NATIONS UNIES

E

Conseil économique et social

Distr.GÉNÉRALE

E/C.12/2008/SR.3230 mars 2009

Original: FRANÇAIS

COMITÉ DES DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS

Quarante et unième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 32e SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genève,le mercredi 5 novembre 2008, à 15 heures

Président: M. TEXIER

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS

a)RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT AUX ARTICLES 16 ET 17 DU PACTE (suite)

Cinquième rapport périodique de la Suède

La séance est ouverte à 15 h eures .

EXAMEN DES RAPPORTS

a)RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT AUX ARTICLES 16 ET 17 DU PACTE (point 6 de l’ordre du jour) (suite)

Cinquième rapport périodique de la Suède (E/C.12/SWE/5); document de base (HRI/CORE/1/Add.4/Rev.1); observations finales du Comité sur le quatrième rapport périodique (E/C.12/1/Add.70); liste des points à traiter (E/C.12/SWE/Q/5); réponses écrites du Gouvernement suédois à la liste des points à traiter (E/C.12/SWE/Q/5/Add.1), réponses complémentaires du Gouvernent suédois à la liste des points à traiter (E/C.12/SWE/Q/5/Add.2))

1. Sur l ’ invitation du Président, la délégation suédoise prend place à la table du Comité.

2.Le PRÉSIDENT souhaite la bienvenue à la délégation suédoise et l’invite à présenter le cinquième rapport périodique de l’État partie.

3.MmeJENRYD (Suède) dit que la Suède, dont le Gouvernement a changé depuis la présentation de son cinquième rapport périodique, reste très attachée à respecter ses obligations au titre du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, droits qui constituent le fondement de sa politique de protection sociale. L’instabilité due aux conflits armés et aux conditions de vie difficiles qui règnent dans différentes parties du monde a généré des migrations massives de populations, y compris vers la Suède qui, par exemple, a accueilli plus de réfugiés d’Iraq que les États-Unis dans leur ensemble. De relativement homogène, la Suède est devenue une société multiethnique dans laquelle un habitant sur huit est né hors de son territoire. Il va donc de soi que le système de protection sociale doit prendre en compte cette réalité. Le cinquième rapport périodique fait état des mesures prises par le gouvernement précédent jusqu’à la soumission du rapport en septembre 2006, les initiatives ultérieures étant présentées dans les réponses écrites à la liste des points à traiter.

4.Désormais, tous les textes législatifs concernant la lutte contre la discrimination et ses différents aspects sont regroupés dans un seul texte, la nouvelle loi sur la discrimination qui entrera en vigueur le 1er janvier 2009. Outre les cinq motifs de discrimination précédemment pris en compte – appartenance ethnique, sexe, orientation sexuelle, religion ou croyance et handicap − elle portera sur l’âge et l’identité sexuelle et concernera des domaines non couverts jusqu’alors comme, par exemple, la discrimination par des fonctionnaires. Pour un meilleur respect de la loi et dans un souci de mieux traiter les cas impliquant plusieurs motifs de discrimination, les différents médiateurs spécialisés fusionneront en une seule autorité nationale, le médiateur chargé des questions de discrimination.

5.Le Plan d’action national pour les droits de l’homme 2006-2009 met l’accent sur la lutte contre la discrimination en traitant des droits des personnes handicapées, des enfants, des minorités nationales et des Samis, de la violence des hommes à l’égard des femmes et de la traite d’êtres humains. Il porte également sur le droit au travail, au logement, à la santé et à l’éducation et vise à informer le public, tant au sein du système éducatif que dans la société. Le Gouvernement a mis en place une délégation qui a pour mission à long terme de veiller au respect total des droits de l’homme dans le pays dans le cadre des mesures du Plan d’action.

6.La Suède accorde une grande importance au droit au travail. Travailler est un moyen de lutter contre l’exclusion et la marginalisation; de plus, un taux élevé et durable d’emploi est une des conditions requises pour financer à long terme le système public de protection sociale et pour éliminer la pauvreté et les inégalités économiques. Bien qu’en Suède, le taux de pauvreté soit le plus bas de l’Union européenne selon un rapport des Communautés européennes de 2008, et que la richesse y soit distribuée de façon plus équitable que dans les autres pays, les efforts doivent se poursuivre. Des réformes ont ainsi été entreprises en vue d’améliorer la situation du marché suédois du travail, sous la forme de mesures d’incitation économique, notamment de crédits d’impôt, et de modifications apportées aux régimes d’assurance chômage et d’assurance maladie. Des actions ont été mises en place à l’attention des personnes ayant quitté leur emploi depuis longtemps (chômage, retraite anticipée, maladie) ou qui dépendent de l’aide sociale, ainsi que des jeunes. Entre 2006 et 2007, le taux d’emploi a augmenté d’un point pour atteindre 67 %, au bénéfice essentiellement des jeunes et des étrangers, même leur situation au regard de l’emploi, tout comme celle des handicapés, doit encore progresser.

