Nations Unies

E/C.12/2011/SR.14

Conseil économique et social

Distr. générale

31 mai 2011

Original: français

Comité des droits économiques, sociaux et culturels

Quarante -sixième session

Compte rendu analytique de la première partie (publique)* de la 14 e séance

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le mardi 10 mai 2011, à 15 heures

Président: M. Pillay

Sommaire

Examen des rapports

a)Rapports présentés par les États parties conformément aux articles 16 et 17 du Pacte (suite)

Deuxième rapport périodique du Yémen (suite)

La séance est ouverte à 15 h 5.

Examen des rapports

a) Rapports présentés par les États parties conformément aux articles 16 et 17 du Pacte (point 7 de l’ordre du jour) (suite)

Deuxième rapport périodique du Yémen ((E/C.12/YEM/2; document de base (HRI/CORE/1/Add.115); liste des points à traiter (E/C.12/YEM/Q/2); réponses écrites du Gouvernement du Yémen à la liste des points à traiter (E/C.12/YEM/Q/2/Add.1 − en anglais et en arabe seulement))

1. Sur l’invitation du Président, la délégation yéménite reprend place à la table du Comité.

Articles 13 à 15 du Pacte (suite)

2.M. Kedzia (Rapporteur pour le pays), observant que malgré les nombreux efforts faits dans le domaine de l’éducation de base, le taux de scolarisation chute, notamment dans l’enseignement primaire, demande quelles mesures l’État partie entend prendre pour enrayer ce phénomène au plus vite. De même, il invite la délégation à indiquer ce que les autorités prévoient pour élargir l’accès à Internet, non seulement en tant que moyen d’information général, mais aussi en tant qu’aide à l’éducation, au développement culturel et à la protection d’autres droits tels que le droit au travail, par l’accès qu’il procure aux informations sur les emplois.

3.M. Marchán Romero se dit préoccupé de l’absence totale d’informations sur l’article 15 du Pacte (droits culturels) dans le rapport de l’État partie, et de ce que le Gouvernement n’a pas non plus répondu à la question 44 de la liste des points à traiter, portant elle aussi sur ce sujet. Il souhaite que la délégation répare cette omission en renseignant sur ce qui est fait afin de permettre la réalisation de ce droit, et qu’elle précise comment l’État promeut l’accès à la vie culturelle. En référence aux obstacles culturels, évoqués dans le discours liminaire de la délégation, auxquels le Yémen se heurte concernant le statut de la femme, M. Marchán Romero rappelle que dans son Observation générale n° 21 (droit de chacun de participer à la vie culturelle), le Comité indique que la diversité culturelle ne peut être invoquée pour porter atteinte aux droits de l’homme garantis par le droit international, ni pour en limiter la portée . Dans ces conditions, ne peuvent être étiquetées comme culturelles que des valeurs positives et constructives, et en aucun cas des pratiques et des traditions portant atteinte à des droits. Le Comité ne peut donc que recommander à l’État partie de recourir à la culture comme à un instrument lui permettant de corriger un grand nombre d’inégalités dans divers domaines. Sachant que tous les pays ont un patrimoine culturel, qui n’est pas uniquement matériel, le Yémen pourrait par exemple expliquer en quoi consiste la diversité ethnique sur son territoire et de quels droits jouissent les différents groupes. M. Marchán Romero demande donc à l’État partie de faire figurer, dans son prochain rapport périodique, des informations sur la composition démographique du pays.

4.M. Sadi estime que les nombreux obstacles culturels dont il a été fait mention tout au long du dialogue avec la délégation de l’État partie et qui freinent l’évolution de la société pourraient être surmontés par une politique éducative appropriée.

5.M. Dasgupta note que le taux d’analphabétisme de la population demeure très élevé (45 %) et voit comme l’une des explications possibles le travail forcé des enfants: par définition, un enfant qui travaille ne peut aller à l’école. Il faudrait donc inciter les parents à scolariser leurs enfants, par exemple en mettant en place l’offre de repas gratuits à l’école. M. Dasgupta souhaite que la délégation s’exprime sur une telle suggestion.

