NATIONS UNIES

E

Conseil Économique et Social

Distr. GENERALE

E/C.12/NLD/CO/3/Add.1

31 janvier 2008

Original: FRANCAIS

COMITÉ DES DROITS ÉCONOMIQUESSOCIAUX ET CULTURELSTrente-huitième sessionGenève, 30 avril - 18 mai 2007

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT AUX ARTICLES 16 ET 17 DU PACTE

Observations finales du Comité des droits économiques, sociaux et culturels

ANTILLES NÉERLANDAISES

Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a examiné le troisième rapport périodique du Royaume des Pays-Bas concernant les Antilles néerlandaises sur l’application du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (E/C.12/ANT/3) à ses 9ème et 10èmeséances, tenues le 4 mai 2007 (E/C.12/2007/SR.9 et 10), et a adopté à ses 21ème, 22ème et 23ème séances, tenues les 14 et 15 mai 2007, les observations finales ci-après.

A. Introduction

GE.08-40364Le Comité se félicite de la présentation du troisième rapport périodique de l’État partie sur les Antilles néerlandaises, qui a été établi conformément à ses directives et contient des informations pratiques sur la mise en œuvre du Pacte. Il accueille avec satisfaction les réponses écrites fournies à la liste des points à traiter (E/C.12/ANT/Q/3/Add.1), mais regrette que ces dernières n’aient pas été transmises suffisamment à l’avance pour permettre leur traduction dans les langues de travail du Comité. Le Comité note le dialogue ouvert et constructif qui s’est instauré avec la délégation de l’État partie et les efforts que celle-ci a accomplis pour répondre oralement aux questions posées.

B. ASPECTS POSITIFS

Le Comité note avec satisfaction que des mesures ont été prises pour introduire des dispositions pénalisant la violence domestique dans le nouveau Code pénal des Antilles néerlandaises

Le Comité salue l’introduction en 2000 dans la législation du travail de nouvelles dispositions protectrices des travailleurs, notamment en cas de maladie, de grossesse et de maternité, et de participation à des activités syndicales.

Le Comité salue les mesures visant à augmenter la durée de l’enseignement obligatoire et à lutter contre l’abandon scolaire.

Le Comité note avec satisfaction la décision récente des autorités d’ajouter aux langues officielles des Antilles néerlandaises le papiamento, en plus du néerlandais et de l’anglais.

C. FACTEURS ET DIFFICULTÉS ENTRAVANT L’APPLICATION DU PACTE

Le Comité note l’absence de facteurs ou difficultés substantiels entravant l’application effective du Pacte dans l’État partie.

D. PRINCIPAUX SUJETS DE PRÉOCCUPATION

Le Comité note avec préoccupation que les diverses autorités des Antilles néerlandaises n’ont pas pleinement conscience de l’importance des obligations internationales découlant du Pacte.

Le Comité regrette que peu de progrès aient été accomplis en matière d’applicabilité directe des droits énoncés dans le Pacte. Il prend note de l’information selon laquelle ces droits ne peuvent être appliqués directement par les tribunaux que dans la mesure où ces derniers jugent possible une telle application. Le Comité s’inquiète du fait que l’État partie considère ainsi que la plupart des droits économiques, sociaux et culturels ne sont pas susceptibles d’applicabilité directe. Le Comité regrette en outre qu’aucun exemple n’ait pu lui être fourni.

Le Comité est préoccupé par le taux de chômage élevé aux Antilles néerlandaises, en particulier par celui des jeunes qui atteignait 37 % en 2006.

Le Comité regrette de n’avoir pas reçu d’informations précises au sujet de mesures telles que l’abolition de l’obligation pour la plupart des industries de Curaçao d’obtenir des autorisations pour licencier, l’aménagement du temps de travail en vue d’une plus grande flexibilité et l’introduction de contrats de travail de courte durée, et sur l’impact de ces mesures sur la situation de l’emploi.

Le Comité regrette de n’avoir pas reçu d’informations suffisantes sur la question de savoir si les salaires minimaux procurent aux travailleurs et à leur famille une existence décente.

Le Comité est préoccupé par l’absence de mesures, législatives ou autres, adoptées aux Antilles néerlandaises en vue d’assurer le droit à une rémunération égale pour un travail de valeur égale. Le Comité est préoccupé par les différences considérables existant entre le salaire moyen des hommes et des femmes; ces dernières gagnant environ 27,4 % de moins que les hommes. Il note avec préoccupation que les Antilles néerlandaises ne considèrent pas cette situation comme étant le reflet d’une discrimination envers les femmes

Le Comité note que le droit de grève est reconnu dans l’État partie, mais regrette que celui-ci n’ait pas clarifié les raisons du maintien de la réserve apportée à l’alinéa d du premier paragraphe de l’article 8 du Pacte pour les Antilles néerlandaises.

