Nations Unies

E/C.12/68/D/45/2018

Conseil économique et social

Distr. générale

3 novembre 2020

Français

Original : espagnol

Comité des droits économiques, sociaux et culturels

Décision adoptée par le Comité en vertu du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, concernant la communication no 45/2018 *

Communication présentée par :

A. M. O. et J. M. U.

Victime(s) présumée(s) :

Les auteurs et leurs trois enfants mineurs

État partie :

Espagne

Date de la communication :

15 juin 2018

Date de la décision:

13 octobre 2020

Objet :

Expulsion pour occupation illégale

Question ( s ) de procédure :

Fondement des griefs

Question ( s ) de fond :

Droit à un logement convenable

Article(s) du Pacte :

11 (par. 1)

Article(s) du Protocole facultatif :

2 et 5

1.1Les auteurs de la communication sont A. M. O., de nationalité roumaine, née le 20 novembre 1987, et J. M. U., de nationalité espagnole, né le 12 septembre 1965. Ils agissent en leur nom propre et au nom de leurs trois enfants mineurs, J. M. O., né le 3 juin 2007, A. M. O., né le 5 mars 2009, et A. M. O., née le 9 septembre 2015. Les auteurs affirment qu’ils sont victimes d’une violation des droits garantis à l’article 11 (par. 1) du Pacte parce qu’ils font l’objet d’une ordonnance d’expulsion du logement qu’ils occupent depuis 2015 et ne se sont pas vu proposer de logement de remplacement. Le Protocole facultatif est entré en vigueur pour l’État partie le 5 mai 2013. Les auteurs ne sont pas représentés par un conseil.

1.2Le 10 juillet 2018, agissant par l’intermédiaire de son groupe de travail des communications, le Comité a enregistré la communication et, prenant note des allégations selon lesquelles les auteurs n’avaient pas de logement de remplacement et subiraient donc un préjudice irréparable s’ils étaient expulsés, a demandé à l’État partie de prendre des mesures provisoires et de surseoir à l’exécution de l’expulsion tant que la communication serait à l’examen ou, à défaut, de fournir aux intéressés un logement de remplacement convenable après les avoir véritablement consultés.

1.3Le 18 juillet 2019, à la lumière du changement intervenu dans la situation économique des auteurs, le Comité a décidé, par l’intermédiaire de son groupe de travail sur les communications, de retirer sa demande de mesures provisoires.

1.4Le Comité va tout d’abord résumer les informations fournies et les allégations formulées par les parties, puis il examinera la recevabilité de la communication et exposera ses conclusions.

A.Résumé des informations présentées et des allégations formulées par les parties

Exposé des faits

2.1Jusqu’au 4 avril 2015, la famille vivait dans un logement appartenant aux parents de l’auteur, dans la rue San Felipe, à Oliva (Valence). À cette date, toutefois, le logement a brûlé. Leur seule autre solution étant de vivre dans la rue − étant donné qu’ils ne pouvaient pas être locataires faute de disposer de revenus suffisants (ils étaient ferrailleurs) et de remplir les autres conditions nécessaires, c’est-à-dire avoir un contrat de travail et un garant − les auteurs ont décidé de s’installer dans un appartement vide de la rue Santa Bárbara, à Oliva également.

2.2Le logement vide dans lequel les auteurs se sont installés appartenait à une banque, qui s’en était vu attribuer la propriété par le tribunal de première instance no 4 de Gandía le 4 décembre 2012 à l’issue d’une procédure de saisie immobilière. Les anciens propriétaires avaient dû quitter les lieux et ce sont les auteurs qui, lorsqu’ils s’y sont installés, en 2015, sont devenus les destinataires des notices d’expulsion envoyées comme suite à la décision du tribunal.

2.3Le 24 mars 2017, la banque devait prendre possession du logement, mais n’a pas pu le faire parce que les auteurs s’y trouvaient.

2.4Le 26 juillet 2017, les auteurs ont demandé à la banque de leur donner la possibilité de payer un loyer social. Le département des services sociaux a appuyé la demande, mais la banque n’y a jamais fait droit.

2.5L’expulsion a été reportée au 2 juin 2017, mais il a de nouveau été sursis à son exécution, les auteurs n’ayant pas été préalablement informés.

2.6Le 18 octobre 2017, les auteurs ont demandé un logement de remplacement à la Generalitat de Valence. À ce jour, il n’a pas été donné suite à leur demande.

