Nations Unies

E/C.12/BGR/CO/6

Conseil économique et social

Distr. générale

29 mars 2019

Français

Original : anglais

Comité des droits économiques, sociaux et culturels

Observations finales concernant le sixième rapport périodique de la Bulgarie *

1.Le Comité a examiné le sixième rapport périodique de la Bulgarie (E/C.12/BGR/6) à ses 8e et 9e séances (voir E/C.12/2019/SR.8 et 9), les 21 et 22 février 2019, et adopté les présentes observations finales à sa 30e séance, le 8 mars 2019.

A.Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction la soumission par l’État partie de son sixième rapport périodique à partir d’une liste de points préalable établie par le Comité (E/C.12/BGR/QPR/6). Il sait gré à l’État partie d’avoir accepté de soumettre son rapport conformément à la procédure simplifiée, qui permet de mieux cibler l’examen du rapport ainsi que le dialogue avec la délégation. Le Comité est reconnaissant du dialogue ouvert et constructif qu’il a eu avec la délégation interministérielle de haut niveau de l’État partie.

B.Aspects positifs

3.Le Comité prend note avec satisfaction des nouvelles stratégies adoptées par l’État partie pour renforcer le niveau de protection des droits économiques, sociaux et culturels sur son territoire, dont il cite de nombreux exemples dans les présentes observations finales. Il prend note en particulier de la Stratégie nationale de réduction de la pauvreté et de promotion de l’inclusion sociale à l’horizon 2020 et de la Stratégie nationale pour l’intégration des Roms (2012-2020).

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Institution nationale des droits de l’homme

4.Le Comité est préoccupé par le fait que le mandat et les capacités de la Commission pour la protection contre la discrimination restent limités.

5. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ élargir le mandat de la Commission pour la protection contre la discrimination et de veiller à ce que cette institution dispose des ressources financières et humaines nécessaires à son bon fonctionnement, de manière à respecter pleinement les Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l ’ homme (Principes de Paris).

Inégalités

6.Le Comité est préoccupé par la persistance de fortes inégalités économiques dans l’État partie ainsi que par les disparités dans l’exercice des droits économiques, sociaux et culturels entre les régions et entre les zones rurales et urbaines.

7. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ élaborer une politique budgétaire plus progressiste pour réduire les inégalités économiques et garantir une répartition équitable des ressources entre les régions afin de réduire les disparités régionales. Il lui recommande également de renforcer les capacités des services sociaux au niveau municipal de façon à mieux identifier les personnes marginalisées et défavorisées et à leur assurer une aide appropriée.

Obligation d’agir au maximum des ressources disponibles

8.Tout en notant que la part du produit intérieur brut consacrée aux dépenses publiques a augmenté au cours des cinq dernières années, le Comité craint que la maîtrise du déficit budgétaire ne nécessite l’adoption de mesures d’austérité et ne diminue la capacité de l’État partie de s’acquitter de son obligation de mobiliser les ressources disponibles au maximum (art. 2, par. 1).

9. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ évaluer l ’ impact sur les droits consacrés par le Pacte lorsqu ’ il procède à des ajustements budgétaires et de prendre toutes les mesures nécessaires pour que les effets négatifs éventuels soient minimes. Il lui recommande également, si l ’ adoption de mesures régressive s est inévitable, de veiller à ce que ces mesures soient absolument nécessaires et proportionnées, ne restent en vigueur que dans la mesure où elles sont nécessaires, n ’ entraînent pas de discrimination et n ’ aient pas d ’ effets disproportionnés sur les droits des individus et des groupes défavorisés et marginalisés. Il lui recommande en outre de veiller à ce que ces mesures n ’ aient pas d ’ incidence sur le contenu essentiel minimum des droits protégés par le Pacte. Le Comité appelle l’attention de l’État partie sur sa déclaration de 2016 sur la dette publique et les mesures d’austérité sous l’angle du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (E/C.12/2016/1).

