NATIONS UNIES

E

Conseil économique et social

Distr.GÉNÉRALE

E/C.12/2008/SR.4225 mai2009

Original: FRANÇAIS

COMITÉ DES DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS

Quarante et unième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 42e SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genève,le mercredi 12 novembre 2008, à 15 heures

Président: M. TEXIER

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS

a)RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT AUX ARTICLES 16 ET 17 DU PACTE (suite)

Rapport initial et deuxième et troisième rapports périodiques de l’Angola

La séance est ouverte à 15 h 10 .

EXAMEN DES RAPPORTS

a)RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT AUX ARTICLES 16 ET 17 DU PACTE (point 6 de l’ordre du jour) (suite)

Rapport initial et deuxième et troisième rapports périodiques de l’Angola (E/C.12/AGO/Q/3; document de base faisant partie des rapports présentés par les États parties (HRI/CORE/AGO/2008); liste des points à traiter (E/C.12/AGO/Q/3); réponses écrites du Gouvernement angolais à la liste des points à traiter (E/C.12/AGO/Q/3/Add.1, en anglais seulement))

1. Sur l ’ invitation du Pré sident, la délégation angolaise prend place à la table du Comité.

2.Le PRÉSIDENT souhaite la bienvenue à la délégation angolaise et l’invite à présenter le rapport initial et les deuxième et troisième rapports périodiques, soumis en un seul document, de l’État partie.

3.M. CHICOTI (Angola) dit que son pays est partie à la plupart des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, dont les dispositions sont impératives en vertu de l’article 21 de sa Constitution. L’Angola entretient d’excellentes relations avec les organes conventionnels de l’Organisation des Nations Unies, dont le Comité des droits économiques, sociaux et culturels, et considère que la présentation de rapports périodiques est un excellent moyen d’améliorer la promotion et la protection des droits de l’homme. L’Angola a vécu jusqu’à récemment une longue période de guerre qui a causé d’immenses souffrances à sa population, détruit une grande partie de ses infrastructures économiques, sociales et culturelles, détérioré les services d’éducation, de santé et de protection sociale, et considérablement affaibli son capital humain.

4.Depuis la fin du conflit armé en avril 2002, l’accent a été mis sur la consolidation de la paix et du processus de réconciliation nationale, l’approfondissement des réformes politiques visant à garantir le respect des principes fondamentaux établis dans la Loi constitutionnelle et l’instauration des conditions du relèvement et du développement social, économique et culturel de l’Angola, les droits de l’homme étant considérés comme déterminants pour le développement durable du pays. Malgré les difficultés, la démocratie naissante donne des signes encourageants de vitalité, à l’image des élections législatives de septembre 2008 où l’on a constaté une importante participation dans un climat de pleine liberté et de transparence. État de droit, l’Angola respecte les libertés fondamentales de ses citoyens et compte un grand nombre d’organisations non gouvernementales, de partis politiques et d’institutions religieuses. Il compte aussi un nombre croissant d’organes privés de presse qui font preuve d’une grande vitalité et contribuent à promouvoir le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

5.L’augmentation des recettes publiques grâce à la croissance économique a abouti, d’une part, à une amélioration significative du revenu par habitant et, d’autre part, à des investissements publics essentiels à l’exercice des droits économiques, sociaux et culturels de la population. Concernant par exemple l’objectif de développement énoncé dans la Déclaration du Millénaire qui tend à réduire de moitié d’ici à 2015 le nombre de personnes vivant avec moins de 1 dollar par jour, les progrès ont été encourageants. En quatre ans à peine, de 2004 à 2007, la valeur de l’économie nationale a presque doublé. Le produit intérieur brut (PIB) par habitant a plus que doublé entre 2002 et 2007, passant de 1 500 à 3 500 dollars. Grâce aux investissements réalisés par le Gouvernement dans le domaine social, l’Angola avait, en 2005, progressé de cinq places au classement mondial du développement humain établi par le Programme des Nations Unies pour le développement. Le nombre d’enfants inscrits à l’école primaire atteignait près de 3,8 millions, soit plus du double qu’en 2002; le nombre d’élèves du secondaire est aujourd’hui de l’ordre de 350 000, soit trois fois plus qu’il y a six ans. Le pays compte aujourd’hui environ 180 000 enseignants contre 76 000 en 2000, et environ 50 000 salles de classe contre 19 000 précédemment, illustration des efforts du Gouvernement pour faire en sorte que les enfants bénéficient d’un accès plus proche à l’école, en particulier dans les zones rurales.

