Nations Unies

E/C.12/2011/SR.39

Conseil économique et social

Distr. générale

29 novembre 2011

Original: français

Comité des droits économiques, sociaux et culturels

Quarante - septième session

Compte rendu analytique de la 39 e séance

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le vendredi 18 novembre 2011, à 15 heures

Président: M. Pillay

Sommaire

Examen des rapports

a)Rapports présentés par les États parties conformément aux articles 16 et 17 du Pacte (suite)

Rapport initial du Turkménistan (suite)

La séance est ouverte à 15 h 5.

Examen des rapports:

a) Rapports présentés par les États parties conformément aux articles 16 et 17 du Pacte (suite)

Rapport initial du Turkménistan ((E/C.12/TKM/1); document de base (HRI/CORE/TKM/ 2009); liste des points à traiter (E/C.12/TKM/Q/1); réponses écrites du Gouvernement turkmène à la liste des points à traiter (E/C.12/TKM/Q/1/Add.1)) (suite)

1. Sur l ’ invitation du Président, la délégation turkmène reprend place à la table du Comité.

Article s 1 er à 9 du Pacte (suite)

2.M. Arniyazov (Turkménistan) dit que le Code pénal prévoit que toute personne qui licencie ou refuse d’embaucher, sans motif, une femme enceinte est privée du droit d’exercer certaines fonctions ou activités pendant une durée maximale de cinq années ou passible d’une amende dont le montant équivaut à cinq à 10 fois le montant du salaire moyen mensuel. Le premier recensement a été effectué en 1995, dans le plus grand respect des recommandations et des normes internationales. Le prochain recensement, préparé depuis longtemps par la venue de spécialistes étrangers et l’envoi d’experts turkmènes à l’étranger, se déroulera en octobre 2012.

3.M. Shaliyev (Turkménistan) précise que les réformes fondées sur les innovations techniques tiennent compte de tous les aspects du développement économique et social du pays et de la diversification de l’économie, et annonce la création prochaine de pôles techniques. Il ajoute que l’égalité de traitement est effective dans l’enseignement, où les salaires sont stables. Comme le Turkménistan fixe la rémunération sur la base de la qualification du travailleur, l’égalité entre les hommes et les femmes est garantie. Dans le secteur de la santé, les infrastructures modernes accueillent aussi bien des Turkmènes que des étrangers et l’égalité de traitement des professionnels est assurée.

4.M. Arniyazov (Turkménistan) explique que les autorités font tout leur possible pour garantir la tolérance et la liberté de culte et luttent contre le fanatisme et l’extrémisme, ainsi que contre les incitations à la haine entre organisations religieuses. Il précise que la loi relative à la liberté de religion et aux organisations religieuses a été adoptée en 2003. Il incombe à une commission du Ministère de la justice d’enregistrer toute organisation religieuse qui en a fait la demande auprès du Conseil des affaires religieuses. Comme il est expliqué au paragraphe 22 du rapport initial, les 122 organisations religieuses enregistrées appartiennent à diverses confessions. Les statuts des organisations ne doivent contenir aucune incitation à la haine ou à l’intolérance contre d’autres groupes religieux et les activités d’évangélisation ou les réunions avec des ecclésiastiques étrangers doivent être autorisées.

5.M. Annagurbanov (Turkménistan) explique que la peine maximale pour harcèlement sexuel sur le lieu de travail est de deux années d’emprisonnement.

6.M. Arniyazov (Turkménistan) dit que la Constitution prévoit l’égalité de tous les citoyens devant la loi sans mentionner les minorités sexuelles, car celles-ci n’existent pas dans la mentalité de la société turkmène, où les filles et les garçons sont éduqués de manière différenciée. Toutefois, le Turkménistan s’engage à étudier cette question de près.

7.M. Annagurbanov (Turkménistan) indique que le Code de la famille établit l’âge du mariage à 16 ans pour un mariage entre Turkmènes et à 18 ans pour les Turkmènes qui souhaitent épouser une personne étrangère ou apatride. Un projet de réforme du Code de la famille prévoit de relever cet âge à 18 ans pour tous. Le mariage, qui doit être enregistré au bureau de l’état civil, n’autorise aucune restriction des droits, comme il est expliqué aux paragraphes 172 et 175 du rapport initial.

