NATIONS UNIES

E

Conseil économique et social

Distr.GÉNÉRALE

E/C.12/2006/SR.3410 janvier 2007

Original: FRANÇAIS

COMITÉ DES DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS

Trente‑septième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 34e SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genève,le mardi 7 novembre 2006, à 15 heures

Présidente: Mme BONOAN‑DANDAN

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS

a)RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT AUX ARTICLES 16 ET 17 DU PACTE (suite)

Troisième rapport périodique des Pays‑Bas (suite)

La séance est ouverte à 15 h 5.

EXAMEN DES RAPPORTS

a)Rapports présentés par les États parties conformément aux articles 16 et 17 du Pacte (point 6 de l’ordre du jour) (suite)

Troisième rapport périodique des Pays‑Bas [(E/1994/104/Add.30); document de base (HRI/CORE/1/Add.66); liste des points à traiter (E/C.12/NLD/Q/3); réponses écrites du Gouvernement néerlandais à la liste des points à traiter (E/C.12/NLD/Q/3/Add.1)] (suite)

1.Sur l’invitation de la Présidente, la délégation néerlandaise reprend place à la table du Comité.

Articles 6 à 9 du Pacte (suite)

2.La PRÉSIDENTE invite la délégation néerlandaise à répondre aux questions posées à la séance précédente.

3.M. de KLERK (Pays‑Bas) dit que les questions relatives aux droits économiques, sociaux et culturels occupent une place importante dans la campagne pour les élections législatives du 22 novembre 2006. Les formations politiques débattent notamment des moyens d’améliorer la qualité du système de santé et du système scolaire. En tout état de cause, la même attention est accordée aux droits économiques, sociaux et culturels qu’aux droits civils et politiques.

4.Les Pays‑Bas font une distinction entre les personnes qui résident légalement dans le pays et jouissent à ce titre de tous les droits consacrés par le Pacte et les personnes en situation irrégulière, y compris les demandeurs d’asile et ceux déboutés de leur demande, qui ont des droits plus rudimentaires (accès aux soins de santé de base, à l’éducation et à l’aide juridictionnelle). Il va sans dire que les Néerlandais d’origine étrangère et les travailleurs migrants au bénéfice d’un permis de séjour peuvent revendiquer et exercer les mêmes droits que les Néerlandais de souche.

5.M. KUIJER (Pays‑Bas) dit que son pays a élaboré une synthèse de la jurisprudence se rapportant aux droits consacrés par le Pacte. Cette synthèse sera traduite en anglais et transmise aux membres du Comité dans les meilleurs délais.

6.Mme KOELMAN (Pays‑Bas) dit que l’article premier de la Constitution interdit la discrimination fondée sur le sexe et que la loi relative à l’égalité de traitement reprend toutes les normes définies dans les directives européennes concernant l’égalité entre hommes et femmes. Cette loi réprime la discrimination fondée sur le sexe sur le lieu de travail et à l’école ainsi que le harcèlement sexuel. La Commission de l’égalité de traitement est un organe semi‑juridictionnel qui connaît des plaintes de particuliers s’estimant victimes de discrimination. La Commission rend des décisions qui ne sont pas juridiquement contraignantes mais, d’après les études réalisées, 75 % d’entre elles sont suivies d’effets. Pour ce qui est des moyens de preuve dans les affaires de discrimination, la loi relative à l’égalité de traitement dispose qu’en cas d’allégation de discrimination, c’est la partie accusée qui doit prouver l’absence de discrimination. La victime n’est pas tenue de démontrer la véracité de ses allégations. Comme indiqué dans la réponse écrite du Gouvernement néerlandais à la question no18 de la liste des points à traiter, le droit de grève n’est pas reconnu par la Constitution mais il est garanti à tous les travailleurs du secteur privé et de la fonction publique en vertu du paragraphe 4 de l’article 6 de la Charte sociale européenne. Des exceptions s’appliquent toutefois aux militaires et aux fonctionnaires du Ministère de la défense.

