NATIONS UNIES

E

Conseil économique et social

Distr.GÉNÉRALE

E/C.12/2006/SR.4212 janvier 2007

Original: FRANÇAIS

COMITÉ DES DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS

Trente‑septième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 42e SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genève,le lundi 13 novembre 2006, à 15 heures

Présidente: Mme BONOAN-DANDAN

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS

a)RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT AUX ARTICLES 16 ET 17 DU PACTE ( suite)

Rapport initial de l’ex-République yougoslave de Macédoine

La séance est ouverte à 15 h 5.

EXAMEN DES RAPPORTS

a)RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT AUX ARTICLES 16 ET 17 DU PACTE (point 6 de l’ordre du jour) (suite)

Rapport initial de l’ex‑République yougoslave de Macédoine (E/C.12/MKD/1; document de base (HRI/CORE/MKD/2006); liste des points à traiter (E/C.12/MKD/Q/1); réponses écrites du Gouvernement de l’ex-République yougoslave de Macédoine à la liste des points à traiter (E/C.12/MKD/Q/1/Add.1))

1. Sur l’invitation de la Présidente, la délégation de l’ex-République yougoslave de Macédoine prend place à la table du Comité.

2.La PRÉSIDENTE souhaite la bienvenue à la délégation de l’ex-République yougoslave de Macédoine et l’invite à présenter le rapport initial de l’État partie.

3.M. MESKOV (ex‑République yougoslave de Macédoine), rappelant que l’État partie a adhéré au Pacte par succession de l’ex‑République fédérative socialiste de Yougoslavie le 17 novembre 1991 et qu’il a présenté son rapport initial en juillet 2005, dit que ce document, qui couvre une période d’une longueur inhabituelle au regard des normes du Comité, expose les progrès accomplis dans un certain nombre de domaines tels que l’éducation, la santé, la participation à la vie politique et le secteur non gouvernemental. Il reste encore beaucoup à accomplir, en particulier en ce qui concerne l’emploi, les droits sociaux, la santé et la condition féminine, pour appliquer toutes les dispositions du Pacte. C’est pourquoi le dialogue avec le Comité, qui devrait permettre de dégager clairement l’orientation à donner aux activités futures afin d’améliorer la situation générale, revêt une importance particulière pour le Gouvernement. Le retard avec lequel l’État partie présente son rapport initial au titre du Pacte tient à plusieurs raisons, dont les principales sont un cadre juridique encore incohérent et parfois lacunaire dû à la période de transition que traverse le pays et au réexamen approfondi des droits économiques, sociaux et culturels, le grand nombre de rapports initiaux qui doivent être présentés au titre de différents instruments internationaux et les réformes et défis d’envergure qui ont marqué la période considérée, en particulier depuis 2001.

4.L’État partie progresse de manière continue dans l’établissement d’une société démocratique. La reconnaissance de l’universalité des droits de l’homme, pierre angulaire de son système juridique, s’exprime sur le plan législatif comme sur le plan institutionnel. Ayant hérité en 1991 d’une situation où les droits de l’homme étaient relativement bien respectés, l’État partie a fait un grand pas en avant sur les plans formel et légal, en s’appuyant sur les normes internationales en la matière, pour que les différentes catégories de bénéficiaires de ces droits soient placées sur un pied d’égalité. Malheureusement, du fait de la grande faiblesse de l’économie et du degré de pauvreté, encore très élevé, cette évolution ne s’est pas encore véritablement traduite dans les faits. Il est donc nécessaire d’établir un cadre institutionnel qui permettra d’assurer le suivi opérationnel des lois et règlements adoptés. La priorité dans ce domaine a été accordée à l’harmonisation du droit du travail avec les acquis de l’Union européenne, en particulier la Directive sur le principe de l’égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne l’accès à l’emploi, à la formation et à la promotion professionnelles, et les conditions de travail, ainsi que la Directive relative à la charge de la preuve dans les cas de discrimination fondée sur le sexe.

