Observations finales concernant le quatrième rapport périodique de la Mongolie *

Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a examiné le quatrième rapport périodique de la Mongolie sur l’application du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (E/C.12/MNG/4) à ses 26e et 27e séances (E/C.12/2015/SR.26 et 27), tenues les 3 et 4 juin 2015, et a adopté à sa 50e séance, le 19 juin 2015, les observations finales ci-après.

A.Introduction

Le Comité accueille avec satisfaction le quatrième rapport périodique de l’État partie, bien qu’il ait été soumis avec un retard considérable, les renseignements complémentaires fournis en réponse à la liste de points à traiter (E/C.12/MNG/Q/4/Add.1), le document de base commun de l’État partie (HRI/CORE/MNG/2013) et les réponses apportées oralement par la délégation et les réponses complémentaires soumises par écrit. Le Comité se félicite également du dialogue constructif qu’il a eu avec la délégation de l’État partie.

B.Aspects positifs

Le Comité prend note avec satisfaction de la ratification du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, en 2010.

Le Comité constate également avec satisfaction que l’État partie a ratifié les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme suivants ou y a adhéré :

a)La Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, en 2015;

b)Le deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, visant à abolir la peine de mort, en 2012;

c)La Convention relative aux droits des personnes handicapées et le Protocole facultatif s’y rapportant, en 2009.

Le Comité prend note avec satisfaction de l’adoption par l’État partie des mesures législatives et mesures de politique générale suivantes :

a)La loi relative à la fourniture d’une aide juridictionnelle aux défendeurs indigents (2013);

b)La loi relative à la lutte contre la traite des êtres humains (2012);

c)La loi relative aux élections législatives (2012);

d)La loi relative à l’égalité des sexes (2011) et la stratégie d’application correspondante (2013-2016);

e)La loi relative à la transparence de l’information et au droit à l’information (2011);

f)La Stratégie nationale de développement (2007-2021);

g)Le Programme national en faveur du vieillissement en bonne santé et en faveur de la santé des personnes âgées (2014-2020);

h)La politique de l’État relative à l’éducation (2014).

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Réforme législative

Le Comité prend note de ce que de nombreuses lois font actuellement l’objet d’un examen en vue d’harmoniser la législation nationale avec les dispositions du Pacte, mais reste préoccupé par la lenteur de la réforme législative et par le peu de consultations menées auprès de la société civile.

Le Comité recommande à l’État partie de redoubler d’efforts pour mener à terme le processus de réforme législative de manière à mettre sa législation en conformité avec les dispositions du Pacte. L’État partie devrait également assurer la participation active de la société civile tout au long de ce processus.

Institution nationale des droits de l’homme

Le Comité prend acte avec satisfaction de l’amélioration de l’accès à la Commission nationale des droits de l’homme de la Mongolie, notamment dans les provinces, mais reste préoccupé par le fait que les ressources allouées à cet organe sont insuffisantes et que ses recommandations ne sont pas suffisamment prises en considération lors de l’élaboration des projets de loi (art. 2, par. 1).

Le Comité recommande à l’État partie de continuer de renforcer les capacités de la Commission nationale des droits de l’homme de la Mongolie et d’accroître les ressources dont elle dispose en vue d’en garantir la pleine indépendance, conformément aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris). Il devrait en outre faire en sorte que les recommandations de la Commission soient davantage prises en considération lors de l’élaboration des projets de loi.

Droits des éleveurs

Le Comité est préoccupé par les incidences négatives des projets d’exploitation minière sur les droits économiques, sociaux et culturels des éleveurs ainsi que par l’insuffisance du cadre juridique relatif à la protection des droits de ces personnes. Il est particulièrement préoccupé par les faits suivants :

a)Les atteintes constantes aux droits des éleveurs nomades sur leurs pâturages, leurs prairies de fauche et leurs ressources en eau résultant des activités minières menées sur leurs terres traditionnelles;

b)Le fait que le consentement préalable, libre et éclairé des éleveurs n’est pas recueilli avant la délivrance de permis d’exploitation minière portant sur des ressources situées dans le sous-sol de leurs terres traditionnelles;

c)L’indemnisation insuffisante accordée aux éleveurs affectés par des projets d’exploitation minière (art. 1, par. 2; 2, par. 2; 11 et 15).

