NATIONS UNIES

E

Conseil économique et social

Distr.GÉNÉRALE

E/C.12/2007/SR.1615 janvier 2008

Original: FRANÇAIS

COMITÉ DES DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS

Trente‑huitième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA PREMIÈRE PARTIE (PUBLIQUE)*DE LA 16e SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genève,le mercredi 9 mai 2007, à 15 heures

Président: M. TEXIER

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS

a)RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT AUX ARTICLES 16 ET 17 DU PACTE (suite)

Rapport initial de la Lettonie (suite)

La séance est ouverte à 15 h 10.

EXAMEN DES RAPPORTS

a)RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT AUX ARTICLES 16 ET 17 DU PACTE (point 8 de l’ordre du jour) ( suite)

Rapport initial de la Lettonie ((E/1990/5/Add.70); document de base (HRI/CORE/1/Add.123), liste des points à traiter (E/C.12/LVA/Q/1); réponses écrites du Gouvernement letton à la liste des points à traiter (E/C.12/LVA/Q/1/Add.1)) (suite)

1. Sur l’invitation du Président, la délégation lettone reprend place à la table du Comité.

Articles 10 à 12 du Pacte (suite)

2.Mme REINE (Lettonie) dit que les résidents qui ne remplissent pas les conditions requises pour obtenir la nationalité lettone peuvent solliciter le statut de non‑citoyen, lequel leur offre une protection par rapport aux étrangers qui n’ont aucun statut. La communauté juive lettone se définit elle‑même comme une communauté minoritaire nationale et non comme une communauté religieuse. À ce titre, la communauté juive est considérée de la même façon que la communauté rom par les pouvoirs publics.

3.La division spéciale de police ne dispose d’aucune statistique sur les affaires dont elle s’occupe. La traite des êtres humains pose des problèmes particuliers aux autorités lettones dans la mesure où la Lettonie n’est que le point de départ de ce fléau. Des procédures pénales peuvent être engagées dans le pays mais elles doivent être poursuivies dans d’autres pays. Les victimes de la traite sont prises en charge par l’État qui leur verse une aide financière ainsi que par des organisations non gouvernementales (ONG) qui leur fournissent un soutien psychologique et une aide juridique. En outre, la Lettonie collabore étroitement avec l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) afin de mettre en œuvre des campagnes d’information sur la traite des personnes.

4.Si la violence familiale ne fait effectivement pas l’objet d’une loi spécifique, plusieurs dispositions du Code pénal s’y rapportent. Ainsi, la violence familiale est assimilée à l’infraction de coups et blessures avec circonstances aggravantes, tandis que le viol conjugal est considéré comme un viol avec circonstances aggravantes.

5.Pour finir, Mme Reine indique que les homosexuels n’ont pas le droit de se marier en Lettonie mais peuvent conclure un pacte civil. En ce qui concerne les anciens membres du KGB, leurs pensions de retraite ne sont pas calculées d’après leurs anciens grades mais d’après leurs années de cotisation et leurs salaires. Aucun ancien agent du KGB n’a bénéficié d’un traitement de faveur.

6.Mme TARE (Lettonie) dit que l’âge minimum d’admission à l’emploi est de 15 ans. D’après les statistiques de 2006, les salaires représentaient 65 % du revenu des ménages et les prestations sociales 18 %. Des renseignements sur les allocations de chômage seront fournis dans le prochain rapport périodique. Le premier plan national d’action pour l’insertion sociale, qui portait sur la période 2004‑2006, visait les familles monoparentales, les personnes âgées, les handicapés, les chômeurs et les sans‑abri. Dans un souci d’efficacité, un plan plus ciblé a été mis en œuvre pour la période 2006‑2008, avec deux grands objectifs: améliorer l’accès des enfants à l’éducation et des jeunes au marché du travail, et faciliter l’accès des familles nombreuses, des familles monoparentales et des personnes âgées aux services publics.

7.En ce qui concerne l’égalité entre les sexes, la délégation ne dispose pas de statistique sur les cas de discrimination indirecte, cette dernière étant couverte depuis très peu de temps par la législation pénale. En 2005‑2006, un programme de promotion de l’égalité des sexes a été lancé avec les objectifs suivants: promouvoir l’éducation des filles à tous les niveaux, sensibiliser la population aux inégalités entre hommes et femmes, réconcilier vie professionnelle et vie familiale, et renforcer la capacité des institutions de traiter des questions relatives à l’égalité des sexes. Un nouveau programme sera mis en œuvre à brefs délais avec deux objectifs supplémentaires: renforcer la capacité des institutions de lutter contre la violence à l’égard des femmes et faire évoluer les mentalités pour en finir avec les rôles traditionnellement dévolus aux hommes et aux femmes. Enfin, Mme Tare indique que les inspecteurs du travail effectuent des visites de contrôle dans les entreprises multinationales comme dans les entreprises nationales.

