Cinquante-sixième session
Compte rendu analytique de la 65e séance
Tenue au Palais des Nations, à Genève, le jeudi 1er octobre 2015, à 10 heures
Président (e) :M. Sadi
Sommaire
Examen des rapports
a)Rapports soumis par les États parties en application des articles 16 et 17 du Pacte (suite)
Quatrième rapport périodique du Maroc (suite)
La séance est ouverte à 10 heures.
Examen des rapports
a)Rapports soumis par les États parties en application des articles 16 et 17 du Pacte (suite)
Quatrième rapport périodique du Maroc (E/C.12/MAR/4 , E/C.12/MAR/Q/4 , E/C.12/MAR/Q/4/Add.1) ( suite)
Sur l’invitation du Président, la délégation marocaine reprend place à la table du Comité.
M. Lamrani (Maroc) dit que le plan gouvernemental pour l’égalité a permis de renforcer les dispositifs juridiques et institutionnels du Maroc, notamment grâce au projet de loi relatif à la violence à l’égard des femmes, au projet de loi relatif à l’Autorité de la parité et de la lutte contre toutes les formes de discrimination, au projet de loi fixant les conditions d’emploi des travailleurs domestiques et au nouveau Code pénal fondé sur l’approche genre et renforçant la protection juridique des femmes victimes de violence. Un Observatoire national de la violence contre les femmes, un Observatoire national de l’image de la femme dans les médias, un Observatoire du genre dans la fonction publique et un système d’information intégré de collecte et de traitement de données sur la violence à l’égard des femmes ont été créés.
Le dispositif d’assistance sociale aux femmes a été renforcé, notamment grâce à la création de centres multifonctionnels liés à l’hébergement, à l’assistance sociale et juridique, à l’écoute et l’orientation et à l’alphabétisation. L’appui financier aux associations porteuses d’initiatives et projets en faveur des femmes a été renforcé. Un nouveau plan gouvernemental pour l’égalité est prévu pour 2017-2021. Ses axes stratégiques découleront du bilan qui aura été fait du premier plan en la matière.
Le Plan national pour l’enfance promeut la vie saine, à l’abri de la maltraitance et de la violence, combat le VIH chez les enfants et vise à leur offrir une éducation de qualité. Une nouvelle politique publique intégrée de protection de l’enfance a été adoptée en 2015 pour en renforcer le cadre juridique.
M. Nadeh (Maroc) dit que 7,6 % du budget national ont été alloués au monde rural en 2015 et que l’écart des taux de pauvreté entre les campagnes et les villes a diminué de moitié entre 2001 et 2011. La part de la population souffrant de malnutrition a diminué de 7 % à 5 % entre 1990 et 2015. L’accès de la population rurale à l’électricité est passé de 9,7 % à 97 % entre 1994 et 2012. En 2014, le taux de chômage en milieu rural était de 4,2 %, contre 14,8 % en milieu urbain.
En 2014, le taux d’activité des plus de 15 ans était de 57,2 % (72,4 % chez les hommes et 25,3 % chez les femmes), le taux de chômage était de 9,7 % chez les hommes et de 10,4 % chez les femmes, et le taux de chômage atteignait son niveau le plus élevé, 20 %, parmi les 15-24 ans, contre 13,9 % chez les 25-34 ans, 6,1 % chez les 35-44 ans et 3 % chez les 45 ans et plus.
M. Bastaoui (Maroc) dit que l’Initiative nationale pour le développement humain (INDH), lancée en 2005, a permis de faire reculer la pauvreté, la précarité et l’exclusion sociale, grâce à plus de 38 000 activités et 8 000 projets, pour un investissement global de 29 milliards de dirhams, concernant plus de 9 millions de personnes, dont la moitié en milieu rural et la moitié de femmes. Dans les 403 communes rurales visées par ces projets, le taux de pauvreté a reculé de 41 %, contre une diminution de 28 % dans les autres communes.
