NATIONS UNIES

E

Conseil économique et social

Distr.GÉNÉRALE

E/C.12/2006/SR.4012 janvier 2007

Original: FRANÇAIS

COMITÉ DES DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS

Trente‑septième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 40e SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genève,le vendredi 10 novembre 2006, à 15 heures

Présidente: Mme BONOAN‑DANDAN

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS

a)RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT AUX ARTICLES 16 ET 17 DU PACTE (suite)

Rapport initial du Tadjikistan (suite)

La séance est ouverte à 15 h 5.

EXAMEN DES RAPPORTS

a)RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT AUX ARTICLES 16 ET 17 DU PACTE (point 6 de l’ordre du jour) (suite)

Rapport initial du Tadjikistan ((E/C.12/TJK/1); document de base (HRI/CORE/1/Add.128); liste des points à traiter (E/C.12/TJK/Q/1); réponses écrites du Gouvernement tadjik à la liste des points à traiter (E/C.12/TJK/Q/1/Add.1)) (suite)

1.Sur l’invitation de la Présidente, la délégation tadjike reprend place à la table du Comité.

Articles 6 à 9 du Pacte (suite)

2.La PRÉSIDENTE invite la délégation tadjike à répondre aux questions posées à la séance précédente.

3.M. KHUDOEROV (Tadjikistan), répondant à la question sur la participation des organisations non gouvernementales (ONG) à la rédaction du rapport périodique, indique que celui‑ci a été établi sous les auspices de la Commission gouvernementale chargée de la mise en œuvre des obligations en matière de droits de l’homme, et qu’un grand nombre d’ONG ont apporté leur contribution. La préparation du document, qui a duré plusieurs années, s’est déroulée sur un mode transparent, et avec l’aide notamment de M. Kolosov, membre du Comité des droits économiques, sociaux et culturels.

4.M. SHABOZOV (Tadjikistan) dit qu’il n’existe pas de plan national unique couvrant tous les domaines d’action énoncés dans la Déclaration et le Programme d’action de Vienne, mais que des programmes, des stratégies et des plans ont été adoptés dans chaque domaine. En outre, tout un éventail de lois ont été votées, qui garantissent le fondement juridique de la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels. Concernant la place du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, M. Shabozov précise que, conformément à l’article 10 de la Constitution, tous les instruments internationaux adoptés par le Tadjikistan sont partie intégrante de l’ordre juridique interne et que tous les textes législatifs adoptés sont, au préalable, examinés à la lumière de ces instruments.

5.M. Shabozov, répondant à la question sur les migrants, rappelle les accords existants à cet égard, présentés dans la réponse écrite du Gouvernement tadjik à la question no 15 de la liste des points à traiter. Il souligne les difficultés rencontrées pour établir avec précision les statistiques sur les migrants, du fait de la grande diversité des sources et des données. Il communique les données par année sur la migration de la main‑d’œuvre tadjike à l’étranger, établies à partir des enquêtes sur les ménages et des cartes de migrants, et indique que 318 000 migrants se trouvent actuellement sur le sol national.

6.En ce qui concerne la polygamie, M. Shabozov précise qu’elle est interdite dans le pays en vertu de l’article 33 de la Constitution, et que le Code pénal tadjik prévoit des sanctions pénales pour ce délit. Rappelant les éléments présentés dans la réponse écrite du Gouvernement tadjik à la question no 23 de la liste des points à traiter, il précise qu’au premier semestre 2006 le nombre de condamnations pour bigamie ou polygamie était déjà de 159, ce qui atteste que l’ensemble des organes compétents de l’État déploient tous les efforts voulus dans ce domaine. Il ajoute que le délit est souvent lié aux chefs de guerre. Le Gouvernement s’efforce de prévenir la polygamie, notamment par l’information des femmes et des jeunes filles, ce qui devrait aboutir rapidement à la réduction du nombre de cas dans le pays.

