Nations Unies

E/C.12/66/3

Conseil économique et social

Distr. générale

29 novembre 2019

Français

Original : espagnol

Comité des droits économiques, sociaux et culturels

Rapport sur le suivi des communications nos 2/2014 et 5/2015 présentées contre l’Espagne *

Communication n o  2/2014, I. D. G. c. Espagne

Constatations adoptées le :

17 juin 2015

Teneur de la communication initiale :

Le logement de l’auteure de la communication a fait l’objet d’une procédure de saisie hypothécaire. Toutefois, l’auteure n’a pas été notifiée personnellement de l’ouverture de la procédure, qui a en effet été annoncée par un avis sur le panneau d’affichage du tribunal. L’auteure affirme qu’elle n’a pas eu connaissance de la notification et qu’elle n’a pas pu prendre part à la procédure et défendre ses droits concernant la demande de saisie hypothécaire. Elle considère que la notification de la procédure de saisie hypothécaire par voie d’affichage a porté atteinte, en l’espèce, aux droits qu’elle tient de l’article 11 du Pacte (E/C.12/55/D/2/2014).

Article enfreint :

Article 11 du Pacte

Recommandations du Comité concernant l’auteure :

L’État partie est tenu, en particulier :

a)De veiller à ce que la mise aux enchères du logement ne se fasse pas sans que l’auteure bénéficie de la protection appropriée en matière de procédure et d’une procédure respectant la légalité, conformément aux dispositions du Pacte et compte tenu des observations générales no 4 (1991) sur le droit à un logement suffisant et no 7 (1997) sur les expulsions forcées ;

b)De rembourser à l’auteure les frais de justice liés à la présente communication.

Recommandations générales :

L’État partie est tenu :

a)D’assurer aux personnes concernées par des procédures de saisie hypothécaire pour non‑remboursement d’emprunt l’accès aux recours prévus par la loi ;

b)D’adopter des mesures législatives ou administratives appropriées afin de veiller à ce que, dans les procédures de saisie hypothécaire, la notification par voie d’affichage soit strictement limitée aux cas où tous les moyens possibles ont été utilisés pour remettre une notification à personne, en garantissant une publicité et un préavis suffisants afin que l’intéressé puisse prendre dûment connaissance du déclenchement de la procédure et y prendre part ;

c)D’adopter des mesures législatives appropriées pour garantir que la procédure de saisie hypothécaire et les règles de procédure établissent des conditions (…) et procédures appropriées devant être suivies avant qu’il ne soit procédé à la mise aux enchères d’un logement ou à une expulsion, conformément au Pacte et compte tenu de l’observation générale no 7 du Comité.

Réponse de l’État partie :

Par des notes verbales datées du 11 mars 2016 et du 8 février 2018, l’État partie a répondu aux recommandations du Comité.

En ce qui concerne les recommandations concernant l’auteure, l’État partie rappelle qu’avant l’adoption des constatations, l’auteure avait présenté au tribunal no 31 une demande de suspension de la procédure d’enchères au motif de la nullité de certaines clauses du contrat de prêt hypothécaire et que le 4 octobre 2013 le tribunal avait en partie fait droit à cette demande incidente en déclarant la nullité de la sixième clause du contrat (« intérêts moratoires »). En outre, tous les moyens qui pouvaient être employés avant de procéder à la notification par voie d’affichage avaient été épuisés et des notifications avaient été envoyées aux autres adresses communiquées par l’auteure. Le 21 octobre 2016, une requête a été adressée à l’organisme chargé d’exécuter l’hypothèque, lequel a été avisé que l’affaire serait classée provisoirement s’il n’agissait pas. Aucune suite n’a été donnée à la requête et il a donc été décidé de classer la procédure à titre provisoire.

