Nations Unies

E/C.12/SLV/CO/6

Conseil économique et social

Distr. générale

9 novembre 2022

Français

Original : espagnol

Comité des droits économiques, sociaux et culturels

Observations finales concernant le sixième rapport périodique d’El Salvador *

1.Le Comité a examiné le sixième rapport périodique d’El Salvador à ses 32e, 34e et 36e séances, les 26, 27 et 28 septembre 2022, et a adopté les présentes observations finales à sa 60e séance, le 14 octobre 2022.

A.Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le sixième rapport périodique de l’État partie et les renseignements complémentaires fournis dans les réponses écrites à la liste de points. Il apprécie le dialogue constructif, qu’il a tenu en ligne pour des raisons particulièrement exceptionnelles, avec la délégation de haut niveau et techniquement compétente. Le Comité note, comme il l’a indiqué dans sa communication à l’État partie, que cette situation exceptionnelle ne constitue pas un précédent dans ses méthodes de travail. En outre, il considère que la participation d’un représentant de l’État partie en personne, en plus de celle des équipes qui ont participé en ligne, aurait contribué à renforcer la confiance et aurait facilité l’examen des questions et, par conséquent, aurait eu un effet bénéfique sur la qualité globale du dialogue.

B.Aspects positifs

3.Le Comité se félicite des mesures législatives, institutionnelles et politiques qui ont été adoptées pour renforcer la protection des droits économiques, sociaux et culturels dans l’État partie, telles que la loi spéciale sur l’inclusion des personnes handicapées, le plan national sur les changements climatiques, la loi « Nacer con Cariño » (loi sur la naissance), la loi « Crecer Juntos » (loi sur l’éducation), la loi générale sur les ressources en eau et la loi sur le système national de santé intégré. Le Comité salue également les efforts et les progrès accomplis par l’État partie dans la gestion de la pandémie de maladie à coronavirus (COVID‑19), la lutte contre la pauvreté, ainsi que les autres mesures mentionnées dans les présentes observations finales.

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

État d’urgence

4.Le Comité est conscient des problèmes de sécurité auxquels doit faire face l’État partie et prend note du rapport que l’État partie a soumis, le 29 juillet 2022, comme suite à la communication conjointe des procédures spéciales, qui rend compte des mesures mises en œuvre afin de garantir l’exercice des droits de l’homme sous le régime d’urgence décrété en mars 2022. Toutefois, le Comité constate avec une vive préoccupation que les modalités de mise en œuvre du régime d’urgence ont des effets sur la jouissance des droits économiques, sociaux et culturels. La fermeture des espaces de participation et de dialogue au niveau national, les restrictions pratiques imposées au travail des défenseurs et défenseuses des droits humains et à l’exercice de la contestation sociale, ainsi que les conditions de détention des personnes privées de liberté sont particulièrement préoccupantes.

5. Le Comité recommande à l’État partie  :

a) De veiller à ce que les mesures exceptionnelles relatives à la suspension des libertés fondamentales, de l’état de droit et des garanties procédurales ne limitent pas la jouissance des droits économiques, sociaux et culturels, ni ne restreignent le travail des défenseurs et défenseuses des droits humains, en particulier des droits économiques, sociaux, culturels et environnementaux  ;

b) De garantir le droit d’association et de manifestation pacifique dans le cadre des politiques relatives aux droits économiques, sociaux et culturels  ;

c) De rétablir les espaces de participation et de dialogue, dans un esprit constructif de transparence, avec tous les acteurs au niveau national, y compris les représentants de la société civile, les universitaires, le secteur privé, les représentants et dirigeants des peuples autochtones et les défenseurs et défenseuses des droits humains  ;

d) De veiller à ce que la proclamation de l’état d’urgence, sa mise en œuvre et sa prolongation soient conformes aux principes de temporalité, de proportionnalité, de nécessité et aux autres principes établis par les normes internationales relatives aux droits de l’homme et qu’elles soient soumises à un contrôle judiciaire  ;

e) D’assurer le respect des principes de légalité, d’humanité et de dignité, des garanties judiciaires et des droits économiques, sociaux et culturels dans les centres de détention et les prisons pendant et après l’état d’urgence.

Gestion de la pandémie de COVID-19 et restriction des droits

6.Le Comité prend note des efforts que l’État partie a déployés pour faire face à la pandémie de COVID-19, mais il regrette de ne pas avoir reçu de renseignements détaillés sur les effets qu’a eus la loi sur la restriction temporaire de certains droits constitutionnels en lien avec la pandémie de COVID-19 sur la jouissance des droits économiques, sociaux et culturels.

7. Le Comité recommande à l’État partie de veiller à ce que l’adoption et la mise en œuvre de mesures exceptionnelles, y compris en cas de pandémie, soient conformes aux principes de temporalité, de proportionnalité, de nécessité et aux autres principes établis par les normes internationales relatives aux droits de l’homme, et soient soumises à un contrôle judiciaire.

Application du Pacte au niveau national

8.Le Comité prend note de l’affirmation très claire de la délégation selon laquelle le droit international des droits de l’homme en général, et les droits énoncés dans le Pacte en particulier, ont été incorporés dans le cadre normatif de l’État partie, qu’ils ont un caractère prépondérant et qu’ils sont opposables, mais il est préoccupé par le manque d’informations sur les décisions des tribunaux nationaux dans lesquelles le Pacte est invoqué et par l’insuffisance de la formation spécialisée dispensée aux juges, aux procureurs et aux avocats sur les dispositions du Pacte et leur opposabilité.