7.M. MOREE (Pays‑Bas) dit que le Gouvernement néerlandais est préoccupé par le nombre de personnes qui dépendent de l’aide sociale et reste convaincu que l’obtention d’un emploi est la meilleure solution pour mener une vie digne et harmonieuse. C’est pourquoi, l’État n’épargne aucun effort pour aider les chômeurs à se recycler et à trouver du travail. Si les Pays‑Bas préfèrent mettre l’accent sur la promotion de l’emploi plutôt que sur l’aide sociale, il n’en reste pas moins que les allocations de chômage et les prestations de sécurité sociale ont augmenté de 5 % ces dernières années. Ce sont les autorités centrales qui fixent le montant des prestations sociales et les conditions à remplir pour en bénéficier et les collectivités locales ne peuvent en aucun cas refuser d’accorder une aide sociale.

8.L’État fournit aux parents un large éventail de services pour les aider à s’acquitter de leurs obligations parentales et professionnelles. Les facilités les plus importantes qui leur sont accordées sont les dispositions relatives aux services de garde d’enfants, aux garderies préscolaires et aux activités extrascolaires. Des ressources budgétaires supplémentaires seront débloquées en 2006‑2008 pour développer encore les services de garde d’enfants. La loi sur les services de garde d’enfants prévoit qu’à partir du 1er septembre 2007, les parents qui travaillent pourront faire garder leurs enfants de 8 heures du matin à 7 heures du soir. L’État définit des normes de qualité pour les crèches, qu’elles soient publiques ou privées, et fixe le montant mensuel des frais de garde pour permettre à tous les parents, en fonction de leur revenu, de faire garder leurs enfants. L’État s’emploie également à promouvoir le travail à temps partiel, en particulier auprès des hommes qui sont moins nombreux à en bénéficier, et fournit des incitations fiscales aux entreprises qui offrent à leurs employés la possibilité de travailler à domicile.

9.Du fait principalement de facteurs démographiques, l’offre de main‑d’œuvre ne cesse de diminuer et la tendance devrait s’accentuer encore après 2011. Parallèlement, le nombre de personnes âgées et de femmes qui travaillent augmentent chaque année. Le salaire minimum légal est indexé sur le coût de la vie et s’applique à tous les secteurs d’activité. Aucun employeur ne peut proposer un salaire inférieur. En revanche, dans certains secteurs, les conventions collectives prévoient des salaires minimaux plus élevés et des conditions de travail plus favorables.

10.Le Gouvernement néerlandais suit de près les mesures adoptées dans certains pays européens pour lutter contre la discrimination à l’embauche et sur le lieu de travail, notamment l’utilisation de curriculum vitae anonymes, mais il n’a encore pris aucune décision à ce sujet.

Articles 10 à 12 du Pacte

11.M. RIEDEL demande si en vertu de la loi sur l’assurance maladie (2006), les étrangers qui n’ont pas le droit de résidence ont accès aux soins médicaux secondaires et tertiaires, et notamment au protocole de traitement du VIH/sida, et les raisons pour lesquelles cette loi ne prévoit pas la prise en charge psychologique des patients. Il voudrait savoir pourquoi, dans le cadre de la promotion de modes de vie sains, les mesures destinées à faire régresser l’obésité chez les enfants et les adolescents visent exclusivement les zones urbaines défavorisées alors que le problème doit également exister dans les zones rurales, et quels ont été les effets de ces mesures.

12.Faisant référence à l’étude de l’OMS sur la rapidité des soins (EVANS, 2002), M. Riedel souhaite savoir quel est, en cas de maladie, le délai d’attente moyen pour consulter et quelles mesures ont été prises pour le réduire. Enfin, il voudrait connaître les raisons pour lesquelles les méthodes contraceptives sont moins bien remboursées aux femmes de plus de 21 ans que par le passé, estimant qu’il s’agit là d’une discrimination fondée sur le sexe car celles‑ci sont davantage touchées par cette mesure que les hommes.

13.M. ATANGANA demande quels ont été les résultats concrets du plan d’action destiné à combattre la violence familiale, qui prévoit des sanctions plus sévères à l’égard des auteurs de violences de ce type.

