NATIONS UNIES

E

Conseil économique et social

Distr.GÉNÉRALE

E/C.12/UNK/CO/11er décembre 2008

FRANÇAISOriginal: ANGLAIS

COMITÉ DES DROITS ÉCONOMIQUES,SOCIAUX ET CULTURELS

Quarante et unième session

Genève, 3-21 novembre 2008

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT AUX ARTICLES 16 ET 17 DU PACTE

Document présenté par la Mission d ’ administration intérimaire des Nations Unies au KOSOVO (MINUK)

O bservations finales du Comité des droits économiques, sociaux et culturels

1.Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a examiné le document présenté par la Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo sur l’application du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels depuis 1999 (E/C.12/UNK/1) à ses 37e et 38e séances, tenues le 10 novembre 2008 (E/C.12/2008/SR.37 et 38), et a adopté, à ses 49e et 50eséances, tenues le 18 novembre 2008, les observations finales ci-après.

A. Introduction

2.Le Comité prend note avec satisfaction de la présentation par la Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (MINUK) d’un document sur l’application du Pacte au Kosovo depuis 1999, comme suite à la demande formulée sur la base des observations finales du Comité relatives au rapport initial de la Serbie-et-Monténégro (E/C.12/1/Add.108, par. 9), adoptées en mai 2005, et compte tenu du mandat de défense et de promotion des droits de l’homme au Kosovo incombant à la MINUK au titre de la résolution 1244 (1999) du Conseil de sécurité.

3.Le Comité accueille avec satisfaction les renseignements détaillés fournis dans le document présenté par la MINUK et dans les réponses écrites à la liste des points à traiter, ainsi que dans les réponses ciblées apportées par la délégation de la MINUK aux questions orales du Comité.

4.Le Comité déplore que le document ne contienne pas de données statistiques ventilées qui auraient permis au Comité de mieux évaluer l’application du Pacte au Kosovo. Il regrette également que la société civile et les organisations non gouvernementales n’aient pas participé à l’élaboration du document et que celui-ci n’ait été traduit en albanais et en serbe qu’en juillet 2008.

B. A spects positifs

5.Le Comité se félicite des efforts déployés aux fins de la protection et de la promotion des droits économiques, sociaux et culturels par le Bureau du Médiateur, créé en 2000 par le Règlement no2000/38 de la MINUK avec le statut d’institution indépendante faisant rapport auReprésentant spécial du Secrétaire général, jusqu’à son remplacement en application du Règlement no2006/6 de la MINUK, qui prévoyait la désignation d’un médiateur local par l’Assemblée du Kosovo.

6.Le Comité salue la législation que la MINUK a promulguée pour faire disparaître la discrimination dont font l’objet les personnes et les groupes défavorisés et marginalisés, notamment la loi contre la discrimination (2004), qui interdit la discrimination directe et indirecte dans la vie publique et dans la vie privée, et accorde une protection spéciale aux communautés minoritaires, et la loi sur l’égalité entre les sexes (2004), qui fixe à 40 % le niveau de représentation des femmes à tous les échelons, dans les organes exécutifs, législatifs et judiciaires.

7.Le Comité constate avec satisfaction que la MINUK, en coopération avec les autorités kosovares, met de plus en plus l’accent sur la durabilité des retours des personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays et des réfugiés.

C. F acteurs et difficultés entravant la mise en œ uvre du Pacte

8.Le Comité estime que le conflit armé de 1998/1999 et les incertitudes autour du statut du Kosovo ont eu des effets néfastes sur l’exercice des droits reconnus dans le Pacte au Kosovo depuis 1999.

D. P rincipaux sujets de préoccupation

9.S’il est vrai que le Pacte fait partie du droit applicable au Kosovo en vertu du Règlement no 1999/24 de la MINUK, il n’en reste pas moins que le Comité juge préoccupant que le Pacte ne soit pas mentionné dans les listes des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme directement applicables figurant au chapitre 3.1 du Cadre constitutionnel de l’autonomie provisoire au Kosovo (Règlement no2001/9 de la MINUK) et à l’article 22 de la «Constitution» adoptée par l’Assemblée du Kosovo le 9 avril 2008.

