Nations Unies

E/C.12/2009/SR.40

Conseil économique et social

Distr. générale

29 novembre 2009

Original: français

Comité des droits économiques, sociaux et culturels

Quarante ‑ troisième session

Compte rendu analytique de la 40 e séance

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le lundi 9 novembre 2009, à 15 heures

Président: M. Marchán Romero

Sommaire

Examen des rapports

a)Examen des rapports présentés par les États parties conformément aux articles 16 et 17 du Pacte (suite)

Deuxième rapport périodique de Madagascar (suite)

La séance est ouverte à 15 heures.

Examen des rapports

a)Rapports présentés par les États parties conformément aux articles 16 et 17du Pacte (point 6 de l’ordre du jour) (suite)

Deuxième rapport périodique de Madagascar [E/C.12/MDG/2; liste des points à traiter (E/C.12/MDG/Q/2); réponses du Gouvernement de Madagascar à la liste des points à traiter (E/C.12/MDG/Q/2/Add.1)] ( suite)

1. Sur l ’ invitation du Président, la délégation malgache reprend place à la table du Comité.

Articles 6 à 9 du Pacte

2.M me Andrianaivo (Madagascar) explique que, compte tenu de la pluralité ethnique de la société malgache, l’État encourage l’organisation d’événements culturels interethniques. Les médias publics assurent la promotion des fêtes rituelles traditionnelles, et les initiatives locales dans ce domaine sont encouragées.

3.M. Andriamaholy (Madagascar) indique que Madagascar ne compte pas sur une quelconque philanthropie dans sa coopération avec la communauté internationale, mais entend bénéficier, au même titre que les autres pays, de son statut de membre à part entière des organisations internationales afin de remédier à ses handicaps et de renforcer ses efforts. Madagascar a besoin de programmes qui l’aident à appliquer les dispositions du Pacte et d’assistance technique pour la mise en place de structures mais aussi pour la formation de formateurs.

4.En ce qui concerne le système des Nations Unies et, en particulier, le Haut-Commissariat des droits de l’homme, Madagascar compte adresser très prochainement une invitation permanente aux titulaires de mandat au titre des procédures spéciales. La mission du Rapporteur spécial sur le droit à l’alimentation, qui avait été acceptée, a dû être reportée à la suite des difficultés traversées par le pays.

5.Les programmes de coopération avec les partenaires bilatéraux font l’objet de négociations et leur mise en œuvre se fait généralement en coopération avec ces derniers et en stricte conformité avec les règles convenues (établissement de rapports, évaluations, etc.).

6.M me Bras Gomes indique qu’il n’a pas été répondu à sa demande d’informations sur un éventuel projet de révision de la loi no 2007-036 relative aux investissements agricoles.

7.M. Rakotoniaina (Madagascar) explique que la loi relative à l’accès des investisseurs étrangers à la propriété foncière n’a pas changé et qu’elle ne prévoit pas la vente de terrains aux étrangers. Ceux-ci ont pour unique possibilité d’investissement foncier la location par bail emphytéotique. La cession de terrains aux étrangers est donc strictement encadrée par la loi.

8.M. Zhan souhaite savoir pourquoi, entre 1993 et 2001, le chômage des femmes a doublé alors qu’il est resté stable pour les hommes.

9.M me Bras Gomes souscrit à la question posée par M. Zhan et regrette l’absence d’information sur les effets de la loi no 004/2005 portant politique nationale de l’emploi mentionnée dans les réponses de l’État partie à la liste des points à traiter. Notant que les taux de chômage indiqués portent sur la période 2001-2004, elle invite la délégation à fournir des chiffres récents. Elle souhaiterait également connaître les mesures prises pour lutter contre le chômage des jeunes âgés de 15 à 24 ans.

10.D’après le rapport périodique de l’État partie, 78 % de la population active des villes travaillent dans le secteur informel où, comme chacun le sait, les travailleurs sont mal protégés, et il serait bon de savoir quelles mesures l’État partie a adoptées, non seulement sur le plan de la législation du travail, mais aussi sur celui de la sécurité sociale.

11.En ce qui concerne l’application du principe d’égalité de rémunération et le recours aux tribunaux en cas de non-respect de ce principe, Mme Bras Gomes invite la délégation à fournir des exemples de cas où des travailleurs ont saisi la justice.

