Nations Unies

E/C.12/CPV/CO/1

Conseil économique et social

Distr. générale

27 novembre 2018

Français

Original : anglais

Comité des droits économiques, sociaux et culturels

Observations finales concernant le rapport initialde Cabo Verde *

1.Le Comité a examiné le rapport initial de Cabo Verde (E/C.12/CPV/1) à ses 45e et 46e séances (voir E/C.12/2018/SR.45 et 46), le 4 octobre 2018, et a adopté les présentes observations à sa 58e séance, le 12 octobre 2018.

A.Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport initial de Cabo Verde, bien que ce dernier ait été soumis avec beaucoup de retard. Il se félicite du dialogue ouvert et constructif qu’il a eu avec la délégation de haut niveau de l’État partie et constate avec satisfaction que le rapport initial a pu bénéficier de consultations avec des organisations de la société civile.

B.Aspects positifs

3.Le Comité se félicite des mesures législatives, institutionnelles et politiques prises pour assurer la protection des droits économiques, sociaux et culturels dans l’État partie, notamment l’instauration par le décret-loi no6/2014 d’un salaire minimum au niveau national et l’adoption du Programme national de lutte contre la pauvreté, du Plan stratégique pour un développement durable et du Plan national pour l’égalité des sexes.

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Institution nationale des droits de l’homme

4.Le Comité est préoccupé par le fait que la Commission nationale de défense des droits de l’homme et de la citoyenneté ne jouit pas d’une indépendance ou d’une autonomie suffisante et ne dispose pas des ressources nécessaires pour ses activités (art. 2 1)).

5. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ accélérer l ’ approbation de la proposition de statut présentée par la Commission nationale de défense des droits de l ’ homme et de la citoyenneté, qui devrait mettre la Commission en conformité avec les Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l ’ homme (Principes de Paris). Il lui recommande également d ’ allouer suffisamment de ressources à la Commission pour lui permettre de fonctionner efficacement et en toute indépendance.

Application du Pacte au niveau national

6.Le Comité note avec préoccupation que les dispositions du Pacte n’ont été invoquées dans aucune décision de justice rendue dans l’État partie, en dépit des dispositions de l’article 12 de sa Constitution, qui prévoit que les traités internationaux ratifiés font partie intégrante du droit interne.

7. Le Comité recommande à l ’ État partie de sensibiliser les juges, les avocats et les agents de l ’ État à la justiciabilité des droits consacrés dans le Pacte, notamment à l ’ aide de programmes de formation, afin de promouvoir l ’ invocation directe de ces droits devant les juridictions de l ’ État partie. Il attire l ’ attention de l ’ État partie sur son observation générale n o 9 (1998) sur l ’ application du Pacte au niveau national.

Changements climatiques et réduction des risques de catastrophe

8.Le Comité est préoccupé par l’impact que les catastrophes naturelles et les sécheresses cycliques touchant l’État partie ont sur les personnes les plus vulnérables et sur l’exercice de leurs droits économiques, sociaux et culturels, impact susceptible d’être aggravé sous l’effet des changements climatiques.

9. Le Comité recommande à l ’ État partie : a) de renforcer les politiques et stratégies publiques destinées à atténuer l ’ impact des catastrophes naturelles et des changements climatiques sur la population et à réduire la vulnérabilité des communautés, notamment celles dont les moyens de subsistance sont tributaires des conditions climatiques, comme les agriculteurs ; b) d ’ améliorer la sécurité structurelle des habitations et des infrastructures ; c) d ’ actualiser régulièrement, en concertation avec les communautés concernées, l es plans d ’ urgence et de réinstallation.

Inégalités

10.Le Comité reste préoccupé par la persistance d’inégalités dans l’État partie ainsi que par la disparité entre les îles, malgré certains progrès (art. 2 1)).

11.Le Comité recommande à l ’ État partie de veiller à ce que les politiques économiques, sociales et budgétaires, y compris le Plan stratégique pour un développement durable, aient pour finalité de mettre un terme aux inégalités dans l ’ exercice des droits consacrés dans le Pacte. Il lui recommande en particulier : a) de veiller à ce que les indicateurs du programme relatif aux bases de données sociales mis en place pour recenser les ménages vivant dans la pauvreté permettent véritablement de su rveiller les inégalités ; b) de développer ses programmes d ’ infrastructures de base afin d ’ améliorer l ’ accès aux services de base, notamment pour la population des îles les moins développées.