Le Comité recommande à l’État partie  :

a) De réformer le cadre juridique régissant l’exploitation minière et de suivre de près l’application des lois s’y rapportant afin de protéger les droits qu’ont les éleveurs sur les pâturages, les prairies de fauche et les ressources en eau;

b) De veiller à ce qu’il soit effectivement procédé à de véritables consultations auprès des éleveurs avant l’octroi de permis d’exploitation minière qui ont une incidence sur leurs droits, et de garantir que les intéressés soient adéquatement indemnisés;

c) De mettre en place des mécanismes de réclamation efficaces qui soient accessibles aux éleveurs affectés par les activités minières et d’un coût abordable.

Exploitation minière et protection de l’environnement

Le Comité est préoccupé par l’insuffisance du cadre juridique régissant le secteur minier en ce qui concerne la protection de l’environnement ainsi que par l’existence de lois contradictoires et l’absence d’études d’impact sur l’environnement.

Le Comité prie instamment l’État partie  :

a) De réformer, à titre prioritaire, ses lois régissant la protection de l’environnement et le secteur minier et, à cet égard, d’envisager de mettre en œuvre les recommandations s’y rapportant formulées par le Groupe de travail sur la question des droits de l’homme et des sociétés transnationales et autres entreprises (2013);

b) De procéder à des évaluations des incidences sur les droits de l’homme et sur l’environnement avant que soient accordés des permis d’exploitation minière, et de veiller à ce que toutes les parties prenantes concernées par de tels projets prennent effectivement part aux processus d’évaluation.

Accès à la justice et action en justice visant à défendre l’intérêt général

Le Comité note avec préoccupation que l’accès aux centres d’aide juridictionnelle est limité dans les zones rurales. Il note également que, dans les affaires d’intérêt général, les organisations non gouvernementales n’ont que des possibilités restreintes de saisir les tribunaux, en particulier la Cour constitutionnelle (art. 2, par. 1).

Le Comité recommande à l’État partie d’accorder davantage de ressources financières et humaines aux centres d’aide juridictionnelle, en particulier dans les zones rurales. Il lui recommande également d’envisager de conférer aux organisations non gouvernementales s’occupant des affaires d’intérêt général, en particulier celles se rapportant aux droits économiques, sociaux et culturels, la capacité d’ester en justice, y compris devant la Cour constitutionnelle.

Corruption

Le Comité est préoccupé par l’ampleur de la corruption dans l’État partie, y compris au sein de l’appareil judiciaire et de la fonction publique, malgré l’adoption de mesures anticorruption (art. 2, par. 1).

Le Comité invite instamment l’État partie à redoubler d’efforts pour lutter contre la corruption, y compris au sein de l’appareil judiciaire et de la fonction publique. Il engage l’État partie à garantir la transparence et l’indépendance de ses institutions, ainsi qu’à enquêter sur toutes les allégations de corruption et à assurer l’application effective des lois réprimant la corruption. À cette fin, il invite l’État partie à appliquer une politique de tolérance zéro à l’égard de la corruption et à rendre les juges, les procureurs et la police attentifs à la responsabilité qui leur incombe d’assurer une application rigoureuse de la loi. L’État partie devrait également protéger les droits de l’homme des personnes qui mènent des activités de lutte contre la corruption, en particulier les victimes, les personnes qui dénoncent les pratiques répréhensibles et les témoins et leurs avocats.

Non-discrimination

Le Comité prend note de ce que la Constitution et diverses lois comportent des dispositions interdisant la discrimination mais relève avec préoccupation l’absence de loi générale couvrant toutes les formes de discrimination, dont celles fondées sur l’orientation sexuelle, l’identité de genre et le handicap (art. 2, par. 2).

Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures pour adopter une loi générale relative à la lutte contre la discrimination qui assure à tous une protection contre la discrimination, qui garantisse l’exercice des droits économiques, sociaux et culturels et qui couvre toutes les formes de discrimination interdites, dont celles fondées sur l’orientation sexuelle, l’identité de genre et le handicap. Le Comité appelle l’attention de l’État partie sur son observation générale n o  20 (2009) concernant la non-discrimination dans l’exercice des droits économiques, sociaux et culturels.