Corruption

10.Le Comité salue les mesures prises récemment par l’État partie pour lutter contre la corruption, en particulier l’adoption du Plan de prévention et d’action anticorruption et de la loi sur la lutte contre la corruption et la confiscation des avoirs. Il s’inquiète toutefois des difficultés qui subsistent dans la lutte contre la corruption et dans la conduite des enquêtes sur les affaires de corruption, y compris des affaires mettant en cause des hauts fonctionnaires, comme le manque d’experts qualifiés et le caractère insuffisant des ressources (art. 2, par. 1).

11. Le Comité recommande à l ’ État partie  :

a) D ’ allouer des ressources humaines, matérielles et financières suffisantes à l ’ exécution du Plan de prévention et d ’ action anticorruption et à l ’ application de la législation anticorruption  ;

b) De renforcer la capacité de l ’ appareil judiciaire à lutter efficacement contre la corruption  ;

c) De sensibiliser le public et les agents de l ’ État à la législation anticorruption et au Plan de prévention et d ’ action anticorruption  ;

d) De veiller à ce que les lanceurs d ’ alerte et les militants de la société civile qui luttent contre la corruption soi en t protégés de la persécution et de la violence.

Roms

12.Le Comité constate avec préoccupation que les effets de la Stratégie nationale pour l’intégration des Roms (2012-2020) restent limités et que les Roms vivant dans l’État partie restent touchés de manière disproportionnée par la pauvreté et l’exclusion sociale et rencontrent des obstacles dans l’exercice de leurs droits économiques, sociaux et culturels. En particulier, il constate avec préoccupation que les Roms restent victimes de discrimination dans les domaines de l’emploi, du logement, des soins de santé et de l’éducation, et que cette discrimination est aggravée par une montée de l’hostilité à l’égard des Roms (art. 2, par. 2).

13. Le Comité recommande à l’État partie de mener des évaluations régulières des résultats de la Stratégie nationale pour l’intégration des Roms et de mettre l’accent sur les domaines où des problèmes particuliers se posent. Il lui recommande également :

a) De faire des efforts supplémentaires pour promouvoir une démarche participative et faire en sorte que la communauté rom et la société civile soient associé e s plus largement à l ’ application de la stratégie  ;

b) De sensibiliser le public à la législation antidiscrimination en vigueur  ;

c) De veiller à ce que les Roms aient accès à l ’ aide judiciaire et à des recours appropriés  ;

d) De veiller à ce que les actes de discrimination et de violence donnent lieu à des enquêtes et des poursuites et à ce que les responsables soient sanctionnés  ; et

e) De promouvoir le dialogue interculturel en vue de désamorcer les préjugés et les idées fausses sur les Roms.

14. Le Comité appelle l ’ attention de l ’ État partie sur son observation générale n o 20 (2009) sur la non-discrimination dans l ’ exercice des droits économiques, sociaux et culturels.

Égalité entre les hommes et les femmes

15.Le Comité est préoccupé par les stéréotypes qui continuent d’avoir cours concernant les rôles économiques, sociaux et culturels des hommes et des femmes, qui perpétuent les inégalités entre les sexes dans l’État partie. De ce fait, les femmes continuent de devoir assumer plus que leur part des tâches domestiques et familiales sans rémunération, ce qui compromet leur pleine participation à la vie publique et au marché du travail (art. 3 et 6).

16. Le Comité recommande à l’État partie de veiller à une application efficace de la Stratégie nationale de promotion de l’égalité hommes-femmes pour la période 2016-2020, en particulier en élaborant des politiques sociales visant à atténuer la part des tâches domestiques et familiales non rémunérées assumée par les femmes, en promouvant le partage des responsabilités familiales entre les hommes et les femmes et en menant des campagnes de sensibilisation pour lutter contre les stéréotypes sexistes et sensibiliser à l ’ obligation juridique d ’ égalité entre les sexes et aux avantages de celle-ci pour la société. À cet égard, le Comité appelle l ’ attention de l ’ État partie sur son observation générale n o 16 (2005) sur le droit égal de l ’ homme et de la femme au bénéfice de tous les droits économiques, sociaux et culturels.