8.M me Atajanova (Turkménistan) explique qu’une grande campagne d’information est menée pour changer la représentation des hommes et des femmes dans la société afin de mettre un terme aux théories anciennes de supériorité d’un sexe sur l’autre. Elle rappelle l’importance de la maternité comme fonction sociale et du rôle des deux parents dans l’éducation. Elle insiste sur la primauté de l’intérêt supérieur de l’enfant. Le Turkménistan attache une très grande importance à la formation de l’esprit des jeunes à la parité et a mis en place en mai 2011 un programme national pour préparer les enfants à l’entrée à l’école et permettre aux parents de participer directement et à parts égales à l’éducation de leurs enfants. Des programmes et manuels scolaires sont également axés sur la question de l’égalité. De nombreux colloques et conférences sur la question sont organisés par des organisations nationales et internationales, en collaboration avec le Gouvernement turkmène. Enfin, les médias contribuent grandement à éliminer les stéréotypes en diffusant des informations et en relayant les activités menées dans ce domaine.

9.M.  Arniyazov (Turkménistan) explique que les normes internationales relatives à la corruption sont incorporées à la législation nationale, notamment à la loi sur la déclaration de revenus et à la loi sur la lutte contre le terrorisme. Le Turkménistan a signé la Convention des Nations Unies contre la corruption et mis en place un mécanisme juridique de lutte contre le blanchiment d’argent, le terrorisme et la criminalité. C’est dans ce cadre que la non-déclaration de revenus et la falsification de valeurs mobilières ont été érigées en infraction pénale.

10.M me Sysoyeva (Turkménistan) explique que l’action du Ministère de la protection sociale et du travail, créé en avril 2009, porte sur la gestion du marché du travail, qui relevait jusqu’alors des collectivités locales. Il veille à ce que la population reçoive les informations recueillies auprès des entreprises sur les possibilités d’emploi. Le statut de chômeur est octroyé par l’Agence pour l’emploi après trois mois sans emploi ni ressources. Mme Sysoyeva fait remarquer que de plus en plus de personnes s’adressant à l’Agence trouvent un emploi. De nombreux programmes de formation des personnes sans emploi sont menés en collaboration avec l’Union européenne, selon le niveau professionnel de la personne concernée, et de nombreuses lois contiennent des dispositions relatives à la protection sociale et à l’emploi. Une banque de données regroupant les besoins et les personnes en recherche d’emploi est en cours d’élaboration.

11.Les contrats de travail peuvent être à durée déterminée ou indéterminée. L’employeur et l’employé peuvent également mettre un terme à la relation de travail en donnant un préavis allant de deux semaines à deux mois, selon les cas et la nature du contrat. Les différends en la matière sont traités par les commissions créées à cet effet au sein des entreprises, les syndicats et les tribunaux, ces derniers connaissant des cas de licenciement abusif ainsi que des cas de licenciement ayant donné lieu à un différend que les commissions et les syndicats n’ont pu résoudre. Le Code du travail prévoit que certains salariés bénéficient d’une protection particulière en cas de licenciement, par exemple ceux qui apportent le seul revenu de la famille.

12.Même si le Turkménistan accorde une grande attention au secteur informel, les statistiques établies concernent essentiellement les secteurs public et privé et le recensement de la population. Les méthodes traditionnelles de collecte de données rendent le recueil d’informations sur les nouvelles formes d’activité économique difficile.

13.Mme Sysoyeva(Turkménistan) dit que par un décret présidentiel de mai 2010, un nouveau programme de statistiques conforme aux normes internationales a été lancé pour la période 2010-2012. Ce programme instaure un nouveau type d’enquêtes et de recherches sur la population active. Une enquête est actuellement menée sur les effectifs, afin d’évaluer la situation réelle du marché du travail dans les différentes régions. En 2012, on pourra ainsi dénombrer toute une série d’activités qui ne sont pas prises en compte dans les statistiques sur les entreprises. Il sera également possible de ventiler les résultats − par sexe, niveau de formation, taille des entreprises, etc. −, grâce aux modules thématiques des questionnaires.

14.Le Code du travail contient une section consacrée au travail domestique, qui prévoit que l’employeur a l’obligation de prendre en charge l’assurance sociale de ses employés de maison. Ces derniers peuvent ainsi bénéficier d’une pension de retraite et d’indemnités en cas d’accident du travail ou de handicap.