6.Pour ce qui est de l’égalité entre les sexes, de la réduction de la mortalité des enfants de moins de 5 ans, de l’amélioration de la santé maternelle, de la lutte contre les maladies endémiques, du développement durable et d’autres objectifs du Millénaire pour le développement, l’Angola compte parmi les quelques pays africains qui devraient atteindre ces objectifs dans les délais prévus. En partenariat avec la société civile, le Gouvernement a mis en œuvre une stratégie pour l’égalité entre les sexes reprenant les principaux domaines thématiques des plans d’action de Dakar et de Beijing pour la promotion de la femme: pauvreté, éducation, santé, droits de citoyenneté, maternité, famille, personnes âgées, personnes handicapées, personnes séropositives et maladies endémiques. Il est toutefois opportun de rappeler qu’en dépit des progrès accomplis, la communauté internationale est loin d’honorer pleinement les engagements pris à l’occasion des principales conférences sur le financement du développement, ce qui est pourtant indispensable à la promotion et à la protection des droits économiques, sociaux et culturels.

7.L’application de la loi et des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme ratifiés par l’Angola est assurée par le Président de la République, le Parlement, le Gouvernement, les pouvoirs publics locaux, les tribunaux, le Procureur général de la République et le Médiateur. Le Gouvernement angolais s’attache à promouvoir le développement culturel tout en respectant l’identité de la culture nationale dans toute sa diversité. L’Angola est un État laïc respectueux de la liberté de croyance et de religion de ses citoyens, indépendamment de leur appartenance ethnique ou sociale. L’Angola continuera d’assumer ses obligations conventionnelles internationales et espère continuer de développer sa coopération dans le domaine des droits de l’homme avec le Comité des droits économiques, sociaux et culturels et le système des Nations Unies.

Articles 1er à 5 du Pacte

8.M. RZEPLINSKI s’enquiert de la formation dispensée dans le domaine des droits de l’homme aux membres de la fonction publique, notamment aux policiers. Il demande dans quelle mesure le Gouvernement angolais est disposé à élaborer un programme pour lutter contre l’impunité, compte tenu en particulier du très long conflit qu’a vécu le pays. S’il est exact, comme semblent l’indiquer les informations figurant à la page 18 des réponses du Gouvernement angolais à la liste des points à traiter, que le pays ne compte que 98 juges tous niveaux de juridiction confondus, M. Rzeplinski souhaiterait savoir comment les décisions de justice sont prises en cas de conflit du travail ou dans les affaires civiles, et quels recours sont accessibles aux personnes qui estiment que leurs droits sociaux fondamentaux ont été lésés.

9.M. Rzeplinski demande ensuite si la délégation angolaise pourrait indiquer quand les propositions tendant à remplacer l’Unité technique de coordination de l’aide humanitaire (UTCAH) par une structure organique adaptée au nouveau contexte, seront prêtes afin que le rôle très marqué de l’UTCAH vis-à-vis des ONG nationales et étrangères puisse évoluer, dans la mesure aussi où les ONG sont considérées par le Gouvernement comme des partenaires potentiels. À propos de la lutte contre la corruption, il observe que si des progrès ont été accomplis depuis 2003, l’Angola se situe à la cent quarante-deuxième place du classement mondial de Transparency International, il souhaiterait plus de précisions sur la politique adoptée dans ce domaine. À ce propos, il aimerait aussi savoir pourquoi, hormis dans la région de la capitale Luanda, les fonctionnaires sont aussi mal payés, ce qui les oblige parfois à exercer un autre travail et les rend plus facilement corruptibles.

10.M. Rzeplinski souhaiterait aussi connaître le point de vue de la délégation angolaise au sujet de l’incidence qu’ont les accords internationaux de coopération économique sur l’exercice des droits économiques, sociaux et culturels. Dans les provinces de Lunda Norte et de Lunda Sul, où se trouvent d’importantes concessions de diamants, les populations locales seraient empêchées d’approcher les zones en question et ne pourraient accéder normalement à leurs terres traditionnelles ou obtenir de l’eau potable. Il demande dans quelle mesure les accords de coopération signés par l’Angola avec des pays ou des sociétés multinationales bénéficient aussi aux populations les plus pauvres et marginalisées.