14.Mme BRAS GOMES, citant des sources selon lesquelles le nombre de personnes âgées de plus de 65 ans devrait doubler d’ici à 2040, demande si l’État partie envisage de mettre en place des services de soins de santé qui permettront, à terme, de dispenser des soins qui seraient accessibles à tous, y compris aux classes moyennes. Elle souhaite également savoir si le Plan national d’action contre l’exclusion sociale a été couronné de succès et a pu cibler les groupes prioritaires. Devant l’accroissement du nombre de jeunes gens sans abri, estimé à quelque 7 000 personnes, elle voudrait connaître les mesures que le Gouvernement a prises ou entend prendre pour améliorer la situation.

15.M. SADI demande s’il n’existe pas une contradiction entre la loi qui autorise le mariage entre deux personnes du même sexe et l’article 23 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, en vertu duquel le droit de se marier et de fonder une famille est reconnu à «l’homme et à la femme» (à partir de l’âge nubile). Il voudrait savoir ce qui explique qu’un mineur de moins de 18 ans, qui n’est par exemple pas habilité à signer un contrat, soit autorisé à consentir à des relations sexuelles dès l’âge de 16 ans, alors qu’un tel acte peut entraîner une grossesse précoce non désirée, contraindre la mineure concernée à abandonner ses études et exposer celle‑ci à des maladies sexuellement transmissibles.

16.Estimant que la prostitution en soi constitue une violation des droits fondamentaux de la personne humaine, M. Sadi déplore que la prostitution dans l’État partie soit non seulement légale mais encore facilitée, voire encouragée, par le fait que les femmes sont exposées dans des vitrines, et souhaiterait connaître l’opinion de la délégation à ce sujet.

17.Mme GHOSE, citant le paragraphe 245 du troisième rapport périodique de l’État partie selon lequel les relations familiales sont stables et harmonieuses, demande pourquoi, dans ce cas, le nombre de cas de sévices à enfant et de violences familiales est en augmentation. Se félicitant que les nouvelles instructions relatives à la violence familiale permettent à la police d’intervenir même en l’absence de plainte de la victime, elle voudrait savoir quels ont été les effets concrets de ces nouvelles instructions, et si la police est habilitée à pénétrer à l’intérieur du domicile des familles concernées, ce qui pourrait constituer une entrave à la vie privée. Elle demande en outre si les actes de violence familiale sont punis de peines dissuasives, et le cas échéant, si ces dernières sont inscrites dans une loi spécifique contre la violence familiale ou dans la loi de portée plus générale régissant les coups et blessures volontaires. Enfin, Mme Ghose souhaite savoir quels stratégies et plans nationaux d’action ont été mis en place pour lutter contre l’accroissement préoccupant du nombre d’enfants disparus ainsi que d’enfants manifestement victimes d’exploitation et de violences.

18Mme BARAHONA RIERA demande si les étrangers qui n’ont pas le droit de résidence dans l’État partie jouissent des droits économiques, sociaux et culturels dont bénéficie le reste de la population.

19.Faisant observer que l’égalité entre les hommes et les femmes n’est pas uniquement affaire de lutte contre la discrimination dans le domaine de l’emploi, Mme Barahona Riera souhaite savoir quelles mesures sont prises par l’État partie pour corriger les inégalités entre les hommes et les femmes en matière de santé, d’éducation et de logement.

20.Pour ce qui est de la traite des personnes, Mme Barahona Riera demande si la modification de la législation a abouti à la pénalisation des actes de cette nature et à l’imposition de peines de prison à leurs auteurs. Elle voudrait aussi savoir si les peines éventuelles infligées pour violence familiale peuvent être assorties d’une mesure d’éloignement du conjoint violent, car les mesures administratives ne suffisent pas à combattre ce phénomène.

21.Pour ce qui est des violences sexuelles dont sont victimes les enfants, elle demande si l’État partie envisage de s’aligner sur la législation de nombreux autres pays, dans lesquels il n’est pas nécessaire que la victime porte plainte pour qu’une procédure soit engagée. Enfin, elle jugerait utile que l’État partie érige en infraction pénale la pornographie impliquant des enfants.

22.M. TIRADO MEJIA demande si la législation de l’État partie permet d’engager des poursuites contre les personnes qui se livreraient à des actes sexuels avec des mineurs à l’étranger, ce qui permettrait de combattre le tourisme sexuel.

