compétence de l ’ Institut allemand des droits de l ’ homme de façon qu ’ il puisse recevoir les plaintes, dont celles qui se rapportent aux droits économiques, sociaux et culturels, permettant ainsi à la population d ’ accéder à ce type de mécanisme. À cet égard, le Comité appelle l ’ attention de l ’ État partie sur son Observation générale n o  10 (1998) sur le rôle des institutions nationales des droits de l ’ homme dans la protection des droits économiques, so ciaux et culturels, où il est recommandé, entre autres, aux institutions nationales d ’ examiner les plaintes faisant état d ’ atteintes aux normes relatives aux droits économiques, sociaux et culturels applicables au sein de l ’ État.

9.Le Comité prend note avec une vive préoccupation de l’impact des politiques agricoles et commerciales de l’État partie, qui favorisent l’exportation de produits agricoles subventionnés à destination des pays en développement, sur la jouissance du droit à un niveau de vie suffisant, et tout particulièrement du droit à l’alimentation, dans les pays destinataires (art. 2.1, 11, 22 et 23).

Le Comité engage vivement l ’ État partie à appliquer pleinement une approche axée sur les droits de l ’ homme dans ses politiques commerciales et agricoles internationales et, notamment, à étudier l ’ impact des subventions sur la jouissance des droits économiques, sociaux et culturels dans les pays importateurs. À cet égard, le Comité appelle l ’ attention de l ’ État partie sur les directives relatives aux mesures, actions et engagements à l ’ échelle internationale énoncées dans les Directives volontaires de l ’ Organisation des Nations Unies pour l ’ alimentation et l ’ agriculture (FAO) relatives à la réalisation du droit à l ’ alimentation (2004).

10.Le Comité se dit préoccupé par le fait que le processus d’élaboration des politiques de l’État partie et son soutien aux investissements des entreprises allemandes à l’étranger ne tiennent pas compte comme il convient des droits de l’homme (art. 2.1, 11, 22 et 23).

Le Comité invite l ’ État partie à veiller à ce que ses politiques relatives aux investissements des entreprises allemandes à l ’ étranger servent la cause des droits économiques, sociaux et culturels dans les pays d ’ accueil.

11.Le Comité s’inquiète de ce que le programme d’aide au développement de l’État partie a soutenu des projets qui semblent avoir abouti à des violations des droits économiques, sociaux et culturels, comme dans le cas du projet d’attribution de titres de propriété au Cambodge (art. 2.1, 11, 22 et 23).

Le Comité recommande à l ’ État partie de faire en sorte que les politiques de coopération au développement qu ’ il compte adopter contribuent à la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels consacrés par le Pacte et n ’ entraînent pas leur violation.

12.Le Comité s’inquiète de ce que les personnes issues de l’immigration, y compris de deuxième génération, continuent de rencontrer de graves obstacles dans la jouissance de leurs droits à l’éducation et à l’emploi, en raison surtout des préjugés existant à leur égard et de la méconnaissance de leurs droits. Le Comité s’inquiète également de ce que les politiques menées pour y remédier n’ont pas abouti à des progrès significatifs et n’ont pas réglé les problèmes de discrimination indirecte (art. 2.2).

Le Comité engage vivement l ’ État partie à redoubler d ’ efforts pour que ses politiques et plans relatifs à l ’ éducation, à l ’ emploi et à la protection sociale remédient aux problèmes que rencontrent les personnes issues de l ’ immigration, y compris en prenant des mesures concrètes visant à aider ces personnes à affirmer leurs droits et en surveillant la bonne application des lois contre la discrimination raciale sur le marché du travail. De plus, le Comité prie instamment l ’ État partie de recueillir des données sur la jouissance par ces personnes de leurs droits économiques, sociaux et culturels, sur la base des déclarations des intéressés eux-mêmes, et, à cet égard, il appelle l ’ attention de l ’ État partie sur son Observation générale n o  20 (2009) sur la non-discrimination dans l ’ exercice des droits économiques, sociaux et culturels. Il demande également à l ’ État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des informations sur les activités menées par le Commissaire du Gouvernement fédéral à l ’ immigration, aux réfugiés et à l ’ intégration.

