Nations Unies

E/C.12/2010/SR.50

Conseil économique et social

Distr. générale

23 novembre 2010

Original: français

Comité des droits économiques, sociaux et culturels

Quarante - cin qu ième session

Compte rendu analytique de la 50 e séance

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le lundi 15 novembre 2010, à 15 heures

Président: M. Marchán Romero

Sommaire

Journée de débat général sur le droit à la santé sexuelle et procréative

La séance est ouverte à 15 h 10.

Journée de débat général sur le droit à la santé sexuelle et procréative

Réunion-débat 3: questions transversales

1.Le Président indique que M. Mokhiber va animer la troisième réunion-débat.

2.M. Mokhiber (Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme) fait observer que les questions transversales liées au droit à la santé sexuelle et procréative, très nombreuses et variées, ont trait notamment aux minorités, au genre, à la pauvreté, à la criminalisation, à la détention, aux personnes handicapées, aux personnes âgées ou encore à l’emploi. Il présente les deux experts qui vont intervenir sur ces questions, à savoir Mme Mehra, anciennement Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes, ses causes et ses conséquences et actuellement Directrice exécutive d’un groupe de conseil juridique sur la justice sociale et les droits des femmes en Inde et en Asie du Sud; et Mme Stefiszyn, Directrice de programme au Centre pour les droits de l’homme de l’Université de Pretoria, auteur de recherches sur la violence à l’égard des femmes en Afrique australe et sur les droits des femmes dans le contexte de la pandémie du VIH/sida.

3.M me  Mehra (Partners for Law in Development) se félicite que le Comité prévoie d’adopter une Observation générale sur la santé sexuelle et procréative qui, espère-t-elle, intégrera toute la complexité des enjeux concernés. En effet, si certains problèmes affectant la santé sexuelle et procréative sont reconnus comme tels, d’autres font encore l’objet de controverses et demeurent sensibles. Il importe en particulier de prendre en considération les discours sociaux qui sous-tendent la discrimination à l’égard des femmes: la construction des rôles sociaux vise fondamentalement à institutionnaliser la domination des hommes sur les femmes dans toutes les sphères de la vie publique et privée. En témoignent l’absence de moyens de contraception, l’imposition de rapports de force au sein de la famille, la violence familiale, le viol conjugal et l’impossibilité pour les femmes de maîtriser leur fécondité. Le secteur de la santé peut également être un lieu de discrimination à l’égard des femmes, notamment lorsque des femmes handicapées, lesbiennes, transgenres, célibataires ou jeunes se voient refuser l’accès aux services médicaux, ou lorsqu’elles subissent des sévices de la part des prestataires de santé. Mme Mehra salue les analyses de ces phénomènes faites par le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes.

4.Les femmes sont très exposées à la violence enracinée dans les pratiques culturelles et aux violences commises dans le cadre des conflits, des migrations ou des déplacements. Pour y remédier, il faut que les États reconnaissent leur existence et mettent en place des mesures de protection. En outre, des discriminations fondées sur d’autres motifs que le sexe ou le genre venant s’ajouter à la discrimination à l’égard des femmes, il est nécessaire d’identifier les groupes les plus exposés à ces discriminations afin de les protéger. Il s’agit notamment des lesbiennes, des homosexuels, des bisexuels, des transsexuels et des intersexués (LGBTI), des séropositifs, des travailleurs du sexe, des handicapés, des adolescents, des migrants et des personnes vivant en milieu rural.

5.Mme Mehra appelle l’attention du Comité sur le fait que la sexualité est déterminée par des facteurs sociaux qui privilégient certains aspects de la sexualité et en stigmatisent d’autres, et qui légitiment certains abus visant les femmes (viol conjugal, pratique juridique consistant à absoudre le violeur qui épouse sa victime). Il faudrait remettre en question les comportements juridiques et normatifs qui reviennent à imposer des normes ambivalentes selon qu’elles s’appliquent aux hommes ou aux femmes.

6.S’agissant des facteurs déterminants sous-jacents de la discrimination, il convient de s’intéresser aux politiques nationales et à leurs effets sur la jouissance du droit à la santé sexuelle et procréative. La santé ne se limite pas à l’absence de maladie: elle englobe un certain nombre de déterminants sociologiques et environnementaux garants d’une vie en bonne santé. Il s’agit notamment de l’alimentation, du logement et de l’accès à l’eau, à l’éducation ou encore à l’emploi. La mise à disposition de soins de santé de qualité accessibles à tous sans discrimination est plus importante encore. Par ailleurs, les politiques démographiques prévoyant des stérilisations forcées, limitant à deux enfants par couple ou refusant la mise en place de services d’avortement sans risques doivent être modifiées de façon à protéger le droit à la santé sexuelle et procréative. Plus généralement, on doit s’intéresser aux priorités stratégiques des États: ceux qui préconisent des politiques militaristes, au détriment de la santé, négligent leurs obligations en matière de droits économiques, sociaux et culturels. Mme Mehra déplore les orientations de nature économique libérale et l’absence de réglementations conformes aux normes relatives aux droits de l’homme concernant certains marchés (biogénétique, techniques de procréation médicalement assistée, produits issus d’embryons, d’ovules et de tissus humains) qui ont pour effet de reconfigurer le patriarcat et le contrôle démographique à l’aide des moyens techniques modernes, sur la base des règles économiques et commerciales transnationales. Compte tenu de la grande diversité des droits en jeu, la terminologie choisie par le Comité devra refléter les multiples dimensions de la santé sexuelle et procréative et les nombreuses questions transversales.

