Nations Unies

E/C.12/UZB/CO/2

Conseil économique et social

Distr. générale

13 juin 2014

Français

Original: anglais

Comité des droits économiques, sociaux et culturels

Observations finales concernant le deuxième rapport périodique de l’Ouzbékistan *

Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a examiné le deuxième rapport périodique de l’Ouzbékistan (E/C.12/UZB/2) à ses 23e et 24e séances, tenues le 13 mai 2014 (E/C.12/2014/SR.23et 24), et a adopté, à sa 40e séance, tenue le 23 mai 2014, les observations finales ci-après.

A.Introduction

Le Comité accueille avec satisfaction la soumission du deuxième rapport périodique de l’Ouzbékistan, qui comporte des informations sur les mesures prises pour donner suite à un certain nombre de recommandations formulées dans les précédentes observations finales du Comité (E/C.12/UZB/CO/1). Il prend note avec satisfaction des réponses écrites à la liste des points (E/C.12/UZB/Q/2/Add.1) et des informations complémentaires données par la délégation de haut niveau de l’État partie au cours de l’examen du rapport.

B.Aspects positifs

Le Comité se félicite que, depuis l’examen du rapport initial, l’État partie ait ratifié les instruments internationaux ci-après:

a)Les Protocoles facultatifs à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés, et concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants (2008);

b)Le Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants (2008);

c)La Convention des Nations Unies contre la corruption (2008);

d)La Convention-cadre de l’Organisation mondiale de la Santé pour la lutte antitabac (2012);

e)Les Conventions de l’Organisation internationale du Travail (OIT) no 182 (1999) concernant l’interdiction des pires formes de travail des enfants et l’action immédiate en vue de leur élimination (2008), et no 138 de (1973) concernant l’âge minimum d’admission à l’emploi (2009).

Le Comité prend note avec satisfaction des efforts déployés par l’État partie pour concevoir et adopter des textes législatifs, des politiques et des programmes donnant suite aux recommandations du Comité, notamment de:

a)L’adoption de plans nationaux d’action visant à donner effet aux recommandations formulées par le Comité suite à l’examen du rapport initial de l’État partie en 2005, et à mettre en œuvre les Conventions nos 182 et 138 de l’OIT; l’adoption du programme par pays de promotion du travail décent de l’OIT (2014); la modification de l’âge minimum d’admission à l’emploi, qui a été porté de 14 à 15 ans dans le Code du travail, et la mise en place d’un système de surveillance interinstitutions visant à prévenir le travail forcé;

b)La participation au Plan d’action anticorruption d’Istanbul adopté dans le cadre du réseau anticorruption pour l’Europe orientale et l’Asie centrale (2010) et la constitution d’un groupe de travail chargé d’élaborer une loi contre la corruption;

c)L’adoption du nouveau texte de loi sur la protection sociale des personnes handicapées (11 juillet 2008) et de la loi sur la protection de l’environnement (2013);

d)La criminalisation de la traite (art. 135 du Code pénal); l’adoption de la loi sur la lutte contre la traite des êtres humains (2008) et d’un plan national d’action dans ce domaine; l’incorporation dans le Code du travail de garanties en matière d’emploi pour les victimes de la traite;

e)L’adoption de mesures entraînant une diminution de l’extrême pauvreté, qui est passée de 27 % en 2008 à 15 % en 2012;

f)L’adoption de la stratégie d’amélioration de l’alimentation (2009-2011) et l’adhésion à la Charte européenne sur la lutte contre l’obésité et la Déclaration de Vienne sur la nutrition et les maladies non transmissibles;

g)L’adoption de mesures ayant abouti à une diminution notable de la mortalité infantile et de la mortalité maternelle;

h)La réalisation d’un inventaire des sites appartenant au patrimoine culturel tous les cinq ans.

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Justiciabilité des droits énoncés dans le Pacte

Le Comité regrette que, selon les informations données par l’État partie, les tribunaux nationaux n’invoquent pas directement le Pacte, bien qu’ils aient la compétence pour le faire en vertu de la législation nationale (art. 1er).