Le Comité recommande à la MINUK de revoir la liste des instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme directement a pplicables figurant au chapitre  3.1 du Cadre constitutionnel de l ’ autonomie provisoire au Kosovo et conseille aux autorités kosovares de prendre les mesures voulues pour que le Pacte soit directement applicable .

10.Le Comité note avec préoccupation que depuis la fin du mandat du Médiateur international en 2005, les fonctions du Bureau du Médiateur sont assurées par un médiateur par intérim, dans l’attente de la nomination d’un médiateur par l’Assemblée du Kosovo, conformément au Règlement no2006/12 de la MINUK.

Le Comité recommande à la MINUK de prendre les mesures nécessaires pour éviter tout délai supplémentaire dans la nomination d ’ un médiateur par l ’ Assemblée du Kosovo conformément au Règlement n o 2006/16 de la MINUK et de veiller à ce que toutes les autorités placées so us la supervision du Bureau du M édiateur au Kosovo donnent effet à ses recommandations.

11.Le Comité constate avec préoccupation que les locaux du Groupe consultatif des droits de l’homme créé en vertu du Règlement no2006/16 de la MINUK pour examiner les plaintes dont la MINUK fait l’objet se trouvent au siège de la MINUK et que le Groupe n’a pas émis le moindre avis sur le fond de l’une quelconque des affaires dont il a été saisi, y compris les affaires relatives aux droits économiques, sociaux et culturels.

Le Comité recommande à la MINUK de fournir au Groupe consultatif des droits de l ’ homme des locaux adaptés à l ’ extérieur de ses bâtiments pour garantir pleinement son indépendance, de le doter de ressources financières et humaines suffisantes pour qu ’ il puisse traiter le nombre croissant d ’ affaires qui lui sont confiées.

12.Le Comité est préoccupé par la non‑application, dans la pratique, de la loi contre la discrimination (2004), la piètre qualité, en particulier dans la version serbe, des instructions administratives données en faveur de son application, et l’absence de décisions de justice fondées sur cette loi.

Le Comité recommande à la MINUK, en coopération avec les autorités kosovares, de former systématiquement les juges et les agents de la fonction publique à l ’ application de la loi contre la discrimination , de veiller à ce que les instructions administratives nécessaires à la mise en œuvre de la loi soient clair e s, formulé e s de manière compréhensible et fidèlement traduit e s en serbe et à ce que les victimes de discrimination dans le domaine des droits économiques, sociaux et culturels bénéficient de recours juridictionnels et les requérants indigents de l ’ aide judiciaire pour invoquer les dispositions de la loi contre la discrimination devant les tribunaux.

13.Le Comité relève avec inquiétude que 20 à 30 % des membres des communautés rom, ashkali et égyptienne, ne sont pas enregistrés comme résidents habituels ou ne disposent pas, en l’absence de registres de l’état civil, de documents d’état civil, tels que les certificats de naissance et de mariage, ces deux documents étant nécessaires pour accéder au marché de l’emploi, à la sécurité sociale, au logement, aux soins de santé et à l’éducation. (art. 2, par. 2)

Le Comité recommande à la MINUK, en coopération avec les autorités kosovares, de redoubler d ’ efforts pour a) faciliter l ’ enregistrement des membres des communautés rom, ashkali et égyptienne en tant que résidents habituels, en encourageant une approche souple de l ’ exonération des frais et des documents de résidence dans toutes les communes; b) simplifier les procédures d ’ enregistrement en matière d ’ état civil, notamment s ’agissant des enregistrements «ultérieurs/tardifs» et des naissances à domicile; c) sensibiliser les familles roms à l ’ importance de l ’ enregistrement aux fins de la jouissance des droits économiques, sociaux et culturels; et d) promouvoir l ’ adoption de la Stratégie d ’ intégration en faveur des communautés rom, ashkali et égyptienne du Kosovo.

14.Le Comité constate avec préoccupation qu’il n’existe pas au Kosovo de loi sur les droits des personnes handicapées. (art. 2, par.2)

Le Comité recommande à la MINUK de sensibiliser l ’ Assemblée du Kosovo à la nécessité urgente d ’ adopter une loi sur les droits des personnes handicapées et d ’ aider les autorités locales à trouver les ressources nécessaires à sa mise en œuvre.

