Nations Unies

E/C.12/2020/SR.6

Conseil économique et social

Distr. générale

27 février 2020

Original : français

Comité des droits économiques, sociaux et culturels

Soixante- septième session

Compte rendu analytique de la 6 e séance*

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le mercredi 19 février 2020, à 15 heures

Président(e):M. Zerbini Ribeiro Leão

Sommaire

Examen de rapports

a)Rapports soumis par les États parties en application des articles 16 et 17 du Pacte (suite)

Cinquième rapport périodique de la Belgique

La séance est ouverte à 15 heures.

Examen de rapports

a)Rapports soumis par les États parties en application des articles 16 et 17 du Pacte (suite)

Cinquième rapport périodique de la Belgique ((E/C.12/BEL/5)  ; document de base commun faisant partie intégrante des rapports présentés par les États parties (HRI/CORE/BEL/2018)  ; liste de points établie avant la soumission du cinquième rapport périodique de la Belgique (E/C.12/BEL/QPR/5))

1.Sur l’invitation du Président, la délégation belge prend place à la table du Comité.

2.M.  Muylle (Belgique) dit que, dans la structure fédérale unique de la Belgique, le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels relève de la compétence de plusieurs gouvernements. Le rapport soumis au Comité est le fruit d’une étroite collaboration entre les diverses entités fédérales et fédérées, et offre ainsi une vision globale du respect par le pays des dispositions du Pacte. La Belgique salue la présence de représentants de la société civile, avec lesquels des consultations ont eu lieu en amont de ce dialogue constructif.

3.M.  Bev é rs (Belgique) dit qu’en avril 2019, la Belgique a adopté une loi portant création d’un institut fédéral pour la protection et la promotion des droits humains. Cet institut permettra d’assurer une couverture totale et transversale des droits fondamentaux au niveau fédéral, puisqu’il sera notamment chargé de suivre la mise en œuvre des obligations internationales qui incombent aux autorités belges. Les différentes entités du système fédéral ont instauré, chacune à leur niveau, un large éventail de mesures destinées à favoriser l’emploi. Le taux d’emploi a ainsi considérablement augmenté. Une série de réformes ont été menées pour renforcer l’intégration des personnes handicapées sur le marché du travail, des mesures d’incitation financière ont été prises pour favoriser le recrutement des seniors, et des politiques ont été spécialement conçues pour offrir des possibilités de formation et d’insertion professionnelle aux jeunes déscolarisés et sans emploi ni formation. De nombreuses initiatives ont été lancées pour améliorer l’efficacité des lois antidiscrimination et mieux combattre la discrimination, notamment au travail et dans l’accès à l’emploi. À titre d’exemple, une modification législative a été adoptée en vue de combler le vide juridique auquel faisaient face les employeurs qui œuvraient en faveur de l’emploi des personnes handicapées, des personnes âgées, des femmes ou des personnes d’origine étrangère. En matière d’éducation, les deux grandes communautés du pays ont approuvé des plans de lutte contre le décrochage scolaire. Ces plans prévoient des mesures visant à améliorer la situation de tous les élèves dès la maternelle. Dans le cadre d’une coopération étendue avec les associations de parents, les écoles s’efforcent d’atteindre l’excellence et de favoriser l’inclusion pour combattre la ségrégation socioéconomique dans l’enseignement.

4.En ce qui concerne les familles de migrants avec enfants, la Belgique a ouvert en été 2018 des « maisons familiales » au sein d’un centre fermé. Des familles avec enfants ont ainsi été hébergées entre l’été 2018 et avril 2019, après quoi le Conseil d’État a suspendu les dispositions de ce régime. Toutefois, des garanties spéciales ont perduré : les familles ont été maintenues dans un régime distinct et adapté à leurs besoins, pour un bref délai et en dernier recours. D’autres solutions ont en outre être proposées aux familles avant le placement en centre fermé, notamment la possibilité, sous certaines conditions, de résider dans une habitation personnelle. La Belgique prend très au sérieux le problème de la pauvreté en général et de la pauvreté infantile en particulier. Outre le troisième Plan fédéral de lutte contre la pauvreté, dont l’un des objectifs stratégiques est la réduction de la pauvreté infantile, les communautés et régions ont élaboré plusieurs autres plans, qui ont abouti à la mise en place d’une stratégie globale et coordonnée de lutte contre la pauvreté et de réduction des inégalités sociales dans toutes les politiques menées. Des mesures récentes ont par exemple permis d’alléger le coût de la scolarité ou d’accélérer l’ouverture automatique de droits sociaux. Depuis 2017, la Belgique dispose d’un plan d’action national « entreprises et droits de l’homme », qui prévoit 33 mesures à prendre par les autorités fédérales et fédérées. Une évaluation de la mise en œuvre de ces mesures a été menée en mai 2019, en collaboration avec les parties prenantes (entreprises, syndicats, société civile et experts), qui ont fait part de leurs vues sur le travail accompli et sur la suite à y donner pour pérenniser l’engagement de la Belgique en faveur de la promotion et de la protection des droits de l’homme.

5.M.  Windfuhr (rapporteur pour la Belgique) note que le pays s’est récemment doté d’une loi portant création d’une institution nationale des droits de l’homme, mais croit comprendre que, dans un premier temps, celle-ci ne sera compétente qu’au niveau fédéral. La Belgique ayant indiqué dans son rapport qu’elle avait l’intention d’étendre les compétences de cette institution au niveau régional, il souhaite savoir ce qu’il en est de ce projet. En outre, il croit comprendre que la Flandre a décidé de cesser sa collaboration avec Unia et a l’intention de créer prochainement sa propre institution. Il se demande si la future institution nationale des droits de l’homme pourra vraiment être habilitée à agir à tous les niveaux de l’État, condition nécessaire pour avoir une vue d’ensemble de l’application du Pacte dans le pays. Il se demande aussi ce qu’il adviendra d’Unia une fois que cette nouvelle institution nationale aura été mise en place. M. Windfuhr constate que la Belgique n’est pas en voie d’atteindre l’objectif qu’elle s’est fixé de réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 15 % d’ici à 2020 et de 35 % d’ici à 2030 par rapport aux niveaux de 2005. Il souhaite savoir où en est l’approbation du Plan national énergie-climat et obtenir des informations sur les mesures et politiques que ce plan prévoit, à court et à long terme, pour réduire les émissions de gaz à effet de serre de la Belgique. Il aimerait connaître les secteurs les plus directement concernés par le Plan et sollicite des précisions sur les mesures prévues pour le secteur des transports. Il s’enquiert également des modalités selon lesquelles la Belgique a débattu de son plan national d’adaptation avec les personnes susceptibles d’être touchées par les changements climatiques, qui risquent d’être nombreuses à long terme dans les pays côtiers. La délégation pourrait peut-être expliquer comment la Belgique envisage de résoudre les conflits que pourrait faire naître l’éventuelle réinstallation de certaines personnes.