12.Dans les zones franches industrielles, les travailleurs ont des droits inférieurs et sont en butte à de nombreux problèmes liés aux conditions de travail, aux droits syndicaux, au harcèlement sexuel, etc. Il semblerait que le Gouvernement s’apprête à élaborer en leur faveur un projet de loi qui tienne compte des observations des partenaires sociaux. La délégation pourrait peut-être apporter des précisions à ce sujet.

13.Madagascar n’a pas ratifié la Convention no 102 de l’Organisation internationale du Travail (OIT) concernant la sécurité sociale (norme minimum) notamment, au motif qu’une telle ratification entraîne pour le pays des coûts financiers de prise en charge auxquels le pays n’est pas encore en mesure de faire face. Mme Bras Gomes demande de quels coûts financiers il s’agit puisqu’en matière de sécurité sociale au moins, les cotisations sont à la charge des salariés et des employeurs.

14.Concernant la Stratégie nationale de risque et de gestion de protection sociale que Madagascar a adoptée en 2007, la délégation pourrait expliquer ce qu’elle recouvre concrètement et ce qu’elle apporte de plus, par exemple en matière de couverture ou de prestations.

15.Enfin, à propos du Programme national de réhabilitation de l’état civil, qui a permis de délivrer 219 000 copies d’acte d’état civil à des enfants âgés de moins de 6 ans par les procédures de jugements supplétifs, il serait intéressant d’en connaître les résultats et de savoir si ces enfants et leur famille ont à présent droit à des prestations particulières.

16.M. Kedziarelève que le harcèlement sexuel est apparemment très répandu dans les zones franches industrielles: 50 % des travailleuses de ces zones en seraient victimes, selon une étude du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP). Or, si le Gouvernement prend des mesures concrètes pour leur venir en aide, il semble qu’il leur laisse le soin d’engager les actions pénales et que la sensibilisation sur le lieu de travail se heurte au refus des employeurs de coopérer. Est-ce à dire que l’État ne prend pas d’initiative en la matière?

17.M. Schrijver aimerait savoir dans quelle mesure les événements politiques récents ont influé sur les droits syndicaux, notamment sur le droit qu’ont les syndicats d’exercer librement leur activité et le droit de grève.

18.M. Abd u l-Moneim, après avoir salué le taux d’activité remarquablement élevé pour un pays en développement, évoque les conditions de travail dans les zones franches industrielles et cite plusieurs rapports indiquant qu’en vertu de la nouvelle loi de janvier 2008, les droits des travailleurs employés dans ces zones sont inférieurs à ceux des travailleurs soumis aux dispositions du Code du travail, et que les procédures d’adoption et d’approbation de la loi en question sont contraires à l’article 184 du Code du travail et aux dispositions de la Convention no 144 de l’OIT sur les consultations tripartites relatives aux normes internationales du travail, ratifiée par Madagascar. Il souhaiterait que la délégation commente ces informations.

19.M me Barahona Riera demande quels programmes sont mis en place en faveur des femmes des zones rurales où le taux de pauvreté est très élevé. Elle aimerait aussi en savoir davantage sur la réglementation du travail domestique et sur la manière dont l’État partie lutte contre le travail domestique des enfants. Elle s’enquiert du nombre d’inspecteurs du travail à Madagascar et demande si ce nombre a augmenté. Enfin, elle souhaiterait des précisions sur l’état d’avancement du projet de nouveau Code du travail.

20.M. Rakotoniaina, répondant à la question sur le harcèlement sexuel qu’il relie au problème de l’inspection du travail, explique qu’en l’absence de dénonciation, les autorités sont impuissantes. Une augmentation du nombre d’inspecteurs du travail permettrait d’obtenir des informations plus précises sur ces cas.

21.La loi de janvier 2008 relative aux zones franches industrielles a été dénoncée par les partenaires sociaux et jugeant ces protestations fondées, l’État n’a pas adopté de décret d’application. La loi sera révisée compte tenu des observations des partenaires sociaux. Les entreprises des zones franches industrielles sont tenues de respecter les dispositions en matière de salaire minimum interprofessionnel garanti (SMIG). Le débat porte plutôt sur les deux points controversés de la loi de janvier 2008: l’emploi des femmes et la réglementation des heures supplémentaires.

22.Un certain nombre de programmes ont été adoptés en faveur des populations vivant en zone rurale, et notamment des femmes. En phase d’exécution, ils visent à encourager les activités génératrices de revenus en facilitant l’accès des femmes au microcrédit. Certaines, grâce aux activités artisanales qu’elles ont créées, voient déjà leur situation s’améliorer.