Le Comité demande instamment à l’État partie de veiller à ce que les dispositions du Pacte soient invoquées devant les tribunaux nationaux et appliqué e s par ceux-ci, notamment en sensibilisant les titulaires de droits et les autorités chargées de leur application. Il renvoie l’État partie à son Observation générale n o  9 (1998) sur l’application du Pacte au niveau national. Il invite l’État partie à faire figurer, dans son prochain rapport périodique, des informations sur les décisions des tribunaux donnant effet aux droits énoncés dans le Pacte.

Indépendance du pouvoir judiciaire

Le Comité demeure préoccupé par les informations selon lesquelles le pouvoir judiciaire ne serait pas totalement indépendant, notamment parce que les magistrats sont nommés pour un mandat de cinq ans qui est renouvelé par le pouvoir exécutif (art. 1er).

Le Comité recommande à l’État partie de veiller à ce que le pouvoir judiciaire soit totalement indépendant et impartial, afin de garantir une bonne utilisation des ressources et la réalisation des droits énoncés dans le Pacte, notamment en instaurant le principe de l’inamovibilité des juges; en créant un organe indépendant chargé de nommer, de promouvoir, de suspendre et de révoquer les magistrats du siège; et en adoptant le projet de code sur la déontologie judiciaire de 2011 . Il renvoie l’État partie aux Principes fondamentaux relatifs à l’indépendance de la magistrature.

Institutions nationales des droits de l’homme

Le Comité regrette que l’État partie n’ait pas encore créé d’institution nationale des droits de l’homme indépendante qui soit pleinement conforme aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris), tout en prenant note avec intérêt des activités exécutées par le Médiateur parlementaire, en particulier l’examen des plaintes relatives aux droits économiques, sociaux et culturels et les propositions législatives y afférentes (art. 1er).

Le Comité demande instamment à l’État partie de mettre en place une institution nationale des droits de l’homme conforme aux Principes de Paris qui soit indépendante et bénéficie de ressources suffisantes, notamment en renforçant l’institution du Médiateur parlementaire, et d’adopter des mesures visant à obtenir son accréditation auprès du Comité international de coordination des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme. Il encourage l’État partie à demander l’aide du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme pour mettre en œuvre les présentes recommandations visant à renforcer l’institution nationale des droits de l’homme.

Corruption

Le Comité est préoccupé par la persistance et l’ampleur de la corruption dans l’État partie, en particulier en ce qui concerne l’accès aux soins de santé, à l’éducation et à l’enregistrement du lieu de résidence, qui entrave la bonne utilisation des ressources de l’État partie et la mise en œuvre du Pacte.

Le Comité recommande à l’État partie de mettre en place une politique et un mécanisme d’ensemble pour combattre et prévenir la petite corruption et la corruption systémique, notamment en:

a) Simplifiant l’adoption du projet de loi, du programme national et des plans d’action contre la corruption, ainsi que les codes de conduite des institutions publiques;

b) Favorisant un système transparent de surveillance de la corruption, surtout dans les domaines de la santé, de l’éducation et de l’enregistrement du lieu de résidence, et en s’assurant que les affaires de corruption sont dûment instruites et que des sanctions proportionnées sont infligées dans les meilleurs délais aux responsables;

c) Veillant à ce que des mécanismes sûrs, accessibles et visibles soient disponibles pour dénoncer la corruption, en particulier dans les domaines de la santé, de l’éducation et de l’enregistrement de la résidence, et en assurant une protection efficace aux militants anticorruption et aux défenseurs des droits de l’homme concernés ;

d) Formant les dirigeants politiques, les législateurs, les magistrats, les agents des forces de l’ordre, les fonctionnaires et le personnel de s service s public s , surtout dans les domaines de l’éducation, de la santé et de l’enregistrement du lieu de résidence, à la déontologie et au coût économique et social de la corruption;

e) Menant des campagnes de sensibilisation.

Non-discrimination et égalité

Le Comité s’inquiète de ce que la législation nationale ne protège pas pleinement de la discrimination fondée sur l’ensemble des motifs interdits par le Pacte. Il est aussi préoccupé par l’absence de cadres législatif et directif pour la protection des droits des minorités ethniques et des nomades, et par les incidences de l’enregistrement obligatoire du lieu de résidence («propiska»), à laquelle sont soumis les migrants internes pour accéder à l’emploi, à un logement et aux soins de santé. Il s’inquiète également de ce que les apatrides et les réfugiés résidant dans l’État partie ne pourraient exercer leurs droits économiques et sociaux fondamentaux, notamment accéder aux soins de santé, à l’éducation et à un emploi légal (art. 2, par. 2).

