Conseil Économique

et Social

Distr.

GÉNÉRALE

E/C.12/2004/SR.3

3 mai 2004

Original: FRANÇAIS

COMITÉ DES DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS

Trente-deuxième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 3e SÉANCE

tenue au Palais des Nations, à Genève,le mardi 27 avril 2004, à 10 heures

Président: M. RIEDEL (Vice‑Président)

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS

a)RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT AUX ARTICLES 16 ET 17 DU PACTE

Rapport initial de la Lituanie

La séance est ouverte à 10 h 10.

EXAMEN DES RAPPORTS:

a)RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT AUX ARTICLES 16 ET 17 DU PACTE (point 6 de l’ordre du jour)

Rapport initial de la Lituanie (E/1990/5/Add.55; document de base (HRI/CORE/1/Add.97); profil de pays (E/C.12/CA/LIT/1) en anglais seulement; liste des points à traiter (E/C.12/Q/LITH/1/Rev.1); réponses écrites du Gouvernement lituanien (HR/CESCR/NONE/2003/10))

1. Sur l’invitation du Président, la délégation lituanienne prend place à la table du Comité.

2.Le PRÉSIDENT souhaite la bienvenue à la délégation lituanienne et l’invite à présenter le rapport initial de l’État partie.

3.M. ŠADŽIUS (Lituanie) présente les principaux faits nouveaux survenus en Lituanie depuis janvier 2002. Conformément au Programme d’action de la Conférence mondiale des droits de l’homme, tenue à Vienne en 1993, et avec le concours du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), la Lituanie a adopté en novembre 2002 un vaste plan national d’action pour la protection et la promotion des droits de l’homme, qui s’articule autour des thèmes suivants: la promotion du droit au travail et du droit à la santé, et la protection des droits des personnes âgées et des handicapés, des consommateurs, de l’enfant, des personnes accusées et emprisonnées et des victimes de la criminalité. Il vise également à promouvoir l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, à prévenir la violence contre les femmes et la traite des personnes, à lutter contre la discrimination et à mieux protéger les droits des minorités sexuelles, des migrants et des réfugiés. En tout état de cause, la situation des droits de l’homme en Lituanie ne pourra s’améliorer que si le plan national d’action est effectivement appliqué, si un système efficace de suivi de la situation des droits de l’homme est établi et si un mécanisme de dialogue continu entre les pouvoirs publics et la société civile est instauré. Dans le cadre de la mise en œuvre du plan d’action, le Ministère de la justice a fait réaliser une étude sur les possibilités de création de tribunaux spécialisés en droit du travail. Cette étude a montré qu’il n’était pas souhaitable de créer de tels tribunaux, mais qu’il était préférable d’établir des chambres spécialisées dans les tribunaux ordinaires et de nommer des juges pour les affaires touchant au droit du travail.

4.La Lituanie a procédé à une vaste réforme de son système judiciaire et adopté six nouveaux codes, le but étant d’appliquer les normes internationales les plus strictes dans le domaine des droits de l’homme et d’offrir davantage de garanties judiciaires aux groupes les plus vulnérables. Le nouveau Code pénal prévoit des périodes de détention plus courtes et institue des peines non privatives de liberté telles que la déchéance des droits civiques et le travail d’intérêt général. Il convient de noter qu’il n’y a pas de peine capitale en Lituanie.

5.Le nouveau Code d’application des peines améliore les conditions de détention dans les établissements pénitentiaires et protège mieux les droits et les libertés fondamentales des détenus. Pleinement conforme à la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et à la Convention européenne des droits de l’homme, le Code d’application des peines réprime le recours à la torture et à tout autre traitement inhumain ou dégradant.