En ce qui concerne les recommandations d’ordre général relatives à la nécessité de limiter strictement la pratique des notifications par voie d’affichage, l’État partie fait remarquer que les articles 164 et suivants de la loi de procédure civile, tels que modifiés le 5 octobre 2015, définissent une procédure de notification à personne précise, qui doit impérativement avoir été épuisée avant toute notification par voie d’affichage. La procédure prévoit notamment que la notification peut être faite sur le lieu de travail du destinataire, qu’en cas de changement de domicile la nouvelle adresse de l’intéressé doit être recherchée et la notification faite à la nouvelle adresse ; la notification peut être remise à des employés, à des parents ou à des personnes avec lesquelles le destinataire vit, ou au concierge de l’immeuble, le cas échéant, et la personne qui reçoit la notification est avisée qu’elle a l’obligation de remettre le document à son destinataire.

Commentaires de l’auteure :

En date du 26 mars 2018, l’auteure a fait parvenir ses commentaires sur les observations de l’État partie. Elle considère que l’État partie n’a appliqué aucune des recommandations du Comité.

Elle souligne que la demande de saisie hypothécaire ne lui a toujours pas été notifiée et qu’elle n’a pas non plus été informée du déclenchement de la procédure. En outre, dans la demande sur laquelle il avait été statué le 4 octobre 2013, elle avait été autorisée seulement à présenter des arguments sur le caractère abusif des clauses de l’hypothèque, et n’avait pas pu développer tous ses moyens de défense.

L’auteure fait observer qu’en avril 2016 ses représentants ont déposé auprès du Ministère de la justice une demande de remboursement d’honoraires pour un montant de 49 600 euros, demande restée sans réponse. Le 6 juillet 2016, ils ont formé un recours contentieux administratif contre le Ministère de la justice pour inaction de l’administration. L’auteure joint à ses commentaires les argumentants avancés par la Direction des services juridiques de l’État (Abogacía del Estado) pour rejeter la demande, qui sont les suivants : c’est l’auteure, et non ses représentants, qui serait habilitée à solliciter le remboursement des honoraires ; les décisions du Comité ne sont pas directement exécutoires ; il n’existe pas de preuve concernant les frais engagés, puisque l’auteure n’a pas produit de justificatif montrant qu’elle les avait acquittés.

Pour ce qui est des recommandations d’ordre général, l’auteure considère qu’aucune mesure n’a été prise pour garantir l’accès aux recours prévus par la loi ou pour limiter la pratique de la notification par voie d’affichage et que, alors que l’article 164 de la loi de procédure civile a été modifié, l’article 686, qui a été appliqué dans son cas n’a pas été modifié. L’auteure considère que la rédaction de la législation est défectueuse et engendre donc un système de notification défectueux. Elle estime que l’exercice du droit à un logement digne continue d’être préoccupant en Espagne.

Décision du Comité :

Le Comité note que, selon l’auteure, la demande de saisie hypothécaire ne lui a pas encore été notifiée et que la recommandation du Comité n’a donc pas été appliquée. Il rappelle qu’il a recommandé à l’État partie de veiller à ce que la mise aux enchères du logement ne se fasse pas sans que l’auteure bénéficie de la protection appropriée en matière de procédure, et d’une procédure respectant la légalité. À ce sujet, le Comité note que, selon les informations qu’il a reçues, à ce jour la mise aux enchères du logement n’a pas eu lieu et l’auteure n’a pas été expulsée et que, selon les affirmations de l’État partie, l’abandon provisoire de la mesure de saisie hypothécaire a été ou sera prochainement prononcé.

Le Comité note que l’État partie a procédé à une modification de la loi visant à limiter la pratique des notifications par voie d’affichage en ce qui concerne les décisions de procédure. Il note également que dans le cas de l’auteure la notification par voie d’affichage n’a pas été utilisée de nouveau. Même si, comme l’affirme l’auteure, seul l’article 164 de la loi de procédure civile a été modifié et l’article 686 ne l’a pas été, le Comité rappelle que ce n’est pas une rédaction défectueuse mais l’application inappropriée de l’article 686 qui a conduit à la violation du droit à un logement suffisant (E/C.12/55/D/2/2014, par. 13.3).