2.7L’expulsion a été fixée au 23 octobre 2017, mais les auteurs ont refusé de quitter les lieux. À une audience qui s’est tenue le 3 novembre 2017, le tribunal a confirmé que la banque devait récupérer la jouissance du logement.

2.8Le 6 novembre 2017, le tribunal a reporté l’expulsion au 5 février 2018, mais les auteurs ont de nouveau refusé de partir, et la mesure n’a donc pas été exécutée.

2.9Le 27 avril 2018, le tribunal a fixé une cinquième date pour l’expulsion, à savoir le 13 juillet 2018, et a requis le concours de la commission judiciaire aux fins de l’évacuation des lieux. Il a en outre demandé aux services sociaux de prendre les mesures voulues compte tenu de la présence de mineurs dans le logement.

2.10Le 30 mai 2018, les auteurs ont fait appel de l’ordonnance d’expulsion et ont demandé qu’il soit sursis à son exécution jusqu’à ce qu’ils se voient attribuer un logement décent et convenable. En outre, ils ont prié le tribunal d’examiner la proportionnalité de la mesure, faisant valoir qu’il n’était pas impératif que la banque entre en possession du logement immédiatement tandis qu’eux se trouvaient dans une situation d’urgence sociale. Rappelant qu’ils se trouvaient dans une situation d’extrême vulnérabilité économique et sociale, ils ont invoqué les normes internationales sur le droit à un logement convenable et l’interdiction des expulsions forcées et argué que les conditions actuelles du marché ne garantissaient pas l’accès au logement pour les populations vulnérables. De surcroît, ils ont dénoncé le démantèlement du système de logements sociaux dans l’État partie et l’opposition active à la législation protégeant le droit au logement, faisant référence au fait que le Tribunal constitutionnel avait empêché la réalisation de plusieurs tentatives de la part de communautés autonomes pour élaborer des lois sur le logement.

2.11Le 7 juin 2018, le tribunal a rejeté l’appel des auteurs et maintenu l’expulsion au 13 juillet 2018.

Teneur de la plainte

3.1Les auteurs allèguent que, étant donné qu’ils ne se sont pas vu proposer de logement de remplacement et ne peuvent pas accéder à autre chose qu’un logement public ou social faute de revenus suffisants, leur expulsion violerait les droits qu’ils tiennent de l’article 11 du Pacte.

3.2Les auteurs joignent à la communication un rapport dans lequel les services sociaux concluent que leur situation économique ne leur permet pas de dépenser plus que le strict nécessaire pour satisfaire leurs besoins de base.

Enregistrement et octroi de mesures provisoires

4.Le 10 juillet 2018, agissant par l’intermédiaire de son groupe de travail des communications, le Comité a enregistré la communication et, prenant note des allégations selon lesquelles les auteurs n’avaient pas de logement de remplacement et subiraient donc un préjudice irréparable s’ils étaient expulsés, a demandé à l’État partie de prendre des mesures provisoires et de surseoir à l’exécution de l’expulsion tant que la communication serait à l’examen ou, à défaut, de fournir aux intéressés un logement de remplacement convenable après les avoir véritablement consultés.

Demande de l’État partie tendant à ce que le Comité retire sa demande de mesures provisoires et mette fin à l’examen de la communication

5.1Dans des observations du 13 février 2019, l’État partie soutient que la communication n’a plus lieu d’être étant donné que les auteurs n’ont pas été expulsés et que les autorités leur cherchent un logement de remplacement. En conséquence, il prie le Comité de retirer sa demande de mesures provisoires et de mettre fin à l’examen de la communication.

5.2L’État partie signale que la banque devait initialement prendre possession du logement le 24 mars 2017, mais n’a pas pu le faire car les auteurs occupaient les lieux. Ensuite, l’expulsion, initialement prévue pour le 2 juin 2017, a été suspendue parce que les intéressés n’en avaient pas préalablement été informés. Elle a été reportée au 23 octobre 2017, mais les auteurs ont refusé de quitter les lieux. Une audience s’est donc tenue le 3 novembre 2017, au cours de laquelle le juge a confirmé que les auteurs occupaient le logement illégalement et devaient le restituer à son propriétaire. Une nouvelle date a été fixée, à savoir le 5 février 2018, mais l’association de lutte contre les expulsions a physiquement empêché l’exécution de la mesure. Saisi d’une nouvelle demande du propriétaire, le juge a de nouveau arrêté une date − le 13 juillet 2018 −, demandant aux services sociaux de trouver un logement pour les enfants. C’est à ce moment-là que les auteurs ont présenté la communication. À la demande du propriétaire, l’expulsion a été suspendue le jour même, sans toutefois que les auteurs en informent le Comité.