Les femmes dans l’emploi

17.Le Comité est préoccupé par la participation plus faible des femmes au marché du travail, la ségrégation professionnelle horizontale et verticale entre les hommes et les femmes et les écarts de rémunération entre les sexes, qui se traduisent par des inégalités de revenus et des prestations de retraite moins élevées pour les femmes. Il est également préoccupé par le fait que la proportion de pères qui exercent leur droit au congé parental reste faible (art. 3, 6 et 7).

18. Le Comité recommande à l ’ État partie de promouvoir la pleine participation des femmes au marché du travail, notamment en élaborant des solutions adéquates et abordables en matière de garderies et en incitant les hommes à exercer leur droit au congé de paternité et au congé parental rémunéré. Il lui recommande également de prendre des mesures pour réduire les écarts de rémunération entre les sexes et de promouvoir l ’ égalité de rémunération pour un travail de valeur égale. Il lui recommande en outre de promouvoir l ’ emploi des femmes dans les domaines où elles restent non représentées et sous-représentées, y compris au moyen de campagnes de sensibilisation et de possibilités de formation.

Emploi des jeunes

19.Le Comité note avec préoccupation que malgré la tendance à la baisse du taux de chômage dans l’État partie, le chômage est deux fois plus élevé parmi les jeunes que dans le reste de la population, et que la proportion de jeunes Roms qui sont à l’écart du système éducatif, de l’emploi et de la formation, en particulier parmi les femmes, est anormalement élevée (art. 6).

20. Le Comité recommande à l ’ État partie de redoubler d ’ efforts pour réduire le chômage des jeunes, notamment en augmentant l ’ offre de possibilités de formation adapté e s au marché du travail et en incitant les employeurs à employer des jeunes. Il lui recommande également de redoubler d ’ efforts pour réinsérer les jeunes qui se trouvent à l ’ écart du système éducatif, de l ’ emploi et de la formation, dans le cadre du Plan de garantie pour la jeunesse, en prenant des mesures spécifiques qui répondent aux besoins des jeunes Roms, en particulier d es femmes. Il lui recommande en outre d ’ accroître le nombre de médiateurs des Roms et des jeunes parmi les populations défavorisées et marginalisées.

Emploi des personnes handicapées

21.Le Comité est préoccupé par le faible taux de participation des personnes handicapées au marché du travail et par le fait que les employeurs ne prévoient souvent pas d’aménagements raisonnables et ne garantissent pas l’accessibilité des lieux de travail. Il constate également avec préoccupation que les quotas relatifs à l’emploi des personnes handicapées ne sont ni respectés ni appliqués (art. 2, par. 2, et 6).

22. Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre des mesures pour accroître la participation des personnes handicapées au marché du travail, notamment en leur garantissant des aménagements raisonnables, en élaborant des politiques et des programmes adaptés aux personnes handicapées et en sensibilisant les employeurs à l ’ obligation de rendre les lieux de travail accessibles aux personnes handicapées. Il recommande également à l ’ État partie de faire appliquer les quotas relatifs à l ’ emploi des personnes handicapées. Il recommande en outre à l ’ État partie de sensibiliser les employeurs et le grand public, y compris les personnes handicapées, à la législation relative à l ’ emploi des personnes handicapées, aux mesures spéciales existantes et aux droits des personnes handicapées.

Harcèlement sur le lieu de travail

23.Le Comité est préoccupé par la prévalence du harcèlement, y compris du harcèlement sexuel, sur le lieu de travail, en particulier dans le secteur de l’habillement où la majorité des travailleurs sont des femmes appartenant à des groupes marginalisés. Il constate également avec préoccupation que, malgré la loi de 2004 sur la protection contre la discrimination, qui définit le harcèlement et le harcèlement sexuel, le niveau de sensibilisation au harcèlement sexuel et aux diverses formes de harcèlement, ainsi que le taux de dénonciation des actes de harcèlement sont faibles (art. 7).