7.M. Mokhiber (Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme) note avec satisfaction que Mme Mehra a mis l’accent sur les incidences de la discrimination et des normes traditionnelles entravant la liberté de décision des femmes sur la hiérarchie sexuelle et ses conséquences en matière de santé, et sur les politiques économiques transnationales, ce dernier point ayant été examiné avec attention par le Comité au cours des dernières années.

8.M me  Stefiszyn (Université de Pretoria), intervenant sur le droit à la santé sexuelle et procréative des femmes dans le contexte de la pandémie du VIH/sida, indique que le rapport entre la violence contre les femmes et la propagation du VIH/sida n’est plus à démontrer. Les femmes, insuffisamment autonomes, ne peuvent faire valoir leurs droits relatifs à la vie sexuelle, donc se protéger contre le VIH: les tentatives dans ce sens se soldent souvent par des violences infligées par le partenaire. On peut donc déplorer que, dans nombre d’États, la violence domestique ne soit pas criminalisée. Les programmes de prévention qui prônent l’abstinence, la fidélité et le recours aux préservatifs reposent sur l’idée fausse que les femmes maîtrisent les circonstances de leur vie sexuelle. Or, bien qu’il soit établi qu’elles ont du mal à imposer l’utilisation du préservatif à leur partenaire, les femmes ont toujours aussi peu accès au préservatif féminin, pour des raisons de coût notamment. Même s’il semble bien qu’elle limite la transmission du VIH de l’homme à la femme, la circoncision masculine, préconisée dans de nombreux pays d’Afrique notamment, vise une fois de plus l’homme; trop souvent, les bailleurs de fonds financent des projets qui bénéficient aux hommes, au mépris des réalités des femmes. Le droit à la santé doit être exercé en l’absence de toute discrimination, y compris celle fondée sur le sexe ou la séropositivité, en particulier envers les groupes vulnérables.

9.Par ailleurs, la stigmatisation et la discrimination dont sont victimes les femmes vivant avec le VIH/sida comptent parmi les principaux facteurs de la propagation du virus. Nombre de femmes séropositives sont stigmatisées en tant que «vecteur» de la maladie, et certaines ont été soumises à des mesures de stérilisation forcée au motif qu’elles ne sauraient exercer leur droit fondamental de choisir le moment d’avoir des enfants. La stérilisation forcée est une pratique avérée en Afrique australe et en Amérique du Sud. D’autres groupes vulnérables (lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres, toxicomanes, travailleurs du sexe) se heurtent aux mêmes problèmes lorsqu’ils veulent accéder aux services de soins. Cette discrimination et cette stigmatisation compromettent l’action des pouvoirs publics contre la pandémie de VIH/sida.

10.M. Mokhiber (Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme) relève que les structures patriarcales ont pour effet de priver les femmes de leur libre arbitre et tendent à exacerber le non-respect de leurs droits. La criminalisation de certains comportements aggrave la discrimination et la stigmatisation, avec pour conséquences la limitation de l’accès aux soins de santé. Il est essentiel que les États établissent des statistiques ventilées pour éclairer leurs décisions politiques relatives à la promotion du droit à la santé sexuelle et procréative.

11.M me  Barahona Riera (Rapporteuse pour l’élaboration d’une Observation générale sur le droit à la santé sexuelle et procréative) convient que les constructions sociales sont au cœur de tous les problèmes de discrimination à l’égard des femmes et d’autres groupes vulnérables, et demande aux experts d’éclairer sur la façon dont l’Observation générale, de nature essentiellement juridique, pourrait tenir compte de cette réalité.

12.M. Riedel demande à Mme Mehra des précisions sur les mauvais traitements infligés par des prestataires de soins de santé. Il souhaite également des informations plus détaillées sur l’utilité des données ventilées.

13.M me Moodie (Fonds des Nations Unies pour l’enfance − UNICEF) dit que le droit à la santé sexuelle et procréative revêt une importance capitale et croissante pour l’UNICEF, qui s’emploie à promouvoir ce droit dans tous les aspects de ses politiques, programmes et partenariats. Le Fonds défend le droit de chacun à une vie sexuelle saine, libre, non contrainte, sans discrimination ni violence, et le droit de décider librement du nombre d’enfants qu’il souhaite avoir et de l’espacement des naissances, conformément au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, à la Convention relative aux droits de l’enfant et à la Convention pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes; au consensus auquel les gouvernements sont parvenus à la Conférence internationale du Caire sur la population et le développement; à d’autres objectifs internationaux par lesquels l’UNICEF s’est engagé à promouvoir la santé sexuelle et procréative et les droits en la matière, d’une part, et l’égalité entre les sexes, d’autre part, en tant que stratégies complémentaires afin de garantir la protection des femmes, des adolescents et des enfants et de faire en sorte qu’ils puissent exercer leurs droits de manière autonome.

