Nations Unies

E/C.12/ARG/CO/3

Conseil économique et social

Distr. générale

14 décembre 2011

Français

Original: anglais

Comité des droits économiques, sociaux et culturels

Quarante-septième session

14 novembre-2 décembre 2011

Examen des rapports présentés par les États parties conformément aux articles 16 et 17 du Pacte

Observations finales du Comité des droits économiques, sociaux et culturels

Argentine

1.Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a examiné le troisième rapport périodique de l’État partie sur l’application du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (E/C.12/ARG/3) à ses 44e à 46eséances, les 23 et 24 novembre 2011 (E/C.12/2011/SR.44 à 46), et a adopté, lors de sa 59e séance, le 2 décembre 2011, les observations finales ci-après.

A.Introduction

2.Le Comité se félicite de la présentation du troisième rapport périodique de l’État partie, mais regrette que celui-ci l’ait soumis avec huit ans de retard. Il note également avec satisfaction que des réponses écrites détaillées à la liste des points à traiter (E/C.12/ARG/Q/3/Add.1) lui ont été soumises le 14 novembre 2011, bien que leur présentation tardive ait rendu impossible leur traduction dans les langues de travail du Comité avant le dialogue avec l’État partie.

3.Le Comité apprécie le dialogue constructif qu’il a eu avec l’État partie, qui était représenté par une délégation de haut niveau comprenant des représentants des ministères concernés.

B.Aspects positifs

4.Le Comité se félicite de la ratification par l’État partie du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, le 24 octobre 2011.

5.Le Comité prend note avec satisfaction des mesures législatives et autres prises par l’État partie pour mettre en œuvre les droits économiques, sociaux et culturels, et en particulier:

a)L’inclusion, pour la première fois en 2010, d’une question reposant sur l’auto-identification des Argentins d’ascendance africaine dans le recensement national;

b)La loi (no 25871 de 2004) relative aux migrations qui, notamment, protège le droit de tous les migrants, y compris des migrants en situation irrégulière, d’accéder librement aux services éducatifs et sanitaires (art. 7 et 8);

c)La loi nationale (no 26657 de 2010) relative à la santé mentale, qui promeut les services de santé communautaires et garantit une approche interdisciplinaire;

d)La loi (no 26618 de 2010) relative à l’égalité devant le mariage, qui accorde notamment les mêmes droits conjugaux aux couples de même sexe qu’aux couples hétérosexuels;

e)La loi (no 26639 de 2010) relative à la protection des glaciers, qui préserve les zones glaciaires et périglaciaires de l’État partie;

f)La loi (nº 26075 de 2006) sur l’éducation nationale, qui prévoit notamment l’affectation de 6 % du produit intérieur brut à l’éducation.

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

6.Le Comité note l’absence d’informations précises sur la jurisprudence nationale en ce qui concerne la mise en œuvre des droits énoncés dans le Pacte, et constate dans le même temps que la Constitution donne au Pacte rang constitutionnel et lui garantit la prééminence sur les lois ordinaires qui s’avèrent incompatibles avec le Pacte.

Le Comité demande à l’État partie de donner, dans son prochain rapport périodique, des informations détaillées sur la mise en œuvre des droits énoncés dans le Pacte par les tribunaux. Dans ce contexte, il appelle son attention sur l’Observation générale n o  9 (1998) concernant l’application du Pacte au niveau national.

7.Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ envisager de modifier la procédure de nomination du Defensor del Pueblo afin qu e le poste puisse désormais être pourvu et que toute situation de blocage soit évitée à l’avenir .

8.Le Comité note avec préoccupation que la loi no 26160 (prolongée par la loi no 26554) relative à la possession et la propriété des terres traditionnellement occupées par les peuples autochtones n’a pas été pleinement appliquée. Il est aussi préoccupé par le retard pris dans la délivrance aux communautés autochtones de titres de propriété portant sur ces terres ou territoires (art. 1er, 11, 12 et 15).