9. Le Comité recommande à l’État partie  :

a) De faire connaître les droits économiques, sociaux et culturels, tels que reconnus dans le Pacte, et le fait qu’ils sont opposables, en particulier aux magistrats, aux avocats et aux membres des forces de l’ordre  ;

b) De sensibiliser aux droits économiques, sociaux et culturels d’autres acteurs, étatiques et non étatiques, responsables de l’application du Pacte, tels que les inspecteurs du travail, les travailleurs sociaux, le personnel de santé et les enseignants, ainsi que les titulaires de droits  ;

c) De tenir compte de son observation générale n o 9 (1998) sur l’application du Pacte au niveau national.

Indépendance de la magistrature

10.Le Comité est préoccupé par les informations reçues concernant le manque d’indépendance, dans la pratique, entre les pouvoirs judiciaire, exécutif et législatif, malgré la proclamation des principes protégeant l’indépendance du pouvoir judiciaire dans la Constitution et la loi organique judiciaire. Il est en particulier préoccupé par le fait que les juges de l’ancienne Chambre constitutionnelle ont été révoqués sans qu’il soit tenu compte de la régularité des procédures et du principe de l’inamovibilité des juges. Il est également préoccupé par les réformes de la loi sur la carrière judiciaire et de la loi organique du Bureau du Procureur général approuvées le 31 août 2021, qui sont incompatibles avec les principes d’indépendance du pouvoir judiciaire et du Bureau du Procureur.

11. Le Comité exhorte l’État partie à prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir l’impartialité et l’indépendance du pouvoir judiciaire, en tant que moyen de préserver l’exercice des droits de l’homme, y compris les droits économiques, sociaux et culturels, en empêchant les pouvoirs exécutif et législatif d’intervenir indûment dans le système judiciaire, en particulier dans la sélection, la nomination ou la révocation des juges. Le Comité appelle l’attention de l’État partie sur les Principes fondamentaux relatifs à l’indépendance de la magistrature et les Principes directeurs applicables au rôle des magistrats du parquet, ainsi que sur les communications du Rapporteur spécial sur l’indépendance des juges et des avocats et sur l’avis n o 76/2020 du Groupe de travail sur la détention arbitraire .

Institution nationale des droits de l’homme

12.Le Comité est conscient de l’importance du travail effectué par le Bureau du Procureur national chargé de la défense des droits de l’homme, mais il est préoccupé par les informations concernant le fait que le Bureau est de moins en moins indépendant et manque de réactivité face aux violations des droits de l’homme dans l’État partie.

13. Le Comité recommande à l’État partie  :

a) De renforcer le Bureau du Procureur national chargé de la défense des droits de l’homme en le rendant plus indépendant et en le dotant des ressources financières et humaines adéquates pour qu’il puisse s’acquitter de son mandat avec diligence et indépendance, en ce qui concerne notamment la promotion et la protection des droits économiques, sociaux et culturels  ;

b) De prendre en compte les Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris) .

Défenseurs et défenseuses des droits humains

14.Le Comité est préoccupé par les informations reçues concernant des persécutions, des menaces, des actes de harcèlement et des représailles à l’encontre des défenseurs et défenseuses des droits humains dans l’État partie, notamment des journalistes et des dirigeants communautaires, ethniques et environnementaux, des universitaires et des membres du personnel médical, dans le contexte de la déclaration de l’état d’urgence.

15. Le Comité exhorte l’État partie à élaborer et à adopter des mesures et des mécanismes efficaces, intégrant les perspectives ethniques et de genre, pour prévenir les actes de violence et protéger la vie, l’intégrité physique et la liberté des défenseurs et défenseuses des droits économiques, sociaux, culturels et environnementaux, en garantissant une large participation des acteurs intéressés et en assurant une coordination efficace entre les autorités nationales et locales. Le Comité appelle l’attention de l’État partie sur sa déclaration relative aux défenseurs des droits de l’homme et aux droits économiques, sociaux et culturels .

Entreprises et droits de l’homme

16.Le Comité est préoccupé par l’application laxiste des mesures législatives et administratives existantes en matière d’environnement aux entreprises opérant sous la juridiction de l’État partie. Il s’inquiète du fait que des activités économiques dans des domaines tels que l’aménagement urbain, les transports, l’énergie et l’élimination des déchets ne fassent pas l’objet d’évaluations d’impact environnemental adéquates, ainsi que de l’utilisation excessive de produits agrochimiques dans le secteur agricole. Il est particulièrement préoccupé de constater que ces activités altèrent la qualité du sol, de l’air et de l’eau et nuisent à la santé de la population et à l’environnement, ce qui a de graves répercussions sur l’exercice des droits économiques, sociaux, culturels et environnementaux des peuples autochtones, des communautés environnantes et des travailleurs agricoles. Le Comité est également préoccupé par les représailles dont font l’objet les juges et les tribunaux lorsqu’ils imposent des mesures conservatoires dans le cadre de projets, tant publics que privés, qui présentent des risques pour l’environnement.