13.Le Comité prend note avec une grande préoccupation de la situation des demandeurs d’asile qui ne bénéficient pas des prestations sociales voulues, vivent dans des logements inappropriés et surpeuplés, ont un accès restreint au marché du travail et ne peuvent accéder qu’aux soins d’urgence (art. 2.2).

Le Comité demande instamment à l ’ État partie de veiller, conformément aux normes internationales, à ce que les demandeurs d ’ asile aient accès dans des conditions d ’ égalité aux régimes de sécurité sociale non contributifs, aux soins de santé et au marché du travail. Le Comité engage aussi l ’ État partie à veiller à ce que les règles nationales en vigueur po ur les normes en matière de logement, s ’ agissant en particulier du nombre d ’ occupants, s ’ appliquent aussi aux centres d ’ accueil.

14.Le Comité demeure préoccupé par le fait que le taux de chômage reste deux fois plus élevé dans les Länder de l’est que dans les Länder de l’ouest, en dépit des mesures prises pour remédier à cette disparité (art. 6, 2.2).

Le Comité invite l ’ État partie à prendre toutes les mesures voulues pour remédier aux disparités régionales entre Länder de l ’ est et Länder de l ’ ouest en matière d ’ emploi, notamment en adoptant des stratégies et des plans d ’ action en faveur de l ’ emploi axés sur les régions où le chômage est le plus élevé. De plus, le Comité recommande d ’ inclure dans ces stratégies et plans d ’ action des programmes de formation technique et professionnel le pour répondre aux besoins du marché du travail. À cet égard, le Comité appelle l ’ attention de l ’ État partie sur son Observation générale n o  18 (2005) sur le droit au travail.

15.Le Comité demeure préoccupé par le faible niveau de représentation des femmes aux postes de décision, dans le secteur public comme dans le secteur privé, et par le fait que l’écart de rémunération reste considérable en dépit de l’interdiction de toute discrimination fondée sur le sexe et de l’existence du principe de l’égalité de rémunération dans la législation de l’État partie (art. 6, 3, 9).

Le Comité engage instamment l ’ État partie à promouvoir la représentation égale des hommes et des femmes aux postes de responsabilité, dans les secteurs public et privé. Il l ’ engage aussi à envisager, pour ce faire, d ’ instituer des quotas dans le secteur public et de mettre en place des mécanismes efficaces chargés de surveiller le respect par le secteur privé des dispositions législatives de l ’ État partie relatives à l ’ égalité de traitement et à la lutte contre les discriminations.

16.Le Comité est préoccupé de ce que le nombre insuffisant de structures d’accueil pour enfants, les choix de carrière des femmes et des hommes et les stéréotypes sexistes continuent d’entraver l’exercice par les femmes, dans des conditions d’égalité, du droit au travail.

Le Comité recommande à l ’ État partie de poursuivre l ’ action menée pour lutter contre les stéréotypes sexistes et d ’ informer filles et garçons sur les possibilités de carrière égales qui s ’ offrent à eux, l ’ objectif étant d ’ inciter les jeunes à faire des études dans des domaines autres que ceux qui sont traditionnellement dévolus à l ’ un ou l ’ autre des deux sexes. De plus, le Comité invite l ’ État partie à développer sensiblement l ’ offre de services de garderie pour enfants et d ’ accueil pour personnes handicapées, âgées ou malades, et à faire en sorte que les hommes participent beaucoup plus largement aux tâches liées aux soins.

17.Le Comité constate avec préoccupation qu’en dépit des mesures prises, le taux de chômage des personnes handicapées est élevé et que les agences pour l’emploi de l’État partie n’ont pas fait tout le nécessaire pour remédier à la situation. Le Comité est également préoccupé par l’absence de données fiables sur la situation des personnes handicapées au regard de l’emploi (art. 6, 2.2).

