NATIONS UNIES

E

Conseil économique et social

Distr.GÉNÉRALE

E/C.12/LIE/CO/19 juin 2006

FRANÇAISOriginal: ANGLAIS

COMITÉ DES DROITS ÉCONOMIQUES,SOCIAUX ET CULTURELSTrente‑sixième sessionGenève, 1er‑19 mai 2006

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT AUX ARTICLES 16 ET 17 DU PACTE

Observations finales du Comité des droits économiques, sociaux et culturels

LIECHTENSTEIN

1.Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a examiné le rapport initial du Liechtenstein sur l’application du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (E/1990/5/Add.66) à ses 6e et 7e séances, tenues les 3 et 4 mai 2006 (E/C.12/2006/SR.6 et 7), et a adopté à sa 29e séance, le 19 mai 2006, les observations finales ci‑après.

A. Introduction

2.Le Comité prend note avec satisfaction de la présentation du rapport initial du Liechtenstein, qui a été établi conformément à ses directives, et des réponses écrites à la liste des points à traiter.

3.Le Comité se félicite du dialogue constructif qu’il a eu avec la délégation de l’État partie, laquelle comprenait des représentants de divers services gouvernementaux, et des réponses apportées par cette délégation aux questions qu’il lui a posées.

B. Aspects positifs

4.Le Comité note avec satisfaction que l’État partie est favorable à l’élaboration d’un protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.

5.Le Comité constate que l’État partie a dressé un plan d’action national pour la mise en œuvre du Programme d’action adopté en 2001 à la Conférence mondiale de Durban contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, ainsi que des plans annuels pour l’application du Programme d’action adopté à la Conférence mondiale sur les femmes, tenue à Beijing en 1995.

6.Le Comité se félicite de la création récente d’un Bureau de l’égalité des chances, qui a pour mission de combattre la discrimination fondée sur le sexe, la religion, le handicap, l’origine nationale et les préférences sexuelles.

7.Le Comité se félicite en outre de l’adoption en 1999 de la loi sur l’égalité des sexes, qui transfère la charge de la preuve à l’employeur en cas de discrimination fondée sur le sexe.

C. Facteurs et difficultés entravant l’application du Pacte

8.Le Comité constate qu’il n’existe pas de facteurs ou de difficultés majeurs entravant l’application effective du Pacte dans l’État partie.

D. Principaux sujets de préoccupation

9.Le Comité note avec préoccupation que, bien que le Pacte fasse partie du droit interne et soit directement applicable dans les tribunaux de l’État partie, aucune décision de justice ne mentionne ni ne confirme l’applicabilité directe de ses dispositions.

10.Le Comité se déclare préoccupé par la persistance dans l’État partie d’attitudes xénophobes et intolérantes à l’égard de personnes d’origine ethnique ou de religion différente, en particulier à l’égard des musulmans et des personnes d’origine turque.

11.Le Comité note avec préoccupation que l’article 31 de la Constitution du Liechtenstein ne garantit l’égalité de traitement qu’aux citoyens de ce pays, les droits économiques, sociaux et culturels des «étrangers» n’étant qu’indirectement protégés en vertu d’instruments internationaux.

12.Le Comité craint que le Bureau de l’égalité des chances, qui a remplacé le Bureau de la parité, ne dispose pas de moyens suffisants pour continuer à mettre l’accent sur la parité des sexes, en sus de ses nouvelles responsabilités concernant l’intégration des étrangers, le handicap, l’âge, la religion et les préférences sexuelles.

13.Le Comité note avec préoccupation qu’au Liechtenstein les femmes sont surreprésentées dans les emplois mal rémunérés.

14.Le Comité note avec préoccupation que l’interdiction de la discrimination fondée sur la race, la couleur de la peau, l’ascendance, la nationalité ou l’origine ethnique − art. 46 a) de la loi sur les contrats de travail − ne s’applique qu’à la rupture de la relation de travail et non à l’embauche, à la rémunération et à la promotion.