14.L’UNICEF promeut dans cette optique l’application des Principes directeurs internationaux sur l’éducation sexuelle de l’Organisation des Nations Unies pour la science, l’éducation et la culture (UNESCO) en partenariat avec d’autres entités du système des Nations Unies, et applique en collaboration avec le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et la Banque mondiale un plan d’action visant à renforcer l’action menée en faveur de la santé des mères et des nouveau-nés dans 25 pays pilotes. Le Fonds a développé régulièrement ses activités visant à promouvoir la santé sexuelle et procréative, en particulier celle des adolescents. Il espère poursuivre son dialogue avec le Comité et d’autres partenaires pour la suite de ces activités.

15.M. Abramson (Spécialiste des questions relatives aux droits de l’enfant) dit que, dans le droit international, les enfants sont reconnus en tant qu’êtres humains dès la conception. La Convention américaine relative aux droits de l’homme dispose que le droit à la vie «doit être protégé par la loi, et en général à partir de la conception», et la Convention relative aux droits de l’enfant a été rédigée expressément pour s’appliquer à partir de la conception.

16.Le déséquilibre le plus important dans le rapport de force entre les personnes est celui entre adultes et enfants, en particulier pendant la période prénatale et immédiatement après la naissance, à travers des pratiques telles que le choix du sexe de l’enfant avant la naissance au détriment des filles, ou la sélection avant la naissance en cas de handicap même mineur (palmure des doigts, par exemple, aisément guérissable par simple intervention chirurgicale). Le point de vue de l’enfant à naître, auquel le droit international reconnaît des droits dès la conception, notamment celui de ne pas être soumis à la violence, n’est pas suffisamment pris en compte dans le débat. Le Comité doit le prendre pleinement en considération dans le cadre du projet d’Observation générale, pour lequel il doit respecter l’équilibre entre plusieurs droits dont certains sont antinomiques.

17.M. Texier dit que la question du contrôle des naissances oppose deux notions contradictoires, celle de liberté de la femme et de l’homme de disposer de leur sexualité et de décider des enfants qu’ils souhaitent avoir et avec quel espacement, et une notion propre à plusieurs religions qui considère le contrôle des naissances comme condamnable. Le Pacte ayant été ratifié par 160 États de systèmes sociaux, économiques et politiques disparates et de conceptions très différentes, M. Texier se demande jusqu’où l’on peut aller sur la question du contrôle des naissances dans le cadre d’une Observation générale.

18.M me Van de Velde (Consultante dans le domaine des droits de l’enfant), évoquant son parcours personnel − enfant conçue dans la violence puis rejetée par sa mère, victime de viol quand elle était jeune femme, ayant subi un avortement et une fausse couche, aujourd’hui mère d’une jeune fille − estime que préconiser le recours systématique à l’avortement en cas de viol ou d’inceste revient, d’une certaine façon, à jeter au visage des personnes conçues dans cette violence et qui ont échappé à l’avortement qu’elles n’auraient pas dû vivre. Elle déplore le fait que très souvent, croyant régler un problème, on tue un être humain au lieu de se préoccuper de la vie de l’enfant en gestation. D’après une enquête, 80 % des femmes ayant avorté après un viol ou un inceste regrettent leur décision, et 100 % de celles qui ont gardé leur enfant en sont heureuses. Mme Van de Velde appelle l’attention sur les droits de l’enfant à naître en tant que personne humaine, qui doivent être pleinement pris en considération.

19.M. Walker (Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme) souligne que les droits des personnes handicapées dans le domaine de la santé sexuelle et procréative doivent être pris en compte dans le projet d’Observation générale. Aux diverses questions soulevées s’ajoutent les problèmes propres aux personnes handicapées: stérilisations et avortements forcés, violences et sévices sexuels, non-reconnaissance de la capacité de décision, manque d’informations adaptées, ou encore risque de double discrimination face à la pauvreté et au sous-développement, non sans conséquences sur le plan de la santé sexuelle et procréative. La Convention relative aux droits des personnes handicapées énonce un certain nombre de principes particulièrement pertinents dans ce contexte, notamment la liberté de faire ses propres choix (art. 3); le droit de décider librement et en toute connaissance de cause du nombre de ses enfants et de l’espacement des naissances (art. 23); l’accès à des services de santé gratuits ou d’un coût abordable couvrant la même gamme et de la même qualité que ceux offerts aux autres personnes, y compris des services de santé sexuelle et procréative (art. 25).

20.M. Buckley (Society for the Protection of Unborn Children) rappelle qu’il a présenté un document contestant au Comité des droits économiques, sociaux et culturels le droit d’élaborer une Observation générale portant sur une notion absente de l’énoncé très précis du Pacte. Selon l’organisation, le droit à la vie de tous les êtres humains de la conception à la mort naturelle est protégé par la Charte internationale des droits de l’homme. Dans son préambule, la Convention relative aux droits de l’enfant reconnaît des droits fondamentaux à l’enfant pendant tout la période prénatale.