8.M. SKUDRA (Lettonie) ne dispose d’aucune statistique sur les enfants des rues. Des études sont en cours et un plan d’action sera prochainement élaboré. En tout état de cause, aucun effort n’est épargné pour encourager les enfants à réintégrer le système scolaire et un programme de remise à niveau d’une durée d’un à deux ans est proposé aux enfants des rues qui retournent à l’école. En ce qui concerne les orphelins, les membres du Comité sont invités à se reporter à la réponse écrite du Gouvernement à la question no 23 de la liste des points à traiter. Dans le cadre de son plan d’action 2004‑2013 en faveur de la famille, l’État entend mettre en œuvre des politiques de promotion du bien‑être des enfants et de lutte contre la violence à l’égard des enfants. Les agents de police, les travailleurs sociaux et les enseignants seront formés à mieux reconnaître les victimes d’actes de violence. En outre, l’État entend promouvoir le regroupement familial et l’emploi pour les parents qui sont partis travailler à l’étranger mais ont laissé derrière eux leur famille.

9.M. ŠTOKENBERGS (Lettonie) dit qu’en vertu de la loi sur l’aide au logement, le Gouvernement peut, dans certaines conditions, aider les foyers les plus modestes à acquérir un logement. Le Gouvernement finance également la construction de logements sociaux. Ainsi, en 2003‑2006, 1 000 nouveaux logements ont été construits à Riga.

10.Pour finir, M. Štokenbergs relève que la proportion de russophones n’est pas de 30 % seulement comme un membre du Comité l’a suggéré, mais plus certainement de l’ordre de 90 %, et que le fait que l’enseignement soit dispensé en letton sur l’ensemble du territoire est le gage d’une bonne communication entre tous les habitants. Il considère même le fait d’avoir pu éviter les divisions entre les différents groupes de la population comme l’une des plus grandes réussites de son pays.

11.M. MUCINŠ (Lettonie) reconnaît que comme beaucoup d’autres pays, la Lettonie manque d’infirmières. Il n’y a pas de solution à brève échéance à ce problème, mais à moyen terme, l’État compte le résoudre en évaluant précisément le nombre de professionnels à former compte tenu de l’évolution démographique et en renforçant en conséquence les écoles d’infirmières ainsi qu’en proposant des conditions de travail susceptibles de retenir le personnel. C’est dans cet esprit qu’il a décidé de fixer le salaire des infirmières à 60 % du salaire des médecins, qui correspond lui‑même au double du revenu national moyen.

12.La lutte contre le cancer du sein passe par le remboursement intégral d’une mammographie tous les deux ans pour toutes les femmes âgées de 50 à 69 ans. Les femmes des autres groupes d’âge sont invitées à se faire examiner annuellement par leur médecin traitant, lequel pourra leur prescrire des examens complémentaires s’il le juge utile. Toute femme de plus de 25 ans peut en outre se faire rembourser chaque année un frottis de dépistage du cancer du col de l’utérus. Ces mesures de prévention sont complétées par des actions d’information publique sur la santé en matière de sexualité et de procréation dans le cadre de campagnes de sensibilisation menées dans les médias et dans les écoles notamment.

13.Les dépenses de santé sont normalement prises en charge à 80 % par la collectivité, les 20 % restants («tiers‑payant») étant acquittés par le patient, mais un assuré social sur trois, soit 900 000 personnes environ percevant de faibles revenus, a droit à une couverture à 100 %.

14.En ce qui concerne les patients atteints de troubles mentaux, en vertu de nouvelles dispositions adoptées début 2007, toute décision d’internement doit être prise par un psychiatre ou par un collège de psychiatres puis soumise dans les vingt‑quatre heures à un juge, lequel a soixante‑douze heures pour l’avaliser ou la rejeter. La durée initiale d’internement ne peut excéder deux mois et si elle est prorogée, elle doit ensuite être réexaminée tous les six mois au maximum.