Le Comité prie instamment l ’ État partie de veiller à ce que l ’ Agence fédérale pour l ’ emploi fournisse des services permettant aux personnes handicapées d ’ obtenir un emploi adapté et de le conserver, et de progresser sur le plan professionnel. À cet égard, le Comité invite l ’ État partie à se reporter à ses recommandations sur les droits relatifs au travail des personnes handicapées telles qu ’ énoncées dans son Observation générale n o  5 (1994) sur les personnes souffrant d ’ un handicap. Il demande en outre à l ’ État partie de fournir dans son prochain rapport périodique des données, ventilées par année, sur le chômage des personnes handicapées.

18.Tout en prenant note de la déclaration de l’État partie selon laquelle les détenus qui travaillent pour des entreprises privées le font volontairement, le Comité regrette qu’il ne lui ait pas été fourni d’informations sur les conditions de travail des détenus (art. 6 et 7).

Le Comité demande à l ’ État partie d ’ inclure dans son prochain rapport périodique des informations sur les conditions de travail des détenus travaillant pour des entreprises privées ainsi que sur les mesures prises pour protéger leurs droits en matière de travail, par exemple en procédant à des inspections.

19.Le Comité s’inquiète du fait que certaines dispositions du régime d’assistance chômage et d’aide sociale de l’État partie, notamment l’obligation pour les chômeurs percevant une allocation d’accepter «tout emploi acceptable», ce qui peut être interprété en pratique comme signifiant presque n’importe quel emploi, et pour les chômeurs de longue durée de faire des travaux d’intérêt général non rémunérés, peuvent conduire à des violations des articles 6 et 7 du Pacte (art. 6, 7 et 9).

Le Comité engage instamment l ’ État partie à faire en sorte que son régime d ’ allocations chômage tienne compte du droit de tout individu d ’ accepter librement un emploi de son choix ainsi que du droit à une rémunération équitable.

20.Le Comité réaffirme la préoccupation qu’il avait exprimée en 2001 quant au fait que l’interdiction de grève imposée par l’État partie aux agents de la fonction publique autres que ceux qui fournissent des services essentiels constitue une restriction des activités syndicales qui n’entre pas dans le champ des restrictions prévues au paragraphe 2 de l’article 8 du Pacte (art. 8).

Le Comité exhorte à nouveau l ’ État partie à prendre des mesures pour faire en sorte que les agents publics qui ne fournissent pas des services essentiels puissent exercer leur droit de grève, conformément à l ’ article 8 du Pacte et aux dispositions de la Convention n o 87 de l ’ Organisation internationale du Travail sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical de 1948.

21.Tout en prenant acte de la décision de la Cour constitutionnelle fédérale confirmant la constitutionnalité de la méthode de calcul du seuil de subsistance, le Comité reste préoccupé par le fait que cette méthode n’assure pas aux bénéficiaires un niveau de vie adéquat. Il note aussi avec préoccupation que le montant des allocations familiales est très modeste, avec pour conséquence que quelque 2,5 millions d’enfants dans l’État partie restent en deçà du seuil de pauvreté. Le Comité s’inquiète en outre de ce que la fraction imposable de la pension a été portée à 80 % en 2005 (art. 9 et 10).

Le Comité engage vivement l ’ État partie à réviser les méthodes et les critères appliqués pour déterminer le niveau des prestations et à vérifier périodiquement l ’ adéquation des critères afin que les prestations versées soient suffisantes pour assurer aux bénéficiaires un niveau de vie adéquat. Le Comité exhorte en outre l ’ État partie à contrôler en permanence l ’ impact de ses divers programmes de protection sociale, y compris l ’ ensemble de mesures prévues pour les enfants en 2011, sur la pauvreté touchant les enfants. De plus, le Comité recommande à l ’ État partie de reconsidérer sa décision d ’ accroître la fraction de la pension soumise à l ’ impôt. À ce sujet, le Comité renouvelle la recommandation qu ’ il avait faite à l ’ État partie en 2001 de veiller à ce que la réforme du système de sécurité sociale qu ’ il a entreprise ne porte pas atteinte à l ’ exercice par les groupes à faible revenu et les catégories de population défavorisées et marginalisées des droits consacrés par le Pacte, et il renvoie l ’ État partie à son Observation générale n o 19 (2008) sur le droit à la sécurité sociale.

