Nations Unies

E/C.12/CMR/CO/2-3

Conseil économique et social

Distr. générale

23 janvier 2012

Original: français

Comité des droits économiques, sociaux et culturels

Quarante-septième session

Genève, 14 novembre-2 décembre 2011

Examen des rapports présentés par les États parties conformément aux articles 16 et 17 du Pacte

Observations finales du Comité des droits économiques, sociaux et culturels

Cameroun

Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a examiné les deuxième et troisième rapports périodiques du Cameroun sur l’application du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (E/C.12/CMR/2-3) à ses 41e à 43e séances (E/C.12/2011/SR.41 à 43), les 21 et 22 novembre 2011, et a adopté, à sa 59e séance, le 2 décembre 2011, les observations finales ci-après.

A.Introduction

Le Comité note avec satisfaction la présentation des deuxième et troisième rapports périodiques du Cameroun. Ces rapportsde l’État partie sont dans leur ensemble conformes aux directives du Comité et rendent compte des mesures prises pour mettre en œuvre les recommandations formulées par le Comité dans ses précédentes observations finales. Le Comité notetoutefois que le rapport a été soumis avec sept ans de retard.

Le Comité note également avec satisfaction les réponses écrites de l’État partie à la liste des points à traiter (E/C.12/CMR/Q/2-3/Add.1) ainsi que les réponses fournies par celui-ci aux questions posées lors du dialogue. Il relève toutefois que les réponses sont souvent restées trop générales.

B.Aspects positifs

 Le Comité accueille avec satisfaction la ratification du Protocole facultatif à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes.

Le Comité prend acte avec satisfaction des efforts accomplis par l’État partie pour promouvoir la mise en œuvre des droits économiques, sociaux et culturels, notamment:

Les efforts entrepris par l’État partie pour atteindre le point d’achèvementau titre de l’Initiative en faveur des pays pauvres très endettés qui ont permis d’alléger la detteet ainsi de dégager des ressources additionnellespour les consacrer aux secteurs prioritaires de la santé;

L’introduction de la gratuité de l’enseignement primaire par la loi de finance nº2000/08 du 30 juin 2000;

L’adoption de la loi n° 2010/002 du 13 avril 2010 portant protection et promotion des personnes handicapées;

L’ouverture de 60 centres de prise en charge du VIH/sidadans les centres de santé publique et la multiplication des centres de dépistage et de traitement de la tuberculose;

Le développement des infrastructures sanitaires, la construction de centres de santé de base et la réhabilitation d’autres structures sanitaires ;

La ratification de la Convention‑cadre de l’OMS pour la lutte antitabac (Organisation mondiale de la santé);

L’adoption de la loi n° 2009/004 du 14 avril 2009 portant organisation de l’assistance judiciaire.

Le Comité se réjouit de l’adoption de la loi n° 2010/004 du 13 avril 2010 modifiant et complétant certaines dispositions de la loi nº 2004/016 du 24 juillet 2004 portant création, organisation et fonctionnement de la Commission nationale des droits de l’homme et des libertés. La loi n° 2010/004 du 13 avril 2010 renforce la conformité de l’État partie avec les Principes de Paris, notamment en accordant une voix consultative, et non plus délibérative, aux représentants du Gouvernement.

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Le Comité est préoccupépar le fait qu’en dépit de la primauté du Pacte sur le droit interne, à ce jour les tribunaux nationauxn’ont jamais invoquéle Pacte dans leurs décisions.

Le Comité recommande à l’État partie de prendre les mesures appropriées pour donner effet au Pacte dans l’ordre juridique interne, et d’adopter, si nécessaire, un texte d’application. Le Comité recommande également à l’État partie d’adopter des mesures propres à sensibiliser les membres du pouvoir judiciaire et la population au Pacte et à la justiciabilité des droits économiques, sociaux et culturels. Le Comité demande à l’État partie d’inclure, dans son prochain rapport périodique, des informations relatives aux décisions des cours et des tribunaux nationaux ainsi que des autorités administratives donnant effet aux droits consacrés par le Pacte. Le Comité appelle l’attention de l’État partie sur son observation générale nº 9 (1998) concernant l’application du Pacte au niveau national.

Le Comité note avec préoccupation que la corruption continue d’être répandue dans l’État partie malgré les campagnes de sensibilisation sur ses effets et les poursuites engagées contre les auteurs de certains faits de corruption.

Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures effectives pour lutte r contre la corruption .