24. Le Comité recommande à l ’ État partie de sensibiliser les employeurs, les employés et le grand public à l ’ interdiction du harcèlement, y compris du harcèlement sexuel, sur le lieu de travail. Il lui recommande de veiller à ce que les employeurs offrent un environnement de travail exempt de harcèlement, à ce que les victimes disposent de recours utiles et à ce que les auteurs des faits soient sanctionnés. Le Comité recommande également à l ’ État partie de prendre des mesures pour que les travailleuses du secteur de l ’ habillement soient protégées contre le harcèlement sexuel et les autres formes de harcèlement.

Droit à la sécurité sociale

25.Le Comité constate avec préoccupation que les niveaux du revenu minimum garanti, des allocations de chômage et des pensions de vieillesse ne permettent pas de garantir un niveau de vie suffisant aux bénéficiaires. Il est également préoccupé par l’incapacité administrative des services sociaux à fournir un soutien ciblé et individualisé aux bénéficiaires (art. 9 et 11).

26. Le Comité recommande à l ’ État partie de poursuivre ses efforts en vue d ’ ajuster le niveau des prestations sociales et d ’ établir un système durable d ’ indexation et, si nécessaire, de recalculer les prestations sociales, afin de garantir un niveau de vie suffisant aux bénéficiaires et à leur famille. Le Comité recommande également à l ’ État partie d ’ allouer les ressources financières nécessaires et de prévoir la formation voulue pour renforcer la capacité administrative des travailleurs sociaux, afin d ’ apporter un soutien individualisé et adéquat aux bénéficiaires.

27.Le Comité constate avec préoccupation qu’il n’existe pas de couverture d’assurance maladie universelle et que ceux qui ne sont pas couverts n’ont pas accès aux soins de santé dans des conditions d’égalité. Il note avec préoccupation que plus de la moitié de la population rom n’est pas couverte par le régime national d’assurance maladie (art. 2, par. 2, et 9).

28. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ étendre la couverture de l ’ assurance maladie nationale aux catégories qui en sont actuellement exclues, notamment par des mesures visant la communauté rom, et de garantir à tous, sans discrimination, l ’ accès à des soins de santé abordables.

Désinstitutionnalisation des enfants

29.Le Comité se félicite de la tendance durable à la désinstitutionnalisation des enfants dans l’État partie, mais il est préoccupé par l’absence de services de développement de la petite enfance et par l’insuffisance du soutien fourni aux enfants, une fois qu’ils ont quitté les institutions de prise en charge. Il est également préoccupé par le manque de personnel qualifié pour s’occuper des enfants placés dans des structures de type familial (art. 10).

30. Le Comité recommande à l ’ État partie de veiller à ce que les besoins spécifiques des enfants désinstitutionnalisés soient pris en compte lorsqu ’ ils sont placés dans un établissement de type familial et que les décisions soient fondées sur l ’ intérêt supérieur de l ’ enfant. Il recommande également à l ’ État partie de favoriser l ’ emploi de personnel qualifié pour s ’ occuper des enfants placés dans des structures de type familial, notamment des psychologues et des spécialistes de la réadaptation et de la petite enfance, et de dispenser une formation adéquate au personnel travaillant dans ces structures.

Violence domestique

31.Tout en prenant note du fait que la Cour constitutionnelle bulgare a déclaré incompatible avec la Constitution la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (Convention d’Istanbul), le Comité est préoccupé par la forte prévalence de la violence contre les femmes, y compris la violence domestique, dans l’État partie. Il est également préoccupé par le fait que ces actes restent très peu signalés et que le niveau de sensibilisation à la violence contre les femmes, y compris la violence domestique, reste faible (art. 3 et 10).

32. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ incorporer les grands principes de la Convention d ’ Istanbul dans sa législation afin de protéger pleinement les femmes contre toutes les formes de violence, de prévenir et éliminer la violence contre les femmes, y compris la violence domestique, et de poursuivre les auteurs de tels actes. Il lui recommande en particulier :

a) De recueillir des statistiques sur la violence à l ’ égard des femmes, y compris la violence domestique, ventilées par âge, type d ’ infraction, lien entre l ’ auteur et la victime et tout autre critère pertinent  ;

b) De veiller à ce que tous les actes de violence à l ’ égard des femmes soient signalés et fassent l ’ objet d ’ enquêtes approfondies, à ce que leurs auteurs soient poursuivis et dûment punis et à ce que les victimes aient accès à la justice, à des réparations efficaces, à des abris et à des services de soutien  ;

c) De former, dans l’optique de l’égalité des sexes, le personnel chargé de l’application des lois et le personnel judiciaire sur la nature de la violence à l ’ égard des femmes, ses causes et ses conséquences et sur la manière de traiter ces cas de violence  ;

d) De sensibiliser le grand public à la violence à l ’ égard des femmes.

Pauvreté et exclusion sociale

33.Le Comité est préoccupé par la forte proportion de personnes, en particulier d’enfants, qui vivent dans la pauvreté ou l’exclusion sociale dans l’État partie. Il constate également avec préoccupation que les membres de la communauté rom et, dans une moindre mesure, les membres de la communauté turque, sont touchés de manière disproportionnée par la pauvreté (art. 10 et 11).

34. Le Comité recommande à l ’ État partie de tirer les enseignements de la mise en œuvre de la Stratégie nationale de réduction de la pauvreté et de promotion de l ’ inclusion sociale à l ’ horizon 2020 afin de s ’ assurer que les mesures ciblées réduisent effectivement la pauvreté. Il recommande en particulier à l ’ État partie de veiller à ce que les mesures, notamment les prestations sociales, touchent effectivement ceux qui en ont besoin, en particulier les Roms et les Turcs. Le Comité recommande également à l ’ État partie d ’ adopter des mesures ciblées pour sortir les enfants de la pauvreté, notamment un soutien socioéconomique aux familles monoparentales et aux familles comptant trois enfants ou plus.

Droit à un logement convenable

35.Le Comité est préoccupé par le grand nombre de personnes qui vivent dans des conditions de logement inadéquates, parfois sans accès à l’assainissement et à l’eau. Il est également préoccupé par le nombre croissant de sans-abri. En outre, le Comité note avec préoccupation que les Roms risquent tout particulièrement d’être expulsés de force sans se voir proposer d’autres solutions adaptées et, par conséquent, de se retrouver sans abri (art. 2, par. 2, et 11).

36. Le Comité demande instamment à l ’ État partie d ’ assurer la fourniture de services d ’ assainissement et d ’ approvisionnement en eau là où ils font actuellement défaut. Il recommande également à l ’ État partie de veiller à ce que les personnes et groupes marginalisés et défavorisés bénéficient de conditions de logement adéquates, notamment en leur facilitant l ’ accès à des programmes de logement social, et en fournissant un logement temporaire convenable aux personnes sans abri. Il lui recommande de prévenir les expulsions forcées et, en cas de démolition de logements illégaux, de veiller à ce que  :

a) L e processus se déroule dans le cadre de la loi et avec une protection procédurale appropriée, y compris un préavis suffisant et raisonnable  ;

b) L es expulsions n ’ aient pas lieu en hiver, ni la nuit, ni pendant l ’ année scolaire  ;

c) L es personnes expulsées qui n ’ ont pas d ’ autre solution de logement bénéficient d ’ un logement de remplacement convenable et que des recours utiles soient à leur disposition.

37. Le Comité appelle l ’ attention de l ’ État partie sur ses observations générales n o 7 (1997) concernant les expulsions forcées et n o 4 (1991) concernant le droit à un logement suffisant.