7.Mme BRAS GOMES demande, au sujet de l’article 9 du Pacte et de la réforme du système de pensions envisagée par le Gouvernement, quelle est celle des trois composantes qui sera mise en place en priorité − protection de base et pensions d’aide sociale aux citoyens inactifs qui n’ont pas droit à une pension de travail (premier niveau); assurance sociale obligatoire liée à l’emploi (deuxième niveau); pensions privées et projet de loi sur les pensions d’État (troisième niveau) − et sur quels éléments repose ce choix. Déplorant la faible participation du public à la réforme, l’absence de débats sur la question et le manque d’informations disponibles, Mme Bras Gomes souhaite savoir ce que le Gouvernement tadjik compte faire pour rendre le processus plus transparent et donner aux personnes visées le sentiment qu’elles sont associées à la prise de décisions qui les concernent en premier chef. Elle demande aussi si les autorités tadjikes se sont fixé un objectif pour le montant minimal des pensions, le montant actuel des pensions ne représentant que 35 % du salaire moyen − déjà très bas −, bien qu’il ait déjà été relevé 14 fois entre 1992 et 2005.

8.Mme Bras Gomes souhaiterait avoir des précisions sur la couverture dont disposent les travailleurs indépendants, catégorie à laquelle sont rattachés les agriculteurs et les agricultrices, et si ces dernières bénéficient d’une protection ayant trait à la maternité, notamment. Concernant les allocations auxquelles ont droit les orphelins placés sous tutelle de l’État, Mme Bras Gomes voudrait savoir si leur non‑versement ne serait pas imputable au manque d’information des personnes qui ont les orphelins à charge. Enfin, s’agissant des allocations familiales versées mensuellement jusqu’aux 18 mois de l’enfant, elle demande s’il est envisagé de prolonger la durée de versement des allocations, sachant que c’est bien souvent la pauvreté qui incite les parents à refuser de s’occuper de l’enfant et de protéger ses droits, allant jusqu’à l’abandon.

9.M. TEXIER, troublé par la réponse du Gouvernement tadjik concernant l’article 6 du Pacte et, plus précisément, par le mode de calcul retenu pour le taux de chômage, demande s’il ne lui serait pas possible d’envisager un mode de calcul qui permette d’obtenir une image plus proche de la réalité, en se fondant notamment sur les normes établies par l’Organisation internationale du Travail (OIT). Il demande également à la délégation tadjike si la baisse annoncée du nombre de sans‑emploi depuis 2000 ne cacherait pas un problème de travail informel dans le pays. Les jeunes étant la tranche de la population la plus touchée par le chômage, il souhaite aussi connaître les mesures prises par le Gouvernement tadjik à cet égard. Enfin, il demande si les statistiques sur les personnes sans emploi ont été ventilées par sexe.

10.M. Texier demande si des plans annuels et à plus long terme sont établis en vue de relever le salaire minimum − qui, selon le paragraphe 259 du rapport initial de l’État partie, ne correspond pas aux normes exigées par l’article 7 du Pacte − et, partant, le niveau de vie de la majorité de la population. Il souhaite aussi savoir si les Tadjiks qui émigrent à l’étranger quittent le pays pour des raisons économiques (difficultés à trouver un emploi, niveau de vie insuffisant). Concernant l’égalité des hommes et des femmes dans l’emploi, il s’étonne du choix par la délégation tadjike du terme «ségrégation» par opposition à «discrimination», et demande si ladite ségrégation repose sur un fait culturel et s’il existe des moyens d’y remédier. Il demande également si le principe énoncé à l’article 7 du Pacte (à travail égal, salaire égal) est appliqué dans le secteur privé.

11.Concernant l’article 8 du Pacte, M. Texier souhaite savoir s’il existe, au Tadjikistan, des syndicats d’opposition qui ne soient pas hérités du système de syndicat unique de l’Union soviétique, et si les syndicats du pays sont affiliés à des centrales internationales telles que la Confédération syndicale internationale, créée récemment.

12.Mme GHOSE, évoquant le problème des enfants des rues, de la prostitution enfantine et de la toxicomanie des enfants au Tadjikistan, demande si l’État prend des mesures pour lutter contre le travail des enfants. Évoquant l’existence de foyers‑pensionnats administrés par l’État, elle demande si les autorités agissent pour empêcher que les enfants vivant dans ces pensionnats ne soient employés à la récolte du coton ou à d’autres activités locales, contre une rémunération en nature voire sans aucune rémunération. S’étonnant du peu d’informations présentées dans le rapport au sujet du harcèlement sexuel au travail, elle estime qu’une loi interdisant cette pratique serait en effet l’une des mesures à prendre pour inciter les femmes à occuper des emplois dans le public et dans le privé.