23.Le travail domestique est réglementé par le Code du travail, au même titre que les autres emplois. L’âge minimum d’embauche est fixé à 15 ans, et toute infraction à cette règle est passible de poursuites. Toutefois, beaucoup de travailleurs domestiques ne sont pas déclarés et, par conséquent, ne bénéficient d’aucune protection. C’est un problème dont le Gouvernement a conscience et auquel il compte remédier.

24.Les cas de saisine pour réajustement du salaire en fonction des tâches accomplies ne manquent pas et, en la matière, la jurisprudence est abondante.

25.M me Razanamahaso a (Madagascar) indique que le droit syndical n’est pas complètement développé dans le pays mais que le droit de grève est reconnu par la législation malgache. Lors des événements politiques récents, il y a eu un mouvement social généralisé au cours duquel les travailleurs ont exercé leur droit de participer à certaines grèves et d’exprimer des revendications d’ordre professionnel.

26.Le nombre d’inspecteurs du travail reste insuffisant à Madagascar, même si un concours a été organisé dernièrement afin de recruter 25 inspecteurs supplémentaires, ce qui a porté le total à 77. Les inspecteurs du travail jouent cependant un rôle important, en particulier dans les grandes villes où ils sont très sollicités et donnent des conseils aussi bien aux employeurs qu’aux travailleurs sociaux et aux employés.

27.M me Andrianaivo (Madagascar) précise que si la Convention no 102 de l’OIT concernant la sécurité sociale (norme minimum) n’a pas encore été ratifiée par l’État partie, il existe un système de sécurité sociale géré par la Caisse nationale de prévoyance sociale qui couvre l’ensemble des prestations habituelles (maladie, perte d’emploi, invalidité, décès, vieillesse, etc.). Cet organisme est placé sous la tutelle du Ministère de la fonction publique, du travail et des lois sociales et du Ministère de l’économie, des finances et du budget.

28.Le harcèlement sexuel constitue une infraction pénale, mais le nombre de cas portés devant des tribunaux est faible en raison de la crainte que ressentent généralement les femmes de subir des représailles ou de perdre leur emploi. Pour ce qui est des mesures prises en faveur des femmes rurales, une journée nationale des femmes rurales est célébrée chaque année le 19 octobre avec le concours de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), en même temps que la Journée internationale de l’alimentation. Les fonds recueillis à cette occasion sont alloués aux femmes rurales pour leur permettre d’exercer des activités productives qui contribuent à leur sécurité alimentaire.

29.M. Andriamaholy (Madagascar) dit que l’économie malgache reste dominée par le secteur informel, qui regroupe 88,9 % des actifs, est que l’un des enjeux actuels pour l’État est de faire entrer ce secteur dans l’économie structurée. Le problème du chômage des jeunes s’explique en partie par l’inadaptation des programmes d’études, et un réajustement est opéré actuellement en vue de mieux assurer la compatibilité de l’enseignement avec le marché du travail. Un effort particulier est fait pour améliorer la situation de l’emploi des femmes, et l’on constate qu’elles sont les premières bénéficiaires du microcrédit.

30.M. Rakotoniaina (Madagascar) indique que la délivrance d’un acte d’état civil, dans le cas d’un enfant, donne droit aux allocations familiales, à l’éducation et à la prise en charge par l’employeur de diverses prestations. Sans acte d’état civil, un enfant est privé d’un certain nombre de droits.

31.M. Randrianandrasana (Madagascar) dit que l’État partie interdit d’employer comme domestique une personne âgée de moins de 18 ans, vu qu’il a ratifié les Conventions de l’OIT no 138, relative à l’âge minimum d’admission à l’emploi, et no 182, visant à éliminer les pires formes de travail des enfants. Un grand nombre d’enfants travaillent à Madagascar − 1 873 000 selon une enquête récente. Sur ce nombre, 1 534 000 enfants sont astreints à un travail dommageable. Un plan d’action contre le travail des enfants a été engagé à partir de 2004 en collaboration avec des ONG et le Bureau international du Travail (BIT). Outre la stratégie de prévention qui est menée, près de 15 000 enfants ont été soustraits à une forme d’emploi dommageable depuis l’année 2001.

32.M me Barahona Riera demande si le nouveau Code du travail est encore en projet ou s’il a été adopté.