M. Najim (Maroc) dit que des divisions spéciales ont été créées au sein des tribunaux d’appel pour lutter contre les crimes financiers. Les juges ont été formés à l’audit et la loi no 37-10 modifiant et complétant la loi no 22-01 relative à la procédure pénale en matière de protection des victimes, des témoins, des experts et des dénonciateurs en ce qui concerne les infractions de corruption, de détournement, de trafic d’influence et autres a été adoptée en 2011. La Charte nationale pour la réforme de la justice est mise en œuvre et l’instance nationale de la probité, de la prévention et de la lutte contre la corruption a été créée en 2011. Le 12 juillet 2015, un numéro vert a été créé pour dénoncer les faits de corruption, ce qui a déjà permis d’arrêter 11 personnes en flagrant délit.
L’article 19 de la Constitution garantit l’égalité de droits entre hommes et femmes et des mesures incitatives ont été prises pour encourager la discrimination positive en faveur des femmes. Un projet de loi est en cours d’élaboration pour lutter contre le harcèlement par textos et le harcèlement pratiqué par un agent d’autorité ou un proche. Il prévoit des circonstances aggravantes si la victime est mineure.
Même si le Code de la famille autorise la polygamie, le tribunal ne valide le nouveau mariage que si les épouses en sont informées et s’il ne risque pas d’y avoir d’inégalité de traitement entre elles. Entre 2011 et 2014, le nombre de cas de polygamie a diminué de 0,34 % des mariages célébrés à 0,28 %. Le mariage d’un mineur, c’est-à-dire de toute personne de moins de 18 ans, ne peut être prononcé que par un tribunal, en présence de son tuteur légal. Une dérogation ne peut être accordée que sur demande du mineur et de son tuteur légal. En 2014, 43 760 demandes de dérogation ont été déposées.
Les auteurs de violences à l’égard des femmes encourent des peines de prison. Les victimes bénéficient de mesures de protection et un numéro vert a été mis en place pour contacter les autorités.
Depuis l’abrogation de l’article 475 du Code pénal en janvier 2015, aucune victime de viol ne peut être mariée à son violeur. Les femmes victimes de violence bénéficient d’une visite médicale gratuite au cours de laquelle est établi un certificat médical attestant les violences subies.
M. Mouttaqi (Maroc) dit que le conflit à Imider est un conflit socioenvironnemental né, en août 2011, sur un fond de revendication pour l’emploi, qui s’est par la suite transformé en conflit autour de la problématique de l’eau. En 2012, à l’issue d’une vingtaine de réunions entre les autorités locales et les parties intéressées, une convention a été signée avec la société minière d’exploitation, qui consacre 10 millions de dirhams par an au développement de la communauté.
M. Seddiki(Maroc) précise que le Conseil économique, social et environnemental réunit l’ensemble des partenaires sociaux et qu’il est souvent sollicité pour avis.
M. Mansour (Maroc) dit que les logements sont de meilleure qualité, notamment grâce au plan « Villes sans bidonvilles ».
M. Chafiki (Maroc) dit que, depuis 2011, la loi de finances prévoit un certain nombre d’exonérations fiscales, dont la diminution du taux d’imposition sur les sociétés, afin de faire reculer le nombre d’emplois informels. Une stratégie nationale de modernisation des toutes petites entreprises a été lancée et, en 2013, le Parlement a adopté la création du statut d’auto-entrepreneur. Un Ministre délégué chargé des petites entreprises et de l’intégration du secteur informel a été nommé.
Le premier pilier du Plan Maroc Vert compte 25 % des exportations agricoles et de la superficie agricole utile tandis que le deuxième pilier représente 75 % des activités agricoles. Le Plan a atteint près de 90 % des objectifs fixés, pour quelque 720 000 bénéficiaires. Tous les intervenants y sont organisés en associations ou en coopératives, depuis la production jusqu’à l’accès au marché.
M me Tabane (Maroc) dit que les mesures adoptées ont permis de faire reculer la malnutrition infantile et qu’un projet de loi sur l’allaitement est en cours d’élaboration. Des instructions ministérielles ont été données pour favoriser l’allaitement et une semaine nationale de l’allaitement a été organisée. Il est envisagé d’interdire aux médecins de recommander les substituts de lait maternel pour les enfants de moins de 6 mois. Les étrangers peuvent bénéficier des services de santé quelle que soit leur situation juridique.
