Nations Unies

E/C.12/2012/SR.17

Conseil économique et social

Distr. générale

18 mai 2012

Original: français

Comité des droits économiques, sociaux et culturels

Quarante-huitième session

Compte rendu analytique de la première partie (publique)* de la 17 e séance

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le jeudi 10 mai 2012, à 10 heures

Président: M. Pillay

Sommaire

Examen des rapports

a)Rapports soumis par les États parties conformément aux articles 16 et 17 du Pacte (suite)

Rapport initial, deuxième et troisième rapports périodiques de l’Éthiopie (suite)

La séance est ouverte à 10 h 5.

Examen des rapports

a)Rapports soumis par les États parties conformément aux articles 16 et 17du Pacte (suite)

Rapport initial, deuxième et troisième rapports périodiques de l ’ Éthiopie ((E/C.12/ETH/1-3); document de base (HRI/CORE/ETH/2008); liste des points à traiter (E/C.12/ETH/Q/1-3); réponses écrites du Gouvernement éthiopien à la liste des points à traiter (E/C.12/ETH/Q/1-3/Add.1 − en anglais seulement)) (suite)

1. Sur l ’ invitation du Président, la délégation éthiopienne reprend place à la table du Comité.

Articles 13 à 15 du Pacte (suite)

2.M.  Kedziademande quelles sont les mesures prises pour rendre l’Internet accessible à tous.

3.M.  March á n Romero souhaite savoir si les deux actes législatifs mentionnés au paragraphe 387 du rapport de l’État partie, qui ont trait à la protection des droits de propriété intellectuelle, prévoient également un régime spécial pour la protection du savoir traditionnel des nombreuses et riches cultures autochtones du pays ou si un tel régime a été créé indépendamment.

4.Faisant référence au rapport de l’experte indépendante sur les questions relatives aux minorités (A/HRC/4/9/Add.3), M. Marchán Romero s’enquiert de la suite donnée aux recommandations qui y sont formulées, en particulier celles portant sur la dépolitisation de l’ethnicité et la promotion de politiques d’inclusion, de partage du pouvoir et de coopération (par. 98) et sur l’organisation d’une conférence consacrée au fonctionnement du système de fédéralisme ethnique (par. 99).

5.M.  Sadi demande s’il existe une stratégie nationale en matière d’éducation qui soit appliquée de manière uniforme sur l’ensemble du territoire, et si l’État partie connaît la jurisprudence du Comité au sujet de l’éducation, en particulier son Observation générale n° 13 et ses diverses observations finales. Il demande en outre si les nombreux groupes ethniques du pays cohabitent de manière pacifique et harmonieuse et si, au-delà des diversités, il se dégage une culture commune.

6.M. Riedel s’inquiète des conséquences que le projet de construction d’un barrage hydroélectrique (Gibe III), à la frontière entre l’Éthiopie et le Kenya, pourrait avoir sur l’environnement et les populations locales (notamment en matière de subsistance et d’alimentation). Il demande quelles mesures sont prises pour garantir les droits des quelque 100000 personnes qui risquent d’être touchées, et si le Gouvernement prévoit de publier des informations détaillées sur le projet pour que les populations concernées puissent l’évaluer et faire part de leurs observations aux autorités.

7.M me Shin demande pourquoi l’Éthiopie a rejeté la recommandation formulée par le Conseil des droits de l’homme à l’issue de l’Examen périodique universel (EPU) de 2010 la priant d’adresser une invitation permanente aux titulaires de mandat au titre des procédures spéciales. Elle demande également si le Gouvernement est disposé à reconsidérer sa position au sujet du financement des œuvres caritatives et des associations par des donateurs étrangers.

8.M.  Kedzia s’étonne lui aussi que l’État partie, qui a fait part de sa détermination à renforcer la coopération avec les organismes des Nations Unies dans le domaine des droits de l’homme, refuse d’adresser une invitation permanente aux titulaires de mandat au titre des procédures spéciales. Il prie la délégation éthiopienne de donner des informations sur les mesures prises pour mettre en œuvre les recommandations énoncées dans le document A/HRC/4/9/Add.3 au sujet de la protection des minorités.