6.En juin 2002, la Lituanie a adopté un nouveau Code du travail, qui reprend les principales normes internationales du travail, crée des conditions plus souples pour favoriser le dialogue social et est conforme à la nouvelle réalité économique du pays. Ce code interdit expressément la discrimination fondée sur le sexe, l’orientation sexuelle, la race, l’origine ethnique, la langue, la nationalité, le statut social, l’âge, la religion, les croyances et l’appartenance à un parti politique ou à une association. Il est désormais illégal de licencier un employé au motif qu’il est syndiqué ou a engagé une procédure contre son employeur. Le Code introduit la notion de partenariat social et met l’accent sur l’importance de la négociation collective, bilatérale ou tripartite. Les employés d’une entreprise peuvent être représentés non seulement par des syndicats mais aussi par des représentants élus ou des conseils du travail. Le Code prévoit en outre une plus grande flexibilité en ce qui concerne les contrats de travail tout en offrant des garanties de stabilité aux travailleurs. Conformément aux recommandations de l’Organisation internationale du Travail (OIT), le Code dispose que le Gouvernement doit répondre aux revendications des employés dans les entreprises et institutions où il est interdit de faire grève.

7.Les nouveaux Code civil et Code de procédure civile ont pour objet de mieux protéger les droits de l’homme et les libertés fondamentales et d’offrir des voies de recours plus efficaces en cas de violation. Le Code civil comprend des dispositions remarquablement progressistes concernant la protection des droits de l’enfant tandis que le Code de procédure civile vise à accélérer la procédure et à éviter tout retard excessif.

8.M. Šadžius cite plusieurs lois importantes qui ont été adoptées récemment ou qui ont des incidences sur l’application des dispositions du Pacte par la Lituanie: la loi concernant l’aide juridique garantie par l’État, en vertu de laquelle les personnes défavorisées ont droit à une aide juridique gratuite; la loi sur l’égalité des chances entre les femmes et les hommes, qui interdit expressément la discrimination directe et indirecte fondée sur l’âge, l’orientation sexuelle, le handicap, l’origine ethnique ou raciale, la religion ou les croyances; la loi sur les associations; la loi sur les syndicats; et la loi sur l’assurance sociale. Par ailleurs, la croissance économique enregistrée par la Lituanie a permis de mettre en œuvre un large éventail de programmes.

9.En conclusion, M. Šadžius dit que le rapport à l’examen a été élaboré par une commission composée de représentants de plusieurs ministères et a été publié en lituanien et en anglais et diffusé sur Internet. La Lituanie envisage en outre de traduire et de publier les conclusions et recommandations qui seront formulées par le Comité à l’issue de son examen.

Articles 1er à 5 du Pacte

10.M. ATANGANA fait observer que l’État partie ne compte qu’une seule cour d’appel et demande si celle-ci n’est pas dépassée par les nombreuses missions qui lui sont confiées, étant donné l’ampleur de la législation adoptée depuis 2002 et la vaste étendue du pays. À cet égard, il souhaite savoir si la Lituanie envisage de restructurer son système judiciaire. Par ailleurs, il note que les tribunaux peuvent révoquer les fonctionnaires reconnus coupables d’abus de fonction et demande si cette pratique exclut la procédure administrative normalement en vigueur.

11.M. SADI demande dans quelle mesure l’État partie a tenu compte des dispositions du Pacte lors de l’élaboration du plan national d’action pour les droits de l’homme et a recensé les principaux problèmes relatifs aux droits de l’homme avant de définir les mesures à prendre. Il souhaite savoir si d’autres ministères que le Ministère de la justice ont pris des mesures pour donner suite au plan d’action. Il recommande en outre à l’État partie d’élaborer un rapport sur les progrès réalisés dans l’application du Pacte. Enfin, il demande si le Pacte peut être directement invoqué devant les tribunaux et, dans l’affirmative, souhaite que la délégation donne des exemples d’affaires récentes.

12.M. MALINVERNI demande dans quelle mesure les nouvelles institutions de défense des droits de l’homme s’occupent des droits économiques, sociaux et culturels et leur accordent autant d’importance qu’aux droits civils et politiques. Il souhaite connaître la jurisprudence de ces institutions sur l’application des droits garantis par le Pacte.

13.M. Malinverni évoque certaines sources selon lesquelles la loi sur la nationalité adoptée en septembre 2002 est discriminatoire en ce sens que les citoyens d’origine lituanienne peuvent obtenir la double nationalité contrairement à ceux qui ne sont pas Lituaniens de souche. Il demande des précisions à ce sujet ainsi que sur la loi sur l’asile que la Lituanie a modifiée en janvier 2002 pour offrir des garanties de procédure aux requérants d’asile. Selon certaines sources, la procédure d’attente avant l’octroi de l’asile resterait longue et des requérants d’asile, notamment originaires d’Asie, seraient victimes de discrimination. Enfin, il note que l’État partie a ratifié la Charte sociale européenne révisée en 2001 et demande s’il entend ratifier le Protocole additionnel se rapportant à cette Charte, qui prévoit un système de réclamations collectives.