Le Comité note que les représentants de l’auteure ont soumis à l’État partie une demande de remboursement d’honoraires d’un montant de 49 600 euros et que, selon les informations qu’il a reçues, cette demande est toujours pendante. Le Comité note que, d’après les documents qui lui ont été soumis, les représentants de l’auteure ont sollicité le remboursement d’une note d’honoraires d’un montant élevé, mais qu’il n’a pas été démontré que l’auteure avait engagé de telles dépenses. Le Comité souligne que les parties ont qualité pour chercher à obtenir l’application des recommandations du Comité, en tout temps, de bonne foi et dans une mesure raisonnable. Le Comité demande donc aux parties de fournir des informations supplémentaires sur le règlement de l’affaire et prie l’auteure d’y contribuer d’une manière raisonnable et de bonne foi.

À la lumière de toutes les informations reçues, le Comité considère que les recommandations concernant l’auteure ont été partiellement mises en œuvre et que les recommandations d’ordre général ont été appliquées de manière satisfaisante. Le Comité décide de continuer la procédure de suivi et invite l’État partie à fournir des renseignements sur les mesures prises à la lumière de la recommandation b) ci-dessus concernant l’auteur, dans les quatre‑vingt-dix jours suivant la publication du présent document.

Communication n o  5/2015, Mohamed Ben Djazia et Naouel Bellili c. Espagne

Constatations adoptées le :

20 juin 2017

Teneur de la communication initiale :

Les auteurs ont été expulsés du logement qu’ils louaient à Madrid, pour défaut de paiement du loyer. Ils considèrent que leur expulsion constituait une violation du paragraphe 1 de l’article 11 du Pacte. Ils estiment également que la procédure engagée devant le tribunal n’a pas été menée dans le respect des garanties judiciaires, étant donné que l’expulsion a été ordonnée sans qu’il ait été tenu compte des conséquences qu’elle pourrait avoir pour eux (E/C.12/61/D/5/2015).

Articles enfreints :

Paragraphe 1 de l’article 11, lu seul et conjointement avec le paragraphe 1 de l’article 2 et le paragraphe 1 de l’article 10 du Pacte

Recommandations du Comité concernant les auteurs :

L’État partie est tenu d’offrir aux auteurs une réparation effective, et notamment :

a)S’ils ne disposent pas d’un logement convenable, d’évaluer leur situation actuelle et, le cas échéant, de leur octroyer un logement public ou de les faire bénéficier d’une autre mesure leur permettant de vivre dans un logement convenable, après les avoir véritablement consultés et compte étant tenu des critères établis dans les présentes constatations ;

b)De les indemniser pour les violations subies ;

c)De les rembourser des honoraires d’avocat associés au traitement de la communication, dans la mesure du raisonnable.

Recommandations générales :

L’État partie est notamment tenu :

a)D’adopter les mesures législatives ou administratives qui s’imposent pour que, dans le cadre des procédures judiciaires d’expulsion de locataires, les défendeurs puissent faire opposition ou interjeter appel afin que le juge examine les conséquences de leur expulsion éventuelle et sa compatibilité avec le Pacte ;

b)De prendre les mesures nécessaires pour remédier au manque de cohérence entre les décisions rendues par les tribunaux et les mesures prises par les services sociaux, qui peut conduire à ce qu’une personne expulsée se retrouve sans logement adéquat ;

c)De prendre les mesures nécessaires pour que les arrêtés d’expulsion frappant des personnes qui n’ont pas les moyens de se reloger ne soient mis à exécution qu’après que les intéressés ont été véritablement consultés et que l’État a fait tout ce qui s’imposait, en agissant au maximum des ressources disponibles, pour que ceux‑ci soient relogés, en particulier lorsque l’expulsion concerne des familles, des personnes âgées, des enfants ou d’autres personnes vulnérables ;

d)D’élaborer et de mettre en œuvre, en coordination avec les communautés autonomes et en agissant au maximum des mesures disponibles, un plan global et intégré visant à garantir l’exercice du droit à un logement adéquat par les personnes à faible revenu, conformément à l’observation générale no 4 (1991) sur le droit à un logement adéquat. Dans ce plan devront être indiqués les ressources et les mesures qui seront mises en œuvre pour garantir le droit au logement de ces personnes, ainsi que les délais correspondants et les critères qui seront utilisés pour déterminer si l’objectif a raisonnablement été atteint. 