Le Comité demande instamment à l ’ État partie de garantir l ’ application intégrale et coordonnée de la loi n o  26160/26 554 , aussi bien au niveau fédéral qu’à l’échelon des provinces . Il recommande à l ’ État partie d’achever le processus de délimitation des terres dans toutes les provinces, comme le prévoient la Constitution et les lois en vigueur, et d ’ accélérer l ’ octroi de titres de propriété communautaires aux autochtones.

9.Le Comité est préoccupé par la persistance des menaces, des déplacements et des expulsions violentes de leurs terres traditionnelles dont sont victimes les peuples autochtones dans de nombreuses provinces. Il déplore aussi l’échec des processus de consultation des communautés autochtones concernées qui, dans certains cas, a abouti à l’exploitation de ressources naturelles sur des territoires traditionnellement occupés ou utilisées par des communautés autochtones sans leur consentement préalable, libre et éclairé, et sans que celles-ci soient indemnisées de manière juste et équitable, ce qui est contraire à la Constitution (art. 75) et à la Convention no 169 de l’Organisation internationale du Travail (OIT) concernant les peuples indigènes et tribaux dans les pays indépendants. Le Comité est particulièrement préoccupé par les conséquences néfastes de l’exploitation de lithium dans les Salinas Grandes (provinces de Salta et de Jujuy) pour l’environnement, l’accès à l’eau, le mode de vie et la subsistance des communautés autochtones (art. 1er, 11 et 12).

Le Comité recommande à l’État partie de prendre les mesures qui s’imposent pour mettre un terme aux violations des droits des peuples autochtones et pour traduire en justice les auteurs de ces infractions à la loi . Il demande instamment à l’État partie d’engager de véritables consultations avec les communautés autochtones avant de concéder à des entreprises du secteur public ou à des tiers l ’exploitation économique de terres et territoires traditionnellement occupés ou utilisés par ces communautés, en s’acquittant de leur obligation d’obtenir le consentement préalable, libre et éclairé de celles qui sont touchées par les activités économiques susmentionnées. Il lui recommande aussi de garantir qu’en aucun cas une telle exploitation ne porte atteinte aux droits énoncés dans le Pacte et que les communautés autochtones soient justement et équitablement indemnisées. Le Comité engage l’État partie à assurer la protection des communautés autochtones pendant l’exécution des projets de prospection et d’exploitation minières. Concernant les Salinas Grandes, il demande instamment à l’État partie de se conformer à la décision de la Cour suprême, qui sera rendue . Dans ce contexte, il rappelle s a Déclaration sur les obligations des États parties concernant le secteur des entreprises et les droits économiques, sociaux et culturels (E/C.12/2011/1).

10.Le Comité est préoccupé par les cas où l’utilisation accrue de pesticides chimiques et de soja transgénique dans des régions traditionnellement habitées ou exploitées par des communautés autochtones a eu des conséquences néfastes pour les communautés concernées. Il s’inquiète de ce que ces communautés ont de plus en plus de mal à pratiquer leur agriculture traditionnelle, ce qui risque d’entraver considérablement leur accès à des ressources alimentaires sûres, suffisantes et d’un coût abordable. Le Comité note aussi l’ampleur du déboisement, qui force les peuples autochtones à quitter des territoires qu’ils occupent ou utilisent traditionnellement, et ce, malgré la loi no 2633 relative à la protection des forêts. Il est également préoccupé par le fait que les activités susmentionnées sont souvent réalisées sans procéder à une véritable consultation préalable des groupes de population concernés (art. 1er, 11, 12 et 15).

Le Comité demande instamment à l ’ État partie de garantir la protection effective de s moyens de subsistance des communautés autochtones et de la jouissance de leur s droits économiques, sociaux et culturels , et de concevoir des garanties d’ordre institutionnel et de procédure propres à assurer la participation effective des communautés autochtones à la prise de décisions sur des sujets les concernant. Il recommande en outre à l ’ État partie de veiller à l ’application intégrale de la loi n o  2633 et d ’ autres textes législat ifs relatifs à la protection de ses ressources non renouvelables, afin de lutter contre le déboisement .