9.M.  Schrijver s’enquiert de la place accordée à l’éducation aux droits de l’homme dans les programmes scolaires. Il demande si les autorités éthiopiennes ont l’intention de publier les observations finales du Comité concernant l’Éthiopie pour les rendre accessibles au grand public et, le cas échéant, dans quelles langues il compte le faire. M. Schrijver souhaite savoir si une procédure est en place à cet égard.

10.Le Président, intervenant en sa qualité de membre du Comité, revient sur son observation formulée la veille au sujet du taux de population vivant en dessous du seuil international de pauvreté, et précise que les données sur lesquelles il s’appuie ont été publiées par la Banque mondiale en janvier 2011.

11.M.  Getahun (Éthiopie) rappelle que, comme indiqué dans les réponses écrites du Gouvernement éthiopien à la liste des points à traiter, la proclamation no 188/1999 établit clairement que les tribunaux de la charia n’ont pas compétence pour les affaires pénales mais seulement pour les questions ayant trait aux relations familiales, telles que le mariage, le divorce, la garde des mineurs, la dot et l’héritage. En principe, labigamie est interdite par le Code de la famille de l’État fédéral et par la législation de la plupart des États régionaux, mais dans la pratique elle existe encore en Éthiopie. Les mariages concernés sont régis par la proclamation no 188/1999. Pour ce qui est de la violence familiale, le Code pénal considère les violences conjugales comme des lésions corporelles graves intentionnelles.

12.S’agissant de la lutte contre la pollution, l’Éthiopie dispose de divers textes législatifs, dont la proclamation no 300/2002 qui régit notamment la gestion des déchets dangereux et des substances chimiques et radioactives, ainsi que des déchets municipaux. Des inspecteurs de l’environnement sont chargés de faire appliquer les normes en vigueur; leurs décisions peuvent faire l’objet d’un recours en appel selon une procédure régulière. La proclamation no 513/2007 régit la gestion des déchets solides à l’échelle fédérale. Les régions ont promulgué des lois similaires. De plus, le Gouvernement a récemment adopté la Stratégie en faveur d’une économie verte résiliente face aux changements climatiques, qui touche tous les aspects de la vie en Éthiopie. Intégrée au Plan de croissance et de transformation, elle est centrée sur l’amélioration de la productivité des petites exploitations agricoles et sur le reboisement, qui est un des piliers de la Stratégie. Le Gouvernement prévoit également de mettre en place des modes de transports en commun peu polluants, notamment des trains fonctionnant à l’électricité, dans toutes les régions. L’autre pilier de la Stratégie est l’utilisation de technologies respectueuses de l’environnement dans la construction.

13.Le projet de barrage Gibe III, qui s’inscrit dans la même Stratégie, permettra de produire 45 000 MW d’énergie hydraulique (contre 2 000 MW actuellement) à près de 84 millions d’habitants. Ce projet fait encore débat; les communautés concernées, en aval du barrage, ont été associées au processus dès le début, comme l’attestent différents documents. La construction de ce barrage aura des retombées positives: elle permettra de passer d’une agriculture de décrue à une agriculture irriguée, et d’échapper aux montées soudaines des eaux que la région a déjà connues, avec les conséquences dévastatrices que l’on sait.

14.Les répercussions sociales et environnementales du projet de barrage ont fait l’objet d’études indépendantes, accessibles sur Internet. Les Kényans ont été associés à l’intégralité du processus consultatif et à l’étude des effets du projet sur le lac Turkana, dont la salinité ne devrait pas augmenter ni le niveau baisser. Un accord d’achat d’énergie a été conclu entre le Kenya et l’Éthiopie. Les différents projets de barrage sont financés en grande partie par des ressources nationales, le reste du financement étant assuré par des prêts à des conditions avantageuses consentis par différents partenaires, dont la Chine. Le site Internet de la Compagnie nationale d’électricité donne accès à tous les documents relatifs au projet.