Réponse de l’État partie :

Par une note verbale datée du 11 janvier 2018, l’État partie a répondu aux recommandations du Comité.

Pour ce qui est recommandations concernant les auteurs, l’État partie signale que des dispositions ont été prises pour permettre l’examen de la demande de logement social dans le cadre de la procédure ouverte d’attribution de logements sociaux, alors que le dossier des auteurs est clos depuis le 26 septembre 2016.

L’État partie fait savoir également que les constatations du Comité ont été publiées au Bulletin du Ministère de la justice.

Pour ce qui est de la recommandation relative à l’élaboration d’un plan global et intégré afin de garantir l’exercice du droit à un logement adéquat par les personnes à faible revenu, l’État partie renvoie à ses observations en réponse à la communication de la Rapporteuse spéciale sur le logement convenable, mentionnées au paragraphe 10 des constatations du Comité.

Commentaires des auteurs :

En date du 1er mars 2018, les auteurs ont fait parvenir leurs commentaires sur les observations de l’État partie.

Les auteurs indiquent qu’ils vivent depuis 2016 dans un logement social attribué par la Mairie de Madrid. Ils affirment n’avoir pas bénéficié de mesures d’indemnisation ni de remboursement pour les frais de procédure engagés et qu’il n’existe pas de dispositif interne pour les obtenir.

Pour ce qui est de la publication des constatations du Comité, les auteurs considèrent qu’elles auraient dû être publiées au Journal officiel, qui est l’organe permettant d’informer le grand public des nouveautés d’ordre législatif en Espagne, et non au Bulletin du Ministère de la justice, dont la diffusion est plus restreinte et qui s’adresse aux professionnels de l’administration de la justice.

En ce qui concerne la recommandation tendant à ce que des mesures soient prises pour que les juges puissent examiner les conséquences d’une expulsion, les auteurs signalent que la législation actuelle ne prévoit toujours pas une telle possibilité. De l’avis des auteurs, pour que cette recommandation puisse être appliquée, il faut que la loi de procédure civile soit modifiée. En outre, les auteurs soulignent que dans les cas d’expulsion pour défaut de paiement du loyer, la procédure est très rapide et les intéressés ont seulement trois jours pour solliciter l’aide juridictionnelle, et que faute de réponse dans un délai de dix jours, un membre du greffe peut ordonner l’expulsion.

Les auteurs expliquent que seule la Communauté autonome de Catalogne a mis en place un protocole permettant de coordonner les mesures prises par les différentes administrations, de façon que les tribunaux informent à l’avance les services sociaux d’une expulsion afin de prévoir une intervention efficace. Or, dans cette communauté autonome, malgré l’existence du protocole les services sociaux ne sont intervenus que dans 564 cas sur les 3 024 expulsions pour défaut de paiement du loyer ordonnées à Barcelone en 2016. Il n’existe pas de protocole similaire dans les autres communautés autonomes.

Les auteurs estiment que la recommandation tendant à mettre en œuvre un plan, dont l’application devra être évaluée, pour garantir l’exercice du droit au logement, a été partiellement suivie d’effet grâce aux lois sur le logement adoptées par plusieurs communautés autonomes. La mise en œuvre de ces textes a cependant été suspendue après l’introduction de recours en inconstitutionnalité par le Gouvernement central.