11.Le Comité est préoccupé par le fait que, depuis 2007, l’introduction de diverses méthodes statistiques dans le système national (INDEC − Institut national de la statistique et du recensement), qui ne sont pas toujours accessibles au public, fait obstacle à l’interprétation correcte des données et à la comparaison des progrès et des difficultés en ce qui concerne la jouissance des droits énoncés dans le Pacte. Il est également préoccupé de noter les divergences en matière de données et de calculs entre certaines statistiques officielles provinciales et nationales ainsi que les doutes émis par des organisations civiles, des établissements de recherche et des institutions financières nationales et internationales quant à la crédibilité des données produites par l’INDEC (art. 2).

Le Comité souligne l ’ importance de disposer de données fiables et complètes pour élaborer de s politiques publiques et les mettre en œuvre. Il recommande à l ’ État partie de prendre les mesures qui s ’ imposent pour que ces statistiques publiques puissent être comparées aux données produites par les institutions internationales compétentes . Il lui recommande aussi de veiller à ce que les méthodes employées et les données recueillies par l ’ INDEC pendant ses enquêtes soient accessibles aux utilisateurs extérieurs et diffusées comme il convient .

12.Le Comité regrette que les données communiquées sur les droits énoncés dans le Pacte ne soient pas présentées de manière comparative et ventilées par année, comme il l’avait demandé dans ses précédentes observations finales.

L’État partie est prié de donner, dans son prochain rapport périodique, des données ventilées par année sur chacun des droits énoncés dans le Pacte, en tenant compte des motifs interdits de discrimination.

13.Le Comité s’inquiète des cas où des agents de sécurité de l’État ou du secteur privé ont engagé des représailles et ont fait un usage excessif de la force contre des personnes participant à des activités de défense des droits économiques, sociaux et culturels, en particulier lors de conflits fonciers.

Le Comité demande instamment à l’État part ie de protéger les militants de mouvements sociaux et les défenseurs des droits de l’homme contre toute forme d’intimidation, toute menace et tout usage excessif de la force par des agents de sécurité de l’État et du secteur privé. Il lui demande aussi de veiller à ce que toutes les allégations de représailles et de mauvais traitements fassent l’objet d’enquêtes promptes et exhaustives et que les auteurs de tels actes soient traduits en justice.

14.Le Comité exprime à nouveau sa préoccupation au sujet des inégalités persistantes existant entre les femmes et les hommes dans la jouissance de leurs droits économiques, sociaux et culturels, en particulier dans le secteur de l’emploi (E/C.12/1/Add.38, par. 17) (art. 3 et 10).

Le Comité demande instamment à l ’ État partie de renforcer ses mesures législatives et autres en vue de parvenir à l ’ égalité effective des droits des hommes et des femmes et de lutter contre toutes les formes de discrimination à l ’ égard de ces dernières . À ce propos, il rappelle son Observation générale n o  16 (2005) concernant le droit égal de l ’ homme et de la femme au bénéfice de tous les droits économiques, sociaux et culturels . Il réitère la recommandation qu ’ il a déjà adressée à l ’ État partie de redoubler d ’ efforts pour promouvoir l ’ égalité des sexes dans tous les domaines de la vie. En ce qui concerne l ’ emploi, le Comité encourage l ’ État partie à examiner les moyens légaux, les mesures de renforcement des capacités et les services qui permettraient aux femmes et aux hommes de concilier responsabilités professionnelles et responsabilités familiales. Il l’engage aussi à promouvoir l ’ emploi des femmes dans le secteur formel de l ’ économie.

15.Le Comité note avec inquiétude qu’un grand nombre de travailleurs sont employés dans l’économie informelle dans l’État partie et déplore qu’une forte proportion d’entre eux, dont les travailleurs migrants, n’ait pas accès au système de sécurité sociale, en particulier aux régimes de retraite. Il se déclare aussi préoccupé par la discrimination en matière de conditions de travail et de salaire minimum à laquelle sont soumis en particulier les travailleurs exerçant des activités externalisées (tercerizados) ou temporaires et les femmes qui sont employées comme domestiques, dans l’industrie textile et dans le secteur agricole (art. 6 et 7).