6.M me Algaefi (Yémen) dit que les autorités mettent en place une stratégie nationale d’enregistrement gratuit des actes d’état civil qui repose à la fois sur la sensibilisation de la population et des fonctionnaires concernés et sur l’adoption de mesures particulières en collaboration avec le Ministère de l’éducation et la société civile, destinées à permettre l’enregistrement des enfants scolarisés mais non enregistrés, y compris les enfants appartenant à des minorités. Il s’agit également de coopérer avec le Ministère de la santé afin que l’enregistrement se fasse dès la naissance, en particulier dans les régions rurales, grâce à l’information des sages-femmes et des personnels des hôpitaux et des centres médicaux. Dans l’hypothèse où des sommes, mêmes symboliques, seraient réclamées pour l’inscription à l’état civil, les familles sont invitées à alerter les autorités, afin qu’elles prennent les mesures nécessaires. Concernant le mariage de mineures, les dispositions légales s’accompagnent d’une sensibilisation des jeunes filles, qui sont encouragées à aller à l’école par le Gouvernement, avec l’appui des organisations de la société civile et du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), notamment sous forme de subventions alimentaires versées à celles qui suivent un enseignement secondaire et à l’instauration de quotas pour les enseignantes en milieu rural. Des actions d’information sur les dangers des grossesses précoces et sur tout ce qui touche à l’enfance sont organisées par le Ministère des waqfs (biens religieux) et de l’orientation religieuse, en collaboration avec des imams modérés, la société étant très réceptive aux propos tenus dans le cadre religieux. Une loi concernant le «mariage touristique» a été adoptée et le Ministère de l’intérieur a donné des instructions pour interdire tout mariage avec un étranger sans l’accord de l’ambassade du pays du futur mari. Une étude est actuellement menée sur les châtiments corporels dans la sphère familiale comme dans les structures éducatives ou les établissements de prise en charge des enfants. Une autre étude a été menée sur la violence sexuelle dont sont victimes les enfants mais, ceux-ci refusant souvent de répondre, elle a porté sur des cas a posteriori: on a ainsi demandé aux étudiants des universités s’ils avaient souffert d’abus sexuels quand ils étaient plus jeunes. Suite à cette étude, les autorités, en coopération avec l’UNICEF et certains pays donateurs, ont mis en place une stratégie nationale de lutte contre la violence faite aux enfants ainsi qu’un réseau national d’organisations gouvernementales et non gouvernementales spécialisées dans la protection de l’enfance, qui s’appuie sur des structures locales et met à disposition des lignes téléphoniques gratuites, pour un meilleur contrôle et un suivi des cas. L’objectif est ici de prendre les mesures nécessaires pour favoriser la réadaptation psychologique et sociale des enfants victimes et de sanctionner les parents. Plusieurs projets de loi dans ce domaine sont en attente de ratification par le Parlement mais, grâce à la formation des juges, des sanctions ont déjà été prononcées contre des parents qui avaient imposé de graves punitions à leurs enfants.

7.Des actions de sensibilisation en la matière ont été menées avec le concours du Ministère des affaires religieuses, des mosquées et de la télévision (diffusion de programmes sur la question pendant le ramadan). Des professionnels des médias ont été formés à cette problématique avec l’appui du Conseil arabe de l’enfance et du développement, et des dessins animés ont été conçus pour inciter les enfants à dénoncer les cas de harcèlement sexuel et de violence. Les fonctionnaires de police suivent des cours de formation sur les violences faites aux enfants et la traite des enfants, et un guide à l’intention des professionnels de la santé a été élaboré sous la responsabilité du Ministère de la santé. Il existe des centres pour la prise en charge psychologique de ces enfants, et la création de centres d’accueil pour femmes battues dotés de secteurs réservés aux enfants battus est à l’examen.