7.Le 10 juillet 2008, le Gouvernement a adopté un plan d’action pour lutter contre la prostitution et la traite d’êtres humains fondé avant tout sur les besoins individuels de protection et d’aide, besoins qui doivent être intégrés dans les activités des autorités publiques. Ce plan vise à intensifier les activités d’information et à développer les logements protégés, les centres de prise en charge et d’autres formes de protection et de soutien. Établir un contact avec les enfants et jeunes exposés à l’exploitation sexuelle ou susceptibles de l’être est difficile; une des solutions réside sans doute dans le renforcement de la formation des groupes de professionnels qui travaillent avec les victimes de la prostitution et de la traite. Les résultats du plan d’action seront présentés au Riksdag (Parlement) en 2010. Il existe également en Suède un plan d’action pour lutter contre la violence des hommes à l’égard des femmes et entre personnes du même sexe, qui comprend 56 mesures et auquel le Gouvernement a alloué environ 80 millions d’euros sur quatre ans. Ce plan vise surtout à mettre en lumière les circonstances et les situations dans lesquelles les femmes sont particulièrement susceptibles d’être la cible de violences (femmes handicapées, migrantes, femmes ayant des problèmes d’addictions, appartenant à des minorités ou encore âgées). Si la Suède a fait des progrès dans ces domaines, comme l’a souligné Mme Ertürk, Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes, beaucoup reste à faire.

8.L’objectif de la politique suédoise en matière de handicap est la diversité dans l’égalité à tous les stades de la vie, ce qui passe par l’élimination des obstacles à la pleine participation de chacun à la société, la lutte contre la discrimination et l’aide à la personne, grâce à des mesures transsectorielles qui s’intègrent dans la plupart des autres domaines de l’action publique. Ces mesures concernent notamment l’accès à l’emploi; le Gouvernement a ainsi chargé le Service public de l’emploi d’élaborer une stratégie d’incitation à l’emploi des personnes handicapées qui devrait être présentée en février 2009. Signataire de la Convention relative aux droits des personnes handicapées et du Protocole facultatif s’y rapportant, la Suède envisage d’adhérer à ces deux instruments et de permettre ainsi aux personnes qui estimeront que leurs droits au titre de la Convention ont été violés de présenter une réclamation devant un comité de surveillance. La Convention ne créant pas de nouveaux droits, l’adhésion à cet instrument et à son protocole facultatif ne nécessite aucune modification de la législation en vigueur. La Délégation aux droits de l’homme présentera un rapport en avril 2009 dans lequel elle indiquera si les organes publics, individuellement ou collectivement, respectent bien les dispositions de la Convention.

9.La Suède est très attachée à la protection sociale et aux droits des personnes âgées. Pour répondre aux nouveaux besoins engendrés par l’évolution démographique, une série de réformes a été mise en place; elle repose sur trois axes: renforcer les droits de la personne et ses possibilités de choix; promouvoir la qualité et la diversité dans la fourniture des services; et améliorer et assurer la qualité des soins dispensés. Pour ce faire, le Gouvernement renforce les bases légales de son action, intensifie l’information de tous et s’investit dans la formation des personnels chargés des services et des soins aux personnes âgées. Jusqu’en 2006, il a ainsi consacré environ 2 milliards de couronnes suédoises par an à l’amélioration de la protection sociale et des droits des personnes âgées et il s’apprête aujourd’hui à augmenter ces ressources.

10.Suite à sa visite en Suède, M. Paul Hunt, Rapporteur spécial sur le droit qu’a toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale possible a salué dans son rapport (A/HRC/428/Add.2) les progrès réalisés par le pays dans ces domaines mais a noté que la situation en matière de santé mentale se dégradait. Pour lutter contre ce phénomène complexe, la Suède joue sur plusieurs tableaux, notamment la réduction du chômage à long terme, l’investissement dans les aides aux parents et le renforcement des mesures de lutte contre la discrimination, notant que la population la plus touchée était les jeunes. Parallèlement, elle augmente le budget consacré aux soins psychiatriques.