Utilisation du maximum de ressources disponibles

12.Sachant que l’État partie a décidé de maîtriser le déficit budgétaire pour renforcer la compétitivité de son économie nationale, le Comité est préoccupé par les effets négatifs que les mesures d’austérité sont susceptibles d’entraîner sur les personnes défavorisées et marginalisées. Il note que le soutien financier obtenu dans le cadre de la coopération internationale a diminué depuis que l’État partie est devenu un pays à revenu intermédiaire (art. 2 1)).

13. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D e veiller , lors de la mise en place des ajustements budgétaires , à allouer suffisamment de crédits budgétaires aux dépenses sociales en faveur des groupes les plus défavorisés ;

b) D’ améliorer la planification et l ’ exécution du budget afin d ’ éviter une sous-utilisation des ressources ;

c) D e veiller à ce que les politiques publiques garantissent la jouissance d ’ un minimum essentiel de droits en tout temps ;

d) D e revoir sa politique budgétaire afin d ’ être mieux en mesure de mobiliser les ressources intérieures nécessaires pour compenser la réduction de l ’ aide internationale ;

e) D e continuer de solliciter l ’ assistance des organisations internationales et des organismes de développement pertinents.

Corruption

14.Le Comité est préoccupé par la persistance de pratiques de corruption, malgré plusieurs mesures prises par l’État partie.

15. Le Comité recommande à l ’ État partie de s ’ attaquer aux causes profondes de la corruption et de poursuivre ses efforts pour lutter contre cette pratique en poursuivant la mise en œuvre des initiatives et réformes engagées en matière de fiscalité, de passation de marchés, de contrôle et de blanchiment d ’ argent, et en veillant à ce que le plan intégré de lutte contre la corruption soit véritablement appliqué. Il recommande en outre à l ’ État partie de garantir un environnement sûr et favorable aux militants anticorruption et de les protéger contre toute violence, menace, représailles, discrimination, pression ou autre mesure arbitraire à laquelle ils pourraient être soumis du fait de leurs activités.

Principe de non-discrimination

16.Le Comité prend note de l’existence de dispositions légales interdisant la discrimination dans certains domaines, mais reste préoccupé par le fait que l’État partie ne s’est pas doté d’une législation exhaustive visant à lutter contre la discrimination (art. 2 2)).

17. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ envisager l ’ adoption d ’ une l oi exhaustive interd isant toutes les formes de discrimination , y compris indirecte, fondées sur les motifs énumérés au paragraphe 2 de l ’ article 2 du Pacte. Il lui recommande également de s ’ employer encore plus activement à faire appliquer les dispositions législatives existantes relatives à la discrimination, à prendre les mesures nécessaires pour que les auteurs d ’ actes de discrimination aient à rendre des comptes et que les victimes aient acc ès à des recours efficaces. Il lui recommande en outre de mener des campagnes de sensibilisation pour lutter contre les stéréotypes touchant les personnes et les groupes exposés au risque de discrimination, comme les personnes vivant avec le VIH/sida. Le Comité appelle l ’ attention de l ’ État partie sur son observation générale n o 20 (2009) sur la non-discrimination dans l ’ exercice des droits économiques, sociaux et culturels.

Droits des personnes handicapées

18.Tout en prenant acte des efforts déployés par l’État partie pour promouvoir et protéger les droits des personnes handicapées, le Comité demeure préoccupé par le fait que ces dernières se heurtent encore à des obstacles qui empêchent leur pleine intégration sociale et contribuent à leur isolement. En particulier, il s’inquiète de ce que :

a)De nombreuses installations et services ouverts ou fournis au public ne satisfont pas aux critères d’accessibilité établis par la loi ;

b)Le taux d’emploi des personnes handicapées est faible, en partie parce que les réglementations relatives à leur recrutement ne font pas l’objet d’une diffusion assez large et que les offres d’emploi ne sont généralement pas accessibles aux personnes malvoyantes ;

c)Les lieux de travail n’offrent pas d’aménagements raisonnables pour faciliter l’emploi des personnes handicapées ;

d)Les stéréotypes dévalorisants et les préjugés à l’égard des personnes ayant un handicap intellectuel ou psychosocial sont très répandus (art. 2, par. 2), 6 et 7).

19. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D’ intensifier ses efforts pour faire appliquer la législation relative à l ’ accessibilité des installations et services ouverts ou fournis au public, d ’ effectuer une évaluation de la législation concernée et de prendre des mesures correctives ;

b) D e diffuser les réglementations en vigueur sur l ’ emploi des personnes handicapées et d ’ évaluer leur efficacité ;

c) D e veiller à ce que les offres d ’ emploi destinées aux personnes malvoyantes soient accessibles et de promouvoir la mise en place d ’ aménagements raisonnables sur le lieu de travail ;

d) D’ effectuer un travail de sensibilisation sur les capacités et les contributions des personnes handicapées.

Droits des couples de même sexe

20.Le Comité constate avec préoccupation que les couples de même sexe ne peuvent pas officialiser légalement leur union dans l’État partie (art. 2, par. 2)).

21.Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre des mesures en vue de l ’ officialisation légale des unions homosexuelles, afin d ’ offrir aux couples homosexuels les mêmes droits et la même protection qu ’ aux couples hétérosexuels.

Égalité entre les hommes et les femmes

22.Le Comité constate avec préoccupation que, malgré l’adoption du Plan national pour l’égalité des sexes, les inégalités entre les hommes et les femmes restent généralisées dans l’État partie. Il est préoccupé par la sous-représentation des femmes dans l’appareil judiciaire, à l’Assemblée nationale et dans la fonction publique. Il est également préoccupé par le fait que des stéréotypes sexistes très tenaces dans l’État partie entravent la pleine et égale participation des femmes à la vie politique et publique (art. 3).

23. Le Comité recommande à l ’ État partie, dans le cadre de la mise en œuvre du Plan national pour l ’ égalité des sexes :

a) D’ accélérer l ’ adoption d ’ une législation sur l ’ égalité des sexes ;

b) D e promouvoir le partage des responsabilités domestiques et familiales entre les hommes et les femmes, notamment en instaurant un congé de paternité ;

c) D’ organiser des campagnes ciblant les législateurs, les partis politiques, le système judiciaire et le grand public pour lutter contre les stéréotypes sexistes et sensibiliser l ’ opinion aux avantages de l ’ égalité des sexes ;

d) D’ offrir aux femmes une formation et des avantages susceptibles de les encourager à participer à la vie publique et politique.

Chômage des jeunes

24.Le Comité est préoccupé par le taux de chômage extrêmement élevé qui touche les jeunes, en particulier les jeunes femmes. Il note avec préoccupation que les programmes d’études de l’enseignement officiel ne sont pas adaptés aux besoins du marché du travail, ce qui explique que les jeunes aient des difficultés à trouver un premier emploi (art. 3, 6 et 12).

25. Le Comité recommande à l ’ État partie de renforcer les mesures destinées à réduire le chômage des jeunes diplômés, en particulier des jeunes femmes, tant dans les zones urbaines qu ’ en milieu rural et, à cet effet :

a) D’ élaborer des programmes d ’ études et de formation qui leur permettent d ’ acquérir d es compétences nécessaires sur le marché du travail ;

b) D’ élargir la couverture de son programme national de stages professionnels ainsi que des programmes de formation professionnelle ;

c) D’ évaluer l ’ efficacité des incitations fiscales mises en place pour favoriser l ’ embauche de jeunes ;

d) D e veiller à ce que ces mesures soient également adaptées aux besoins des jeunes femmes à la recherche d ’ un emploi.

Emploi des femmes

26.Le Comité est préoccupé par le faible taux de participation des femmes au marché du travail (inférieur de 10 % à celui des hommes) ainsi que par le taux élevé du chômage féminin. Le Comité est également préoccupé par la persistance de fortes inégalités salariales entre les hommes et les femmes, par la ségrégation verticale et horizontale qui caractérise le marché du travail ainsi que par la forte proportion de femmes en situation d’emploi précaire. Il note par ailleurs que les femmes travaillent essentiellement dans l’économie informelle et qu’elles sont, par conséquent, moins susceptibles d’être couvertes par des mécanismes contributifs de sécurité sociale et plus susceptibles de recevoir des pensions sociales non contributives, lesquelles ne représentent actuellement que 20 % du minimum vital. Les femmes ont donc des revenus plus faibles et des pensions moins élevées, ce qui les expose tout particulièrement au risque de pauvreté, en particulier lorsqu’elles sont âgées (art. 6, 7 et 10).

27. Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre des mesures destinées à encourager et à faciliter la participation des femmes au marché du travail et à lever les obstacles à leur participation, en particulier :

a) En s’ attaquant aux causes profondes de la faible participation des femmes au marché du travail, notamment les stéréotypes et les rôles traditionnellement dévolus aux hommes et aux femmes ;

b) En l uttant contre la discrimination à l ’ égard des femmes dans le cadre des procédures de recrutement ;

c) En a doptant des mesures pour aider les femmes qui travaillent à trouver un emploi à plein temps dans l ’ économie formelle, notamment la mise en place de services de garde d ’ enfants peu onéreux et d ’ autres mesures visant à aider les hommes et les femmes à concilier vie professionnelle et vie familiale ;

d) En portant à quatorze semaines au moins la durée du congé de maternité, comme le recommande l ’ Organisation internationale du Travail (OIT) ;

e) En s outenant l’avancement professionnel des femmes pour leur permettre d ’ accéder à des postes de haut niveau ainsi qu ’ à des emplois dans des secteurs où elles sont sous-représentées, en vue de remédier à la ségrégation verticale et horizontale des sexes sur le marché du travail ;

f) En a ppliquant les dispositions légales relatives à l ’ égalité de rémunération pour un travail de valeur égale pour les hommes et les femmes ;

g) En v eillant à ce que les prestations sociales atténuent effectivement les conséquences des interruptions de carrière et autres désavantage s auxquels l es femmes se heurtent tout au long de leur vie professionnelle et qui les empêchent de jouir du droit à un niveau de vie suffisant, notamment lorsqu ’ elles sont âgées.

Salaire minimum

28.Le Comité note avec préoccupation que de nombreux employeurs, en particulier dans les secteurs de l’agriculture et des services domestiques, ne respectent pas l’obligation légale de verser le salaire minimum. Il note aussi avec préoccupation que le salaire minimum actuel ne permet pas d’assurer un niveau de vie décent aux travailleurs et à leur famille (art. 7).

29. Le Comité recommande à l ’ État partie de faire mieux respecter l’obligation d e verser le salaire minimum, moyennant notamment d es inspection s dans des secteurs comme le secteur agricole ou celui des services domestiques. Le Comité recommande également à l ’ État partie de veiller à ce que le salaire minimum permette d’ assure r un niveau de vie décent aux travailleurs et à leur famille, par exemple en réexaminant périodiquement son montant et en l ’ indexant au moins sur le coût de la vie.

Conditions de travail justes et favorables

30.Le Comité craint que, en l’absence de garanties appropriées, les réformes du travail engagées en 2015 pour rendre le pays plus attrayant pour les investisseurs, mais aussi la libéralisation du marché du travail, n’aggravent la précarité de l’emploi et ne touchent de manière disproportionnée les travailleurs les plus vulnérables (art. 7).

31. Tout en reconnaissant qu ’ il est nécessaire de ménager un juste équilibre entre sécurité de l ’ emploi et flexibilité de l ’ économie, le Comité recommande à l ’ État partie de protéger les droits des travailleurs, en particulier d es plus vulnérables d ’ entre eux. Il appelle son attention sur son observation générale n o 23 (2016) sur le droit à des conditions de travail justes et favorables.

Travailleurs domestiques

32.Le Comité constate avec préoccupation que les travailleurs domestiques ne bénéficient pas de conditions de travail justes et favorables dans l’État partie.

33. Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre des mesures efficaces pour mieux faire connaître et appliquer les dispositions légales relatives aux droits des travailleurs domestiques en matière de travail et de sécurité sociale, et de veiller à ce que les travailleurs domestiques jouissent de leurs droits. Il encourage par ailleurs l ’ État partie à ratifier la C onvention n o 189 (2011) de l ’ OIT sur les travailleuses et travailleurs domestiques .

Économie informelle

34.Le Comité note avec préoccupation qu’une forte proportion de la population de l’État partie travaille dans l’économie informelle, sans bénéficier de la sécurité sociale ni de la protection des droits du travail (art. 7 et 9).

