Nations Unies

E/C.12/ECU/CO/3

Conseil économique et social

Distr. générale

13 décembre 2012

Français

Original: espagnol

Comité des droits économiques, sociaux et culturels

Observations finales concernant le troisième rapport de l’Équateur, adoptées par le Comité à sa quarante-neuvième session (14-30 novembre 2012)

1.Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a examiné le troisième rapport périodique de l’Équateur sur l’application du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (E/C.12/ECU/3) à ses 34e et 35e séances, tenues les 14 et 15 novembre 2012 (E/C.12/2012/SR.34 et 35), et a adopté à sa 58e séance, le 30 novembre 2012, les observations finales ci-après.

A.Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le troisième rapport périodique de l’Équateur ainsi que les réponses écrites qui ont été données à la liste de points à traiter. Il remercie la délégation de l’État partie, présidée par le Ministre coordonnateur du développement social, de sa participation active au dialogue qui s’est tenu avec le Comité.

B.Aspects positifs

3.Le Comité se félicite que l’État partie ait ratifié le Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (résolution 63/117 de l’Assemblée générale, annexe), et il le remercie d’avoir été le premier État à ratifier le Protocole.

4.Il salue également le fait que l’État partie ait ratifié d’autres instruments internationaux, à savoir:

a)La Convention relative aux droits des personnes handicapées et le Protocole facultatif s’y rapportant;

b)Le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants; et

c)La Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées.

5.Le Comité prend note avec satisfaction des progrès réalisés dans l’État partie sur le plan des indicateurs sociaux relatifs au développement humain et à la lutte contre la pauvreté ainsi que de l’augmentation des ressources budgétaires allouées au secteur économique et social depuis l’adoption en 2004 de ses observations finales sur le deuxième rapport périodique de l’Équateur (E/C.12/1/Add.100).

6.Le Comité souligne l’adoption, en 2008, de la Constitution de la République de l’Équateur, qui prévoit l’application immédiate des droits fondamentaux qu’elle contient et qui figurent dans les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme; et établit le principe de la non-discrimination dans l’exercice des droits fondamentaux et la justiciabilité de ces droits au moyen de mécanismes judiciaires comme le recours en protection.

7.Le Comité salue la mise en place d’un cadre législatif destiné à garantir l’exercice de plusieurs droits consacrés dans le Pacte, comprenant les éléments suivants:

a)La loi organique relative au régime de souveraineté alimentaire, publiée dans le supplément au Journal officiel no 583 daté du 5 mai 2009;

b)La loi organique relative à l’enseignement supérieur, publiée au Journal officiel no 298 daté du 12 octobre 2010;

c)La loi organique relative au handicap, publiée dans le supplément au Journal officiel no 796 daté du 25 septembre 2012;

d)La loi organique de défense des droits liés au travail, publiée dans le deuxième supplément au Journal officiel no 797 daté du 26 septembre 2012.

8.Le Comité prend note avec satisfaction des informations communiquées au sujet de l’application directe des dispositions du Pacte et de l’utilisation de la doctrine du Comité et de ses Observations générales no 4 sur le droit à un logement convenable (art 11, par. 1, du Pacte) et no 15 sur le droit à l’eau (art. 11 et 12 du Pacte) comme sources d’interprétation dans les affaires suivantes: affaire no 1207-10-EP, jugement no 148-12-SEP-CC, recours extraordinaire en protection concernant le droit au logement; affaire no 1586-2008-RA, recours en amparo concernant le droit du travail; affaire no 0907-2008-RA, recours en amparo concernant le droit à l’éducation.

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

9.Le Comité s’inquiète à nouveau de l’absence de consultations avec les peuples et nationalités autochtones visant à obtenir leur consentement préalable, libre et éclairé sur les projets d’exploitation des ressources naturelles qui les concernent. Il est particulièrement préoccupé par le fait que le décret exécutif no 1247 d’août 2012 ait été promulgué sans que les peuples et nationalités autochtones aient été consultés, et qu’il assujettisse les accords qui peuvent être conclus aux dispositions préétablies dans les politiques publiques. Le Comité note avec préoccupation que les activités d’information que mène l’État partie, notamment au moyen de bureaux de consultation et d’unités de consultation itinérantes, sur les projets d’exploitation minière et d’exploitation des hydrocarbures, se limitent à la diffusion de l’information sur ces projets et ne permettent toujours pas le dialogue interculturel et l’expression par les peuples et nationalités autochtones de leur consentement, conformément à leur droit d’être consulté.