11.M. Rzeplinski souhaiterait des renseignements plus détaillés sur la stratégie d’autonomisation des femmes et sa mise en œuvre concrète, ainsi que sur le nouveau Ministère de la famille et de la promotion de la femme, dont la création cette année est un élément très encourageant. Néanmoins, une discrimination ouverte serait exercée à l’égard des femmes, notamment à l’échelon local, dans l’accès aux postes de l’administration. M. Rzeplinski demande enfin des précisions sur les mesures prises pour protéger certaines catégories, notamment les homosexuels, les personnes séropositives ou malades du sida, les victimes des mines terrestres et les personnes handicapées contre la discrimination dans l’accès à l’emploi, à la santé et à d’autres services publics.

12.Mme BONOAN-DANDAN s’étonne des disparités entre les informations sur la situation économique et sociale figurant dans le document de base de l’Angola et les excellents chiffres concernant notamment la croissance économique annoncés dans le discours liminaire de la délégation angolaise, et souhaite en connaître les raisons. Elle demande quelle est la part accordée aux droits économiques, sociaux et culturels dans la Stratégie de réduction de la pauvreté élaborée par le Gouvernement et si ce dernier entend maintenant procéder à un recensement de sa population, ce qui l’aiderait à mieux cerner les besoins, par exemple en matière d’accès à la contraception. Par ailleurs, il serait utile de disposer des chiffres actuels de l’inflation, du déficit budgétaire ou encore du service de la dette extérieure, compte tenu de l’augmentation des revenus pétroliers, et de savoir s’il existe aujourd’hui un mécanisme favorisant la transparence des transactions sans lequel, on le sait, la corruption s’installe.

13.Mme Bonoan-Dandan déplore que le Gouvernement n’ait pas fourni d’exemples de cas dans lesquels des particuliers auraient invoqué les droits économiques, sociaux et culturels devant la Cour constitutionnelle ou la Cour suprême, comme cela était demandé dans la question 1 de la liste des points à traiter; la délégation pourrait, à cet égard, fournir exemples et statistiques. Elle souhaite des éclaircissements sur les fonctions du Médiateur: peut-il réellement traiter des plaintes concernant des violations des droits des citoyens et des cas d’omission ou de négligence de la part des autorités et quel est véritablement son rôle en ce qui concerne l’application du Pacte? Enfin, il serait utile de savoir pourquoi le bureau du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme a été fermé.

14.MmeBRAS GOMES demande quelles sont les intentions du Gouvernement angolais, qui s’est engagé en faveur d’un renforcement de la coopération internationale avec le Haut‑Commissariat dans le cadre du Comité des droits de l’homme, maintenant que le bureau du Haut‑Commissariat a fermé. Elle souhaite savoir comment les mesures énoncées dans la partie du document de base consacrée au contexte social ont été élaborées, et si des consultations ont été tenues avec les autorités locales et les personnes concernées afin de les rendre aussi adaptées et concrètes que possible. Par ailleurs, la délégation pourrait indiquer quand la nouvelle constitution devrait être prête et quelle place y sera accordée aux droits économiques, sociaux et culturels. Elle pourrait aussi donner des informations sur ce qui est fait pour aider les nombreux Angolais déplacés dans le pays.

15.MmeWILSON souhaite savoir si les tribunaux angolais peuvent invoquer directement les dispositions des instruments internationaux, en particulier du Pacte, si les juges sont formés aux droits de l’homme et à ces instruments, et si les droits économiques, sociaux et culturels sont directement applicables dans le droit interne. Parallèlement, elle s’inquiète du manque d’indépendance de l’appareil judiciaire et demande si la séparation des pouvoirs est inscrite dans la Constitution ou dans le droit coutumier. Le pays, du fait du long conflit qu’il a connu, compte de nombreuses personnes handicapées; le Gouvernement a donc certainement pris des mesures positives en leur faveur, par exemple pour leur permettre d’accéder aux bâtiments publics, ainsi que des actions de déminage, dont le Comité aimerait prendre connaissance. Dans son discours liminaire, le chef de la délégation a assuré que la liberté de la presse était garantie; or, il semblerait que, dans la pratique, ce ne soit pas entièrement le cas et que des journalistes s’autocensurent. La liberté de la presse, donc la liberté d’expression, étant l’une des bases de la démocratie, la délégation pourrait préciser ce qu’il en est réellement.