Le Comité, tout en notant les activités de promo tion d es droits économiques, sociaux et culturels entreprises par la Commission n ationale des d roits de l’ h omme et des l ibertés , qui jouit d’un statut A, dans l’État partie , recommande à ce dernier de veiller à ce que d es ressources humaines et financières suffisantes soient attribuées à cette institution.

Le Comité regrette quel’État partie, dans les réponses qu’il a apportéesaux questions qui lui étaient posées lors du dialogue, ait fourni des renseignements insuffisants sur le cadre législatif de la protection contre la discrimination (art. 2, par. 2).

Le Comité recommande à l’État partie d’adopter une législation antidiscriminatoire globale qui énumère tous les motifs de discrimination interdits, comme le prévoit le paragraphe 2 de l’article 2 du Pacte.

Le Comité reste préoccupé par le fait qu’en dépit des projets entrepris en faveur des peuples autochtones, tels que décrits au paragraphe 194 du rapport de l’État partie, certains groupes de personnes ne jouissent pas des mêmes droits économiques, sociaux et culturels que le reste de la population.Par ailleurs, le Comité déplore l’absence d’une politique globale en faveur des peuples autochtones (art. 2, par. 2).

Le Comité engage l’État partie à adopter une politique globale et cohérente aux fins de promouvoir le droit des populations autochtones à un niveau de vie suffisant. Le Comité renvoie l’État partie à son observation générale n° 20 (2009) sur la non-discrimination dans l’exercice des droits économiques, sociaux et culturels.

Le Comité engage en outre l’État partie à garantir les droits économiques, sociaux et culturels des peuples autochtones lors de la mise en œuvre des grands projets prévus dans le Document de s tratégie pour la c roissance et l’ e mploi . À cet effet , il recommande également à l’État partie d’entreprendre des programmes d’éducation et de sensibilisation à leur droit de prendre part aux décisions les concernant tout au long des différentes phases de sdits projets.

Le Comité est préoccupé par le fait que les personnes handicapées se heurtentà des difficultésdans les domaines de l’éducation et du travail, en dépit des mesures législatives et institutionnelles adoptées par l’État partie, à en juger par le recrutement de seulement 52 personnes handicapées sur les 25000 personnes qui ont été embauchées récemment dans la fonction publique. Par ailleurs, tout en notant les décisions interministérielles visant à faciliter l’accès des personnes handicapées à l’éducation, le Comité regrettede ne pas avoir reçu d’informations précises sur l’accès des personnes handicapées dans la pratique à l’éducation et à l’emploi, nisur les mesures prises ou envisagées,découlant de ces mêmesdécisions, pour faciliter l’accès et l’usage des institutions et des bâtiments tant publics que privés aux personnes handicapées,commele prévoit la loi sur la promotion et la protection des personnes handicapées (art. 2, par. 2).

Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures concrètes et efficaces et d’allouer les ressources nécessaires à la mise en œuvre de la loi sur la promotion et la protection des personnes handicapées. Par ailleurs, le Comité recommande à l’État partie de promouvoir l’intégration des personnes handicapées dans l’éducation et sur le marché du travail, notamment en introduisant un système de quotas . Il recommande en outre à l’État partie de veiller à ce que, dans sa législation et dans ses politiques, le refus d’aménagement raisonnable soit considéré comme une forme de discrimination. Le Comité demande par ailleurs à l’État partie de fournir dans son prochain rapport périodique des données ventilées et comparatives sur l’incidence des mesures prises à cet égard et attire l’ attention de l’État partie sur l’observation générale n° 5 (1994) sur les personnes handicap ées .

Le Comité réitère sa préoccupationde constater que les dispositions législatives discriminatoires envers les femmes, dont il avaitrecommandé l’abrogation dans ses observations finales précédentes, sont encore en vigueur dans l’État partie. (art. 3).

Le Comité exhorte l’État partie à veiller à ce qu e les dispositions pertinentes du Code de la famille , du Code du travail et du Code pénal soient amendées aussi rapidement que possible et à ce q u ’aucune disposition discriminatoire envers les femmes ne soit maintenue dans les projets de loi en cours de révision . Il recommande que ces nouveaux textes permettent à l’État partie de s’acquitter de ses obligations de garantir l a parité entre l es hommes et l es femmes dans l’exercice de leurs droits économiques, sociaux et culturels, conformément à l’article 3 du Pacte. À cet égard, le Comité attire l’attention de l’État partie sur son observation générale nº 16 (2005).