Le Comité demande instamment à l ’ État partie de mener, dans le cadre des activités d ’ exploration et d ’ exploitation des ressources minières et des hydrocarbures, des consultations qui permettent la libre expression du consentement des autochtones à la réalisation d ’ un projet, consacrent le temps et les espaces nécessaires à la réflexion et à la prise de décisions, et prévoient des mesures de sauvegarde de l ’ intégrité culturelle et de réparation. Les processus de consultation devraient respecter les accords communautaires déjà établis ainsi que les décisions qui en découlent . Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ envisager de suspendre l ’ application du décret n o 1247 de 2012 et d ’ y substituer des dispositions législatives élaborées en concertation avec les peuples autochtones pour réglementer le droit à la consultation, et de procéder aux consultations prélégislatives voulues. Le Comité demande instamment à l ’ État partie de se conformer à l ’ arrêt de la Cour interaméricaine des droits de l ’ homme en date du 27 juin 2012 ( Peuple autochtone Kichwa de Sarayaku c. Équateur ).

10.Le Comité prend note avec préoccupation des enquêtes et des poursuites pénales menées contre des responsables sociaux et des dirigeants autochtones qui ont pris part à des manifestations publiques organisées pour protester contre plusieurs initiatives législatives du Gouvernement relatives à l’administration des ressources en eau et à la mise en place de projets ayant des incidences sur les réserves naturelles, comme dans le cas de la Laguna Kimsakocha. Le Comité s’inquiète du fait qu’il n’existe pas dans l’État partie de mécanismes permettant une réelle concertation sociale au sujet des activités d’extraction des ressources naturelles, qui permette de concilier celles-ci avec la cosmovision du développement des peuples et nationalités autochtones.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ établir toutes les garanties nécessaires pour assurer l ’ exercice du droit de réunion et de manifestation pacifique, et de réglementer l ’ usage de la force par les agents de la force publique dans le cadre des manifestations sociales. Il recommande également à l ’ État partie de définir clairement le champ d ’ application des infractions pénales de sabotage et de terrorisme et d ’ en limiter l ’ application dans le contexte des manifestations sociales. Des commissions d ’ enquête indépendantes pourraient formuler des recommandations quant au bien-fondé de l ’ action pénale dans le cas de protestations sociales.

11.Le Comité constate avec préoccupation que bien qu’elles reculent, les inégalités dans la répartition du revenu au sein de l’État partie demeurent importantes, avec un indice de Gini de 49,0. Le Comité regrette que l’État partie n’ait pas communiqué à cet égard de données statistiques suffisantes, à jour et ventilées par sexe, appartenance ethnique, zone géographique, âge et statut économique et social.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ intégrer dans ses politiques des objectifs et des indicateurs visant à supprimer les inégalités qui touchent en particulier les autochtones et les Afro-Équatoriens. Le Comité recommande à l ’ État partie de continuer d ’ élaborer, avec le concours technique du C onseiller aux droits de l ’ homme du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l ’ homme, des indicateurs permettant de contrôler si les politiques publiques parviennent à résorber les inégalités.

12.Le Comité note avec préoccupation que 35 % seulement des personnes handicapées font partie de la population économiquement active, et qu’aucune information n’a été donnée sur les mesures prises pour éliminer les formes de discrimination dont les personnes handicapées demeurent victimes dans différents domaines. Le Comité est préoccupé par le fait que les programmes sociaux qui sont menés, comme le versement d’allocations aux familles de personnes souffrant d’un handicap intellectuel ou psychosocial ou la mise à disposition de prothèses, soient insuffisants pour que soient reconnus les droits des personnes handicapées.