15.Pour ce qui est des retraites, le montant mensuel minimum et les prestations peuvent être revalorisés tous les cinq ans par le Gouvernement en fonction des conclusions d’une étude effectuée sur la question par l’Organisme public des retraites.

16.L’Éthiopie n’a pas accepté les recommandations relatives aux visites de titulaires de mandat au titre des procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme (A/HRC/13/17) car elle souhaite pouvoir agir au cas par cas. Toutes les recommandations du Groupe de travail sur l’EPU et des organes conventionnels sont examinées avec le plus grand sérieux; toutefois, des considérations constitutionnelles ou budgétaires ou des divergences de vues peuvent en restreindre l’application. Les recommandations sont intégrées au Plan national d’action sur les droits de l’homme, dont l’un des principaux objectifs est leur exécution, après consultation de l’ensemble des parties prenantes. Les recommandations auxquelles l’Éthiopie estime pouvoir donner suite sont soumises au législateur pour adoption, puis il incombe aux organismes compétents de les mettre en œuvre et d’y allouer les ressources nécessaires.

17.La Constitution et les lois éthiopiennes contiennent notamment de nombreuses dispositions relatives à la représentation, à l’auto-identification, ainsi qu’à la pratique de la langue et de la culture des minorités. Depuis 1991, les neuf États régionaux peuvent choisir la langue dominante aux niveaux administratif, judiciaire et scolaire.

18.M. Yimer (Éthiopie) rappelle que l’Éthiopie a déjà reçu deux visites de l’Expert indépendant sur les questions relatives aux minorités. Le paragraphe 1 de l’article 91 de la Constitution garantit la protection de toutes les cultures et, chaque année, l’Éthiopie célèbre la Journée des nations, des nationalités et des peuples. L’article 39 de la Constitution prescrit les droits des nations, des nationalités et des peuples, y compris le droit à la sécession, et la protection des savoirs traditionnels. Le Ministère de l’éducation est chargé d’établir les programmes scolaires, qui sont dispensés dans tous les établissements d’enseignement, dans des langues différentes selon l’établissement. L’éducation aux droits de l’homme fait partie du programme au lycée et à l’université. Un comité consultatif composé de représentants des neuf États régionaux doit examiner dans les semaines à venir l’ensemble des observations finales des organes conventionnels. L’Éthiopie s’efforce d’élargir l’accès à Internet dans tout le pays; le Ministère de la communication et des technologies de l’information et de la communication a été créé en 2010.

19.M me Lulit (Éthiopie) dit que la Stratégie nationale relative à la santé procréative est fondée sur les droits de l’homme; celle-ci encadre la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement, et vise à faire connaître les risques liés à la grossesse auprès de la population afin de réduire la mortalité maternelle, ainsi qu’à faciliter l’accès à des soins de santé de qualité dans tout le pays, notamment dans les zones rurales. Le nombre de centres de santé est passé de 600, en 2005, à 2 500, en 2010. Dans le cadre du Programme d’expansion des services de santé, des services de planification familiale ont été mis en place au niveau local et plus de 34 000 travailleurs de santé ont été déployés dans les zones rurales, notamment pour distribuer différents moyens de contraception. Les services de planification familiale sont gratuits et implantés dans des établissements publics. Le nombre de décès liés aux avortements dans les hôpitaux est passé de 32 %, en 2005, à moins de 6 %, en 2008.

20.Désormais, l’âge du premier mariage des filles tend à être supérieur à 16 ans, notamment parce que les filles accèdent davantage à l’éducation. Le nombre de mariages précoces et d’avortements illégaux a diminué ces dernières années. Plusieurs politiques et stratégies ont été adoptées en faveur de la santé maternelle et néonatale: Initiative pour une grossesse plus sûre(2010), Stratégie en faveur de la santé procréative des adolescents et des jeunes (2006), révision de la loi sur l’avortement (2005), politique relative à la gratuité des services pour les services essentiels de santé maternelle primaire. De même, plusieurs stratégies ont été adoptées en vue de réduire la mortalité maternelle, notamment des programmes d’expansion des services de santé et d’augmentation des postes de santé, de généralisation du recours aux moyens de contraception modernes, de formation des sages-femmes et de formation aux urgences obstétriques. L’Éthiopie n’est toutefois pas en mesure d’affirmer qu’elle pourra réaliser le cinquième objectif du Millénaire relatif à l’amélioration de la santé maternelle d’ici à 2015.