33.M me Bras Gomes demande comment la Stratégie nationale de risque et de gestion de protection sociale s’articule avec le système de sécurité sociale, et si ce lien pourrait être renforcé dans les années à venir. Elle aimerait aussi savoir quel est le système de sécurité sociale pour les femmes et les hommes ruraux, notamment lorsqu’ils sont âgés; et de quel type de protection sociale bénéficient les travailleurs domestiques en cas de maladie, de chômage, etc.

34.Le Président, intervenant en sa qualité de membre du Comité, demande, dans la mesure où le travail informel concerne un pourcentage très élevé de la population (près de 90 %), comment, si les travailleurs ne sont pas enregistrés, les programmes d’aide sociale sont fournis à ces derniers. Est-il impératif d’occuper un emploi formel pour pouvoir solliciter des prestations sociales?

35.M me Razanamahaso a (Madagascar) précise que Madagascar s’est doté d’un nouveau Code du travail en 2005 et que c’est ce code qui est en vigueur actuellement.

36.M. Rakotoniaina (Madagascar) dit que l’État partie, compte tenu de son niveau de développement économique, ne dispose pas encore des moyens d’étendre la couverture sociale aux travailleurs du secteur informel. Des efforts sont faits cependant pour tenter d’intégrer ces travailleurs dans le secteur formel, ce qui leur donnerait droit aux prestations.

37.À l’heure actuelle, il n’existe pas de prestations sociales spécifiques pour les femmes rurales. Toutefois, dans la culture malgache, les descendants ont une obligation morale d’assistance envers leurs parents si ces derniers en ont besoin. En ce qui concerne les travailleurs domestiques, il existe deux situations: ceux qui sont déclarés bénéficient de la sécurité sociale et de l’assurance maladie et ont droit à des congés. Pour les travailleurs non déclarés, l’employeur peut prendre en charge les frais de maladie, par exemple. Toutefois, cela n’est pas réglementé.

Articles 10 à 12 du Pacte

38.M. Riedel aimerait savoir si l’action menée par la Direction pour la promotion de l’eau potable créée au sein du Ministère de l’énergie et des mines a amélioré l’accès de la population à une eau saine. Concernant l’assainissement, il souhaiterait des informations sur les résultats du programme d’amélioration de l’accès de la population à des équipements suffisants pour l’évacuation des excréments, mis en place en 2000, ainsi que de la campagne visant à changer le comportement des agents de l’État. Qu’en est-il, en particulier, dans les régions rurales, où l’accès à l’assainissement d’un pourcentage élevé de la population est encore largement déficient?

39.Concernant la situation des prisons, où il existe un grave problème de surpopulation et où la malnutrition touche parfois jusqu’à deux tiers des détenus, M. Riedel souhaiterait des précisions sur les résultats des initiatives des initiatives prises pour y remédier, par exemple en redynamisant certains camps où les détenus effectuent une production agricole. Il aimerait aussi en savoir davantage sur les résultats du plan d’action entrepris pour améliorer les conditions de vie dans les prisons, notamment du point de vue de l’accès aux soins.

40.Pour ce qui est du droit à la santé, l’État partie indique que pour la période 1998-2005, 41 % des enfants de moins de 1 an n’étaient pas vaccinés contre la rougeole et 28 % contre la tuberculose; M. Riedel aimerait des renseignements actualisés à ce sujet. La situation s’est-elle améliorée, et dans quelle mesure? L’État partie a-t-il sollicité la coopération et l’aide internationales, et dans l’affirmative, les a-t-il obtenues? Selon un rapport du Programme des Nations Unies pour le développement, 70 % de la population rurale n’aurait pas accès à un médecin. M. Riedel demande des éclaircissements sur cette situation et sur les mesures prises par l’État partie pour y remédier. Enfin, il souhaiterait des précisions sur le montant actuel du budget national alloué à la santé, les informations les plus récentes figurant dans le rapport de l’État partie à ce sujet datant de 2003.

41.M. Pillay observe qu’en dépit du plan de lutte contre la pauvreté adopté par Madagascar, la proportion de personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté reste proche de 70 %. Dans la mesure où il ne semble pas exister de système d’assistance sociale, il souhaiterait savoir comment l’État partie vient en aide aux populations les plus démunies et quelle est la part du budget allouée à la lutte contre la pauvreté. La délégation pourrait aussi indiquer si les droits économiques, sociaux et culturels sont intégrés dans la stratégie de réduction de la pauvreté, conformément à la Déclaration sur la pauvreté et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, adoptée par le Comité en 2003. Enfin, compte tenu des lacunes subsistant dans les réponses de l’État partie à la liste des points à traiter, notamment en ce qui concerne l’effet des programmes et mesures de lutte contre la pauvreté, et les expulsions forcées, M. Pillay invite l’État partie à fournir les renseignements demandés dans son prochain rapport périodique.