13.M. RZEPLINSKI, constatant qu’un nombre élevé de travailleurs migrants décèdent à l’étranger − et notamment en Fédération de Russie − du fait qu’on leur offre généralement les emplois les plus risqués, voudrait savoir quelles mesures le Gouvernement tadjik a prises pour offrir une protection à ces personnes et si les familles des défunts peuvent prétendre à une pension servie par le système national de protection sociale.

14.M. Rzeplinski s’étonne de ce qu’un seul syndicat regroupe près de 90 % des travailleurs, et voudrait savoir dans quelles conditions les activités des syndicats peuvent être restreintes. Il estime en outre surprenant que malgré le faible niveau des salaires les salariés ne se mettent jamais en grève, et demande un complément d’information sur la situation des enfants contraints de travailler dans les champs de coton, ce qui explique selon lui le taux élevé d’abandons scolaires, ainsi que sur les ouvriers agricoles dekhkan, employés dans des conditions proches de l’esclavage, payés très en retard et soumis à une fiscalité très lourde.

15.Enfin, M. Rzeplinski demande à la délégation tadjike d’expliquer l’écart de salaire entre les enseignants, qui touchent l’équivalent de 10 dollars des États‑Unis par mois, et les membres des forces de l’ordre, dont le salaire est 10 fois supérieur.

16.M. ABDEL‑MONEIM demande si les syndicats veillent à ce que les contrats de travail soient élaborés de manière à ce que toutes les dispositions du Pacte relatives au droit au travail soient respectées, s’agissant notamment du salaire minimum. Il voudrait savoir ce qui justifie que certaines personnes touchent des «compléments de pension» tels que mentionnés au paragraphe 385 du rapport initial de l’État partie, et notamment des pensions d’aide sociale pour «services rendus à la nation». Enfin, il souhaiterait un complément d’information sur la manière dont est fixé le montant de la retraite minimale, dont la responsabilité ne doit pas incomber uniquement au Président de la République.

17.M. RIEDEL demande si l’État partie envisage de ratifier la Convention no 102 de l’OIT concernant la norme minimum de la sécurité sociale et la Convention no 118 de l’OIT sur l’égalité de traitement (sécurité sociale).

18.M. Riedel voudrait savoir quelles mesures le Gouvernement tadjik entend prendre pour que les enfants orphelins qui ont légalement droit à une pension puissent effectivement la percevoir, ce qui n’est manifestement pas le cas dans les faits en raison de la méconnaissance de ce droit par leurs représentants légaux ou l’inefficacité des services publics chargés de leur octroyer.

19.Enfin, un complément d’information serait le bienvenu sur les mesures qu’envisage de prendre le Gouvernement tadjik pour éviter que les personnes atteintes du VIH soient exclues du système de sécurité sociale du fait qu’elles hésitent à déclarer leur séropositivité de peur d’être mises au ban de la société.

20.M. MALINVERNI, se référant au paragraphe 457 du rapport initial de l’État partie, se demande où l’État partie a trouvé les ressources pour augmenter dans de telles proportions et sur une période aussi courte le salaire minimum et le salaire moyen, et si cette hausse n’a fait que suivre l’inflation. Citant la réponse écrite du Gouvernement tadjik à la question no 25 de la liste des points à traiter, il voudrait savoir quels sont «les cas prévus par la loi» justifiant une dérogation à l’article 35 de la Constitution qui dispose que «nul ne peut être soumis au travail forcé». Enfin, il demande à la délégation tadjike d’infirmer ou de confirmer les informations fournies par des sources informelles, selon lesquelles 20 % des enfants travailleraient dans l’État partie.

21.M. SADI demande si, comme il semble ressortir du rapport initial de l’État partie et des réponses écrites du Gouvernement tadjik à la liste des points à traiter, les travailleurs migrants réguliers et clandestins ont les mêmes droits au Tadjikistan, et, si tel est le cas, l’État partie envisage de ratifier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille. Il voudrait savoir ce qui explique que certaines entreprises d’État puissent fixer un salaire minimum supérieur à celui qui est fixé par décret présidentiel, ce qui reviendrait à établir une inégalité de traitement entre les salariés.

22.Enfin, M. Sadi souhaite savoir si l’État partie entend, à l’instar de nombreux autres pays du monde, obliger les entreprises et les institutions du pays à embaucher un certain pourcentage de personnes handicapées.

La séance est suspendue à 16 h 10; elle est reprise à 16 h 25.

23.M. KHAMIDOV (Tadjikistan) dit qu’il est désormais interdit d’employer des enfants d’âge scolaire pour récolter le coton.