8.En 2005, les tribunaux ont rendu 22 jugements dans des affaires de traite d’enfants, et six en 2008-2009. Une étude sur cette question, réalisée en collaboration avec l’UNICEF et l’Ambassade des États-Unis, a montré qu’au Yémen il ne s’agit pas de traite au sens propre − les enfants ne sont pas vendus mais envoyés dans d’autres pays, notamment en Arabie saoudite, afin de venir en aide à leur famille. Des accords ont donc été conclus avec les gouvernorats et les conseils locaux, qui ont mené des actions de sensibilisation auprès de leurs administrés sur les problèmes rencontrés par les enfants envoyés à l’étranger et diffusé des reportages télévisés comportant des témoignages d’enfants rentrés au Yémen. Un projet a été mis en place, avec l’appui du Ministère du travail des États-Unis, pour faciliter la réinsertion scolaire de ces enfants et lutter contre l’analphabétisme. Des cours de sensibilisation ont aussi été dispensés aux chauffeurs de bus et de taxi afin qu’ils signalent les enfants suspects. Pour lutter contre le phénomène, un comité technique conjoint d’échange d’informations, de suivi et de coordination a été créé avec l’Arabie saoudite qui enquête sur le sort des enfants sur son territoire, et s’efforce d’identifier les responsables, puis s’occupe de rapatrier les victimes. Depuis deux ans, le phénomène s’est considérablement réduit sous l’effet conjugué des mesures qui ont été prises et des événements qui secouent le Yémen.

9.Les mutilations génitales féminines sont pratiquées principalement dans les zones côtières. Un spécialiste, recruté avec l’aide de l’UNICEF, a été consulté en vue de l’élaboration d’une stratégie de lutte contre ces pratiques; de plus, un expert soudanais de la charia a participé à des ateliers destinés à élaborer une fatwa (avis) mais, à ce jour, le projet n’a pas encore abouti. Un guide d’information et de sensibilisation a été publié avec le concours d’un spécialiste national, membre de l’opposition, et avec l’appui de l’UNICEF. Une formation est proposée au niveau des gouvernorats par une association dont l’action est reconnue par les partis religieux.

10.La législation fixe l’âge minimum du recrutement de soldats à 18 ans mais, face aux abus et pour lutter contre la participation des enfants aux conflits armés, le Gouvernement a chargé le Ministère de la défense de diffuser des circulaires auprès de ses services, leur rappelant les règles en vigueur et les engageant à procéder à l’examen des registres de soldats. Le Ministère de l’intérieur doit de son côté examiner les registres d’engagés volontaires afin de contrôler l’âge des soldats. Par ailleurs, Human Rights Watch indique que certains groupes dissidents comptent des mineurs parmi leurs milices combattantes. Le Gouvernement va mettre en place un mécanisme transparent chargé de déterminer l’âge de ceux qui sont dépourvus de certificats de naissance.

11.Une enquête a été réalisée sur le travail des enfants. Ce travail, s’il se déroule dans le cadre de la famille (travaux des champs, commerce, notamment) et ne nuit pas à la scolarisation de l’enfant, est autorisé. S’agissant des pires formes de travail des enfants, le Gouvernement s’efforce d’y mettre un terme en coopération avec le Programme international pour l’abolition du travail des enfants, de l’Organisation internationale du Travail.

12.M. Algonayd (Yémen) dit qu’il y a encore dans le pays des maladies transmissibles − diarrhée, bronchite, tuberculose − et que les maladies chroniques sont en augmentation. Le pays connaît encore la bilharziose et le paludisme, et n’est pas épargné par le cancer, le diabète et les maladies cardiovasculaires. Les maladies transmissibles touchent la moitié des enfants de moins de cinq ans. Les autorités sanitaires doivent lutter sur plusieurs fronts: les maladies traditionnelles et les maladies modernes, auxquelles s’ajoutent les accidents de la circulation. Les priorités sont établies selon les ressources disponibles. Une stratégie a été élaborée pour débarrasser la péninsule arabique du paludisme: de 2,5 millions de cas à la fin des années 1990, on est passé à quelque 250 000 cas en 2010, selon les données de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). L’objectif poursuivi, avec l’appui de la Banque mondiale, est d’éradiquer ce fléau; il est le même pour la bilharziose, qui touche 3 millions de personnes. Des vaccins sont administrés aux enfants pour lutter contre les maladies pulmonaires aiguës, importante cause de mortalité chez les moins de cinq ans. Les chiffres que l’OMS doit annoncer prochainement devraient faire état d’une baisse de 5 % environ du taux de mortalité de cette tranche d’âge.