23.Se référant à la répartition équitable des disponibilités alimentaires mondiales évoquée aux paragraphes 340 à 343 du rapport à l’examen, M. Tirado Mejia souhaiterait savoir ce que pense l’État partie des subventions que les pays développés octroient à leurs agriculteurs, qui sont en grande partie responsables de la situation difficile des agriculteurs des pays en développement, et qui ont des répercussions sur la jouissance, par ces derniers, des droits économiques, sociaux et culturels.

24.Enfin, M. Tirado Mejia demande si le fait que l’État partie ait légalisé le cannabis a eu pour effet de réduire l’ampleur de ce phénomène, et si cette mesure a eu des effets collatéraux regrettables.

25.M. MALINVERNI se demande s’il ne serait pas préférable d’éloigner un conjoint violent du domicile familial plutôt que de contraindre la victime à se réfugier dans une structure d’accueil. Il souhaiterait connaître les statistiques relatives à la violence contre les enfants, et savoir si l’entrée en vigueur, en mars 2006, de la loi portant interdiction des châtiments corporels a eu pour effet de réduire l’incidence de ce phénomène.

26.M. Malinverni se dit peu satisfait de la réponse écrite du Gouvernement néerlandais à la question no 26 de la liste des points à traiter, qui précise que les sans‑abri sont souvent des personnes expulsées de leur logement en raison d’arriérés de paiement ou encore des personnes qui sortent de prison ou d’établissement de soins de santé et qui n’ont fait l’objet d’aucune mesure de réinsertion, ce qui selon lui est indigne d’un pays aussi développé que l’État partie.

27.M. ABDEL‑MONEIM demande à la délégation pourquoi, depuis la mise en place de la loi sur le droit aux prestations le 1er juillet 1998, les immigrants en situation irrégulière aux Pays‑Bas n’ont plus droit aux avantages comme le permis de logement, et comment la part du budget national consacrée au logement a pu passer de 8,77 % en 1970 à 7,1 % en 2002, alors que le budget du logement doublait sur cette même période. De la même façon, il se demande comment l’État partie peut continuer à octroyer des aides au logement alors que la part du budget national consacrée au logement est en baisse.

La séance est suspendue à 16 h 25; elle est reprise à 16 h 55.

28.M. de KLERK (Pays‑Bas), répondant à la question de Mme Barahona Riera sur les travailleurs migrants illégaux, explique que ceux‑ci sont très peu nombreux vu que le simple fait de travailler leur donne droit à un permis de séjour. La grande majorité des personnes qui se trouvent illégalement aux Pays‑Bas sont des demandeurs d’asile dont la demande a été rejetée. Ces personnes n’ont pas accès aux droits économiques, sociaux et culturels et l’État n’a envers elles qu’un nombre limité d’obligations, qui touchent principalement à l’aide médicale d’urgence, à l’éducation des mineurs et à l’aide juridictionnelle. Quant à l’évolution des statistiques relatives aux demandeurs d’asile, dont M. Abdel‑Moneim s’est étonné, elle résulte de la combinaison de deux facteurs: l’un, externe, est l’augmentation rapide du nombre de demandeurs d’asile en provenance de zones de conflit et l’autre, interne, est le durcissement du «tri» effectué par les autorités chargées de l’immigration entre les demandeurs d’asile qui fuient les persécutions politiques et les migrants économiques, l’asile n’étant accordé qu’aux premiers.

29.Répondant à M. Tirado Mejia, M. de Klerk explique que bien que les Pays‑Bas soient de gros exportateurs de produits agricoles, ils font partie des pays qui, au sein de l’Union européenne, préconisent le plus fortement la diminution rapide des subventions et la levée des obstacles aux importations en provenance des pays en développement. Cela étant, les décisions sont prises à Bruxelles.

30.S’agissant des drogues, il n’est pas exact que la politique néerlandaise soit toujours libérale. Elle met surtout l’accent sur la prévention. Les Néerlandais sont parfois taxés de «libéraux» dans ce domaine parce qu’ils tiennent à maintenir la distinction entre drogues «douces» et drogues «dures». Pour les drogues dures, leur politique est aussi stricte que celle des autres pays. Pour les drogues douces, l’importation, l’exportation et la vente sont interdites, sauf en petite quantité (moins de cinq grammes). Quoi qu’il en soit, ce sont les résultats qui comptent et la politique néerlandaise est manifestement efficace, puisque les Pays‑Bas figurent parmi les pays européens où le nombre de décès dus à la drogue est le plus bas.