22.Le Comité s’inquiète de la discrimination existant entre les Länder de l’est et ceux de l’ouest en ce qui concerne la jouissance du droit à la sécurité sociale, telle qu’illustrée par la décision de la Cour constitutionnelle fédérale de juillet 2010 relative aux droits à pension des ministres et vice-ministres de l’ancienne République démocratique allemande (RDA).

Le Comité engage vivement l ’ État partie à prendre rapidement des mesures efficaces pour prévenir à l ’ avenir toute discrimination entre les Länder de l ’ est et ceux de l ’ ouest quant au niveau des prestations sociales et à remédier aux situations de discrimination existant en la matière.

23.Le Comité note avec préoccupation que la violence familiale ne constitue pas une infraction pénale autonome dans la législation de l’État partie. Il s’inquiète aussi de l’augmentation des violences faites aux femmes de certains groupes ethniques (art. 10).

Le Comité demande instamment à l ’ État partie d ’ ériger la violence familiale en infraction pénale autonome. Il l ’ invite aussi à continuer d ’ évaluer la mise en œuvre d ’ un certain nombre de mesures et de programmes en termes d ’ incidence de la violence à l ’ égard des femmes, en particulier parmi certains groupes ethniques.

24.Le Comité observe avec inquiétude que, selon les données de l’État partie, 13 % de sa population vit en deçà du seuil de pauvreté et que 1,3 million de personnes économiquement actives (voir le document A/HRC/WG.6/4/DEU/3, par. 33) ont besoin d’un complément de revenu parce que leur salaire ne leur permet pas d’assurer leur subsistance. Le Comité est préoccupé en outre par le fait que, compte tenu du vaste système de protection sociale existant dans l’État partie, un tel niveau de pauvreté peut laisser penser que les prestations sont insuffisantes ou qu’il est difficile d’en bénéficier (art. 11, 9).

Le Comité demande à l ’ État partie d ’ adopter et d ’ appliquer un vaste programme de lutte contre la pauvreté prenant en considération les aspects de la pauvreté révélés par les analyses spécialisées effectuées par l ’ État partie. Il lui recommande d ’ inclure dans ces stratégies un réexamen du niveau des prestations sociales. En outre, le Comité invite l ’ État partie à tenir compte des droits de l ’ homme dans la mise en œuvre du programme de lutte contre la pauvreté, en portant particulièrement attention aux groupes défavorisés et marginalisés. À cet égard, le Comité renvoie l ’ État partie à sa Déclaration sur la pauvreté et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (2001).

25.Le Comité regrette que l’État partie n’ait pas donné suite à sa recommandation de 2001 lui demandant de faire le point sur l’ampleur et les causes du problème des sans-abri sur son territoire et de mettre en place des programmes et des mesures pour y remédier (art. 11).

Le Comité renouvelle sa recommandation invitant l ’ État partie à faire le point sur l ’ ampleur et les causes du problème des sans-abri et à prendre des mesures concrètes pour le combattre. À cet égard, le Comité demande à l ’ État partie de fournir dans son prochain rapport périodique des renseignements sur la question, y compris des données ventilées par année, par sexe et par Land.

26.Le Comité juge préoccupant que les personnes transsexuelles et transgenres soient souvent assimilées à des personnes souffrant de maladie mentale et que les politiques législatives ou autres de l’État partie aient pour effet d’exposer ces personnes à une discrimination et à des violations de leurs droits en matière de santé sexuelle et procréative (art. 12, 2.2).

Le Comité engage vivement l ’ État partie à renforcer les mesures d ’ ordre législatif ou autre relatives à l ’ identité et à la santé des personnes transsexuelles et transgenres pour que ces dernières ne fassent plus l ’ objet d ’ une discrimination et que leur intégrité physique et leurs droits en matière de santé sexuelle et procréative soient respectés. Le Comité demande à l ’ État partie de consulter pleinement les personnes transsexuelles et transgenres à cet effet.