6.En ce qui concerne les droits de l’homme et les entreprises, M. Windfuhr sollicite des renseignements sur les initiatives prises pour aider les entreprises à tenir compte de la politique de diligence voulue en matière de droits de l’homme dans le cadre de leurs activités, et pour inciter directement les entreprises à agir, étant donné que le plan d’action national se limite à des mesures volontaires et ne définit pas d’objectifs, d’indicateurs, de responsabilités ni d’échéances. Il souhaite savoir ce que la Belgique entend faire pour améliorer le respect par les entreprises belges des normes de diligence voulue en matière de droits de l’homme, telles que définies dans les Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme, ainsi que pour encourager les entreprises à examiner attentivement l’ensemble de leur chaîne de valeur selon une approche axée sur les droits de l’homme. Le Comité a reçu de la part d’organisations non gouvernementales (ONG) des informations selon lesquelles des entreprises belges avaient exercé des représailles contre des militants locaux et des habitants de certains pays d’implantation. Il serait intéressant que la délégation explique ce que la Belgique compte faire pour protéger les défenseurs des droits de l’homme contre de tels agissements et précise si le pays envisage d’appliquer à cet égard les orientations de l’Union européenne concernant les défenseurs des droits de l’homme. Le Comité déplore que le Pacte ne soit pas directement applicable en droit belge et ne soit que rarement invoqué devant les tribunaux du pays. La Belgique avait également indiqué que le Pacte ne conférait pas directement de droits subjectifs aux personnes. Il y a lieu de préciser si le pays a revu sa position à cet égard. M. Windfuhr se demande en outre pourquoi si peu de personnes se prévalent du Protocole facultatif et émet l’idée que les personnes potentiellement intéressées pourraient ne pas être suffisamment informées de l’existence de cet instrument. Il signale que, d’après les informations dont il dispose, des personnes ont du mal à bénéficier de l’aide juridictionnelle depuis la réforme du système judiciaire, en particulier les personnes démunies, les personnes handicapées et les étrangers placés dans des centres de détention fermés. Des commentaires sur ce point seraient les bienvenus.

7.M. Windfuhr se réjouit de l’importance accordée aux objectifs de développement durable par la Belgique, qui s’est dotée de plans d’action à tous les niveaux de l’État. Il aimerait obtenir des précisions sur la place faite dans ces plans à l’aide internationale et à des préoccupations nationales telles que les villes durables ou la pauvreté. Il constate avec inquiétude que la Belgique n’a toujours pas atteint l’objectif qu’elle s’était fixé de consacrer 0,7 % de son PIB à l’aide publique au développement. Il demande à la délégation belge ce que le pays entend faire pour accroître l’aide au développement à l’avenir. En ce qui concerne l’obligation d’agir au maximum des ressources disponibles, la délégation est invitée à expliquer pourquoi les dépenses consacrées à la protection sociale ont baissé au cours de la période considérée, en particulier les dépenses de soins de santé et de chômage. En outre, l’impôt sur les sociétés va être ramené à 25 % en 2020 et selon certaines ONG, la Belgique deviendrait un paradis fiscal. Il serait intéressant que la délégation donne son point de vue sur cette question et en dise plus sur l’engagement que le pays a pris de sortir 380 000 personnes de la pauvreté. M. Windfuhr s’enquiert de la suite donnée aux 33 recommandations formulées par la commission d’experts chargée d’évaluer les trois lois antidiscrimination du pays, ainsi que des principales leçons que la Belgique a déjà pu tirer des travaux de cette commission. Il note que des plaintes pour discrimination ont été déposées auprès de l’Inspection régionale de l’emploi. À cet égard, il demande à la délégation des informations sur les cas les plus susceptibles d’être signalés et sur les conclusions tirées de ces signalements quant à la discrimination à l’égard des groupes vulnérables sur le marché du travail. Il se félicite des travaux du Point de contact national belge pour les Roms, sollicite auprès de la délégation belge des précisions sur les enseignements que la Belgique a dégagés de ces travaux en ce qui concerne la coordination intersectorielle, et aimerait en savoir plus sur les problèmes auxquels le Point de contact s’intéresse. Il souhaite aussi savoir pourquoi la Stratégie nationale d’intégration des Roms, qui existe pourtant depuis 2012, n’est pas utilisée pour lutter contre la discrimination à l’égard des Roms. Il demande si des mesures sont prises pour mettre en place une stratégie effective de protection des Roms et des plans de lutte contre l’antitsiganisme aux niveaux national, régional et local. La délégation est invitée à expliquer comment la Belgique vient en aide aux localités dans lesquelles vivent des Roms en situation de vulnérabilité.

8.Le Comité a reçu des informations selon lesquelles des migrants, surtout en provenance de pays non européens, continuaient d’être victimes de discrimination dans l’exercice de leurs droits économiques, sociaux et culturels, notamment en matière d’embauche et de logement. Des migrants seraient également victimes d’exploitation dans des secteurs tributaires d’une main-d’œuvre peu qualifiée (construction, ménage, transport, restauration, etc.). Bien souvent, les réfugiés sont aussi en proie à la discrimination dans l’exercice de leurs droits économiques, sociaux et culturels, principalement du droit au logement et à une alimentation adéquate. Selon les renseignements dont dispose le Comité, certains auraient été victimes de violences policières et de détention arbitraire. En outre, d’après Myria, le nombre de places dans les centres d’accueil serait en baisse. Le Comité aimerait connaître le nombre de réfugiés et d’apatrides auxquels il n’a pas été offert de place en centre d’accueil. Il sollicite également des informations sur l’état d’avancement de la révision des lois antidiscrimination, ainsi que sur les mesures que la Belgique compte prendre pour combattre la discrimination, en particulier, mais pas exclusivement, dans le secteur privé. En 2016, la proportion d’employés handicapés dans la fonction publique était de 1,44 %, alors que le quota avait été fixé à 3 % par un arrêté royal de 1972. De plus, seuls 23 % des personnes handicapées de 15 à 64 ans ont un emploi. Le Comité s’interroge sur ce que le pays compte faire pour remédier à cette situation. Il demande si les personnes intersexes sont toujours soumises à des opérations non nécessaires et souhaite obtenir des données à cet égard. Il sollicite des informations sur les progrès enregistrés dans la réduction de l’écart salarial entre hommes et femmes, dans la lutte contre la discrimination à l’égard des femmes dans la sphère socioéconomique et sur le marché du travail, surtout quant à l’accès aux postes à responsabilités, ainsi que dans la lutte contre la discrimination croisée et multiple dont sont victimes en particulier les femmes appartenant à des groupes désavantagés (réfugiées, migrantes, femmes handicapées, etc.). En outre, il serait bon que la délégation fournisse des informations sur l’approche que la Belgique adopte pour combattre la violence contre les femmes sans papiers, compte tenu de la difficulté à détecter ce type de violence.