M. Tahiri (Maroc) dit que le Maroc a engagé la réforme de l’éducation (2015-2030) qui préconise plusieurs mesures pour améliorer la qualité du système éducatif et la maîtrise des connaissances fondamentales, notamment en mettant l’accent sur l’enseignement primaire et l’apprentissage des compétences fondamentales (lecture, écriture et calcul), sur la formation initiale et continue des enseignants, sur la révision des seuils de passage d’un niveau à l’autre et sur la révision de la question de l’orientation des élèves, notamment grâce au rapprochement de la formation professionnelle et de l’enseignement scolaire. La réforme prévoit également la mise en place d’écoles associées, à la fois privées et publiques, où les compétences des deux secteurs sont utilisées au mieux.
Grâce aux réformes de l’enseignement supérieur, le nombre d’étudiants universitaires est passé de 38 000 en 2005 à 85 000 en 2010. Désormais, une place à l’université est garantie à chaque bachelier. La Charte nationale de l’éducation et de la formation, adoptée en 2000, prévoit une contribution du secteur privé de 20 % dans l’effort déployé par l’État pour garantir l’exercice du droit à une éducation gratuite et de qualité pour tous les enfants en âge de scolarisation, sans discrimination d’aucune sorte. Le Conseil supérieur de l’éducation, de la formation et de la recherche scientifique a tenu de larges débats sur le point de savoir s’il convenait de préserver le statut de la langue nationale dans l’enseignement et décidé qu’il convenait d’ouvrir davantage le système d’enseignement secondaire à d’autres langues, notamment le français, l’anglais et l’espagnol. Des classes bilangues ont donc été créées en 2011; les premiers bacheliers de cette nouvelle formule sont attendus en 2016.
M. Soukrati (Maroc), répondant aux questions concernant les visites effectuées par l’Inspection du travail dans le secteur agricole, dit que l’Inspection du travail compte 478 agents spécialisés dans ce secteur, dont 114 femmes. En 2014, elle a effectué 1 520 visites dans les exploitations agricoles et 571 au cours du seul premier semestre de 2015. Les principaux manquements observés ont trait, dans 83 % des cas, à la législation sur le temps de travail et les salaires. Les agents de l’Inspection du travail ont été particulièrement sensibilisés au respect des droits fondamentaux du travail, en particulier à la liberté syndicale et à l’abolition du travail des enfants et du travail forcé.
M. Rouwane (Maroc) dit que le Maroc a engagé en 2006 un processus de ratification des protocoles se rapportant aux principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme auxquels le pays est partie. Il a ainsi signé, en 2008, le Protocole facultatif se rapportant à la Convention relative aux droits des personnes handicapées et, en 2014, le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Le Parlement a donné un avis favorable à la ratification du premier Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques et du Protocole facultatif à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, qui devrait intervenir sous peu. Le Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels est, selon toute vraisemblance, le prochain instrument que le Maroc devrait signer et ratifier.
M. Seddiki (Maroc) reconnaît que son pays rencontre de nombreux problèmes pour lutter contre le chômage, malgré les progrès importants enregistrés ces dernières années. Les autorités s’attellent en particulier à accroître le taux d’emploi des femmes, qui n’est pour l’heure que de 25,3 %, ce qui est très insuffisant. Le deuxième problème que le Gouvernement s’efforce de résoudre est celui du taux de chômage des jeunes, qui concerne 50 % des 15-24 ans. La Stratégie nationale pour l’emploi, qui a été adoptée en janvier 2015 et élaborée en concertation avec les partenaires sociaux, le patronat, et les représentants de la société civile, poursuit quatre objectifs : améliorer la croissance créatrice d’emplois; placer l’emploi au cœur des politiques macroéconomiques; réviser les politiques publiques en matière d’emploi; et améliorer la gestion et la gouvernance du marché du travail. Cette stratégie a d’ores et déjà donné de bons résultats dans les zones rurales et le Gouvernement espère parvenir au plein emploi à l’horizon 2020-2025.