21.Le Comité doit assurer l’application du Pacte conformément à la règle générale d’interprétation énoncée à l’article 31 de la Convention de Vienne sur le droit des traités. L’ONG, qui ne reconnaît aucun droit à l’avortement ni aucun droit au détriment de vies innocentes, invite le Comité à ne pas céder aux pressions d’organisations internationales puissantes qui tirent un profit financier considérable du sacrifice de vies humaines, et à se garder de toute campagne idéologique qui aurait pour objet d’élargir le sens du Pacte, tandis qu’il ferait abstraction du sort des plus vulnérables, à savoir les enfants durant la période de la vie qui va de la conception à la naissance.

22.M. Schmitt (Organisationmondiale des associations pour l’éducation prénatale − OMAEP) indique que son organisation, qui regroupe des associations d’une vingtaine de pays, travaille à partir de données scientifiques, en tenant compte des traditions culturelles des différents pays. Elle constate dans ses travaux que ce qui suit la naissance prend son origine bien avant la naissance, dès la conception. Des travaux scientifiques récents soulignent l’influence bénéfique que peut avoir le bon état psychique de la mère sur le développement de l’enfant pendant la période de gestation, quelles que soient les conditions dans lesquelles l’enfant a été conçu.

23.M. French (Save the Children) remercie les intervenants pour leurs contributions sur la discrimination fondée sur le sexe, qui présente un lien direct avec la santé et la survie de l’enfant, d’où la nécessité d’une approche transversale. Par exemple, le fait pour une femme de ne pouvoir décider à quel moment elle va avoir un enfant ni avec quel partenaire a une incidence sur l’espacement des naissances. Or, dans une même fratrie, l’enfant né moins de dix-huit mois après l’enfant précédent a trois fois plus de risques de décéder que s’il naissait après un intervalle de trois ans. Le manque de pouvoir de décision des femmes peut aussi entraîner des mariages et des grossesses précoces; et le risque de décès de la femme enceinte est deux fois plus élevé lorsqu’elle a entre 15 et 20 ans et cinq fois plus élevé pour l’adolescente de moins de 15 ans

24.M me Jernow (Commission internationale de juristes) dit que la pénalisation des relations sexuelles librement consenties, du travail sexuel, de la transmission du VIH et plus généralement des relations sexuelles hors mariage a des incidences sur deux aspects connexes des droits en matière de santé sexuelle et procréative. En premier lieu, elle porte directement atteinte au droit à la santé en empêchant l’accès aux services de santé de personnes considérées comme déviantes ou immorales et en suscitant à leur endroit des attitudes de stigmatisation, de discrimination et de peur. En outre, les services de santé ne sont pas conçus pour répondre à leurs besoins. Les pays où les relations sexuelles librement consenties sont criminalisées s’avèrent souvent incapables de fournir des renseignements sur le niveau d’information et le comportement des populations à risque.

25.En second lieu, la pénalisation des relations sexuelles consentantes a des conséquences directes pour la santé sexuelle en refusant aux personnes la liberté de disposer de leur corps et de choisir leurs partenaires; elle viole les droits à la vie privée, à la dignité et à la non-discrimination. Des droits ne sauraient être restreints en fonction de motifs religieux ou de préjugés. Les lois concernant les relations entre personnes du même sexe servent souvent à justifier le harcèlement et l’arrestation de personnes perçues comme homosexuelles ou comme s’écartant de la norme. De telles lois sont davantage motivées par l’antipathie pour ces personnes que par des considérations objectives, ce qui ne peut être admis en droit.

26.M me Verzivolli (Réseau international des groupes d’action pour l’alimentation infantile) appelle l’attention sur la question de l’allaitement naturel. Partie intégrante du cycle procréatif féminin et donc de la santé procréative, l’allaitement naturel est bénéfique pour la santé de la mère comme pour celle de l’enfant. En pratique, les femmes et l’ensemble de la population doivent être informés des avantages de l’allaitement et une aide doit être offerte aux femmes au moyen de services complets de santé sexuelle et procréative, y compris lors des catastrophes naturelles et dans les situations d’urgence.

27.M me Meyer de Stadelhofen (Femmes catholiques du monde) dit que l’organisation qu’elle représente soutient le droit à la vie et condamne l’avortement, et regrette qu’un thème aussi sensible que celui de la santé sexuelle et procréative n’ait pas été abordé différemment. Il aurait été plus approprié de réunir des experts de différentes cultures et religions afin de montrer les différentes approches et, ainsi, mieux cerner les problèmes.