Centres d’accueil pour migrants et demandeurs d’asile

38.Le Comité constate avec préoccupation que les conditions de vie dans les centres d’accueil pour migrants et demandeurs d’asile ne sont pas satisfaisantes, notamment parce que ces centres ne fournissent pas toujours une nourriture adaptée aux besoins de chacun et les articles non alimentaires nécessaires. Il constate également avec inquiétude que les vulnérabilités ou les besoins particuliers des usagers ne sont pas pris en compte et qu’aucun espace sûr n’est prévu pour les femmes et les filles et les personnes ayant des besoins spéciaux. Le Comité note en outre avec préoccupation que l’allocation mensuelle accordée aux demandeurs d’asile dans les centres d’accueil est insuffisante pour répondre à leurs besoins de base (art. 3, 10 et 11).

39. Le Comité recommande à l’État partie de veiller à ce que les demandeurs d’asile et les migrants placés dans des centres d’accueil reçoivent une nourriture adéquate répondant à leurs besoins et des articles non alimentaires essentiels. Il recommande également que des espaces sûrs soient créés dans chaque centre d’accueil et que la situation et la vulnérabilité de chaque personne soient évaluées à son arrivée, une attention particulière étant accordée aux enfants non accompagnés et séparés et aux victimes de la traite, de la violence fondée sur le genre et de la torture. En outre, le Comité recommande à l’État partie de relever l’allocation mensuelle accordée aux demandeurs d’asile afin de leur permettre de subvenir à leurs besoins de base.

Inégalité dans l’accès aux soins de santé

40.Le Comité est préoccupé par les disparités entre districts et régions en ce qui concerne l’accès aux soins de santé et la disponibilité de médecins et d’infirmiers (art. 12).

41. Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures pour accroître l’offre de soins de santé et recruter des médecins et des infirmiers qualifiés pour travailler dans les régions et districts défavorisés, notamment en accordant des incitations.

Droit à la santé des personnes ayant des problèmes de santé mentale

42.Le Comité est préoccupé par le fait qu’un grand nombre de personnes ayant des problèmes de santé mentale restent sans soins et que la Stratégie nationale pour les soins de longue durée ne prévoit pas de solutions et de services de soins de longue durée et pérennes pour répondre aux besoins des personnes âgées, en particulier de celles ayant des problèmes de santé mentale. Il note avec préoccupation que la capacité des services gériatriques est insuffisante et que les soins communautaires ne sont pas largement disponibles et accessibles. Il est également préoccupé par le manque de personnel médical qualifié assurant une prise en charge adéquate de ces personnes et par l’absence de soutien aux aidants professionnels et naturels (art. 12).

43. Le Comité recommande à l ’ État partie de procéder à une évaluation des besoins et de mettre en place des solutions et des services de soins spécifiques permettant de diagnostiquer et de traiter les problèmes de santé mentale, y compris chez les personnes âgées, ainsi que d ’ allouer un budget suffisant pour assurer des soins et services durables aux personnes âgées, dans le cadre de la Stratégie nationale pour les soins de longue durée. Il recommande également que la capacité des services gériatriques soit renforcée pour répondre aux besoins à long terme et que des soins communautaires et des services sanitaires et sociaux intégrés soient disponibles et accessibles aux personnes âgées, notamment dans les zones rurales et isolées. Il recommande en outre que les professionnels de la santé reçoivent une formation sur le diagnostic et le traitement précoces des problèmes de santé mentale, notamment chez les personnes âgées, et que les aidants professionnels et naturels bénéficient d ’ une formation et d ’ une aide.

Capacité juridique des personnes handicapées

44.Le Comité est préoccupé par le fait que le projet de loi sur les personnes physiques et les mesures d’assistance, qui abolit la privation de la capacité juridique des personnes souffrant d’un handicap intellectuel ou psychologique, n’a pas encore été adopté par l’Assemblée nationale (art. 2, par. 2, et 12).