Discrimination à l’égard des lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexués

Le Comité prend note avec satisfaction des renseignements communiqués par la délégation de l’État partie concernant l’inclusion de l’orientation sexuelle comme motif de discrimination interdit dans le projet de Code pénal révisé et le projet de loi sur le travail. Il note toutefois avec préoccupation la persistance de la discrimination à l’égard des lesbiennes, des gays, des bisexuels, des transgenres et des intersexués dans les domaines de l’emploi, du logement, des soins de santé et de l’éducation. Le Comité est en outre préoccupé par le fait que les couples de même sexe ne sont pas reconnus, ce qui fait obstacle à leur jouissance des droits visés par le Pacte (art. 2, par. 2).

Le Comité recommande à l’État partie  :

a) De prendre toutes les mesures voulues, en particulier des mesures de sensibilisation, pour que les lesbiennes, les gays, les bisexuels, les transgenres et les intersexués ne soient pas victimes de discrimination fondée sur l’orientation sexuelle ou l’identité de genre;

b) De reconnaître que les couples de même sexe ont le droit de jouir de leurs droits économiques, sociaux et culturels sur un pied d’égalité.

Égalité entre hommes et femmes

Le Comité prend note avec satisfaction de l’adoption de la loi relative à l’égalité des sexes (2011), qui s’accompagne d’une stratégie d’application, mais s’inquiète de la persistance de stéréotypes sexistes sur les rôles et responsabilités des hommes et des femmes au sein de la famille et de la société. Le Comité est également préoccupé par le fait que les femmes continuent d’être faiblement représentées au Parlement et aux postes de responsabilité. En outre, il fait part de la préoccupation que lui inspire la persistance d’offres d’emplois qui établissent une discrimination fondée sur le sexe, du harcèlement sexuel sur le lieu de travail et de la forte concentration de femmes dans les secteurs où les rémunérations sont faibles (art. 3 et 7).

Le Comité recommande à l’État partie  :

a) D’intensifier ses efforts visant à instaurer une égalité de fait entre les hommes et les femmes dans la jouissance des droits économiques, sociaux et culturels, notamment en utilisant les m é dias , en lançant des campagnes nationales de sensibilisation et en recourant plus largement aux mesures spéciales temporaires;

b) De contrôler et d’assurer la bonne application de la loi relative à l’égalité entre les sexes et de faire figurer dans son prochain rapport périodique des renseignements sur son incidence;

c) D’interdire immédiatement la pratique des offres d’emplois qui établissent une discrimination fondée sur le sexe et, à cette fin, d’accélérer l’adoption du projet de loi sur l’emploi révisé et de prendre d’autres mesures législatives et administratives nécessaires pour assurer l’égalité des sexes dans le domaine du travail, notamment pour combattre le harcèlement sexuel;

d) D’intensifier ses efforts visant à faciliter et à favoriser l’accès des femmes à des emplois généralement occupés en majorité par des hommes afin de mettre fin à la ségrégation professionnelle fondée sur le sexe.

Chômage

Le Comité est préoccupé par le taux de chômage élevé dans l’État partie, malgré sa croissance économique rapide. Il est particulièrement préoccupé par le nombre disproportionné de personnes handicapées, d’éleveurs et de jeunes parmi les chômeurs (art. 6).

Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures efficaces pour réduire le taux de chômage et de faire en sorte que la croissance économique soit plus équitable. À cette fin, il l’invite à cibler en particulier les groupes qui sont plus exposés au chômage, notamment les personnes handicapées, les éleveurs et les jeunes. À cet égard, l’État partie devrait renforcer la mise en œuvre des programmes ciblés et mesures spéciales qui ont déjà été mis en place, notamment au titre du projet de loi relatif au travail, et adopter et appliquer effectivement d’autres mesures telles que des mesures d’incitation à l’intention des employeurs, selon que de besoin.

Petits exploitants miniers

Le Comité est préoccupé par la situation de nombre d’éleveurs qui ont perdu leur cheptel et qui se livrent à des activités minières artisanales et à petite échelle. Le Comité s’inquiète de ce que ces activités sont généralement menées en dehors d’un cadre réglementaire et se caractérisent par des conditions de travail mauvaises et dangereuses, notamment par la faiblesse de la rémunération et l’emploi de produits chimiques dangereux tels que le mercure (art. 2, par. 2; 6; 7 et 12).