15.Le Comité s’inquiète de la faible représentation des membres des communautés rom, ashkali et égyptienne et autres communautés non albanaises dans les services publics et dans le système judiciaire, en particulier aux postes de responsabilité. (art. 2, par.2)

Le Comité recommande à la MINUK, en coopération avec les autorités kosovares, d ’ intensifier les efforts qu ’ elle déploie pour promouvoir la représentation adéquate des communautés non albanaises dans les services publics et le système judiciaire, ainsi que leur participation effective, en particulier aux postes de responsabilité, par exemple, en imposant aux municipalités de respecter les quotas fixés dans la Politique de partage équitable du financement, en adoptant des déclarations de principe et des stratégies de mise en œuvre en matière d ’ égalité des chances, en nommant des responsables de l ’ égalité des chances et en procédant à la collecte systématique de données ventilées pour déterminer si les communautés non albanaises sont représentées proportionnellement dans les services municipaux, y compris aux postes de responsabilité .

16.Le Comité note avec préoccupation que les femmes, en particulier les femmes issues de communautés non albanaises, ne sont pas représentées aux postes de responsabilité ni au niveau municipal ni dans les organes législatifs et judiciaires et les organes gouvernementaux centraux et locaux. (art. 3)

Le Comité recommande à la MINUK, en coopération avec les autorités kosovares , d ’ intensifier les efforts qu ’ elle déploie pour accroître la rep résentation des femmes, en  particulier des femmes issues de communautés non albanaises, aux postes à responsabilité au niveau municipal, par exemple, en imposant aux municipalités de créer des services de l ’ égalité entre les sexes, ainsi qu ’ aux postes à responsabilité dans les organes législatifs et judiciaires et les organes gouvernementaux centraux et locaux , conformément au quota de 40  % prévu dans la loi sur l ’ égalité entre les sexes.

17.Le Comité note avec inquiétude que 30 à 40 % des Kosovars sont au chômage, en particulier les femmes, les jeunes, les communautés non albanaises, les rapatriés et les personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays, et qu’il n’existe pas de mesures particulières pour régulariser progressivement la situation des personnes travaillant dans le secteur informel. (art. 6)

Le Comité recommande à la MINUK, en coopération avec les autorités kosovares, d ’ intensifier les efforts qu ’ elle déploie pour promouvoir les possibilités d ’ emploi, en particulier dans le secteur formel , y compris pour les femmes, les jeunes, les communautés non albanaises, les rapatriés et les personnes déplacées à l ’ intérieur de leur propre pays, par exemple par la formation en cours d ’ emploi, l ’ adoption du programme destiné à favoriser l ’ emploi des jeunes et l ’ augmentation des incitations et des subventions à l ’ intention du secteur privé. Il recommande également à la MINUK, en coopération avec les autorités kosovares, de régulariser la situation des personnes travaillant dans le secteur informel en les incluant progressivement dans les régimes de sécurité sociale et en adoptant un plan d ’ action concernant le secteur informel de l ’ économie.

18.Le Comité relève avec préoccupation que, lors de la privatisation des anciennes entreprises en propriété collective, la MINUK n’aurait pas fourni les garanties suffisantes visant à préserver la composition ethnique de la main‑d’œuvre d’effectifs qui prévalait avant le conflit armé, et qu’elle aurait fixé des délais discriminatoires qui auraient empêché de nombreuses personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays et de rapatriés de s’inscrire sur les listes des anciens employés pouvant prétendre à une part de la distribution des recettes issues de la vente de ces entreprises et de faire recours devant la Chambre spéciale de la Cour suprême en cas de non‑inscription. (art. 6)

Le Comité recommande à la MINUK d ’ envisager de revoir ses Règlements n os 2005/48 et 2004/45 afin de ne pas entretenir les effets des migrations forcées pendant et après le conflit armé de 1998/ 1999 sur la composition ethnique de la main ‑ d ’ œuvre travaillant dans les anciennes entreprise s en propriété collective et de  donner aux personnes déplacées et aux réfugiés suffisamment de temps et de renseignements pour qu ’ ils puissent obtenir les documents nécessaires à leur inscription sur la liste des employés pouvant prétendre à une part des recettes de la vente des anciennes entreprises en propriété collective, ou sinon pour faire recours devant la Chambre spéciale de la Cour suprême.