Le Comité prie l’État partie:

a) De veiller à ce que ses lois interdisent effectivement la discrimination et prévient des mécanismes protégeant contre la discrimination s’agissant des droits économiques, sociaux et culturels, conformément aux dispositions du Pacte, et à ce que des recours administratifs et judiciaires efficaces soient disponibles en cas de discrimination;

b) D’adopter des cadres législatifs et des directi ves visant à garantir la pleine jouissance des droits énoncés dans le Pacte, sans discrimination, à toutes les personnes résidant sur son territoire, quelle que soit leur origine ethnique ou nationale, conformément à l’Observation générale n o  20 du Comité sur la non ‑discrimination dans l’exercice des droits économiques, sociaux et culturels (2009) ;

c) De prendre des mesures efficaces pour s’assurer que la «propiska» ne limite pas l’accès aux droits économiques, sociaux et culturels et de tenir compte de l’expérience des États qui ont remplacé la «propiska» par un système conforme aux normes internationales relatives à la liberté de circulation;

d) De prendre des mesures pratiques, notamment législatives le cas échéant , afin de garantir que les apatrides et les réfugiés jouissent de leurs droits économiques, sociaux et culturels, notamment en ce qui concerne l’accès à un emploi légal, aux soins de santé et à l’éducation;

e) D’adhérer à la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés et au Protocole facultatif de 1967 y relatif, ainsi qu’à la Convention de 1954 relative au statut des apatrides et à la Convention de 1961 sur la réduction des cas d’apatridie.

Personnes handicapées

Le Comité s’inquiète de ce que le taux d’emploi des personnes handicapées est très faible, malgré les mesures prises pour stimuler l’emploi de ces personnes et de ce que des obstacles physiques peuvent les empêcher d’accéder aux services sociaux, au marché du travail et à l’éducation. Il est aussi préoccupé par l’absence de personnel formé dans les écoles et par l’inadéquation des programmes scolaires (art. 2, par. 2; art. 6 et 13).

Le Comité recommande à l’État partie de redoubler d’efforts afin de veiller à ce que l’accès des personnes handicapées à l’ensemble des services sociaux, notamment à l’école et à l’emploi , ne soit pas entravé, notamment en apportant des aménagements raisonnables à l’école et sur le lieu de travail. Il recommande aussi à l’État partie de ratifier, dans les meilleurs délais, la Convention relative aux droits des personnes handicapées signée en 2009.

Égalité entre hommes et femmes

Le Comité s’inquiète de ce que le projet de loi sur l’égalité des droits et des chances pour les femmes et les hommes n’a pas encore été adopté et de ce que les femmes demeurent sous-représentées dans l’administration de l’État, l’appareil judiciaire, le pouvoir exécutif et les autorités locales, surtout aux postes élevés. À ce propos, il note avec préoccupation que les stéréotypes traditionnels sur le rôle des hommes et des femmes dans la famille et dans la société portent préjudice à l’exercice des droits économiques, sociaux et culturels des femmes (art. 3, 6 et 13).

Le Comité recommande à l’État partie:

a) D’accélérer le processus d’adoption de la loi sur l’égalité des droits et des chances pour les femmes et les hommes, et de la faire connaître aux fonctionnaires, aux membres de l’appareil judiciaire et au public;

b) De poursuivre des politiques, de dispenser des formations et de mener des campagnes de sensibilisation visant à promouvoir la représentation des femmes dans des conditions d’égalité dans les organes publics et privés, surtout aux postes décisionnels de haut niveau;

c) De redoubler d’efforts afin de modifier la manière dont la société perçoit le rôle des hommes et des femmes, notamment en les sensibilisant à l’égalité des chances professionnelles que donnent l’enseignement et la formation dans des domaines autres que ceux où prédominent traditionnellement l’un ou l’autre sexe, et en promouvant le partage équitable des responsabilités familiales.