15.Le Comité constate avec préoccupation qu’il n’y a pas de salaire minimum légal et que, récemment, de nombreuses entreprises ont quitté la Chambre de commerce du Liechtenstein et ne participent donc plus aux négociations collectives sur les salaires.

16.Le Comité note que le droit de grève n’est pas expressément reconnu par la Constitution du Liechtenstein ni par le droit du travail.

17.Le Comité se déclare préoccupé par la persistance d’actes de violence familiale, en particulier à l’égard des femmes.

18.Le Comité note avec préoccupation que les personnes d’origine ethnique différente, en particulier les demandeurs d’asile et les femmes immigrées, semblent se heurter à des difficultés pour louer des logements.

19.Le Comité se déclare préoccupé par le niveau élevé de la consommation de tabac et d’alcool, ainsi que par l’abus de drogues illicites comme le cannabis, en particulier chez les mineurs.

20.Le Comité note avec préoccupation que les enfants d’immigrants ont généralement de moins bons résultats scolaires que les enfants d’origine liechtensteinoise, qu’ils sont surtout présents au niveau inférieur de l’école secondaire, et qu’ils sont sous‑représentés dans l’enseignement supérieur.

E. Suggestions et recommandations

21.Le Comité recommande à l’État partie d’envisager de créer une institution nationale des droits de l’homme qui soit indépendante, conformément aux Principes de Paris (résolution 48/134 de l’Assemblée générale, annexe), et d’adopter un plan d’action national général pour la promotion et la protection de tous les droits de l’homme, notamment des droits économiques, sociaux et culturels.

22.Le Comité demande à l’État partie de veiller à ce que les tribunaux nationaux donnent effet aux dispositions du Pacte et à ce qu’il soit pleinement tenu compte, dans la formation dispensée par les facultés de droit et les écoles de la magistrature, de tous les droits inscrits dans le Pacte, tels qu’ils sont définis dans les observations générales du Comité, ainsi que d’encourager le recours au Pacte en tant que source de droit interne. À cet égard, il appelle l’attention de l’État partie sur l’Observation générale no 9 concernant l’application du Pacte au niveau national.

23.Le Comité encourage l’État partie à envisager de ratifier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.

24.Le Comité prie l’État partie de redoubler d’efforts pour promouvoir la tolérance ethnique et religieuse, par l’éducation scolaire, la formation pédagogique et l’organisation de campagnes de sensibilisation, et d’adopter une stratégie générale pour intégrer les étrangers, en particulier les personnes d’origine ethnique ou de religion différente.

25.Le Comité recommande à l’État partie d’envisager d’adopter des mesures législatives en vue d’étendre l’application des dispositions garantissant l’égalité de traitement aux droits de l’homme des étrangers, et en particulier à leurs droits économiques, sociaux et culturels.

26.Le Comité encourage l’État partie à adopter le projet d’amendement de la loi sur l’égalité des chances visant à transférer la charge de la preuve à l’employeur dans les cas de harcèlement sexuel.

27.Le Comité demande à l’État partie de prendre les mesures voulues pour que les travaux du Bureau de l’égalité des chances demeurent clairement axés sur la parité des sexes.

28.Le Comité prie instamment l’État partie d’appliquer le principe de l’égalité de traitement des hommes et des femmes en ce qui concerne l’accès à l’emploi et la promotion, de redoubler d’efforts pour organiser des programmes de formation à l’intention des femmes exerçant des emplois mal rémunérés ainsi que des chômeuses, et d’appliquer aussi le principe «à travail égal, salaire égal». Il invite l’État partie à inclure dans son prochain rapport périodique des données statistiques sur la place des femmes dans la population active, ventilées en fonction de l’âge, du salaire, du type d’emploi (temps partiel/temps complet) et de l’origine ethnique.