19.Le Comité est préoccupé par le niveau des salaires au Kosovo qui ne suffit pas pour assurer un niveau de vie décent aux travailleurs et aux membres de leur famille, en particulier aux femmes qui gagneraient en moyenne 20% de moins que les hommes, et par l’absence de législation fixant un salaire minimum. (art. 7)

Le Comité recommande à la MINUK, en coopération avec les autorités kosovares, de prendre des mesures appropriées pour faire en sorte que les niveaux de salaire assurent un niveau de vie décent à tous les travailleurs et à leur famille, conformément à l ’article 7 a)  ii) du Pacte, et d ’ appliquer le principe de l ’ égalité de  rémunération pour un travail égal. Il recommande également à la MINUK de conseiller à l ’ Assemblée du Kosovo d ’ adopter l ’ avant-projet de loi sur le salaire minimum.

20.Le Comité constate avec préoccupation qu’au Kosovo le droit de former des syndicats et de s’y affilier et le droit de grève ne sont pas expressément garantis par la loi. (art. 8)

Le Comité recommande à la MINUK d ’ encourager l ’ Assemblée du Kosovo à adopter le projet de loi sur le travail et le projet de loi sur le droit à la liberté d ’ association et le droit de grève.

21.Le Comité s’inquiète que le montant minimum des prestations de retraite de base et des prestations de retraite financées par des cotisations, des pensions d’invalidité, des prestations reçues par les invalides de guerre et par les survivants, ainsi que des allocations d’aide sociale ne soit pas suffisant pour assurer un niveau de vie décent aux bénéficiaires et aux personnes qui sont à leur charge. Le Comité est également préoccupé par le fait que l’impossibilité pour les personnes qui possèdent plus de 0,5 hectare de terres arables de bénéficier de telles prestations peut avoir un effet discriminatoire sur les personnes de retour qui ne peuvent reprendre possession de leurs terres en raison de problèmes d’occupation illégale ou de sécurité. (art. 9)

Le Comité recommande à la MINUK, en coopération a vec les autorités du Kosovo, de  faire en sorte que le montant minimum des prestations de retraite de base et des prestations de retraite financées par des cotisations, des pensions d ’ invalidité, des prestations reçues par les invalides de guerre et par les survivants, ainsi que des allocations d ’ aide sociale soit suffisant pour assurer un niveau de vie décent aux bénéficiaires et aux personnes qui sont à leur charge. Il lui recommande également de procéder à un réexamen de toute condition d’admissibilité discriminatoire pour les prestations sociales fondée, notamment, sur la propriété.

22.Le Comité prend note avec inquiétude des informations selon lesquelles les membres des communautés non albanaises se heurtent à des difficultés, telles que l’absence de formulaire en langue serbe avant 2005 ou l’obligation de faire délivrer les certificats de décès par la MINUK, lorsqu’ils déposent une demande de pensions d’invalides de guerre et de survivants au titre du Règlement no2000/66 de la MINUK. (art. 9)

Le Comité recommande à la MINUK, en coopération avec les autorités du Kosovo, de faire en sorte que les membres des communautés non albanaises jouissent de l’égalité d’accès aux pensions d’invalides de guerre et de survivants, en droit et en pratique.