Le Comité déplore que la législation en vigueur dans l’État partie assortit l’emprisonnement de l’obligation de travailler, y compris dans le cas des délits d’opinion. Le Comité est en particulier préoccupé par le fait que la législation autorise des entités privées à embaucherdes détenus sans le consentement de ces derniers(art. 6).

Le Comité exhorte l’État partie à abolir la peine de travail forcé et à mettre sa législation en conformité avec l’article 6 du Pacte. Il recommande également à l’État partie de prendre d es mesures, d’ordre législatif et autre, pour que le travail d es détenu s soit toujours subordonné à leur consentement. Le Comité demande à l’État partie de fournir dans son prochain rapport périodique des renseignements sur les conditions de travail des détenus.

Le Comité reste préoccupé par les taux élevésduchômage et du sous-emploi, qui se sont aggravés depuis le début de la crise économique dans l’État partie, notamment parmi les jeunes et les femmes. Le Comité note aussi avec préoccupation qu’une grande majorité des jeunes travaillent dans l’économie informelle(art. 6).

L e Comité , t out en prenant acte de s grands projets prévus en 2012 qui , selon l’État partie, devraient augmenter l’offre sur le marché du travail , recommande à l’État partie :

D ’inclure dans sa politique d’emploi des mesures visant à remédier aux difficultés d’insertion des jeunes et des femmes dans le marché du travail formel ;

D e développer les formations professionnelles répondant aux besoins du marché du travail  ;

D e veiller à ce que les activités promues par le Fonds national de l’emploi, telles que l’appui à la création d ’un e microentreprise et la formation à un métier, favorisent la création d’emplois dans l’économie formelle ;

D e doter le Fonds national de l’emploi et l’Observatoire national de l’emploi des ressources nécessaires à leur bon fonctionnement .

Le Comité attire l’attention de l’État partie sur son observation générale n° 18 (2005) sur le droit au travail.

Le Comité demeure préoccupé par le fait que lesalaire minimum interprofessionnel garanti, fixé au terme de négociations tripartites, n’assure pas un niveau de vie décent aux travailleurs et à leur famille(art. 7).

Le Comité recommande à l’État partie de veiller à ce que le montant du salaire minimum interprofesssionel garanti permette aux travailleurs et à leur famille de jouir d’une existence décente, conformément à l’article 7 du Pacte. À cet égard, le Comité recommande à l’État partie de s’assurer que le mécanisme de fixation et de révision du salaire minimum tien t compte du niveau minimum de subsistance et de l’évolution du coût de la vie.

Le Comité réaffirme son inquiétude devant les conditions de travail précaires dans les plantations où les contrôles sont inadéquats, notamment en raison de la sous-traitance. Souvent utilisée par les propriétaires de ces plantations, la sous-traitance oblige certains ouvriers et leur famille à devenir des prestataires(art. 7).

Le Comité réitère sa précédente recommandation dans laquelle elle appelait l’État parti e à prendre des mesures concrètes et efficaces pour faire respecter les normes fondamentales de travail dans les plantations. En particulier, le Comité appelle l’État partie à s’assurer que le cadre réglementaire de la sous-traitance prot è ge suffisamment les droits des travailleurs dans l la cas particuli er du travail dans les plantations.

Le Comité juge préoccupantes les informations faisant étatde violations des droits syndicaux, notamment l’arrestation ou le licenciement de dirigeants et d’adhérents syndicaux, ainsi que de l’interférence de l’État partie dans le fonctionnement des syndicats. L’État partiefavoriseraitcertaines organisationssyndicales et refuserait d’en reconnaître d’autres, notamment la Centrale syndicale du secteur public (art. 8).

Le Comité recommande à l’État partie de respecter le droit de chacun de fonder des syndicats avec d’autres personnes et de prendre part à des activités syndicales, conformément à l’article 8 du Pacte. Le Comité recommande également à l’État partie de garantir l’égalité des syndicats dans la pratique.

Le Comité observe avec préoccupation que le système de sécurité sociale de l’État partie n’est basé que sur l’activité économique formelle,excluant ainsi une grande majorité de la population : les personnes sansemploi ou employée dans l’économie informelle (art. 9).