29.Le Comité recommande à l’État partie d’envisager de modifier la loi sur les contrats de travail afin que l’interdiction de la discrimination raciale et ethnique s’applique à tous les aspects de l’emploi, y compris à l’embauche et à la promotion.

30.Le Comité recommande à l’État partie d’envisager d’introduire un salaire minimum légal ou de veiller à ce que les salaires négociés dans le cadre des conventions collectives valent pour tous les employeurs et tous les salariés d’une profession ou d’un secteur économique donné, indépendamment de l’appartenance à la Chambre de commerce, et de garantir une existence décente aux travailleurs et aux salariés ainsi qu’à leur famille, conformément à l’alinéa ii)de l’article 7 du Pacte.

31.Le Comité recommande à l’État partie de reconnaître expressément le droit de grève dans sa législation nationale et de définir les limites admissibles de ce droit. Il l’encourage à supprimer les dispositions de la loi sur la fonction publique qui empêchent les fonctionnaires de faire grève.

32.Le Comité encourage l’État partie à poursuivre ses efforts pour réformer le système de sécurité sociale en prenant des mesures «socialement acceptables» − selon les termes utilisés par l’État partie − telles que la réintégration des personnes handicapées sur le lieu de travail afin de soulager financièrement le régime d’assurance couvrant les handicapés. Il lui demande de fournir des renseignements détaillés sur cette réforme dans son prochain rapport périodique, en ayant à l’esprit les obligations contractées en vertu de l’article 9 du Pacte.

33.Le Comité prie instamment l’État partie d’accroître son assistance aux personnes victimes de violence familiale et de viol conjugal ainsi qu’aux enfants victimes de maltraitance, de renforcer ses campagnes d’information et ses programmes de formation à l’intention des agents de la force publique et du personnel médical pour bien leur faire comprendre le caractère criminel de tels actes, et de fournir, dans son prochain rapport périodique, des renseignements sur les résultats de ces mesures ainsi que sur le nombre de victimes, d’auteurs de tels actes et de condamnations, ainsi que sur les types de sanctions infligées.

34.Le Comité invite l’État partie à continuer de rassembler des données statistiques sur la situation des personnes autres que ses nationaux dans le domaine du logement, à les inclure dans son prochain rapport périodique et à fournir également des renseignements concernant les mesures prises sur la base de ces statistiques.

35.Le Comité demande à l’État partie de poursuivre ses campagnes d’éducation, en particulier à l’intention des mineurs, pour les sensibiliser aux risques que présente la consommation de tabac, d’alcool et de drogues, et de veiller à ce que des services de conseil adéquats soient offerts à tous les tabagiques, alcooliques et toxicomanes. Il invite l’État partie à établir des repères nationaux et des indicateurs détaillés, sur une base annuelle, pour les groupes cibles visés par sa campagne pluriannuelle de prévention de la dépendance, et à donner des renseignements à ce sujet dans son prochain rapport périodique.

36.Le Comité encourage l’État partie à continuer de réduire les obstacles linguistiques en organisant des cours d’allemand intensifs à l’intention des enfants d’immigrants, d’offrir des classes de rattrapage appropriées et de sensibiliser davantage les familles à l’importance de l’instruction pour l’avenir professionnel des enfants. Il l’encourage aussi à relever l’âge auquel on oriente les élèves vers l’un des trois niveaux de l’enseignement secondaire, qui est actuellement de 11 ans, afin que les enfants aient atteint un stade de développement suffisant lorsque cette décision est prise.

37.Le Comité demande à l’État partie de diffuser largement les présentes observations finales à tous les niveaux de la société et de l’informer, dans son prochain rapport périodique, de toutes les mesures qu’il aura prises pour les mettre en œuvre. Il l’encourage également à associer des organisations non gouvernementales et d’autres membres de la société civile au processus de discussion au niveau national avant la présentation dudit rapport.

38.Enfin, le Comité demande à l’État partie de présenter ses deuxième et troisième rapports périodiques en un seul document au plus tard le 30 juin 2011.

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