Interventions de tiers :

Le 14 mars 2018, le Réseau international pour les droits économiques, sociaux et culturels (Réseau-DESC) a fait parvenir une note sur le suivi des recommandations d’ordre général faites par le Comité. Le Réseau considère que la sécurité d’occupation des logements n’existe pas en Espagne, car les bailleurs peuvent refuser de renouveler un contrat de location sans donner de motif. En outre, les juges ne peuvent pas examiner les conséquences d’une expulsion au regard des principes du caractère raisonnable et de la proportionnalité, contrairement à ce qui passe dans d’autres pays. Le Réseau-DESC ajoute que, même s’il existe des protocoles aux niveaux municipal et régional afin d’établir une coordination avec les services sociaux en cas d’expulsion, ces protocoles ne sont pas systématiquement suivis et l’administration n’est pas légalement tenue de proposer des solutions de relogement.

En ce qui concerne la recommandation relative à l’élaboration d’un plan en matière de logement, l’organisation souligne que, en 2013, l’Espagne comptait 300 000 demandeurs de logement social alors que 3,4 millions de logements étaient vacants et que 9 752 étaient des logements sociaux habitables en l’état. Les logements sociaux représentent aujourd’hui 1 % du total du parc de logements en Espagne, contre 32 % aux Pays‑Bas, 23 % en Autriche et 18 % au Royaume‑Uni. Depuis 2009, les fonds alloués au secteur du logement ont été réduits de moitié. Parallèlement, le prix des logements a considérablement augmenté ces dix dernières années. Le pourcentage des personnes qui doivent consacrer plus de 40 % de leurs revenus aux dépenses de logement est passé de 5 % à 10,3 %. L’État partie a adopté un nouveau plan national du logement pour la période 2018‑2021, mais pour que ce plan puisse répondre aux besoins actuels, il faudra accroître les investissements dans ce secteur et élargir le parc des logements sociaux. Le Réseau-DESC recommande à l’État partie d’augmenter la part du budget consacrée au logement, de recueillir des données ventilées sur les besoins de la population en matière de logement et sur l’effet des politiques appliquées, et de mettre en œuvre une stratégie dans le domaine du logement axée sur les droits de l’homme.

En date du 17 avril et du 24 juillet 2018, le Défenseur du peuple a envoyé des observations écrites sur la mise en œuvre des recommandations du Comité. Il juge insuffisantes les réponses données par l’État partie, qui ne traite pas toutes les recommandations et, lorsqu’il le fait, c’est de manière sommaire ou en se référant à des observations faites avant l’examen de l’affaire par le Comité. En outre, le Défenseur du peuple signale qu’il a consulté le Bulletin du Ministère de la justice, mais qu’il n’a pas pu avoir accès à la publication relative aux constatations du Comité et que, quoi qu’il en soit, l’organe adéquat pour faire connaître ces constatations est le Journal officiel. Le Défenseur rend également compte des résultats des échanges qu’il a eus avec les ministères concernés. Selon le Secrétariat d’État aux infrastructures, aux transports et au logement, les questions de logement sont du ressort exclusif des communautés autonomes, qui ont été dotées des ressources économiques nécessaires pour mettre en œuvre le plan national du logement 2018‑2021. Le Défenseur du peuple considère que le Secrétariat d’État devrait recueillir les informations nécessaires auprès des communautés autonomes. Pour sa part, le Ministère de la justice affirme que puisque les auteurs ont fait savoir qu’ils avaient obtenu un logement social en 2016, le Comité aurait pu considérer qu’il y avait lieu de mettre fin à l’examen de la communication. Il souligne également le caractère non contraignant des recommandations du Comité, qui explique qu’il n’a pas été répondu aux recommandations concernant l’indemnisation et le remboursement des frais engagés : en effet, comme il est établi au paragraphe 2 de l’article 9 du Protocole facultatif, l’État partie était seulement tenu de les examiner « dûment ». Le Défenseur du peuple considère, sans entrer dans le fond de la question, que les obligations découlant du Protocole facultatif exigent, à tout le moins, une analyse des recommandations et une réponse motivée et argumentée à chacune d’entre elles. Il suggère que les recommandations du Comité soient de nouveau examinées et qu’une réponse avec exposé des motifs soit apportée, et que les constatations du Comité soient publiées au Journal officiel. Le 23 septembre 2019, le Défenseur du peuple a soumis des informations complémentaires indiquant que, le 3 avril 2019, le Parlement avait adopté le décret 7/2019 portant création d’un nouveau recours pour les personnes sous le coup d’un ordre d’expulsion qui pourraient demander aux services sociaux d’examiner leur situation de vulnérabilité. Le Défenseur du peuple ajoute que les constatations ont été publiées au Bulletin du Ministère de la justice et considère donc que la recommandation de publier les constatations a été pleinement respectée.