11.Mettre en place un État-providence fondé sur l’égalité des droits pour tous, qu’il s’agisse des droits économiques, sociaux et culturels ou des autres droits, est un processus permanent qui requiert des réajustements, de la réflexion et des réaménagements. Dans cette optique, la Suède attend donc beaucoup des observations et des recommandations du Comité, tout comme des opinions et des préoccupations que les organisations non gouvernementales (ONG) ont exprimées devant celui-ci.

Articles 1er à 5 du Pacte

12.M. ABDEL-MONEIM, s’il apprécie l’esprit d’honnêteté que revêt le cinquième rapport périodique de la Suède, déplore que, pour faire le point sur l’évolution de certaines dispositions, le pays renvoie à son ou ses rapport(s) précédent(s). Or, plus de dix années pouvant s’être écoulées entre‑temps, les circonstances et les situations ont changé et, par conséquent, les comparaisons deviennent difficiles à établir. Il regrette également qu’en raison de la restructuration des statistiques publiques (AKU), il n’ait pas été possible de comparer les chiffres de 2005 à ceux des années antérieures.

13.M. ATANGANA demande pourquoi la Suède n’a pas incorporé le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels alors qu’elle l’a fait pour la Convention européenne des droits de l’homme. Par ailleurs, selon des informations reçues de diverses sources, l’organisation judiciaire du pays serait hybride, reposant à la fois sur des magistrats professionnels et sur des personnes désignées par les collectivités locales et les partis politiques. Si ces informations étaient confirmées, il serait légitime de se poser la question de l’indépendance de l’appareil judiciaire et de savoir ce que l’État partie entend faire pour améliorer la situation.

14.M. RIEDEL demande, par rapport à la réponse écrite du Gouvernement suédois à la question no 1 de la liste des points à traiter, où en est l’État partie dans les mesures qu’il doit prendre, y compris l’adaptation de sa législation, pour réaliser pleinement les droits énoncés dans le Pacte, étant bien entendu que les différents plans d’action nationaux mentionnés dans les documents font partie de cette démarche. Il souhaiterait d’ailleurs connaître les résultats du Plan d’action national pour les droits de l’homme 2006-2009, en matière de droits économiques, sociaux et culturels. M. Riedel voudrait savoir quelle sera la position de la Suède lors de la très prochaine adoption du projet de protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels par l’Assemblé générale des Nations Unies.

15.M. PILLAY demande si les droits énoncés dans le Pacte peuvent être invoqués devant les tribunaux suédois et les organes judiciaires, par exemple le nouveau médiateur. La discrimination semble être un problème récurrent en Suède; des rapports font état de cas de personnes d’origine étrangère ayant été victimes de préjugés raciaux, par exemple de la part de responsables de l’application des lois. Ces personnes bénéficient-elles de protection et de conseils, recrute-t-on du personnel pour les aider? M. Pillay déplore par ailleurs que les Roms continuent d’être victimes de discrimination en matière d’accès au logement, à l’éducation et à l’emploi. Il se réjouit que l’État partie ait donné suite à une des recommandations que lui avait adressée le Comité, à savoir créer un organisme national des droits de l’homme. Il demande si le nouveau médiateur a la capacité de traiter les cas de violation des droits économiques, sociaux et culturels par des acteurs non étatiques et d’accorder des dédommagements.

16.MmeBRAS GOMES demande si le nouveau médiateur bénéficiera des mêmes ressources, notamment humaines, que celles allouées aux quatre médiateurs avant la fusion de leurs services. Par ailleurs, il est de notoriété publique que la Suède est très active en matière de coopération internationale; l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) indique toutefois que cette coopération mériterait d’être élargie et assouplie. Mme Bras Gomes souhaite savoir si la Suède en convient et, dans l’affirmative, ce qu’elle entend faire à ce propos, et si elle pourrait aller, par exemple, jusqu’à superviser les activités d’entreprises privées.

17.M. KERDOUN se félicite de savoir que la Suède a mis en place une nouvelle politique de développement global s’appuyant sur une politique de coopération internationale. Il souhaiterait avoir des exemples de pays qui en bénéficient et avoir des chiffres sur ce que représente l’aide au développement versée par la Suède. Par ailleurs, il souligne que, dans son discours liminaire, la délégation suédoise a mentionné que son pays passait d’une société homogène à une société multiethnique. Il s’interroge sur les problèmes que posent cette évolution et la réception de migrants, et sur les raisons qui poussent les Iraquiens à émigrer en Suède.