28.Dans le domaine de l’éducation sexuelle, les parents montrent une nette préférence pour les instruments internationaux car le sujet touche des convictions religieuses et morales. La politique des États doit renforcer l’action des parents dans le respect de ces convictions. La formation dans ce domaine ne peut prétendre imposer une morale ou une vision du monde propre à l’État. Femmes catholiques du monde regrette une vision de l’éducation sexuelle trop inspirée par les modèles pédagogiques des pays du Nord qui ont montré clairement leurs limites: augmentation de la violence sexuelle à l’école et des grossesses d’adolescentes, et propagation des maladies sexuellement transmissibles en milieu scolaire. En outre, les jeunes eux-mêmes font le constat que cette éducation, axée uniquement sur les risques, est très négative. Face aux expériences d’une violence extrême qu’ils connaissent tous les jours, quels que soient l’école ou le milieu social et familial, c’est à un dialogue et à une formation au respect de l’intimité et au sens profond de la sexualité que les jeunes aspirent fondamentalement.

29.M me Philipps (Centre for Reproductive Rights) dit que son organisation recense bon nombre de violations des droits en matière de santé sexuelle et procréative des femmes séropositives. Non limitées au champ d’application du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, ces violations touchent tout un ensemble de sujets relatifs aux droits de l’homme − droit de ne pas être soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants; droit à l’intégrité physique et mentale; droit à la dignité; droit à la santé; droit de disposer de son corps; droit de ne pas être soumis à la violence sexiste; droit à la vie privée; droit à la vie de famille −, qui doivent être tous pris en considération dans le cadre du projet d’Observation générale.

30.M me Todd-Ghev (Organisation mondiale de la santé − OMS) souligne que le projet d’Observation générale recouvre un grand nombre de questions que le Comité est particulièrement bien placé pour traiter de manière transversale. Elle invite celui-ci à veiller à ce que le processus d’élaboration du texte ne soit pas détourné par des débats sur l’avortement. La question doit être traitée mais elle risque de consumer les discussions et l’analyse des questions au détriment des nombreux aspects devant être abordés. Mme Todd‑Ghev recommande aussi au Comité de faire appel aux nombreux spécialistes et organismes (OMS, Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida, Fonds des Nations Unies pour la population) qui rassemblent des données et mènent des analyses scientifiques sur ces questions depuis très longtemps.

31.M me Timberlake (ONUSIDA) dit qu’il appartient au Comité de déterminer clairement à l’avance ce qui doit faire l’objet de l’Observation générale. Il se peut que certaines questions ne se limitent pas au domaine de la santé mais concernent tous les droits visés par le Pacte. S’agissant de ceux qui ne relèvent pas du Pacte, il serait bon que le Comité envisage une coopération avec le Comité des droits de l’homme.

32.Mme Timberlake souligne la nécessité d’envisager séparément sexualité et procréation, qui sont de plus en plus dissociées dans le monde actuel. Cela entraîne aussi nombre de questions, notamment le droit à la sexualité des jeunes et des adultes, dans le cadre du mariage et en dehors; le travail sexuel et les droits des travailleurs du sexe; la remise en cause des droits à la sexualité de certains (séropositifs, handicapés, toxicomanes). Le Comité devrait aussi examiner, outre la dimension législative, l’aspect social des choses et la question des comportements, et, à cet égard, la portée des obligations qui incombent aux États. ONUSIDA est disposé à apporter toute clarification sur la pénalisation de la transmission du VIH et la question de son utilité pour les femmes; il n’y est pas favorable, estimant que cette pénalisation, loin de protéger les femmes, tend à les défavoriser au plan juridique.

33.M me Bonoan-Dandan dit que toutes les contributions au débat sont très utiles, mais qu’elles ne pourront toutes être prises en considération dans l’élaboration du projet d’Observation générale. Elle assure les participants que les membres du Comité parviendront en toute connaissance de cause à des décisions équilibrées sur les points épineux. C’est de l’examen des rapports des États parties et des problèmes soulevés alors que découle directement l’idée d’élaborer l’Observation générale.

34.M me Bras Gomes ajoute que la légitimité du Comité pour examiner un projet d’Observation générale de cette nature vient de ce qu’il dialogue avec les États parties sur ces questions depuis plus de quinze ans, pendant lesquels il a rassemblé des informations sur les situations nationales. Précisant qu’il ne s’agit pas d’un projet sur la question de l’avortement, Mme Bras Gomes souhaite recentrer le débat. L’un des principaux objectifs d’une Observation générale est de définir des obligations pour les États; la contribution de spécialistes vise à aider les membres du Comité à en déterminer le contenu fondamental.

35.M me  Nowicka (Fédération polonaise des femmes et du planning familial) soutient le Comité dans son projet de formaliser par une Observation générale des principes qu’il applique déjà depuis fort longtemps. Elle fait observer que, dans l’affaire Tysiąc c. Pologne, la Cour européenne des droits de l’homme a relevé les conséquences négatives que peut avoir la criminalisation des droits à la santé sexuelle et procréative sur les services que la loi garantit à la population et, en particulier, aux femmes. En Pologne, si les femmes ne peuvent être envoyées en prison pour avoir recouru à l’avortement, toute personne qui incite à y recourir s’expose à une peine de prison, à l’instar de cette mère ayant aidé sa fille de 14 ans − enceinte à la suite d’un viol et sur le point de se suicider − à se faire avorter.