45. Le Comité recommande à l ’ État partie de reconnaître que les personnes handicapées jouissent de la capacité juridique dans des conditions d ’ égalité avec les autres dans tous les aspects de la vie et d ’ adopter rapidement le projet de loi sur les personnes physiques et les mesures d’assistance . Il lui recommande également de mieux faire connaître la loi dès son adoption et de former les professionnels de la justice, de la santé et de la protection sociale à ses dispositions.

Consommateurs de drogues

46.Le Comité est préoccupé par la très forte prévalence du VIH parmi les usagers de drogues injectables alors que la prévalence dans la population générale de l’État partie est faible. Il s’inquiète en outre de ce que la crainte de la stigmatisation et de la discrimination empêche les usagers de drogues injectables et les personnes vivant avec le VIH/sida de demander des soins et des traitements vitaux. En outre, il note avec préoccupation qu’aucune ressource n’a été allouée pour combler le déficit laissé par le retrait en 2017 du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme (art. 2, par. 2, et 12).

47. Le Comité recommande à l ’ État partie de poursuivre ses efforts pour assurer un financement durable des activités de prévention du VIH et des programmes de réduction des risques qui répondent aux besoins des consommateurs de drogues . Il lui recommande également de sensibiliser le personnel médical aux idées fausses, à la stigmatisation et à la discrimination à l ’ égard des personnes vivant avec le VIH et des consommateurs de drogues et de veiller à ce qu ’ un traitement médical approprié, y compris des médicaments antirétroviraux, leur soit administré.

Droit à l’éducation

48.Le Comité est préoccupé par la baisse du taux net de scolarisation aux niveaux préscolaire et primaire et par la forte augmentation des taux d’abandon scolaire dans l’État partie. Il note avec préoccupation que le nombre d’enfants et de jeunes roms qui abandonnent l’école, en particulier les filles, est anormalement élevé. Il est également préoccupé par le fait qu’en dépit de l’interdiction légale de la ségrégation scolaire, une forte proportion d’enfants roms fréquentent de facto des écoles séparées, ce qui constitue un obstacle à leur intégration. Il est en outre préoccupé par le faible taux d’inscription des enfants handicapés dans les écoles ordinaires (art. 2, par. 2, et 13).

49. Le Comité recommande à l ’ État partie de  :

a) Supprimer les obstacles financiers et matériels à la scolarisation des enfants aux niveaux préscolaire et primaire, en particulier dans les communautés marginalisées et défavorisées  ;

b) Poursuivre ses efforts pour lutter contre l ’ abandon scolaire dans le cadre de la Stratégie de réduction du décrochage scolaire et du p lan d ’ action y afférent , notamment en renforçant la participation de la société civile, des parents, des médiateurs et des membres de la communauté rom au mécanisme interministériel en place  ;

c) Faire respecter l ’ interdiction légale de la ségrégation scolaire en vue de promouvoir l ’ intégration des enfants roms dans la société  ; en particulier, lutter contre la ségrégation scolaire de facto en encourageant la scolarisation des enfants roms dans des écoles mixtes et sensibiliser les parents appartenant à différents groupes ethniques aux avantages de la diversité ethnique  ;

d) Faciliter l ’ accès des enfants handicapés à l ’ éducation inclusive, notamment en améliorant l ’ accessibilité physique des écoles, en fournissant des moyens de transport adéquats, en dotant les écoles de matériels pédagogiques adaptés et en dispensant aux enseignants et éducateurs une formation adéquate.

Droits culturels des minorités

50.Bien que la Constitution de l’État partie reconnaisse le droit de chacun de développer sa propre culture sur la base de son auto-identification ethnique, le Comité est préoccupé par les mesures des autorités visant à décourager les personnes appartenant à des minorités de s’identifier librement à un groupe minoritaire particulier et par le manque de clarté des critères appliqués par les autorités pour accorder l’accès aux droits dont bénéficient les minorités (art. 15).