31.Mme NICOLAI (Pays‑Bas), répondant aux questions de M. Riedel sur le système de santé, dit que la loi sur l’assurance maladie ne couvre les immigrés qu’en cas d’urgence et dans des cas particuliers, par exemple lorsqu’ils sont atteints par le VIH/sida. Quant à la question de la rapidité des soins, le Gouvernement a alloué des crédits importants pour réduire les listes d’attente et, si la population n’est pas encore entièrement satisfaite, les progrès accomplis donnent à penser que l’approche adoptée est efficace. Par ailleurs, la pilule contraceptive est effectivement moins bien remboursée, pour des raisons économiques, mais les études montrent que si son utilisation a baissé celle des autres contraceptifs a augmenté, et que la situation des femmes n’a donc pas changé s’agissant de l’accès à la santé et de la maîtrise de leur fertilité.

32.Répondant aux questions sur la violence familiale, Mme Nicolai confirme que les chiffres sont véritablement alarmants. Il semble que plus de 40 % de la population ait subi ce type de violence à un moment de la vie ou à un autre, dont 10 % chaque jour ou chaque semaine. La police a établi une procédure spéciale d’enregistrement, et les statistiques montrent qu’environ 57 000 cas lui sont signalés chaque année. Sachant que seulement 12 % des cas sont rapportés à la police, on peut en déduire un nombre de cas d’environ 500 000 par an. À peine 3 % des auteurs sont arrêtés par la police. Le Gouvernement a instauré une coopération entre les prestataires de santé, la police, le parquet et les institutions publiques et privées de protection de la jeunesse en vue de créer une base de données nationale et de s’entendre sur les mesures à prendre lorsqu’il est constaté qu’un enfant est témoin ou victime d’actes de violence familiale.

33.Pour la période 2002‑2007, le Gouvernement a alloué des fonds spéciaux à une cinquantaine de municipalités en vue d’améliorer l’aide apportée aux familles à risque. Les municipalités doivent rendre des comptes sur l’utilisation des fonds et les résultats obtenus, et faire part de leur expérience de manière que des enseignements puissent en être tirés et que ce type d’action soit étendu à l’ensemble des municipalités. Par ailleurs, l’opération «Jeunes» a été entreprise pour renforcer la coordination et la coopération entre les différents organismes publics de protection de la jeunesse. Sept d’entre eux collaborent à présent en vue d’élaborer des politiques mieux intégrées en faveur des jeunes. L’établissement d’un dossier électronique où sont consignés les signalements concernant un enfant donné (à compter de janvier 2007, il en sera créé un pour chaque nouveau‑né) permet une meilleure surveillance des risques. Afin de mieux protéger les enfants contre la violence familiale, l’Office de protection de la jeunesse a désormais l’obligation légale d’intervenir auprès des parents lorsqu’un enfant à risque lui est signalé par un maître d’école, un voisin ou la police. Si les parents ne réagissent pas de manière satisfaisante, il doit en référer au Conseil pour la protection des enfants.

34.Dans le passé, on cherchait principalement à maintenir l’enfant dans le milieu familial pour, pensait‑on, préserver des conditions de vie normales, mais à présent les décisions sont fondées sur l’intérêt de l’enfant et on hésite de moins en moins à le retirer de la famille pour le placer dans une famille d’accueil ou en institution. Les mentalités en général évoluent également, la population étant davantage sensibilisée, et chacun est plus enclin à signaler un enfant qui lui paraît en difficulté, ce qui renforce la protection des enfants contre ce fléau.

35.Répondant à Mme Ghose, Mme Nicolai dit que les chiffres très élevés sur la violence familiale s’expliquent par un signalement plus fréquent des cas. La mesure du phénomène ne se fait que depuis peu dans le pays et, avec la disparition du tabou politique et social sur la question, le taux de déclaration croît. Concernant les punitions et autres châtiments, le Code pénal néerlandais les considère comme une agression et les sanctionne au même titre que les violences et voies de fait.