S’agissant des droits linguistiques et culturels des Amazighs, M. Seddiki dit qu’il est lui-même, à l’instar de l’Ambassadeur du Maroc, amazigh, et qu’ils sont tous deux les preuves vivantes non seulement du respect que la société marocaine leur témoigne mais aussi de l’absence de discrimination à leur égard. Les Amazighs sont les peuples premiers du Maroc mais le pays a connu depuis le sixième siècle nombre de métissages et de brassages, y compris avec les populations andalouses et du golfe Persique, qui ont contribué à forger la diversité de sa population. Les Marocains ont tranché définitivement sur cette question, d’ailleurs mal comprise à l’étranger, afin d’éviter tout conflit ethnique qui s’avérerait dangereux pour la stabilité et la prospérité de la région.
M. Uprimny (Rapporteur pour le Maroc) souhaite savoir quelles mesures les autorités marocaines envisagent de prendre pour lutter contre le taux élevé de mortalité maternelle et infantile observé dans les zones rurales, et qui serait principalement dû à l’absence de structures néonatales appropriées. Il aimerait également connaître la position de l’État partie sur la question de l’avortement. S’agissant du droit à la santé dans les prisons, le Rapporteur constate que les conditions de détention demeurent très difficiles et qu’elles sont aggravées par un taux de surpeuplement qui atteignait 60 % en 2014. Il serait utile de savoir ce que le Maroc entend faire pour remédier à cette situation.
Prenant note des nombreux progrès effectués par l’État partie dans le domaine de l’enseignement primaire, secondaire et supérieur, le Rapporteur constate qu’il existe très peu de structures d’éducation préscolaire, situation qui n’est pas de nature à faciliter la participation des femmes au marché de l’emploi. Dans un tout autre registre, il aimerait savoir si les couples de même sexe ont droit à une protection juridique. S’agissant du Sahara occidental, la délégation est invitée à indiquer quelles dispositions garantissent le respect des droits culturels du peuple sahraoui. Relevant que le statut d’autonomie du Sahara occidental sera soumis à une consultation référendaire des populations concernées, il souhaite savoir ce qu’il adviendra si le « non » l’emporte aux élections et si tous les habitants seront consultés.
M me Bras Gomes demande à la délégation de confirmer ou d’infirmer l’information selon laquelle les migrants et les réfugiés sont admis au bénéfice du régime d’assistance médicale. Elle aimerait également recevoir des informations concernant le système de protection sociale et juridique des travailleurs employés dans l’économie informelle.
M. Kedzia demande à la délégation d’indiquer les mesures prises par le Maroc pour prévenir la fracture numérique, notamment en ce qui concerne les personnes handicapées.
M. Abdel-Moneim souhaite savoir si les autorités marocaines ont constaté que la baisse de la pauvreté s’accompagnait de façon systématique d’une amélioration de la qualité et du niveau de vie des personnes démunies.
M me Shin prend note des efforts accomplis par le Maroc pour assurer l’égalité des droits des femmes. Évoquant la question de la polygamie, elle considère que le Maroc devrait, par souci d’égalité juridique entre les hommes et les femmes, autoriser la polyandrie. Elle recommande à l’État partie d’éliminer la pratique consistant à ne délivrer gratuitement des certificats médicaux que si l’incapacité temporaire de travail de la victime est supérieure à vingt jours, et qui nuit particulièrement aux femmes victimes de violences. Elle aimerait également savoir si les soins médicaux sont aussi gratuits pour les victimes de violence familiale.
M. Pillay souhaiterait recevoir des informations sur le nombre de personnes qui ont été expulsées des bidonvilles et le sort qui leur a été réservé, ainsi que sur le nombre de sans-abris recensés dans les zones rurales. Il appelle l’attention de l’État partie sur le fait que les murs de sable érigés par les forces royales marocaines au Sahara occidental coupent, de fait, le territoire en deux et empêchent ses habitants de jouir effectivement de leurs droits économiques, sociaux et culturels, exactement comme en Cisjordanie, où les autorités israéliennes ont érigé un mur de quelque 700 kilomètres.
Le Président, s’exprimant en tant que membre du Comité sur la question de la polygamie, rappelle que selon le Coran, un homme qui a plus d’une femme ne peut être juste.
M. Seddiki (Maroc) indique que son Gouvernement, pour trouver une solution au problème du surpeuplement carcéral, a décidé de ne plus sanctionner certains délits de peines privatives de liberté.