5.L’État partie, qui prépare activement son adhésion à l’Union européenne, aligne ses institutions et sa législation sur les normes européennes, en accordant une attention particulière aux questions relatives aux droits de l’homme et aux libertés fondamentales ainsi qu’à l’égalité des chances entre tous les citoyens. Conscient que la véritable démocratisation du pays exige la jouissance complète et effective des droits économiques, sociaux et culturels, qui nécessite elle‑même un certain degré de développement économique, il est déterminé à poursuivre ses efforts dans ce domaine.

6.Soucieux de combattre le chômage, le Gouvernement a élaboré pour la période 2006-2010 une stratégie nationale pour l’emploi qui intègre les dimensions macroéconomique et microéconomique, aborde la question de la sécurité sociale et de la protection sociale et inclut les politiques pour l’emploi de la Stratégie de Lisbonne révisée et les Lignes directrices intégrées pour la croissance et l’emploi de l’Union européenne. Mise en œuvre grâce au Plan d’action national pour l’emploi 2006‑2008 et à d’autres documents opérationnels, en étroite collaboration avec les partenaires sociaux, elle aura pour objectif de promouvoir le plein emploi, la qualité et la productivité sur le lieu de travail ainsi que la cohésion sociale. Le Plan d’action national pour l’emploi prévoit également les fonds nécessaires et les modifications législatives qui devront être apportées. La Stratégie nationale et le Plan d’action national ont été élaborés dans le cadre d’un partenariat élargi entre les ministères chargés de mettre en œuvre la politique économique et la politique de l’emploi (finance, économie, éducation et sciences, agriculture, eaux et forêts, collectivités autonomes locales), avec la participation de l’Agence nationale pour l’emploi, du Bureau national de statistique, de l’Association des unités de gouvernement autonomes locales et des partenaires sociaux. Ils s’appuient également sur les données et analyses fournies par des experts locaux et nationaux ainsi que des experts du Projet CARDS (Assistance communautaire concernant la reconstruction, le développement et la stabilité) de la Commission européenne intitulé «Politique de l’emploi II». Les fonds alloués par l’État partie à la mise en œuvre de ces deux documents seront complétés par l’Union européenne et des donateurs bilatéraux. Le programme pour 2007, assorti d’un budget estimatif, définit le type de mesures à prendre pour différents groupes cibles et désigne les différentes instances chargées de les mettre en œuvre. Plusieurs projets pilotes qui bénéficient du soutien financier du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) donnent déjà des résultats positifs.

7.La protection des travailleurs, considérée par la législation nationale comme faisant partie intégrante de l’organisation du travail, est garantie à tous les salariés, quelles que soient la nature et la difficulté des tâches qu’ils ont à accomplir. Pour les employés des secteurs industriel et administratif, la loi sur la protection au travail énonce plusieurs obligations qui touchent à l’organisation, la planification et la réglementation de la protection sur le lieu de travail, à la formation professionnelle et à l’acquisition de compétences permettant de travailler de manière indépendante et en toute sécurité, à la vérification des outils de travail, à la surveillance des agents biologiques, chimiques ou physiques nocifs et aux examens médicaux (initial et périodiques) que doivent subir les employés qui travaillent dans des conditions particulières. Le Ministère du travail et de la politique sociale compte élaborer et adopter plusieurs règlements visant à mettre en œuvre les directives européennes dans ce domaine.