13.Les maladies liées à la malnutrition relèvent principalement des départements chargés des questions sociales, mais, avec l’aggravation de la crise, les interventions du Ministère de la santé se sont intensifiées. Il existe dans chaque gouvernorat ainsi que dans le quart des districts du pays des centres de traitement de la malnutrition aiguë. En 2010, le Gouvernement a distribué des denrées alimentaires à plus de 190 000 mères et enfants souffrant de malnutrition et apporté une aide provisoire à plus de 15 000 personnes. Le Programme alimentaire mondial (PAM) a fourni 11 tonnes de nourriture à cette fin. Par ailleurs, des bénévoles aident à la distribution de la pâte énergétique «Plumpy’nut», ce qui réduit sensiblement les coûts.

14.Le tabagisme est à l’origine de nombreuses maladies chroniques. La ratification, trois ans plus tôt, de la Convention-cadre de l’OMS pour la lutte antitabac a donné lieu à la promulgation d’une loi. Le mécanisme d’application de cette loi, encore faible, requiert des campagnes de sensibilisation qui ont déjà débuté à la télévision et à la radio, et la nomination de coordonnateurs chargés de veiller à l’application des dispositions en vigueur. De création récente, le Conseil médical yéménite est chargé du contrôle des erreurs médicales commises dans les centres de soins tant publics que privés. Il prend les mesures administratives et disciplinaires qui s’imposent et, au besoin, peut saisir les tribunaux. Plusieurs cas font actuellement l’objet d’enquêtes.

15.Les problèmes de famine chez les enfants, relevés par l’UNICEF, tiennent à une conjonction de facteurs. Cela étant, les chiffres à disposition sont issus d’une enquête réalisée uniquement dans trois gouvernorats très densément peuplés, et une certaine amélioration a été observée par suite de l’intervention des pouvoirs publics. Le Yémen s’est doté d’une stratégie nationale pour l’alimentation, qui s’inscrit dans une stratégie plus globale en faveur de la sécurité alimentaire. Considérée comme une priorité nationale, l’alimentation est l’axe retenu pour la coopération avec l’UNICEF, et elle sera l’objet de nombreux projets menés en collaboration avec divers organismes internationaux et donateurs.

16.M. Alabbasi (Yémen) indique que la Stratégie nationale pour l’enseignement primaire et secondaire et la Stratégie pour l’émancipation des jeunes filles, mises en œuvre en collaboration avec la Banque mondiale et le Gouvernement britannique, visent à améliorer le taux de scolarisation au Yémen et à résoudre les nombreux problèmes évoqués dans le rapport à l’examen. La cinquième révision annuelle du plan d’exécution de ces stratégies a été récemment menée avec les pays donateurs.

17.Avec environ 3 millions d’enfants non scolarisés, le pays n’est pas en bonne voie pour réaliser les objectifs du Millénaire pour le développement (OMD). Il a présenté un rapport à l’occasion de la Réunion plénière de haut niveau de l’Assemblée générale sur les objectifs du Millénaire pour le développement tenue à New York en septembre 2010, lors de laquelle il a été retenu pour faire partie d’un groupe de pays devant faire l’objet d’un suivi aux fins de la réalisation des OMD. Le Yémen a le potentiel voulu pour généraliser l’accès à l’enseignement primaire et secondaire d’ici à 2015, mais les contraintes budgétaires ne lui permettent pas d’allouer des ressources supplémentaires à l’éducation, qui représente 18 à 20 % des dépenses budgétaires. Toutefois, plus de 1 000 écoles sont construites chaque année (soit plus de trois par jour).

18.Des programmes de fourniture de repas gratuits dans les écoles sont mis en place avec l’aide du Programme alimentaire mondial (PAM) pour inciter les familles à scolariser leurs filles et pour réduire ainsi le taux d’abandon scolaire des filles, qui reste l’un des plus élevés au monde pour ce qui est des zones rurales, notamment en raison du poids de la tradition. Le Gouvernement demeure tributaire de l’aide internationale en dépit des efforts qu’il déploie pour parvenir à un taux de scolarisation satisfaisant.