14.M. CEAUSU demande si des dispositions sont prévues pour donner au médiateur davantage de moyens pour exercer sa fonction. Il souhaite aussi savoir si seulement 250 plaintes ont été reçues au cours des quatre premières années de fonctionnement du bureau du médiateur et combien d’infractions administratives ont été sanctionnées.

15.Mme IYER se félicite de l’introduction des nouvelles dispositions législatives et du programme d’action pour les droits de l’homme, qui s’appliquent notamment aux minorités nationales (18 % de la population). À ce sujet, elle souhaite s’assurer que ces initiatives améliorent la situation des femmes et des minorités et voudrait savoir si les résultats du programme 2000-2004 d’intégration des Roms dans la société lituanienne ont été évalués afin d’en tirer des enseignements pour la suite. Par ailleurs, quelle a été l’incidence de la loi sur la restitution de la propriété foncière du 25 juillet 1991, notamment sur certaines minorités nationales? Même si le principe d’égalité des chances entre hommes et femmes figure dans la Constitution et est inscrit dans la législation, les femmes continueraient à faire l’objet d’une discrimination. La Lituanie a-t-elle prévu des mesures de discrimination positives, notamment au niveau des organes décisionnels?

16.Mme BARAHONA RIERA se félicite des réformes entreprises pour instaurer un État de droit, mais elle se dit préoccupée par certains problèmes liés à l’application du nouveau cadre juridique. Elle croit savoir que de nombreuses affaires dont sont saisis les tribunaux restent en souffrance et que certains juges subissent des pressions diverses. Quelles sont les mesures en place pour garantir l’indépendance de la magistrature et accélérer les travaux de la justice?

17.Concernant l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, Mme Barahona Riera demande pourquoi aucune mesure n’a été prise pour favoriser la participation des femmes à la vie politique. Enfin, le Gouvernement lituanien envisage-t-il de faire adopter une loi destinée à protéger les victimes de la violence familiale?

18.Mme BRAS GOMES demande si l’État a pris des mesures pour remédier, notamment par le biais d’une aide budgétaire, aux inégalités apparues entre les régions à la suite des réformes économiques. Elle demande également si les Roms ont été consultés lors de l’évaluation de leur programme d’intégration. Malgré les nombreuses lois visant à établir l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, des inégalités subsistent. La Lituanie a-t-elle évalué les résultats du programme mis en place dans ce domaine, et dans l’affirmative, quels sont les domaines importants auxquels il convient de s’attaquer tant au niveau des politiques que de la pratique?

19.M. GRISSA aimerait savoir ce que recouvre précisément l’expression «minorité nationale» et si les personnes concernées sont considérées comme des «étrangers» ou ont les mêmes droits que les autres citoyens. Il souligne que cette expression revêt un caractère discriminatoire.

20.M. PILLAY se félicite des réformes législatives et judiciaires accomplies par la Lituanie, et, en particulier, de l’adoption de la loi contre la corruption. Cependant les documents à disposition ne permettent pas d’établir clairement la primauté des dispositions du Pacte sur la législation nationale. Seules certaines dispositions du Pacte semblent pouvoir être appliquées directement par les tribunaux. Il souhaite savoir si tel est le cas et également si les citoyens ont la possibilité d’invoquer ces dispositions devant les tribunaux en cas d’incompatibilité avec la législation nationale.

21.M. KERDOUN se félicite de l’adoption du nouveau Code du travail dans le cadre de la mise en œuvre du plan national d’action pour les droits de l’homme. En outre, il demande quelles mesures le Gouvernement lituanien compte prendre face à la recrudescence probable du chômage, surtout chez les jeunes, qui découlera de la fermeture prochaine de la centrale nucléaire d’Ignalina.