23.Le Comité constate avec préoccupation que la violence familiale est très répandue au Kosovo, que peu de cas sont signalés à la police et aux défenseurs des victimes, qu’aucune loi n’érige expressément en infraction le viol entre époux, que la proportion de poursuites engagées et de condamnations prononcées est faible et que les victimes ne bénéficieraient d’aucune aide. (art. 10)

Le Comité recommande à la MINUK, en coopération avec les autorités du Kosovo, de faire en sorte a) que le viol entre époux soit expressément érigé en infraction; b) que les juges, les procureurs et les membres de la police suivent une formation obligatoire sur la stricte application du Règlement n o 2003/12 de la MINUK relatif à la lutte contre la violence familiale; c) que les professionnels de la santé et le public soient informés de la nécessité de signaler les cas de violence familiale; d) que les pratiques en matière de condamnation soient réexaminées et que les délais pour l’adoption de mesures de protection soient respectés; e) que le nombre et la capacité d’accueil des foyers soient augmentés et que les programmes de réadaptation des victimes soient renforcés, notamment grâce à l’octroi d’une aide financière adéquate aux ONG; et  f) que le prochain rapport sur l’application du Pacte au Kosovo comprenne des données actualisées sur le nombre et la nature des cas si gnalés de violence familiale et  sexuelle, les condamnations et les sanctions appliquées à leurs auteurs.

24.Le Comité note avec préoccupation que les juges et les procureurs retiennent souvent les qualifications les plus légères, aboutissant à des condamnations pour facilitation de la prostitution, au lieu d’opter pour l’inculpation de traite de personnes, et que les enfants victimes de maltraitance et d’exploitation, les enfants abandonnés par leurs parents ou les enfants des rues sont souvent considérés comme des enfants «antisociaux» par les services sociaux et ne bénéficient pas de la protection spéciale offerte aux enfants victimes de la traite. (art. 10)

Le Comité recommande à la MINUK, en coopération a vec les autorités du Kosovo, de  faire en sorte a) que les juges, les procureurs et les membres de la police suivent une formation obligatoire sur la stricte applicatio n de l’article 139 du Règlement n o 2003/26 de la MINUK et autres dispositions pénales applicables à la traite des personnes; b) que les pratiques en matière de condamnation soient réexaminées; c) que la catégorie des enfants «antisociaux» soit immédiatement supprimée et qu’une protection spéciale soit offerte à tous les enfants victimes de la traite, sans discrimination; et d) que le prochain rapport sur l’application du Pacte au Kosovo comprenne des données actualisées sur le nombre (estimatif) de personnes qui, dans le cadre d’un trafic, ont été transférées vers ou depuis le Kosovo, y ont transité ou ont été déplacées de son territoire, ainsi que sur le nombre de poursuites, de condamnations et de sanctions appliquées aux trafiquants.

25.Le Comité est préoccupé par l’absence de mesures concertées visant à prévenir et à réduire le travail des enfants, qui serait très répandu dans les entreprises familiales et dans l’économie informelle. (art. 10)

Le Comité recommande à la MINUK d’appeler l’attention des autorités compétentes, notamment l’Inspection du travail, les centres de trav ail social et le Comité pour la  prévention du travail des enfants récemment créé, sur la nécessité impérieuse d’adopter et d’appliquer effectivement des mesures concertées pour la prévention et la réduction du travail des enfants, notamment en augmentant le nombre des inspections de travail et les mesures d’aide aux familles pauvres, et de suivre la situation en incluant dans le prochain rapport sur l’application du Pacte au Kosovo des données actualisées sur le nombre d’enfants qui continuent de travailler.

26.Le Comité note avec préoccupation qu’environ 45 % des Kosovars vivent dans la pauvreté, soit avec moins de 1,42 euro par jour, et qu’environ 15 % vivent dans l’extrême pauvreté, soit avec moins de 0,93 euro par jour. (art. 11)

Le Comité recommande à la MINUK de dégager des fonds et d’encourager les autorités du Kosovo à mettre effectivement en œuvre le Plan 2008-2011 de lutte contre la pauvreté, ainsi qu’à y intégrer pleinement les droits économiques, sociaux et  culturels et à répondre expressément aux besoins des personnes sans emploi, des ménages dirigés par des femmes, des communautés minoritaires rom, ashkali et égyptienne et autres communautés minoritaires non serbes, et des personnes déplacées. À cet égard, il est fait référence à la Déclaration du Comité concernant la pauvreté et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (E/C.12/2001/10).