8.Depuis l’élargissement de l’Union européenne du 1er mai 2004, les Roms constituent le groupe minoritaire le plus pauvre d’Europe et celui dont la croissance démographique est la plus rapide. Leur nombre total serait de 7 à 13 millions, soit environ 2 % de la population de l’Union européenne élargie. Environ 6 millions de Roms vivent en Europe centrale et orientale et presque 5 millions dans les nouveaux États membres de l’Union européenne. Le défi que constitue le développement économique et social des Roms demeure l’une des questions importantes inscrites à l’ordre du jour des pays d’Europe centrale et orientale et des autres pays de l’Union. Le problème des Roms est essentiellement lié à la pauvreté, elle‑même due au faible niveau d’éducation, à l’absence de logement adéquat, au mauvais état de santé, au taux de chômage élevé, le tout créant un cercle vicieux de pauvreté et d’exclusion. L’État partie compte parmi les pays qui se sont montrés résolus à promouvoir la protection des droits des Roms. Il ne s’agit pas seulement d’un devoir moral, mais aussi d’une obligation inscrite dans la loi. Dans le cadre de la Décennie pour l’intégration des Roms, le groupe de travail national composé de représentants des ministères ainsi que des organes roms compétents a élaboré quatre plans d’action nationaux dans les domaines de l’emploi, de l’éducation, de la santé et du logement articulés autour de trois thèmes principaux (pauvreté, discrimination et égalité entre hommes et femmes), qui ont été adoptés le 31 janvier 2005. l’État partie, seul pays participant à la Décennie à avoir élaboré et adopté des plans opérationnels en vue d’une mise en œuvre plus rapide et efficace des plans nationaux, a été proclamé chef de file de la Décennie par la Banque mondiale et l’Open Society Institute. En 2004, une stratégie pour les Roms a été établie. Étant donné que la Stratégie et la Décennie visent principalement l’intégration des Roms dans la société nationale et le renforcement de la communauté rom, il faut que les objectifs et activités qui y sont rattachés soient harmonisés avec la politique générale de réforme de l’État. Compte tenu de la situation actuelle des Roms, il est en outre nécessaire d’adopter des mesures spéciales afin de garantir aux membres de cette communauté l’égalité des chances dans tous les domaines. Les principaux indicateurs à long terme qui permettront d’évaluer le succès de la Stratégie et de la Décennie seront l’amélioration de la qualité de vie des Roms et leur participation accrue à la vie sociale du pays.

9.Soucieux de poursuivre sa coopération fructueuse avec les organismes des Nations Unies, en particulier ceux qui sont représentés dans le pays, le Gouvernement de l’État partie espère que le dialogue avec le Comité permettra d’apporter des réponses complètes et pertinentes aux membres.

Articles 1 à 5 du Pacte

10.M. RIEDEL, se référant à la réponse écrite du Gouvernement de l’ex-République yougoslave de Macédoine à la question no 4 de la liste des points à traiter, demande pourquoi le Médiateur pour les droits de l’homme n’a pas demandé l’accréditation du Comité international de coordination des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme. Il souhaiterait également savoir si toutes ses recommandations ont été suivies d’effet. Notant que l’organisme interministériel chargé de la protection des droits de l’homme vient d’adopter un programme d’action distinct, M. Riedel demande comment ses activités seront coordonnées avec celles du Médiateur et si les Principes de Paris seront respectés. Enfin, félicitant l’État partie pour sa participation au Groupe de travail sur l’élaboration d’un protocole facultatif se rapportant au Pacte, il demande si la position exprimée lors des travaux demeure la position officielle du gouvernement actuel.

11.M. ATANGANA fait observer que l’indépendance du système judiciaire, inscrite dans la Constitution, n’est pas assurée dans la pratique puisque la nomination des juges, par exemple, est parfois fondée sur des considérations politiques.

12.Mme GHOSE demande si tous les Roms peuvent obtenir la nationalité macédonienne et si le Plan d’action national lancé en 2004 a déjà eu des effets sur les droits économiques, sociaux et culturels des membres de cette communauté. Elle souhaiterait par ailleurs des renseignements plus précis sur le statut des Albanais, des Kosovars, des Ashkali et des Égyptiens dans l’État partie.

13.M. MALINVERNI, notant l’activité soutenue du Bureau du Médiateur pour les droits de l’homme et le fait que celui-ci est compétent pour connaître d’affaires liées aux droits économiques, sociaux et culturels, demande pourquoi, selon la réponse écrite du Gouvernement de l’ex-République yougoslave de Macédoine à la question no 1 de la liste des points à traiter, «il n’a été enregistré aucune décision de justice dans laquelle les dispositions du Pacte aient été appliquées directement dans des cas individuels».