19.M me Algaefi (Yémen) fait savoir que les jeunes filles mariées de force qui entament une procédure de divorce, ou qui ont déjà divorcé mais ne perçoivent pas encore toutes les prestations auxquelles elles ont droit, bénéficient d’une aide judiciaire et de services gratuits de réinsertion sociale et de santé. Les organisations de la société civile participent aux initiatives menées dans ce cadre.

20.Déplorant le décès d’enfants lors des manifestations précédemment évoquées, Mme Algaefi annonce que les autorités yéménites ont convoqué tous les partis politiques et ont obtenu que la majorité d’entre eux renoncent à utiliser des enfants dans les conflits politiques ou armés. Des psychologues ont aussi été consultés pour évaluer les risques liés à la participation d’enfants à de tels conflits et divers séminaires ont été mis sur pied. Par ailleurs, l’organisation non gouvernementale (ONG) Save the Children a diffusé des brochures pour sensibiliser l’opinion.

21.M me Shin convient qu’il est regrettable que le Comité compte seulement trois femmes, mais rappelle que les 18 membres qui le composent sont désignés par le Conseil économique et social parmi les candidats proposés par les États parties au Pacte (dont le Yémen), auxquels il appartient donc de faire un effort en faveur d’une meilleure représentation des femmes. Estimant que l’État partie ne peut se contenter d’évoquer le poids des traditions et des coutumes pour expliquer le taux de scolarisation des filles, elle invite le Gouvernement yéménite à faire preuve d’une véritable volonté politique en prenant les initiatives qui s’imposent pour faire évoluer les comportements.

22.M me Barahona Riera exprime le souhait qu’un jour les femmes soient mieux représentées non seulement au Comité, mais aussi aux postes clés de l’État partie. Elle demande si les programmes relatifs à la santé en matière de sexualité et de procréation ont permis de collecter des données statistiques, et s’enquiert des services offerts (éducation sexuelle, contraception et autres) et des bénéficiaires.

23.M. Marchán Romero constate qu’il n’a reçu aucune réponse quant à la mise en œuvre des droits culturels consacrés par le Pacte et, réaffirmant que le rapport de l’État partie ne contient aucune indication à ce sujet, souhaite qu’il y soit remédié dans le prochain rapport. Il demande si, dans l’État partie, on a conscience de l’importance des droits culturels.

24.M. Al-Rassas (Yémen) déclare que les autorités yéménites accordent une grande importance aux droits culturels, mais que toutes les questions évoquées sont liées aux traditions et aux coutumes, qui évoluent lentement et sont difficiles à changer. Le Gouvernement yéménite concentre ses efforts sur l’éducation; ainsi, les programmes scolaires traitent de sujets tels que la santé des filles et des femmes et leur rôle dans la société, l’utilisation rationnelle de l’eau, les droits de l’enfant, les effets néfastes du qât, la violence familiale et la nécessité de renoncer à la logique de vengeance imposée par la tradition. Des activités de sensibilisation sont également menées à l’occasion de conférences religieuses ou de la prière du vendredi. De plus, le Gouvernement a créé des bibliothèques dans certains gouvernorats, installé Internet dans certaines écoles et organisé des festivals et des concours de poésie.

25.M me Algaefi se félicite de l’intérêt porté à la condition de la femme au Yémen. Elle indique que, grâce à la volonté politique du Gouvernement, convaincu qu’il ne peut y avoir de progrès sans éducation, les initiatives importantes menées dans le pays en vue d’augmenter la scolarisation des filles ont permis de faire reculer le taux d’abandon scolaire.