42.M. Atangana demande, au sujet de l’extension de la famille par le «fatidrà», qui crée un lien de parenté fictif entre deux personnes étrangères par la fusion de sang, quelles obligations ce type de lien entraîne entre les membres de la famille. Il souhaite par ailleurs savoir si les mesures prises en vue de renforcer la répression pénale des actes de violence envers les femmes et la violence familiale en général sont appliquées et, dans l’affirmative, s’il est possible d’avoir des données relatives aux poursuites engagées à ce titre et aux condamnations prononcées par les tribunaux. Enfin, à propos des cas de maltraitance d’enfants employés comme domestiques, la réponse de l’État partie à la question 23 de la liste des points à traiter fait apparaître de nombreuses lenteurs en ce qui concerne les poursuites. Il demande ce qui motive ces lenteurs et quelles décisions ont été prononcées dans les affaires mentionnées par l’État partie.

43.M. Dasgupta constate que le travail des enfants est encore très répandu dans l’État partie bien que le droit du travail fixe l’âge minimum d’admission à l’emploi à 15 ans. La majorité des enfants qui travaillent (62 %) n’atteignent pas cet âge, et certains n’ont que 6 ans. Il demande quelles mesures ont été prises pour faire appliquer le droit, combien de poursuites judiciaires ont été engagées et quelles sont les sanctions prévues pour ce type d’infraction. Le rapport de l’État partie indique que 15 000 enfants ont été «empêchés» de travailler mais il ne fournit pas de renseignements précis à ce sujet. Par ailleurs, des centres de formation professionnelle destinés aux jeunes enfants ont été mis en place mais, depuis 2002, seulement 190 enfants ont été formés dans ce cadre. Au regard de cette situation, M. Dasgupta demande dans quelle mesure l’État partie s’acquitte de ses obligations de protection des enfants vulnérables.

44.M. Kedzia salue les mesures qui ont été prises par l’État partie pour apporter une solution au problème des enfants non enregistrés à l’état civil lors de leur naissance et pour délivrer des actes de naissance à 296 000 enfants. Toutefois, la proportion des enfants non enregistrés reste très élevée, et ils sont privés de l’accès à l’éducation. La délégation pourrait fournir de plus amples renseignements et indiquer si les mesures prises seront suffisantes pour résoudre ce problème. Au sujet du travail des enfants, les capacités de contrôle et d’application des dispositions en la matière ne semblent pas adéquates et il serait bon de savoir si le Gouvernement a l’intention de renforcer ses capacités et de quelle façon. En ce qui concerne les mariages forcés, M. Kedzia note avec satisfaction que l’âge du mariage a été relevé à 18 ans aussi bien pour les filles que pour les garçons et souhaite avoir de plus amples renseignements concernant la mise en œuvre de cette disposition, notamment à propos de l’ouverture de centres de conseil familial en 2009.

45.D’après les informations dont dispose le Comité, 43 % des unions enregistrées à Madagascar sont des mariages traditionnels qui ne permettent pas aux femmes de revendiquer quelque droit que ce soit et les conjoints vivent souvent en dessous du seuil de pauvreté. Il serait bon de connaître l’avis du Gouvernement sur cette question et d’avoir un complément d’information concernant le sort des enfants abandonnés.

46.Enfin, M. Kedzia demande des explications à propos de certaines réponses de l’État partie à la liste des points à traiter, où il est dit que «en 2008, 1 144 postes budgétaires ont été attribués au Ministère de la santé incluant 862 personnels techniques» et que «en 2009, sur les 1 360 postes budgétaires attribués, le recrutement de 1 060 personnels techniques est programmé».

47.M. Tirado Mejiademande quelles mesures ont été prises pour améliorer la situation carcérale dans l’État partie en ce qui concerne notamment l’alimentation, la santé et la sécurité. Au sujet de la violence familiale, qui semble très fréquente à Madagascar, il souhaite savoir quelles politiques ont été engagées et quels types de sanctions sont appliquées. Il demande par ailleurs quelles sont les sanctions prévues pour la traite des personnes, notamment des femmes et des enfants, à des fins d’exploitation par le travail ou sexuelle, et s’il s’agit de sanctions pénales.