22.M. ŠADŽIUS (Lituanie) dit que tous les instruments internationaux ratifiés font partie intégrante du système juridique lituanien et peuvent être invoqués devant les tribunaux. Toutefois, des lacunes subsistent au niveau de l’information des citoyens sur la possibilité d’un tel recours. Les instruments internationaux ont néanmoins été invoqués à diverses reprises dans le cadre d’affaires examinées par la Cour suprême. Le Pacte étant un ensemble de dispositions générales dont l’application directe s’avère parfois difficile, celles‑ci sont transposées dans des lois adoptées par le Parlement.

23.M. Šadžius répond à M. Atangana que la cour d’appel n’est pas la seule instance d’appel en Lituanie. Conformément au Code pénal et au Code civil, les recours en appel des jugements des tribunaux de district sont examinés par les tribunaux régionaux. Par ailleurs, certaines affaires doivent être jugées obligatoirement par les tribunaux régionaux en première instance avant de pouvoir être examinées par la cour d’appel. Celle‑ci ne rencontre pas de problèmes d’engorgement.

24.Mme MILAŠIUTĖ (Lituanie) ajoute qu’il existe également un système de tribunaux administratifs qui comporte une instance d’appel. Elle confirme également que les dispositions du Pacte peuvent être invoquées directement devant les tribunaux et qu’aucun obstacle juridique n’entrave une telle initiative. Lorsque les dispositions du Pacte sont transposées dans le système juridique national, les juristes et les tribunaux se réfèrent plus facilement aux lois nationales. Enfin, lorsque la Cour constitutionnelle examine la compatibilité des lois avec la Constitution, elle se reporte souvent aux instruments internationaux.

25.M. ŠADŽIUS (Lituanie) reconnaît l’importance de la question des minorités nationales et rappelle, à ce titre, qu’après l’indépendance, la Lituanie a adopté une loi stricte sur la nationalité en vertu de laquelle toute personne résidant à une certaine date sur le territoire lituanien, quelle que soit son origine ethnique, avait la possibilité d’acquérir la nationalité lituanienne. La double nationalité n’est autorisée qu’à titre exceptionnel, notamment pour des personnalités ayant contribué de manière importante à l’activité économique, culturelle, etc. Sinon, la naturalisation implique l’abandon de l’autre nationalité. Enfin, les personnes d’origine lituanienne bénéficient d’une procédure simplifiée pour obtenir à nouveau la nationalité lituanienne.

26.Mme KASPUTIENĖ (Lituanie) dit que la disposition de l’article 18 de la loi sur la nationalité qui permet aux citoyens d’origine lituanienne de bénéficier de la double nationalité est actuellement examinée par la Cour constitutionnelle. L’identité ethnique nationale n’a rien à voir avec la citoyenneté. L’expression «minorités nationales» ne correspond pas à une notion juridique, mais recouvre une réalité culturelle. Les minorités nationales peuvent bénéficier d’un soutien de la part des autorités dans les domaines de la culture, de l’éducation et de l’information. Il existe notamment un programme d’intégration de la population rom pour la période 2000‑2004 dont les résultats sont en cours d’évaluation. La communauté rom, qui comprenait moins de 3 000 personnes au dernier recensement de 2001, est étroitement associée à l’élaboration de la prochaine phase de ce programme.

27.M. ŠADŽIUS (Lituanie) dit que le Gouvernement lituanien est résolu à remédier aux grandes différences qui existent entre les régions en matière de développement économique et social et espère pouvoir rendre compte des progrès qui seront accomplis dans le prochain rapport périodique de l’État partie.

28.Mme GUOBAITÉ‑KIRSLIENĖ (Lituanie) répond que l’évaluation du programme pour l’emploi 2001‑2004 montre que les différences régionales se sont atténuées. Entre 2001 et 2003, les programmes locaux soutenus par les autorités ont créé plus de 1000 emplois. En 2003, 4 millions de talonas ont été alloués à des initiatives et projets locaux pour l’emploi.

29.Mme KASPUTIENÉ (Lituanie) précise que la première tranche de la centrale nucléaire d’Ignalina doit être fermée en 2005 et la deuxième en 2009. Le Gouvernement lituanien a pris des mesures pour faire face aux problèmes que rencontreront les personnes directement et indirectement touchées par cette fermeture. Il a ainsi créé un organisme régional chargé de concevoir un plan de développement de la région d’Ignalina et de coordonner tous les efforts entrepris, notamment pour promouvoir la création d’entreprises. En outre, des centres d’information et de consultation accueillent la population concernée. Enfin, le Parlement lituanien a voté une loi offrant des garanties supplémentaires aux personnes qui seront licenciées, notamment en matière de reconversion et de réemploi. Les mesures d’assistance sociale seront adaptées en fonction des résultats obtenus.