5.3L’État partie précise que les auteurs avaient demandé un diagnostic des services sociaux afin que la banque leur permette de payer un loyer social, mais ne se sont pas présentés à leur rendez-vous du 20 avril 2017, alors pourtant que l’établissement du rapport demandé supposait nécessairement un entretien. Néanmoins, le 8 mai 2017, les intéressés ont demandé un rendez-vous urgent avec l’assistante sociale parce qu’une nouvelle date avait été fixée pour l’expulsion. Le 6 juin 2017, les services sociaux ont fait parvenir à la banque un diagnostic favorable à la demande de loyer social. Le 18 octobre 2017, les auteurs ont été inscrits au registre des demandeurs de logements sociaux de la communauté autonome (sur lequel figurent actuellement 10 046 personnes) et, le 4 septembre 2018, une réunion a eu lieu entre les intéressés, le conseiller social, un représentant de l’association d’aide aux personnes grevées par une hypothèque et le directeur de la succursale locale de la banque. Selon l’État partie, les services sociaux négocient sur plusieurs fronts avec la banque afin d’obtenir qu’elle signe un contrat de bail avec les auteurs en vue de régulariser leur situation. Tous les efforts sont donc faits, et tous les moyens disponibles mis en œuvre, pour remédier à la situation des auteurs sur le plan du logement.

5.4Selon l’État partie, les demandes d’allocation d’aide sociale d’urgence et de pension minimale de retraite présentées par l’auteur ont été examinées le 22 mars 2018. Cependant, elles ont toutes deux été rejetées car elles n’étaient pas assorties des documents requis. Le 7 juin 2018, les intéressés ont demandé à la Generalitat de Valence d’admettre au bénéfice du revenu d’inclusion sociale en février 2019, il a été fait droit à leur demande et une allocation mensuelle de 918 euros a commencé à leur être versée. Par ailleurs, les services sociaux ont demandé à l’auteur de leur fournir des informations au sujet d’une maladie chronique qui l’empêche de travailler afin de déterminer s’il remplissait les conditions requises pour bénéficier d’une allocation d’invalidité, mais ils n’ont pas reçu de réponse. Enfin, l’État partie signale que, du 31 juillet au 30 septembre 2018, l’auteur a travaillé à temps partiel et gagnait 588 euros par mois.

5.5L’État partie fait savoir que la municipalité est prête à envisager d’accorder à la famille un logement social d’urgence jusqu’à ce qu’une solution de rechange soit trouvée et a fait tout son possible pour aider les auteurs, mais ceux-ci n’ont pas coopéré comme il se devait avec les services sociaux et leur situation en a pâti.

Commentaires des auteurs sur la demande de l’État partie tendant à ce que le Comité retire sa demande de mesures provisoires et mette fin à l’examen de la communication

6.1Dans des commentaires du 24 juin 2019, les auteurs reconnaissent que la Generalitat de Valence est l’une des régions les plus avancées en ce qui concerne la promotion et la garantie du droit au logement, en particulier depuis l’adoption de la loi 2/2017 du 3 février sur la fonction sociale du logement. Ils soutiennent toutefois que l’État partie doit se doter de politiques de logement, étendre le parc de logements publics et s’abstenir d’expulser les plus défavorisés, faisant valoir que les banques et les « fonds vautours » sont propriétaires de nombreux logements qui restent vides.

6.2Les auteurs avancent qu’ils n’ont pas de solution de logement et que, même si la Generalitat de Valence leur verse depuis février 2019 un revenu d’insertion sociale de 918 euros mensuels (au titre duquel ils ont aussi touché 5 254 euros rétroactivement), ils n’ont pas les moyens d’accéder au parc locatif privé.

6.3Les auteurs signalent que, le 1er avril 2019, le tribunal a fixé la date de l’expulsion au 8 juillet 2019 et que, s’ils n’ont pas été relogés d’ici là, ils seront obligés de vivre dans la rue ou d’occuper un autre logement vide.