Le Comité recommande à l ’ État partie de poursuivre les efforts qu ’ il déploie pour atteindre les objectifs fixés dans les politiques relatives à l ’ emploi en ce qui concerne la prise en compte de la diversité et des aptitudes des personnes handicapées et la réalisation d ’ aménagements raisonnables dans le domaine du travail. Il encourage l ’ État partie à élaborer des politiques publiques fondées sur la reconnaissance des droits des personnes handicapées qui s ’ étendent au-delà des mesures d ’ assistance sociale. Le Comité recommande à l ’ État partie de doter le Bureau du Défenseur du peuple de s ressources nécessaires afin qu ’ il puisse contrôler la situation des droits des personnes handicapées, et de renforcer la capacité des organismes locaux d ’ appliquer la loi organique sur le handicap de 2012 .

13.Le Comité est préoccupé par la situation dans laquelle se trouvent les migrants et les demandeurs d’asile du fait de l’application du décret no 1182 de mai 2012, et par les effets négatifs qu’a celui-ci sur la reconnaissance du statut de réfugié. Le Comité est également préoccupé par les obstacles auxquels se heurtent les personnes de nationalité colombienne dans l’exercice de leurs droits économiques, sociaux et culturels dans l’État partie.

Le Comité recommande à l ’ État partie de mettre en place un mécanisme chargé de surveiller la jouissance effective de leurs droits économiques, sociaux et culturels par les demandeurs d ’ asile et les personnes bénéficiant du statut de réfugié dans l ’ État partie. Le Comité encourage les pouvoirs publics à intégrer à leur action les conseils et les compétences techniques d ’ organismes internationaux comme le Haut-Commissariat pour les réfugiés ainsi que d ’ organisations de la société civile.

14.Le Comité prend note des informations communiquées par l’État partie au sujet des politiques publiques, notamment du Plan pour l’égalité des chances, des budgets publics alloués à la question de l’égalité entre les sexes et du système au mérite instauré par la loi organique relative à la fonction publique. Le Comité est cependant préoccupé par les stéréotypes sexistes qui confèrent aux femmes un statut inférieur dans la famille et la société en général et empêchent les femmes d’exercer leurs droits sur un pied d’égalité avec les hommes.

Le Comité recommande à l ’ État partie d’adopter les mesures nécessaires, législatives et autres, pour intégrer le principe de l’égalité des sexes dans toutes les politiques publiques relatives aux droits éc onomiques, sociaux et culturels. Il lui recommande également de prendre des mesures en vue d’ éliminer les stéréotypes et les rôles traditionnels dans la famille et dans la société en général, qui constituent une discrimination à l’égard des femmes .

15.Le Comité constate avec préoccupation que malgré la baisse du taux de chômage, environ 40 % de la population exerce des activités dans l’économie informelle.

Le Comité recommande à l ’ État partie de poursuivre ses efforts pour réduire le taux de chômage et mettre en œuvre des mesures en vue de lutter contre le travail informel. Il recommande la mise en place de mécanismes de suivi de la mise en œuvre de la loi organique relative aux droits liés au travail et de la loi sur la défense du commerçant au détail, du travailleur indépendant et du microentrepreneur, afin d ’ assurer le respect des normes garantissant un emploi juste et digne pour tous dans l ’ État partie.

16.Le Comité relève avec préoccupation qu’au moins 11 000 fonctionnaires ont été licenciés sans motif suite à l’application du décret exécutif no 813 de 2011. Le Comité est préoccupé par la stigmatisation dont font l’objet ces fonctionnaires et par le fait qu’un grand nombre d’entre eux aient été contraints de se résoudre à prendre une retraite anticipée. Le Comité constate avec préoccupation que les licenciements n’étaient pas motivés et qu’ils se sont déroulés sans garantie d’une procédure régulière.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ assouplir les formalités relatives à l ’ indemnisation de tous les fonctionnaires licenciés de façon abusive et de mettre en œuvre à leur intention des programmes de recyclage et de reclassement. Le Comité recommande à l ’ État partie de cesser de recourir à des licenciements sans motif.

17.Le Comité constate avec préoccupation que si la part du panier moyen des ménages que permet de couvrir le salaire minimum (92 %) a augmenté, le montant du salaire minimum varie selon les groupes d’emploi et la loi fixe à un niveau inférieur la rémunération des employées de maison. Le Comité est préoccupé par les inégalités existant entre les sexes dans le taux de participation à la population active, lequel est de 47,1 % pour les femmes contre 77,1 % pour les hommes, par le fait que les femmes vivant en milieu rural consacrent plus d’heures aux tâches ménagères et par les écarts de rémunération persistant entre les hommes et les femmes.