M me Tabane (Maroc), répondant aux questions sur les services de santé en prison, dit que tous les établissements pénitentiaires disposent d’infirmeries où travaillent des médecins aussi bien généralistes que spécialistes. L’Administration pénitentiaire s’est adjointe les services de 36 médecins consultants. Tous les détenus ont le droit d’effectuer six visites médicales par an et plusieurs campagnes de vaccination et de prévention du VIH/sida ont été menées en direction des détenus. Des aménagements sont créés à l’intention des détenus handicapés et/ou âgés.
M. Seddiki (Maroc) dit que le fait d’autoriser la création d’établissements d’enseignement préscolaire privés ne nuira pas aux enfants issus de familles défavorisées, au contraire : l’État aura davantage de moyens à consacrer aux établissements publics existants et s’efforcera d’améliorer la qualité de l’enseignement qui y est dispensé.
La question de la légalisation de l’avortement fait débat, et une commission spéciale a été créée pour examiner les cas dans lesquels il pourrait être autorisé. À ce stade, il le serait si la vie de la mère est en danger, en cas de viol et en cas de malformation congénitale. Il s’agit là d’une question de société délicate qui doit être traitée avec préoccupation, afin de ne pas heurter les sensibilités.
Le niveau de vie augmente ce qui fait reculer le seuil de pauvreté. Le Gouvernement marocain établit le seuil de pauvreté par des méthodes rigoureuses qui tiennent compte de la hausse du coût de la vie. Il prend le problème de la pauvreté très au sérieux et est déjà parvenu à en faire baisser le taux.
Le Gouvernement s’est attaqué au phénomène des bidonvilles mais n’a pas réussi à l’éradiquer car l’ampleur de l’exode rural a engendré une telle pénurie de logements dans les villes qu’il ne lui serait pas possible de reloger tous les habitants des bidonvilles restants. La baisse du taux de croissance démographique, qui s’élève désormais à 1,02 %, contribuera à terme à régler le problème du fait que, progressivement, la demande de logements diminuera.
La tendance est à l’interdiction de la polygamie. Cela étant, il faut bien comprendre qu’un homme qui ne peut fonder une famille avec sa première femme se tourne vers une autre pour assurer sa descendance, en particulier les paysans qui ont besoin d’héritiers de sexe masculin.
Par définition, le secteur informel n’est pas réglementé et n’offre aucune garantie en matière de protection sociale et de respect des normes du travail. Le Gouvernement a toutefois tenté de favoriser la transition de l’économie informelle à l’économie formelle en abaissant à 10 % (au lieu de 30 % normalement) le taux d’imposition des entreprises qui font la démarche de déclarer leur activité.
M. Attaoui (Maroc) dit que le projet de loi relatif aux droits des personnes en situation de handicap, dont le Parlement est saisi depuis septembre 2015, a pour objet de garantir l’égalité des chances sur le marché de l’emploi et de prévenir la discrimination à l’égard des personnes handicapées sur le lieu de travail. En outre, le Roi Mohammed VI a pris l’engagement solennel de renforcer la formation des personnes handicapées afin que celles-ci puissent accéder aux technologies de l’information et maîtriser les moyens de communication numériques actuels. Le Code pénal réprime tous les actes portant atteinte à l’intégrité physique des femmes et des enfants handicapés, et des textes d’application ont été adoptés.
M me Rouijel (Maroc) dit que le Gouvernement marocain a mis en place un dispositif de soutien aux artistes dans les régions du sud qui a déjà donné de bons résultats; ce dispositif fixe notamment les modalités de la participation de ces artistes aux festivals et autres manifestations culturelles. Les provinces du sud sont de surcroît bien mieux loties que les autres régions du pays en termes d’infrastructures culturelles, comme l’atteste le nombre de médiathèques, bibliothèques et points de lecture. L’offre culturelle y est variée et les particularismes culturels locaux sont mis en valeur grâce à divers plans nationaux. La poésie, la langue et le patrimoine culturel oral hassanis sont mis à l’honneur dans le cadre de divers programmes, dont le programme de préservation du patrimoine.