36.M me  Ball (Human Rights Law Resource Centre) invite le Comité à s’appuyer dans son Observation générale sur la jurisprudence d’autres comités afin de garantir une certaine cohésion entre les différents instruments de l’ONU. Il est important en particulier que le Comité fasse référence aux dispositions de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (art. 2, al. f, et art. 5, al. a), ainsi qu’à l’article 10 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et aux Règles des Nations Unies concernant le traitement des femmes détenues et les mesures non privatives de liberté pour les femmes délinquantes (Règles de Bangkok), qui reconnaissent la vulnérabilité particulière des personnes en détention et les obligations positives de l’État à leur égard.

37.M me  Mehra (Partners in Law for Development) dit que la construction sociale doit figurer dans l’introduction de l’Observation générale compte tenu de sa place dans l’approche des autres organes relatifs aux droits de l’homme quant à la discrimination. Les États parties pourront ainsi prendre plus aisément des mesures pour lutter contre les préjugés culturels et faire évoluer les pratiques dans des domaines de la sphère privée considérés comme sacro-saints. La subordination de la femme, de construction sociale, fait que souvent les sévices qu’elle subit au sein de la famille sont passés sous silence et, dans le prolongement, les institutions publiques, y compris le système de santé, tendent à adopter les mêmes comportements.

38.M me  Stefiszyn (Université de Pretoria) insiste sur le fait que la jurisprudence conséquente des différents organes des droits de l’homme contient déjà tous les principes évoqués au cours du débat. La situation des droits de l’homme a considérablement évolué depuis la Déclaration universelle des droits de l’homme, et de nombreuses questions nouvelles sont apparues dans le débat international (orientations sexuelles, avortement, prostitution); il est important que le Comité des droits économiques, sociaux et culturels poursuive sur cette voie, en consacrant un paragraphe de l’Observation générale à la question du VIH/sida, et en abordant la question de la criminalisation. Quant au contrôle des naissances et aux convictions religieuses, Mme Stefiszyn rappelle que le droit international est fondé sur ce qui est considéré comme universel et non sur la moralité publique, ce à quoi adhèrent les États parties lorsqu’ils ratifient l’instrument.

39.M me  Barahona Riera (Rapporteuse pour l’élaboration d’une Observation générale sur le droit à la santé sexuelle et procréative) rappelle que le projet d’Observation générale est le fruit de l’expérience du Comité tout autant que de la jurisprudence des autres organes conventionnels. Toutes les notions ont été amplement débattues et le Comité s’appuie sur une base juridique internationale, et une terminologie bien arrêtée.

40.M. Mokhiber (Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme) dit que dans toutes leurs activités les spécialistes des droits de l’homme se fondent sur les orientations données par les comités au sujet des incidences sur le plan normatif des droits visés par les différents instruments. Se félicitant que le processus d’élaboration de l’Observation générale soit en bonne voie, il assure le Comité du soutien indéfectible du Haut-Commissariat dans sa tâche.

Réunion-débat 4: conclusions

41.M me  Barahona Riera (Rapporteuse pour l’élaboration d’une Observation générale sur le droit à la santé sexuelle et procréative) dit que les trois experts qui vont intervenir ont en commun une vision très claire de la portée des recommandations ou Observations générales des comités, et une conscience aiguë des difficultés et de la responsabilité des membres du Comité dans leur entreprise.

42.M. Puras (Comité des droits de l’enfant) souligne l’importance que revêt pour son propre Comité le projet d’Observation générale du Comité des droits économiques, sociaux et culturels sur le droit à la santé sexuelle et procréative. Dans ses activités, le Comité des droits de l’enfant ne cesse de soulever des questions en rapport avec ce droit, et sa propre Observation générale no 4 (2003) sur la santé et le développement de l’adolescent y renvoie directement. Au cours de son dialogue avec les États parties à la Convention relative aux droits de l’enfant, le Comité s’enquiert des mesures adoptées en faveur du droit à la santé sexuelle et procréative dans l’optique du droit de l’enfant de se développer harmonieusement et de s’épanouir pleinement, en s’intéressant notamment à l’éducation sexuelle dispensée à l’école et aux mesures visant à protéger l’enfant et l’adolescent contre les pratiques préjudiciables (mariage précoce, mutilations génitales féminines). Dans nombre de régions et de pays, les principes modernes de santé publique, les éléments établis scientifiquement et l’approche fondée sur les droits de l’homme, associés aux efforts déployés par les pouvoirs publics, la société civile et d’autres intervenants de poids, ont contribué à la protection des droits en matière de sexualité et de procréation en tant que composante à part entière des droits fondamentaux de l’adulte comme de l’enfant.