Le Comité engage l’État partie à poursuivre le processus de modernisation de la sécurité sociale de manière à garantir ce droit à toutes les personnes. Le Comité recommande également à l’État partie de veiller à ce que le système de sécurité sociale garanti ss e la protection l e plus large possible . Il lui recommande en outre d’ int rodui re progressivement des régimes non contributifs destinés à ceux qui ne peuvent pas verser des cotisations . À cet égard, le Comité appelle l’attention de l’État partie sur son observation générale n° 19 (2007) sur le droit à la sécurité sociale.

Le Comité constate avec préoccupation que l’âge minimum de travail dans l’État partie est de 14 ans. Le Comité juge en outre préoccupant que des enfants âgés de moins de 15 ans travaillent dans les plantations et chez les particuliers.Le Comité s’interroge aussi sur l’efficacité des mesures prises par l’État partie pour lutter contre le travail des enfants à en juger par lepetit nombre d’enfants pris en charge par les institutions publiques (art. 10).

Le Comité engage instamment l’État partie à mettre sa législation en conformité avec les normes internationales relatives au travail des enfants, en particulier eu égard à l’âge minimum et aux différentes catégories de travaux dangereux.

En outre, l e Comité recommande vivement à l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires, y compris l’augmentation du nombre des inspections du travail, pour faire respecter la législation nationale interdisant le travail des enfants et veiller à ce que les personnes qui ont recours à la main-d’œuvre enfantine illégale soient poursuivies. Le Comité demande à l’État partie d’inclure dans son prochain rapport périodique des renseignements sur les poursuites engagées et les condamnations prononcées à cet égard.

Le Comité note avec préoccupation que les actes de violence contre les femmes et les filles, la violence domestique, la mutilation génitale féminine ou encore le harcèlement sexuel, ne sont toujours pas explicitement interdits par la législation de l’État partie, en dépit des précédentes recommandations du Comité. Le Comité note également avec préoccupation que d’autres actes tels que le viol conjugal et le repassage des seins ne sont pas sanctionnerpar la législation de l’État partie. Le Comité regrette en outre l’absence d’information fiable sur l’ampleur de ces phénomènes dans l’État partie (art. 10).

Le Comité recommande vivement à l’État partie d’accélérer le processus de révision et d’adoption des lois visant à renforcer le cadre législatif de la lutte contre la violence à l’en contre d es femmes et d es filles et de veiller à ce que la violence domestique, la mutilation génitale féminine et le harcèlement sexuel , tout comme le repassage des seins et le viol conjugal, soient réprimés par le Code pénal et que les auteurs soient poursuivis. Le Comité recommande également que des campagnes de sensibilisation nationale soient lancées pour combattre toutes les formes de violence faites aux femmes et aux filles. Le Comité demande à l’État partie d’inclure dans son prochain rapport des renseignements sur l’ampleur des différentes formes de la violence contre les femmes et les filles, ainsi que des statistiques sur les poursuites engagées et les condamnations prononcées.

Le Comité reste préoccupé du fait qu’en dépit des efforts déployés par l’État partie, qui ont permis de réduire la pauvreté dans les villes, celle-ci s’est aggravée dans les zones rurales et dans les régions d’Adamaoua, l’Est, le Nord et l’Extrême Nord.(art. 11).

Le Comité recommande à l’État partie d’intensifier sa lutte contre la pauvreté , e n particulier dans les zones rurales et dans les régions défavorisées et marginalisées. Le Comité recommande également à l’État partie de s’attacher particulièrement aux droits des plus démunis , notam ment d es femmes et d es enfants, ainsi que d es autres groupes défavorisés et marginalisés . À cet effet, il renvoie l’État partie à sa déclaration sur la pauvreté et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (E/C.12/2001/10). Le Comité prie l’État partie de lui fournir, dans le prochain rapport périodique, des informations sur la part du budget public investi dans la lutte contre la pauvreté dans les régions défavorisées ainsi que des données comparatives et ventilées par sexe, région et zone urbaine/rurale sur le taux d’incidence de la pauvreté.

Le Comité constate avec préoccupation la pénurie de logements dans l’État partie, estimée à environ600000 logements dans les villes. Le Comité note également avec inquiétude que 70 pour cent des ménages situés en zone urbaine vivent dans des quartiers sous-structurés.En outre,tout en notant les différents projets de construction et d’aménagement de parcelles, le Comité regrette de ne pas avoir reçude renseignements sur l’existence d’une stratégie nationale de logement (art. 11).