M. Joumani (Maroc) dit que le Gouvernement encourage les organisateurs de festivals à l’échelle nationale à faire la promotion des artistes sahraouis et que les plans de développement de l’artisanat au niveau régional visent à organiser des rencontres entre les artisans sahraouis spécialisés dans le travail du bois, de l’argent et du cuir et des designers internationaux qui peuvent leur ouvrir l’accès à de nouveaux marchés.
M. A m ouzay (Maroc) dit que l’Institut royal de la culture amazighe (IRCAM) œuvre en faveur de la promotion de la langue amazighe dans l’enseignement et a élaboré des outils pédagogiques pour l’enseignement primaire. Le nombre d’enseignants de langue amazighe est passé de 80 en 2013 à 127 en 2014.
M. Auajjar (Maroc) dit que, malgré le retour du fondamentalisme islamique dans la région, le Royaume du Maroc est parvenu à faire accepter l’idée que les valeurs universelles des droits de l’homme devaient être respectées et inscrites dans la Constitution. Certaines questions, comme celle de la peine de mort ou de l’avortement, devront être examinées de manière plus approfondie avant que des projets de loi qui respectent à la fois les grandes valeurs de l’Islam et les valeurs universelles des droits de l’homme puissent voir le jour.
M. Auajjar s’élève avec véhémence contre la comparaison hasardeuse entre le mur construit au Sahara et le mur de séparation érigé par Israël. Il précise que ce mur construit en sable dans des zones non peuplées a pour objet de protéger les populations des provinces du sud contre les fléaux que sont la traite des êtres humains, le trafic de drogues ou encore l’immigration clandestine, et qu’il est doté de plusieurs points de passage permettant aux habitants de ces provinces de le franchir. Il ajoute que jamais ce mur n’a été qualifié de mur de séparation dans un rapport officiel du Secrétaire général des Nations Unies. M. Auajjar comprend que la société civile puisse être préoccupée par le retard dans l’adoption de plusieurs lois organiques, qui porteraient notamment sur la langue amazighe, le droit de grève ou l’indépendance de la justice, mais dit que la promulgation de telles lois est une obligation constitutionnelle et que le processus est en marche. Pour ce qui est de la langue amazighe, toutes les chaînes de télévision nationales, outre les chaînes amazighes, sont tenues de diffuser une partie de leurs programmes dans cette langue.
Enfin, M. Auajjar insiste sur le fait que le Roi Mohammed VI accorde une grande importance à la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels ainsi que politiques et s’est fixé comme objectif de combattre la pauvreté, notamment en mettant l’accent sur l’éducation.
M. Uprimny (Rapporteur pour le Maroc) se félicite du rapport franc et constructif engagé avec la délégation marocaine. Il dit que le Comité attend de l’État partie qu’il diffuse largement au sein de la société les observations finales qui seront rendues publiques le dernier jour de la session en cours et qu’il soumette son prochain rapport dans les temps.
M. Seddiki (Maroc) espère que la délégation marocaine sera parvenue à livrer au Comité une image aussi fidèle que possible de la réalité marocaine, avec ses contradictions, ses avancées et ses faiblesses. Il rend hommage au travail des défenseurs des droits de l’homme, présents dans la salle, qui sont les partenaires incontournables du Gouvernement dans son action. Il dit que le Maroc s’engage solennellement à persévérer sur la voie dans laquelle il s’est engagé et à consacrer davantage de ressources encore à la mise en œuvre des droits économiques, sociaux et culturels. Le Gouvernement se concentrera avant tout sur le droit au travail, qu’il considère déterminant pour l’exercice des autres droits. Le Royaume du Maroc a toujours fait preuve d’une grande solidarité envers les peuples des pays subsahariens, et a aussi consacré des moyens considérables à l’accueil de milliers de réfugiés. Enfin, M. Seddiki veillera à ce que les observations finales soient diffusées largement à l’échelle du pays.
Le Président convient qu’il n’est pas toujours aisé de faire évoluer les mentalités sans heurter les consciences ou les sensibilités mais que les normes internationales n’en sont pas moins des normes universelles, qui ont été adoptées par la communauté internationale, où tous les courants politiques et religieux ont pu s’exprimer, et sont donc contraignantes.
La séance est levée à 13 heures.