17. Le Comité recommande à l’État partie  :

a) De renforcer sa législation et sa réglementation, conformément à ses obligations internationales en matière de droits de l’homme, afin de garantir que les aménagements urbains, les projets de transport et d’énergie, les décharges et autres activités de développement économique, dont s’occupent des entreprises nationales et internationales, n’aient pas d’effets préjudiciables sur la jouissance des droits économiques, sociaux et culturels  ;

b) De prévenir les actes d’intimidation et de représailles, y compris les actes de violence, dont font l’objet les juges et les avocats dans le cadre de leur travail, en lien avec la mise en œuvre de mesures législatives et administratives relatives à l’environnement  ;

c) De veiller à ce que les communautés et les peuples autochtones touchés par des activités liées au développement économique et à l’exploitation des ressources naturelles sur leurs territoires soient consultés, soient indemnisés pour les dommages et pertes subis, et obtiennent des avantages tangibles de ces activités  ;

d) De tenir compte, à cet égard, de l’observation générale n o 24 (2017) du Comité sur les obligations des États en vertu du Pacte dans le contexte des activités des entreprises, et des rapports du Rapporteur spécial sur les incidences sur les droits de l’homme de la gestion et de l’élimination écologiquement rationnelles des produits et déchets dangereux en ce qui concerne le droit à la science sous la perspective des substances toxiques et les droits des travailleurs et l’exposition à des substances toxiques .

Droits des peuples autochtones

18.Le Comité prend note des efforts déployés par l’État partie, mais il regrette de ne pas avoir reçu de renseignements détaillés sur le degré de mise en œuvre et les résultats du plan national d’action pour les peuples autochtones. Le Comité constate avec préoccupation que l’État partie ne dispose pas d’un mécanisme juridique permettant de reconnaître le droit des peuples autochtones en tant que tels d’obtenir des titres fonciers collectifs et qu’il n’existe pas de consultation systématique, libre, préalable et éclairée des peuples autochtones dans les processus décisionnels concernant l’exploitation des ressources naturelles sur leurs territoires traditionnels. Le Comité constate en particulier avec préoccupation que l’État partie n’a toujours pas ratifié la Convention (no 169) relative aux peuples indigènes et tribaux, 1989 de l’Organisation internationale du Travail.

19. Le Comité exhorte l’État partie à  :

a) Créer des mécanismes pour reconnaître les droits des peuples autochtones sur leurs terres traditionnelles et leurs ressources naturelles  ;

b) Concevoir, adopter et mettre en œuvre, en consultation avec les peuples autochtones, une procédure appropriée qui garantisse leur droit d’être consultés en vue d’obtenir leur consentement libre, préalable et éclairé concernant toute mesure législative ou administrative susceptible d’avoir des effets sur leurs droits et leurs territoires, et veiller à ce que cette procédure tienne compte de leurs traditions et de leurs caractéristiques culturelles  ;

c) Procéder, dans le cadre des activités de prospection et d’exploitation minière et hydroélectrique, à des consultations au cours desquelles les peuples concernés puissent donner librement leur consentement  ;

d) Accélérer la procédure d’adhésion à la Convention ( n o 169) relative aux peuples indigènes et tribaux, 1989 , de l’Organisation internationale du Travail  ;

e) Redoubler d’efforts pour promouvoir et appliquer tous les principes énoncés dans la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.

Obligation d’agir au maximum des ressources disponibles

20.Le Comité prend note des mesures fiscales mises en œuvre par l’État partie. Toutefois, il réaffirme sa préoccupation quant au fait que le recouvrement des impôts dans l’État partie reste faible, et que le système fiscal demeure régressif et trop dépendant des impôts indirects. Le Comité est également préoccupé par l’augmentation de la dette publique par rapport au produit intérieur brut et par l’adoption d’instruments financiers hautement volatils et spéculatifs comme monnaie légale, comme le bitcoin, depuis le 7 septembre 2021. Le Comité regrette de ne pas avoir reçu de renseignements détaillés sur la proportion des dépenses publiques allouées par l’État partie aux priorités sociales, telles que la sécurité sociale, l’alimentation, le logement, l’eau et l’assainissement, la santé et l’éducation (art. 2).

21. Le Comité recommande à l’État partie  :

a) De continuer à élaborer une politique fiscale progressive qui améliore le recouvrement de l’impôt afin d’allouer davantage de ressources à la concrétisation des droits économiques, sociaux et culturels  ;

b) De faire en sorte que le budget soit élaboré et mis en œuvre de façon transparente et participative, et garantisse l’exercice des droits économiques, sociaux et culturels par l’ensemble de la population, en particulier par les personnes et les groupes les plus marginalisés et défavorisés  ;

c) De renforcer les mécanismes de reddition de comptes concernant les recettes et les dépenses publiques  ;

d) De revoir et d’ajuster la loi sur les bitcoins afin de réduire les risques macroéconomiques potentiels, et d’établir des mécanismes de contrôle pour encadrer et superviser l’utilisation des bitcoins, en assurant la transparence voulue et la reddition de comptes, et en prévenant le blanchiment d’argent.

Collecte des données

22.Le Comité est conscient des efforts que l’État partie a déployés pour renforcer ses systèmes de statistiques et de collecte de données, mais il craint que les mesures prises dans ce domaine, ainsi que la suppression de la Direction générale des statistiques et du recensement et l’attribution de fonctions à la Banque centrale de réserve, ne soient pas suffisantes pour assurer la collecte et la production de données fiables et ventilées qui sont nécessaires pour suivre la réalisation progressive des droits reconnus dans le Pacte (art. 2, par. 1 et 2).

23. Le Comité recommande à l’État partie  :

a) De veiller à ce que la collecte de données statistiques officielles permettant d’évaluer le degré de jouissance des droits énoncés dans le Pacte soit effectuée de manière impartiale, techniquement rationnelle et transparente, avec des données publiques complètes et désagrégées, en particulier parmi les individus et les groupes défavorisés et marginalisés  ;

b) De tenir compte de la publication du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme concernant l’adoption d’une approche des données fondée sur les droits de l’homme.