Le Comité demande instamment à l ’ État partie de niveler le salaire minimum de tous les secteurs d ’ emploi et de continuer d ’ en augmenter progressivement le montant. Il recommande également à l ’ État partie d’adopter les mesures nécessaires pour augmenter le taux d’emploi des femmes et s’assurer qu’elles reçoivent un salaire égal pou r un travail égal et une rémunération égale pour un travail de valeur égale. Il recommande à l’État partie de mettre en place des mécanismes chargés de contrôler que les conditions de travail sont justes dans tous les secteurs économiques .

18.Le Comité exprime à nouveau la préoccupation que lui inspirent les conditions d’hygiène et de sécurité dans l’emploi et, en particulier, les conditions de travail dans les secteurs qui concentrent l’essentiel de la main-d’œuvre, c’est-à-dire l’agriculture, le secteur minier et l’industrie. Le Comité constate avec inquiétude que les conditions de travail dans les plantations agricoles s’apparentent à des formes contemporaines d’esclavage, ainsi que l’a souligné la Rapporteuse spéciale sur les formes contemporaines d’esclavage. Le Comité s’inquiète également du nombre insuffisant d’inspecteurs du travail et de moyens de contrôle et de surveillance.

Le Comité recommande à l ’ État partie de renforcer les dispositifs d ’ inspection et de contrôle des conditions d ’ hygiène et de sécurité dans l ’ emploi et, en particulier, d ’ accroître l ’ effectif des inspecteurs du travail et la fréquence de leurs visites, en mettant l ’ accent sur les secteurs qui concentrent le plus de main-d ’ œuvre, comme l ’ agriculture, le secteur minier et l ’ industrie.

19.Le Comité est préoccupé par les restrictions imposées à l’exercice du droit de créer des syndicats prévu à l’article 8 du Pacte, conformément aux Conventions nos 87 sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical (1948) et 98 sur le droit d’organisation et de négociation collective (1949) de l’Organisation internationale du Travail. Il est plus particulièrement préoccupé par le fait que près de 2 000 travailleurs affiliés au syndicat de l’entreprise Petroecuador aient été licenciés au mépris du droit syndical.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ adopter des mesures pour garantir le respect du droit de former des syndicats. Il engage l ’ État partie à faire respecter le droit syndical et à prévenir toute procédure permettant de licencier des travailleurs syndiqués.

20.Le Comité est préoccupé par le fait que le régime de sécurité sociale de l’État partie ne prévoie toujours pas de couverture universelle. Il est également préoccupé par les disparités entre les taux de couverture, qui s’établissent à 22 % pour l’ensemble de la population, 12 % pour les femmes autochtones et 18 % pour les femmes afro‑équatoriennes.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ élaborer sans tarder un plan pour garantir la couverture universelle de la sécurité sociale et d ’ établir des mécanismes spécifiques pour donner accès aux programmes sociaux de l ’ Équateur aux femmes autochtones et afro-équatoriennes. Le Comité recommande à l ’ État partie de tenir compte d es critères énoncés d ans son Observation générale n o 19 sur le droit à la sécurité sociale (art. 9 du Pacte) pour progresser sur la voie de la pleine réalisation du droit à la sécurité sociale.

21.Le Comité exprime sa profonde préoccupation devant la violence sexuelle et l’exploitation dont sont victimes les filles et les femmes. Il est plus particulièrement préoccupé par les cas de sévices sexuels commis dans des établissements d’enseignement et par les résultats limités des enquêtes judiciaires menées pour établir les responsabilités et appliquer les sanctions pénales prévues. Le Comité est également préoccupé par l’absence d’informations ventilées sur l’âge, le sexe et le lieu de résidence (zone rurale ou urbaine) des victimes. Il prend acte de l’annonce faite par l’État partie au sujet de l’accord que souscriront le Ministère de l’éducation et le Bureau du Procureur général de l’État pour qu’une enquête pénale soit ouverte d’office en cas de violence sexuelle.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ intensifier ses efforts pour lutter contre la violence fondée sur le sexe au moyen de programmes de prévention et de mécanismes de protection des femmes, en tenant compte du rôle que peuvent jouer les femmes e t les organisations qui les représentent. Il engage l ’ État partie à accorder la priorité aux enquêtes sur les cas de violence sexuelle et de sévices sexuels dans les collèges, et à allouer les crédits nécessaires aux centres de soins pour faire face aux diverses formes de violence, d ’ exploitation et de sévices, et à élaborer à l ’ intention des victimes des programmes de prévention et de soins de santé mentale et de soutien psychosocial. Il recommande à l ’ État partie de prendre des mesures pour éviter que les responsables d ’ actes de violence sexuelle exercent à nouveau des activités au contact d ’ enfants et d ’ adolescents. Le Comité demande à l’État partie d’inclure dans son prochain rapport périodique des statistiques ventilées sur l’âge, le sexe et le lieu de résidence des victimes.