La séance est suspendue à 15 h 40  ; elle est reprise à 15 h 55.

9.M.  Wéry (Belgique) dit que le Parlement fédéral a adopté le 25 avril 2019 la loi portant création d’un institut fédéral pour la protection et la promotion des droits humains. Cet institut assure une couverture totale des droits de l’homme au niveau fédéral et rend possible la création, à terme, d’une institution nationale des droits de l’homme conforme aux Principes de Paris, conformément aux demandes de nombreux organes conventionnels. L’exposé des motifs de cette loi reconnaît que de nombreuses questions ne sont pas traitées par les mécanismes existants des droits de l’homme, dont les droits économiques, sociaux et culturels consacrés par la Charte sociale européenne (révisée) de 1996 et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. La loi prévoit des dispositions qui entreront en vigueur en cas d’interfédéralisation, notamment la création d’un conseil de concertation au sein duquel les organes de protection et de promotion des droits de l’homme existants seront représentés. Les entités fédérées et le niveau fédéral devront pour cela partager une même vision. À l’entrée en vigueur du Pacte pour la Belgique, en 1983, le Conseil d’État a statué que cet instrument ne pouvait avoir d’effet direct parce que ses dispositions nécessitaient des mesures d’exécution et de mise en œuvre nationales. Seules quelques dispositions du Pacte, dont le droit de grève par exemple, ont un effet direct. Les droits économiques, sociaux et culturels sont cependant visés par l’obligation de standstill: à ce titre, les juridictions doivent veiller à ce qu’il n’y ait pas de recul substantiel de la garantie de ces droits par rapport au niveau antérieur, sans une justification suffisante liée par exemple à l’intérêt général. Le principe de standstill est bien ancré dans la jurisprudence : les juridictions belges de tous degrés y font référence, par exemple dans des affaires portant sur une rémunération équitable, le droit à un environnement sain, l’inconstitutionnalité de certaines dispositions de la loi, etc. De manière générale, la jurisprudence des différentes juridictions et la doctrine montrent également que le Pacte, comme les autres instruments conventionnels, sont bien connus des magistrats et des avocats. Ces instruments sont aussi enseignés dans les différentes facultés, notamment de droit.

10.M.  Maenaut(Belgique)dit quel’accord de coalition du Gouvernement flamand, daté d’octobre 2019, prévoit la fin prochaine de la coopération avec Unia et la mise en place d’un centre efficace pour l’égalité des chances, qui fonctionnera sur la base de la législation antidiscrimination flamande et reprendra les compétences actuelles d’Unia et celles de la chambre flamande des services de l’ombudsman pour les questions de genre. La Flandre consultera Unia et tous les acteurs pertinents au niveau national ainsi que le Réseau européen des institutions nationales des droits de l’homme (REINDH) et le Réseau européen des organismes de lutte contre les discriminations (EQUINET). À terme, le centre flamand pour l’égalité des chances devrait fonctionner au sein d’un mécanisme interfédéral conforme aux Principes de Paris.

11.M.  Bevérs(Belgique) dit que la politique climatique belge est étroitement liée à la politique européenne en la matière. La Belgique a atteint en 2018 déjà, l’objectif européen de réduction des émissions de gaz à effet de serre fixé pour 2020, à savoir une réduction de 20 % par rapport à 1990. Toutefois, les niveaux d’émissions stagnent et les émissions causées par les transports ont même augmenté au cours des dernières années, ce qui s’explique par la situation géographique et économique particulière du pays. Des politiques économiques et environnementales intégrées seront nécessaires pour respecter les objectifs fixés par l’Accord de Paris. La Belgique finalise sa stratégie nationale pour contribuer à l’objectif fixé par le Conseil européen de rendre l’Europe climatiquement neutre d’ici à 2050. La transition vers la neutralité climatique exigera une transformation profonde mais difficile, de l’économie et de la société.

12.M.  Leenknegt (Belgique) dit que pour atteindre les objectifs de l’Accord de Paris, conformément aux exigences de l’Union européenne, la Belgique a adopté le Plan national énergie-climat pour la période 2021-2030, dont l’exécution permettra notamment au pays de réduire de 35 % par rapport à 2005 les émissions dans des secteurs non couverts par le système d’échange de quotas d’émission de l’UE (SEQE-UE) ; d’augmenter à 17,5 % la part des énergies renouvelables dans la production énergétique ; d’augmenter l’efficacité énergétique de 12 à 15 %, en réduisant la consommation d’énergie ; et d’augmenter le taux d’interconnexion électrique à 30 %, l’objectif de 2020 sur ce point étant déjà dépassé. Certains objectifs devraient être revus à l’avenir, en fonction des avancées technologiques, elles-mêmes tributaires de la stabilité du budget accordé à la recherche-développement, qui s’élève à 3 % du PIB, un bon niveau par rapport à la moyenne européenne.

13.M me Dekempeneer (Belgique) dit que le premier plan flamand d’adaptation pour 2013-2020 avait été établi avec le concours de toutes les parties prenantes : conseillers, entreprises, ONG environnementales, autorités locales, universités, instituts scientifiques, etc. Un deuxième plan pour 2021-2030, élaboré de la même façon, est en cours d’approbation par le Gouvernement flamand.

14.M.  Muylle(Belgique) dit que le Plan national d’action Entreprises et droits de l’homme (2017) contient 33 mesures destinées à encourager les entreprises belges et internationales actives en Belgique, ainsi que les organisations et autorités locales à respecter et promouvoir les droits de l’homme dans leurs activités et domaines d’activités. Le Plan d’action prévoit également le suivi des mesures et l’établissement de rapports réguliers qui sont envoyés à tous les membres du Parlement et du conseil d’administration de l’entité évaluée. Pour ce qui est de la diligence raisonnable en matière de droits de l’homme, la Belgique est d’avis que dans un environnement compétitif, c’est aux niveaux européen et international qu’il faut mettre au point des stratégies garantissant le respect des droits de l’homme, et le pays collabore à la recherche de solutions en ce sens.