15.Une enquête est menée actuellement afin de déterminer les revenus des familles et d’établir le montant minimal du revenu de chaque catégorie (population active, retraités,…). Un budget minimal est établi pour chaque groupe grâce aux données recueillies. Il sert de base au Gouvernement pour fixer le salaire minimum, dont le montant est relevé tous les ans, l’objectif étant de le multiplier par deux d’ici à cinq ans. Le montant des pensions de retraite et des prestations sociales évolue en fonction du salaire minimum et de coefficients établis par décret présidentiel. Il a augmenté de 10 % depuis 2008 et devrait être relevé à nouveau de 10 % en 2012.

16.En ce qui concerne la parité entre les hommes et les femmes, il n’y a pas de différence de salaire pour un même poste ou emploi. Cependant, il est vrai que certaines professions sont plutôt occupées par des hommes (transports, construction et industrie) et les salaires sont plus élevés dans ces secteurs que dans le secteur des services, qui est plus féminisé.

17.M. Arniyazov (Turkménistan) dit que la loi et le Code de procédure civile prévoient que les citoyens peuvent ester devant les tribunaux dans le cas d’un conflit du travail. Si un employé a été licencié à tort, il doit être réintégré et indemnisé. Il n’existe qu’une seule organisation syndicale, qui dispose de comités dans chaque organe et entreprise. Ce sont ces comités qui prennent toutes les décisions concernant les membres du syndicat.

18.M. Annagurbanov(Turkménistan)dit que les normes du travail qui sont exposées dans le rapport présenté au Comité sont les normes de l’ancien Code du travail. Le Turkménistan est membre de l’Organisation internationale du Travail (OIT), dont il a signé les huit conventions fondamentales. L’article 33 de la Constitution garantit le droit au travail et le droit au choix de sa profession; on ne peut ni y déroger ni adopter des dispositions discriminatoires.

19.Une loi du 15 août 2009 prévoit l’assistance aux travailleurs dans le besoin. Des politiques publiques visent à organiser le travail des personnes handicapées pour leur permettre de participer au développement économique et social du pays. Le Turkménistan a ratifié la Convention relative aux droits des personnes handicapées, en application de laquelle certains postes sont réservés à ces personnes. Des quotas pour l’embauche de personnes handicapées sont fixés chaque année. Quant aux travailleurs étrangers, ils disposent des mêmes droits et sont soumis aux mêmes devoirs que les citoyens turkmènes.

20.M. Shaliyev (Turkménistan)précise que les droits des ressortissants turkmènes qui s’exilent sont protégés par les ambassades établies dans les pays d’accueil. Cependant, peu de citoyens turkmènes quittent le pays pour aller à l’étranger car il y a beaucoup de postes à pourvoir dans le secteur national de la production et de l’exportation d’énergie. En revanche, beaucoup d’étrangers viennent travailler au Turkménistan. Les comités syndicaux et le Ministère du travail contrôlent la sécurité sur le lieu de travail.

21.M. Sadi demande si l’État partie a l’intention de présenter son premier rapport sur l’application de plusieurs conventions de l’OIT que celui-ci a ratifiées. Il voudrait savoir en outre si l’application de la nouvelle loi sur le travail fait l’objet d’une jurisprudence.

22.M. Abashidze (Rapporteur pour le Turkménistan) demande si le taux d’inflation est pris en compte dans l’établissement du salaire minimum.

23.M me Shin estime qu’il n’y a aucune raison justifiant que les professions occupées majoritairement par des femmes soient systématiquement moins bien rémunérées que celles exercées par des hommes. Le principe d’égalité de salaire pour un travail de valeur égale devrait être respecté quel que soit le secteur d’activité. Mme Shin demande si l’interdiction faite aux femmes d’occuper certains postes a été supprimée.

24.M me Barahona Riera aimerait savoir quel est le montant de la pension de retraite minimum. Dans la mesure où il s’agit d’un régime fondé sur le versement de cotisations volontaires, elle souhaite connaître le nombre de bénéficiaires de pensions de retraite et le nombre de personnes qui ne sont pas couverts par le système de sécurité sociale et de retraite. Elle demande quel type d’aide et de prestations sociales est accordé à ces derniers.