22.Le Comité réaffirme sa préoccupation devant la persistance du travail des enfants dans l’État partie, malgré une réduction du nombre d’enfants qui travaillent et malgré les mesures législatives prises pour porter à 15 ans l’âge minimum requis pour accéder à l’emploi. Plus particulièrement, il constate avec préoccupation que la situation de pauvreté des familles rurales et l’accès limité à l’éducation secondaire augmentent les risques en matière de travail des enfants.

Le Comité encourage l ’ État partie à redoubler d ’ efforts en mettant en œuvre un plan d ’ urgence pour lutter contre le travail des enfants assorti de mécanismes de suivi des résultats, dans les diverses régions et dans chaque secteur économique. Il engage l ’ État partie à mener des inspections du travail systématiques et des politiques publiques visant à alléger la situation de vulnérabilité des enfants et des jeunes dans les zones rurales et urbaines, et à assurer pleinement leur accès à l ’ enseignement secondaire.

23.Le Comité constate que, bien que l’indice national de pauvreté ait été ramené à 36,2 % en 2011, la pauvreté augmente considérablement dans des régions telles que l’Amazonie et la Costa. Le Comité est préoccupé par le fait que l’allocation de développement humain destinée aux personnes vivant dans l’extrême pauvreté ne soit pas accessible à toutes les personnes qui se trouvent dans une telle situation et que les autorités locales ne puissent agir de manière satisfaisante pour protéger le droit à un niveau de vie suffisant de la population vivant dans l’extrême pauvreté, en particulier dans les zones rurales.

Le Comité recommande à l ’ État partie de faire en sorte que les programmes de lutte contre la pauvreté prennent dûment en considération les différences et les fractures entre zones urbaines et rurales. Il lui recommande également de poursuivre ses efforts dans le cadre des engagements qu ’ il a souscrits au titre des objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) et d ’ envisager de s ’ appuyer sur les conseils techniques du Programme des Nations Unies pour le développement pour analyser les progrès accomplis vers la réalisation des cibles établies dans les OMD et en rendre compte. Le Comité engage l ’ État partie à établir des mécanismes d ’ information accessibles à la population au sujet de l ’ accès à l ’ allocation de développement humain et à faciliter la création de conseils populaires chargés de contrôler l ’ octroi de l ’ allocation en question et son incidence sur les conditions de vie des bénéficiaires.

24.Le Comité constate avec une profonde préoccupation que le taux de dénutrition infantile persiste dans l’État partie et atteint encore 26 %, malgré les efforts déployés pour le réduire. La dénutrition touche principalement les enfants autochtones pour lesquels la malnutrition chronique est deux fois plus fréquente que pour les autres enfants. Dans les régions comme la Sierra andine, elle atteint 50 % et s’accompagne de déficiences en vitamine A et en fer.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ établir, avec la participation de la société civile, des cartes sur la population en situation d’insécurité alimentaire et de malnutrition à l ’ échelle municipale qui contiennent des données ventilées permettant de définir les priorités en matière de lutte contre la dénutrition, et des mécanismes de suivi de l ’ application des objectifs proposés. Le Comité recommande également à l ’ État partie d ’ élargir le cadre normatif de la protection du droit à l ’ alimentation et d ’ inclure dans la loi organique sur le régime de souveraineté alimentaire des dispositions tendant à protéger la souveraineté alimentaire.