14.M. Malinverni note avec satisfaction que l’article 9 de la Constitution consacre le principe de la non‑discrimination et que le nombre de parlementaires d’origine ethnique a augmenté entre 1998 et 2002. Il souhaite savoir ce qu’il en est de la situation en 2006. Constatant qu’il existe des quotas pour les femmes au Parlement, M. Malinverni demande si l’État partie envisage d’en introduire également pour les communautés ethniques. Citant des sources selon lesquelles les Roms et les Albanais auraient des difficultés à obtenir des papiers d’identité, il voudrait savoir pourquoi ces personnes ont plus de mal que les autres à exercer leurs droits. Il évoque enfin certaines informations selon lesquelles le Gouvernement serait peu enclin à reconnaître le statut de réfugié aux Kosovars qui ont fui le conflit dans leur pays.

15.M. SADI demande des renseignements sur la participation des organisations non gouvernementales (ONG) à l’élaboration du rapport à l’examen et souhaite savoir si l’État partie fait une distinction entre les nationaux et les étrangers pour ce qui est de l’exercice des droits économiques, sociaux et culturels.

16.Mme BARAHONA RIERA demande quel organisme est chargé de mettre en œuvre la politique de promotion de l’égalité entre hommes et femmes et quelles sont les ressources humaines et financières dont il dispose à cet effet. Elle souhaite savoir si l’ex‑République yougoslave de Macédoine a adopté une loi pour l’égalité des chances entre hommes et femmes ainsi qu’une loi érigeant en infraction le harcèlement sexuel sur le lieu de travail. Elle voudrait enfin en savoir plus sur la situation des femmes rurales qui, selon certaines sources, sont très défavorisées.

La séance est suspendue à 15 h 55; elle est reprise à 16 h 5.

17.M. TODOROV (ex‑République yougoslave de Macédoine) ne peut fournir aucune information sur le Bureau du Médiateur pour les droits de l’homme, qui bénéficie d’une indépendance totale et n’est pas tenu de rendre compte au Gouvernement. Le Médiateur pour les droits de l’homme publie en revanche des rapports annuels, dont sont tirées les statistiques concernant les violations des droits économiques, sociaux et culturels qui figurent dans les réponses écrites du Gouvernement. La délégation ne dispose d’aucune information sur les activités de l’organisme interministériel chargé de la protection des droits de l’homme, qui n’a été créé qu’en mars 2006. Cet organisme devrait élaborer des rapports périodiques sur les droits de l’homme dans le pays, rapports qui seront traduits et soumis au Comité si nécessaire.

18.M. Todorov reconnaît que, par le passé, certains magistrats ont été nommés sur la base de critères purement politiques mais dit que la situation va radicalement changer avec la réforme de l’appareil judiciaire engagée en décembre 2005. Un organe indépendant sera notamment chargé de la nomination des magistrats. Par ailleurs, il confirme que son pays est favorable à l’adoption d’un protocole facultatif au Pacte et appuie sans réserve les travaux du Groupe de travail créé à cet effet.

19.Mme KAMBERI (ex‑République yougoslave de Macédoine) dit que son pays est l’un des rares d’Europe où la communauté rom est officiellement reconnue et exerce les mêmes droits que les autres communautés ethniques. Soucieux d’améliorer les conditions de vie des Roms, l’État partie a adopté dès le lancement de la Décennie 2005‑2015 pour l’intégration des Roms quatre plans d’action dans les domaines de l’emploi, de l’éducation, du logement et de la santé. Ces plans d’action ont été systématiquement soumis aux organisations non gouvernementales roms afin qu’elles puissent faire part de leurs observations.

20.Mme Kamberi dit que la communauté des Roms en Macédoine se divise en Ashkali et en Égyptiens. Les premiers parlent albanais et les seconds rom, mais ni les uns ni les autres ne veulent être reconnus comme Roms. Ils s’opposent par exemple à ce que leurs enfants bénéficient des bourses d’études pour l’enseignement secondaire réservées aux élèves roms.