36.M. KUIJER (Pays‑Bas) précise qu’en cas d’agression le droit néerlandais sanctionne l’auteur d’une peine maximale de trois ans de prison − quatre en cas de circonstances aggravantes −, sans spécification d’une peine minimale.

37.Répondant à M. Malinverni, Mme NICOLAI (Pays‑Bas) fait part de deux mesures prises récemment, à savoir la mise en place par le Ministère de la santé, de la protection sociale et des sports d’un projet pilote de traitement spécifique des auteurs d’actes de violence familiale − pour lequel on ne dispose pas encore de statistiques −, et le dépôt au cours de l’été 2006 d’un projet de loi devant le Parlement, qui frappe l’auteur de tels faits d’une interdiction temporaire de réintégrer le domicile familial.

38.M. KUIJER (Pays‑Bas), en réponse à M. Tirado Mejia, précise que dans le cas précis du tourisme sexuel, le Code pénal néerlandais a des incidences extraterritoriales, mais les nationaux néerlandais et les citoyens non néerlandais ne relèvent pas des mêmes dispositions. Quant à l’exigence que l’acte soit qualifié comme une infraction pénale dans le droit néerlandais et dans le droit de l’autre pays concerné, elle ne s’applique pas en ce qui concerne la pornographie mettant en scène des enfants.

39.Concernant le mariage entre personnes de même sexe, c’est la loi entrée en vigueur en 2001 − qui va au‑delà des dispositions minimales de l’article 3 du Pacte disposant le traitement égal de l’homme et de la femme − qui le régit. Les règles portant sur le mariage proprement dit et sa dissolution et les obligations qui incombent aux partenaires sont les mêmes que pour les mariages hétérosexuels. En revanche, des dispositions différentes régissent les questions ayant trait aux enfants.

40.Mme BARAHONA RIERA, ayant bien compris qu’il n’existe pas de loi spécifique sur la violence familiale, demande à la délégation néerlandaise de préciser si cette violence est qualifiée sur le plan pénal et si le Code pénal prévoit des sanctions spécifiques à cet égard.

41.Mme GHOSE demande à la délégation néerlandaise s’il ne serait pas opportun d’instituer un texte de loi spécifique sur la violence familiale, à l’instar du harcèlement sexuel considéré dans le droit national à part du harcèlement ordinaire. La violence familiale revêt une dimension particulière, notamment en ce que l’enfant peut en être le spectateur mais aussi la victime.

42.M. SADI souhaite savoir, concernant le tourisme sexuel, pour quelle raison les Néerlandais de souche et les autres citoyens bénéficient d’un traitement différent. Ayant rappelé que le Comité ne peut commencer à faire des recommandations sur la violence familiale et les mauvais traitements à l’égard des enfants tant qu’il ne connaît pas les véritables raisons de l’ampleur du phénomène dans le pays, il demande à la délégation néerlandaise de bien vouloir explorer plus avant les causes profondes (alcoolisme, divorce ou autres) du taux élevé de cette forme de violence.

43.M. de KLERK (Pays‑Bas) rappelle que les chiffres de la violence familiale et des mauvais traitements à enfant sont comparables à ceux relevés dans plusieurs autres pays d’Europe.

44.M. KUIJER (Pays‑Bas) confirme que la violence familiale est bien considérée dans le droit néerlandais comme une infraction pénale, même si elle ne fait pas l’objet d’un texte spécifique. Concernant l’étude de 1997 sur la question, il rappelle la définition très large qui y était donnée de la violence familiale, englobant également la violence psychologique (y compris les comportements effrayants), qui explique en partie les chiffres si élevés obtenus. Même une remarque effrayante à un moment quelconque de l’existence a en effet pu être comptabilisée comme un incident de violence familiale. Pour sanctionner cette violence, le législateur a fixé une peine maximale en cas de coups et blessures, qui peut être augmentée du tiers si l’acte est commis par un conjoint, mais a choisi de ne pas fixer de peine minimale pour éviter que ne soient infligées des sanctions non justifiées dans certaines circonstances particulières.

45.Répondant à M. Sadi, M. Kuijer précise qu’il est exceptionnel que le droit pénal néerlandais ait des incidences extraterritoriales. Pour cette raison, il a été fait appel à un procédé législatif purement technique, mais aucune différence notable n’existe dans le traitement réservé aux Néerlandais de souche et aux citoyens non néerlandais.