51. Le Comité recommande à l ’ État partie de veiller, dans la pratique, à ce que  :

a) Les mesures prises par les autorités ne visent pas à décourager les personnes appartenant à des minorités de s ’ identifier librement comme appartenant à un groupe minoritaire particulier  ;

b) Les critères appliqués pour accorder l ’ accès aux droits dont bénéficient les minorités ne soient pas interprétés ou définis de manière à limiter arbitrairement la possibilité pour les membres de ces communautés d ’ avoir accès aux droits énoncés dans le Pacte, en particulier le droit à l ’ éducation  ;

c) L ’ exercice des droits dont bénéficient les minorités ne soit pas une source de distinction arbitraire ou injustifiée entre les communautés dans l ’ accès aux droits énoncés dans le Pacte.

D.Autres recommandations

52. Le Comité encourage l ’ État partie à envisager de signer et de ratifier le Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Il l ’ encourage également à envisager de ratifier la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées et la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.

53. Le Comité recommande à l ’ État partie de tenir pleinement compte des obligations que lui impose le Pacte et de garantir le plein exercice des droits qui y sont énoncés dans la mise en œuvre au niveau national du Programme de développement durable à l ’ horizon 2030, avec l ’ aide et la coopération de la communauté internationale en cas de besoin. La réalisation des objectifs de développement durable serait grandement facilitée si l ’ État partie établissait des mécanismes indépendants pour suivre les progrès réalisés et s ’ il considérait que les bénéficiaires des programmes publics étaient détenteurs de droits qu ’ ils peuvent faire valoir. La réalisation des objectifs dans le respect des principes de participation, de responsabilité et de non-discrimination permettrait de garantir que nul n ’ est laissé de côté.

54. Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre des mesures pour mettre au point et appliquer progressivement des indicateurs appropriés à la mise en œuvre des droits économiques, sociaux et culturels, et faciliter ainsi l ’ évaluation des progrès réalisés pour se conformer aux obligations que lui impose le Pacte pour diverses catégories de la population. À cet égard, il renvoie au cadre conceptuel et méthodologique concernant les indicateurs des droits de l ’ homme mis au point par le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l ’ homme (voir HRI/MC/2008/3).

55. Le Comité prie l ’ État partie de diffuser largement les présentes observations finales à tous les niveaux de la société, aux échelons national, provincial et municipal, en particulier auprès des parlementaires, des fonctionnaires et des autorités judiciaires, et de l ’ informer dans son prochain rapport périodique des mesures prises pour y donner suite. Il l ’ encourage à associer l ’ Ombudsman, la Commission pour la protection contre la discrimination, les organisations non gouvernementales et d ’ autres membres de la société civile au suivi des présentes observations finales et au processus de consultation nationale avant la soumission de son prochain rapport périodique.

56. Conformément à la procédure de suivi des observations finales adoptées par le Comité, l ’ État partie est prié de fournir, dans un délai de vingt-quatre mois à compter de l ’ adoption des présentes observations finales, des renseignements sur la mise en œuvre des recommandations formulées par le Comité aux paragraphes 3 6 (expulsions forcées), 4 5 (capacité juridique des personnes handicapées) et 4 9 c) (ségrégation scolaire de facto) ci-dessus.

57. Le Comité prie l ’ État partie de lui soumettre, le 31 mars 2024 au plus tard , son septième rapport périodique. À cette fin, et compte tenu du fait que l’État partie a accepté d’établir son rapport selon la procédure simplifiée, le Comité lui adressera en temps voulu une liste préalable de points à traiter. Les réponses de l’État partie à cette liste constitueront son septième rapport périodique soumis en application de l’article 16 du Pacte. Le Comité invite aussi l’État partie à mettre à jour, si nécessaire, son document de base commun conformément aux directives harmonisées pour l ’ établissement des rapports à présenter en vertu des instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme (voir HRI/GEN/2/Rev.6, chap. I).