21.Contrairement à d’autres pays dans lesquels l’octroi de la nationalité aux membres de la communauté rom pose un réel problème, l’État partie ne déplore qu’un millier de personnes qui, pour des raisons pratiques, n’ont pas encore pu obtenir la nationalité macédonienne. Il s’agit généralement de personnes nées dans des pays autres que l’ex-Yougoslavie et qui ne sont pas en mesure de produire un acte de naissance ou encore de personnes issues de familles particulièrement pauvres, nées au domicile familial et non à l’hôpital et qui n’ont de ce fait jamais été déclarées à l’état civil. Les Roms demandeurs d’asile originaires du Kosovo ne se voient pas accorder le statut de réfugié mais celui de personne assistée à titre humanitaire.

22.Mme Kamberi rejette les allégations selon lesquelles les Albanais auraient des difficultés à exercer leurs droits et à obtenir des papiers d’identité.

23.Mme Kamberi convient que les auteurs du rapport initial n’ont pas directement consulté les ONG − particulièrement actives dans le pays − lors de son élaboration mais qu’ils ont tenu compte des informations présentées dans les divers rapports publiés par certaines d’entre elles ainsi que des statistiques pertinentes qui y figurent. Elle ajoute que le Gouvernement est conscient de la nécessité d’associer à l’avenir les ONG à l’élaboration des rapports périodiques.

24.À titre de complément d’information sur les droits et les libertés dont il est question aux paragraphes 98 à 106 du rapport à l’examen, Mme Kamberi précise qu’ils sont les mêmes pour les «individus» et les «citoyens», sauf en ce qui concerne le droit au travail, à l’assurance sociale et à la santé.

25.M. TODOROV (ex‑République yougoslave de Macédoine) dit que la délégation fournira ultérieurement des renseignements détaillés sur la représentation des minorités ethniques dans les organes de l’État.

26.M. MESKOV (ex‑République yougoslave de Macédoine) dit qu’à l’issue des élections législatives de juillet 2006, sur les 120 députés, le Parlement comptait 29 Albanais, 2 Roms, 2 Turcs, 1 Serbe, 1 Bosniaque et 1 Vlach. Des partis politiques ont proposé d’établir un système de quotas pour les minorités ethniques au Parlement, mais le Gouvernement n’envisage à ce stade aucun système de ce type puisque le Parlement compte déjà des représentants de minorités ethniques.

27.M. AVRAMOVSKI (ex‑République yougoslave de Macédoine) dit qu’en 1999, avec la guerre au Kosovo, son pays a reçu des milliers de réfugiés kosovars qui ont été hébergés dans des centres d’accueil et ont bénéficié de soins médicaux et d’une aide sociale pendant les deux premières années de leur séjour. Ceux qui ont obtenu le statut de réfugié ont le droit de travailler comme tous les autres étrangers en situation régulière.

28.Par ailleurs, le fait que les tribunaux n’ont rendu aucune décision sur des affaires de violation des droits économiques, sociaux et culturels ne signifie aucunement que ces droits ne sont pas garantis par la Constitution ni protégés par l’État.

29.Mme GROZDANOVA (ex‑République yougoslave de Macédoine) dit qu’il a été décidé d’instaurer des quotas permettant une meilleure représentation des femmes au sein du Parlement et des organes décisionnels, à la suite de quoi 21 d’entre elles ont été élues députées lors des élections parlementaires de 2002, contre seulement 9 en 1998. Trois femmes ont en outre été élues maires à la suite de la modification de la loi régissant les élections locales.

30.Mme Grozdanova dit que la loi sur l’égalité des chances entre les hommes et les femmes adoptée en mai 2006 vise à promouvoir l’égalité entre les sexes dans le domaine économique, social et de l’emploi. Dans ce dernier domaine précisément, la loi sur les relations professionnelles interdit la discrimination fondée sur le sexe et punit le harcèlement sexuel sur le lieu de travail.

31.Une personne qui estime que ses droits ont été lésés peut saisir les organes compétents au sein du Ministère du travail et de la politique sociale, qui lance une procédure d’enquête, ou encore le Médiateur pour les droits de l’homme, chargé de recueillir les plaintes. Des cours de formation sont en outre dispensés à toutes les personnes chargées de garantir le respect de l’application de la loi, dont les parlementaires et les membres des gouvernements locaux, ainsi qu’aux journalistes.