18.MmeWILSON se félicite de l’adoption d’une convention multilatérale entre la Suède, la Finlande et la Norvège sur les Samis qui couvre les questions de propriété. Elle souhaiterait savoir pourquoi le transfert des responsabilités au Parlement sami concernant l’élevage des rennes ne porte pas aussi sur d’autres activités traditionnelles des Samis comme l’exploitation des forêts et des mines. À propos des questions de propriété, le processus aurait pris du retard parce que le coût des démarches pour faire valoir des droits de propriété serait trop élevé pour un certain nombre de Samis. Mme Wilson demande si une aide financière est proposée pour ces démarches. Elle souhaiterait des commentaires de la délégation suédoise au sujet de certaines allégations concernant le nouveau système de recours en matière d’asile, qui ne protégerait pas la confidentialité des demandeurs d’asile et ne leur donnerait pas accès à l’information en cas de décision d’expulsion; il serait aussi possible de les expulser de force. Mme Wilson souhaite savoir quel pourcentage des demandeurs d’asile dont la demande a été rejetée ne quittent pas le pays et deviennent des clandestins.

19.Se référant à des informations émanant d’ONG suédoises selon lesquelles il existerait un décalage entre la loi et la pratique en matière de protection des handicapés, Mme Wilson demande si en dehors du secteur public, des peines peuvent être imposées aux employeurs qui exerceraient une discrimination à l’égard des handicapés en matière d’emploi. Elle souhaiterait aussi des précisions sur la stratégie d’incitation à l’emploi des handicapés concernant la nature de cette stratégie, son applicabilité éventuelle aux employeurs privés, l’instauration éventuelle de quotas et l’application de peines si les quotas ne sont pas atteints.

20.M. SADI souhaiterait des exemples de cas où le Pacte a été directement invoqué en Suède, dans la mesure où les traités internationaux ne font pas automatiquement partie du droit suédois et doivent être transcrits dans une loi. Il demande si la récente crise bancaire et financière aura des incidences sur le programme d’aide publique au développement de la Suède. Relevant qu’un certain nombre d’ONG font état de problèmes d’accès au système de transport pour les handicapés, il souhaiterait des éclaircissements à ce propos.

21.M. DASGUPTA remercie la délégation pour ses informations concernant la coopération internationale suédoise. Il souhaiterait à cet égard des indications supplémentaires sur le montant des ressources financières allouées à la politique suédoise de développement global et à l’aide publique au développement, notamment par rapport au PNB. Il demande des éclaircissements sur la définition du handicap et la notion de personnes handicapées «dont la capacité de travail n’est pas réduite», car selon les chiffres indiqués dans le rapport à l’examen, le taux d’emploi de cette catégorie de personnes est supérieur à celui du reste de la population.

22.Mme BONOAN-DANDAN demande des éclaircissements sur le sens d’une phrase au paragraphe 18 du cinquième rapport périodique de la Suède selon laquelle une «perspective de non-discrimination a été ajoutée aux droits économiques et sociaux» dans le cadre du nouveau plan d’action suédois pour les droits de l’homme − dans la mesure où la non-discrimination est un principe fondamental des droits économiques, sociaux et culturels. Se référant au rapport sur la mission en Suède du Rapporteur spécial sur le droit qu’à toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mental possible (A/HRC/428/Add.2), elle a été surprise d’y lire que le droit à la santé est peu intégré aux lois et politiques internes de la Suède et demande dans quelle mesure les droits économiques, sociaux et culturels sont globalement pris en compte dans ses processus internes. Enfin, elle demande à propos du fusionnement des quatre médiateurs actuels pour les questions de discrimination si la création d’une institution nationale des droits de l’homme fondée sur les Principes de Paris pourrait être envisagée en Suède, sans compromettre les fonctions des médiateurs, la différence étant qu’une institution nationale peut couvrir tout le spectre des droits économiques, sociaux et culturels, tandis que les médiateurs ont un rôle spécialisé.

23.Le PRÉSIDENT, parlant en sa qualité de membre du Comité, demande si le Parlement suédois a commencé à réfléchir aux difficultés que soulève la Convention no 169 de l’Organisation internationale du Travail (OIT) pour la Suède, notamment en ce qui concerne le droit à la terre, et si des concertations sont engagées sur ces questions avec les populations concernées et les Samis en particulier.

La séance est suspendue à 16 h 5; elle est reprise à 16 h 15.