30.M. ŽIŪKAS (Lituanie) répond que la Lituanie a signé la Charte sociale européenne révisée en 1997 et l’a ratifiée en 2001, mais que seuls 10 pays ont signé le Protocole additionnel à cette charte.

31.Mme KASPUTIENĖ (Lituanie) dit que la Commission parlementaire des droits de l’homme est le principal organe qui supervise la mise en œuvre du plan national d’action pour les droits de l’homme. En outre, l’application des 13 chapitres de ce plan est évaluée par des commissions spéciales réunissant les représentants des différents ministères compétents et d’organisations non gouvernementales (ONG). Le premier rapport sur les activités menées en 2003 est disponible sur Internet.

32.Mme MILAŠIŪTĖ (Lituanie) dit que les droits civils et politiques et les droits économiques, sociaux et culturels sont considérés comme inséparables dans le plan national d’action pour les droits de l’homme.

33.M. ŠADŽIUS (Lituanie) se demande si la création d’un organisme distinct qui serait chargé de superviser toutes les activités relatives aux droits de l’homme serait une bonne chose compte tenu de la complexité des problèmes posés. Il juge préférable de confier la coordination des mesures administratives au Ministère de la justice.

34.Aucune loi réprimant la violence familiale n’existe car tous les délits doivent être définis dans le Code pénal lituanien. De même, les mesures particulières à prendre pour lutter contre la corruption doivent être stipulées dans le Code pénal. À ce propos, les salaires des juges ont été fortement relevés, mais d’autres solutions doivent être trouvées car la corruption persiste.

35.Concernant la parité entre les sexes, M. Šadžius dit que les femmes continuent d’être moins bien rémunérées que les hommes et que même si elles sont plus nombreuses à être diplômées de l’enseignement supérieur, elles ont moins de chances de trouver des postes à responsabilité dans l’administration, dans les universités et dans les établissements scientifiques. Par contre, dans les instances dirigeantes, notamment les ministères, la parité entre les sexes est respectée. M. Šadžius ne pense pas que l’on puisse remédier aux disparités hommes/femmes par la loi ou en instaurant des quotas, mais plutôt en améliorant le fonctionnement de la démocratie. Son parti, le Parti social‑démocrate, a ainsi décidé qu’un tiers de ses représentants au moins devaient être des femmes.

36.Mme PETRIKIENĖ (Lituanie) rappelle que la Lituanie est favorable à l’élaboration d’un protocole facultatif se rapportant au Pacte.

Articles 6 à 9 du Pacte

37.M. TEXIER souhaite avoir des éclaircissements sur l’ampleur du contentieux qui existe en droit du travail. Faisant observer que les chiffres du chômage indiqués dans les deux tableaux figurant dans la réponse écrite à la question no 3 de la liste des points à traiter sont très différents, il demande quelles mesures le Gouvernement envisage de prendre pour non seulement réduire le chômage, mais aussi atténuer les différences considérables qui existent entre les régions.

38.Concernant l’article 7 du Pacte, M. Texier souhaite savoir si le salaire minimum actuel permet à tous les travailleurs et à leur famille de vivre décemment. Il demande des précisions au sujet de l’accès égal des hommes et des femmes à toutes les professions et de l’évolution des salaires des femmes par rapport à ceux des hommes. En outre, quel est l’état de la législation en matière de protection salariale de la femme enceinte? Existe‑t‑il des dispositions spécifiques dans le Code du travail interdisant toute discrimination à son égard et obligeant l’employeur à la reprendre après son congé de maternité?

39.M. Texier souhaite en savoir plus sur les limitations du droit de grève, qui semblent relativement étendues, et notamment sur la notion de service minimum. Ces restrictions sont‑elles compatibles avec l’article 8 du Pacte et les Conventions pertinentes de l’OIT? Enfin, M. Texier demande de plus amples renseignements sur le fonctionnement et les pouvoirs du Conseil tripartite, notamment s’agissant de la négociation des conventions collectives.