27.Le Comité s’inquiète que peu de personnes déplacées et de réfugiés, en particulier ceux appartenant à des communautés minoritaires, aient pu ces dernières années retrouver les maisons dans lesquelles ils vivaient avant le conflit armé, en dépit des efforts déployés pour faciliter les retours durables. (art. 11)

Le Comité recommande à la MINUK, en coopération avec les autorités du Kosovo, de redoubler d’efforts pour garantir la reprise de possession des biens immeubles, la sécurité physique et le retour durable des personnes déplacées et des réfugiés, en particulier ceux appartenant à des communautés minoritaires, dans les maisons où ils vivaient avant le conflit armé, par exemple en augmentant l’assistance en matière de création de revenus pour les personnes de retour, en veillant à ce que les Principes directeurs relatifs au déplacement de personnes à l’intérieur de leur propre pays (E/CN.4/1998/53/Add.2) soient pleinement pris en compte lors de la révision du Manuel révisé pour les retours durables (2006), et en faisant directement participer les personnes déplacées à toutes les étapes de l’adoption et de la mise en œuvre des stratégies de retour dans les zones municipales.

28.Le Comité note avec préoccupation que la date limite fixée pour la présentation des réclamations à l’Office kosovar de la propriété immobilière aurait contribué à exclure de nombreuses personnes déplacées insuffisamment informées de cette date. Il est également préoccupé par l’arriéré de quelque 18 000 demandes civiles d’indemnisation des dégâts prétendument causés par la KFOR, la MINUK, les institutions provisoires de l’administration autonome ou les municipalités pendant les troubles civils, qui n’ont pas été examinées par les tribunaux conformément à une instruction donnée par le Département de la justice de la MINUK en août 2004. (art. 11)

Le Comité recommande à la MINUK de réexaminer l’article 8 de son Règlement n o 2007/8 afin de prendre des dispositions transitoires pour les personnes déplacées qui n’ont pas pu soumettre leurs réclamations à l’Office kosovar de la propriété immobilière avant la date limite de décembre 2007 parce qu’elles n’avaient pas été informées de cette date. Il recommande également à la MINUK, en coopération avec les autorités du Kosovo, de renforcer les effectifs des tribunaux et de leur donner l’instruction d’examiner toutes les demandes civiles d’indemnisation des dégâts prétendument causés par la KFOR, la MINUK, les institutions provisoires d’administration autonome ou les municipalités pendant les troubles civils et d’accorder la priorité aux cas impliquant une discrimination.

29.Le Comité note avec préoccupation qu’un certain nombre de familles roms, ashkalis et égyptiennes, qui avaient été relogées dans le camp de personnes déplacées de Cesmin Lug/Çesmin Llug après la démolition en 1999 de la «Mahalla rom» à Mitrovicë/Mitrovica, choisissent de rester à Cesmin Lug/Çesmin Llug en dépit des niveaux élevés de contamination par le plomb, parce qu’elles se méfient de la solution de relogement durable proposée et qu’elles craignent que le camp de personnes déplacées d’Osterode, dans lequel la plupart des familles roms, ashkalis et égyptiennes ont été relogées depuis les camps de personnes déplacées contaminées par le plomb, soit lui-même situé près d’un site contaminé par le plomb. Le Comité est également préoccupé par le fait que, selon certaines sources, les enfants vivant dans le camp d’Osterode présentent des taux élevés de plomb dans le sang et que les traitements médicaux pour l’empoisonnement par le plomb ont été interrompus en 2007. (art. 11)

Le Comité recommande à la MINUK, en coopération avec les autorités du Kosovo, de faire en sorte a) que les familles roms, ashkalis et égyptiennes qui choisissent de rester dans le camp de personnes déplacées de Cesmin Lug/Çesmin Llug soient suffisamment informées des risques sanitaires qu’elles encourent et qu’il leur soit proposé des solutions de relogement satisfaisantes qui correspondent à leurs attentes culturelles; b) que les taux élevés de plomb chez les personnes, en particulier les enfants, qui vivent dans les camps de personnes déplacées de Cesmin Lug/Çesmin Llug, d’Osterode et de Leposavi ć /Leposaviq fassent l’objet d’une surveillance constante et qu’un suivi médical approprié soit disponible dans les trois camps; c) que la phase 2 de la reconstruction de la «Mahalla rom» soit mise en œuvre et achevée dès que possible; et d) que toutes les familles roms, ashkalis et égyptiennes relogées dans des camps de personnes déplacées soient progressivement réinstallées dans la «Mahalla rom» et puissent disposer d’un logement satisfaisant avec une garantie de maintien dans les lieux.