25.M me Sysoyeva (Turkménistan) répond que le salaire minimum est calculé sur la base d’un budget familial, qui représente le panier de la ménagère à un moment donné. Le taux d’inflation est donc pris en compte dans l’établissement de ce budget minimal. Cette procédure est conforme à la Constitution, qui dispose que le salaire ne doit pas être inférieur au niveau de vie minimal.

26.En ce qui concerne l’égalité de salaire entre les hommes et les femmes, des réformes ont été menées dans le cadre de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing de 1995. Une base de données contenant des statistiques ventilées par sexe a été créée en 2008; elle permet de contrôler les principaux indices, notamment celui des écarts de salaire entre les hommes et les femmes. Le principe d’égalité de salaire pour un travail de valeur égale s’applique, mais certains emplois sont mieux rémunérés que d’autres. Il n’y a pas d’interdiction d’employer des femmes pour certains travaux, mais celles-ci sont physiologiquement moins aptes à exécuter certains types de tâches.

27.Le régime de la pension de retraite est bien volontaire, mais l’État verse une pension minimale à chaque citoyen. Le Turkménistan s’est acquitté de ses obligations en matière de présentation de rapports auprès de l’OIT en lui soumettant en 2011 un rapport relatif à l’application des Conventions no 29 sur le travail forcé et no 105 sur l’abolition du travail forcé.

28.M. Shaliyev (Turkménistan) dit que le relèvement du salaire minimum est aligné sur l’augmentation du panier de la ménagère. Le Gouvernement a adopté un programme alimentaire ambitieux dans les différentes régions grâce à des investissements publics et privés, y compris étrangers.

29.M Abashidze (Rapporteur pour le Turkménistan) demande s’il existe des statistiques concernant les personnes handicapées et comment s’organise leur prise en charge. Il aimerait notamment savoir si les centres qui les accueillent sont en nombre suffisant. Il demande si des statistiques sur les enfants handicapés, qui étaient placés dans des internats dans l’ancien système soviétique, sont disponibles. M. Abashidze aimerait savoir si des mesures sont prises désormais pour que ces enfants restent dans leur famille.

30.M me  Agayeva (Turkménistan) répond qu’il y a des statistiques sur les enfants handicapés. Le handicap est évalué par des commissions spécialisées et le statut d’enfant handicapé concerne les enfants jusqu’à 16 ans. Le nombre d’institutions pour enfants handicapés n’a pas augmenté ces dernières années, mais l’on prévoit de construire de nouveaux bâtiments pour les accueillir dans de meilleures conditions. Nombre d’entre eux vivent avec leur famille car tout est mis en œuvre pour que les enfants handicapés, tout comme les orphelins, soient élevés dans leur famille ou par des proches.

31.M. Arniyazov (Turkménistan) précise que ces enfants sont scolarisés dans des établissements d’enseignement primaire et secondaire avec des enfants non handicapés, dans la mesure du possible.

Articles 10 à 12 du Pacte

32.M. Ribeiro Leão voudrait savoir si l’État partie a procédé à une nouvelle enquête sur le niveau de vie de la population depuis celle réalisée en 1998 en coopération avec la Banque mondiale et, dans l’affirmative, quels en ont été les résultats.

33.M. Riedel, rappelant que 90 % du territoire turkmène est désertique, appelle l’attention sur les problèmes considérables que rencontre l’État partie en matière d’assainissement et d’accès à l’eau potable. Il explique notamment que les réserves d’eau en provenance de la mer d’Aral s’amenuisent et que les eaux de ruissellement sont polluées par les résidus agricoles et chimiques ainsi que par les excréments, entraînant une recrudescence de maladies telles que l’hépatite A, la diarrhée et la dysenterie. Il demande quels programmes, mesures, politiques et stratégies ont été mis en place par l’État partie pour pallier ces problèmes, et si l’État partie a accru la part de son budget consacrée à la santé proportionnellement à la hausse des recettes provenant de ses ressources énergétiques.

34.Le Comité voudrait savoir s’il est vrai que de nombreux établissements publics de santé en dehors de la capitale ont été contraints de fermer leurs portes depuis la privatisation des services de santé et que beaucoup de malades n’ont plus les moyens de se faire soigner, et ce qu’il en est de l’accès aux médicaments essentiels. Il aimerait également connaître la source des données statistiques relatives à la prévalence du VIH/sida, des formes résistantes de tuberculose et des maladies sexuellement transmissibles, sachant qu’il n’existe pas de statistiques officielles en la matière.