Examen de la demande de l’État partie

7.Le 18 juillet 2019, à la lumière de l’évolution de la situation économique des auteurs, le Comité a accepté de retirer sa demande de mesures provisoires, sans toutefois mettre fin à l’examen de la communication.

Observations de l’État partie sur la recevabilité et sur le fond

8.1Dans des observations du 16 décembre 2019, l’État partie soutient que la communication devrait être déclarée irrecevable pour défaut manifeste de fondement. En effet, les auteurs continuent de vivre dans le logement concerné, l’expulsion a été suspendue à sept reprises et, dans la mesure des ressources disponibles, les autorités subviennent aux besoins de la famille.

8.2L’État partie soutient que l’article 11 du Pacte ne garantit pas le droit absolu d’occuper un logement appartenant à un tiers et n’impose pas non plus aux États de loger les personnes si les ressources disponibles ne lui permettent pas de le faire. Selon lui, cette disposition n’énonce pas un droit subjectif ; elle prévoit simplement que les États doivent prendre les mesures et adopter les politiques voulues pour faciliter l’accès à un logement convenable. En l’occurrence, la Constitution espagnole impose aux pouvoirs publics de respecter le droit au logement. L’État partie rappelle, en particulier, qu’il s’est employé à faciliter l’accès au marché résidentiel privé, à savoir tant l’accès à la propriété immobilière (en octroyant des crédits d’impôts sur les revenus et diverses aides aux jeunes, notamment des prêts subventionnés) que l’accès à la location (en accordant des aides spéciales). De surcroît, il a pris des mesures visant à éviter les saisies immobilières, introduisant dans sa législation un moratoire sur les expulsions en cas de non-remboursement de créances hypothécaires et introduisant un code de bonnes pratiques bancaires devant permettre la renégociation des échéances en cas de défaut de paiement. Enfin, des dispositions ont été adoptées dans le but de répondre aux besoins urgents des personnes tombant sous le coup d’une expulsion légitime, et les organes juridictionnels ont établi des protocoles de coordination qui leur permettent de coopérer avec les services sociaux avant une expulsion afin que les besoins des intéressés puissent être évalués et qu’un logement d’urgence puisse être proposé. Ces mesures ont acquis force de loi avec l’adoption du décret-loi royal 7/2019 du 1er mars. De surcroît, les services sociaux municipaux s’occupent d’évaluer les besoins des familles et de suivre l’évolution des situations. La Generalitat de Valence a établi un dispositif d’aides directes aux fins du paiement des loyers des personnes en situation d’urgence et un mécanisme d’aides publiques au logement, ainsi qu’un réseau baptisé Infohabitatge, qui conseille les personnes à la recherche d’un logement et soutient celles qui ont été expulsées pour défaut de paiement, notamment en les aidant à se reloger. En outre, elle alimente le répertoire des logements publics avec les informations fournies par les grands propriétaires, avec lesquels elle négocie l’établissement de loyers sociaux. À moyen terme, elle réhabilitera les logements publics qui ne répondent pas aux normes et élargira le parc locatif destiné aux personnes vulnérables.

8.3L’État partie soutient que les auteurs ne sont pas victimes d’une violation de l’article 11 du Pacte et n’ont pas démontré qu’ils étaient dans une situation de besoin parce que leurs ressources ne leur permettaient pas d’accéder au marché privé du logement. Il précise que le revenu d’un ménage comprend les ressources financières (dans le cas des auteurs, 918 euros par mois au titre du revenu d’inclusion sociale accordé par la Generalitat de Valence) et les transferts gratuits en nature (par exemple, les services d’éducation et de santé) et que le montant du revenu minimum est calculé à partir du salaire minimum interprofessionnel. Il ajoute que les auteurs vivent dans une petite ville où il leur est possible d’accéder à un logement puis de demander à bénéficier des aides fournies par la Generalitat pour pouvoir payer leur loyer. En outre, les autorités gardent les besoins des intéressés à l’examen depuis 2013, et les services sociaux sont tenus informés des échéances pertinentes.

Commentaires des auteurs sur les observations de l’État partie

9.1Dans des commentaires du 25 février 2020, les auteurs soutiennent qu’il leur est difficile de louer un logement, d’une part parce qu’ils sont Gitans et bon nombre de propriétaires ont donc des préjugés à leur égard, et d’autre part parce qu’il faut généralement présenter un contrat de travail pour signer un bail, ce qu’ils ne sont pas en mesure de faire.