43.Le Comité des droits de l’enfant a toutefois conscience des obstacles et difficultés dans ce domaine: la santé sexuelle et procréative demeure la question la plus délicate et la plus controversée du droit international relatif aux droits de l’homme. Dans ses observations finales, il s’est inquiété des nouvelles orientations politiques, généralement motivées par des choix idéologiques, tendant à réduire les programmes d’éducation en matière de sexualité et de santé destinés aux adolescents ou à refuser à ceux-ci l’accès à des services confidentiels. Il est donc d’autant plus urgent de rechercher le consensus autour des moyens efficaces de promouvoir et protéger les droits des enfants et des adolescents; l’initiative du Comité des droits économiques, sociaux et culturels s’inscrit parfaitement dans cette optique.

44.M me  Šimonović (Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes) souligne combien la concertation et la coopération entre organes conventionnels de l’ONU sont importantes lors de l’élaboration de recommandations générales sur des droits visés par plusieurs instruments. Le Comité des droits de l’enfant et le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes ont créé un groupe de travail conjoint chargé d’élaborer une recommandation générale commune sur les pratiques préjudiciables, qui sera notamment axée sur les mutilations génitales féminines.

45.Dans son Observation générale, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels devra aborder le droit à la santé sexuelle et procréative sous l’angle des problèmes spécifiques des femmes: ce sont elles qui souffrent le plus du déni de ce droit. La Convention sur l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes apporte à tous les droits visés par les autres instruments relatifs aux droits de l’homme un éclairage différent, celui de la problématique hommes-femmes. Plusieurs articles de la Convention et les recommandations générales du Comité préconisent l’adoption de mesures spécifiques contre la discrimination directement liée au droit à la santé sexuelle et procréative, notamment les Recommandations générales nos 19 sur la violence à l’égard des femmes, 21 sur l’égalité dans le mariage et les rapports familiaux, 24 sur les femmes et la santé, et 28 sur les obligations de fond qui incombent aux États parties au titre de l’article 2 de la Convention. Les articles 4 et 11 de la Convention prévoient des mesures spéciales de protection des femmes ayant trait à la maternité et à la procréation; l’article 12 impose aux États parties de garantir aux femmes l’accès aux services de santé appropriés (soins de santé, planification familiale, surveillance de la grossesse, médecine prénatale et postnatale, notamment); l’article 16 consacre le droit des femmes de décider librement de tout ce qui a trait à leur sexualité et à la procréation; et l’article 10 garantit l’accès à l’information et aux conseils relevant de la planification familiale.

46.Dans ses observations finales, le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes s’inquiète de la mortalité maternelle élevée, liée notamment aux carences des services de santé procréative et à l’absence de soins de qualité permettant de faire face aux complications consécutives à un avortement dangereux. Il engage les États à supprimer les législations criminalisant l’avortement, dénonce la sélection du fœtus en fonction du sexe et en recommande l’interdiction en droit interne, et prône la mise en place de stratégies complètes permettant de dépasser les stéréotypes traditionnels qui entretiennent la préférence marquée pour les garçons. Mme Šimonović conclut en évoquant l’affaire A. S. c. Hongrie (communication no 4/2004) dont le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes avait été saisi et dans laquelle il a constaté que l’État partie n’avait pas respecté les dispositions des articles 10 (al. h), 12 et 16 (al. e) de la Convention en manquant de fournir l’information appropriée et les conseils relatifs à la planification familiale, recommandant à l’État partie d’accorder à Mme A. S. une indemnisation appropriée.

47.M me Andion (Centre pour les droits reproductifs) souligne l’importance des normes nationales, régionales et internationales en tant que base normative solide en matière de droits à la santé sexuelle et procréative, que l’Observation générale viendra renforcer et faire avancer. Le Comité peut s’appuyer sur les acteurs de la santé publique qui ont permis de nombreuses avancées, notamment grâce aux progrès technologiques et scientifiques. L’Observation générale doit prendre en compte le fait que le Protocole facultatif se rapportant au Pacte a déjà été adopté. Le texte doit être exhaustif, constituer un instrument vivant et dynamique de caractère normatif tout en fournissant des orientations applicables quelle que soit la réalité du pays. Il doit aussi inclure les obstacles juridiques, sociaux, culturels qui peuvent se présenter, et ne pas se limiter à la question des soins de santé. Le Comité devra décider s’il rattache le droit à la santé sexuelle et procréative au seul droit à la santé ou s’il le lie également au droit à l’égalité et à la non-discrimination, et au droit à l’éducation, au progrès scientifique et à un niveau de vie suffisant.

48.Mme Andion rappelle ce en quoi le droit à la santé sexuelle et procréative diffère des autres droits: criminalisation − de la transmission du VIH notamment −; répercussions des demandes d’autorisation sur l’accès des femmes et des adolescents aux soins de santé sexuelle et procréative; discrimination à facteurs multiples; lien entre droits de l’homme et éthique médicale; consentement éclairé et objection de conscience; poids des idéologies, de la religion et de la morale dans les politiques en la matière, au mépris de la science, de la santé publique et des droits de l’homme. Lorsqu’il s’agira d’énumérer les groupes ayant besoin d’une attention particulière, le Comité devra veiller à n’en exclure aucun. Enfin, le Comité devra trouver le moyen d’articuler le «caractère approprié» des mesures prises par l’État (art. 8, al. 4, du Protocole) et les obligations fondamentales minimales. Le texte devra également faire mention de la réalisation progressive.