16.M. ATANGANA s’inquiète lui aussi du fonctionnement et du manque d’indépendance de la justice dont certains hauts magistrats sont, par exemple, des personnalités politiques du parti au pouvoir. Il regrette que, dans sa réponse à la question 4 de la liste des points à traiter, le Gouvernement angolais se contente d’énumérer une série de mesures visant à lutter contre la corruption et le népotisme, sans préciser si elles ont été appliquées et avec quels résultats; la délégation pourrait éclairer le Comité en la matière, ainsi que sur le nombre de tribunaux qui fonctionnent aujourd’hui réellement.

17.M. PILLAY se déclare préoccupé par les informations selon lesquelles les revenus générés par le pétrole n’auraient pas été officiellement comptabilisés, notamment plusieurs milliards de dollars qui auraient pu être utilisés à des fins sociales et éducatives par exemple, dans le cadre de la promotion plus générale des droits économiques, sociaux et culturels. Par ailleurs, il prend acte d’informations faisant état du fait que la majorité des Angolais n’auraient pas accès à la justice ou que, pour porter son affaire devant un tribunal, il faille pratiquer la corruption; de plus, la population ne serait pas informée de ses droits économiques, sociaux et culturels. Il aimerait savoir si le Médiateur a déjà eu à traiter des cas de violations de ces droits, par exemple d’expulsions forcées. Les mesures prises par les autorités pour combattre la culture de la corruption qui semble régner à tous les niveaux de la société angolaise mériteraient d’être signalées, détaillées et appuyées par des chiffres relatifs aux cas traités.

18.M. SADI s’interroge sur les raisons pour lesquelles − le long conflit armé mis à part − le Gouvernement angolais a mis si longtemps à soumettre un rapport au Comité alors qu’il insiste sur son attachement au Pacte; il rappelle également, pour faire écho à ce que la délégation angolaise a déclaré précédemment, que l’ensemble des dispositions du Pacte doivent être incorporées dans le droit interne − et non seulement celles de la majorité des articles − et souhaite savoir si les autorités sont dûment informées du contenu de cet instrument. Si les cours élevés du pétrole ont largement bénéficié à l’économie angolaise, on peut s’interroger sur l’impact que leur chute de près de 50 % aura sur le respect par l’État partie de ses obligations au titre du Pacte. Enfin, la province de Cabinda, enclave pétrolière, concentre beaucoup des richesses du pays, et il serait bon de savoir si sa population jouit d’un statut particulier (autonomie, par exemple) et si elle partage ces richesses avec le reste des Angolais.

19.M. DASGUPTA voudrait avoir confirmation d’informations selon lesquelles la compagnie pétrolière SONANGOL ne déclarerait certains de ses revenus générés par la vente de pétrole, ni au Ministère des finances, ni à la Banque nationale d’Angola; si ces faits étaient avérés, l’État partie ne respecterait donc pas ses obligations au titre de l’article 2 du Pacte, à savoir son engagement à agir […] au maximum de ses ressources disponibles, en vue d’assurer progressivement le plein exercice des droits reconnus dans le Pacte . Il demande si la compagnie bénéficie d’un statut particulier et, dans l’affirmative, sur quelle base légale.

20.M. TIRADO MEJIA, devant l’importance du nombre de personnes déplacées dans le pays, demande quelles mesures très concrètes le Gouvernement a prises en leur faveur en matière de logement, d’éducation, d’intégration ou encore d’aide financière. Il espère qu’un pays comme l’Angola, qui a vu son revenu par habitant et son produit intérieur brut doubler récemment, redistribue les richesses dans un esprit d’égalité; il aimerait savoir ce que cela a changé concrètement s’agissant des droits économiques, sociaux et culturels, notamment en matière d’éducation − lutte contre l’illettrisme, par exemple − et espère que la multiplication des écoles ne s’est pas faite au détriment de la qualité de l’enseignement.

21.Mme BARAHONA RIERA demande quelles sont les modalités du contrôle que l’État exerce sur les entreprises publiques qui exploitent des ressources naturelles telles que le pétrole et les diamants, et comment est garantie la transparence dans l’utilisation des fonds publics. Notant qu’un pourcentage élevé du PNB provient du pétrole et des diamants, elle voudrait savoir s’il existe des politiques et des lois permettant de transférer les revenus tirés du pétrole et des diamants au secteur social. Enfin, elle demande si le Ministère de la famille et de la femme a mis en place une politique de promotion de l’égalité entre les sexes et s’il dispose de moyens financiers suffisants pour s’acquitter de sa mission.