Le Comité regrette de n’avoir pas reçu de statistiques ventilées par sexe et par âge sur les différentes catégories de travailleurs couverts par le système de sécurité sociale, ni de renseignements sur les mesures prises en vue d’élargir cette protection aux personnes qui en sont exclues. Il s’inquiète des informations selon lesquelles le pourcentage de la population couverte par la sécurité sociale est très faible.

Le Comité s’inquiète du fait que les montants des allocations de sécurité sociale sont insuffisants pour permettre aux bénéficiaires de lutter contre la pauvreté. Le Comité s’inquiète aussi des informations selon lesquelles l’assistance sociale n’est pas accordée à tous ceux qui en ont besoin de façon à leur assurer un niveau de vie suffisant.

Le Comité s’inquiète de la situation particulièrement difficile des familles monoparentales, qui ne reçoivent pas une assistance adéquate.

Le Comité est préoccupé par des informations selon lesquelles les services de garde d’enfants demeurent insuffisants, en particulier sur les Îles du Vent néerlandaises.

Le Comité s’inquiète du fait que seulement les fonctionnaires et les professeurs ont droit aux allocations familiales.

Le Comité est profondément préoccupé par le taux des grossesses précoces qui serait élevé aux Antilles néerlandaises, celles-ci ayant des conséquences néfastes sur les droits à l’éducation et à la santé des adolescentes. Le Comité est également préoccupé par les taux d’avortement parmi les adolescentes. Il regrette que l’État partie n’ait pas présenté des informations suffisantes sur les mesures adoptées pour faire face à ces phénomènes.

Le Comité est préoccupé par l’absence d’un système d’enregistrement commun pour les cas d’exploitation sexuelle et les autres abus contre les enfants aux Antilles néerlandaises, ce qui rend toute évaluation de la situation difficile. Il s’inquiète en outre du manque de renseignements spécifiques relatifs à la protection juridique des garçons contre l’exploitation sexuelle, en particulier en ce qui concerne les dispositions pénales en matière de viol.

Le Comité note avec préoccupation qu’en dépit des assurances des autorités des Antilles néerlandaises selon lesquelles la lutte contre la pauvreté est l’une de leurs priorités, il n’a pas encore été établi un seuil officiel de pauvreté qui indiquerait l’étendue de la pauvreté aux Antilles néerlandaises. En outre, le Comité est préoccupé par le fait que les droits économiques, sociaux et culturels n’ont pas encore été intégrés aux programmes de réduction de la pauvreté des Antilles néerlandaises.

E. Suggestions et recommandations

Le Comité attire à nouveau l’attention de l’État partie sur son observation générale no 3 (1990), relative à la nature des obligations des États parties, et l’invite à réexaminer la question de la possibilité d’appliquer directement les dispositions du Pacte. Il recommande que des formations spécifiques relatives à la justiciabilité des droits économiques, sociaux et culturels et aux possibilités d’application directe des droits énoncés dans le Pacte soient mises en place à l’intention des juges et des avocats.

Le Comité recommande à l’État partie d’assurer la pleine intégration des droits économiques, sociaux et culturels dans la nouvelle Constitution de Curaçao, à égalité avec les droits civils et politiques.

Le Comité recommande que soit établie dans les îles des Antilles néerlandaises une institution indépendante relative aux droits de l’homme. Il recommande également que soit adopté et mis en œuvre un plan d’action pour les droits de l’homme tenant pleinement compte les droits énoncés dans le Pacte.

Le Comité recommande l’adoption dans un avenir proche d’une ordonnance relative à l’égalité de traitement aux Antilles néerlandaises.

Le Comité recommande l’adoption de mesures permettant la protection effective et adéquate des droits économiques, sociaux et culturels des demandeurs d’asile et des réfugiés.

Le Comité recommande à l’État partie d’assurer l’entrée en vigueur et la mise en œuvre effective, dans les meilleurs délais, des dispositions pénalisant la violence domestique qui seront introduites dans le nouveau code pénal.

Le Comité demande instamment à l’État partie de redoubler d’efforts dans la lutte contre le chômage par l’exécution de programmes ciblés, notamment pour les jeunes. Des renseignements détaillés sur l’effectivité des mesures ainsi adoptées, de même que des données statistiques sur le chômage, ventilées sur une base comparative, devraient être inclues dans le prochain rapport périodique.

Le Comité recommande à l’État partie d’évaluer l’impact des modifications apportées à la législation du travail sur les droits des travailleurs au regard des articles 6 et 7 du Pacte et de l’observation générale n° 18 (2005) concernant le droit au travail (article 6).