Le Comité demande instamment à l ’ État partie de continuer de s’efforcer de réduire la taille du secteur informel de l ’ économie afin de favoriser l’emploi dans le secteur formel et, ce faisant, d ’ assurer à tous les travailleurs la pleine jouissance des droits économiques et sociaux. Il lui recommande d ’ étendre l ’ application de la législation relative au salaire minimum aux secteurs auxquels c elle -ci ne s ’ applique toujours pas . Il lui recommande aussi de prendre des mesures afin d ’ assurer une protection juridique complète aux travailleurs, quel que soit leur secteur d’activité . Il encourage en outre l ’ État partie à envisager de modifi er l es règles de résidence applicables aux travailleurs migrants, conformément à la Constitution argentine et à la loi relative aux migrations , afin que ceux-ci aient accès aux prestations sociale s du régime non contributif .

16.Le Comité est préoccupé par le fait que le harcèlement sexuel au travail n’est expressément interdit ni dans le droit pénal ni dans le droit du travail de l’État partie et n’est pas expressément qualifié de délit (art. 7 b)).

Le Comité engage vivement l ’État partie à a pprouver et à appliquer des mesures législatives qui interdisent expressément le harcèlement sexuel au travail, et le rendent passible de sanctions prévues par le droit pénal et le droit du travail . Il lui recommande aussi de lancer des campagnes publiques de sensibilisation au harcèlement sexuel et d’accorder une protection complète aux victimes.

17.Le Comité est préoccupé par la traite d’êtres humains dans l’État partie et regrette les lacunes de la loi no 26364 sur la question. Il est préoccupé également par l’insuffisance des mesures prévues pour la réadaptation des victimes de traite et d’exploitation (art. 10, par. 3).

Le Comité recommande à l’État partie d’accélérer le processus de révision de sa législation sur la lutte contre la traite d’êtres humains en tenant compte des normes internationales. Il recommande également à l’État partie d’accroître les ressources allouées à la prévention de la traite d’êtres humains, à la poursuite et à la condamnation des responsables et à l’aide aux victimes, ainsi qu’au renforcement de la coordination entre tous les niveaux.

18.Le Comité exprime à nouveau sa préoccupation au sujet des violences à l’égard des femmes signalées dans l’État partie, en particulier de la violence familiale (E/C.12/1/Add.38, par. 25). Il est aussi préoccupé par la coordination insuffisante entre les divers niveaux de gouvernance, qui constitue un obstacle important à une action efficace contre la violence à l’égard des femmes (art. 3 et 10).

Le Comité recommande à l’État partie de continuer de sensibiliser l’opinion au caractère délictuel de la violence familiale et de traduire en justice les auteurs d’actes de ce type. Il recommande aussi à l’État partie de renforcer ses programmes de conseil juridique, ainsi que d’améliorer l’accès à des foyers et à des services de soutien psychosocial pour les victimes. Le Comité engage l’État partie à veiller à ce que des ressources financières suffisantes soient allouées au Conseil national des femmes ( Consejo Nacional de las Mujeres ) afin de lui permettre d’atteindre ses objectifs.

19.Le Comité regrette que des irrégularités dans l’application de la loi (no 23551) sur les syndicats entravent l’exercice des droits du travail et des droits syndicaux, en contradiction avec la Constitution argentine et la Convention no 87 (1948) de l’OIT concernant la liberté syndicale et la protection du droit syndical. Il s’agit notamment des difficultés et des retards constatés dans le processus d’enregistrement des syndicats par le Ministère du travail, du renvoi de travailleurs qui prennent part à des manifestations, et des actes de violence dont sont victimes des responsables et des membres de syndicats (art. 8).