La séance est suspendue à 16 h 45; elle est reprise à 16 h 55.

22.M. CHICOTI (Angola) dit que son pays est sorti de la guerre civile depuis six ans seulement et que la transition vers la démocratie, le développement et la promotion des droits économiques, sociaux et culturels ne se fait pas sans difficulté. Les vingt-sept années de conflit ont empêché les autorités de mettre en place les institutions et les infrastructures nécessaires. Depuis 2002, le Gouvernement angolais n’a ménagé aucun effort pour créer des institutions, d’abord à l’échelon national puis à l’échelon local avec la nomination d’un administrateur local dans chacune des 18 provinces que compte le pays. Le Gouvernement doit aussi faire face à des déplacements massifs de population et s’occuper de la réinstallation de milliers de personnes qui, dans leur immense majorité, n’ont rien retrouvé de leurs biens et de leurs logements à leur retour. Dans le cadre du Protocole de Lusaka, il a débloqué un montant de 500 millions de dollars pour faciliter la réintégration des familles, sans obtenir la moindre aide de la communauté internationale.

23.Pendant de nombreuses années, les autorités angolaises ont collaboré étroitement avec le Bureau du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme en Angola afin, notamment, de sensibiliser l’armée, la police et la population civile aux droits de l’homme dans toutes les provinces. Un travail colossal a été effectué mais l’État peut désormais agir seul grâce à la création de la Commission des droits de l’homme au sein du Ministère de la justice. D’une manière générale, l’on peut dire aujourd’hui que la justice est rendue de façon beaucoup plus rapide et impartiale. En ce qui concerne les salaires, M. Chicoti explique qu’ils ne varient pas selon les provinces et que la même grille salariale s’applique à tous les fonctionnaires sur le territoire. Un agent de la police touchait environ 100 dollars par mois en 2006, contre 200 dollars en 2008, augmentation qui s’inscrit dans le cadre des mesures de lutte contre la corruption. En 2002, le pays était complètement dévasté et les plans mis en œuvre par le Gouvernement ont permis de répondre aux besoins fondamentaux de la population dans les domaines de la santé et de l’éducation. Les revenus tirés du pétrole et des diamants ont permis à l’État de constituer des réserves mais pas d’assurer une répartition équitable des richesses car il doit d’abord établir les infrastructures et institutions nécessaires.

24.Le PRÉSIDENT, faisant observer que le Comité des droits économiques, sociaux et culturels n’est pas une instance politique mais un comité des droits de l’homme, demande à la délégation de fournir des renseignements concrets.

25.M. CHICOTI (Angola) n’entend pas faire une déclaration politique mais souhaite évoquer les grands défis que doit relever son pays et resituer le contexte dans lequel l’État doit agir.

26.Mme BONOAN‑DANDAN demande pourquoi le bureau du Haut‑Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme en Angola a été fermé.

27.M. CHICOTI dit que le bureau a été fermé parce qu’il avait achevé son mandat et réalisé un excellent travail. Aujourd’hui, c’est le Ministère de la justice qui s’occupe des questions relatives aux droits de l’homme même si l’Angola continue d’avoir d’excellentes relations avec les organismes des Nations Unies, en particulier le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD).

28.M. DO NASCIMENTO (Angola) dit que le bureau du Haut-Commissariat en Angola avait été créé dans le cadre de la mission de paix des Nations Unies dans le pays. Lorsque la mission a pris fin en 2002, l’Angola a demandé que le bureau puisse poursuivre son travail dans le pays. Le budget du bureau n’a pas été approuvé par la Cinquième Commission de l’Assemblée générale mais ses activités ont été financées gracieusement par un certain nombre de pays. M. Do Nascimento précise en outre que tous les bureaux du Haut-Commissariat sont établis en vertu d’un mémorandum d’accord entre l’État concerné et le Haut‑Commissariat. Or, dans le cas de l’Angola, aucun mémorandum d’accord n’avait été signé puisque le pays était en guerre.

29.Le PRÉSIDENT, intervenant en sa qualité de membre du Comité, dit que selon plusieurs rapports du Haut‑Commissariat, le Bureau des droits de l’homme en Angola avait des difficultés à fonctionner et ne disposait pas de la marge de manœuvre nécessaire pour s’acquitter de sa mission.