Non-discrimination

24.Le Comité constate avec préoccupation que l’article 3 de la Constitution ne garantit pas l’égalité et la non-discrimination sous toutes ses formes. Il est également préoccupé par l’absence d’une législation antidiscrimination complète qui dresse une liste exhaustive des motifs de discrimination prohibés. Il est en outre préoccupé par la persistance d’une discrimination systémique dans la pratique et par des manifestations de violence à l’égard de certains groupes de la population, en particulier les femmes, les peuples autochtones, les personnes d’ascendance africaine et la population rurale, entre autres (art. 2, par. 2).

25. Le Comité exhorte l’État partie à prendre des mesures pour rendre compte de la discrimination formelle et concrète qui s’exerce sur son territoire et des effets des mesures qu’il a prises. Le Comité recommande à l’État partie  :

a) D’envisager de modifier l’article 3 de la Constitution afin d’y ajouter expressément des garanties d’égalité et de non-discrimination pour toutes les personnes, sans distinction de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique ou autre, d’origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation, conformément aux engagements énoncés dans le Pacte  ;

b) De promouvoir l’adoption d’une législation anti-discrimination complète qui interdit la discrimination directe et indirecte sous toutes ses formes et pour tous les motifs de discrimination définis dans le Pacte  ;

c) De garantir l’accès des victimes de discrimination à des recours utiles, y compris la possibilité d’obtenir réparation  ;

d) De tenir compte de son observation générale n o  20 (2009) sur la non ‑ discrimination dans l’exercice des droits économiques, sociaux et culturels.

Discrimination fondée sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre

26.Le Comité prend note des mesures que l’État partie a mises en place pour prévenir toute forme de discrimination dans l’administration publique sur la base de l’identité de genre et de l’orientation sexuelle, mais il constate avec inquiétude que ces mesures ne sont pas suffisantes. Il est également préoccupé par l’ampleur, dans la pratique, de la discrimination, de la stigmatisation et des stéréotypes négatifs qui font que les personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres et intersexes ont du mal à exercer leurs droits économiques, sociaux et culturels (art. 2, par. 2).

27. Le Comité recommande à l’État partie  :

a) De prendre toutes les mesures nécessaires pour que les personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres et intersexes puissent pleinement exercer leurs droits économiques, sociaux et culturels sans discrimination, tant dans l’administration publique que dans le secteur privé, notamment à la faveur de stratégies de sensibilisation aux stéréotypes et de lutte contre ces stéréotypes  ;

b) De mener des campagnes de sensibilisation ciblant le public, les prestataires de soins de santé, les forces de l’ordre et d’autres agents publics afin d’éliminer les stéréotypes négatifs et la stigmatisation dont souffrent les personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres et intersexes  ;

c) De veiller à ce que les personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres et intersexes puissent exercer leurs droits économiques, sociaux et culturels, et avoir accès à la santé, à l’éducation, à l’emploi, au logement et aux programmes de réduction de la pauvreté et de sécurité alimentaire. À cet égard, le Comité appelle l’attention de l’État partie sur le rapport de l’Expert indépendant chargé de la question de la protection contre la violence et la discrimination liées à l’orientation sexuelle et à l’identité de genre sur l’inclusion socioéconomique et culturelle des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres et intersexes .

Personnes handicapées

28.Le Comité regrette de ne pas avoir reçu de statistiques détaillées sur les résultats et les effets des dispositions antérieures à la loi spéciale sur l’inclusion des personnes handicapées, en vigueur depuis le 1er janvier 2021. Le Comité reste préoccupé par les barrières culturelles et les préjugés qui continuent d’empêcher les personnes handicapées de jouir de leurs droits économiques, sociaux et culturels (art. 2, par. 2).

29. Rappelant sa précédente recommandation , le Comité recommande à l’État partie  :

a) De mettre en place un mécanisme de contrôle, de suivi et de vérification doté de ressources matérielles, techniques et humaines suffisantes afin de contrôler avec efficacité et impartialité les modalités de mise en œuvre de la loi spéciale sur l’inclusion des personnes handicapées  ;

b) De prendre toutes les mesures nécessaires pour éliminer les barrières culturelles et les préjugés auxquels continuent de se heurter les personnes handicapées dans la société.

Égalité entre hommes et femmes

30.Le Comité est conscient des efforts que l’État partie déploie pour débusquer les schémas culturels et remédier aux stéréotypes de genre, ainsi que pour développer le partage des responsabilités en matière d’éducation. Toutefois, il reste préoccupé par la persistance et l’accroissement des inégalités de rémunération entre les sexes, par la très faible participation des femmes au marché du travail, ainsi que par la moindre représentation des femmes aux postes de décision dans les secteurs public et privé (art. 3).

31. Le Comité recommande à l’État partie  :

a) De redoubler d’efforts pour accroître la participation des femmes au marché du travail et combler les inégalités de rémunération entre les sexes en s’attaquant à la ségrégation verticale et horizontale fondée sur le sexe sur le marché du travail, en revoyant ses politiques sociales et fiscales et en s’attaquant aux facteurs qui découragent les femmes de poursuivre leur carrière ou d’occuper un poste à temps plein, notamment au moyen de mesures visant à favoriser un équilibre entre vie professionnelle et vie familiale  ;

b) De promouvoir une plus grande représentation des femmes à tous les niveaux de l’administration publique, en particulier aux postes de décision, ainsi que leur participation aux fonctions de direction dans le secteur privé  ;

c) De tenir compte de son observation générale n o 16 (2005) sur le droit égal de l’homme et de la femme au bénéfice de tous les droits économiques, sociaux et culturels.