25.Le Comité est préoccupé par les effets des projets des industries minière et agroalimentaire sur l’environnement, en particulier par leurs incidences sur la jouissance du droit à l’eau dans les zones rurales.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ élaborer des mesures de protection du milieu naturel et, plus spécifiquement, d’indiquer les dispositions à prendre pour protéger l’exercice du droit à l ’ eau dans le cadre du développement de projets d ’ activités minières et agroalimentaires.

26.Le Comité est préoccupé par les procédures d’achat de terres par des entreprises et par leur incidence sur la propriété foncière en milieu rural. Il est également préoccupé par les conditions de logement dans les zones à risque, où la fourniture des services de base n’est pas garantie et par les effets du phénomène qualifié de «trafic de terres» par l’État partie.

Le Comité recommande à l ’ État partie de mettre au point des plans d ’ attribution de titres de propriété qui protègent la propriété foncière des paysans et de créer des mécanismes de prévention des ventes forcées dans les zones rurales. Le Comité recommande également à l ’ État partie de mener à bien la réinstallation des familles qui habitent dans des zones à risque dans le respect des principes du droit à une procédure régulière et de communiquer des informations exhaustives sur les conditions de cette réinstallation. Le Comité recommande à l’État partie d’établir des mécanismes chargés de contrôler les procédures d’expulsion et de réinstallation et leur incidence sur la jouissance du droit au logement, en tenant compte des Observations générales n o  4 et n o  7 du Comité, sur le droit à un logement suffisant (art. 11, par. 1, du Pacte) : expulsions forcées .

27.Le Comité fait part de ses préoccupations face à l’insuffisance des services de santé, notamment les services de santé maternelle, fournis dans les zones rurales, ce qui affecte en particulier les femmes autochtones.

Le Comité recommande à l ’ État partie de poursuivre ses efforts en vue de fournir des services de santé maternelle et infantile, en accordant une attention particulière à la couverture et à l ’ accessibilité dans les zones rurales et dans les zones habitées par la population autochtone.

28.Le Comité exprime sa préoccupation devant le taux élevé de grossesse (82,8 ‰) chez les adolescentes de l’État partie, qui est un des plus importants parmi les pays d’Amérique latine ayant un niveau de développement humain élevé. Le Comité est préoccupé par la couverture très basse des services de planification familiale, qui n’est que de 12 %, et par les obstacles qui entravent l’accès aux méthodes de contraception d’urgence au détriment du droit des femmes à la santé sexuelle et procréative.

Le Comité recommande à l ’ État partie de faire les efforts nécessaires, dans le cadre de la Stratégie nationale intersectorielle de planification familiale ENIPLA et d ’ autres programmes pertinents, pour prévenir les grossesses adolescentes sous l ’ angle de l ’ exercice des droits de l ’ homme. Le Comité demande instamment à l ’ État partie de lever les obstacles à l ’ accès à la contraception d ’ urgence et, plus particulièrement, de supprimer les restrictions à la libre distribution des moyens de contraception en question, de mettre au point des stratégies pour surmonter les préjugés culturels qui restreignent la fourniture de ces services aux femmes et de mener des campagnes d ’ information sur le droit des femmes d ’ accéder à ces services.

29.Le Comité constate avec préoccupation que l’article 447 du Code pénal de l’Équateur n’exclut la responsabilité pénale qu’en cas d’avortement pratiqué pour éviter de mettre en danger la vie ou la santé de la mère ou en cas de viol d’une femme souffrant d’un handicap mental et psychosocial.

Le Comité recommande à l ’ État partie de mettre en œuvre la réforme du Code pénal afin d ’ établir des exceptions à la pénalisation de l ’ avortement lorsque la grossesse est la conséquence d ’ un viol, même si la victime ne souffre d ’ aucun handicap, et lorsque l ’ existence de malformations congénitales a été établie. Le Comité prie instamment l ’ État partie de supprimer de son Code pénal les termes «idiote» et «démente» lorsqu ’ ils renvoient aux femmes souffrant d ’ un handicap mental ou psychosocial.

30.Le Comité est préoccupé par l’absence de données suffisantes, ventilées et actualisées sur la santé mentale et psychosociale dans l’État partie. Il est également préoccupé par l’incidence du VIH/sida et, plus particulièrement, par les lacunes relatives à la fourniture de traitements antirétroviraux, ainsi que par la prestation de services de santé, en particulier aux lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres (LGBT).