Le Comité recommande à l’État partie d’envisager d’adopter les modifications nécessaires de la loi sur les syndicats de façon à reconnaître les droits collectifs fondamentaux de toutes les catégories de travailleurs et de syndicats et à assurer la pleine conformité de la législation nationale avec les obligations internationales de l’Argentine. À cet égard, il recommande aussi à l’État partie de rendre applicables mutadis mutandis à tous les travailleurs et syndicats les décisions pertinentes de la Cour suprême. Il demande instamment à l’État partie de veiller à ce que l’enregistrement des syndicats soit effectué conformément à l’article 8 du Pacte et dans les délais prévus. Il rappelle aussi à l’État partie que des représailles comme la perte d’emploi pour avoir pris part à des manifestations et des grèves qui sont organisées conformément à la loi doivent être interdites et que les victimes de ces atteintes doivent obtenir réparation.

20.Le Comité s’inquiète de ce que les conditions à remplir pour bénéficier de l’allocation universelle pour enfants (Asignación Universal por Hijo), qui est accordée par la loi, excluent de fait certains groupes comme les migrants et leurs enfants.

Le Comité engage l’État partie à envisager d’adopter toutes les mesures nécessaires pour garantir l’application sans restriction de l’allocation universelle pour enfants, en particulier aux enfants appartenant à des groupes marginalisés et défavorisés, comme les enfants de travailleurs migrants en situation irrégulière et les enfants de personnes privées de liberté.

21.Le Comité exprime à nouveau sa préoccupation au sujet de la pénurie de logements qui persiste dans l’État partie (E/C.12/1/Add.38, par. 20) en raison de l’inadéquation entre les besoins de larges secteurs de la société et l’offre de logements suffisants et abordables. L’absence de données analytiques officielles fiables dans ce domaine constitue un obstacle important à toute solution efficace à ce problème. Le Comité note avec préoccupation que la spéculation sur les marchés foncier et immobilier et sur celui de la construction a créé des difficultés d’accès au logement pour les populations à revenus faible et moyen. Il réaffirme aussi son inquiétude au sujet des expulsions forcées d’individus et de groupes défavorisés et marginalisés qui sont contraires aux obligations de l’État partie au regard du Pacte et qui touchent en particulier les migrants et les peuples autochtones (art. 11, par. 1).

Le Comité demande instamment à l’État partie d’adopter une politique de logement qui vise à assurer l’accès de tous à un logement suffisant et abordable, dont la sécurité d’occupation soit garantie par la loi. Il engage l’État partie à lutter efficacement contre la spéculation sur les marchés foncier et immobilier et sur celui de la construction, en tenant compte de son Observation générale n o  4 (1991) sur le droit à un logement suffisant. Le Comité demande aussi instamment à l’État partie d’adopter des mesures précises, y compris législatives, pour faire en sorte que les personnes expulsées de force reçoivent un logement de remplacement ou un dédommagement juste et équitable conformément à l’Observation générale n o  7 (1997) sur les expulsions forcées.

22.Le Comité exprime à nouveau sa préoccupation devant l’insuffisance des services de santé procréative auxquels ont accès les jeunes filles et les femmes dans l’État partie, et dont les carences se soldent par un taux de mortalité maternelle important et un nombre de grossesses d’adolescentes globalement élevé (E/C.12/1/Add.8, par. 24). Il relève en particulier des disparités importantes entre les provinces. Il note aussi avec préoccupation que les avortements non médicalisés restent une des principales causes de mortalité maternelle (art. 10 à 12).

Le Comité exhorte l’État partie à faire en sorte que la loi sur la santé sexuelle et procréative soit appliquée dans toutes les provinces, et à garantir à tous, en particulier aux adolescents, l’accès à une éducation et des services complets de santé sexuelle et procréative, en vue notamment de remédier au taux de mortalité maternelle élevé. Il recommande à l’État partie de mener des programmes visant à mieux sensibiliser le public à la santé sexuelle et procréative. Il lui recommande aussi de prendre les mesures nécessaires en vue de garantir l’accès à des procédures d’avortement autorisées par la loi, afin de réduire le nombre de décès maternels qui pourraient être évités, et de garantir l’accès aux installations, fournitures et prestations médicales, afin de réduire les risques qui précèdent et qui suivent l’avortement.