24.M. SHABOZOV (Tadjikistan) dit que l’article 74 du Code du travail interdit d’employer des enfants de moins de 15 ans et que seuls les mineurs âgés de 14 ans ou 15 ans suivant une formation technique peuvent faire un stage en entreprise à condition que les conditions de travail ne soient pas susceptibles de nuire à leur santé ni d’interférer dans le bon déroulement de leurs études et qu’ils n’effectuent pas plus de 23 heures de travail par semaine. Quant aux mineurs âgés de 15 ans à 17 ans, ils ne peuvent pas travailler plus de 35 heures hebdomadaires.

25.Dans le secteur privé, l’on constate qu’un certain nombre d’enfants travaillent dans des entreprises familiales, en raison de l’idée communément admise que le travail forge le caractère et influe sur le bon développement de l’enfant. Les filles sont en outre davantage incitées par leurs parents à entrer sur le marché du travail afin de se préparer à leur vie d’adulte et sont actuellement 16 % moins nombreuses qu’au début des années 90 à poursuivre des études supérieures.

26.Le phénomène des enfants des rues est principalement dû à la dégradation de la situation économique: les parents n’étant plus en mesure de subvenir aux besoins de toute la famille, les enfants sont souvent contraints d’accepter des emplois peu qualifiés la plupart du temps faiblement rémunérés et il est difficile d’évaluer le nombre d’enfants concernés. Les enfants orphelins sont quant à eux pris en charge par des organisations de protection de l’enfance qui, en coopération avec le Ministère du travail et de la protection sociale, veillent à ce que ces enfants ne soient pas contraints de travailler et puissent dans la mesure du possible réintégrer le système scolaire. Un centre d’aide psychologique et de réintégration sociale a été créé en faveur des enfants des rues et divers projets ont été menés en vue de permettre aux jeunes âgés de 14 ans à 18 ans de suivre une formation professionnelle, et des cours d’alphabétisation rapide sont proposés à ceux qui en ont besoin.

27.M. MAKHMADALIEV (Tadjikistan) dit que son pays a ratifié la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille en 2002, et que le Ministère du travail a entrepris une vaste étude sur les caractéristiques des flux migratoires et sur les problèmes rencontrés par les travailleurs migrants. Les envois de fonds des travailleurs migrants ne font plus l’objet de limitation ni de contrôle et sont devenus une vraie manne pour l’économie tadjike. Depuis 2001, un bureau du Ministère du travail et de la protection sociale a été ouvert en Fédération de Russie. Il a essentiellement pour fonction de conseiller les nombreux citoyens tadjiks se trouvant en Fédération de Russie sur tous les aspects liés à la migration de main‑d’œuvre, notamment par une aide à la recherche d’un emploi légal ou par des consultations juridiques.

28.Le calcul des pensions de retraite est fondé sur le principe de la solidarité entre les générations. Des mesures ont été prises pour relever le niveau minimal des pensions car les écarts entre les pensions minimales et les pensions maximales étaient très importants. En dépit des efforts déployés par les autorités, un retraité sur cinq dispose toujours d’une pension qui ne lui permet guère de vivre dans des conditions décentes. C’est pourquoi une réforme des pensions de retraite a été entreprise en 1998. L’âge de la retraite est de 63 ans pour les hommes et de 58 ans pour les femmes. Le pourcentage de la population active ne cesse de diminuer et l’on compte actuellement un retraité pour deux travailleurs.

29.Pour ce qui est de la protection des couches les plus vulnérables de la société, force est de constater que la crise économique a entraîné une détérioration sensible des conditions de vie des citoyens tadjiks, en particulier des enfants, et a creusé les inégalités. Les enfants les plus défavorisés perçoivent des allocations afin de pouvoir satisfaire leurs besoins fondamentaux. L’enjeu actuel pour les autorités tadjikes est de former les jeunes générations aux nouvelles conditions du marché afin qu’elles puissent acquérir les compétences nécessaires pour trouver facilement un travail.

30.Mme MUHAMMADIEVA (Tadjikistan) dit que l’article 102 du Code du travail interdit expressément la discrimination sur le lieu de travail et consacre le principe de l’égalité de traitement sans distinction de race ou de sexe. La situation n’est certes pas aussi réjouissante dans la pratique, les femmes occupant traditionnellement les emplois les moins rémunérés. Le 1er avril 2006, le Tadjikistan a adopté tout un train de mesures qui visent à augmenter le salaire des femmes dans un certain nombre de secteurs où elles sont très présentes. Ainsi, d’après les dernières enquêtes réalisées, les salaires des femmes auraient augmenté d’environ 40 % dans les domaines de la santé et de l’éducation. Les inégalités de salaires sont moins criantes dans la fonction publique, où de nombreuses femmes sont employées.