48.Relevant que, dans certaines communautés, la naissance d’enfants jumeaux est considérée comme une malédiction et que l’on envisage alors de supprimer l’un des enfants, M. Tirado Mejia demande si des mesures ont été prises pour combattre de telles croyances. Dans l’État partie, des milliers de femmes meurent à la suite d’avortements pratiqués clandestinement ou dans des conditions dangereuses, et il voudrait savoir si Madagascar dispose d’une loi sur l’avortement. La commission mise en place par le Gouvernement pour étudier cette question a formulé des recommandations tendant à ériger l’avortement en infraction sanctionnée par une amende. Il souhaiterait avoir un complément d’information à ce sujet.

49.M. Sadi rappelle que le Gouvernement a lancé en mai 2007 une enquête nationale sur le travail des enfants, notamment dans les emplois domestiques, et demande quelles en ont été les conclusions. En ce qui concerne le mariage forcé, il serait intéressant de savoir si des poursuites juridiques ont déjà été engagées et, le cas échéant, d’en avoir des exemples. L’État partie a indiqué qu’il s’efforçait d’éliminer les pratiques coutumières relatives au mariage forcé et que le Gouvernement avait prévu de mener des consultations aux niveaux local, régional et national à ce sujet. Il serait bon de connaître les résultats de ces consultations.

50.Le Gouvernement a adopté en août 2007 une loi visant à assurer une protection adéquate aux femmes et aux enfants maltraités. Diverses mesures ont été prises, dont la mise en place d’un service d’assistance téléphonique. Il reste à connaître les résultats concrets de ces actions et les dispositions adoptées en ce qui concerne les droits des enfants, la traite des enfants et le tourisme sexuel. Il serait bon de savoir précisément si suffisamment de poursuites ont été engagées dans le cadre du programme de lutte contre la traite des personnes.

51.L’État partie a indiqué qu’après une série d’ateliers et de séminaires consacrés aux problèmes liés à l’avortement, il avait décidé de réduire les peines sanctionnant l’avortement et de les limiter à une amende. M. Sadi estime que cela n’est pas suffisant et qu’il serait possible d’adopter une approche plus éclairée. Il invite la délégation à faire de plus amples observations à ce sujet.

52.M. Abdul-Moneim constate que les informations fournies par l’État partie concernant sa situation économique sont contradictoires et relève notamment que, en 2004, 72 % de la population se trouvait en dessous du seuil de pauvreté. Il demande en quoi consiste la croissance économique mentionnée par l’État partie dans son rapport, et si la construction d’infrastructures a permis de créer de nombreux emplois. Il souhaiterait également savoir sur la base de quels critères l’État partie évalue ce qui constitue un niveau de vie suffisant. Le taux d’inflation a été évoqué, mais il serait utile de prendre également en considération l’indice des prix à la consommation et le niveau de charges fiscales moyen mis en rapport avec le salaire minimum. La délégation est priée d’apporter des précisions à ce sujet.

53.M me  Barahona Riera déclare que le droit à l’enseignement devrait revêtir une grande importance pour l’État partie, où plus de la moitié des enfants ne sont pas scolarisés, ce qui a des conséquences très graves, notamment en matière de travail des enfants. Elle demande quel est le pourcentage du budget national consacré à l’éducation et, sachant que l’enseignement primaire est obligatoire et gratuit, s’il existe des mesures d’incitation à la scolarisation. Elle souhaiterait par ailleurs savoir comment fonctionne le système de santé dans l’État partie, s’il est public ou privé et s’il existe un certain nombre de services de base gratuits, tels que les services de santé maternelle ou procréative. Elle souhaiterait également savoir en quoi consistent les systèmes de distribution d’eau potable, s’ils sont publics ou privés et si des projets d’investissement publics sont prévus dans ce domaine.

54.Mme Barahona Riera prend acte de l’existence d’un cadre juridique en vue de la protection de la femme et de l’égalité entre hommes et femmes, mais elle estime que ce cadre est insuffisant car il n’accorde pas assez d’importance à la lutte contre la discrimination envers les femmes. Les pratiques culturelles préjudiciables aux femmes perdurent et les infractions ne sont pas suffisamment sanctionnées, par exemple en ce qui concerne les mariages forcés. L’égalité en matière d’héritage est prévue par la loi mais semble ne pas être appliquée dans la pratique. Enfin, il serait bon de savoir si la violence familiale est érigée en infraction au même titre que d’autres types de violence et, dans l’affirmative, combien d’affaires ont récemment été portées devant les tribunaux.