Le Comité recommande à l ’ État partie de faire de la santé mentale une des composantes prioritaires de sa stratégie nationale de santé et d ’ établir des mécan ismes de contrôle réguliers et indépendants . Il demande à l ’ État partie de présenter, dans son prochain rapport périodique, des informations sur les progrès accomplis en matière de santé mentale et psychosociale. Il recommande à l ’ État partie d ’ établir des directives pour garantir l ’ accès des personnes LGBT sans discrimination aux services de santé, y compris de santé sexuelle et génésique .

31.Le Comité est préoccupé par la persistance de l’analphabétisme et son incidence parmi la population autochtone, malgré les progrès accomplis pour supprimer les frais de scolarité dans l’enseignement primaire. Le Comité est également préoccupé par les restrictions qui entravent l’accès à l’éducation et le maintien dans l’enseignement secondaire et supérieur, en particulier chez les adolescents et les jeunes autochtones, Afro‑Équatoriens et Montubios.

Le Comité recommande à l ’ État partie de poursuivre ses efforts dans le cadre du plan d ’alphabétisation de manière qu ’ il prenne en considération la situation des habitants des zones rurales, des autochtones et des différents groupes d ’ âge. Il encourage l ’ État partie à élaborer des programmes spécifiques pour prévenir l ’ abandon scolaire et s ’ attaquer à s es causes. Il recommande à l’État partie de mettre en œuvre ses politiques avec une large participation du secteur éducatif, y compris des parents et des tuteurs, des syndicats d’enseignants et des mouvements sociaux tant du secteur public que privé.

32.Le Comité est préoccupé par les mauvais traitements physiques et psychologiques dont sont victimes les adolescents et les jeunes dans le système éducatif.

Le Comité demande instamment à l ’ État partie de mettre en place des mesures efficaces dans le système éducatif pour prévenir les mauvais traitements physiques et psychologiques à l ’ encontre des adolescents et des jeunes, et de promouvoir une culture de respect de leurs droits fondamentaux.

33.Le Comité est préoccupé par le risque de voir disparaître certaines langues autochtones dans l’État partie. Il est aussi préoccupé par le fait qu’il n’y a pas suffisamment de documents d’information traduits dans les différentes langues autochtones.

Le Comité invite instamment l ’ État partie à adopter des mesures d ’ urgence pour préserver les langues autochtones. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ intensifier ses efforts pour traduire les informations dans les principales langues autochtones et pour développer des mécanismes visant à encourager leur pratique au niveau local, y compris dans les médias audiovisuels, les livres et les contes d ’ enfants.

34.Le Comité constate avec préoccupation que malgré les efforts de l’État partie pour développer l’accès à Internet, l’accès au cyberespace demeure limité, tout comme son utilisation.

Le Comité recommande à l ’ État partie de poursuivre ses activités visant à élargir l ’ accès à Internet et de redoubler d ’ efforts pour créer des centres d ’ information et d ’ éducation sur l ’ utilisation des nouvelles technologies et d ’ Internet.

35.Le Comité constate avec préoccupation que malgré les efforts de l’État partie pour lutter contre la piraterie et les infractions au droit de propriété intellectuelle, le commerce de produits piratés demeure important.

Le Comité recommande à l ’ État partie de redoubler d ’ efforts pour combattre la piraterie et les infractions au droit de propriété intellectuelle. Il lui recommande également de renforcer le plan d ’ action national contre la piraterie, en signant davantage d ’ accords avec les entreprises détentrices de licences.

36. Le Comité demande à l’État partie de diffuser largement les présentes observations finales auprès de tous les secteurs de la société, y compris les peuples et nationalités autochtones, et de l’informer, dans son prochain rapport périodique, des mesures qu’il aura prises pour y donner suite .

37. Le Comité demand e à l’État partie de soumettre son quatrième rapport périodique, établi conformément aux directives concernant les rapports spécifiques que les États parties doivent soumettre conformément aux articles 16 et 17 du Pacte (E/C.12/2008/2) le 30 novembre 2017 au plus tard .