15.M me Lefebvre (Belgique)dit que la Cour constitutionnelle, garante des droits et des libertés en Belgique, a approuvé la majeure partie de la réforme de l’aide juridique. Cette dernière permet un meilleur accès à l’aide juridique. En effet, quiconque bénéficiait de l’aide juridique sur base d’une présomption auparavant irréfragable, peut désormais être amené à justifier son statut de bénéficiaire. Le Bureau de l’aide juridique peut, s’il suppose que la situation d’un bénéficiaire a évolué, demander des compléments d’information, et s’il y a lieu, réallouer les ressources aux personnes qui en ont le plus besoin. Dans les faits, et après un temps d’adaptation qui a suivi l’entrée en vigueur de la réforme, le nombre de désignations d’avocats et celui des prestations ont considérablement augmenté. Le budget de l’indemnisation des avocats au titre de l’aide juridique a augmenté de 19 millions en 2018 et les avocats pro-Deo sont rémunérés trois fois plus qu’avant. La réforme a entraîné une modification de la nomenclature qui impose la prudence dans les comparaisons. Les cas signalés au Comité, de non‑introduction d’un recours dans les temps, faute de désignation d’un avocat, s’expliquent vraisemblablement par le fait que l’urgence n’a pas été invoquée. En effet, les bureaux d’aide juridique peuvent autoriser la désignation d’un avocat si le demandeur n’est pas en mesure de démontrer, dans les délais imposés par l’urgence de la procédure, qu’il remplit les conditions pour bénéficier de l’aide juridique. Il dispose ensuite de quinze jours pour fournir les pièces requises. Les ordres d’avocat belges ont confirmé le bon fonctionnement de ce système spécial. Plusieurs bureaux d’aide juridique sont très souples quant aux désignations d’avocats pour les étrangers, que la procédure concernée soit ou non liée à la question du séjour. Une simple déclaration sur l’honneur par laquelle le demandeur certifie qu’il ne dispose d’aucun revenu suffit.

16.M.  Leenknegt (Belgique) dit que la Belgique a soumis en juillet 2017 son premier rapport volontaire national d’évaluation concernant la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et qu’elle y a mis l’accent sur la question de la pauvreté. La situation est stable, la pauvreté chez les enfants se situe sous la moyenne européenne et le risque de pauvreté a diminué chez les personnes âgées. Certaines catégories restent vulnérables, comme les familles monoparentales, les personnes avec un niveau d’instruction faible, les personnes issues de l’immigration, etc. Il faut donc continuer à s’efforcer de ne laisser personne de côté. En dépit des plans de réduction de la pauvreté existants à tous les niveaux de pouvoir, la Belgique n’atteindra vraisemblablement pas l’objectif de 10,6 % de pauvreté d’ici à 2030, la projection étant de 16,4 % en cas de politiques inchangées. Tous les niveaux de pouvoirs, y compris municipal, élaborent des politiques liées aux objectifs de développement durable. L’ONU a décerné un prix à la ville de Gand il y a quelques années à Bonn, pour la campagne de sensibilisation aux objectifs de développement durable qu’elle a menée avec cinq autres villes belges. Depuis les dernières élections municipales d’octobre 2018, les objectifs de développement durable sont expressément inscrits dans les programmes des majorités au pouvoir dans de nombreuses municipalités, des deux côtés de la frontière linguistique.

17.M.  Muylle (Belgique) dit qu’en application de la législation belge, le budget de l’aide publique au développement ne peut être inférieur à 0,7 % du PIB. Ce n’est plus le cas depuis que le Gouvernement fédéral a décidé de répartir sur toutes les lignes budgétaires les économies imposées par la crise financière de 2009-2010. Il entend revenir à l’objectif des 0,7%, au plus tard en 2030, d’autant plus qu’il appuie totalement les objectifs de développement durable. Afin d’augmenter l’efficacité de son aide au développement, la Belgique concentre ses interventions dans certains secteurs et dans certains pays, évalue beaucoup plus régulièrement les effets de l’aide, lie cette aide à l’action de grands acteurs, (Fondation Gates ou organisations internationales), et adopte des approches novatrices, comme le démontre sa participation au Programme d’investissement à impact humanitaire, mieux connu sous le nom d’obligation à impact humanitaire, mis en œuvre avec le Comité international de la Croix-Rouge (CICR).

18.M.  Bevérs(Belgique) explique que le gouvernement précédent a adopté une réforme fiscale, appelée Tax shift, qui a permis la création de nombreux emplois. Le taux d’imposition des entreprises a globalement baissé. Des exemptions fiscales ont été supprimées. La Belgique, loin d’être un paradis fiscal, reste l’un des pays européens où la charge fiscale est la plus lourde. La diminution des dépenses consacrées aux allocations de chômage s’explique principalement par la baisse du chômage. Le système d’octroi des allocations a également été modifié. Si la seule obtention d’un diplôme ouvrait auparavant le droit aux allocations de chômage pour une durée illimitée, même en l’absence de toute expérience professionnelle, cette possibilité est maintenant limitée à trois ans. Une évaluation de la mesure a permis de constater que si elle n’a pas amélioré l’insertion des jeunes sur le marché du travail, elle n’a pas non plus entraîné une augmentation du risque de pauvreté pour ce groupe. Le nombre total de personnes qui bénéficiaient de ce système depuis longtemps a effectivement diminué, suite à la réforme.

19.M me Proumen (Belgique) dit que le taux de risque de pauvreté se situe à 16,04 %, niveau le plus haut jamais atteint en Belgique. L’augmentation du niveau d’emploi a surtout bénéficié aux personnes à revenu moyen, ayant au minimum achevé l’enseignement secondaire. Pour les personnes qui se situent sous le seuil de pauvreté, la précarité augmente et l’augmentation des allocations de sécurité sociale, de 24 % en dix ans, ne suffit pas à atteindre le seuil de pauvreté. Le risque de pauvreté chez les enfants vivant dans des ménages précarisés a augmenté et les nouvelles mesures qui seront prises dans ce domaine viseront toute la famille. Les nouveaux plans de lutte contre la pauvreté pour 2020‑2024 sont en cours d’élaboration, au niveau fédéral et dans les entités fédérées, et une certaine concertation a lieu entre ces divers niveaux de pouvoirs. Les mesures contenues dans la Stratégie nationale d’intégration des Roms de 2012 n’ont pas encore été évaluées, contrairement à l’engagement pris par le Gouvernement. Le travail se poursuit néanmoins. Produit direct de la stratégie, la Plateforme nationale belge pour les Roms réunit toutes les parties concernées afin de favoriser le développement d’une perception positive des Roms dans la société. Les régions flamande et wallonne ont toutes deux mis en place des mesures concrètes (personnes-relais en Flandre, centre de médiation en Wallonie) pour favoriser le vivre-ensemble, l’intégration sociale et civique, l’accès à l’emploi et aux services de santé. Dans les deux communautés, des dispositifs concrets favorisent l’accueil des Roms dans les divers niveaux d’enseignement et des groupes de travail s’emploient à cerner les besoins des enfants roms à l’école. Partout en Belgique, les caravanes sont reconnues comme un logement, sous l’appellation d’habitation légère. Deux millions d’euros en Flandre et cinq millions d’euros en Wallonie vont être consacrés en 2020 à l’aménagement d’emplacements. Les 19 communes de la région de Bruxelles-Capitale coopèrent pour faciliter les déplacements des Roms de l’une à l’autre. Le logement social est accessible aux Roms, sans discrimination.