32.Mme Grozdanova reconnaît qu’il reste beaucoup à faire pour donner aux femmes rurales les moyens d’intégrer le marché de l’emploi et de participer davantage à la vie économique du pays, notamment en créant leur propre entreprise. Quant à la participation des femmes roms à la vie politique, il faut savoir que l’État partie a été le premier pays à élire une femme rom conseillère municipale et une autre députée.

33.En 2004, le Code pénal a été modifié afin d’ériger en infraction la discrimination à l’égard des personnes handicapées et la loi sur la famille a été révisée afin de punir la violence conjugale et le détournement de mineurs. Une vaste campagne a également été lancée pour sensibiliser la population au problème de la violence au sein de la famille et le Ministère de l’intérieur a mis en place et finance une ligne téléphonique spéciale qui répond aux appels des personnes qui en sont victimes. Sept centres ont également été créés pour accueillir ces personnes lorsque la violence qu’elles subissent les oblige à quitter le domicile familial.

34.M. SADI se demande si le fait que le Pacte ne soit pas directement invoqué devant les tribunaux s’explique par une méconnaissance de cet instrument de la part des juges, et pourquoi l’on parle de parlementaires turcs ou roms et non pas macédoniens.

35.M. PILLAY voudrait savoir si l’État partie envisage d’élaborer une loi‑cadre sur la non‑discrimination et quels sont les problèmes de langue qui, d’après un rapport du Conseil de l’Europe, entravent l’accès à la justice, se demandant si les membres des minorités ethniques rencontrent de tels problèmes lorsqu’ils mènent une action en justice.

36.Mme GHOSE souhaiterait savoir quelles démarches le millier de Roms qui n’ont pas encore obtenu la nationalité macédonienne doivent effectuer pour régulariser leur situation et s’il est possible dans l’État partie de fonder un parti politique sur la base de l’appartenance à une communauté ethnique, et dans l’affirmative, si un tel parti existe dans l’ex‑République yougoslave de Macédoine. Elle voudrait en outre avoir des précisions sur les réfugiés du Kosovo.

37.M. ATANGANA demande quelles sont les fonctions exactes du Bureau du Procureur général, qui semblent empiéter sur celles des juges.

38.M. TODOROV (ex‑République yougoslave de Macédoine) dit qu’il est fort probable que l’absence de jurisprudence concernant l’application des dispositions du Pacte soit due au fait que les juges et les magistrats n’en connaissent pas suffisamment la teneur, compte tenu que la législation nationale les autorise à se fonder directement sur les dispositions des instruments internationaux pour étayer leurs décisions.

39.Le Code de procédure civile, le Code de procédure administrative et le Code de procédure pénale disposent que les personnes qui entament une action en justice peuvent soumettre leur plainte et toute documentation écrite dans leur langue maternelle. En outre, celles qui appartiennent à une communauté qui constitue plus de 20 % de la population totale sont habilitées à utiliser leur langue maternelle devant les tribunaux, qui a dans ce cas le statut de langue officielle.

40.M. Todorov indique ensuite que le Gouvernement n’envisage pas pour l’instant de présenter une loi‑cadre sur la non‑discrimination.

41.Répondant à M. Atangana, M. Todorov indique qu’en application des dispositions actuelles de la loi, le Procureur général est nommé par le Gouvernement, et représente l’un des organes de l’État. La situation va changer à cet égard, puisqu’un projet de loi a été mis au point par le Ministère de la justice, et un système de Bureau du Procureur général indépendant, devenu simple partie au procès et non plus représentant de l’État, va être mis en place.