24.MmeJENRYD (Suède) dit qu’il n’existe pas de problème de compatibilité entre le Pacte et la législation suédoise dans la mesure où la Cour suprême considère que les lois nationales doivent être interprétées conformément aux obligations internationales de la Suède et les traités l’emportent en cas de conflit; des exemples de cette jurisprudence pourront éventuellement être fournis à la séance suivante. Rien ne s’oppose à ce que le contenu du Pacte soit invoqué par un individu dans le cadre d’une affaire ou devant les tribunaux. Répondant à une question sur les nominations politiques de juges qui ne sont pas des professionnels du droit dans les tribunaux, Mme Jenryd indique qu’il s’agit d’une tradition ancienne de la Suède visant à permettre à des citoyens ordinaires de participer à l’administration de la justice.

25.Par ailleurs, si dans le rapport qu’elle présentera en mars 2010, la Délégation aux droits de l’homme recommande de créer une institution indépendante pour veiller au respect des droits de l’homme en Suède, cette proposition ne manquera pas d’être examinée par le Gouvernement. Mme Jenryd précise en outre que le plan d’action national pour les droits de l’homme comporte bien un chapitre distinct consacré aux droits économiques, sociaux et culturels.

26.MmeSTEIN (Suède), répondant à une question sur le protocole facultatif visant à instituer un mécanisme de communications, dit que la nécessité d’une protection complète de tous les droits de l’homme est un principe central de la politique de la Suède en matière de droits de l’homme. Comme elle l’a indiqué à diverses occasions, la Suède n’est pas convaincue que l’élaboration d’un protocole facultatif sur les communications individuelles soit le meilleur moyen de promouvoir la politique des droits de l’homme. Au cours des négociations, elle a fait valoir que des critères précis d’admission et d’examen des plaintes devaient figurer dans le texte; elle a aussi exprimé des doutes concernant l’inclusion de dispositions sur la coopération et l’assistance internationales, qui pourraient être interprétées comme donnant un rôle au Comité dans la gestion de cette aide, comportent un risque de double emploi avec des stratégies existantes, et risquent de détourner le Comité de ses fonctions essentielles tandis que ses ressources sont limitées. La Suède regrette que des points importants de sa position n’aient pas été pris en considération dans le projet de texte dont l’Assemblée générale est maintenant saisie. Toutefois, elle ne fera pas d’objection à l’adoption de ce texte dans les semaines à venir.

27.M. WILHELMSSON (Suède) explique qu’il a été décidé récemment que le nouveau médiateur résultant de la fusion des quatre médiateurs actuellement en fonction pour les questions de discrimination s’appellerait médiateur pour l’égalité. Ce médiateur aura toujours pour mandat général de veiller au respect des lois sur la discrimination. Il pourra se saisir de violations des droits économiques, sociaux et culturels mais seulement pour autant qu’il y ait dans le même temps discrimination. L’ensemble du personnel des quatre services actuels sera transféré à la nouvelle autorité, mais il est possible que les effectifs changent car le nouveau médiateur aura toute liberté pour décider de la composition de son personnel.

28.La nouvelle loi sur la discrimination qui entrera prochainement en vigueur remédie à la plupart des lacunes de la législation antérieure en ce qui concerne les personnes handicapées. La commission parlementaire sur la discrimination avait suggéré d’y inclure la question de l’accessibilité pour les handicapés mais le Gouvernement a estimé que cela ne serait pas judicieux. Il reste cependant saisi de la question et s’emploie activement à trouver une solution. Le handicap est défini dans la future loi comme une «limitation physique, mentale ou intellectuelle permanente de la capacité fonctionnelle d’une personne qui, en raison d’un accident ou d’une maladie, existait à la naissance ou est survenue depuis, ou dont la survenue est probable». La principale forme de sanction en cas de discrimination consiste en des dommages et intérêts, qui seront plus élevés dans le cadre de la nouvelle loi.

29.MmeSANTESSON (Suède) croit savoir que les données figurant dans le cinquième rapport périodique sur les handicapés dont la capacité de travail n’est pas réduite proviennent d’études sans caractère scientifique réalisées par l’État tous les deux ans sous forme d’entretiens au cours desquels il appartient à chaque personne d’indiquer si elle s’estime handicapée et si ce handicap l’empêche ou non de travailler. Le service de l’emploi public a été chargé d’élaborer une nouvelle stratégie d’incitation à l’emploi des personnes handicapées qui sera présentée au printemps 2009. Si des quotas et des sanctions sont prévus, la Suède opte depuis longtemps dans ce domaine pour une démarche incitative plutôt que répressive qui consiste à accorder des subventions salariales aux employeurs qui emploient des handicapés.