30.M. CHIKOTI (Angola) indique qu’à travail égal, il n’y pas d’écart de salaire entre les provinces de Lunda Norte et de Lunda Sul et que les autorités ne restreignent aucunement la liberté de circulation dans ces régions, exception faite de certaines zones situées à proximité de concessions de diamants. L’accès à l’eau n’est en aucun cas limité par les autorités.

31.Le Gouvernement angolais consacre des ressources considérables à la réintégration des personnes déplacées et ne ménage aucun effort pour favoriser la participation des femmes aux gouvernements locaux, notamment au niveau des provinces. Il n’existe aucune discrimination institutionnalisée à l’égard des femmes, des malades du sida ou des homosexuels, comme en témoigne l’absence de plainte pour ces motifs.

32.Les mutilés de guerre ne sont pas victimes de discrimination en matière d’accès à l’emploi; ils sont confrontés au même titre que leurs concitoyens à la pénurie d’emplois dans les grandes villes − qui drainent la majorité de la population − et au taux de chômage élevé qui prévaut sur l’ensemble du territoire. Le fait que l’Angola tire un revenu élevé du pétrole ne signifie pas pour autant que le marché de l’emploi est florissant. En revanche, le Gouvernement angolais doit effectivement favoriser la création d’emplois, et dans ce cadre, il accordera la priorité aux mutilés de guerre et autres groupes défavorisés.

33.La corruption existe comme partout ailleurs, mais la Cour des comptes contrôle les opérations financières des différents organismes publics, dont l’entreprise SONANGOL chargée de l’exploitation des ressources pétrolières du pays. Contrairement à ce qui a été avancé par certains membres du Comité, celle-ci fait rapport au Ministère des finances, et la Banque centrale assure le suivi des ventes du pétrole angolais sur les marchés internationaux, ce qui lui permet de connaître les recettes de l’entreprise.

34.Le recensement général de la population, prévu pour 2009, permettra de pallier l’absence de données statistiques déplorée par certains membres du Comité.

35.Le programme national de déminage a certes pris du retard, faute de fonds, mais n’a pas été interrompu pour autant. L’institution nationale chargée de le mettre en œuvre travaille en collaboration avec des partenaires étrangers.

36.Des progrès énormes ont été enregistrés dans le domaine de la liberté de la presse, et il existe désormais plusieurs radios et journaux indépendants qui ont le droit de diffuser les informations de leur choix.

37.La réforme du système judiciaire en cours prévoit la création de nouvelles institutions et la construction de bâtiments pour les héberger. Un palais de justice doit être inauguré très prochainement.

38.Le Parlement nouvellement élu procède à l’élaboration d’une nouvelle constitution, qui devrait être approuvée avant les élections présidentielles de 2009, et qui devrait instaurer une meilleure séparation des pouvoirs. Il est vrai qu’actuellement, les magistrats sont nommés par le Président de la République, comme dans de nombreux pays du monde d’ailleurs.

39.La province de Cabinda n’est pas la seule à produire du pétrole; chacune de celles qui exploitent cette ressource se voit allouer 10 % du revenu que le pays tire de l’exploitation pétrolière.

40.L’Angola ne respecte pas l’intégralité des recommandations du Fonds monétaire international (FMI), qui ne sont pas toutes pertinentes. Le FMI avait notamment préconisé de réduire les effectifs de la fonction publique à un moment où le besoin d’enseignants, d’infirmiers et de sages-femmes se faisait particulièrement sentir. Le problème alors n’était pas que l’Angola manquait de moyens pour payer les salaires de ses fonctionnaires, comme le FMI le pensait, mais que les employés étaient inégalement répartis entre les différents secteurs de la fonction publique.

41.Il est vrai que l’Angola a le contrôle de ses ressources naturelles, qu’elle exploite par l’intermédiaire de la Société nationale des hydrocarbures, de l’Entreprise nationale de diamants d’Angola ou encore de l’entreprise SONANGOL. Cela ne l’empêche pas pour autant de les exploiter conjointement avec des entreprises privées, tirant ainsi profit de leur technologie. Il est également vrai que ces secteurs nécessitent une main‑d’œuvre très spécialisée et qu’ils emploient peu d’Angolais, mais le Gouvernement angolais compte développer d’autres secteurs d’activité, dont l’agriculture, qui pourra employer de la main‑d’œuvre locale. Bien qu’il ait engrangé d’énormes bénéfices − évalués à 50 milliards de dollars − en raison du cours élevé du pétrole, le Gouvernement angolais n’a pas l’intention de redistribuer ce revenu directement, estimant qu’il faut accorder la priorité à la relance de l’économie.