Droit au travail

32.Le Comité est conscient des efforts déployés par l’État partie, mais il reste préoccupé par le niveau élevé des taux de chômage et de sous-emploi, et par le grand nombre de personnes qui travaillent dans l’économie informelle, sans bénéficier d’aucune réglementation de base, en particulier les femmes, les jeunes et les personnes âgées de plus de 60 ans, ainsi que par les inégalités marquées dans l’accès au marché du travail dans le secteur rural (art. 3 et 6).

33. Rappelant sa précédente recommandation , le Comité exhorte l’État partie à  :

a) Prendre toutes les mesures nécessaires pour que les travailleurs de l’économie informelle bénéficient des normes fondamentales du travail et de la protection sociale  ;

b) Évaluer et suivre les effets de la politique nationale pour l’emploi décent 2017-2030 et en rendre compte dans son prochain rapport périodique  ;

c) Redoubler d’efforts pour assurer la transition de l’économie informelle à l’économie formelle et régulariser la situation des travailleurs du secteur informel, et s’employer à réduire les inégalités en matière d’emploi dans les zones rurales. À cet égard, le Comité appelle l’attention de l’État partie sur la recommandation ( n o 204) de l’Organisation internationale du Travail sur la transition de l’économie informelle vers l’économie formelle, de 2015.

Conditions de travail justes et favorables

34.Le Comité réaffirme que, malgré les efforts déployés dans ce domaine, le salaire minimum reste faible et ne suffit pas à assurer des conditions de vie décentes aux travailleurs et aux membres de leur famille. En outre, le Comité est préoccupé par les rapports sur les conditions de travail, en particulier des femmes et des travailleurs migrants, dans certains secteurs, tels que l’industrie des maquiladoras, le travail domestique, la construction, la sécurité privée et l’agriculture. Le Comité est particulièrement préoccupé par le fait que les conditions de travail dans ces secteurs restent précaires et exposent les travailleurs à des risques d’abus et d’exploitation (art. 7).

35. Le Comité recommande à l’État partie  :

a) D’établir un mécanisme efficace de révision périodique du salaire minimum, conformément à l’article 7 (al. a) ii)) du Pacte, associant les travailleurs et les employeurs et leurs organisations représentatives, afin que tous les travailleurs reçoivent un salaire minimum qui leur permette d’avoir des conditions de vie décentes pour eux-mêmes et les membres de leur famille  ;

b) De mettre en place un mécanisme d’inspection du travail, doté des ressources matérielles, techniques et humaines suffisantes pour contrôler avec efficacité et impartialité les conditions de travail dans tous les secteurs  ;

c) De créer des mécanismes efficaces pour dénoncer toutes les formes d’abus et d’exploitation par le travail, en prenant en considération, en particulier, la situation des femmes et des migrants qui travaillent dans les maquiladoras et dans les secteurs du travail domestique, de la construction, de la sécurité privée et de l’agriculture.

Droits syndicaux

36.Le Comité réaffirme sa préoccupation quant aux restrictions, tant formelles que matérielles, imposées au droit de grève, en raison d’obstacles liés à l’enregistrement des syndicats. Il regrette de ne pas avoir reçu de données précises et actualisées sur le nombre de grèves déclarées illégales entre 2014 et 2021, ni d’informations sur les motifs pour lesquels les grèves ont été déclarées illégales par les tribunaux de l’État partie (art. 8).

37. Rappelant sa recommandation précédente , le Comité recommande à l’État partie  :

a) De prendre toutes les mesures nécessaires pour que tous les travailleurs puissent exercer leur droit de grève, conformément à l’article 8 du Pacte, notamment en envisageant de réformer son cadre réglementaire  ;

b) De garantir le droit de créer et de faire enregistrer des syndicats et de veiller à ne pas s’immiscer dans leurs procédures internes  ;

c) De protéger les personnes qui participent à des activités syndicales et de prévenir et de réprimer toute forme de représailles  ;

d) De repenser la définition des services essentiels afin que tous les agents de l’État dont les services ne peuvent raisonnablement être considérés comme essentiels aient le droit de grève.

Droit à la sécurité sociale

38.Le Comité prend note avec intérêt de la réforme des retraites en cours dans l’État partie, mais il est préoccupé par le fait que seulement 30 % environ de la population économiquement active bénéficie d’une couverture sociale (art. 9).

39. Le Comité recommande à l’État partie  :

a) De mettre en place un système de sécurité sociale qui assure une couverture universelle et offre des prestations suffisantes pour tous, en particulier pour les groupes les plus défavorisés et marginalisés, afin de leur garantir un niveau de vie décent  ;

b) De redoubler d’efforts pour concevoir un socle de protection sociale qui intègre des garanties sociales universelles de base. Le Comité se réfère à cet égard à son observation générale n o 19 (2007) sur le droit à la sécurité sociale et à la recommandation n o 202 sur les socles nationaux de protection sociale (2012).

Protection des filles et des garçons

40.Le Comité réaffirme sa préoccupation concernant la persistance du travail des enfants dans l’État partie. Il est particulièrement préoccupé par les rapports faisant état d’un taux élevé d’enfants exposés aux pires formes de travail et par le fait que le travail des enfants n’est pas incriminé dans le Code pénal. Le Comité constate également avec préoccupation que la pauvreté, en particulier dans les zones rurales, ainsi que les difficultés rencontrées pour avoir accès à l’école et y rester, augmentent le risque de travail des enfants. Le Comité regrette de n’avoir pas reçu de renseignements concrets sur les mesures qui ont été prises pour prévenir l’exploitation des enfants en situation de rue (art. 10).