30.MmeALDEN (Suède) dit que le Gouvernement suédois est conscient des décalages qui existent entre la législation sur la discrimination et son application et estime que la meilleure solution est une stratégie multiple reposant sur une législation claire et complète, des instructions précises pour son application, des plans d’action et des stratégies, un système transparent de suivi et des ressources adéquates. En Suède, ce sont les municipalités et les autorités locales qui fournissent la plupart des services aux personnes handicapées. Certaines ont du mal à l’heure actuelle à répondre aux besoins. L’État veille à ce que les bénéficiaires reçoivent les prestations auxquelles ils ont droit et ont accès aux services. Les tribunaux jouent un rôle très important d’orientation sur la façon dont la législation doit être appliquée en pratique. Au cours des dernières années, le Gouvernement a pris des mesures concrètes pour faire en sorte que les jugements rendus par les tribunaux dans des affaires où les autorités locales ou municipales n’avaient pas rempli leur mission de service soient suivis d’effets.

31.La Suède ayant pour objectif une société ouverte et accessible à tous, sa politique en faveur des personnes handicapées doit être comprise comme complémentaire de sa stratégie fondamentale et globale visant à la pleine participation de tous les citoyens. Le Gouvernement, qui accorde une grande priorité au renforcement de l’accès au réseau et aux différents moyens de transport public et y travaille depuis de nombreuses années déjà, s’est engagé à accorder les priorités, les ressources et les fonds requis, consacrant 15 millions d’euros à cet effet.

32.Mme STEIN (Suède), intervenant sur la question de la politique en faveur du développement global, rappelle que le Gouvernement compte agir en se dotant d’une politique de développement efficace et de grande qualité tout en veillant à la cohérence entre tous les domaines d’action du Gouvernement (affaires étrangères, sécurité, migrations, agriculture, notamment). Dans le rapport qu’il a présenté au Riksdag en mars 2008 sur la mise en œuvre de cette politique, le Gouvernement a indiqué vouloir désormais axer sa stratégie sur la démocratie et les droits de l’homme, d’une part, et concentrer ses efforts sur une trentaine de pays, majoritairement en Afrique, d’autre part. La politique menée contribue aux droits économiques, sociaux et culturels à travers les six domaines d’action que sont la lutte contre l’oppression, la lutte contre l’exclusion économique, la gestion des mouvements migratoires, les répercussions des changements climatiques, l’instabilité ou les conflits, et les diverses menaces sur le plan sanitaire. La Suède consacre 1 % de son PIB à la coopération internationale en faveur du développement. Le montant alloué suit donc l’évolution du PIB: s’il a récemment augmenté, passant de 2 770 millions d’euros en 2007 à 3 200 millions en 2008, il risque aussi de diminuer si le PIB baisse.

33.La Suède soutient les travaux de la Banque mondiale dans le domaine de la gouvernance et du renforcement des capacités nationales, et elle s’est associée à la Suisse et à d’autres pays nordiques pour créer un fonds de contributions volontaires destiné à financer notamment des études devant permettre de mieux cerner les liens entre développement et droits de l’homme. Ce fonds devrait être opérationnel dans un proche avenir.

34.Sur la question des politiques commerciales et de la responsabilité sociale des entreprises, Mme Stein indique que le Gouvernement encourage activement les entreprises du pays à travers son partenariat en faveur de la responsabilité mondiale, comme l’atteste la première place occupée en 2007 par la Suède dans l’indice mondial de la compétitivité. La politique menée repose sur la conviction que c’est aux États qu’incombe la responsabilité de respecter et de défendre les droits de l’homme mais qu’il faut aussi offrir aux entreprises un cadre pour orienter leur action dans ce domaine, raison pour laquelle le pays appuie financièrement les travaux menés par le Représentant spécial du Secrétaire général chargé de la question des droits de l’homme et des sociétés transnationales et autres entreprises.

35.Mme JENRYD (Suède) indique que le Gouvernement s’efforce actuellement de trouver une solution pour la question de la Convention no 169 de l’OIT. Le droit d’élever des rennes ne devant pas entraver le droit d’autrui à la terre, et inversement, la volonté politique est de respecter un certain équilibre entre les intérêts de chacun. S’agissant du droit à l’aide judiciaire, les Samis ont à titre individuel les mêmes droits que les autres citoyens, mais un village sami, par exemple, constitue une entité collective et ne peut donc accéder à l’aide judiciaire. Un accord a été conclu par les Samis avec une compagnie d’assurance à ce sujet, et les villages samis ont la possibilité de recourir au médiateur chargé des questions de discrimination ethnique pour les représenter. Enfin, sur la question de la pêche, très controversée par chacune des parties en jeu, les résultats de l’enquête menée n’ont pas abouti à des propositions de loi, et l’on s’oriente plutôt vers une association regroupant les villages samis et les entités nationales et institutions internationales pour tenter de régler les problèmes.