42.Les personnes corrompues qui se sont enrichies de manière illégale doivent être jugées par les instances compétentes; porter des accusations générales n’apporte rien. D’ailleurs, contrairement aux affirmations de certains membres du Comité, plusieurs hauts fonctionnaires ont déjà été traduits en justice, dont un ministre.

43.Mme MEDINA (Angola) dit que le Ministère de la famille et de la promotion de la femme, créé en 1997, a élaboré une stratégie en faveur de l’égalité des sexes et de la promotion de la femme en vue de mettre en œuvre tous les objectifs du cadre d’action de Dakar et du Programme d’action de Beijing. Dans le cadre de cette stratégie qui vise notamment à atténuer la pauvreté, les femmes peuvent, depuis 2000, bénéficier de programmes de microcrédit appuyés par des banques privées.

44.Les femmes participent activement à la vie du pays, comme en témoigne leur taux de représentation au Parlement, où elles ont obtenu 41 % des sièges lors des élections législatives qui ont eu lieu récemment. Elles constituent en outre 33 % des membres du gouvernement central et sont également très bien représentées au sein des collectivités locales. Pour que, d’une manière générale, les femmes aient davantage d’autonomie et ne soient victimes d’aucune discrimination, l’Angola se dotera prochainement d’une loi sur l’égalité des sexes, conformément à une orientation politique de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC).

45.MmeESPERANCA (Angola) dit que le Bureau du médiateur est une instance publique indépendante dont les membres sont désignés à la majorité des deux tiers des parlementaires et confirmés dans leurs fonctions par le Président de l’Assemblée nationale. Élus pour quatre ans, ces membres sont inamovibles et ne peuvent pas démissionner en cours de mandat. L’enveloppe budgétaire dont dispose le médiateur dépend du plan pluriannuel d’activités qu’il présente et les crédits alloués sont prélevés sur le budget de l’État. Le médiateur est habilité à connaître de plaintes individuelles ou collectives et peut aussi s’autosaisir s’il estime que les droits fondamentaux des citoyens sont violés ou menacés.

46.L’article 21 de la Loi constitutionnelle dispose en son paragraphe 2 que les normes constitutionnelles relatives aux droits fondamentaux sont interprétées et intégrées dans le respect des instruments internationaux auxquels l’Angola a adhéré. Le paragraphe 3 du même article fait en outre obligation aux juridictions angolaises d’appliquer les instruments internationaux – dont le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels − même si les parties ne les ont pas invoqués, consacrant ainsi le principe de l’application directe des traités internationaux en droit interne.

47.M. BAMBI (Angola) dit que la Constitution garantit la séparation des pouvoirs puisqu’elle oblige les juges à prendre leurs décisions en toute conscience et en se fondant sur le droit uniquement, leur interdisant, en son article 54, de se conformer à un ordre quel qu’il soit de la part d’un ministre ou du Président de l’Assemblée nationale. Le Conseil supérieur de la justice, qui est l’organe de discipline devant lequel les juges et les procureurs pris en défaut doivent répondre de leurs actes, est composé de juristes nommés par l’Assemblée nationale. Certains d’entre eux sont membres du parti majoritaire certes, mais pas tous: d’autres appartiennent à des partis d’opposition et les uns comme les autres sont nommés sur la base de leurs compétences dans le domaine juridique uniquement.

48.La guerre a rendu impossible la création de tribunaux dans les communes les plus affectées par les combats, d’où la pénurie actuelle de tribunaux municipaux. Il ne faut pas en déduire pour autant que l’impunité règne dans ces municipalités, les affaires étant en effet jugées par les tribunaux de province auxquels sont rattachées lesdites municipalités.

49.Tous les tribunaux de province ont une chambre spécialisée dans le droit du travail que les citoyens qui s’estiment lésés par leur employeur peuvent saisir. Le mécanisme mis en place est rapide et efficace en ce sens qu’il permet aux procureurs auprès de ces chambres de mettre les deux parties en présence en vue d’une conciliation. La partie lésée n’a pas besoin de se faire assister d’un avocat et peut se contenter de relater les faits par écrit.

La séance est levée à 18 heures.

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