15.Mme OŠA (Lettonie) annonce que l’État accorde des subventions aux personnes qui souhaitent rénover leur logement et alloue des fonds structurels à l’amélioration de l’efficacité énergétique des bâtiments, mais l’action des autorités en matière de qualité du logement est nécessairement limitée par le fait que les habitations sont détenues par des propriétaires privés à 94 % dans les villes et à 97 % dans les campagnes. Les municipalités mettent des foyers d’accueil, proposant divers services, aux sans‑abri, qui étaient au nombre de 2 500 en Lettonie en 2006.

16.Mme REINE (Lettonie) ajoute que des dispositions légales interdisent désormais d’expulser des personnes âgées et des familles ayant des enfants en bas âge ou des enfants handicapés sans leur proposer de logement de remplacement; il reste à les faire connaître à tous les magistrats, ce à quoi le Centre de formation judiciaire a commencé à s’employer activement.

Articles 13 à 15 du Pacte

17.M. RZEPLINSKI demande à la délégation lettone de préciser combien gagne un instituteur ayant dix ans d’expérience par rapport à d’autres fonctionnaires, comme des policiers par exemple, d’indiquer les taux de scolarisation des Roms et des handicapés, d’expliquer la structure des diplômes universitaires et dans quelle mesure ces diplômes sont reconnus dans les autres pays de l’Union européenne.

18.M. Rzeplinski souhaite obtenir de la délégation lettone des données statistiques permettant d’évaluer la situation des écoles en matière de sécurité (agressions, trafic et consommation de drogue ou d’alcool).

19.Mme WILSON se demande quelles mesures ont été prises pour faire face au manque d’enseignants qualifiés dont le rapport initial de l’État partie fait état ainsi que pour mieux intégrer les Roms dans la société en général et dans le système éducatif en particulier. Un rapport établi en 2004 par une ONG dénonçait le taux d’abandon scolaire alarmant enregistré dans la communauté rom; il est à souhaiter que des mesures d’incitation à la poursuite de la scolarité ont été prises depuis en faveur de ce groupe de population.

20.M. KOLOSOV attend toujours une réponse à la question de savoir si l’État partie applique le droit du sang ou le droit du sol pour l’octroi de la nationalité. Il aimerait par ailleurs avoir des précisions sur les moyens déployés pour protéger les enfants de scènes de violence dans les médias et sur l’Internet et savoir si le fait que les collections des bibliothèques soient qualifiées de «complètement libres» signifie que l’on peut aussi y trouver des ouvrages nazis, par exemple.

21.M. ABDEL‑MONEIM souhaiterait en savoir plus sur la diffusion auprès du grand public des documents d’archives évoqués au paragraphe 661 du rapport initial de l’État partie ainsi que sur la Fondation du capital culturel, dont il est question au paragraphe 608 du rapport à l’examen, et sur ses aspects fonctionnels. La délégation lettone pourrait aussi préciser si c’est un mouvement de centralisation ou au contraire de décentralisation qui touche les musées.

22.M. Abdel‑Moneim remarque que dans l’ensemble, l’éducation semble plus délaissée que la culture en Lettonie. Le faible niveau des salaires des enseignants laisse craindre un développement de l’éducation informelle, qui aurait peut‑être en fait un coût plus élevé qu’une revalorisation des traitements dans l’éducation nationale.

23.Les conditions des prêts accordés aux étudiants sont prohibitives. Il est regrettable que le montant du prêt ne puisse pas excéder les frais de scolarité, que le taux annuel soit de 5 % et que les intérêts soient calculés à partir du douzième mois suivant l’achèvement des études, ce qui pose la question de savoir comment ceux qui n’ont pas trouvé d’emploi un an après la fin de leurs études peuvent rembourser leur prêt.

24.M. MARCHAND ROMERO se félicite de l’approbation de la loi sur le libre développement des minorités nationales et ethniques, qui a pour objet de garantir à tous les groupes nationaux et ethniques de Lettonie le droit à l’autonomie et à l’autogestion culturelle. Il se demande toutefois comment l’État partie concilie le principe d’autonomie et d’autogestion culturelle des différents groupes ethniques avec la nouvelle philosophie du financement de la culture, basée sur la «compétition», introduite avec la Fondation du capital culturel. Il s’inquiète aussi de l’accent mis sur l’«intégration» dans le Programme national Culture: favoriser la compréhension mutuelle est une bonne chose, mais l’État partie doit aussi veiller à permettre aux différentes nationalités vivant sur son territoire de préserver leur identité propre.