31.M. KHUDOEROV (Tadjikistan) dit qu’en vertu de l’article 35 de la Constitution, nul ne peut être contraint à un travail forcé. L’article 8 du Code de travail adopté en 1998 détermine les cas dans lesquels l’État peut faire appel aux citoyens pour leur demander de travailler. Il s’agit de circonstances exceptionnelles où la vie et la santé de la population sont menacées, par exemple en cas de guerre. Il convient par ailleurs de ne pas confondre le travail forcé et les peines de travail obligatoire et de rééducation qui peuvent être imposées aux détenus par les autorités judiciaires en vertu de l’article 147 du Code pénal.

32.M. KHAMIDOV (Tadjikistan) dit que tous les syndicats du Tadjikistan ont les mêmes droits. Les organisations syndicales peuvent volontairement créer des associations syndicales selon des critères sectoriels ou géographiques. La loi garantit l’indépendance des syndicats vis‑à‑vis des autorités de l’État, des organes économiques et des associations politiques et autres. Les syndicats ne sont placés sous aucune autorité ni sous aucun contrôle. Les syndicats agissent en toute indépendance, que ce soit pour élaborer et adopter leurs statuts, arrêter leur structure, élire leurs organes de direction, organiser leurs activités, ou tenir des assemblées, conférences, réunions plénières et sessions. Toute ingérence des organes publics et agents de l’État dans les activités des syndicats est interdite, sauf dans les cas prévus par la loi. Les employeurs ne sont pas autorisés à dénier ou à refuser le droit d’adhérer à un syndicat. Ceci ne s’est jamais produit au Tadjikistan.

33.La Fédération des syndicats du Tadjikistan est une organisation publique indépendante qui rassemble les comités sectoriels nationaux et les associations intersyndicales sur une base volontaire dans le but de consolider et coordonner les activités de ses membres en matière de représentation et de défense des droits professionnels, sociaux et économiques ainsi que des intérêts des personnes syndiquées. Les syndicats et associations professionnelles qui n’appartiennent pas à la Fédération ne sont pas enregistrés. Les 19 comités de secteurs nationaux et les 3 conseils syndicaux de région, qui représentent environ 1 million d’adhérents, appartiennent tous à la Fédération.

34.M. TEMUROV (Tadjikistan) dit que selon les chiffres officiels il y aurait au Tadjikistan environ 600 personnes malades du sida, dont une grande proportion de moins de 25 ans, d’hommes et de toxicomanes. Pendant longtemps, la situation nationale dans ce domaine n’a pas pu être évaluée pour des raisons économiques, et l’intervention du Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida (ONUSIDA) a permis de constater que la réalité était bien plus sombre qu’on ne le pensait. Sur le plan social, les principaux facteurs connexes sont le chômage et la pauvreté et les groupes de population les plus vulnérables, les migrants et les travailleurs sexuels, notamment. Or, les modes de transmission du VIH/sida ne sont pas toujours bien connus de la population. La création d’un organe mixte de lutte contre le VIH/sida, le paludisme et la tuberculose, assorti d’un mécanisme conjoint de surveillance et de suivi, a permis d’élaborer des indicateurs et d’organiser des campagnes de sensibilisation. Grâce aux 8 millions de dollars des États‑Unis versés depuis 2004 par le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme, la prévention a été renforcée, en particulier auprès des groupes à risque, des centres de conseil ont été établis, en particulier à l’intention des travailleurs migrants, et des traitements antirétroviraux gratuits ont été distribués à ceux qui en avaient besoin. La loi protège les droits des personnes touchées par le VIH/sida, mais beaucoup ne cherchent même pas à se faire soigner ou à bénéficier d’une aide; c’est pourquoi l’information figure parmi les priorités actuelles du Ministère de la santé.

Articles 10 à 12 du Pacte

35.Mme GHOSE demande pourquoi le projet de loi contre la violence familiale n’a pas encore été adopté et souhaiterait savoir ce qui est fait en matière de formation, de sensibilisation et d’assistance aux victimes.