Le Comité recommande à l’État partie de mettre en place une stratégie nationale et un plan d’action en vue de garantir le droit à un logement décent et de veiller à ce que la construction de nouveaux logements sociaux soit destiné e prioritairement aux personnes et groupes défavorisés et marginalisés, notamment aux habitants des taudis. Le Comité recommande en outre à l’État partie d’augmenter sensiblement le budget national alloué au logement de façon à faire face à l’ampleur du problème. Le Comité attire l’attention de l’État partie sur son observation générale n° 4 (1999) sur le droit à un logement suffisant.

Le Comité prend noteavec préoccupation du nombre élevé des cas d’expulsion forcée et de démolition de logements portés à sa connaissance. Dans les cas en question, les personnes n’ont été ni averties suffisamment à l’avance ni correctement indemnisées ou relogées. Le Comité regrette que l’État partie ne lui ait pas fourni les détails du décret n° 2008/0738/PM du 23 avril 2008 portant organisation des procédures et modalités de l’aménagement foncier, ni de renseignements sur les voies de recours accessibles aux personnes concernées(art. 11).

Le Comité engage l’État partie à veiller à ce que le cadre juridique réglementant la conduite de s projets d’urbanis me garantisse une indemnisation ou un relogement approprié en cas d’expulsion , ainsi que l’accès des personnes concernées aux voies de recours . Par ailleurs, l e Comité exhorte l’État partie à veiller à ce qu e, dans la pratique, personne ne se retrouve sans toit à la suite d’ une expulsion. À cet égard, le Comité renvoie l’État partie à son observation générale n° 7 (1997) sur les expulsions forcées.

Le Comité observe avec préoccupation que le régime foncier de l’État partie n’est plus adapté au contexte économique et culturel du pays, et qu’ilrend certaines populations autochtones ainsi queles petits exploitants agricoles vulnérables à l’accaparement de la terre. Le Comité est également préoccupé par les obstacles mis à l’accès à la propriété foncière, en particulier des femmes, tels que les montants prohibitifs des taxes sur les transactions foncières(art. 11, par. 1, al. 2).

Le Comité invite instamment l’État partie à accélérer le processus de refonte du régime foncier , à veiller à ce que le droit aux terres ancestrales et au x terres communautaires soit garanti aux populations autochtones et aux petits producteurs, et à faire en sorte que les obstacles mis à l’accès au titre foncier soient levés , en particulier en ce qui concerne les femmes.

Tout en prenant note de l’amélioration de l’accès à l’eau potable dans l’État partie et duprogramme d’adduction d’eau et d’électrification en cours dans les zones rurales, le Comité constate avec préoccupation qu’une grande proportion de la population rurale n’en bénéficie toujours pas. Le Comité relève également le coût élevé de l’eau et de l’installation d’un branchement individuel au réseau public ainsi que la proportion élevée d’enfants contraints de participer à la collecte d’eau potable.(art. 11, 10).

Le Comité exhorte l’État partie à redoubler d’effort s pour améliorer l’accès à l’eau potable , particulièrement dans les zones rurales. Il recommande en outre à l’État partie de prendre les mesures nécessaire s pour améliorer l’approvisionnement en eau dans les logements ainsi que de veiller à ce que les 70 000 branchements sociaux prévus bénéficient aux groupes les plus défavorisés. Le Comité appelle l’attention de l’État partie sur son observation générale n° 15 (2002) sur le droit à l’eau. Il recommande également à l’État partie de sensibiliser la population au fait que le s enfants compromettent gravement leur santé en transport ant de s grandes cruches d’eau .

Le Comité juge préoccupante l’insécurité alimentaire qui sévit dans la région septentrionale de l’État partie ainsi que le fort taux de malnutrition dans le pays. Il constate également avec inquiétude l’augmentation desprix et la pénurie récurrente ou occasionnelle de certaines denrées alimentaires, malgré les efforts consentispar l’État partie, tels que le subventionnement de certains produits ou la négociation des prix avec les distributeurs (art. 11).

Le Comité invite instamment l’État partie à prendre les mesures nécessaires pour protéger le droit à une alimentation suffisante, notamment à mett re en place un système public de distribution de denrées alimentaires aux régions et aux groupes les plus défavorisés et les plus marginalisés. Par ailleurs, il exhorte l’État partie à s’attaquer aux problèmes structurels de l’insécurité alimentaire, tels que la sécurité foncière d es petits producteurs, le transport et la distribution des denrées alimentaires, ou encore la disponibilité du crédit agricole. Le Comité renvoie l’État partie à son observation générale n° 12 (1999) sur le droit à une nourriture suffisante et aux D irectives volontaires à l’appui de la concrétisation progressive du droit à une alimentation adéquate dans le contexte de la sécurité alimentaire nationale, adoptées par l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture.