20.M me  Claus (Belgique) explique que dans son rapport intermédiaire de 2017, la Commission d’évaluation de la législation fédérale relative à la lutte contre les discriminations a formulé 33 recommandations dont certaines ont déjà été mises en œuvre, notamment celle concernant les tests de situation et les appels mystère (ou « mystery calls »). En 2019, l’inspection sociale au niveau fédéral et la région de Bruxelles-Capitale ont obtenu plusieurs autorisations du ministère public pour effectuer des mystery calls, par des inspecteurs formés à cette technique. Un projet de loi a été élaboré afin d’intégrer, dans la législation, les notions de discriminations multiples, discriminations sur un motif perçu et discriminations par association, qui existent partiellement seulement dans certaines législations régionales. D’autres recommandations (nos 5, 6, 7, 8, 9, 15 et 28) sont en cours d’exécution. L’article 150 de la Constitution est ouvert à la révision. C’est la première étape vers la mise en place d’un régime procédural identique pour tous les délits inspirés par la haine envers un groupe protégé et l’effectivité garantie de la sanction pour les cas autres que ceux liés au racisme et à la xénophobie.

21.Mme Claus indique que, fin janvier 2020, le Gouvernement fédéral, par la voix de la Première Ministre belge, a proposé la création d’une conférence interministérielle sur le racisme, une proposition ensuite approuvée par le Comité de concertation, qui réunit les gouvernements des communautés et régions et le Gouvernement fédéral. Il s’agit là d’un premier pas vers un plan d’action contre le racisme. Les travaux préparatoires de ce plan tiennent compte des recommandations de la société civile en matière de lutte contre les différentes formes de racisme, y compris l’antitsiganisme et le racisme à l’égard des migrants. L’exercice par les personnes migrantes de leurs droits économiques, sociaux et culturels, notamment l’accès à l’emploi ainsi qu’aux biens et aux services, est garanti par la loi antiracisme de 1981, qui interdit la discrimination fondée sur « la nationalité, une prétendue race, la couleur de peau, l’ascendance ou l’origine nationale ou ethnique ». En 2011, la loi a instauré des quotas hommes-femmes dans les conseils d’administration, lesquels doivent être composés, pour un tiers, des membres du sexe moins représenté. Des sanctions sont prévues en cas de non-respect desdits quotas. Cette loi a grandement contribué à la représentation des femmes. Entre 2008 et 2017, la proportion de femmes dans les conseils d’administration des entreprises cotées en Bourse et des entreprises publiques est ainsi passée de 8,2 % à 26,8 %. S’il est prévu que les entreprises atteignent le quota légal dans les délais impartis, les comités de direction ne sont, pour leur part, pas soumis à cette loi, et la proportion de femmes y demeure donc plus faible.

22.M.  Bevérs(Belgique) dit que les ressortissants de pays n’appartenant pas à l’UE ou les personnes dont les parents ou grands-parents sont des ressortissants de pays hors UE peuvent effectivement rencontrer des difficultés d’insertion sur le marché du travail, ce qui tient à plusieurs facteurs, dont le manque d’accessibilité du marché du travail, se traduisant par un faible taux d’emploi chez les jeunes et les personnes peu qualifiées dans leur ensemble, des obstacles relatifs au système éducatif et une discrimination réelle sur le marché du travail. Différentes mesures ont été prises pour remédier à ces problèmes, notamment la réalisation d’appels mystère et la publication d’un arrêté royal en matière de discrimination positive. En outre, les services d’emploi régionaux étudient les profils individuels des chercheurs d’emploi afin de répondre au mieux à leurs besoins. L’écart de rémunération entre les hommes et les femmes sur base horaire en Belgique est le plus bas de la zone de l’OCDE. En outre, la participation des femmes au marché du travail connaît une augmentation supérieure à celle des hommes depuis de nombreuses années. L’écart qui demeure s’apprécie sur une base annuelle en raison du pourcentage élevé de femmes travaillant à temps partiel, ce qui s’explique notamment par un déséquilibre dans la répartition des tâches familiales. Des campagnes ont été organisées en vue d’encourager les pères à assumer leur part des tâches domestiques ou encore à prendre un congé parental mais des efforts supplémentaires sont nécessaires à cet égard. En Belgique, les services de garde d’enfants sont assez performants mais leur accessibilité et leur coût par rapport aux moyens de la population sont les deux principaux aspects qui doivent encore être améliorés.

23.M me Dekempeneer (Belgique) dit que la Région flamande a adopté en 2018 un plan d’action contre la discrimination sur le marché des logements privés dont la mise en œuvre se fait en coopération avec les différentes parties prenantes. Un pacte prévoyant des mécanismes d’autoréglementation a également été conclu entre le Gouvernement flamand et le secteur immobilier. Le plan d’action et le pacte seront évalués et des mesures supplémentaires seront prises en tant que de besoin.

24.M me Rajkovcevic (Belgique) dit que le Gouvernement régional bruxellois a adopté une ordonnance visant à renforcer la lutte contre la discrimination dans l’accès au logement. Malgré des avancées, des difficultés demeurent concernant la charge de la preuve. L’ordonnance autorise les inspecteurs de Bruxelles Logement à recourir à des tests pour détecter les pratiques discriminatoires chez les bailleurs privés et les professionnels du secteur immobilier. En amont, une étude menée en 2016 et 2017 auprès des agences immobilières à Bruxelles à partir de six critères (origine ethnique, source de revenus, composition familiale, âge, handicap et genre) a révélé que les deux principaux motifs de discrimination sont l’origine ethnique et la source de revenus des candidats locataires. Il ressort aussi qu’un tiers des agents immobiliers se livrent clairement à une discrimination. À cet égard, une campagne de sensibilisation a été menée, des formations ont été dispensées et des brochures d’information ont été diffusées. Deux types de tests sont réalisés : le test de situation, qui consiste à présenter au bailleur ou à l’agent deux locataires réels ou fictifs ayant le même profil à l’exception du critère testé et à comparer les situations qui en résultent, et le test du client mystère, qui permet quant à lui de dresser le constat immédiat d’une pratique discriminatoire, l’agent ne devant pas accepter de demande de discrimination émanant d’un client potentiel. Si une pratique discriminatoire est mise en évidence, le dossier est transmis au Procureur du Roi, qui décide ou non de poursuivre l’auteur présumé de l’infraction. À défaut de poursuites, l’inspection de Bruxelles Logement inflige une amende administrative, qui alimente le fonds budgétaire régional de solidarité.