Deuxième réponse de l’État partie :

Dans une note verbale datée du 26 février 2019, l’État partie indique qu’à la suite d’une réunion organisée avec tous les organes et institutions compétents pour répondre aux communications individuelles portant sur le droit au logement, il a été jugé utile, à titre de bonne pratique, de créer un mécanisme de communication entre les municipalités et les tribunaux afin que l’ouverture d’une procédure d’expulsion soit portée à la connaissance des autorités compétentes dès que possible. En outre, il a été décidé de mettre en œuvre un protocole d’action afin d’accélérer la transmission aux autorités concernées des demandes de mesures provisoires émanant du Comité. Un groupe de travail interministériel a de plus été constitué afin de définir des mesures à prendre d’urgence dans le domaine du logement et de la location et une division des droits de l’homme a été établie au Ministère des affaires étrangères, de l’Union européenne et de la coopération, de façon à assurer une meilleure application des recommandations et décisions des différents organes internationaux.

Décision du Comité :

Le Comité note qu’aujourd’hui les auteurs de la communication ont un logement adéquat. Il note également que les auteurs affirment n’avoir pas à ce jour reçu une indemnité ni le remboursement des frais engagés en lien avec la communication. L’État partie n’a pas réfuté cette affirmation.

Le Comité considère par conséquent que des mesures satisfaisantes ont été prises pour donner effet aux recommandations concernant les auteurs, mais qu’il n’a pas encore été répondu aux recommandations b) et c), pour lesquelles aucune mesure satisfaisante n’a été prise.

Le Comité note que, d’après les auteurs, la procédure judiciaire actuelle ne permet toujours pas aux juges d’examiner les conséquences d’une expulsion. Le Comité prend note des informations fournies par le Défenseur du peuple à cet égard, qui n’ont pas encore été commentées par les parties, et décide donc d’attendre des informations complémentaires de l’État partie et des auteurs sur l’adoption du décret 7/2019.

Le Comité note que l’État partie a décidé, à titre de bonne pratique, de créer un mécanisme de communication entre les municipalités et les tribunaux afin que l’ouverture de toute procédure d’expulsion soit portée à la connaissance des services compétents le plus tôt possible. À ce propos, les auteurs et les tiers qui sont intervenus affirment que pour l’heure ce mécanisme est insuffisant. Le Comité attend avec intérêt de recevoir de plus amples informations sur les résultats de la mise en place de ce mécanisme.

Le Comité note que d’après l’État partie les constatations ont été publiées au Bulletin du Ministère de la justice et que les auteurs et les tiers estiment que c’est le Journal officiel qui serait l’organe approprié.

À la lumière de toutes les informations reçues, le Comité estime que quelques mesures initiales ont été prises mais que d’autres actions sont encore nécessaires, et qu’il faut donner des informations sur les mesures prises. Le Comité décide de continuer la procédure de suivi et invite l’État partie à apporter des renseignements sur les mesures qu’il aura prises au sujet des recommandations b) et c) concernant les auteurs, et des recommandations générales a), b), c) et d), dans les quatre‑vingt‑dix jours suivant la publication du présent document.