35. Le Comité recommande à l ’ État partie de redoubler d’efforts pour intégrer davantage de travailleurs dans l ’ économie formelle, promouvoir la formalisation des entreprises informelles et accroître la proportion de travailleurs couverts par la législation du travail et le système contributif de sécurité sociale.

Droits syndicaux

36.Le Comité note que la liberté syndicale et le droit de grève sont garantis par la Constitution de l’État partie, mais constate avec préoccupation que les syndicats ont fait état de violations du droit de grève (art. 8).

37. Tout en reconnaissant qu ’ il est nécessaire d ’ assurer le fonctionnement d ’ un minimum de services essentiels, le Comité recommande à l ’ État partie de veiller à ce que le droit de grève soit protégé et que les restrictions au droit de grève susceptibles d ’ être imposées dans certains secteurs d ’ activité soient interprétées au sens strict, conformément aux principes de l ’ OIT sur le droit de grève.

Droit à la sécurité sociale

38.Le Comité note avec préoccupation que la pension sociale de base, dont le montant est actuellement de 5 000 escudos par mois, ne permet pas d’assurer un niveau de vie suffisant aux retraités. Il relève en outre avec préoccupation que, dans la pratique, de nombreux employeurs n’intègrent pas les travailleurs domestiques dans le système de sécurité sociale ou ne versent pas la part des cotisations obligatoires qui est à leur charge. Il note également que la viabilité financière du système de sécurité sociale de l’État partie est menacée (art. 9).

39. Le Comité recommande à l ’ État partie de veiller à ce que  : a) les allocations soient suffisantes, moyennant, notamment l’ indexa tio n du montant révisé de la pension sociale de base sur le coût de la vie ; b) l’intégration d es travailleurs au système de sécurité sociale et le versement d es cotisations obligatoires so ie nt efficacement contrôlés , en particulier pour les travailleurs domestiques ; c) le système de sécurité sociale soit bien géré et supervisé afin de garantir sa viabilité financière. Le Comité appelle l ’ attention de l ’ État partie sur son observation générale n o 19 (2007) sur le droit à la sécurité sociale.

40.S’il observe que l’État partie a conclu des accords de sécurité sociale avec plusieurs pays accueillant des travailleurs migrants caboverdiens, le Comité est préoccupé par le fait que les migrants venant de l’État partie n’ont pas tous accès à la protection sociale (art. 9).

41. Le Comité recommande à l ’ État partie de continuer de faire le nécessaire pour dialoguer avec les pays d ’ accueil et les migrants caboverdiens en vue de garantir à ces derniers leur droit à la sécurité sociale.

Protection de l’enfant

42.Le Comité est préoccupé par la forte proportion d’enfants vivant dans la pauvreté, en particulier au sein de familles monoparentales (art. 10 et 11).

43. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ allouer suffisamment de ressources et de définir des indicateurs précis pour la mise en œuvre du Programme national de lutte contre la pauvreté et du Plan stratégique pour un développement durable , et de prendre des mesures ciblées pour sortir les enfants et les ménages de la pauvreté , tant dans les zones urbaines que rurales.

44.Le Comité est préoccupé par la persistance, dans l’État partie, de l’exploitation des enfants et de la violence contre les enfants, notamment de la violence sexuelle. Il s’inquiète également de ce que, bien qu’interdit, le travail des enfants reste très répandu dans l’État partie, notamment en raison de la pauvreté (art. 7 et 10).

45.Le Comité recommande à l’État partie de poursuivre ses efforts pour protéger les enfants contre la maltraitance, la violence et l’exploitation, moyennant notamment la mise en œuvre effective du plan national de lutte contre la maltraitance et l’exploitation des enfants, des campagnes de sensibilisation et des programmes d’information ciblés à l’intention des enseignants et du personnel médical travaillant avec les enfants. Il lui recommande également de continuer à prendre des mesures efficaces pour prévenir et éliminer le travail des enfants, par exemple en apportant un soutien aux familles et aux ménages défavorisés et en leur proposant les incitations nécessaires pour qu’ils maintiennent leurs enfants à l’école.

Enregistrement des naissances

46.Le Comité se félicite des efforts déployés par l’État partie pour augmenter le nombre de naissances enregistrées, notamment en exigeant des parents qu’ils enregistrent leur nouveau-né à la maternité. Il note toutefois avec préoccupation que les enfants qui ne naissent pas à la maternité ne sont pas enregistrés (art. 10).