Le Comité recommande à l’État partie de prendre les mesures nécessaires pour protéger les droits des personnes qui mènent des activités minières artisanales et à petite échelle, notamment en se dotant d’un cadre juridique approprié. Il devrait entre autres assurer l’accès des mineurs artisanaux et des petits exploitants miniers à la terre et à des permis en vue de renforcer et de faire respecter la réglementation relative au traitement sans mercure. En outre, il devrait envisager de réduire les taxes, le cas échéant, pour légaliser les activités de ces personnes.

Conditions de travail

Le Comité est préoccupé par l’insuffisance des normes relatives à la santé et à la sécurité, en particulier dans les secteurs de la construction de routes, de l’énergie et de l’exploitation minière, et par le nombre élevé d’accidents mortels, qui surviennent malgré les mesures législatives prises pour remédier à cette situation. Le Comité s’inquiète également du faible nombre d’inspecteurs du travail (art. 7).

Le Comité invite instamment l’État partie à assurer l’application rigoureuse des lois et règlements relatifs à la santé et la sécurité au travail et à élaborer et adopter d’autres mesures, selon qu’il conviendra, notamment à ratifier la Convention (n o  81) sur l’inspection du travail, 1947, et la Convention (n o 129) sur l’inspection du travail (agriculture), 1969, de l’Organisation internationale du Travail (OIT). Le Comité recommande également à l’État partie d’accroître le nombre d’inspecteurs du travail ayant suivi une formation adéquate et de veiller à ce qu’ils soient uniformément répartis dans le pays.

Exploitation économique des enfants

Le Comité est préoccupé par la persistance du travail des enfants, particulièrement en zone rurale et dans l’agriculture et le secteur privé. Il est également préoccupé par le fait que des enfants continuent à être affectés à des travaux dangereux et risqués, en particulier dans les secteurs de l’extraction minière et des courses de chevaux (art. 10).

Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures efficaces pour prévenir le travail des enfants et d’enquêter sur ce phénomène. Il lui recommande aussi de redoubler d’efforts pour mettre un terme à l’affectation d’enfants à des travaux dangereux et risqués, notamment en appliquant strictement le décret gouvernemental n o  107, qui interdit l’affectation d’enfants à de tels travaux, et de relever l’âge minimum des jockeys de façon à le rendre conforme aux normes internationales en la matière.

Droits syndicaux

Le Comité est préoccupé par le fait que les droits syndicaux ne sont pas toujours garantis et que les travailleurs des grandes sociétés d’extraction minière risquent d’être licenciés s’ils mènent des activités syndicales (art. 8).

Le Comité recommande à l’État partie de faire en sorte que des dispositions relatives aux droits syndicaux soient incorporées dans le projet révisé de loi sur le travail et dans toute autre législation, si besoin est, et de veiller à la stricte application de ces textes.

Sécurité sociale

Le Comité est préoccupé par le fait que la sécurité sociale n’offre pas de couverture universelle dans l’État partie. Il trouve particulièrement inquiétante la fragmentation des programmes actuels de sécurité sociale, qui ne répondent pas aux besoins des plus démunis de la société. Le Comité est aussi préoccupé par le caractère inadéquat des prestations de sécurité sociale (art. 9).

Le Comité recommande à l’État partie d’accélérer la réforme du système de sécurité sociale et de veiller à ce que les régimes de protection sociale soient mis en œuvre selon des critères non discriminatoires et ciblent les groupes et les individus les plus vulnérables. À cet égard, il prie l’État partie  :

a) De consulter davantage les partenaires sociaux et les titulaires de droits;

b) De veiller à ce que les prestations sociales soient indexées au coût de la vie et assurent un niveau de vie suffisant aux bénéficiaires et aux membres de leur famille;

c) De mettre sur pied un socle de protection sociale afin de s’acquitter de son obligation de mettre en œuvre le droit à la sécurité sociale, conformément à l’observation générale n o  19 (2008) du Comité concernant le droit à la sécurité sociale, à la recommandation n o  202 (2012) de l’OIT concernant les socles de protection sociale et à la déclaration du Comité sur les socles de protection sociale (E/C.12/2015/1);

d) D’accélérer l’adhésion à la Convention (n o  102) de l’OIT concernant la sécurité sociale (norme minimum), 1952.