41. Le Comité recommande à l’État partie  :

a) D’ériger le travail des enfants en infraction dans le Code pénal  ;

b) De redoubler d’efforts pour mettre en œuvre efficacement la loi sur la protection globale des enfants et des adolescents et le protocole d’action interinstitutionnel spécialisé, en veillant à ce que les dispositions juridiques relatives au travail des enfants soient appliquées avec fermeté, en renforçant les mécanismes d’inspection du travail des enfants et en apportant un soutien aux familles pauvres afin que les enfants puissent aller à l’école  ;

c) De réaliser une étude complète sur la situation des enfants des rues afin de s’attaquer à ce problème et d’exécuter des programmes de protection globale.

Violence contre les femmes et les filles

42.Le Comité est préoccupé par les informations concernant les taux élevés de féminicides et d’actes de violence sexuelle et domestique, et par l’insuffisance des mesures prises pour assurer la protection efficace des victimes (art. 10).

43. Le Comité recommande à l’État partie  :

a) De mener des enquêtes approfondies sur les féminicides et sur tous les actes de violence commis contre des femmes, et à veiller à ce que les auteurs de ces actes soient poursuivis en justice et dûment sanctionnés, selon qu’il convient  ;

b) D’adopter toutes les mesures nécessaires pour prévenir la violence contre les femmes  ;

c) De redoubler d’efforts pour protéger toutes les femmes et filles victimes de violence, en particulier de violence domestique, de veiller à ce qu’elles aient accès à la justice au moyen de recours utiles leur permettant notamment d’obtenir réparation et d’être indemnisées, et de faire en sorte qu’elles aient accès en temps voulu à des centres d’accueil à même de leur offrir une protection physique immédiate, des conseils juridiques et des soins médicaux et psychologiques  ;

d) D’organiser des campagnes d’information afin de sensibiliser l’opinion et de fournir aux agents des forces de l’ordre et aux juges une formation qui mette l’accent sur la gravité et le caractère criminel de la violence contre les femmes et de la violence domestique.

Pauvreté

44.Le Comité prend note des efforts déployés par l’État partie, mais il constate avec préoccupation que les taux de pauvreté et d’extrême pauvreté restent élevés et qu’il existe une grande disparité des niveaux de pauvreté entre les zones rurales et urbaines. En outre, le Comité regrette de ne pas avoir reçu de renseignements sur le degré de mise en œuvre de la stratégie d’éradication de la pauvreté (2017), ses effets, en particulier sur la situation des peuples autochtones, et des statistiques détaillées à ce sujet (art. 11).

45.Le Comité recommande une nouvelle fois à l’État partie :

a) D’adopter les mesures nécessaires pour lutter contre la pauvreté, en particulier l’extrême pauvreté, dans le cadre du plan de développement social 2019 ‑ 2024, en suivant une approche fondée sur les droits de l’homme et en prêtant une attention particulière aux zones rurales, ainsi qu’à l’exclusion sociale dont sont victimes les peuples autochtones, afin de garantir la pleine jouissance de leurs droits humains, en particulier de leurs droits économiques, sociaux et culturels  ;

b) De fournir, dans son prochain rapport périodique, des statistiques détaillées sur les résultats et les effets des mesures qui ont été prises pour lutter contre la pauvreté. À cet égard, le Comité renvoie l’État partie à sa déclaration de 2001 sur la pauvreté et le Pacte.

Droit à un logement convenable

46.Le Comité prend note des mesures que l’État partie a prises dans ce domaine, mais il réaffirme sa préoccupation quant à l’insuffisance du budget alloué au logement et des logements sociaux disponibles, en particulier dans les zones rurales. Le Comité est préoccupé par l’absence de législation relative aux expulsions forcées qui réponde aux normes internationales (art. 11).

47. Le Comité recommande à l’État partie  :

a) De redoubler d’efforts pour élaborer et allouer des budgets aux programmes visant à garantir la sécurité d’occupation, y compris l’accès au crédit et aux subventions pour les familles à faibles revenus et les groupes les plus défavorisés. Le Comité rappelle à ce titre son observation générale n o 4 (1991) sur le droit à un logement suffisant  ;

b) D’adopter une législation relative aux expulsions forcées qui soit conforme aux normes et lignes directrices internationales, notamment à l’observation générale n o 7 (1997) sur les expulsions forcées.

Droit à l’alimentation

48.Le Comité constate avec préoccupation que le droit à l’alimentation n’est pas encore garanti par la Constitution. Il est également préoccupé par l’absence d’un cadre législatif complet sur le droit à l’alimentation. Il regrette de ne pas avoir reçu de statistiques à jour et ventilées par zone urbaine et rurale concernant le taux de malnutrition infantile ces cinq dernières années. Le Comité est préoccupé par la persistance de l’insécurité alimentaire dans l’État partie (art. 11)

49. Le Comité recommande à l’État partie  :

a) De charger l’appareil législatif d’achever le processus de réforme constitutionnelle afin que le droit à l’alimentation soit garanti dans la Constitution  ;

b) De prendre toutes les mesures nécessaires pour prévenir et combattre la malnutrition infantile, notamment dans le cadre du plan de développement social 2019 ‑ 2024 et de la politique «  Crecer Juntos » (grandir ensemble)  ;

c) De se reporter à son observation générale nº 12 (1999) sur le droit à une nourriture suffisante et aux Directives volontaires à l’appui de la concrétisation progressive du droit à une alimentation adéquate dans le contexte de la sécurité alimentaire nationale.