Emploi

Le Comité se félicite des mesures prises par l’État partie afin de stimuler l’emploi, surtout chez les femmes et dans les zones rurales, par le biais des petites entreprises, du travail à domicile et de la simplification de la réglementation des entreprises. Il demeure toutefois préoccupé par le sous-emploi, en particulier chez les nomades et dans le secteur agricole, par le taux de chômage élevé des femmes, par la persistance de l’écart de rémunération entre hommes et femmes et par le chômage généralisé dans le secteur informel. Il regrette qu’aucune information ne soit disponible sur l’ampleur du secteur informel et sur l’incidence des mesures prises pour protéger les droits des travailleurs de ce secteur (art. 3, 6 et 9).

Le Comité invite l’État partie à:

a) Prendre d es mesures pour réduire le sous- emploi, en particulier le taux de chômage élevé chez les femmes;

b) Redoubler d’efforts afin de réduire l’écart de rémunération entre les hommes et les femmes;

c) Régulariser progressivement la situation de tous les travailleurs du secteur informel et garantir leur couverture par les régimes en vigueur dans les domaines du travail et de la sécurité sociale;

d) Faire figurer, dans son prochain rapport périodique, des informations sur les pr ogrès accomplis afin de réduire l’importance du secteur informel, notamment sur le pourcentage de travailleurs et de «petites entreprises» concernées, ainsi que sur la question de savoir si les «petites entreprises» font l’objet d’inspections du travail et de sanctions administratives pour violation du droit des travailleurs à des conditions de travail justes et favorables.

Salaire minimum

Le Comité se félicite que le salaire minimum ait augmenté depuis 2006, mais regrette de ne pas avoir reçu d’informations suffisantes sur la mise en œuvre de cette augmentation et sur la question de savoir si celui-ci procure aux travailleurs et à leur famille une existence décente (art. 7).

Le Comité demande instamment à l’État partie:

a) De veiller à ce que le salaire minimum national soit périodiquement révisé et fixé à un niveau suffisant pour assurer à tous les travailleurs et à leur famille un niveau de vie décent;

b) De faire appliquer le salaire minimum dans les secteurs public et privé, notamment dans le secteur informel;

c) D’achever la mise en place de barèmes des salaires conformes au principe d’une rémunération égale pour un travail de valeur égale et de veiller à leur application dans tous les secteurs d’emploi;

d) D’accélérer le processus d’adoption du projet de loi de 2008 sur la rémunération au travail, contenant la définition du salaire minimum conformément aux dispositions de l’article 7 du Pacte, et de faire figurer, dans son prochain rapport périodique, des informations sur la portée du salaire minimum, sur les mécanismes d’application et leur efficacité.

Pauvreté

Le Comité s’inquiète de ce que, malgré la revalorisation annuelle des salaires, des pensions de retraite et des prestations sociales, une proportion considérable de la population ouzbèke vit en dessous du seuil de pauvreté surtout dans les zones rurales. Il est aussi préoccupé par les informations selon lesquelles le montant de la pension des retraités qui travaillent aurait été diminué. Il regrette l’absence d’informations sur l’ampleur de la pauvreté, ventilées par sexe, âge et district, et sur la mesure dans laquelle le montant révisé des salaires, des pensions de retraite, des allocations de chômage et des prestations d’aide sociale permet de jouir d’un niveau de vie suffisant. Il relève l’absence d’informations sur les conditions à remplir pour bénéficier de la sécurité sociale, sur le pourcentage de la population couverte ainsi que sur l’aide et les services dont bénéficient ceux qui ne le sont pas (art. 9 et 11).