Violence à l’égard des femmes et des enfants

Le Comité se dit une nouvelle fois préoccupé par l’ampleur du phénomène de la violence intrafamiliale à l’égard des femmes et des enfants dans l’État partie, malgré les mesures, notamment législatives, prises pour le combattre. Il est aussi préoccupé par le nombre limité d’affaires ayant donné lieu à des poursuites au titre de la loi relative à la lutte contre la violence intrafamiliale, et par la connaissance limitée de cette loi et le caractère inadéquat des structures et services offrant une protection aux victimes de ce type de violence (art. 10).

Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures pour faire appliquer efficacement la loi relative à la lutte contre la violence intrafamiliale. Il devrait poursuivre les responsables et garantir une protection et une assistance efficaces aux victimes, notamment en créant suffisamment de foyers dans les zones rurales et reculées, et en appuyant l’action menée dans ce domaine par la société civile. Le Comité engage en outre l’État partie à mettre en œuvre des programmes de sensibilisation et de formation à l’intention des organes judiciaires, des agents des forces de l’ordre et des travailleurs sociaux au sujet de la loi et des droits des femmes.

Pauvreté

Le Comité est préoccupé par le fait que, malgré une croissance économique soutenue, le taux de pauvreté a progressé au cours des dernières années dans l’État partie, en particulier chez les femmes, les enfants, les personnes handicapées et les éleveurs vivant dans des zones reculées. Il est aussi préoccupé par l’inefficacité des mesures prises pour combattre la pauvreté, qui s’explique notamment par la fragmentation des programmes et le manque de coordination de l’action publique (art. 2 et 11).

Rappelant sa déclaration sur la pauvreté et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (E/C.12/2001/10), le Comité exhorte l’État partie  :

a) À adopter des mesures visant à faire fond de la croissance économique pour réduire la pauvreté, notamment en veillant à ce que tous les Mongols tirent profit des bénéfices réalisés par l’industrie minière;

b) À adopter une stratégie nationale de réduction de la pauvreté fondée sur les normes relatives aux droits de l’homme, intégrée dans les programmes de développement provinciaux et locaux, et soutenue par un mécanisme de mise en œuvre assorti d’échéances et d’instruments de contrôle;

c) À désigner un ministère chargé au premier chef de la mise en œuvre de la stratégie de réduction de la pauvreté et de la création et de la mise en œuvre de mécanismes adéquats de contrôle et de responsabilité.

Accès à un logement convenable

Le Comité est préoccupé par la pénurie de logements qui touche l’État partie, spécialement dans les zones urbaines et par l’apparition provoquée par la progression des migrations internes d’habitats informels autour des zones urbaines, qui se caractérisent par la pauvreté et par la rareté des services de base. Le Comité s’inquiète aussi des répercussions néfastes, qui se manifestent notamment par des expulsions, de l’application du Règlement relatif au réaménagement des zones à forte concentration de gers (yourtes) sur la situation des personnes dont les terres font l’objet d’un plan de réaménagement, en particulier celles qui ne sont pas titulaires de droits de propriété foncière, lesquelles ne sont pas adéquatement indemnisées et ne sont pas relogées dans des zones où des services sociaux de base sont assurés (art. 11).

Rappelant ses observations générales n o  4 (1991) sur le droit à un logement suffisant et n o  7 (1997) sur les expulsions forcées, le Comité recommande à l’État partie  :

a) De redoubler d’efforts pour augmenter le nombre de logements destinés à la population, notamment de logements sociaux pour les personnes et les groupes défavorisés et marginalisés, en particulier dans les zones urbaines, en vue de réduire le nombre de personnes vivant dans des implantations sauvages;

b) Dans l’intervalle, de prendre des mesures efficaces pour améliorer les conditions de vie dans ces implantations, notamment en y facilitant l’accès aux services fondamentaux, dont l’eau, l’assainissement, l’éducation et les soins de santé;

c) D’apporter les modifications voulues au Règlement relatif au réaménagement des zones à forte concentration de gers afin qu’il ne porte pas atteinte au droit des personnes qui y vivent à un logement suffisant, dont le droit à la sécurité d’occupation et le droit de ne pas être expulsées sans être adéquatement indemnisées ou relogées dans des zones où elles peuvent bénéficier de services sociaux de base;

d) De se doter d’un cadre juridique relatif aux expulsions forcées qui soit conforme aux normes internationales.