26.Concernant la santé génésique, le Ministère de la santé et le Département de la santé génésique agissent en étroite collaboration notamment dans les domaines de la santé néonatale et prénatale, et le Département de la santé génésique bénéficie du soutien considérable du Fonds des Nations Unies pour la population et de l’ambassade des Pays-Bas. S’agissant de la planification familiale, les centres de consultation ouverts dans différents gouvernorats assurent une prise en charge gratuite de la grossesse. Des programmes ont été mis en œuvre et le personnel a été formé dans les domaines de l’obstétrique et de la prise en charge des nouveau-nés et des femmes pendant la grossesse et l’accouchement. En raison du nombre plus élevé de décès en couches dans les zones rurales − dû aux difficultés qu’ont les femmes vivant dans des zones reculées pour accéder aux centres de santé −, des sages-femmes dûment formées se rendent à domicile pour aider les femmes pendant l’accouchement et pour prendre en charge les bébés à la naissance, notamment en fournissant du matériel et en diffusant des informations.

27.Mme Algaefi se félicite du soutien des donateurs et signale la création d’ONG dont l’action vise les sages-femmes, auxquelles une journée nationale a également été consacrée. Évoquant les activités de l’Alliance du ruban blanc pour une maternité à moindre risque et la participation de nombreux organes gouvernementaux − ministères de la formation, des affaires sociales, de l’administration locale et de l’éducation; Conseil pour la mère et l’enfant; Comité national pour la femme −, elle insiste sur l’importance d’une diffusion élargie d’informations sur la grossesse à moindre risque.

28.M. Al-Rassas signale l’existence d’un comité de la culture chargé du suivi des activités liées au cinéma et au théâtre, de la diffusion d’ouvrages et de la publication de livres à bas prix, ainsi que d’un organe chargé des publications. Il précise que le Yémen fera état dans son prochain rapport de renseignements se rapportant à la culture, et que l’absence de réponse à toutes les questions peut être imputée à leur connotation religieuse. Prenant l’exemple de la polygamie, il indique qu’il s’agit d’une question religieuse difficile à évoquer au sein d’une société aussi conservatrice que la société yéménite. La sensibilisation de la population est le seul moyen de traiter cette question: la promulgation d’une loi interdisant la polygamie serait contraire à la charia et toute intervention sur la question susciterait le courroux des islamistes. Il précise que, si elle était courante dans les années 1970, la polygamie n’existe aujourd’hui que dans une moindre mesure et est, selon lui, vouée à disparaître.

29.M. Al-Rassas indique que la lapidation n’est pas appliquée dans la pratique, la charia exigeant soit que quatre personnes aient été témoins de l’acte en cause − ce qui est impossible dans la plupart des cas −, soit que les couples avouent leur faute. La flagellation, qui n’est pratiquée que dans certains cas mineurs, est souvent remplacée par un emprisonnement de dix à quinze jours. Quant à l’amputation, qui sanctionne le vol conformément à la charia, elle n’est pas appliquée dans la pratique au Yémen. En ce qui concerne la question religieuse du divorce demandé par les femmes, M. Al-Rassas indique que, dans certains gouvernorats, la femme peut demander le divorce, conformément à la charia, pratique que le Gouvernement souhaiterait voir appliquée dans l’ensemble du pays.

30.M me Shin demande que le nombre de femmes au sein de la délégation yéménite soit plus élevé lors du prochain dialogue avec le Comité.

31.M. Al-Rassas souligne que, malgré la pauvreté, la pénurie de ressources, l’analphabétisme rampant, des spécificités géographiques difficiles et la dispersion de la population sur le territoire, le Gouvernement s’efforce de s’acquitter de ses obligations et se dirige lentement, mais sûrement, vers une amélioration du respect de tous les droits de l’homme. En raison du nombre élevé de réfugiés étrangers et de personnes déplacées à l’intérieur du pays, le Yémen fait face à des contraintes imprévues qui grèvent lourdement son budget, auxquelles s’ajoutent les dépenses liées à la lutte contre le fléau de longue date que représente le qât; le pays a besoin de temps pour faire face à tous ces problèmes. Partisan du changement et du progrès, le Gouvernement accorde une attention particulière aux élections et à la nécessité de ne pas recourir à la violence et aux armes, et il compte associer la société civile et les ONG à la rédaction du prochain rapport.

32. La délégation yéménite se retire.

La première partie (publique) de la séance prend fin à 16 h 45.