35.La délégation turkmène pourrait indiquer si, comme cela a été rapporté au Comité, l’accès aux soins de santé dépend des pots-de-vin versés au personnel des hôpitaux, aux infirmiers, voire aux médecins et, dans l’affirmative, quelles mesures l’État a prises pour combattre la corruption.

36.D’après l’Organisation mondiale de la santé (OMS), il existe un immense fossé entre les zones rurales et les zones urbaines en matière de traitement des eaux et d’assainissement ainsi que de niveau de pollution. L’État partie est invité à décrire la situation plus avant dans son prochain rapport périodique et d’y faire figurer des données épidémiologiques ventilées par région.

37.M. Riedel demande quel sera le mandat du futur centre pour les maladies virales que l’État partie entend placer sous la responsabilité du Ministère de la santé et de l’industrie médicale, et si ce nouvel organe sera amené à remplacer le centre de prévention du VIH/sida, qui est sur le point d’être fermé.

38.Le Comité apprécierait que l’État partie fasse figurer dans son prochain rapport périodique des informations sur les mécanismes qu’il a mis en place pour donner effet à la Convention-cadre de l’OMS pour la lutte antitabac à laquelle il est partie, et y décrive notamment les mesures et autres programmes de sensibilisation et de prévention du tabagisme, en particulier de l’usage du narguilé.

39.M. Schrijver déplore l’absence d’informations, dans le rapport à l’examen, sur le phénomène des mariages précoces, qui, d’après le Comité des droits de l’enfant, serait particulièrement répandu dans l’État partie. Il voudrait connaître le nombre exact de personnes vivant au-dessous du seuil de pauvreté ainsi que les mesures mises en œuvre pour lutter contre la pauvreté et garantir l’accès à l’eau potable et à l’assainissement, en particulier dans les zones rurales. Un complément d’information serait également le bienvenu sur les expulsions forcées et les démolitions d’habitations qui ont eu pour effet de chasser des milliers de résidents de chez eux, contre leur gré, et sans qu’aucune protection juridique efficace ni indemnisation correcte ne leur soit accordée.

40.M me Barahona Riera demande si l’État partie tient un registre des apatrides présents sur le territoire turkmène, et si lesdits apatrides et les sans-papiers ont accès à la santé et à l’éducation. Elle aimerait avoir un complément d’information sur le projet intitulé «Intégration d’une démarche soucieuse de l’égalité des sexes dans le processus d’élaboration et d’adoption des décisions stratégiques au Turkménistan» mené conjointement avec le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), et sur les institutions chargées de la mise en œuvre du plan national d’action pour 2005-2010 destiné à donner effet à la Déclaration et au Programme d’action de Beijing au Turkménistan et des plans en faveur de la protection de la famille. Elle voudrait aussi connaître la part du budget national consacrée à la mise en œuvre desdits plans ainsi que le montant du budget du Ministère de la famille.

41.Notant l’absence de loi contre la violence familiale, Mme Barahona Riera aimerait savoir quand l’État partie envisage d’ériger en infraction les actes de cette nature, s’il existe ou non une loi portant interdiction de la traite des êtres humains, et si la traite constitue un délit en vertu du Code pénal turkmène et, dans l’affirmative, quelle est la durée des peines prévues par ledit Code et combien d’affaires ayant trait à la traite des êtres humains ont déjà été portées devant les tribunaux.

42.Mme Barahona Riera voudrait savoir si le système de santé de l’État partie est public et, dans l’affirmative, si l’accès aux services de santé est universel et gratuit ou s’il faut cotiser pour bénéficier de la couverture médicale, et si les groupes vulnérables en sont de fait exclus. Elle demande en outre si les services de santé sexuelle et procréative, les soins anténatals et postnatals, la contraception et la prise en charge des maladies sexuellement transmissibles sont couverts par le système de santé public ou payants et quels programmes d’éducation sexuelle sont menés dans les écoles.

43.M. Abashidze (Rapporteur pour le Turkménistan) aimerait connaître les statistiques relatives aux grossesses et aux accouchements en prison, et savoir si les nouveau-nés restent auprès de leur mère en prison après la naissance. Il apprécierait un complément d’information sur les dispositions régissant les mariages entre un Turkmène et un étranger ou un apatride, ne comprenant pas pourquoi, dans ce cas, le mariage est célébré trois mois, voire six mois, après le dépôt de la demande officielle. Il aimerait aussi savoir pourquoi l’âge du mariage avec un étranger ou un apatride est de 18 ans, contre 16 ans pour les mariages entre citoyens turkmènes, jugeant cette clause discriminatoire.