Le droit à l’alimentation

Le Comité est préoccupé par le régime alimentaire déséquilibré de nombreux Mongols, les restrictions imposées aux laboratoires alimentaires indépendants s’agissant de donner des informations à la population sur des questions de sécurité alimentaire, et les renseignements montrant que les légumes contiennent d’importantes quantités de pesticides. Il est aussi préoccupé par la faible valeur des bons d’alimentation et par leur distribution limitée (art. 11).

Le Comité recommande à l’État partie  :

a) De redoubler d’efforts pour garantir l’accès à une alimentation sûre, adéquate et abordable, notamment en intensifiant ses campagnes sur les régimes alimentaires sains, et pour combattre l’obésité et les causes profondes des maladies cardiovasculaires;

b) D’intensifier les efforts qu’il déploie pour mettre un terme à l’insécurité alimentaire et à la faim, notamment en distribuant des bons d’alimentation répondant aux normes nutritionnelles de toutes les personnes dans le besoin, tout en veillant à ce que le ciblage des programmes de distribution de bons d’alimentation n’aboutisse pas à l’exclusion de certains ménages dans le besoin;

c) De renforcer l’indépendance du laboratoire d’État, notamment en améliorant ses ressources humaines et techniques, et de supprimer toute restriction à la capacité des laboratoires alimentaires non étatiques de renseigner la population;

d) De prendre des mesures efficaces pour prévenir l’utilisation de pesticides dans l’alimentation, dissuader de telles pratiques et mener des enquêtes à ce sujet;

e) De tenir compte de l’observation générale n o  12 (1999) sur le droit à une nourriture suffisante et des directives volontaires à l’appui de la concrétisation progressive du droit à une alimentation adéquate dans le contexte de la sécurité alimentaire nationale adoptées en 2004 par l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture.

Eau et assainissement

Le Comité est préoccupé par les disparités entre zones rurales et zones urbaines s’agissant de l’accès à l’eau potable et à l’assainissement. Il est aussi préoccupé par le prix élevé de l’eau dans les zones à forte concentration de gers. Il constate avec inquiétude que les activités de l’industrie minière ont provoqué une pollution de l’eau et des sols (art. 11 et 12).

Rappelant son observation générale n o  15 (2002) relative au droit à l’eau et sa déclaration relative au droit à l’assainissement (E/C.12/2010/1), le Comité exhorte l’État partie à combler les disparités en matière d’accès à l’eau potable et à l’assainissement entre populations rurales et populations urbaines, et d’assurer à chacun un accès abordable à l’eau potable. Il lui recommande en outre de redoubler d’efforts pour remédier aux répercussions des activités minières sur l’eau et le sol.

Pollution de l’air et santé

Le Comité est extrêmement préoccupé par l’augmentation du niveau de la pollution de l’air, particulièrement à Oulan-Bator et dans les zones à forte concentration de gers, et par l’apparition et la propagation des maladies, notamment les affections respiratoires, cardiaques ou pulmonaires (art. 11 et 12).

Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures efficaces pour faire face au niveau croissant de pollution de l’air à Oulan-Bator et dans les zones de gers, notamment en introduisant dans ces zones de nouveaux systèmes de chauffage efficaces du point de vue énergétique.

VIH/sida et autres maladies

Le Comité est préoccupé par l’insuffisance des mesures de prévention du VIH/sida dans l’État partie, notamment par la mise en œuvre limitée des lois sur les soins de santé et la prévention du VIH/sida et des politiques connexes. Il est aussi préoccupé par la pratique du dépistage obligatoire du VIH/sida. Il note en outre avec inquiétude que les cas de cancer du foie sont extrêmement nombreux, ce qui serait dû au fait que l’alcoolisme est largement répandu, et que l’hépatite B et C se propage bien que des mesures aient été prises pour juguler l’épidémie (art. 12).

Le Comité recommande à l’État partie de renforcer les mesures mises en place pour prévenir le VIH/sida, notamment en rétablissant le Comité national sur le sida et en appliquant efficacement les lois et politiques pertinentes. Il lui demande de prendre des mesures législatives et autres pour faire en sorte que le dépistage du VIH/sida se fasse sur une base volontaire et dans le respect de la confidentialité. Le Comité recommande en outre à l’État partie d’intensifier ses efforts en matière de lutte contre l’alcoolisme, notamment en menant des campagnes de sensibilisation, et de renforcer ses mesures de prévention et de traitement en vue de combattre l’hépatite B et C.