23.Le Comité s’inquiète du niveau élevé de la consommation de tabac dans l’État partie, surtout parmi les femmes et les jeunes (art. 12, par. 1).

Le Comité recommande à l’État partie de ratifier et d’appliquer la Convention-cadre de l’OMS pour la lutte antitabac et d’élaborer des politiques efficaces en matière de sensibilisation, de fiscalité et de tarification pour réduire la consommation de tabac, en ciblant particulièrement les femmes et les jeunes.

24.Le Comité constate avec préoccupation que, malgré les efforts déployés pour garantir l’accès universel à l’éducation, il y a encore des enfants qui restent en dehors du système éducatif, qui sont analphabètes, qui redoublent et qui abandonnent l’école, en particulier parmi les communautés autochtones défavorisées et marginalisées. Il note aussi avec regret que les communautés autochtones n’ont pas toujours droit à une éducation bilingue interculturelle (art. 13).

Le Comité recommande à l’État partie d’appliquer de manière effective la législation existante pour garantir le droit à l’éducation et pour remédier en particulier aux problèmes d’exclusion du système éducatif, d’analphabétisme, de redoublement et d’abandon scolaire. Il demande instamment à l’État partie de continuer de s’efforcer de remédier aux disparités entre les différents groupes sociaux et promouvoir le développement de l’éducation dans les provinces et groupes défavorisés et marginalisés. Le Comité recommande aussi à l’État partie de prendre des mesures efficaces pour garantir l’accès des peuples autochtones à l’éducation interculturelle et veiller à ce que celle-ci soit adaptée à leurs besoins particuliers.

25.Le Comité regrette l’insuffisance des renseignements fournis par l’État partie au sujet de la protection des droits collectifs des peuples autochtones sur leurs connaissances traditionnelles et leur patrimoine culturel, notamment leurs terres ancestrales, en tant que partie intégrante de leur identité culturelle (art. 15).

Le Comité recommande à l’État partie de donner, dans son prochain rapport périodique, des informations détaillées sur les mesures précises et effectives prises, notamment dans le domaine législatif, en vue de reconnaître et protéger les connaissances traditionnelles et l’héritage culturel des peuples autochtones, notamment leurs terres ancestrales, conformément à ses Observations générales n o 17 (2005) sur le droit de chacun de bénéficier de la protection des intérêts moraux et matériels découlant de toute production scientifique, littéraire ou artistique dont il est l’auteur, et n o 21 (2009) sur le droit de chacun de participer à la vie culturelle.  

26. Le Comité encourage l’État partie à donner, dans son prochain rapport périodique, davantage d’informations détaillées sur les mesures adoptées pour garantir le droit de chacun de bénéficier du progrès scientifique et de ses applications, conformément au paragraphe 1 b) de l’article 15 du Pacte.

27. Le Comité demande à l’État partie de diffuser largement les présentes observations finales dans tous les secteurs de la société, en particulier auprès des agents de l’État, des magistrats et des organisations de la société civile, de les faire traduire et leur donner la plus large publicité possible, et de l’informer des mesures prises pour y donner suite dans son prochain rapport périodique, ou plus tôt, selon qu’il conviendra. Il invite aussi l’État partie à continuer d’associer les institutions nationales des droits de l’homme, les organisations non gouvernementales et d’autres membres de la société civile au processus d’élaboration de plans pour l’application des présentes observations finales et aux délibérations menées au niveau national avant la soumission de son prochain rapport périodique.

28.Le Comité demande à l’État partie de soumettre, avant le 2 décembre 2016, son quatrième rapport périodique, établi conformément aux directives révisées du Comité concernant l’établissement des rapports adoptées en 2008 (E/C.12/2008/2).