21.Le taux de couverture en soins prénataux est passé de 67,7 %, en 2008/09, à 71,4 %, en 2009/10, tandis que celui des soins dispensés, dans des conditions d’hygiène, par des travailleurs de santé déployés dans le cadre du programme d’expansion des soins de santé, passait de 12,3 % à 17 %, et le taux d’acceptation des moyens de contraception de 56,2 % à 61,9 %. Le pourcentage de naissances encadrées par des travailleurs de santé est passé de 5,7 %, en 2005, à 10 %, en 2011. L’Éthiopie devrait pouvoir réaliser le quatrième objectif du Millénaire relatif à la réduction de la mortalité infantile, sachant que le taux correspondant a reculé de 97 ‰, en 2001/02, à 59 ‰, en 2010/11, tandis que celui de la mortalité des enfants de moins de 5 ans passait de 144 ‰ à 88 ‰ au cours de la même période.

22.L’alimentation est l’un des volets du programme d’expansion des services de santé. Il n’existe pas de campagne spécifique de lutte contre le tabagisme mais des programmes de prévention des comportements à risque sont menés, notamment en matière d’addiction (tabac, alcool, drogues). L’Autorité chargée de l’administration et du contrôle des médicaments organise des ateliers et des formations à l’intention des parlementaires, des travailleurs de santé, des travailleurs sociaux, des agents des forces de l’ordre, des journalistes et des jeunes. Le Ministère de la santé diffuse quant à lui des programmes et campagnes de promotion de modes de vie sains.

23.M.  Ayehu (Éthiopie) dit que la politique culturelle est fondée sur le principe de l’égalité et qu’elle est appliquée au niveau fédéral et au niveau des régions, où des centres culturels et des bureaux du tourisme ont été créés. La Journée des nations, des nationalités et des peuples, célébrée le 9 décembre, a pour buts de promouvoir les valeurs et les principes du système fédéral et de faire connaître l’identité, l’histoire et la culture des différentes communautés composant la société éthiopienne. En collaboration avec les organismes régionaux compétents, le Ministère de la culture et du tourisme a organisé des festivals culturels consacrés à l’art et à l’artisanat éthiopiens; des manifestations similaires sont aussi organisées au niveau régional par les autorités culturelles et les bureaux du tourisme locaux. Pour l’exercice 2011/12, le budget alloué par le Gouvernement fédéral au Ministère de la culture et du tourisme s’élève à près de 194 millions de birr. Le Gouvernement a également versé quelque 15 milliards de birr de subventions aux gouvernements régionaux pour les aider à réaliser les objectifs de développement socioéconomique; cette enveloppe s’ajoute aux subventions ordinaires. Les gouvernements régionaux disposent d’une autonomie qui leur permet d’établir leur budget en fonction de leurs priorités.

24.S’agissant des droits de propriété intellectuelle, l’Éthiopie considère que les droits relatifs aux savoirs traditionnels sont un droit collectif des communautés, qu’elle est, à l’instar d’autres pays en développement dotés d’un riche patrimoine, très soucieuse de protéger. Le Bureau éthiopien de la propriété intellectuelle travaille actuellement à l’établissement d’un système national de numérisation des savoirs traditionnels, et des initiatives sont prises pour créer un cadre législatif, politique et institutionnel complet dans ce domaine. Il existe également un ensemble de textes législatifs relatifs aux droits des agriculteurs, à la protection des savoirs agricoles traditionnels et au partage des avantages.