Le Comité se déclare encore préoccupé par l’insuffisance des politiques mises en œuvre par l’État partie en vue de réduire la mortalité infantile et maternelle. Par ailleurs, ildéplore que le nombre des grossesses reste élevé parmiles adolescentes et surtout que 20 pourcent des avortements pratiqués sur les adolescentes se fassent de manière clandestine,ce qui met leur santé et leur vie en danger.(art. 12, 10).

Le Comité invite instamment l’État partie à prendre toutes les mesures nécessaires pour réduire la mortalité infantile et maternelle et faciliter l’accès des femmes et des adolescentes aux services de santé sexuelle et de procréation, y compris au planning familial et à l’information sur le contrôle des naissances. Le Comité engage également l’État partie à évaluer l’adéquation et l’efficacité de l a législation visant à préven ir la mortalité maternelle due à un avortement clandestin.

Le Comité note avec préoccupation que des médicaments de mauvaise qualité sont vendus sur le marché informel faute de produits à des prix accessibles. (art. 12).

Le Comité exhorte l’État partie à prendre des mesures adéquates pour démanteler le réseau informel d’approvisionnement et de distribution de médicaments de mauvaise qualité et à fournir un plus grand accès aux médicaments génériques. Le Comité appelle l’attention de l’État partie sur son o bservation générale n o  14 (2000) sur le droit au meilleur état de santé susceptible d’être atteint.

Le Comité note avec préoccupation lafréquence des épidémies de choléra,qui est liée à un mauvaisassainissement, en dépit des efforts accomplis par l’État partie pour les contenir. Le Comité relève d’ailleurs que selon les données produites par l’Institut national de la statistique du Cameroun, seuls 14,2 pourcent des ménages ruraux disposent de toilettes décentes(art. 12, 11).

Le Comité exhorte l’État partie à redoubler d’ efforts pour prévenir le choléra et à développer les services publics d’assainissement , de traitement des déchets et d ’approvisionnement en eau salubre , particulièrement dans les zones rurales – écoles comprises . En outre, il recommande à l’État partie de prendre les mesures nécessaires pour améliorer l’accès à des installations sanitaires adéquates. L’État partie est invité à fournir dans son prochain rapport périodique des renseignements sur la mise en œuvre de cette recommandation ainsi que sur le pourcentage d’écoles dotées de toilettes décentes et séparées. Le Comité renvoie l’État partie à sa déclaration sur le droit à l’assainissement (2011).

Le Comité juge préoccupant le taux élevé de séroprévalence du VIH dans l’État partie, en dépit de la baisse de ce taux tout au long de ces dernières années suite aux mesures prises (art. 12).

Le Comité recommande à l’État partie de poursuivre ses efforts en vue d’améliorer l’accès, la disponibilité et la qualité des services de prévention du sida tout en développant les services de traitement , surtout dans les zones rurales , et en prêtant une attention particulière aux groupes vulnérables, tels que les femmes, les jeunes et les enfants, ainsi qu ’aux groupes à risque, comme les travailleuses du sexe et les détenus. Le Comité demande également à l’État partie de sensibiliser les personnes vivant avec le VIH/ sida à leurs droits humains et aux lois qui les protègent.

Le Comité note avec préoccupation le niveau de tabagisme élevé dans l’État partie, en dépit des mesures prises pour diminuer la consommation de tabac (art. 12).

Le Comité recommande à l’État partie d’élaborer des politiques publiques efficaces pour lutter contre la consommation de tabac, de durcir l’interdiction de publicité des produits du tabac , de promulguer des lois faisant de tous les espaces publics fermés des zones strictement non ‑fumeurs et d’intensifier l es campagnes de sensibilisation. Il recommande également à l’État partie d’allouer une partie des recettes provenant des taxes sur les cigarettes aux efforts pour lutte r contre le tabagisme.