25.M. KERDOUN relève une contradiction entre l’augmentation des salaires des enseignants en 2001, 2002 et 2003, d’une part, et la pénurie d’enseignants due à l’insuffisance des salaires et à la médiocrité du statut social, de l’autre.

26.Mme REINE (Lettonie) indique que les statistiques sur la sécurité dans les écoles seront présentées dans le deuxième rapport périodique. Sur la proportion des cours qui doivent être dispensés en letton, elle précise que cette obligation ne vaut que pour les écoles publiques, les écoles privées ayant toute liberté à cet égard, et dit que la loi sur la langue nationale impose un minimum de matières enseignées dans la langue de la minorité. Sur la question de la langue dans laquelle se passent les examens, Mme Reine fait part des règles en vigueur dans les écoles publiques. Les examens des niveaux 1, 3, 6 et 9 se déroulent dans la langue dans laquelle la matière est enseignée, mais l’élève peut choisir de répondre dans une autre langue. Pour les épreuves de langues des minorités, le Ministère de l’éducation a mis au point des examens en letton, en polonais et en russe. Le diplôme de fin d’études secondaires se déroule en letton, mais là aussi, l’élève peut répondre dans une autre langue; cet examen servant aussi d’examen d’entrée à l’université, les étudiants ne sont pas séparés en fonction de leur langue; 70 à 80 % des diplômés des écoles des minorités poursuivent leurs études dans le pays. En Lettonie, la licence correspond à quatre années d’études supérieures.

27.Le soutien financier de l’État aux établissements scolaires privés (qui représentent 1 % de toutes les écoles du pays) est accordé indépendamment de la langue d’instruction choisie, les restrictions qu’imposait la loi nationale à ce sujet ayant été abolies sur décision de la Cour constitutionnelle. La moitié des subventions de l’État aux écoles privées va aux établissements pour les minorités.

28.La question de l’insuffisance des salaires des enseignants n’est pas encore résolue. Le plan d’action que le Gouvernement a adopté ne peut donner de résultats du jour au lendemain et une revalorisation des salaires doit être négociée avec les syndicats. Le personnel enseignant bénéficie d’un soutien sous forme d’aides au logement ou au transport, ou encore d’assurance sociale. Pour enseigner dans le primaire, il faut avoir suivi une formation en pédagogie à l’université. L’État mène un programme spécial d’intégration et d’éducation des Roms, auquel institutions publiques, employeurs et parents roms sont associés, qui porte sur la période 2007‑2009 et vise à inciter les enfants roms à fréquenter davantage l’école, les statistiques montrant que le nombre d’élèves roms scolarisés n’est pas encore stable. En matière de pornographie et de violence, les médias ont l’interdiction de diffuser des émissions à caractère violent ou pornographique entre 7 et 23 heures, et les prestataires de services Internet doivent équiper leurs serveurs de filtres. Enfin, ne souhaitant pas engager de débat sur la citoyenneté lettone du nouveau-né, Mme Reine renvoie au texte de loi correspondant, disponible en anglais.

29.Mme MELNBARDE (Lettonie) confirme que les bibliothèques constituent leur collection en toute indépendance, et dit que, la littérature nazie correspondant à une partie de l’histoire du pays, elle ne peut être écartée des bibliothèques. En ce qui concerne la Fondation du capital culturel, le budget est passé de 4 millions à 6,5 millions de lats entre 2004 et 2007, et avec les quatre concours que la Fondation a organisés en 2005, ce sont 2 127 projets qui ont été examinés. Pour faire pendant à la Fondation, une autre fondation en faveur de l’intégration a été mise en place par le Gouvernement afin de soutenir les cultures et les initiatives des minorités (5 projets financés en 2007) et d’autres organismes ou institutions apportent un soutien aux ONG représentant les minorités nationales. Sur la question de la décentralisation, Mme Melnbarde indique qu’après l’indépendance du pays, toutes les institutions culturelles lettones étant encore financées par l’État, la gestion des musées municipaux a été confiée aux municipalités afin de gagner en efficacité. Enfin, sur la question du lien entre le programme national Culture et l’intégration dans la société, Mme Melnbarde indique qu’un nouveau document phare intitulé «Directives pour une politique culturelle à long terme» a été mis au point en vue de renforcer la coopération entre les institutions culturelles et celles qui sont chargées de l’intégration dans la société.

30.Le PRÉSIDENT remercie la délégation lettone et annonce que l’examen du rapport initial de l’État partie est achevé.

31.La délégation lettone se retire.

La première partie (publique) de la séance prend fin à 17 h 30.

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