Le Comité demande instamment à l’État partie de mettre en place un ensemble d’indicateurs fiables afin d’évaluer l’ampleur de la pauvreté dans le pays, notamment concernant la consommation de denr ées alimentaires et autres produits . L’État partie devrait redoubler d’efforts afin de fixer les pensions de retraite, les prestations de chômage et les autres prestations d’aide sociale à un montant suffisant pour que les bénéficiaires et leur famille jouissent d’un niveau de vie convenable. Les retraités qui travaillent devraient recevoir l’intégralité de leur pension de retraite. Le Comité recommande de calculer les prestations d’aide sociale en partant d’une évaluation exacte de la pauvreté, et de fixer des critères clairs et transparents pour l’admissibilité aux régimes de sécurité sociale. Il renvoie l’État partie à ses Observations générales n o  6 (1995) sur les droits économiques, sociaux et culturels des personnes âgées et n o  19 (2007) sur le droit à la sécurité sociale. Le Comité invite l’État partie à lui faire rapport, dans son prochain rapport périodique, sur les mesures prises dans ce domaine et sur leur incidence.

Migration de main-d’œuvre

Le Comité s’inquiète de ce que, malgré les efforts déployés pour lutter contre la traite des êtres humains, de nombreux Ouzbeks, en particulier des femmes et des enfants, travailleraient à l’étranger dans des conditions dangereuses, sans bénéficier d’une rémunération et d’une période de repos suffisantes, de protection sociale, de soins de santé ou d’un logement convenable (art. 7, 9 et 11).

Le Comité demande instamment à l’État partie:

a) D’évaluer les causes et l’ampleur de la migration des travailleurs ouzbeks, notamment en menant une étude au plan national , afin de prendre des mesures efficaces pour lutter contre ce phénomène, en particulier en multipliant les possibilités d’emploi décent dans l’État partie;

b) De renforcer le rôle de l’Agence pour la migration de main-d’œuvre relevant du Ministère du trav ail et de la protection sociale afin que les citoyens ouzbeks soient informés avant leur départ à l’étranger, ainsi que le rôle des accords bilatéraux et des consulats dans la protection des droits des travailleurs migrants dans les pays d’accueil;

c) De veiller à la réintégration des migrants ouzbeks rentrés au pays, notamment en leur donnant des possibilités d’emploi et en tenant compte de la période de travail à l’étranger dans le calcul de la pension de retraite.

Droit d’organisation

Le Comité relève l’absence d’informations sur l’adoption des amendements proposés en 2007 concernant la loi sur les syndicats, et les droits et garanties pour exercer leur activité et sur le mécanisme en vigueur pour régler les conflits collectifs du travail. Il constate aussi l’absence de disposition sur le droit de grève dans la législation. Il s’inquiète de ce que, conformément à la loi sur les «organisations non gouvernementales», ces organisations doivent être obligatoirement enregistrées auprès du Ministère de la justice qui contrôle leurs activités afin de s’assurer qu’elles sont conformes aux objectifs prévus dans leurs statuts et à la législation nationale (art. 8).

Le Comité demande instamment à l’État partie d’accélérer l’adoption des amendements apportés en 2007 à la loi sur les syndicats, et les droits et garanties pour exercer leur activité . Il lui recommande d’abroger l’obligation d’enregistrement des organisations non gouvernementales et de revoir la législation nationale afin de la rendre conforme aux obligations découlant de l’article 8 du Pacte et de l’article 34 de la Constitution ouzbèke, qui consacre le droit des citoyens de former leurs propres organisations.

Mariage d’enfants et mariages forcés

Malgré les informations fournies par l’État partie sur les mesures engagées pour protéger la famille, le Comité est préoccupé par la persistance des mariages forcés et des mariages d’enfants, ainsi que par les enlèvements de femmes en vue du mariage, notamment dans les zones rurales (art. 10).

Le Comité demande instamment à l’État partie de relever l’âge minimum du mariage à 18 ans pour les femmes comme pour les hommes, et de veiller à ce que cette règle soit appliquée dans l’ensemble du pays, notamment dans les zones rurales. Il recommande que toutes les mesures nécessaires soient prises pour lutter contre la pratique du mariage d’enfants et des mariages forcés, et contre celle de l’enlèvement de femmes en vue du mariage.

Violence au foyer

Le Comité se dit préoccupépar la violence à l’égard des femmes, en particulier la violence au foyer (art. 10).

Il convient d’intensifier les efforts destinés à prévenir et combattre la violence au foyer, y compris en la criminalisant et en adoptant le projet de loi sur la prévention de la violence à l’égard des femmes, ainsi que l’action visant à apporter une protection aux victimes, notamment en leur garantissant l’accès à la justice et à des soins médicaux, des services d’assistance sociale et juridiq ue et à un hébergement adéquats.