47. Le Comité recommande à l ’ État partie de continuer à sensibiliser la population à la nécessité d ’ enregistrer les naissances et aux répercussions négatives que le non ‑ enregistrement peut avoir sur la jouissance des droits économiques, sociaux et culturels par les enfants. En outre, l e Comité prie instamment l ’ État partie de s ’ employer à lever les obstacles à l ’ enregistrement des naissances, en particulier dans les zones rurales.

Violence sexuelle et violence fondée sur le genre

48.Le Comité s’inquiète du caractère largement répandu de la violence fondée sur le genre dans l’État partie, de l’application limitée de la loi no 84/VII/2011 sur la violence fondée sur le genre et de l’insuffisance de ressources allouées pour mettre en place des solutions appropriées. Il note avec préoccupation que les agents de la force publique et les membres du personnel judiciaire et du personnel médical ne reçoivent pas la formation nécessaire pour traiter les cas de violence fondée sur le genre et qu’il n’existe pas de services d’orientation pour les victimes. Il note également avec préoccupation que la crainte de la stigmatisation et de la discrimination dissuade fréquemment les victimes de violence fondée sur le genre de dénoncer les infractions, ce qui contribue à l’impunité de leurs auteurs (art. 10).

49. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ allouer les ressources humaines et financières nécessaires à la pleine application de la loi n o 84/VII/2011 sur la violence fondée sur le genre et de prendre des mesures appropriées pour prévenir la violence fondée sur le genre , d’ améliorer le traitement judiciaire des cas de violence fondée sur le genre et de mettre en place des services coordonnés de soutien aux victimes. En particulier, i l recommande à l ’ État partie : a) de veiller à ce que des abris et des refuges soient disponibles ; b) de dispenser aux agents de la force publique, aux membres du personnel judiciaire et du personnel médical une formation sur l a manière de traite r les cas de violence fondée sur le genre et d’ aide r les victimes ; c) d ’ organiser des campagnes destinées à mieux faire connaître la législation relative à la violence fondée sur le genre et les services existants pour les victimes, et à réduire la stigmatisation et les préjugés à l ’ égard de ces dernières.

Droit au logement

50.Le Comité est préoccupé par les difficultés qu’ont les personnes et les familles vulnérables à trouver un logement convenable ainsi que par l’expansion des établissements informels. Il est également préoccupé par les mauvaises conditions de vie et l’insalubrité qui règnent dans les établissements informels, lesquelles sont à l’origine d’un niveau élevé de violence et de criminalité (art. 11).

51.Le Comité recommande à l ’ État partie de continuer à œuvre r pour réduire le nombre de personnes vivant dans des conditions insalubres et dangereuses, notamment en modernisant les établissements informels et en assurant l ’ accès à des services de base peu onéreux, dont l ’ eau, l ’ assainissement et l ’ électricité. Le Comité recommande également à l ’ État partie de veiller à ce que les personnes et les groupes les plus vulnérables aient accès à un logement bon marché et convenable, en particulier en développant le programme de logement Casa para Todos (Un logement pour tous) et en apportant une aide adaptée aux besoins des personnes et des familles à faible revenu.

Droit à l’eau

52.Le Comité note avec préoccupation que de nombreuses personnes vivant dans les zones rurales n’ont pas accès à l’approvisionnement public en eau et ont de ce fait recours à d’autres sources d’eau, laquelle n’est pas toujours propre à la consommation et est nettement plus onéreuse (art. 11).

53. Le Comité recommande à l ’ État partie de poursuivre les efforts déployés pour assurer à tous une eau potable et bon marché en augmentant la capacité de dessalement de l ’ eau, en développant le réseau de distribution et en augmentant le nombre de ménages raccordés au réseau public d ’ approvisionnement en eau dans tout le pays, y compris dans les zones isolées et les zones rurales.

Droit à la santé

54.Le Comité s’inquiète du fait que le personnel médical n’est pas formé à la prise en charge des personnes vivant avec le VIH/sida, lesquelles continuent d’être stigmatisées dans le système de soins de santé. Il est également préoccupé par le manque de confidentialité concernant leur état (art. 2, par. 2), et 12).

55. Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre des mesures visant à garantir que les personnes vivant avec le VIH/sida jouissent de leur droit au meilleur état de santé possible , sans discrimination, notamment en proposant au personnel médical à différents niveaux des programmes de formation adéquats destinés à combattre les stéréotypes et la stigmatisation , et en lui fournissant l es connaissances et outils nécessaires pour qu ’ il soit en mesure d’apporter des soins appropriés aux personnes vivant avec le VIH/sida, y compris pour ce qui est de la protection de leur vie privée.

56.Le Comité est préoccupé par la pénurie de personnel médical qualifié pour fournir des services aux personnes handicapées, en particulier dans le domaine de la santé sexuelle et procréative. Il est également préoccupé par le fait que les équipements médicaux des établissements de soins de santé sont souvent inadaptés aux personnes handicapées (art. 2, par. 2) et 12).

57. Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre des mesures pour garantir que les personnes handicapées jouissent du droit au meilleur état de santé possible , sans discrimination. Il recommande notamment à l ’ État partie :

a) D e dispenser une formation au personnel médical à différents niveaux, en vue de lutter contre les stéréotypes et la stigmatisation et de fournir des services adéquats aux personnes handicapées, y compris dans le domaine de la santé sexuelle et procréative ;

b) D e s’assurer régulièrement que les établissements de santé publics et privés sont accessibles, de les adapter aux besoins des personnes handicapées et de veiller à ce que les personnes malvoyantes aient accès aux informations.

58.S’il salue l’augmentation du nombre de médecins et d’infirmiers employés dans l’État partie au cours des dernières années, le Comité juge préoccupante la pénurie de spécialistes dans certaines îles de Cabo Verde. Il s’inquiète également du manque de moyens de transport adéquats pour évacuer les patients en situation critique vers des îles où se trouvent des hôpitaux (art. 11).

59. Le Comité recommande à l ’ État partie de renforcer le système d ’ évacuation sanitaire et le système de transfert vers les hôpitaux afin d ’ assurer une prise en charge rapide et sans heurts des patients, et d ’ allouer un budget suffisant pour les ressources humaines, matérielles et financières nécessaires aux évacuations, frais de transport et d ’ entretien compris. Il recommande également à l ’ État partie de recruter davantage de médecins spécialisés, notamment dans les îles les moins peuplées.

60.Le Comité est préoccupé par le manque de services adéquats pour les personnes ayant des troubles mentaux et par le fait que nombre de ces personnes sont abandonnées sans soins dans la rue, ou enfermées chez elles par leur famille (art. 11).

61. Le Comité recommande à l ’ État partie de mettre en place un système communautaire de soins de santé mentale et de le doter de ressource s suffisant es, notamment pour permettre le recrutement de personnel qualifié. Il recommande en outre à l ’ État partie d e mener des activités destinées à sensibilis er le public aux problèmes et aux troubles de la santé mentale et à réduire la stigmatisation qui leur est associée.

Droit à l’éducation

62.Le Comité note que les enfants ont droit à une éducation gratuite jusqu’en classe de septième et que l’État partie envisage d’étendre ce droit à la classe de huitième, mais il reste préoccupé par les difficultés rencontrées par les ménages défavorisés en ce qui concerne les coûts indirects, tels que le transport et les repas. Il observe avec préoccupation que l’accès des enfants handicapés au système éducatif reste limité, en dépit des efforts déployés pour améliorer la situation (art. 13).

63. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ allouer les ressources nécessaires à la mise en œuvre du Plan stratégique pour l ’ éducation. Il invite instamment l ’ État partie à lever les obstacles à l ’ égalité d ’ accès à l ’ éducation et à l ’ exercice du droit à l ’ éducation, notamment : a) en apportant u n soutien aux ménages défavorisés, en particulier en prenant en charge les frais de scolarité après la septième année , l e transport scolaire et des repas chauds ; b)  en intégrant les enfants handicapés dans le système scolaire ordinaire et en améliorant l ’ accessibilité des bâtiments scolaires et du matériel pédagogique.

64.Tout en se félicitant des récentes modifications législatives qui abolissent l’exclusion des jeunes filles enceintes du système éducatif ainsi que des dispositions prises pour leur permettre de poursuivre leur scolarité, le Comité est préoccupé par le nombre croissant d’enfants et de jeunes, en particulier de filles, qui ne sont pas scolarisés (art. 13).