25.M me Kormoss (Belgique) dit que la police n’a pas accès aux centres fermés pour migrants ou réfugiés. Différentes dispositions ont été prises pour lutter contre toute forme de violence et gérer les cas de violence, notamment la formation du personnel à la gestion des comportements agressifs, des projets de communication interculturelle, l’organisation de réunions pluridisciplinaires de suivi régulier de la situation dans les centres ou encore la diffusion de directives relatives à la gestion de situations pouvant susciter des tensions. Il existe par ailleurs un mécanisme permettant aux personnes de s’adresser à une commission indépendante des plaintes. La question des violences policières a déjà été soulevée dans le cadre du dialogue constructif concernant la mise en œuvre du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Dans l’exercice de sa mission, la police peut être amenée à recourir à la force, dans le strict respect des conditions légales (légalité, proportionnalité, subsidiarité, opportunité, avertissement préalable, etc.). Ses interventions doivent s’inscrire dans le respect des dispositions relatives à la protection des droits de l’homme, lesquelles prescrivent notamment l’interdiction des mauvais traitements et de la torture. Toute violation de ces dispositions est susceptible de faire l’objet de poursuites sur le plan pénal, disciplinaire, administratif ou statutaire. Les sanctions encourues sont abordées dans le cadre de la formation des policiers.

26.M.  Wéry (Belgique) dit que la loi n’impose pas de traitement pour mettre fin à l’intersexualité. Jusqu’à leur majorité, les enfants sont sous l’autorité de leurs parents, à qui il appartient de prendre les décisions qui s’imposent en matière de santé. La loi relative aux droits du patient indique que les droits du patient mineur sont exercés par ses parents ou par ses tuteurs, qui ont l’obligation de déclarer l’enfant dans les quinze jours suivant sa naissance mais disposent dans ce cas d’un délai allant jusqu’à trois mois. Cette question ne se résume toutefois pas à celle de l’autorité parentale en matière médicale et fait l’objet d’initiatives de formation et de sensibilisation. Le 21 février, la Chambre des représentants (parlement belge) organisera un colloque sur ce thème afin de mieux faire connaître les besoins des personnes intersexes et les problèmes auxquels elles se heurtent. Une étude menée en 2016 a mis en lumière l’absence de statistiques en la matière et la nécessité d’affiner la définition de la personne intersexe et de trouver des moyens de l’enregistrer.

27.M me Lefebvre (Belgique) dit que les personnes migrantes sont particulièrement vulnérables face à la violence fondée sur le genre. Des dispositions légales leur permettent de maintenir leur droit de séjour sous certaines conditions mais, dans la pratique, plusieurs obstacles les empêchent d’activer ces mécanismes et de bénéficier d’une protection effective (méconnaissance de leurs droits, précarité du séjour, dépendance administrative vis-à-vis du partenaire). Les victimes de violence conjugale, souvent des femmes, peinent à quitter leur domicile ou à porter plainte. Plusieurs grandes mesures ont été prises dans ce domaine. Tout d’abord, les personnes chargées de l’écoute des demandeurs d’asile et de l’examen des demandes de protection internationale, ainsi que les interprètes qui les assistent, ont reçu des formations spécialisées dont l’objectif était d’améliorer la prise en charge des personnes et de tenir compte de la violence. Des directives internes ont également été diffusées au sein du Commissariat général aux réfugiés et aux apatrides en ce qui concerne les mariages d’enfants ou les violences sexuelles, notamment en vue de garantir que la demande de la victime soit traitée indépendamment de celle de l’auteur. De plus, la procédure de suivi tendant à garantir qu’une fillette ne subira pas de mutilations génitales après avoir reçu le statut de réfugiée a été renforcée. La police doit signaler à l’Office des étrangers tout cas de violence familiale concernant des migrants, à condition toutefois qu’une plainte ait été déposée. Un projet de circulaire sur le maintien du droit de séjour obtenu dans le cadre d’un regroupement familial à l’intention des victimes de violence a été établi pour permettre à ces personnes de recevoir des informations sur les mécanismes de protection à leur disposition (refuges, police, etc.). Il n’a pas encore été adopté mais a déjà été distribué aux partenaires. L’Agence fédérale pour l’accueil des demandeurs d’asile (Fedasil) tient compte de la question du genre et a lancé une vaste étude sur le recensement des personnes vulnérables qui ont des besoins spéciaux, y compris les victimes de violence fondée sur le genre, et leur prise en charge dans des structures d’accueil. Fedasil finance un projet qui a pour but de reconnaître et d’accompagner les victimes de violence fondée sur le genre dans le réseau d’accueil. En matière de sensibilisation, l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes a contribué à l’élaboration d’une brochure intitulée « Migrant-e et victime de relations conjugales : quels sont mes droits ? », qui contient des renseignements sur les droits et les démarches des personnes migrantes ainsi que les coordonnées de professionnels susceptibles de leur venir en aide.

28.M.  Mancisidor demande à la délégation des statistiques ventilées par région, genre, âge, ethnie, zone rurale/urbaine sur l’emploi des femmes, des jeunes, des personnes âgées de 55 à 64 ans et des personnes handicapées, et des informations sur l’efficacité des mesures prises en vue de faciliter l’accès à l’emploi des groupes susmentionnés. Il évoque des statistiques de l’Organisation internationale du Travail selon lesquelles le taux de chômage des jeunes avoisinait les 19 % en 2017 et souhaiterait savoir si la situation s’est améliorée depuis lors. En outre, la délégation est invitée à donner des informations sur les mécanismes de mise en commun d’expériences entre les régions et leur contribution à la diffusion de bonnes pratiques. Elle pourrait peut-être également expliquer la corrélation entre la référence, faite au paragraphe 146 du rapport à l’examen, aux incitations relatives à l’engagement des plus de 50 ans, et l’annexe, qui explique qu’à partir de 50 ans, les personnes en recherche d’emploi n’ont plus droit à un soutien adapté mais sont traitées au même titre que tout autre chômeur. En outre, la délégation voudra bien indiquer quels sont les types de mesures mis en place pour remédier à la faible participation au marché du travail et fournir des données à ce sujet ventilées par genre, âge et niveau de qualification. Constatant que le taux d’emploi des personnes nées hors de l’Union européenne (UE) est de 49,1 %, soit 21,1 points de pourcentage de moins que les personnes nées sur le sol européen, l’expert du Comité s’interroge sur les effets réels des mesures évoquées par la délégation en matière de lutte contre la discrimination fondée sur l’origine ethnique et d’insertion des migrants sur le marché du travail.