En dépit de l’introduction de la gratuité de l’enseignement public fondamental, le Comité est inquiet devant lemontant élevé des frais annexes d’éducationque doivent acquitter les parents au moment de l’inscription des élèves, notamment les frais de l’Association des parents d’élèves. Le Comité est également inquiet de l’inégalité d’accès à l’éducation primaire dans les régions d’Adamaoua, de l’Extrême Nord et du Nord, où les filles sont moins scolarisées. Par ailleurs, le Comité relève que même si l’État partie a amélioré le taux de scolarisation des enfants, les taux faibles de rétention dans l’enseignement fondamental et dans l’enseignement de transition à l’enseignement secondaire restent au cœur du problème du travail des enfants. Le Comité relève en outre que seulement 5 pour cent de la population accède à l’enseignement supérieur(art. 13 à 14).

Le Comité recommande à l’État partie de veiller à ce que l’éducation soit gratuite et accessible à tous dans des conditions d’égalité . Il recommande à l’État partie d’ accorder aux familles à faible revenu une aide financière qui couvre les dépenses associées à l’éducation. Le Comité souligne également le besoin de renforcer les mesures visant à réduire le taux d’abandon scolaire. En outre, il exhorte l’État partie à développer l’accès à l’enseignement supérieur afin d’apporter au marché du travail les capacités nécessaire s à la croissance du pays. Le Comité rappelle à l’État partie son observation générale n º 13 (1999) sur le droit à l’éducation.

Le Comité est préoccupé par le fait qu’en dépit de sa reconnaissance des droits culturels des peuples autochtones qui vivent sur son territoire, consacrée par sa législation, l’État partie a déplacé certaines communautés, telles que la communauté pygmée Baka et la communauté Mbororo, hors de leurs terres ancestrales et octroyées ces dernières à des tiers à des fins d’exploitation forestière, forçant lesdites communautés à s’adapter à d’autres formes de culture qui prévalent dans le pays (art. 15).

Le Comité recommande à l’État partie d’adopter des mesures efficaces pour protéger le droit de chaque peuple autochtone à se s terres ancestrales et aux ressources naturelles qui s’y trouvent , et de veiller à ce que l es programmes nationaux de développement respecte nt le principe de participation et la protection d e l’identité distinctive culturelle de chacun de ces peuples. À cet égard, l e Comité renvoie l’État partie à son observation générale n º 21 (2009) sur le droit de chacun de participer à la vie culturelle.

Le Comité encourage l’État partie à envisager de signer et de ratifier le Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.

Le Comité encourage l’État partie à envisager de ratifier le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradant, le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, de même que le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés, la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, la Convention relative aux droits des personnes handicapées et le Protocole facultatif s’y rapportant, et la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées. Le Comité invite également l’État partie à signer et à ratifier le deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, visant à abolir la peine de mort.

Le Comité encourage l’État partie à collaborer pleinement avec le Rapporteur spécial chargé d’examiner la question des obligations en rapport avec les droits de l’homme qui concernent l’accès à l’eau potable et à l’assainissement et le Rapporteur spécial sur le droit à l’alimentation lors des prochaines missions de ces derniers au Cameroun. Le Comité encourage également l’État partie à envisager d’inviter la Rapporteuse spéciale sur l'extrême pauvreté et les droits humains à se rendre sur place et d’adresser des invitations à d’autres rapporteurs spéciaux s’occupant des droits économiques, sociaux et culturels, afin de bénéficier de leur expertise au moment d’élaborer des politiques répondant aux préoccupations du Comité.

Le Comité recommande vivement à l’État partie de continuer à collaborer avec le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, les institutions spécialisées et les programmes pertinents des Nations Unies pour assurer l’exercice des droits économiques, sociaux et culturels conformément aux obligations qu’il a contractées en vertu du Pacte, donner suite aux présentes observations finales et préparer son prochain rapport.

Le Comité demande à l’État partie de diffuser largement les présentes observations finales à tous les niveaux de la société, en particulier de la fonction publique, du pouvoir judiciaire et des organisations de la société civile, et de l’informer, dans son prochain rapport périodique, des mesures qu’il aura prises pour les mettre en œuvre. Il encourage l’État partie à continuer d’associer les organisations de la société civile au processus de discussion au niveau national avant la présentation de son prochain rapport périodique.

Le Comité invite l’État partie à mettre à jour son document de base conformément aux directives harmonisées concernant les rapports, telles qu’approuvées par les organes de surveillance des traités internationaux relatifs aux droits de l’homme.

Le Comité demande à l’État partie de présenter son prochain rapport périodique conformément aux directives adoptées par le Comité en 2008 (E/C.12/2008/2), d’ici le 2 décembre 2016.