27.Le Comité note avec beaucoup de préoccupation que l’État partie n’a pas pris des mesures suffisantes pour améliorer la situation des personnes âgées résidant en maison de retraite, qui, selon certaines informations, vivent dans des conditions inhumaines et ne bénéficient toujours pas d’une prise en charge appropriée faute de personnel qualifié et parce que les normes en matière de soins ne sont pas dûment appliquées (art. 12).

Le Comité engage instamment l ’ État partie à prendre sans délai des mesures pour améliorer la situation des personnes âgées vivant en maison de retraite. Il demande en particulier à l ’ État partie d ’ allouer les ressources nécessaires pour former le personnel soignant conformément aux normes de formation adoptées récemment. Il l ’ invite aussi à effectuer des inspections plus fréquentes et plus détaillées des maisons de retraite. À cet égard, le Comité appelle l ’ attention de l ’ État partie sur les Principes des Nations Unies pour les personnes âgées (résolution 46/91 de l ’ Assemblée générale du 16 décembre 1991) ainsi que sur son Observation générale n o  6 (1995) sur les droits économiques, sociaux et culturels des personnes âgées.

28.Le Comité note avec préoccupation que pas moins de 25 % des enfants partent pour l’école sans avoir pris de petit-déjeuner et qu’ils risquent ainsi de souffrir de malnutrition car toutes les écoles ne servent pas encore de repas à midi (art. 13, 12, 10).

Le Comité engage instamment l ’ État partie à prendre des mesures concrètes pour faire en sorte que les enfants, surtout ceux des familles pauvres, soient nourris convenablement. Il demande également à l ’ État partie de veiller à ce que les initiatives à cet égard ne stigmatisent pas encore davantage les enfants de milieu social défavorisé.

29.Le Comité s’inquiète de ce que de nombreux élèves quittent toujours l’école sans diplôme, en particulier ceux de milieu social défavorisé, en dépit des diverses mesures prises par l’État partie, telles que les services de conseil et de suivi individuels et le soutien spécial aux enfants ayant des besoins particuliers (art. 13, 2.2).

Le Comité engage vivement l ’ État partie à tenir compte des dimensions sociales du problème lorsqu ’ il met en œuvre des programmes d ’ aide à l ’ intention des élèves qui risquent de quitter l ’ école sans diplôme. Le Comité demande aussi à l ’ État partie de mieux informer les élèves suivant une filière de formation professionnelle de la possibilité pour eux d ’ obtenir le diplôme de l ’ enseignement secondaire, et de leur apporter le soutien voulu.

30.Le Comité constate avec préoccupation que l’État partie n’a pas donné suite à sa recommandation de 2001 l’invitant à réduire les droits d’inscription dans l’enseignement supérieur, en vue de leur suppression à terme, conformément aux dispositions de l’alinéa c du paragraphe 2 de l’article 13 prévoyant l’instauration progressive de la gratuité de l’enseignement (art. 13).

Le Comité réitère sa recommandation demandant à l ’ État partie d ’ inscrire dans la législation-cadre nationale régissant l ’ enseignement supérieur la réduction des droits d ’ inscription, et engage instamment l ’ État partie à confier des responsabilités accrues au G ouvernement fédéral en ce qui concerne les politiques d ’ éducation, jusqu ’ à présent dévolues aux Länder. À cet égard, le Comité appelle une nouvelle fois l ’ attention de l ’ État partie sur son Observation générale n o 13 (1999) sur le droit à l ’ éducation.

31.Le Comité juge préoccupant que l’enseignement des droits de l’homme, y compris les droits économiques, sociaux et culturels, ne bénéficie pas d’une attention suffisante et ne soit pas systématiquement intégré dans les programmes d’études aux différents niveaux (art. 13).