44.Compte tenu que le budget de l’État était excédentaire en 2008, il ne fait pas de doute que l’État partie a les moyens de créer des logements sociaux et de rénover les logements existants. La délégation turkmène pourrait fournir un complément d’information sur la politique menée depuis 2010 dans le cadre du nouveau programme national de développement économique et social, faire parvenir au Comité des statistiques sur les ressources budgétaires octroyées à la construction de logements sociaux et indiquer le nombre de telles unités de logement qui ont été construites et octroyées à des personnes démunies.

45.M. Abashidze regrette l’absence de statistiques sur les séropositifs et les malades du sida, et craint que cela ne révèle la persistance de préjugés à l’égard de cette population. Il demande donc ce qui est fait pour que les malades du sida et les porteurs du virus ne fassent pas l’objet de discriminations. Il aimerait aussi connaître le nombre de toxicomanes dans le pays. Enfin, la délégation voudra bien indiquer si l’accès à Internet est réglementé au Turkménistan.

46.M. Kedzia aimerait en savoir plus sur les services dont bénéficient les victimes de la traite en matière de conseil, d’aide juridictionnelle et de réadaptation, y compris sur les foyers qui les accueillent, et demande s’il est vrai qu’en dépit de l’article 17 du Code du mariage et de la famille qui interdit la polygamie, cette pratique est encore très répandue dans l’État partie.

47.Faisant ensuite référence au programme national d’embellissement de la ville d’Achgabat à l’horizon 2020, qui prévoit la construction de nouveaux immeubles, stades et autres installations, il se dit préoccupé par des informations portées à la connaissance du Comité, selon lesquelles dans ce cadre, des milliers de résidents auraient été expulsés de leurs habitations − par la suite démolies − en l’absence d’une décision judiciaire. Il demande si les intéressés ont accès à des recours efficaces pour défendre leurs droits, si leurs besoins ont été évalués et, dans l’affirmative, si les mesures qui s’imposent ont été prises.

48.M me  Agayeva (Turkménistan) dit que le Gouvernement turkmène n’a ménagé aucun effort pour faciliter l’accès à l’eau potable, notamment dans les zones de peuplement. Pour garantir la qualité de l’eau, des analyses microbiologiques et chimiques sont effectuées deux à trois fois par mois, notamment au printemps et en été, en période de crues et d’inondations. L’eau en bouteille est également régulièrement contrôlée par les services épidémiologiques de l’État, qui veillent à ce qu’elle réponde aux normes nationales et internationales pertinentes.

49.Le Turkménistan a lancé une stratégie DOTS de lutte contre la tuberculose, dans le cadre de laquelle il communique chaque année à l’OMS des données sur la situation de la tuberculose dans le pays, dont le taux de morbidité et la réponse des malades aux traitements préconisés par l’OMS. Il convient de se féliciter de la baisse de la mortalité due à cette maladie à l’échelle du pays, à la fois en zone urbaine et en zone rurale, sans doute due à l’implantation, au sein des hôpitaux universitaires, de services de diagnostic qui permettent de dépister les nouveaux cas et de traiter les malades. Un service de dépistage a en outre été mis en place dans les prisons, et les malades sont orientés vers les services spécialisés dans le traitement de la tuberculose. Sur le plan financier, l’intégralité du traitement est prise en charge par le Ministère de la santé.

50.Le plan stratégique de lutte contre le tabagisme en cours d’élaboration prévoit l’interdiction de fumer dans les écoles et autres lieux publics, de faire de la publicité pour le tabac et ses produits dérivés et de vendre des cigarettes aux moins de 17 ans. Le Turkménistan a adhéré en 2011 à la Convention-cadre de l’OMS pour la lutte antitabac. Dans ce contexte, le Gouvernement turkmène a mené une campagne de sensibilisation à la nocivité du tabagisme − y compris du tabagisme passif − ciblant notamment les écoles. Depuis 2009, des interventions sont menées dans les écoles à tous les niveaux d’enseignement, et dès que la Convention sera entrée en vigueur, le Gouvernement veillera à ce que l’interdiction de vendre du tabac aux adolescents soit respectée, et les personnes qui souhaitent arrêter de fumer bénéficieront d’un soutien au sevrage tabagique.