29.En ce qui concerne l’article 7 du Pacte, le Comité demande quand est prévue l’entrée en vigueur de la loi sur le bien-être applicable aux travailleurs domestiques et gens de maison et, si la loi est déjà en vigueur, comment sa mise en œuvre influe sur la situation des domestiques. La délégation est invitée à préciser en quoi les mesures présentées aux paragraphes 168 à 185 du rapport ont contribué à remédier à améliorer la situation. Elle est également invitée à apporter des précisions sur l’accès des migrants aux syndicats, leur taux de syndicalisation et les éventuels obstacles qu’ils rencontrent. D’après le paragraphe193 du rapport, aucune mesure législative sur le droit de grève n’est planifiée au vu de l’absence de consensus à cet égard. Le Comité voudrait des éclaircissements sur cette absence de consensus et souhaiterait connaître la position des syndicats et des employeurs à cet égard. En ce qui concerne l’article 9 du Pacte, l’État partie a réaffirmé son intention de relever le niveau des prestations sociales pour le faire coïncider avec le seuil de pauvreté. Ladélégation est invitée à indiquer si le niveau a déjà été relevé ou, à défaut, où en est ce processus. Enfin, elle est invitée à apporter des éclaircissements sur les mesures prises aux fins de l’harmonisation du niveau de protection entre travailleurs indépendants et salariés et la part du travail indépendant dans l’économie nationale.

30.M.  Bevérs(Belgique) dit que les statistiques demandées figurent dans les annexes au rapport, soit sous forme de tableau, soit sur le lien fourni, à l’exception de la distinction entre zones rurales et urbaines, qui n’est guère pertinente dans un pays urbanisé comme la Belgique. En ce qui concerne la faible participation au marché du travail, il indique que le rapport 2019 de la Commission européenne fait état d’une amélioration, notamment une hausse du taux d’emploi. Cette tendance devrait se poursuivre en 2020 et en 2021 même si le taux d’inactivité demeure une grande préoccupation. Le Conseil supérieur de l’emploi, plus haute instance consultative en la matière auprès du Gouvernement belge, a établi un rapport sur la situation des personnes sans emploi et poursuit ses travaux, en particulier en matière d’inadéquation des compétences. La Belgique affiche un écart important entre le taux d’emploi des personnes peu qualifiées et celui des personnes hautement qualifiées, ce qui est à envisager à la lumière des évolutions du marché du travail telles que le passage au numérique, lequel devrait accroître l’écart dans tous les pays. La Belgique a demandé à l’OCDE de se pencher sur cette question et de lui donner des conseils. Le rapport fait état de freins au travail et des efforts sont menés à ce sujet, notamment pour aider les personnes ayant un handicap ou une maladie liés au travail à se réinsérer sur le marché du travail. Le coût de la main-d’œuvre, lié à la question de l’impôt, explique aussi ce problème, de même que la faible mobilité sur le marché du travail. Pour ces raisons, l’objectif de 2020 ne sera pas atteint en dépit de l’augmentation du taux d’emploi, obtenue grâce aux initiatives des régions et à l’évolution de la taxation. En matière d’insertion des migrants sur le marché du travail, la Belgique a l’un des écarts les plus importants entre personnes nées dans un pays de l’UE et personnes nées hors UE, tout comme les Pays-Bas et la Suède, avec lesquels elle coopère aux fins de la mise en commun des bonnes pratiques et de la recherche de solutions. Ce problème est structurel et touche les nouveaux arrivants mais également les immigrés jusqu’à la deuxième génération, de sorte qu’il ne peut être réglé à court terme, surtout qu’il est lié à l’éducation. Le taux d’emploi des migrants a été en hausse alors que celui des personnes d’origine belge a stagné, ce qui prouve qu’un processus de rattrapage est en cours, mais il est lent et des mesures supplémentaires s’imposent. L’exploitation par le travail englobe différentes questions qu’il convient de distinguer. La mobilité sur le marché du travail au sein de l’UE pose des questions en matière de respect des conditions de travail, notamment dans le cadre du détachement des travailleurs, pour lequel l’Union a renforcé les règles et leur application. L’Autorité européenne du travail a été créée avec pour mission d’aider les pays à gérer les questions transfrontières et garantir que les travailleurs venant d’un autre pays bénéficient du même niveau de rémunération et des mêmes conditions que les employés locaux. Le bâtiment, l’agriculture et les transports font partie des secteurs les plus vulnérables et l’inspection sociale s’emploie à régler les problèmes, tâche rendue compliquée par le caractère transfrontière de ces questions.

31.Il existe dans l’Union européenne des mécanismes pour garantir le paiement des salaires des travailleurs détachés, mais la situation est plus difficile pour les migrants illégaux, qui peuvent avoir quitté le pays sans laisser d’adresse. La Belgique coopère avec des ONG pour tenter de retrouver ces personnes et oblige les employeurs à conserver les sommes dues sur un compte bloqué ; elle autorise également exceptionnellement le versement des salaires en espèces pour éviter les situations de ce genre. Les syndicats n’ont pas obligation de déclarer le nombre ou le profil de leurs adhérents. Il n’existe donc pas de statistiques à ce sujet, a fortiori sur le taux de syndicalisation des travailleurs migrants. Le droit de grève n’est pas défini dans la législation belge, mais les cours et tribunaux reconnaissent expressément ce droit et les partenaires sociaux ont conclu en 2002 un gentlemen agreement’s, jugé préférable à une loi. Cet accord fixe les limites de l’exercice du droit de grève, et interdit par exemple de bloquer des routes. Une obligation de service minimum est également prévue, par exemple dans les prisons pour garantir les droits des personnes incarcérées. En outre, les employés des transports ferroviaires doivent faire part quelques jours à l’avance de leur intention de faire grève. La Belgique compte un nombre relativement élevé de travailleurs indépendants. Historiquement, ces travailleurs bénéficiaient de moins d’avantages sociaux que les salariés, en Belgique comme dans de nombreux autres pays, mais on constate dans l’ensemble de l’UE une convergence progressive des statuts, en contrepartie d’une augmentation des charges sociales payées par les indépendants. Le taux d’employés handicapés dans le secteur public s’élevait en 2018 à 1,25 % et des mesures supplémentaires ont été prises pour progresser vers la réalisation de l’objectif de 3 %, en obligeant les administrations à embaucher sur la base d’une liste de personnes handicapées, en renforçant les contrôles et en menant des actions de sensibilisation. Cependant, le Gouvernement fédéral étant en affaires courantes, le secteur public n’a que très peu recruté ces deux dernières années. Les gouvernements régionaux ont également pris des mesures pour améliorer l’emploi des personnes handicapées.

32.M me  Dekempeneer (Belgique) dit que les régions coopèrent en matière de politiques d’activation sur le marché du travail. La Flandre a pris des mesures concrètes en faveur de certains groupes vulnérables, notamment les jeunes peu qualifiés, les personnes de plus de 55 ans et les personnes handicapées, pour les aider à se former et à trouver un emploi, ce qui a permis de faire baisser le taux de chômage au niveau régional.