36.M. ANDERSSON (Suède), répondant aux différentes questions posées sur la santé, précise tout d’abord qu’à l’avenir, dans ses rapports, la Suède évitera de se référer aux rapports précédents. Il explique ensuite que l’autorité du pays en matière de statistiques a dû s’adapter au nouveau système mis en place à l’échelle européenne et devrait désormais produire des statistiques exploitables à des fins de comparaison. Quant au pourcentage de personnes restant dans le pays après s’être vu refuser l’autorisation de rester sur le territoire, il est impossible de l’établir, mais les autorités estiment qu’il s’agit d’un nombre limité de personnes, auxquelles les soins et traitements sont assurément dispensés lorsqu’elles en ont besoin.

37.Sur la question de l’impact de l’instabilité économique actuelle, M. Andersson indique qu’à l’instar des autres pays de l’Union européenne, la Suède a garanti ses banques, mais le taux de chômage devrait s’en ressentir (de 6 % actuellement, il devrait passer à 10 % en 2009). Le pays dispose toutefois d’un système permettant à la population de survivre dans de bonnes conditions en de telles situations.

38.Sur l’absence de mention explicite du droit à la santé dans la législation suédoise, la délégation suédoise précise que ce droit est inscrit dans la Constitution (chapitre premier). En outre, il existe toute une batterie de textes qui garantissent le droit des Suédois à la santé (loi sur les services de santé et les services médicaux, loi sur l’interdiction de la discrimination, etc.).

39.Mme JENRYD (Suède) dit que pour garantir le droit des Samis à la santé, le Gouvernement a chargé l’institution nationale de la santé publique d’étudier la situation des minorités ethniques sur le plan de la santé, y compris celle des Samis.

40.Le Gouvernement, conscient de la discrimination ethnique dans l’appareil judiciaire, a pris différentes mesures pour approfondir la question. Des études menées (2003, 2006), il ressort que la discrimination à l’égard des personnes d’origine non suédoise existe à tous les niveaux du système, mais qu’elle est plus prononcée au sein de la police. Un certain nombre de recommandations de mesures concrètes ont été formulées et sont actuellement examinées par les services gouvernementaux; elles constituent un excellent point de départ pour l’action dans ce domaine. En outre, la loi de procédure administrative prévoit en son chapitre 8 le recours à des interprètes et des traducteurs, lorsque la situation l’exige, les coûts y afférents devant être pris en charge par les autorités. Le Gouvernement a alloué des fonds supplémentaires pour couvrir ces dépenses.

41.Enfin, en ce qui concerne la situation de vulnérabilité des Roms, Mme Jenryd assure que le Gouvernement prend la question très au sérieux. La Délégation chargée des questions relatives aux Roms s’occupe du problème de logement de cette population, et elle a créé au printemps 2008 un groupe de travail sur l’éducation, chargé de faire des propositions tendant à améliorer la situation des enfants roms sur le plan scolaire.

42.M. KOLOSOV, notant que la Suède est très active dans le domaine de la coopération internationale, demande si l’État suédois assortit son aide au développement de conditions, par exemple en matière de promotion et de défense des droits de l’homme.

43.Mme BONOAN-DANDAN demande quels droits économiques, sociaux et culturels consacrés par le Pacte font l’objet de politiques et de programmes spécifiques.

44.M. SADI voudrait obtenir davantage de renseignements sur le véritable nombre de personnes handicapées dans l’État partie car il doute, compte tenu du degré de développement de la Suède, que ces personnes représentent 20 % de la population comme l’affirment certaines sources.

45.Mme STEIN (Suède) dit que l’aide au développement n’est, en règle générale, assortie d’aucune condition. On ne saurait exiger d’un pays ravagé par des conflits ou des catastrophes naturelles qu’il mette avant tout l’accent sur la promotion des droits de l’homme. Il n’en reste pas moins que les programmes de développement s’accompagnent d’activités de renforcement des capacités techniques visant notamment à mieux tenir compte des questions relatives aux droits de l’homme.

46.Mme AKESSON (Suède) explique que la Suède n’a pas de définition claire et précise de la notion de «handicap» même si les organismes compétents se réfèrent en général à la Classification internationale du fonctionnement, du handicap et de la santé de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Les taux de personnes handicapées varient considérablement selon le type d’études. Il faut également tenir compte du vieillissement rapide de la population suédoise et du fait que beaucoup de personnes âgées déclarent souffrir d’un handicap et sont donc considérées comme handicapées.