Travail des enfants

Le Comité demeure préoccupé par les informations selon lesquelles les enfants continuent de participer à la récolte du coton, sont exposés à des conditions de travail dangereuses s’absentent de l’école pendant des périodes allant jusqu’à deux mois durant l’année scolaire (art. 7; 10, par. 3; et 13).

Le Comité demande instamment à l’État partie:

a) De redoubler d’efforts afin de garantir la protection des enfants contre l’exploitation économique et sociale et de leur permettre de jouir pleinement de leur droit à l’éducation;

b) De fournir, dans son prochain rapport périodique, des statistiques sur le nombre et la nature des affaires portées devant les tribuna ux concernant des violations des droits relatifs au travail et sur les décisions rendues, ainsi que des renseignements sur les ef fets concrets des contrôles sur l’interdiction du travail forcé et dangereux;

c) D’accepter un contrôle régulier et indépendant par des organisations internationales .

Châtiments corporels

Le Comité se déclare inquiet de la persistance des châtiments corporels, lesquels ne sont pas explicitement interdits par la loi (art. 7,10 (par. 3) et 13).

Le Comité demande instamment à l’État partie d’interdire les châtiments corporels en tout lieu, y compris dans la famille, à l’école et dans les structures de protection de remplacement, et de mener des campagnes de form ation et de sensibilisation. Il  renvoie l’État partie à la recommandation relative à la discipline scolaire qu’il a formulée dans son Observation générale n o  13 (1999) sur le droit à l’éducation.

Réforme agraire

Le Comité est préoccupé par le fait qu’en dépit des mesures engagées pour stimuler le développement rural dans le cadre de la réforme agraire, des agriculteurs auraient été privés de leurs parcelles de terre, et par le fait que la question de la propriété foncière des agriculteurs n’est pas réglée. Il s’est inquiété également du faible pourcentage de femmes propriétaires fonciers et de la baisse du nombre de femmes à la tête d’une exploitation agricole (art. 3 et 11).

Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures appropriées, y compris législatives et de politique gén érale en vue d’examiner les problèmes liés au régime foncier et de les résoudre dans les meilleurs délais, en tenant compte des besoins et des droits fonciers des agriculteurs; de garantir l’accès à la justice en cas de spoliation de terres; d’enquêt er sur les cas de spoliation de terres et de poursuivre et sanctionner les responsables; et d’offrir réparation aux victimes. Il encourage l’État partie à poursuivre la réforme agraire en mettant l’accent sur l’égalité entre les sexes. Le Comité invite l’État partie à lui rendre compte, dans son prochain rapport périodique, des mesures prises dans ce domaine et de leur incidence.

Logement

Malgré les informations sur les mesures engagées pour améliorer la situation du logement, en particulier dans les zones rurales, le Comité demeure préoccupé par le fait qu’aucune donnée ne lui a été communiquée quant à l’ampleur du phénomène des sans-abri et des expulsions forcées, et au nombre de personnes inscrites sur les listes d’attente pour l’obtention d’un logement social ou municipal. Il regrette l’absence d’informations lui permettant d’établir si le montant des indemnisations en cas d’expulsion est suffisant. Il s’inquiète aussi du fait que seules quelques catégories de citoyens peuvent se voir proposer un logement de remplacement en cas d’expulsion et que les personnes déchues de leurs droits parentaux peuvent être expulsées sans solution de relogement dès lors qu’elles sont jugées inaptes à vivre avec leurs enfants (art. 11).

Le Comité réitère la recommandation qu’il avait adressée à l’État partie lui demandant de prendre les mesures appropriées, législatives et autres, en vue de proposer à toutes les personnes expulsées un logement de remplacement ou une indemnisation adéquate, conformément à son Observation générale n o  7 (1997) sur le droit à un logement convenable. Le Comité engage l’État partie à intensifier ses efforts pour fournir des logements convenables, notamment des logements sociaux, en particulier pour les familles à faible revenu et les personnes et groupes défavorisés et marginalisés . À cette fin, il encourage l’État partie à collecter des données sur le logement, ventilées selon le type, les conditions et la valeur marchande des logements, aux niveaux régional et local, en vue d’identifier les problèmes et d’élaborer des stratégies appropriées.