51.Le centre de prévention du VIH/sida a été remplacé par un pôle médical construit à Achgabat, comprenant six établissements spécialisés dans le traitement notamment de la tuberculose, du sida et des maladies infectieuses.

52.Mme Agayeva fait observer qu’une loi sur la prévention des maladies provoquées par l’infection au VIH/Sida a été adoptée en 2001. En 2005, le Gouvernement a mis en œuvre un nouveau programme national de prévention du VIH/sida et des maladies sexuellement transmissibles (MST) et, en 2005, il a lancé un programme de dépistage du VIH/sida chez les femmes enceintes. En 2007, avec l’appui du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), le Gouvernement a créé un centre d’information sur le VIH et les MST destiné aux femmes, qui propose également des consultations de gynécologues et de psychologues dans ce domaine. Depuis 2009, un autre centre de ce type organise des activités de prévention axées sur les jeunes. En outre, un programme de sensibilisation destiné aux journalistes vise à renforcer le rôle de cette profession dans les activités de prévention. En ce qui concerne le problème de la diminution du nombre de places disponibles dans les hôpitaux depuis l’indépendance du pays, la première mesure prise pour y remédier a été de fournir davantage de soins médicaux ambulatoires dans le cadre d’un programme d’action prioritaire de l’OMS. Le Gouvernement a ensuite créé des centres de diagnostic et de soins d’urgence afin d’améliorer la prise en charge des patients et d’utiliser de manière plus rationnelle les places disponibles dans les établissements de soins. Trois nouveaux hôpitaux ont été construits dans différentes régions du pays et des cliniques et dispensaires ont été construits ou rénovés dans les zones rurales. Depuis 1995, un nouveau système d’assurance maladie volontaire couvre environ 95 % de la population. La cotisation s’élève à 2 % des revenus de l’assuré et l’assurance rembourse à hauteur de 90 % les médicaments et tous les types de services médicaux, aussi bien en matière de prévention que de traitement.

53.M. Arniyazov (Turkménistan) dit que les dispositions relatives au traitement réservé aux femmes dans les lieux de privation de liberté ont été modifiées et sont maintenant conformes aux normes internationales en la matière. Lorsqu’une femme a un enfant de moins de 3 ans, ce dernier est autorisé à rester auprès de sa mère. Lorsque les conditions le permettent, on autorise également les femmes à accoucher en dehors du centre de détention et, dans certains cas, à ne pas y retourner jusqu’à ce que l’enfant ait atteint l’âge de 3 ans. L’article 129 du Code pénal interdit la traite des êtres humains et prévoit des peines pouvant aller jusqu’à vint-cinq ans d’emprisonnement pour des actes de ce type. La violence au foyer est également sanctionnée par le Code pénal, qui distingue les infractions et les peines correspondantes en fonction du degré de violence des actes commis. La différence de délais pour l’enregistrement du mariage après la publication des bans, qui est d’un mois pour les citoyens turkmènes et de trois mois pour les étrangers, est due au fait que la loi impose de vérifier que les citoyens concernés n’ont pas été mariés précédemment et qu’une période plus longue est requise pour obtenir cette information pour les ressortissants étrangers. À ce propos, il indique que le Mejlis (Parlement turkmène) a achevé l’élaboration d’un projet de nouveau code de la famille conforme aux normes internationales concernant le mariage des ressortissants étrangers, qui devrait être adopté prochainement.

54.M. Geldimammedov (Turkménistan) dit que l’éducation sexuelle des enfants a été intégrée en 2008 au programme scolaire dans le cadre du cours intitulé «principes d’un mode de vie sain» suite à une phase préparatoire de consultations associant des spécialistes du Ministère de l’éducation, du Ministère de la santé et des organisations internationales telles que le FNUAP. Avec l’appui du Fonds, des formations de formateurs ont été organisées à l’étranger, notamment en Bulgarie, et l’Institut national de formation dispense également des cours de formation continue dans ce domaine. Pour les enfants plus jeunes, la formation porte sur un mode de vie sain et, pour les élèves plus âgés, elle inclut l’éducation sexuelle et la santé procréative.