La séance est suspendue à 17 heures; elle est reprise à 17 h 15.

55.M me Razanamahasoa (Madagascar) dit que les réponses aux questions concernant la politique de réduction de la pauvreté et les expulsions de personnes dépourvues de titre foncier seront communiquées au Comité par écrit.

56.M. Rakotoniaina (Madagascar), répondant à la question sur la lenteur des poursuites à l’encontre des auteurs de violences domestiques, cite des exemples de jugements prononcés dans un délai inférieur à un an. Il ne dispose pas de données chiffrées sur les cas de violence contre les femmes portés devant les tribunaux mais tient à indiquer que les jugements en la matière suivent les peines prévues par la loi, qui sont sévères. Le viol conjugal ne constitue pas une infraction autonome au regard du Code pénal. La rareté des cas jugés s’explique notamment par la réticence des victimes à exposer leur situation et il y a là un grand travail de sensibilisation à mener. Par ailleurs, les autorités nationales, conscientes que la sévérité des peines encourues en cas d’avortement pousse les femmes à avorter clandestinement et génère par conséquent une mortalité maternelle élevée, ont lancé des débats avec des représentants de toutes les sensibilités religieuses et politiques ainsi que les chefs traditionnels en vue d’adresser une proposition au Parlement. La proposition consiste, en cas d’avortement, à substituer une peine d’emprisonnement par une amende, mais rien n’est encore acquis car elle se heurte déjà à une forte résistance de certains membres de la société, y compris de l’Église catholique.

57.Dans la pratique, et dans certaines localités en particulier, il est vrai que les femmes n’accèdent pas à l’héritage malgré la législation en vigueur qui ne leur est pas défavorable. Il faudra là aussi faire des efforts de sensibilisation. Comme toutes les coutumes, celle qui consiste à abandonner les jumeaux est difficile à éradiquer; depuis quelque temps toutefois, ses partisans ont assoupli leur position: s’ils ne donnent pas leur bénédiction pour l’accueil de jumeaux au sein de la famille, ils n’exposent plus cette dernière à des représailles. Enfin, concernant l’extension de la notion de famille, les nouveaux liens ainsi créés relèvent uniquement de la solidarité et de l’entraide et n’ont aucun caractère légal pouvant par exemple influer sur l’héritage.

58.M me Rabemananjara (Madagascar) explique que, grâce au projet WASH (Water Assainissement Soap Hygiène), de nombreuses communes rurales disposent aujourd’hui d’infrastructures permettant l’accès à l’eau potable, sous forme par exemple de puits ou de bornes-fontaines. La campagne nationale pour l’éducation en matière d’assainissement lancée en 2007 dans le cadre de ce projet se poursuivra jusqu’en 2012 afin de toucher l’ensemble du territoire et, de ce fait, toutes les couches de la population.

59.M me Andrianaivo (Madagascar) indique que les autorités malgaches, conscientes que l’eau constitue une ressource stratégique pour le pays dans le cadre de la lutte contre la pauvreté et la protection de l’environnement, ont créé en 2003 l’Autorité nationale de l’eau et de l’assainissement, qui regroupe différents ministères et qui est chargée de la gestion intégrée des ressources en eau. À la suite de la visite de la Directrice générale de l’UNICEF, en 2008, un projet intitulé «Amis du Wash» a été lancé dont l’objectif est d’améliorer les infrastructures d’hygiène dans les milieux scolaire et hospitalier.

60.M. Andriamaholy (Madagascar) dit que son pays a fait beaucoup d’efforts pour améliorer la situation carcérale et notamment l’alimentation des détenus en portant la ration calorique quotidienne à 2 500 calories et en variant les apports nutritionnels afin d’atteindre les normes minimales en la matière. La surpopulation carcérale affecte essentiellement la capitale et deux établissements de détention en province; au niveau national, la situation s’améliore, grâce notamment à un traitement accéléré des dossiers des prévenus visant à réduire le nombre de dossiers en instance.

61.M. Rakotoniaina (Madagascar) explique que, pour désengorger les prisons, les autorités ont organisé un transfert de détenus ayant fait preuve de bonne conduite vers des camps pénaux, ce qui a permis parallèlement d’augmenter la production agricole et ainsi de mieux ravitailler les centres de détention. Aujourd’hui, certains détenus peuvent également bénéficier d’une libération conditionnelle, ce qui contribue aussi à réduire la population carcérale.