Droits à l’eau et à l’assainissement

50.Le Comité constate avec préoccupation que le droit à l’eau n’est pas encore garanti par la Constitution et qu’il existe de grandes disparités entre les zones urbaines et rurales pour ce qui est de l’accès à l’eau potable et à l’assainissement. Il est également préoccupé par le manque d’informations sur les mesures qui ont été mises en œuvre pour réduire les effets possibles des activités extractives sur les eaux transfrontalières (art. 11).

51. Le Comité recommande à l’État partie  :

a) D’intensifier ses efforts pour assurer une protection adéquate de ses ressources en eau en adoptant des mesures appropriées pour le traitement des eaux usées et la prévention et la réduction de la pollution des eaux de surface et souterraines  ;

b) De redoubler d’efforts pour fournir des services d’approvisionnement en eau et d’assainissement à toutes les habitations existantes, en particulier dans les zones rurales  ;

c) De prendre les mesures nécessaires pour que les eaux transfrontalières ne soient pas affectées par les activités extractives, qui nuisent à l’accès à l’eau potable, en particulier des communautés potentiellement touchées  ;

d) De tenir compte de son observation générale n o 15 (2002) sur le droit à l’eau.

Droit à la santé physique et mentale

52.Le Comité prend note des efforts qui sont déployés pour accroître le budget et la qualité du secteur de la santé, et des défis qui se présentent dans le cadre de la riposte à la pandémie de COVID-19, mais il réaffirme sa préoccupation quant au fait que le budget alloué à la santé reste faible pour couvrir correctement les besoins de tous les groupes de population, en particulier les groupes défavorisés et marginalisés (art. 12).

53. Le Comité recommande à l’État partie d’accroître le budget de la santé et de prendre les mesures nécessaires pour mettre en place un système national de santé qui soit accessible à tous sans aucune discrimination, conformément à l’article 12 du Pacte et compte tenu de l’observation générale n o 14 (2000) sur le droit au meilleur état de santé susceptible d’être atteint.

Droits à la santé et à un niveau de vie suffisant en prison

54.Le Comité est conscient des efforts que l’État partie déploie pour améliorer les conditions de vie dans les centres pénitentiaires et les lieux de détention, mais il est préoccupé par les informations concernant l’augmentation de la population dans ces centres, en particulier dans le cadre du régime d’exception, et en particulier les conditions de surpopulation, le manque de soins de santé et l’accès insuffisant à une alimentation adéquate et à l’eau potable (art. 11 et 12).

55. Le Comité recommande à l’État partie  :

a) De mettre tout en œuvre pour éliminer la surpopulation dans les centres pénitentiaires et les lieux de détention, en garantissant des conditions de vie satisfaisantes, en offrant un accès adéquat aux soins de santé, y compris à des soins de santé procréative et sexuelle, et en veillant à ce que les détenus reçoivent une nourriture suffisante et de l’eau potable  ;

b) De permettre aux organisations de la société civile d’accéder aux établissements pénitentiaires et leur assurer les moyens de pouvoir surveiller la situation en ce qui concerne l’exercice des droits consacrés par le Pacte  ;

c) De tenir compte de l’observation générale n o 32 (2007) du Comité des droits de l’homme sur le droit à un procès équitable et à l’égalité devant les tribunaux et les cours de justice, et de l’Ensemble de règles minima des Nations Unies pour le traitement des détenus (Règles Nelson Mandela).

Santé sexuelle et procréative

56.Le Comité prend note des efforts déployés par l’État partie, mais il reste préoccupé par l’insuffisance et l’inadéquation des services de santé sexuelle et procréative disponibles, en particulier pour les jeunes femmes, situation qui, malgré des améliorations, continue de se traduire par de forts taux de mortalité maternelle et des taux de grossesse élevés chez les adolescentes, en particulier dans les zones rurales (art. 12).

57. Le Comité recommande à l’État partie  :

a) De redoubler d’efforts pour mettre en œuvre la stratégie nationale intersectorielle de prévention de la grossesse chez les filles et les adolescentes 2017-2027, et de garantir l’accessibilité et la disponibilité des services de santé sexuelle et procréative, en particulier dans les zones rurales  ;

b) De développer et de renforcer l’éducation à la santé sexuelle et procréative dans les programmes des établissements d’enseignement primaire et secondaire de filles et de garçons, de façon qu’elle soit complète et adaptée à chaque tranche d’âge, et de mettre en place des programmes d’éducation et de sensibilisation de l’opinion publique dans ce domaine  ;

c) De tenir compte de son observation générale n o 22 (2016) sur le droit à la santé sexuelle et procréative.

Avortement

58.Le Comité réaffirme sa préoccupation face à la persistance de l’interdiction totale de l’avortement, sans aucune considération des situations exceptionnelles, ce qui a conduit à des cas de souffrance et d’injustice graves, touchant particulièrement les femmes pauvres et peu instruites. Le Comité est particulièrement préoccupé par les cas dans lesquels des femmes qui s’étaient présentées dans des établissements de santé dans un état alarmant ont été dénoncées car suspectées de s’y être fait avorter. Dans certains cas, elles se sont vu imposer des sanctions pénales disproportionnées sans que la procédure régulière n’ait été suivie. De même, le Comité est préoccupé par le nombre élevé des avortements non médicalisés et clandestins qui ont de graves conséquences sur la santé et restent parmi les principales causes de la mortalité maternelle (art. 12).