25.M.  Abebe (Éthiopie) dit que le Gouvernement, pleinement conscient de l’importance cruciale de l’éducation pour le développement du pays, a introduit la gratuité de l’enseignement primaire qui n’est toutefois pas obligatoire, faute de moyens. Il illustre par quelques chiffres les progrès considérables réalisés dans le domaine de l’éducation: le taux net de scolarisation à l’école primaire est de 96 %; entre 1995 et 2011, le nombre d’écoles primaires en zone rurale est passé de 8 434 à 28 349; le nombre d’élèves scolarisés dans les établissements primaires est passé de 2 millions à 16,7 millions, dont 8 millions de filles; le budget de l’éducation, qui était de 2,7 milliards de birr en 2005/06, a augmenté chaque année pour atteindre 6,7 milliards de birr dans le budget 2011/12. S’agissant des données sur la scolarisation ventilées par zone et par sexe, M. Abebe dit qu’en zone urbaine, les écoles primaires comptent 1,6 million de garçons (49,8 %) et 1,63 million de filles, et en zone rurale, 6,6 millions de garçons (53 %) et 5,9 millions de filles. Dans le cadre du Plan de croissance et de transformation, un dispositif visant à améliorer la qualité de l’enseignement a été adopté. Il est constitué de six programmes thématiques: formation des enseignants; programmes d’études; gestion; évaluation des élèves et examens; éthique; et technologies de l’information et de la communication (TIC). Grâce à cette initiative, le nombre d’enseignants qualifiés a connu une rapide augmentation, notamment dans le primaire supérieur.

26.Le taux d’abandon scolaire est lié principalement aux problèmes de sensibilisation des parents, d’accessibilité des établissements et de manque d’enseignants qualifiés. Diverses mesures ont été prises pour y remédier, notamment l’augmentation du nombre d’enseignants qualifiés et leur meilleure répartition sur l’ensemble du territoire, la mise en place de programmes d’alimentation scolaire, l’aménagement de dortoirs pour les filles, et surtout l’utilisation des langues vernaculaires au niveau primaire.

27.L’Éthiopie, pour laquelle le développement est une question de survie, ne peut se permettre d’exclure la moitié de sa population. L’éducation des filles est donc une priorité pour le Gouvernement. Elle fait l’objet d’une stratégie nationale et est prise en compte dans tous les volets de l’organisation du système éducatif − formation des enseignants, conception des programmes, enseignement supérieur. Le Ministère de l’éducation a conclu un mémorandum d’accord avec les gouvernements régionaux pour promouvoir la scolarisation des filles, également soutenue par de nombreuses mesures à différents niveaux − clubs de filles ou groupes de conseillers pour les filles dans toutes les écoles; système d’entraide entre élèves pour réduire l’échec et l’abandon scolaires; célébration d’une semaine de l’éducation des filles. Par ailleurs, les Bureaux des affaires féminines aux niveaux régional et local encouragent l’éducation des femmes. À travers les programmes intégrés d’autonomisation des femmes, celles-ci ont accès aux cours d’alphabétisation et constituent la moitié du million et demi d’adultes bénéficiaires. Des campagnes de sensibilisation sont également menées pour promouvoir l’éducation des femmes et des filles.

28.Sur la question du travail des enfants, phénomène certes très répandu, M. Abebe fait observer qu’il peut s’agir de menus travaux qui n’occupent l’enfant que deux à trois heures par jour et ne l’empêchent pas d’aller à l’école; il demande que le problème soit replacé dans le contexte de l’Éthiopie, qui est l’un des pays les moins avancés.

29.Dans le cadre du Programme d’éducation alternative de base, un projet d’enseignement itinérant a été mis en place à l’intention des peuples nomades. Les résultats sont encourageants, même si le nombre d’élèves reste inférieur aux attentes. Des membres des communautés nomades (Somalis, Afars) sont formés au métier d’enseignant.