62.M me Andrianaivo (Madagascar), répondant aux questions relatives à la traite des personnes, dit que Madagascar a ratifié le Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants. À Madagascar, les femmes et les enfants sont victimes de la traite à des fins de travail forcé et d’exploitation sexuelle, y compris en vue de mariages forcés, phénomène qui s’explique notamment par la politique d’expansion du tourisme et l’augmentation de l’adoption internationale. Les autorités malgaches ont entrepris une campagne de sensibilisation à la traite des personnes, une loi contre la traite des personnes a été adoptée en 2008, et l’article 262 du Code du travail érige en infraction la traite de personnes à des fins de travail forcé. Parallèlement, il existe des réseaux de protection des droits des enfants placés sous l’égide du Ministère de la santé qui, outre une mission de signalement d’abus, dispensent une aide aux victimes, ainsi que des centres d’analyse criminelle chargés de collecter des informations sur la traite des personnes et de saisir les autorités compétentes le cas échéant. Le Gouvernement est toutefois limité dans son action par une insuffisance des capacités institutionnelles et financières.

63.M. Randrianandrasana (Madagascar) dit que la Constitution, comme les lois d’orientation successives, a consacré le principe de l’éducation gratuite et obligatoire, d’où une obligation pour l’État de mettre en place les infrastructures nécessaires à l’exercice de ce droit. Le Gouvernement a adopté en 2002 le plan Éducation pour tous et lancé en 2008 une réforme du système éducatif. La part du budget de l’État consacrée à l’éducation est en augmentation régulière: elle est passée de 15,9 % en 2003 à 17,6 % en 2007, soit respectivement de 3 % à 3,1 % du produit intérieur brut. Diverses mesures visant à alléger les charges parentales en matière d’éducation ont été adoptées, allant du financement des frais d’inscription à l’octroi de subventions pour la rémunération des enseignants dans le privé en passant par la fourniture de kits scolaires ou de blouses. Le travail des enfants constituant un obstacle majeur à la réalisation des objectifs du plan Éducation pour tous, le Gouvernement a élaboré un Programme national d’action pour la lutte contre le travail des enfants qui prévoit notamment les réformes législatives nécessaires pour lutter contre ce fléau. Cette action nécessite toutefois un budget important, d’autant que le phénomène est lié à la pauvreté.

64.M me Rahantanirina (Madagascar), à propos de la répartition des médecins au détriment des zones rurales, explique que le Ministère de la santé a mis en place en 2008 un projet destiné à inciter les personnels de santé à travailler dans ces zones, avec le soutien de la Banque mondiale et d’autres partenaires. Parallèlement, en se fondant sur les besoins exprimés par les autorités sanitaires locales, l’État a procédé au recrutement de 250 médecins en 2008 et a prévu celui de 400 autres en 2009. Pour remédier à l’insuffisance de la couverture vaccinale des enfants, les autorités ont lancé en 2006 une campagne consacrée à la santé de la mère et de l’enfant qui comprend un ensemble d’activités intégrant des programmes de vaccination, de nutrition et de santé procréative. En ce qui concerne l’amélioration de la prise en charge des groupes défavorisés, le Ministère de la santé a créé un fonds d’équité pour la prise en charge des soins des plus démunis. Le budget de la santé représente actuellement 5,7 % du budget de l’État, bien loin des objectifs fixés à 15 %. Le système de santé malgache est composé des secteurs public, privé, associatif et libéral. La population est donc libre de choisir son affiliation.

Articles 13 à 15 du Pacte

65.M. Kerdoun, notant que dans son rapport périodique l’État partie indique que la distance entre l’école et le lieu d’habitation des élèves constitue un problème, demande ce que les autorités entendent faire pour y remédier et s’il s’agit d’un problème de transport, auquel cas il suffirait d’organiser un ramassage scolaire comme cela se fait ailleurs, y compris en sollicitant des dons de véhicules. L’État partie énumère aussi un certain nombre de difficultés qui limitent l’exercice du droit à l’éducation, mais sans indiquer les solutions qu’il envisage pour les surmonter. M. Kerdoun souhaite enfin savoir comment l’État partie explique le taux d’abandon relativement élevé des apprenants dans les programmes d’alphabétisation et le taux élevé d’abandon scolaire et de redoublements.

La séance est levée à 18 heures.