40.M. CEAUSU fait observer que le taux de chômage, même en baisse par rapport à 2001, est resté très élevé en 2002 − avec un niveau de 13,8  % − et constate avec inquiétude que seule une petite partie des chômeurs sont indemnisés. Il se demande si les personnes sans ressources se tournent de ce fait vers l’économie parallèle, et si le travail informel est répandu. Dans l’affirmative, il voudrait savoir si le Gouvernement lituanien tente d’y mettre un frein, sachant que les personnes employées dans ces conditions n’ont pas de protection sociale.

41.M. Ceausu demande un complément d’information au sujet des travaux d’intérêt public qui sont parfois effectués par les enfants des familles socialement vulnérables. Quel est l’âge des enfants et le type de travaux concernés? Les enfants sont‑ils engagés uniquement pendant les vacances d’été? Leur refus d’accomplir ces travaux peut‑il entraîner la suppression de certaines allocations sociales versées à leur famille par les autorités locales?

42.M. Ceausu demande aussi si le projet de loi relatif à l’inspection du travail a été adopté et voudrait avoir des détails sur le fonctionnement de l’inspection du travail dans l’État partie, notamment sur le nombre d’inspecteurs, leurs pouvoirs, leur faculté d’interdire une activité qu’ils estiment présenter un risque pour la santé des travailleurs, et sur la présence ou non de bureaux chargés de l’inspection dans chacun des districts. Il voudrait aussi savoir quelle est l’incidence des accidents du travail ‑ et notamment des accidents mortels. Enfin, il demande un complément d’information sur les dispositions légales régissant le licenciement, qui semble pouvoir intervenir sans préavis et sans justification moyennant le versement, par l’employeur, d’une indemnité de départ à la personne licenciée.

43.M. MARTYNOV voudrait connaître la raison pour laquelle l’État partie n’a pas ratifié la Convention no 2 de l’OIT sur le chômage et s’il entend le faire prochainement. Il se félicite des résultats positifs auxquels a abouti le Programme pour l’emploi 2001‑2004, mais regrette que les réponses écrites ne fournissent pas davantage d’informations sur les travailleurs agricoles, qui constituent 40 % des chômeurs. À cet égard, il se demande si les mesures prises par le Gouvernement pour lutter contre le chômage dans ce secteur d’activités sont suffisantes ou s’il conviendrait de les renforcer, et pourquoi le taux de chômage en Lituanie est une fois et demie supérieur à celui de la Lettonie et deux fois à celui de l’Estonie. En outre, que pense la délégation des conclusions de la Fédération internationale Helsinki pour les droits de l’homme selon lesquelles les programmes du Gouvernement lituanien visant à créer des emplois en 2002‑2003 n’auraient pas été mis en œuvre de manière appropriée et les fonds destinés à la création d’emplois n’auraient pas été utilisés?

44.M. Martynov voudrait savoir si le Gouvernement lituanien entend renforcer la formation professionnelle, qui selon certains sources dignes de foi, laisserait à désirer puisque près de la moitié des chômeurs n’en bénéficieraient pas. Au vu de l’augmentation de 20 % en 2003 du nombre d’accidents du travail, pourquoi le Gouvernement n’a‑t‑il pas encore ratifié la Convention n° 174 de l’OIT sur la prévention des accidents industriels majeurs et a‑t‑il l’intention de le faire prochainement?

45.M. Martinov voudrait savoir si la mise en place d’un mécanisme chargé de réévaluer régulièrement le salaire minimum mensuel est envisagée et si des mesures sont prévues pour que ce seuil minimal soit respecté à l’échelle du pays, ce qui n’est pas le cas actuellement. En effet, il semblerait que des exceptions soient permises en la matière et tendraient à être discriminatoires à l’égard de certaines catégories d’employés, en particulier − mais pas exclusivement − dans le secteur de l’agriculture.