30.M me Mahlet (Éthiopie) dit que le nombre de femmes vivant avec le VIH/sida, plus élevé dans les zones rurales que dans les zones urbaines, s’explique non pas par les viols ou les enlèvements mais par des croyances ancestrales, l’ignorance et les tabous face aux moyens de contraception. Pour remédier à cette situation, des campagnes de sensibilisation et des cours de formation en matière de santé sexuelle et procréative, avec distribution de préservatifs, ont été menés dans tous les villages du pays, auprès des hommes comme des femmes. Ces initiatives ont contribué à réduire le nombre de nouvelles infections dans les zones rurales et incité les femmes vivant avec le VIH/sida à suivre un traitement. Une étude indépendante confirme que, depuis la mise en œuvre de ce programme, 97 % des femmes et 99 % des hommes sont informés sur le VIH/sida, soit la quasi-totalité de la population éthiopienne. L’incidence de la maladie est passée de 0,28 % en 2009/10 à 0,14 % en 2010/11, et la prévalence est de 2,3 %. Le taux de prise en charge des femmes enceintes par les services de prévention de la transmission mère-enfant (PTME) a progressé de 22 % en 2009/10 à 33,4 % en 2010/11, tandis que le pourcentage de personnes bénéficiant de traitements antirétroviraux passait de 8,3 % à 9,3 %. La quasi-totalité des 9 466 000 personnes que les services de conseil et de dépistage volontaire cherchaient à atteindre l’ont été; plus de 125 000 personnes se sont révélées porteuses du VIH et suivent un traitement. Entre 2009/10 et 2010/11, le pourcentage de femmes enceintes ayant subi un test de dépistage est passé de 22 % à 33,4 % et celui de femmes enceintes ayant suivi un traitement préventif de 8 % à 9,3 %. Enfin, le nombre de centres de santé qui dispensent le traitement PTME est passé de 1 103 en 2009/10 à 1 445 en 2010/11.

31.M.  Hidug (Éthiopie) dit que le Gouvernement éthiopien a érigé en infraction pénale les actes de violence à l’égard des femmes, dont les auteurs s’exposent désormais à des sanctions. Il a créé un pôle spécialisé composé de juges ayant suivi une formation pointue dans ce domaine au sein du Ministère de la justice, ainsi qu’une juridiction chargée de connaître de telles affaires. L’Éthiopie s’est en outre dotée d’une chambre civile consacrée aux affaires de cette nature où des victimes à faible revenu demandent réparation.

32.Pour combattre efficacement la violence à l’égard des femmes, le Gouvernement a instauré un mécanisme habilité à engager une procédure administrative ou pénale contre les membres des forces de l’ordre et autres responsables de l’application des lois qui n’auraient pas pris les mesures voulues contre les auteurs de tels actes. Il a en outre mis en place, en collaboration avec des organisations non gouvernementales, des programmes de formation sur cette question à l’intention des juges, des procureurs, des policiers ou encore des défenseurs des droits des femmes, programmes qui ont porté leurs fruits puisque le taux de condamnation est en progression depuis lors.

33.D’autres mesures encore ont consisté à sensibiliser la population aux principes des droits de l’homme − et plus précisément des droits des femmes −, et à traduire à cette fin dans les langues locales les principaux instruments internationaux pertinents auxquels l’Éthiopie est partie, puis à en diffuser largement la traduction à l’échelle du pays. De plus, un hôpital a été exclusivement affecté à la prise en charge des femmes victimes de violences souffrant de séquelles physiques et psychologiques.

34.Des consultations ont été menées auprès des responsables religieux et des chefs traditionnels dans l’État de l’Afar pour tenter de mettre un terme aux pratiques traditionnelles néfastes telles que la violence à l’égard des femmes, et de favoriser le respect des droits économiques, sociaux et culturels des femmes. Une loi spéciale interdisant les pratiques traditionnelles néfastes a d’ailleurs été adoptée.

35.M.  Abraha (Éthiopie) dit que l’Éthiopie n’a tiré aucun profit des grandes révolutions qui ont marqué le siècle qui vient de s’écouler, à savoir les révolutions industrielles du XXe siècle, la révolution verte des années 1960 à 1990, et la révolution actuelle des technologies de l’information et de la communication (TIC). Pour éviter de se laisser distancer au niveau mondial dans le domaine des TIC, l’Éthiopie s’est employée à étendre ses réseaux de téléphonie mobile et d’accès à Internet. C’est ainsi qu’elle est parvenue à multiplier par 10 le nombre d’utilisateurs de téléphones portables depuis 2005, et à faire passer de 13 % (2004) à 62 % (2010) le nombre de ruraux se trouvant à moins de cinq kilomètres d’un téléphone, l’objectif étant d’atteindre un taux de couverture de 100 %. En outre, 10 000 kilomètres de câbles à fibre optique ont été mis en place, avec raccordement aux réseaux de câbles sous-marins internationaux. Il est également prévu de mettre la technologie numérique au service de l’éducation grâce à la numérisation des documents et manuels pédagogiques.