65. Le Comité recommande à l ’ État partie de mener des recherches sur les causes du décrochage scolaire et d ’ adopter des mesures visant à maintenir les garçons et les filles au sein du système éducatif, comme organiser des campagnes destinées à sensibiliser la population à l ’ importance d ’ une scolarité réussie, et proposer aux familles vulnérables des incitations leur permett a nt de maintenir leurs enfants à l’école et encourage r ceux-ci à terminer leurs études avant d ’ entrer dans la vie active.

66.Tout en se félicitant de la révision des programmes scolaires et de l’introduction de nouveaux sujets d’étude, le Comité demeure préoccupé par le fait que les enseignants ne sont pas tous suffisamment formés à l’application de ces nouveaux programmes (art. 13).

67. Le Comité recommande à l ’ État partie de continuer à actualiser les programmes scolaires en y intégrant des sujets d ’ étude tels que l ’ éducation civique, la santé sexuelle et procréative, les droits de l ’ homme et l ’ égalité des sexes. Il recommande également à l ’ État partie de recruter des enseignants en vue d ’ assurer un enseignement de qualité et de les former régulièrement aux nouveaux programmes.

Droits culturels

68.Le Comité constate avec préoccupation que, en dépit des efforts déployés par l’État partie, le créole caboverdien n’est pas suffisamment valorisé dans la vie publique et culturelle ou dans les médias (art. 15).

69. Le Comité recommande à l ’ État partie de continuer à promouvoir l’utilisation du créole caboverdien , la langue nationale du pays .

Autres recommandations

70. Le Comité recommande à l ’ État partie de tenir pleinement compte des obligations que lui impose le Pacte et de garantir le plein exercice des droits qui y sont énoncés dans la mise en œuvre au niveau national du Programme de développement durable à l ’ horizon 2030, avec l ’ aide et la coopération de la communauté internationale en cas de besoin. La réalisation des objectifs de développement durable serait grandement facilitée si l ’ État partie établissait des mécanismes indépendants pour suivre les progrès réalisés et s ’ il considérait que les bénéficiaires des programmes publics étaient détenteurs de droits qu ’ ils peuvent faire valoir. S’attacher à atteindre les objectifs dans le respect des principes de participation, de responsabilité et de non-discrimination permettrait de garantir que nul n ’ est laissé à l ’ écart.

71 . Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre des mesures pour mettre au point et appliquer progressivement des indicateurs appropriés à la mise en œuvre des droits économiques, sociaux et culturels, et faciliter ainsi l ’ évaluation des progrès réalisés pour se conformer aux obligations que lui impose le Pacte pour diverses catégories de la population. À cet égard, il renvoie au cadre conceptuel et méthodologique concernant les indicateurs des droits de l ’ homme mis au point par le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l ’ homme (voir HRI/MC/2008/3).

72. Le Comité prie l ’ État partie de diffuser largement les présentes observations finales à tous les niveaux de la société, aux échelons national, provincial et territorial, en particulier auprès des parlementaires, des fonctionnaires et des autorités judiciaires, et de l ’ informer dans son prochain rapport périodique des mesures prises pour y donner suite. Il l ’ encourage à associer la Commission nationale de défense des droits de l ’ homme et de la citoyenneté, les organisations non gouvernementales et d ’ autres membres de la société civile au suivi des présentes observations finales et au processus de consultation nationale avant la soumission de son prochain rapport périodique.

73. Conformément à la procédure sur la suite donnée aux observations finales adoptées par le Comité, l’État partie est prié de fournir, dans un délai de vingt ‑ quatre mois à compter de l’adoption des présentes observations finales, des informations sur la mise en œuvre des recommandatio ns figurant aux paragraphes 5 (i nstitution nationale des droits de l’homme), 17 (principe de non-discrimination) et 25 (chômage des jeunes) ci-dessus.

74. Le Comité demande à l ’ État partie de présenter son deuxième rapport périodique, qui sera établi conformément aux directives concernant les rapports que le Comité a adoptées en 2008 (voir E/C.12/2008/2), d ’ ici au 31 octobre 2023. Il l ’ invite aussi à mettre à jour son document de base commun conformément aux directives harmonisées pour l ’ établissement des rapports à présenter en vertu des instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme (voir HRI/GEN/2/Rev.6, chap. I).