49.M me Barahona Riera (Rapporteuse pour l’élaboration d’une Observation générale sur le droit à la santé sexuelle et procréative) rappelle que le droit à la santé sexuelle et procréative découle de l’article 12 du Pacte (droit à la santé), qui est étroitement lié à tous les autres articles du Pacte.

50.M me Bonoan-Dandan conçoit que l’Observation générale doive être équilibrée, dynamique et fondée sur des données et qu’elle doive s’appuyer sur les normes établies déjà acceptées, mais dans la rédaction du texte, le Comité s’appuiera sur sa propre expérience et sur l’examen de la situation dans les États parties, ainsi que sur le travail des autres organes conventionnels. Les fondements de l’Observation générale seront ancrés dans les obligations fondamentales du Pacte. Il convient d’avoir présents à l’esprit le lien entre droit à la santé sexuelle et procréative et le droit à la participation à la vie culturelle, et les questions sensibles des rapports au sein du couple et des pratiques des communautés locales, des minorités ou des populations autochtones.

51.M. Martins Da Cunha (Brésil) estime qu’il convient d’ajouter au texte les points suivants: l’accès aux médicaments et aux services médicaux; la couverture universelle et les soins de santé; la coopération internationale (art. 2, al. 1, du Pacte) et les facteurs sociaux déterminants en matière de santé sexuelle et procréative, notamment ceux qui sont liés à d’autres droits de l’homme (non-discrimination, droit à l’alimentation, droit au logement, droit à la vie privée, notamment).

52.M me Brown (Coordonnatrice des femmes et du groupe de travail d’ESCR-Net; Coalition internationale d’ONG pour un protocole facultatif au Pacte relatif aux droits économiques sociaux et culturels) dit que le Protocole facultatif se rapportant au Pacte va permettre à toutes les femmes de faire entendre leur voix auprès d’une instance internationale lorsqu’elles n’ont pas obtenu réparation au niveau national. Il incombe au Comité de choisir le moyen par lequel il entend recevoir l’avis d’experts sur la question (auditions, amicus curiae, par exemple). Une démarche axée sur une égalité réelle permet de mieux comprendre la nature des violations des droits des femmes, d’intégrer clairement les obligations des États en matière de conduite et de résultat et d’adopter des mesures positives facilitant les recours. Elle doit permettre de répondre à toutes les revendications des femmes et garantir que les sanctions prononcées seront adaptées. Le texte doit donc être normatif et clair tant pour les États que pour les titulaires de droits et les demandeurs. Il aidera également les juridictions nationales à appliquer les dispositions établies.

53.M me  Farha (Centre pour les droits à l’égalité au logement) encourage le Comité à adopter une définition solide et progressive de l’égalité réelle qui s’inscrirait dans la lignée de la jurisprudence du Comité des droits économiques, sociaux et culturels (Observations générales nos 16 et 21), et de celles du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et du droit international. Selon elle, les quatre vertus cardinales de l’égalité réelle consistent à placer le titulaire de droit au centre de l’analyse, à examiner les effets des politiques, programmes ou lois, à se pencher sur l’action ou l’inaction d’un État et à mettre en place des obligations positives, notamment l’obligation d’immédiateté. Mme Fahra invite le Comité à avoir les Observations générales nos 16 et 21 présentes à l’esprit lors de la rédaction de l’Observation générale sur la santé sexuelle et procréative.

54.M me  Barahona Riera (Rapporteuse pour l’élaboration d’une Observation générale sur le droit à la santé sexuelle et procréative) remercie chaleureusement l’ensemble des participants au débat général et conclut en rappelant que le droit à la santé sexuelle et procréative est un droit fondamental. La mise en œuvre du Pacte doit être plus qu’une simple norme pour que soit garanti l’accès de tous, de préférence gratuit, aux meilleurs soins de santé sexuelle et procréative possibles.

55.Le Président remercie à son tour les participants et insiste sur l’importance de cette journée qui a permis à chacun (État, ONG, membre du Comité) d’apporter sa pierre à l’édifice. Comme tous les droits, le droit à la santé sexuelle et procréative est un droit indiscutable qu’il est facile de définir et difficile de mettre en œuvre. Le Président souligne que le Comité, indépendant et neutre, a pour rôle d’aider les États parties à appliquer les dispositions du Pacte et de leur donner les outils nécessaires à sa mise en œuvre, afin qu’ils agissent au maximum de leurs ressources disponibles, en vue d’assurer progressivement le plein exercice des droits reconnus dans le Pacte par tous les moyens appropriés (art. 2). Les contributions demeurent bienvenues car elles sont indispensables aux travaux du Comité, qui doit s’atteler à la rédaction du projet d’Observation générale puis se livrer à l’examen approfondi du texte. Si, une fois achevée, l’Observation générale parvient à jeter un peu de lumière sur le droit qu’a toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale qu’elle soit capable d’atteindre, elle aura trouvé sa raison d’être, même si le Comité en attend bien davantage.

La séance est levée à 18 heures.