36.M.  Getahun (Éthiopie) dit que son pays a adopté trois lois majeures dans le domaine des savoirs traditionnels: la proclamation no 482/2006 sur l’accès aux ressources génétiques, les connaissances communautaires et les droits communautaires, la proclamation 209/2000 relative à la conservation du patrimoine culturel et à la recherche dans ce domaine et enfin la proclamation 229/1966 sur les antiquités portant sur la protection des valeurs historiques et archéologiques du pays. À cet égard, l’Éthiopie s’enorgueillit d’être considérée comme le «berceau de l’humanité».

37.Très impliquée dans les discussions qui ont lieu à l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) sur la question des ressources génétiques, des savoirs traditionnels et du folklore, l’Éthiopie invite le Comité à y prendre part. Elle travaille notamment à la création d’un centre de l’innovation et des technologies et d’une école de la propriété intellectuelle et envisage de mettre en place à long terme un projet de numérisation et d’enregistrement des savoirs et du patrimoine culturels du pays.

38.M.  Sadi demande si l’État partie envisage de recourir davantage à l’énergie solaire dans les zones rurales, notamment pour l’irrigation et le pompage de l’eau des puits.

39.M.  Marchán Romero invite l’État partie à fournir des informations détaillées, dans son prochain rapport périodique, sur les projets relatifs aux ressources génétiques, aux savoirs traditionnels et au folklore mentionnés par la délégation. Il demande comment l’État partie s’y prend pour numériser et enregistrer les savoirs traditionnels, et pour veiller à la protection de ces savoirs. Il souhaite en outre savoir si l’État partie envisage d’instaurer un fonds de développement pour que les communautés concernées aient accès aux revenus que l’État partie tire de l’exploitation légale de leurs ressources traditionnelles.

40.M.  Getahun (Éthiopie) dit que le Gouvernement éthiopien est conscient de la nécessité de se tourner à terme vers l’énergie solaire, mais que l’énergie la moins chère à produire demeure l’énergie hydraulique. Cela étant, des projets pilotes sont actuellement menés à l’échelle locale pour expérimenter d’autres types d’énergie, notamment solaire et éolienne.

41.M.  Abuye (Éthiopie) se félicite du dialogue fructueux et riche instauré avec le Comité en dépit de quelques points de désaccord et l’assure que le Gouvernement éthiopien accordera la plus grande attention aux observations finales qui lui seront adressées, qu’il communiquera à toutes les parties prenantes. Saluant la grande variété des sujets abordés, qui témoigne de l’intérêt des membres du Comité pour la situation qui prévaut en Éthiopie, il dit que le Gouvernement veillera à l’avenir à soumettre dans les temps ses rapports périodiques ainsi que ses réponses écrites à la liste des points à traiter.

42.Le Président salue à son tour le dialogue franc instauré avec la délégation éthiopienne, et remercie la délégation. Il insiste sur la nécessité pour l’État partie de faire rapport au Comité dans les délais fixés. Il se réjouit du très bon taux de croissance et des progrès enregistrés en matière de lutte contre la pauvreté, malgré les disparités observées entre zones rurales et zones urbaines. Le Président affirme que le Comité s’assurera de la fiabilité de ses diverses sources d’information − organisations internationales et organisations non gouvernementales − et de l’exactitude des renseignements dont il dispose avant d’élaborer ses observations finales, s’agissant notamment de la question des expulsions forcées et des questions foncières qui en découlent. Il annonce que l’examen des rapport initial et deuxième et troisième rapports périodiques de l’Éthiopie est achevé.

43. La délégation éthiopienne se retire.

La première partie (publique) de la séance prend fin à 12 h 20.