Système de santé

Le Comité est préoccupé par le faible nombre d’hôpitaux et l’effectif réduit des personnels de santé hautement qualifiés dans les zones rurales et ce, bien que la moitié au moins du nombre total de patients soient traités dans ces zones. Il note avec inquiétude que les services essentiels ne sont pas compris dans les prestations sociales garanties par l’État et qu’il n’existe pas de régime national d’assurance maladie dans l’État partie. Il regrette le manque d’informations sur la santé mentale, en particulier concernant l’utilisation d’autres formes de traitement des maladies mentales et l’existence du contrôle juridictionnel en cas de placement dans un établissement psychiatrique (art. 12).

Le Comité demande instamment à l’État partie de continuer à améliorer le système de santé, y compris en prenant les mesures nécessaires pour qu’il y ait, dans les zones rurales, des hôpitaux en quantité suffisante, correctement dotés en personnel et équipés. Il recommande que les soins secondaires et tertiaires ainsi que les médicaments des patients non hospitalisés soient com pris dans les prestations garanties par l’État. Il encourage l’État partie à créer un régime national d’assurance maladie offrant une couverture universelle, ainsi que cela a été annoncé pendant le dialogue. Il renvoie l’État partie à son Observation générale n o  14 (2000) sur le droit au meilleur état de santé susceptible d’être atteint.

Situation sanitaire

Le Comité note que, malgré une baisse sensible des taux de mortalité maternelle et infantile, ceux-ci demeurent relativement élevés. Il demeure préoccupé par le niveau de la malnutrition dans le pays, malgré les efforts déployés par l’État partie pour remédier au problème. Il est également inquiet de l’augmentation du nombre des maladies liées à l’alimentation, telle l’obésité; de l’augmentation de la consommation d’alcool et de tabac, en particulier chez les enfants; de la persistance de la tuberculose; et de l’incidence croissante du VIH/sida, en particulier chez les utilisateurs de drogues injectables (art. 10 à 12).

Le Comité demande instamment à l’État partie d’intensifier ses efforts en vue d’améliorer la santé maternelle et infantile, en particulier pendant la période prénatale et néonatale, ainsi que le traitement et la prévention de la tuberculose et du VIH/sida, y compris en rétablissant les thérapies de substitution aux opiacés, comme cela a été annoncé pendant le dialogue. Il engage l’État partie à s’attaquer à la malnutrition et aux maladies liées à l’alimentation, ainsi qu’à la consommation d’alcool et de tabac. L’accent devrait être placé sur la prévention, en particulier sur la sensibilisation aux effets nocifs des régimes alimentaires malsains et de la consommation d’alcool et de tabac, sur la surveillance de ces pratiques, sur l’interdiction de la vente d’alcool et de tabac aux enfants , ainsi que sur la promotion de modes de vie sains.

Eau et assainissement

Le Comité s’inquiète du fait que, malgré les mesures engagées par l’État partie pour améliorer la gestion de l’eau et des systèmes d’assainissement, un grand nombre d’habitants de l’Ouzbékistan n’ont pas accès à des installations sanitaires adéquates ni à l’eau potable, en particulier dans les régions de Khorezm et du Karakalpakstan qui sont frappées par la sécheresse et par la catastrophe de la mer d’Aral. Il note avec inquiétude que le déficit et la pollution hydriques, l’insuffisance du réseau d’égouts et la contamination des sols due à l’utilisation extensive de produits chimiques dans l’agriculture ont contribué à la progression des maladies transmises par l’eau et de la morbidité liée à l’eau. Il est aussi préoccupé par le fait que les maladies transmises par voie aérienne constitueraient la deuxième cause de mortalité et de morbidité dans le pays (art. 12).