30.Le Comité est préoccupé par les taux élevés de mortalité infantile et maternelle au Kosovo, ainsi que par le nombre d’avortements clandestins, qui serait élevé. (art. 12)

Le Comité recommande à la MINUK de dégager des fonds et d’appeler l’attention des autorités compétentes du Kosovo sur la nécessité de prendre des mesures immédiates pour que toutes les femmes enceintes aient accès à des services de santé maternelle satisfaisants, y compris des services d’accouchement médicalisé et de surveillance des nouveau-nés, et que tous les adolescents et adultes aient accès à des informations et des services complets en matière de santé sexuelle et génésique, ainsi qu’à des moyens de contraception et à des services d’interruption de grossesse sans risques, y compris dans les zones rurales.

31.Le Comité note avec inquiétude que le taux de scolarisation des filles, en particulier de communautés minoritaires non serbes, est bas dans le secondaire, que le taux de scolarisation des enfants roms, ashkalis et égyptiens, en particulier des filles, est faible alors que leur taux d’abandon scolaire est élevé, et que les enfants appartenant à des communautés minoritaires non serbes, en particulier les enfants roms, ashkalis et égyptiens, n’ont guère la possibilité de suivre un enseignement dans leur langue maternelle ou d’étudier leur langue ainsi que leur histoire et leur culture. (art. 13)

Le Comité recommande à la MINUK de dégager des fonds et d’appeler l’attention des autorités compétentes du Kosovo sur la nécessité a) de sensibiliser les parents à l’importance de l’éducation pour leurs enfants, y compris leurs filles; b) d’augmenter le nombre de cours de rattrapage et de cours en langue albanaise, en particulier pour les enfants roms, ashkalis et égyptiens; et c) de faire en sorte que les enfants membres de communautés minoritaires non serbes, en particulier les enfants roms, ashkalis et égyptiens, aient la possibilité, à tous les niveaux de la scolarité, de suivre un enseignement dans leur langue maternelle ou d’étudier leur langue ainsi que leur histoire et leur culture, et qu’un nombre suffisant d’enseignants et de manuels scolaires soient disponibles à cet effet, et que les cultures et traditions des communautés minoritaires soient dûment prises en compte lors de la révision des programmes scolaires.

32.Le Comité est préoccupé par le fait que la population du Kosovo est profondément divisée en fonction de l’appartenance ethnique, comme en témoignent les incidents récurrents de violence interethnique et le climat d’intolérance entre les communautés ethniques au Kosovo. (art. 15)

Le Comité recommande à la MINUK d’encourager les autorités compétentes du Kosovo à favoriser le dialogue et la tolérance interculturels par le biais de l’éducation scolaire, de projets communautaires et de campagnes nationales.

33.Le Comité recommande à la MINUK de faire en sorte que le prochain rapport sur l’application du Pacte au Kosovo comprenne des données statistiques actualisées sur l’exercice de chacun des droits énoncés dans le Pacte, ventilées par âge, sexe, origine ethnique, population rurale/urbaine et autre situation pertinente, sur une base comparative annuelle pour les cinq dernières années.

34.Le Comité demande à la MINUK de diffuser largement les présentes observations finales à tous les niveaux de la société, en particulier auprès de la fonction publique, de l’appareil judiciaire et des organisations de la société civile, de les traduire en albanais et en serbe, et, dans la mesure du possible, dans des langues minoritaires comme le romani, et de l’informer des mesures prises pour les mettre en œuvre dans le prochain rapport sur l’application du Pacte au Kosovo. Il encourage aussi la MINUK, ou toute autre administration future au Kosovo, à continuer d’associer des organisations non gouvernementales et d’autres membres de la société civile au processus de discussion avant la présentation du prochain rapport.

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