Le Comité demande à l ’ État partie de veiller à ce qu ’ un enseignement sur les droits de l ’ homme, y compris les droits économiques, sociaux et culturels, soit dispensé aux étudiants à tous les niveaux, selon qu ’ il convient, ainsi qu ’ aux membres de toutes les professions intervenant directement dans la promotion et la protection des droits économiques, sociaux et culturels, y compris les fonctionnaires, les enseignants, les travailleurs sociaux et les policiers.

32.Tout en prenant note des informations fournies dans les réponses à la liste des points à traiter, le Comité est préoccupé par l’absence de données permettant l’identification des minorités et des groupes ethniques et religieux vivant sur le territoire de l’État partie, ce qui entrave, entre autres, la pleine jouissance par ces minorités et groupes de leurs droits culturels (art. 15).

Tout en prenant acte des dispositions juridiques qui empêchent l ’ État partie de recueillir des données statistiques sur la composition ethnique de sa population, le Comité lui recommande d ’ adopter des mesures et des mécanismes destinés à permettre aux groupes et aux minorités de s ’ identifier comme tels, sur la base de déclarations faites par les intéressés eux-mêmes, afin de garantir leurs droits culturels, en particulier le droit de préserver, de promouvoir et de développer leur propre culture, qui constitue un fondement essentiel de leur identité. À cet égard, le Comité renvoie l ’ État partie à son Observation générale n o  21 (2009) sur le droit de chacun de participer à la vie culturelle.

33. Le Comité encourage l ’ État partie à accroître le niveau de sa contribution à l ’ aide publique au développement, qui s ’ établissait en 2009 à 0,35 % du produit national brut (PNB) , et à atteindre dans les meilleurs délais l ’ objectif international fixé à 0,7 % du PNB.

34. Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre des mesures concrètes pour réexaminer la politique et la pratique consistant à orienter et à classer les élèves dès un très jeune âge, compte tenu en particulier des conséquences de cette pratique pour l ’ accès aux degrés supérieurs de l ’ enseignement des élèves issus de groupes socialement défavorisés, en particulier, conformément à la recommandation formulée par le Rapporteur spécial sur le droit à l ’ éducation (A/HRC/4/29/Add.3).

35.Le Comité demande à l’État partie d’inclure dans son prochain rapport périodique des informations sur:

a)Les enfants vivant et travaillant dans la rue, y compris des statistiques ventilées par groupe d’âge et par origine migratoire, ainsi que sur les mesures prises pour répondre au problème;

b)Sa politique en ce qui concerne la protection de la santé en relation avec les produits alimentaires contenant des organismes génétiquement modifiés;

c)L’administration de traitements médicaux sous contrainte à des patients souffrant de maladie mentale et la réglementation en la matière;

d)La prévalence de la consommation de drogues et les résultats des programmes de prévention de la consommation de drogues et de la toxicomanie parmi les enfants et les jeunes, tels qu’exposés dans l’annexe 16 des réponses à la liste des points à traiter (E/C.12/DEU/Q/5/Add.1);

e)L’incidence du suicide et les résultats des mesures prises pour le prévenir.

36. Le Comité encourage l ’ État partie à envisager de signer et de ratifier le Protocole facultatif se rapportant au Pacte.

37. Le Comité encourage l ’ État partie à envisager de ratifier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.

38. Le Comité demande à l ’ État partie de diffuser largement les présentes observations finales dans tous les secteurs de la société, en particulier auprès de l ’ administration, de l ’ appareil judiciaire et des organisations de la société civile, de les traduire et de leur donner la plus large publicité possible, et de l ’ informer dans son prochain rapport périodique des mesures qu ’ il aura prises pour y donner suite. Il invite aussi l ’ État partie à continuer d ’ associer les institutions nationales des droits de l ’ homme, les organisations non gouvernementales et d ’ autres membres de la société civile au processus de discussion au niveau national avant la présentation de son prochain rapport périodique.

39. Le Comité demande à l ’ État partie de soumettre son sixième rapport périodique, établi conformément aux directives révisées du Comité concernant l ’ établissement de rapports adoptées en 2008 (E/C.12/2008/2), d ’ ici au 30 juin 2016.