46.M. Martynov demande si, comme le déclare la Confédération internationale des syndicats libres (CISL), les avocats des syndicats ne peuvent plus ni représenter ni défendre les personnes syndiquées dans le cadre des procédures d’appel à la Cour suprême. Est‑il vrai en outre que le Gouvernement lituanien n’a pas consulté les syndicats lors de l’élaboration de la nouvelle législation du travail? Enfin, comment se fait‑il que le nombre de chômeurs percevant des indemnités de chômage − déjà faible en 2001 avec un taux de 14 % − soit tombé à 11 % en 2002?

47.Mme BRAS GOMES demande si les quelque 140 initiatives en faveur de l’emploi prises au niveau local ont favorisé les jeunes – dont le taux de chômage est 2,5 fois supérieur à la moyenne nationale −, et notamment les jeunes en quête d’un premier emploi. S’agissant des disparités en matière d’emploi, elle voudrait savoir quelles mesures le Gouvernement lituanien envisage de prendre pour réduire les inégalités observées entre les régions et entre les sexes.

48.Pour ce qui est de la réforme du système des pensions approuvée en 2000, celle‑ci semblerait avoir pour vocation de garantir une couverture minimale à toutes les personnes âgées et handicapées. Mme Bras Gomes, faisant siennes les conclusions d’une étude menée par un groupe de chercheurs de l’Université de Vilnius, se demande s’il ne serait pas souhaitable d’accorder cette couverture minimale à l’ensemble de la population: en l’octroyant sur la base de la résidence, elle bénéficierait notamment aux travailleurs agricoles, dont la situation est particulièrement difficile. Mme Bras Gomes souhaiterait aussi savoir si le Gouvernement lituanien entend ratifier la Convention no 102 de l’OIT concernant la sécurité sociale (norme minimum), la Convention no 117 sur la politique sociale (objectifs et normes de base) et la Convention n° 118 sur l’égalité de traitement (sécurité sociale).

49.M. KOLOSOV, citant le paragraphe 258 du rapport à l’examen, demande si les travailleurs sont toujours aussi peu syndiqués et les syndicats aussi faibles économiquement et mal organisés. Est‑il fréquent que les employeurs refusent de virer au compte en banque du syndicat la partie du salaire du travailleur syndiqué correspondant à sa cotisation, comme la loi sur les syndicats les y oblige? M. Kolosov souhaite aussi savoir si les syndicats peuvent ester en justice, s’il existe une fédération nationale des syndicats − et dans l’affirmative, quelles en sont les fonctions – et s’il arrive que les travailleurs fassent grève pour des raisons autres que des revendications salariales, notamment pour protester contre de mauvaises conditions de travail ou encore des clauses discriminatoires à l’embauche. Enfin, quel rôle jouent les personnes appartenant à des minorités ethniques au sein des syndicats, et d’une manière générale, sont‑elles représentées à tous les niveaux de la société, dans les municipalités et au sein des trois pouvoirs?

50.M. MALINVERNI demande s’il est vrai que la pension de vieillesse (combinant la pension de base et la pension supplémentaire) ne représente que quelque 40 % du salaire moyen. Quel peut être le montant de la prestation versée à une femme qui s’est consacrée à sa famille et qui n’a donc jamais cotisé à l’assurance vieillesse? M. Malinverni observe ensuite que les personnes handicapées touchent des pensions très faibles et se demande s’il ne serait pas préférable de prendre des mesures visant à intégrer ces personnes dans le monde du travail lorsque leur handicap le leur permet.

51.M. ŠADŽIUS (Lituanie) dit que dans le cadre de la réforme du système des pensions, les prestations versées aux handicapés et celles octroyées au titre du système d’assurance sociale de l’État ont été largement réévaluées en date du 1er avril 2004. Il ajoute que la première étape de la réforme du système d’assurance sociale se traduit par le versement régulier et dans les délais de ces prestations, ce qui n’était pas le cas il y a à peine quatre ans. Le montant de la pension de base a lui aussi été augmenté, mais force est de constater que les salaires les plus bas, même s’ils ont été relevés de 35 %, ne permettent toujours pas au travailleur et à sa famille d’avoir un niveau de vie décent. Selon lui, c’est en luttant contre le travail informel, à savoir en incitant les travailleurs à déclarer leurs revenus et à participer aux caisses de pension capitalisées que le problème pourra être enrayé et la situation des retraites améliorée.

La séance est levée à 13 heures.

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