36.M. RIEDEL souhaiterait connaître les mesures prises contre les maladies opportunistes qui affectent les personnes malades du VIH/sida, le taux de vaccination actuel contre l’hépatite B et ce qui a été entrepris récemment pour élargir l’accès à une eau salubre afin de mieux combattre les infections intestinales. Il demande par ailleurs ce qui est fait pour améliorer la situation des détenus atteints du VIH/sida (dont un tiers ne recevraient pas de traitement approprié, selon des ONG) ou de la tuberculose (qui pâtissent de l’insuffisance des crédits budgétaires alloués à ce secteur).

37.M. Riedel souhaiterait également savoir si l’hospitalisation sous contrainte en psychiatrie donne lieu à des réexamens périodiques afin de protéger les droits des intéressés et si les enfants placés dans les nouvelles unités d’établissements de santé mentale qui leur sont spécialement destinées reçoivent une éducation appropriée. Il demande enfin quelles mesures sont prises en faveur des handicapés, en particulier les enfants.

38.M. MALINVERNI demande à la délégation tadjike de commenter les chiffres alarmants relatifs à la violence à l’égard des femmes figurant dans la réponse écrite du Gouvernement tadjik à la question no 26 de la liste des points à traiter et fait observer que, si les auteurs de violence familiale ne sont pas poursuivis d’office, comme indiqué dans cette réponse, la réalité est sans doute encore plus inquiétante. Il demande par ailleurs les raisons qui ont conduit à l’adoption de la méthode utilisée pour déterminer le seuil de pauvreté, à savoir, selon le paragraphe 456 du rapport initial de l’État partie, «l’auto‑évaluation par la population» et si, à la suite de la forte réduction du niveau de pauvreté constatée de 1999 (81 %) à 2003 (64 %), cette tendance très positive s’est confirmée jusqu’en 2006.

39.Mme BARAHONA RIERA, notant que près d’un million de Tadjiks ont émigré dans la Fédération de Russie et dans d’autres pays, demande s’il existe des statistiques ventilées par sexe et si l’impact sur les familles qui restent au pays est mesuré. Comme d’autres membres du Comité, elle déplore l’absence de loi spécifique contre la violence familiale, et souligne que le Code pénal n’érige pas de tels actes en infractions distinctes. S’agissant de la traite des êtres humains, Mme Barahona Riera souhaiterait des précisions sur le nombre de victimes, l’assistance qui leur est apportée et ce qui est fait pour mieux faire connaître les nouvelles dispositions législatives aux juges et à la police de manière que les auteurs soient plus efficacement poursuivis. Enfin, des renseignements supplémentaires concernant l’impact du passage à l’économie de marché sur le système de santé et, notamment sur son financement − par exemple, est‑il entièrement à la charge de l’État ou assuré en partie par le versement de cotisations? − et sur la réforme en cours − tend‑elle vers la privatisation? − seraient utiles.

40.M. SADI demande pourquoi l’État partie ne parvient pas à réduire le nombre de mariages forcés et de filles mariées avant l’âge de 17 ans, si le viol conjugal est érigé en infraction pénale et, par ailleurs, si les femmes jouissent des mêmes droits que les hommes s’agissant de transmettre leur nationalité à leurs enfants.

41.M. TIRADO MEJIA, se référant à la réponse écrite du Gouvernement tadjik à la question no 31 de la liste des points à traiter, demande s’il y a eu des cas de tuberculose ou de mort par famine dans des établissements autres que l’Hôpital psychiatrique national et, appuyé par M. RZEPLINSKI, souhaiterait des précisions à propos des placements en psychiatrie sur décision de justice (types de décision, nombre de cas, motifs).

42.Mme BRAS GOMES, notant que dans le rapport initial de l’État partie les chiffres les plus récents relatifs au logement datent de 2003, demande des informations sur la situation actuelle.

43.M. RZEPLINSKI demande ce qui est prévu pour garantir un logement et l’accès à l’eau potable au million et demi d’habitants que comptera Douchanbé en 2012. Il se félicite de l’interdiction de la polygamie mais demande ce qu’il advient des épouses «illégales» et de leurs enfants lorsqu’un homme qui a plusieurs femmes est mis en prison, par exemple. Il souhaiterait également savoir si des femmes exercent le métier de procureure et, dans l’affirmative, quel est leur nombre. Il demande enfin ce qui est fait pour protéger les personnes exposées au tabagisme passif.

La séance est levée à 18 heures.

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