42.Mme KAMBERI (ex‑République yougoslave de Macédoine) fait part du nombre de réfugiés du Kosovo présents dans le pays (1928), dont 1 914 logeant en logement privé et 14 en foyer, chiffres communiqués par le Haut‑Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR). Elle précise que l’intégration des réfugiés roms, ashkali et égyptiens (RAE) se fait en tenant compte des droits à la protection sociale, à la santé, à l’accès au marché du travail, et à l’éducation. Une loi régit la protection des demandeurs d’asile, qui suit les directives de juillet 2003 du Conseil de l’Europe. Les réfugiés du Kosovo disposent de droits différents selon qu’ils sont demandeurs d’asile (droit de rester dans le pays, assurance maladie, droit de travailler sur place exclusivement), qu’ils ont le statut de réfugié (droit de séjourner dans le pays, d’y travailler, de percevoir certaines allocations, droit à la protection sociale et médicale) ou qu’ils bénéficient de la protection humanitaire (droit de rester dans le pays, assurance santé, droit à certaines allocations).

43.En ce qui concerne la citoyenneté des Roms, Mme Kamberi indique qu’un millier de Roms n’ont pas la nationalité macédonienne pour des raisons d’ordre technique. Leurs cas sont examinés actuellement, et ils devraient obtenir les documents nécessaires à l’obtention de la citoyenneté. Tous ceux qui sont en attente desdits documents (que le HCR s’occupe d’obtenir) peuvent demeurer dans le pays. Un véritable réseau d’ONG roms a déjà aidé 500 Roms environ à obtenir la nationalité macédonienne.

44.M. TODOROV (ex‑République yougoslave de Macédoine) confirme que les différents groupes ethniques sont présents à l’échelle des partis politiques, et ce depuis le début de l’indépendance du pays, en 1990‑1991. La réalité du pays est le pluralisme: les Albanais par exemple disposent de trois grands partis politiques, dont un au Gouvernement, les Turcs de deux, dont un membre de la coalition gouvernementale, les Roms de six, dont cinq d’opposition.

Articles 6 à 9 du Pacte

45.Mme ALEKSOSKA (ex‑République yougoslave de Macédoine) dit que la loi sur les relations professionnelles interdit toute discrimination dans le travail, comporte des dispositions assouplissant le marché du travail et réglemente la représentation des syndicats et la représentation des employeurs, dans une optique de dialogue social en tant que moyen pour favoriser le processus démocratique. Les partenaires sociaux ont été associés à la rédaction du texte de loi.

46.En 2005 et 2006, des amendements ont été apportés aux lois relatives à l’emploi et à l’assurance chômage, visant à réduire le chômage – l’un des objectifs prioritaires du Gouvernement. Certains indicateurs font apparaître une évolution favorable du marché du travail, avec une baisse du taux de chômage et une augmentation des taux d’emploi.

47.M. SAKIRI (ex‑République yougoslave de Macédoine) indique qu’un projet de loi sur la sécurité et la protection de la santé dans l’emploi, conforme aux directives de l’Union européenne, est actuellement en cours de rédaction; il prévoit notamment l’obligation pour l’employeur de désigner un responsable de la sécurité dans l’entreprise, et l’obligation d’informer les employés sur la réglementation en vigueur en matière de sécurité. Conformément à la Convention no 155 de l’Organisation internationale du Travail (OIT) sur la sécurité et la santé des travailleurs, le texte de loi en question devrait énoncer l’obligation faite au Gouvernement d’adopter un programme national dans ce domaine.

48.Mme BRAS GOMES demande à la délégation d’étayer par des statistiques récentes la diminution du taux de chômage depuis 2003 (alors de 36,7 %), et de donner des exemples d’indicateurs à long terme attestant la réussite des modalités adoptées pour accélérer la mise en œuvre du Plan d’action national pour l’emploi, en particulier pour les Roms et pour les femmes. Elle s’étonne par ailleurs qu’aucun cas de harcèlement sexuel au travail n’ait été signalé dans le pays, et demande des explications à ce sujet. Elle souhaite aussi connaître les mesures envisagées par le Gouvernement pour régulariser le secteur informel de l’économie.

49.Concernant l’article 7 du Pacte, Mme Bras Gomes demande si les autorités de l’État partie comptent instituer un salaire minimum national, garant de la protection des droits du travail dans la plupart des pays, et dans la négative, la raison d’un tel choix.