Droit à l’éducation

Le Comité est préoccupé par le fait que presque 5 % des enfants âgés de 6 à 11 ans ne sont pas scolarisés. Il constate avec inquiétude que les garçons, les enfants vivant en zones reculées et les enfants appartenant à des groupes minoritaires sont surreprésentés parmi les élèves qui abandonnent l’école prématurément. Il est également préoccupé par les informations faisant état de la détérioration de la qualité de l’enseignement dans les écoles d’Oulan-Bator, de l’état déplorable des infrastructures scolaires et du nombre excessif d’enfants par classe (art. 13 et 14).

Le Comité recommande à l’État partie d’intensifier l’action qu’il mène pour  :

a) Garantir la scolarisation de tous les enfants;

b) Faire face plus efficacement aux facteurs recensés comme motifs de persistance de l’abandon scolaire, en particulier parmi les garçons et les enfants des zones reculées, ou encore les enfants issus de groupes minoritaires;

c) Prévoir les ressources voulues pour que les enfants puissent exercer leur droit à l’éducation à Oulan-Bator, notamment en construisant de nouvelles écoles, en améliorant l’équipement scolaire et en formant les enseignants et le personnel scolaire;

d) Mener des campagnes pour mieux faire comprendre l’importance de l’instruction, notamment auprès des parents.

Éducation pour tous

Le Comité est préoccupé par le fait que nombre d’écoles ne sont pas accessibles aux enfants handicapés, particulièrement en zone rurale, et que ces enfants sont nombreux à ne pas fréquenter l’école. Il trouve également inquiétant le manque d’enseignants formés pour travailler avec les enfants handicapés (art. 2, par. 2 ; 13 et 14).

Le Comité recommande à l’État partie d’assurer l’accès à une éducation inclusive pour les enfants handicapés, notamment par  : la formation obligatoire des enseignants; l’élaboration de plans d’enseignement personnalisés pour les élèves; l’accès physique, sans obstacle, aux écoles et à leurs locaux; et l’allocation de ressources financières suffisantes.

Droits culturels

Le Comité est préoccupé par la mise en œuvre inadéquate de la Politique nationale en faveur des arts et de la culture (2011), s’expliquant principalement par l’allocation limitée de ressources. Il est également inquiet de constater que les efforts menés pour préserver le patrimoine culturel de l’État partie ne suffisent pas, malgré le fait que des mesures ont été prises à cette fin (art. 15).

Le Comité recommande à l’État partie d’allouer les ressources nécessaires pour mettre efficacement en œuvre la Politique nationale en faveur des arts et de la culture. Il lui demande aussi d’en faire davantage pour préserver le patrimoine culturel, notamment en contrôlant et en garantissant l’application stricte de la loi sur la protection du patrimoine culturel (2014), et d’accroître les investissements réalisés dans ce domaine.

D.Autres recommandations

Le Comité recommande à l’État partie de ratifier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille et le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant établissant une procédure de présentation de communications.

Le Comité recommande à l’État partie d’intensifier ses efforts de sensibilisation des membres de l’appareil judiciaire, des avocats et des titulaires de droits au Pacte i nternational relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et au Protocole facultatif s’y rapportant, ainsi qu’à l’opposabilité des droits visés par ces instruments. Le Comité appelle l’attention de l’État partie sur son observation générale n o 9 (1998) concernant l’application du Pacte au plan national.

Le Comité prie l’État partie de traduire les présentes observations finales en mongol et de les diffuser largement à tous les niveaux de la société, en particulier auprès des parlementaires, des fonctionnaires, des autorités judiciaires et des titulaires de droit, et de l’informer dans son prochain rapport périodique de toutes les mesures prises pour donner suite à ces observations. Il invite aussi l’État partie à associer les organisations non gouvernementales et d’autres membres de la société civile au processus de mise en œuvre des présentes observations finales, avant la présentation de son prochain rapport périodique.

Le Comité demande à l’État partie de soumettre son cinquième rapport périodique au plus tard le 30 juin 2020 et l’invite à mettre à jour son document de base commun, au besoin, conformément aux directives harmonisées concernant l’établissement de rapports destinés aux organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme (HRI/GEN/2/Rev.6, chap. I).