Le Comité recommande que les divers salaires minimaux soient suffisamment élevés pour procurer aux travailleurs et à leur famille une existence décente, conformément à l’alinéa a ii) de l’article 7 du Pacte, et souhaite recevoir de plus amples renseignements à ce propos dans le prochain rapport. Le Comité encourage également l’État partie à éliminer entièrement les différences entre les diverses catégories de salaire minimal dans un bref délai.

Le Comité demande instamment à l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires, notamment législatives, pour assurer la mise en œuvre immédiate du principe de rémunération égale pour un travail de valeur égale. Il attire à ce sujet l’attention de l’État partie sur son observation générale 16 (2005) relative au droit égal de l’homme et de la femme au bénéfice de tous les droits économiques, sociaux et culturels (article 3).

Le Comité recommande à l’État partie d’envisager plus sérieusement le retrait de la réserve apportée à l’alinéa d du premier paragraphe de l’article 8 du Pacte.

Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer le droit de toute personne à la sécurité sociale. L’État partie devra effectuer une étude approfondie sur les personnes qui en sont exclues, en indiquant les raisons de cette exclusion, et sur les résultats des mesures prises pour faire face à cette situation, et l’inclure dans le prochain rapport périodique.

Le Comité encourage l’État partie à accorder l’assistance sociale à tous ceux qui en ont besoin, en particulier aux personnes et groupes les plus défavorisés et marginalisés pour qu’ils puissent atteindre un niveau de vie suffisant.

Le Comité recommande que l’État partie adopte des mesures spécifiques de protection des familles monoparentales, incluant des allocations familiales, des services de garde pour les enfants et une assistance financière, de façon à assurer le droit de ces familles à un niveau de vie suffisant, à une protection adéquate et à l’éducation de leurs enfants.

Le Comité demande instamment que soit adoptée une politique nationale en matière de services de garde d’enfants. Une telle politique devrait notamment s’attacher à garantir l’existence de ces services en nombre suffisant dans l’ensemble des îles des Antilles néerlandaises.

Le Comité encourage l’État partie à élargir les catégories couvertes par les allocations familiales de sorte que toutes les familles ayant des enfants à charge puissent en bénéficier.

Le Comité demande à l’État partie de fournir des renseignements détaillés, y compris des statistiques, sur les grossesses précoces et les avortements parmi les adolescentes, de même que sur les mesures adoptées pour répondre à ces phénomènes.

Le Comité recommande à l’État partie d’adopter des mesures de protection des enfants, y compris les garçons, contre l’exploitation sexuelle, la violence et toute autre forme d’abus. Un système d’enregistrement commun des cas de maltraitance devrait être créé aux Antilles néerlandaises.

Le Comité recommande que soit établi un seuil officiel de pauvreté aux Antilles néerlandaises et que les droits économiques, sociaux et culturels soient intégrés aux programmes de réduction de la pauvreté mis en place aux Antilles néerlandaises. À cet égard, le Comité renvoie l’État partie à sa déclaration sur « La pauvreté et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels » (E/C.12/2001/10).

Le Comité encourage l’État partie à poursuivre ses efforts en matière de lutte contre l’abandon scolaire.

Le Comité demande que des informations plus précises lui soient fournies dans le prochain rapport périodique sur la composition ethnique de la population des Antilles néerlandaises et sur l’exercice des droits culturels par les personnes et par les groupes

Le Comité demande à l’État partie de traduire le Pacte et les présentes observations finales en papiamento et en néerlandais, et de les diffuser largement dans toutes les couches de la

société, en particulier auprès des fonctionnaires de l’État et des membres de l’appareil judicaire, et de l’informer dans son prochain rapport périodique de toutes les mesures qu’il aura prises pour y donner suite. Il encourage également l’État partie à associer des organisations non gouvernementales et d’autres membres de la société civile au processus de discussion engagée au niveau national avant la présentation de son prochain rapport périodique.

Le Comité invite l’État partie à mettre à jour son document de base conformément aux exigences des directives harmonisées en matière d’établissement des rapports, relatives au document de base commun, telles que récemment approuvées par les organes de supervision des traités internationaux relatifs aux droits de l’homme.

Le Comité rappelle à l’État partie que la soumission de son quatrième rapport périodique est due au 30 juin 2007. Toutefois, compte tenu du fait que l’examen du rapport sur les Antilles néerlandaises a eu lieu en mai 2007, le Comité décide d’offrir un délai supplémentaire à l’État partie. Il invite ce dernier à soumettre son quatrième rapport périodique, relatif à tous les territoires composant le Royaume des Pays-Bas, pour le 30 juin 2008, et lui demande d’y inclure des renseignements détaillés sur les mesures qu’il aura prises pour donner suite aux recommandations formulées dans les présentes observations finales.

-----