33.M me Rajkovcevic (Belgique) dit que la Région de Bruxelles-Capitale a lancé le projet Handipreneurs, dans le cadre de l’ordonnance portant sur l’intégration de la dimension du handicap dans les lignes politiques de la Région, le programme Back to Work, destiné à favoriser le retour à l’emploi des femmes ayant volontairement interrompu leur carrière pour raisons familiales, ainsi que la plateforme Women in Business, pour appuyer l’entrepreneuriat féminin.

34.M me  Reuter (Belgique) dit que l’accès des jeunes à l’emploi est l’une des priorités de la Wallonie. Le projet Garantie jeunesse, qui s’inscrit dans la recommandation du Conseil de l’Union européenne sur l’établissement d’une garantie pour la jeunesse, vise à proposer à chaque jeune de moins de 25 ans un emploi de qualité ou une formation dans les quatre mois qui suivent son inscription comme demandeur d’emploi. En outre, l’accès des personnes handicapées à l’emploi est l’une des priorités de l’Agence wallonne pour une vie de qualité, qui dispose de sept bureaux. L’Agence a organisé plus d’une vingtaine d’actions depuis 2018 et octroie des aides financières aux travailleurs handicapés et aux entreprises qui les emploient, par exemple dans le cadre du projet Ergojob. La Région wallonne, en coopération avec Fedasil, a mis en place en 2015 un parcours d’intégration pour les primo‑arrivants, notamment pour améliorer leur insertion socioprofessionnelle. Les Missions régionales pour l’emploi et les Centres d’insertion socioprofessionnelle sont chargés de mettre en œuvre cette politique régionale.

35.M me Proumen (Belgique) dit que les minima sociaux ont augmenté de 28 % au cours des dix dernières années et que les bénéficiaires de ces allocations ont également droit à des tarifs préférentiels dans les domaines de l’énergie et du transport.

36.M me  Lefebvre (Belgique) dit qu’une loi entrée en vigueur en juillet 2019 consacre le principe de non-sanction des victimes de traite des êtres humains, qui ne pourront donc plus être poursuivies, notamment pour travail illégal. Cette disposition vise à protéger ces victimes et à les convaincre de collaborer avec la justice.

37.M.  Uprimny dit que la violence contre les femmes et les enfants est un problème récurrent en Belgique. Il se félicite des mesures décrites dans le rapport à l’examen mais s’interroge sur leur efficacité. Il invite la délégation à communiquer les résultats des évaluations du Plan d’action national de lutte contre toutes les formes de violence fondée sur le genre 2015-2019 et du Plan national de sécurité 2016-2019, car les statistiques figurant dans l’annexe au rapport ne permettent pas de savoir s’il y a eu amélioration. Les migrants en situation irrégulière, en particulier les femmes, ayant peur de déposer plainte par crainte d’être détenus et renvoyés vers leur pays d’origine, l’expert aimerait savoir s’il existe une stratégie concrète visant à établir une séparation claire entre les services de l’immigration et les services de police. Il s’interroge également sur les politiques de lutte contre la pauvreté, notamment sur l’efficacité du troisième Plan fédéral de lutte contre la pauvreté (2016-2019), et souhaiterait avoir des renseignements sur les mesures correctrices qui pourraient être mises en place. Il est à craindre qu’en raison de la structure constitutionnelle complexe de la Belgique, le manque de coordination entre les régions puisse accentuer le problème du logement des sans-abri. En effet, si un accord de coopération dans ce domaine a été conclu en 2014, la conférence interministérielle chargée de son application n’a apparemment pas été mise en place. L’expert aimerait savoir si des statistiques fédérales sur les expulsions seront bientôt disponibles, et si l’État partie prévoit d’élaborer une stratégie nationale sur le logement et les sans-abri et de développer le parc de logements sociaux, qui est notoirement insuffisant et ne représente que 7 ou 8 % du parc privé, contre 20 % dans certains pays européens ou, à défaut, d’encadrer les loyers du marché locatif privé. Selon les informations dont dispose le Comité, le nombre d’expulsions aurait augmenté au cours des dernières décennies, car le bailleur aurait la possibilité de mettre fin au contrat de façon unilatérale, de même que le nombre de cas de coupure des services d’eau et d’électricité, dont les tarifs ont beaucoup augmenté. La délégation est donc invitée à détailler le cadre juridique et les mécanismes qui peuvent être mis en place pour garantir le droit à un logement en cas d’expulsion et le droit à l’eau. L’expert voudrait également avoir des précisions sur les mesures qui pourraient être prises pour faire respecter le droit au logement des gens du voyage, puisque de nombreuses caravanes auraient été saisies au cours de l’opération « Strike » menée par la police belge en 2019 pour démanteler un réseau d’escrocs.

38.M. Uprimny salue les efforts notables que la Belgique a déployés pour faire face à l’afflux de migrants et de réfugiés, mais il semble que dans de nombreux cas, des demandes d’asile auraient été rejetées sur la base de présomptions générales, en dépit de la décision de la Cour constitutionnelle sur la procédure à suivre, et que les demandeurs aient alors été privés de leurs droits sociaux. Il souhaite donc connaître les stratégies prévues pour remédier à cette situation. L’expert s’inquiète de l’augmentation des cas de surpoids et d’obésité et demande des précisions sur les modifications à apporter aux stratégies de lutte contre ces phénomènes qui touchent les groupes les plus vulnérables. Il aimerait aussi connaître les mesures prises pour protéger l’agriculture paysanne, sachant que le pays a perdu environ 70 % de ses fermes au cours des trente dernières années, et savoir si la Belgique compte appuyer la Déclaration des Nations Unies sur les droits des paysans et des autres personnes travaillant dans les zones rurales. La délégation est également invitée à fournir des renseignements sur toute étude ayant été ou devant être menée sur la politique de soutien aux agrocarburants et leurs effets sur le droit à l’alimentation dans les États tiers où les entreprises de l’État partie ont des activités ou depuis lesquels elles importent des agrocarburants. Si la Belgique dispose d’un excellent système de santé, les migrants en situation irrégulière n’ont droit qu’à une aide d’urgence et se heurtent à des obstacles administratifs pour l’obtenir, et les personnes handicapées ont des difficultés à accéder à des soins de qualité en raison du manque d’infrastructures et de sensibilisation du personnel médical. Le Comité aimerait donc connaître les mécanismes susceptibles de remédier à ces problèmes, ainsi que les mesures envisagées pour assurer un accès équitable aux soins indépendamment du niveau de revenu du foyer. Enfin, l’expert souhaiterait savoir pourquoi la Belgique, à l’instar de la Colombie, n’incorpore pas dans la loi une norme de consentement parental qualifié, c’est-à-dire éclairé par un avis médical, avant d’engager tout traitement dans les cas d’intersexualité chez un enfant.

La séance est levée à 18 h 5.