Le Comité demande instamment à l’État partie d’investir davantage de ressources dans l’amélioration de l’approvisionnement en eau potable et des systèmes d’assainissement, en particulier dans les zones rurales, et de prendre promptement des dispositions pour protéger l’eau, le sol et l’air contre la contamination. Il engage l’État partie à prendre les mesures nécessaires pour prévenir et traiter les maladies transmises par l’eau et par voie aérienne, y compris à travers des mesures de politique générale et des campagnes de sensibilisation. Il encourage l’État partie à coopérer avec les pays voisins dans le domaine de la gestion de l’eau, en vue de trouver des solutions viables à la catastrophe de la mer d’Aral. Il renvoie l’État partie à son Observation générale n o  15 (2000) sur le droit à l’eau et à sa Déclaration sur le droit à l’assainissement.

Éducation

Bien que la quasi-totalité de la population de l’État partie soit alphabétisée, le Comité se dit préoccupé par la qualité médiocre de l’enseignement et du personnel enseignant dans les zones rurales. Bien que l’équilibre entre les sexes dans les écoles secondaires et les écoles professionnelles se soit amélioré, le Comité s’inquiète de ce que le pourcentage de femmes dans l’enseignement supérieur ne représente que le tiers que celui des hommes. Il est également préoccupé par la baisse du nombre d’écoles assurant un enseignement dans les langues minoritaires, en particulier le kazakh et le turkmène, et par l’insuffisance de l’aide fournie pour promouvoir la langue tadjike (art. 3 et 13).

Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires en vue d’améliorer la qualité de l’enseignement, en particulier dans les zones rurales. Il lui recommande aussi d’accorder une plus grande attention à l’équilibre entre les sexes, en vue d’assurer l’égalité d’accès à l’enseignement supérieur. Il encourage l’État partie à favoriser la promotion des langues minoritaires et à garantir l’enseignement dans ces langues à tous les niveaux et l’ invite à continuer d’investir dans la formation des enseignants et d’étendre l’accès à Internet sur l’ensemble du territoire.

Vie culturelle

Le Comité est préoccupé par le manque de reconnaissance des minorités ethniques par l’État partie et admet difficilement qu’il soit possible d’assurer l’harmonie des relations interethniques sans reconnaître le droit à l’auto-identification culturelle. Il est inquiet de la déclaration faite par l’État partie dans son rapport (E/C.12/UZB/2, par. 968) selon laquelle: «grâce aux centres culturels ethniques, les groupes ethniques et les groupes nationaux vivant dans le pays ne se considèrent pas comme étant des minorités ethniques».

Le Comité demande instamment à l’État partie de veiller à ce que ses lois protègent les droits garantis à tous les groupes ethniques, y compris le droit de jouir de leur diversité culturelle, de leurs traditions, de leurs coutumes et de leurs langues, ainsi que de toutes les autres formes d’expression de leur identité et de leurs liens culturels. Il renvoie l’État partie à l’Observation générale n o  21 (2009) sur le droit de chacun de participer à la vie culturelle.

D. Autres recommandations

Le Comité encourage l’État partie à signer et à ratifier le Protocole facultatif se rapportant au Pacte.

Le Comité encourage également l’État partie à signer et à ratifier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille et la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, et à accepter les mécanismes d’examen des plaintes émanant de particuliers au titre des principaux instruments relatifs aux droits de l’homme que l’État partie n’a pas acceptés, afin de renforcer la protection des droits de l’homme en donnant aux titulaires de droits des possibilités supplémentaires de faire valoir leurs droits au niveau international lorsque les recours internes ont été épuisés.

Le Comité prie l’État partie de diffuser largement les présentes observations finales à tous les niveaux de la société, en particulier auprès des parlementaires, des agents de la fonction publique et des membres de l’appareil judiciaire, et de l’informer dans son prochain rapport périodique de toutes les mesures prises pour les mettre en œuvre. Il l’engage aussi à associer les organisations non gouvernementales et les autres membres de la société civile aux débats tenus au niveau national avant la soumission de son prochain rapport périodique.

Le Comité invite l’État partie à mettre à jour son document de base conformément aux directives harmonisées pour l’établissement des documents de base (HRI/GEN/2/Rev.6, chap.  I).

Le Comité prie l’État partie de lui soumettre son troisième rapport périodique, établi conformément aux directives révisées concernant l’établissement des rapports que le Comité a adoptées en 2008 (E/C.12/2008/2), le 30 mai 2019 au plus tard.