59. Le Comité exhorte l’État partie à  :

a) Réviser sa législation en ce qui concerne l’interdiction totale de l’avortement afin de la rendre compatible avec d’autres droits fondamentaux, comme le droit de la femme à la santé et à la vie, ainsi que son droit à la dignité  ;

b) Traiter par des soins de grande qualité les complications causées par les avortements pratiqués dans des conditions dangereuses au lieu de privilégier les poursuites pénales.

Droit à l’éducation

60.Le Comité prend note de l’augmentation du budget alloué à l’éducation et l’amélioration des indicateurs en termes de réduction de l’analphabétisme et de parité entre les sexes dans l’accès à l’éducation, mais il est préoccupé par l’insuffisance du budget et par les taux élevés d’abandon scolaire dans l’enseignement secondaire. Il est également préoccupé par les différences notables entre les élèves issus de ménages de différents niveaux de revenus en ce qui concerne l’accès à l’école et la poursuite de la scolarisation, ainsi que par les inégalités entre les écoles urbaines et rurales pour ce qui est de la qualité de l’enseignement et des infrastructures (art. 13 et 14).

61. Le Comité recommande à l’État partie  :

a) D’allouer les ressources nécessaires pour garantir la qualité du système éducatif et des infrastructures dans les zones rurales et urbaines  ;

b) De poursuivre le plan d’alphabétisation et de redoubler d’efforts en ce qui concerne les zones rurales et les communautés autochtones  ;

c) De mettre en place des programmes pour prévenir l’abandon scolaire et s’attaquer aux causes du problème.

Éducation bilingue interculturelle

62.Le Comité prend note des efforts déployés par l’État partie, mais il constate toujours avec préoccupation que les jeunes, en particulier autochtones, ont un accès limité à l’enseignement secondaire et supérieur et ont des difficultés à poursuivre leurs études à ce niveau-là, et que les communautés autochtones, en particulier les filles et les femmes, enregistrent des taux élevés d’analphabétisme (art. 13 et 14).

63. Le Comité recommande à l’État partie  :

a) De prendre des mesures efficaces pour garantir l’accès des peuples autochtones à l’éducation dans leur propre langue et à l’éducation interculturelle, en veillant à ce que cette éducation intègre les traditions et les connaissances culturelles des peuples autochtones  ;

b) De redoubler d’efforts pour préserver les langues autochtones et promouvoir leur utilisation, notamment en veillant à ce que les municipalités et les territoires les enseignent et les utilisent dans les écoles, selon qu’il convient.

Accès à Internet

64.Le Comité prend note de ce que fait l’État partie pour renforcer l’accès à Internet, mais il constate avec préoccupation que cet accès reste limité, en particulier pour les peuples autochtones, les populations rurales et les ménages vivant dans la pauvreté (art. 15).

65. Le Comité recommande à l’État partie de redoubler d’efforts pour garantir à tous, et en particulier aux groupes marginalisés et défavorisés, un accès de qualité à Internet.

D.Autres recommandations

66. Le Comité recommande à l’État partie de ratifier les instruments relatifs aux droits de l’homme auxquels il n’est pas encore partie, à savoir la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées et le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

67.Le Comité recommande à l’État partie de tenir pleinement compte des obligations que lui impose le Pacte et de garantir le plein exercice des droits qui y sont consacrés dans la mise en œuvre au niveau national du Programme de développement durable à l’horizon 2030, y compris dans le cadre du relèvement après la pandémie de COVID-19. La réalisation des objectifs de développement durable serait sensiblement facilitée si l’État partie établissait des mécanismes indépendants pour le suivi des progrès et considérait les bénéficiaires des programmes publics comme les titulaires de droits qu’ils peuvent faire valoir. En outre, le Comité recommande à l’État partie de soutenir les engagements pris au niveau mondial dans le contexte de la décennie d’action en faveur des objectifs de développement durable. Appliquer les objectifs d’après les principes de participation, de responsabilité et de non-discrimination permettrait de faire en sorte que nul ne soit laissé de côté. À cet égard, le Comité appelle l’attention de l’État partie sur sa déclaration relative à l’engagement de ne laisser personne de côté .

68.Le Comité prie l’État partie de diffuser largement les présentes observations finales à tous les niveaux de la société, en particulier auprès des parlementaires, des agents de l’État et des autorités judiciaires, et de l’informer, dans son prochain rapport périodique, des mesures prises pour y donner suite. Le Comité souligne le rôle crucial du Parlement dans la mise en œuvre des présentes observations finales et engage l’État partie à assurer sa participation aux futures procédures de rapport et de suivi. Le Comité engage l’État partie à collaborer avec le Bureau du Procureur national chargé de la défense des droits de l’homme, les organisations non gouvernementales et d’autres membres de la société civile, au suivi des présentes observations finales et au processus de consultation nationale avant la soumission de son prochain rapport périodique.

69. Conformément à la procédure concernant la suite à donner aux observations finales adoptées par le Comité, l’État partie est prié de fournir, dans un délai de vingt-quatre mois à compter de l’adoption des présentes observations finales, des informations sur l’application des recommandations faites par le Comité aux paragraphes 5 ( é tat d’urgence), 11 (indépendance de la magistrature) et 59 a) (avortement).

70. Le Comité demande à l’État partie de soumettre son septième rapport périodique au titre de l’article 16 du Pacte avant le 31 octobre 2027, à moins qu’il ne soit informé d’une modification du cycle d’examen. Conformément à la résolution 68/268 de l’Assemblée générale, le rapport ne devra pas dépasser 21 200 mots.