50.Sur l’article 9 du Pacte, Mme Bras Gomes interroge la délégation sur la question de l’aide sociale, qui pose deux problèmes dans le pays: le coût élevé des programmes, imputable en partie au fait qu’ils sont mal ciblés, et l’insuffisance des montants de l’aide, qui ne garantissent pas aux bénéficiaires des conditions de vie minimales. Elle lui demande aussi de préciser s’il existe bien un seul montant minimal pour la pension, et si celui‑ci suffit à garantir un niveau de vie décent. Enfin, elle souhaite savoir s’il est envisagé de mettre en place un véritable congé de paternité, le congé du père n’étant actuellement prévu qu’en cas de déficience de la mère (maladie, décès, abandon).

51.M. RIEDEL souhaite que le Gouvernement détermine et communique au Comité des valeurs repères permettant d’évaluer les résultats du projet de loi sur la sécurité du travail au cours des cinq années à venir. S’étonnant que l’État partie n’ait pas signé et ratifié les Conventions nos 117 – politique sociale (objectifs et normes de base) −, 118 – égalité de traitement (sécurité sociale) – et 174 – prévention des accidents industriels majeurs – de l’OIT, il en demande la raison. Face au taux de chômage extrêmement élevé dans le pays (37,7 %) et surtout à la part alarmante (85 %) du chômage à long terme, M. Riedel souhaite connaître les mesures concrètes prises par le Gouvernement, notamment les résultats du Plan d’action national pour l’emploi (PANE) pour 2004 et 2005. Enfin, pour déterminer si la situation des droits de l’homme dans le pays s’est améliorée ou s’est détériorée, le Comité a besoin d’indications précises: raison de la diminution de moitié du nombre de chômeurs bénéficiaires de programmes de formation entre 2000 et 2003; données annuelles sur le chômage, ventilées par sexe, par milieu (rural ou urbain) et par catégorie (communauté des RAE); chiffres sur les montants effectivement versés aux personnes handicapées au titre de l’aide sociale.

52.M. ABDEL‑MONEIM s’étonne de l’existence d’un régime préférentiel en faveur des employés du Ministère de la défense, pratique qu’il a déjà rencontrée dans d’autres pays et qu’il juge contraire au paragraphe 2 de l’article 2 du Pacte, qui interdit aux États parties d’exercer une discrimination fondée sur l’origine sociale. Se référant aux paragraphes 271 et 272 du rapport initial de l’État partie, il s’inquiète que, dans le calcul du montant minimum de la pension, il soit tenu compte uniquement du nombre d’années prises en compte pour la retraite et non d’autres facteurs importants tels que le taux d’inflation, l’article 9 du Pacte devant être lu ici à la lumière de l’article 11 qui reconnaît le droit de toute personne à un niveau de vie suffisant.

53.M. PILLAY, évoquant des informations émanant du Conseil de l’Europe, s’étonne que pour bénéficier d’une aide sociale les Roms soient tenus de présenter leur facture d’électricité, sachant qu’ils disposent rarement de l’infrastructure de base dans leur logement. Il est tout aussi irréaliste de leur demander de faire la preuve qu’ils ont accompli huit années de scolarité pour leur permettre d’accéder aux soins de santé. M. Pillay souhaite savoir ce que fait le Gouvernement à ce sujet.

54.M. KOLOSOV, satisfait des informations exhaustives fournies dans le rapport initial de l’ex‑République yougoslave de Macédoine au sujet du droit de grève, déplore qu’il n’y soit pas fait mention de la coopération des syndicats macédoniens avec les fédérations internationales de syndicats et, jugeant la liste des restrictions au droit de grève légèrement excessive, demande si le Gouvernement envisage de la réduire.

55.M. MARTYNOV souhaite que la délégation présente des statistiques récentes non seulement sur les Roms mais aussi sur les autres groupes ethniques, et lui demande si des allocations chômage sont effectivement versées dans le pays, quel en est le montant et s’il permet de vivre dans des conditions décentes. Il voudrait aussi avoir des explications sur la très longue liste d’exceptions au versement des prestations d’aide sociale, notamment la possession d’un véhicule à moteur immatriculé et les personnes qui ont été licenciées pour faute.

La séance est levée à 18 heures.

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