Articles 13 à 15 du Pacte

55.M. Kerdoun constate que l’État partie n’a pas fourni de réponse à un certain nombre de questions relatives au droit à l’éducation et juge utile de les rappeler à la délégation. S’agissant des mesures prises pour augmenter l’effectif des étudiantes dans l’enseignement supérieur et inciter les jeunes femmes à adopter des domaines d’étude à prépondérance masculine, il fait remarquer que les chiffres concernant le nombre d’étudiantes portent sur l’année académique 2009/10 mais ne peuvent pas être comparés car les statistiques générales sur les étudiants inscrits dans l’enseignement supérieur s’arrêtent en 2008. Il demande donc à la délégation de fournir des données permettant de voir quelle a été l’évolution de la proportion d’étudiantes dans l’enseignement supérieur. Il souhaite également des renseignements sur les taux de scolarisation et d’abandon scolaire, sur les possibilités de formation professionnelle permettant de faciliter l’accès des jeunes au marché du travail et sur la prise en charge par l’État partie des frais de scolarité autres que les frais d’inscription. M. Kerdoun demande si un certificat d’études secondaires est exigé pour accéder à l’enseignement supérieur et, dans l’affirmative, pourquoi des concours d’entrée sont organisés. Il souhaite également des précisions sur les résultats obtenus grâce à la coopération internationale dans le domaine de l’éducation, à laquelle l’État partie fait beaucoup appel, et demande si cette coopération a permis d’améliorer le système éducatif turkmène, notamment pour ce qui concerne la protection des droits des élèves et leur instruction.

56.M. Marchá n Romero déplore l’absence de statistiques concernant les groupes ethniques dans le rapport de l’État partie et demande si une procédure de reconnaissance officielle de ces groupes et une loi régissant leurs rapports avec l’État existent. Il se dit préoccupé par l’intolérance dont seraient victimes certaines minorités, par exemple les groupes ouzbek ou baloutche et engage l’État partie à se référer à l’Observation générale no 21 du Comité concernant le droit de chacun de participer à la vie culturelle. Il souhaite également connaître l’avis de la délégation sur les informations reçues par le Comité selon lesquelles le Gouvernement turkmène imposerait des restrictions à l’utilisation de certains documents religieux ou éducatifs, car cela pourrait constituer une mesure d’assimilation nationale contraire aux principes d’intégration de tous dans la société.

57.M. Abashidze (Rapporteur pour le Turkménistan) demande jusqu’à quel niveau d’enseignement l’éducation est obligatoire et gratuite pour tous. Plus précisément, il souhaite savoir si l’enseignement primaire et secondaire couvre une période de dix ans ou plus. Il demande pourquoi le nombre d’élèves augmente dans les écoles secondaires d’Achgabat et de Lebap alors que le nombre d’établissements scolaires y diminue.

58.Relevant que l’enseignement supérieur est gratuit dans l’État partie mais que, selon certaines informations, il y aurait un problème de corruption en matière d’accès aux universités, M. Abashidze souhaite savoir si le Turkménistan a mis en place un examen public unifié pour l’entrée dans les universités ou a conservé l’ancien système soviétique. Notant que certaines catégories de personnes handicapées ont le droit d’entrer à l’université sans passer de concours mais que le rapport à l’examen ne contient pas de statistiques à ce sujet, il demande quel est le nombre d’entre eux qui sont entrés à l’université et dans quelle mesure ce droit est appliqué dans la pratique. Il aimerait savoir si les personnes qui partent étudier à l’étranger par elles-mêmes, sans avoir accompli leur service militaire, peuvent bénéficier des avantages des programmes d’études mis en place par l’État et sous quelles conditions. Il demande quelles mesures ont été prises par l’État pour améliorer les qualifications des enseignants dans les établissements d’enseignement supérieur; si les enfants bénéficient de repas gratuits dans le secondaire; s’il existe des écoles privées et si l’enseignement y est dispensé uniquement en turkmène ou également dans d’autres langues; s’il y a un système de quotas concernant l’accès des étudiants dans l’enseignement supérieur; et pourquoi les femmes sont moins nombreuses dans les universités et s’orientent plutôt vers l’enseignement professionnel. Enfin, il souhaite savoir si la Constitution garantit l’égalité en matière de droits culturels, quelle est la part du budget allouée à la culture et si les mesures sont orientées vers une politique générale ou plus concrètement sur certains groupes ethniques en particulier.

La séance est levée à 18 heures.