9.2Les auteurs soutiennent que le problème n’est pas qu’il n’y a pas suffisamment de logements disponibles, mais que la quantité de logements vides qui datent de l’époque de la bulle immobilière, où on construisait de manière effrénée, appartient à des banques et à des « fonds vautours » qui, dans une optique spéculative, attendent que la conjoncture soit favorable pour les mettre sur le marché, et l’État partie ne fait rien pour remédier à la situation.

9.3Les auteurs soutiennent que la mairie d’Oliva s’est engagée à négocier un loyer social avec le « fonds vautour » qui a récemment racheté leur logement à la banque, mais n’a à ce jour pas reçu de réponse favorable.

B.Examen de la recevabilité

10.1Avant d’examiner tout grief formulé dans une communication, le Comité doit, conformément à l’article 9 de son règlement intérieur, déterminer si la communication est recevable au regard du Protocole facultatif se rapportant au Pacte.

10.2Le Comité note que, selon l’État partie, la communication devrait être déclarée irrecevable pour défaut manifeste de fondement aux motifs que les auteurs continuent de vivre dans le logement ; que l’expulsion a été suspendue à sept reprises ; que les besoins de la famille sont pris en charge par les autorités dans la mesure des ressources disponibles ; que les intéressés n’ont pas coopéré comme ils auraient dû le faire avec les services sociaux − notamment en ne leur fournissant pas les documents requis pour déterminer s’ils avaient droit à telles ou telles allocations − ; et que rien ne vient démontrer qu’ils sont dans le besoin, sachant que, dans la petite ville dans laquelle ils habitent, il est tout à fait possible de se loger avec un revenu mensuel de 918 euros. Le Comité note également que les auteurs soutiennent qu’il leur est difficile de louer un logement, d’une part parce qu’ils sont Gitans et bon nombre de propriétaires ont donc des préjugés à leur égard, et d’autre part parce qu’il faut généralement présenter un contrat de travail pour pouvoir signer un bail.

10.3Aux termes du paragraphe 2 e) de l’article 3 du Protocole facultatif, le Comité déclare irrecevable toute communication qui est manifestement mal fondée, insuffisamment étayée, ou repose exclusivement sur des informations diffusées par les médias. De surcroît, pour que le Comité examine le fond d’une communication, il faut que les faits et les griefs présentés permettent de penser, du moins à première vue, que les auteurs sont ou pourraient être victimes d’une violation d’un droit consacré par le Pacte. Or, en l’espèce, le Comité constate que les auteurs ont commencé à occuper un logement illégalement en 2015 et qu’ils n’ont pas démontré qu’ils avaient tout de suite demandé à se voir attribuer un autre logement. Il constate en outre que, d’après les documents fournis par l’État partie, dont ils ne contestent pas la véracité, ils n’ont pas fait preuve de toute la diligence voulue auprès des services sociaux. Enfin, ils soutiennent que les propriétaires sont peu enclins à leur louer un logement parce qu’ils sont Gitans, mais ne mentionnent néanmoins aucune tentative concrète qui n’aurait pas abouti ; et que, depuis février 2019, ils touchent de la Generalitat de Valence une allocation de revenu d’insertion sociale de 918 euros par mois, allocation au titre de laquelle ils ont de surcroît perçu 5 254 euros à titre rétroactif. Le Comité rappelle qu’il incombe aux auteurs, au premier chef, d’étayer leurs allégations et de fournir des preuves documentaires à l’appui de ce qu’ils avancent. En l’espèce, faute d’éléments suffisants pour déterminer si le droit des intéressés à un logement est réellement menacé, le Comité estime que la communication n’est pas suffisamment étayée aux fins de la recevabilité et est donc irrecevable au regard du paragraphe 2 e) de l’article 3 du Protocole facultatif en ce qui concerne le grief de violation de l’article 11 du Pacte.

C.Conclusion

11.Compte tenu de toutes les informations qui lui ont été communiquées, le Comité, agissant en vertu du Protocole facultatif, estime que la communication n’est pas recevable au regard du paragraphe 2 e) de l’article 3 du Protocole facultatif.

12.Le Comité décide que, conformément au paragraphe 1 de l’article 9 du Protocole facultatif, la présente décision sera communiquée aux auteurs de la communication et à l’État partie.