Articles 13 à 15 du Pacte

46.M. RZEPLINSKI demande quelles mesures les autorités chargées de l’éducation ont prises pour lutter contre la violence à l’école, dont sont victimes les enseignants tout autant que les élèves.

47.M. SADI s’étonne que l’article 23 de la Constitution autorise les écoles catholiques et protestantes à limiter le nombre d’élèves immigrés alors que les écoles publiques n’ont pas cette possibilité. Notant par ailleurs que l’éducation semble viser la création d’une société multiculturelle, il souhaiterait savoir ce qu’il advient de la culture autochtone dans ce processus.

48.M. MARCHAN ROMERO, relevant que dans sa réponse écrite à la question no 32 de la liste des points à traiter, le Gouvernement néerlandais indique que la politique culturelle s’adresse de plus en plus aux jeunes en général et de moins en moins à ceux issus de minorités ethniques précises, demande comment les Pays‑Bas parviennent à concilier cette politique intégratrice et la nécessité de préserver l’identité des différentes communautés culturelles.

49.M. de KLERK (Pays‑Bas) explique que même si la préservation de l’identité culturelle est importante, la balance penche actuellement davantage en faveur de l’intégration, ce qui se traduit par exemple par une insistance accrue sur l’apprentissage du néerlandais et la connaissance des bases de l’histoire du pays.

50.Répondant à M. Sadi à propos du système scolaire, M. de Klerk explique qu’il existe aux Pays‑Bas deux principales catégories d’écoles. Les écoles publiques, ouvertes à tous les élèves quelle que soit leur religion, et les écoles destinées aux élèves de certaines religions. Cependant, les deux catégories sont subventionnées par l’État. Les écoles qui appartiennent à la seconde acceptent en réalité des élèves professant une autre religion, mais ceux‑ci doivent respecter l’esprit de l’enseignement qui y est dispensé, ce qui signifie, par exemple, qu’un élève musulman que les parents souhaitent inscrire dans une école catholique doit respecter les principes catholiques enseignés dans l’établissement concerné. Dans le cas contraire, l’école a le droit de refuser l’admission. Les écoles publiques, en revanche, n’ont pas ce droit puisqu’elles sont censées dispenser un enseignement laïc.

51.M. KERDOUN, se référant au paragraphe 448 du troisième rapport périodique de l’État partie, demande s’il existe un quelconque contrôle de l’État sur les écoles privées, qui sont fréquentées par près de 70 % des enfants, et si ces établissements ont la liberté d’arrêter leurs propres programmes scolaires, auquel cas la cohésion de la société néerlandaise pourrait s’en trouver compromise. Si un tel contrôle existe, il souhaite connaître ce qui est pris en compte (respect des programmes nationaux, origine du financement). M. Kerdoun demande ensuite à la délégation quelles sont les raisons qui poussent les enfants à quitter prématurément l’école (difficultés à suivre, besoin de travailler, autres) dans un pays où l’enfant bénéficie d’une attention exceptionnelle, et où son devenir de citoyen à part entière compte.

52.M. de KLERK (Pays‑Bas), répond que la question de la remise en cause de la cohésion sociale du fait de l’implantation d’écoles privées à caractère professionnel − encore limitée en ce qui concerne les écoles primaires islamiques, au nombre de 40 à 50 seulement − continue d’être débattue dans le pays et notamment sur la scène politique. Les programmes scolaires qui y sont dispensés sont en tous points conformes aux programmes officiels, certaines matières étant simplement abordées selon une perspective religieuse spécifique, et ces établissements bénéficient d’un financement intégral ou partiel de l’État.

53.M. KERDOUN demande si les écoles à vocation religieuse bénéficient d’un financement supplémentaire de la part d’organisations caritatives ou d’autres États (pays musulmans favorisant et finançant les écoles islamiques, par exemple). Il souhaite également connaître la langue d’enseignement privilégiée aux Pays‑Bas et voudrait savoir si, comme dans certains pays, il existe une tendance à enseigner en anglais ou encore en arabe pour l’interprétation des textes religieux.

La séance est levée à 18 heures.

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