47.M. ANDERSSON (Suède) dit qu’il est impossible de préciser quels droits économiques, sociaux et culturels consacrés par le Pacte font l’objet de tels ou tels programmes spécifiques. Comme on le sait, la Suède est l’un des pays développés qui disposent des programmes et services sociaux les plus étendus et mène depuis fort longtemps une politique visant à offrir aux habitants les meilleures conditions possibles dans de multiples domaines: éducation, santé, travail, logement, etc.

Articles 6 à 9 du Pacte

48.M. ABDEL-MONEIM demande si le Gouvernement suédois compte parmi les acteurs du marché du travail évoqués au paragraphe 60 du rapport à l’examen et, dans l’affirmative, quel est son rôle spécifique. Il demande également quel est le montant total des programmes d’action sur le marché du travail mentionnés aux paragraphes 70 à 74 du rapport et voudrait savoir si ce montant est comparable aux sommes allouées au secteur bancaire par le Gouvernement suédois afin d’atténuer les effets de la crise financière mondiale. Il relève au paragraphe 63 du rapport que «le chômage ouvert a progressé et le taux d’emploi a continué de baisser en 2004», constat préoccupant qui remet en question la politique de l’emploi du Gouvernement. La délégation suédoise est invitée à donner son point de vue à ce sujet, surtout en ce qui concerne le chômage des jeunes qui atteint des niveaux alarmants.

49.MmeBRAS GOMES note au paragraphe 8 des réponses écrites du Gouvernement suédois à la liste des points à traiter que les questions relatives au temps partiel relèvent des conventions collectives et demande pourquoi le Gouvernement n’a pas son mot à dire à ce sujet, sachant que, toujours d’après les réponses écrites, nombre de femmes employées à temps partiel souhaiteraient travailler davantage. Elle relève au paragraphe 71 des réponses écrites que le taux de chômage des étrangers, en particulier des femmes, est beaucoup plus élevé que celui des Suédois et que les écarts semblent se creuser. Elle demande à la délégation d’expliquer cette situation et de fournir des renseignements sur l’efficacité du programme d’intégration pour les nouveaux immigrés. Enfin, elle souhaite obtenir des explications au sujet d’une phrase figurant au paragraphe 88 des réponses écrites, selon laquelle les salaires minimaux sont surtout importants pour l’embauche de travailleurs sans formation professionnelle.

50.M. ZHAN Daode demande pourquoi l’État partie ne parvient pas à adopter une définition claire de la notion de «handicap» et voudrait connaître les mesures prises pour lutter contre la discrimination dont les handicapés sont victimes dans l’emploi. Il souhaite également que la délégation suédoise fournisse davantage de renseignements sur les difficultés que les immigrés continuent de rencontrer pour trouver un travail.

51.Le PRÉSIDENT, parlant en sa qualité de membre du Comité, note au paragraphe 71 des réponses écrites que le Gouvernement suédois fournit des statistiques sur le chômage des personnes âgées de 15 à 74 ans et voudrait obtenir l’assurance de la délégation que l’âge minimal d’admission à l’emploi n’est pas de 15 ans dans l’État partie. De même, il imagine que si la crise économique a comme conséquence de repousser l’âge de la retraite, les travailleurs ne doivent toutefois pas attendre soixante-quatorze ans pour faire valoir leurs droits à pension.

52.MmeSANTESSON (Suède) confirme qu’aucun mineur de 15 ans ne peut travailler en Suède et que l’âge de la retraite est de 61 ans bien qu’il soit possible, à compter de cet âge, de poursuivre son activité professionnelle tout en bénéficiant d’une pension de retraite. La Suède ne manque pas de programmes et de politiques en faveur de l’emploi et il serait injuste de douter de leur efficacité car c’est principalement la situation économique internationale qui influe sur le marché national de l’emploi. Une vaste réforme du marché de l’emploi a été engagée il y a deux ans dans le but de simplifier les modalités d’embauche pour les employeurs, de favoriser la création d’entreprises et d’inciter les chômeurs à rechercher activement un emploi plutôt que de dépendre de l’aide sociale. Il s’agit aussi de lutter contre toutes les formes d’exclusion sur le marché du travail par la mise en place de programmes spécifiques à l’intention des personnes handicapées, des nouveaux immigrés, des jeunes et des chômeurs de longue date. La délégation fournira davantage d’informations concrètes sur la question à la séance suivante.

La séance est levée à 18 heures.

-----