Nations Unies

E/C.12/MRT/CO/1

Conseil économique et social

Distr. générale

10 décembre 2012

Français

Original: anglais

Comité des droits économiques, sociaux et culturels

Observations finales concernant le rapport initial de la Mauritanie, adoptées par le Comitéà sa quarante‑neuvième session(12-30 novembre 2012)

1.Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a examiné le rapport initial de la Mauritanie sur la mise en œuvre du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (E/C.12/MRT/1) à ses 36e, 37e et 38e séances, tenues les 15 et 16 novembre 2012 (E/C.12/2012/SR.36 à 38), et a adopté, à sa 58e séance tenue le 30 novembre 2012, les observations finales ci-après.

A.Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport initial de la Mauritanie. Il est satisfait du dialogue avec la délégation de l’État partie, mais regrette l’absence d’experts des ministères et services compétents. Il aurait souhaité des réponses plus précises et complètes aux questions posées lors du dialogue.

3.Le Comité regrette l’absence totale d’éléments d’information concernant l’application de l’article 3 du Pacte sur le droit égal de l’homme et de la femme au bénéfice de tous les droits économiques, sociaux et culturels. Il regrette aussi l’insuffisance des éléments fournis sur l’application de l’article 6 relatif au droit au travail, de l’article 7 relatif au droit à des conditions de travail justes et favorables, et de l’article 8 relatif aux droits syndicaux.

4.Le Comité remercie l’État partie pour ses réponses écrites à la liste des points à traiter (E/C.12/MRT/Q/1/Add.1), mais regrette que les réponses n’aient pas couvert toutes les questions.

B.Aspects positifs

5.Le Comité note avec satisfaction que l’État partie a ratifié plusieurs instruments relatifs aux droits de l’homme au cours des cinq dernières années.

6.Le Comité prend acte avec satisfaction:

a)Du développement des infrastructures publiques intervenu ces dernières années, qui a désenclavé certaines régions isolées et rapproché les services publics de la population;

b)De l’assainissement des quartiers de taudis de Nouakchott;

c)De l’adoption de la politique de santé nationale et du plan national 2012 de développement sanitaire, et de la création de la faculté de médecine de l’Université de Nouakchott;

d)De l’amélioration notable du taux de scolarisation dans l’enseignement primaire depuis l’adoption de la loi no 2001‑054 sur l’éducation de base obligatoire et l’application du programme national 2001-2010 pour le développement du secteur éducatif.

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

7.Le Comité s’inquiète de ce que les dispositions du Pacte n’ont pas été invoquées par les tribunaux de l’État partie, en dépit du fait que la Constitution garantit la primauté des accords internationaux ratifiés par l’État partie sur les lois nationales. Le Comité s’inquiète également de ce que le Pacte n’a jamais été publié au Journal officiel (art. 2, par. 1).

Le Comité demande à l ’ État partie de faire en sorte que le Pacte soit publié au Journal officiel. Il lui demande également de sensibiliser les membres du système judiciaire et le public aux droits économiques, sociaux et culturels énoncés dans le Pacte ainsi qu ’ au fait que ces droits peuvent être invoqués en justice, et de prendre les mesures nécessaires, telles que la fourniture effective d ’ une aide juridictionnelle, afin de promouvoir l ’ accès à la justice. Le Comité demande à l ’ État partie de présenter dans son prochain rapport périodique des renseignements détaillés sur les affaires jugées par les tribunaux dans lesquelles les dispositions du Pacte ont été invoquées. Le Comité appelle l ’ attention de l ’ État partie sur son Observation générale n o 9 (1998) concernant l ’ application du Pacte au niveau national.

8.Le Comité s’inquiète des effets néfastes des activités extractives et minières menées dans l’État partie sur l’environnement et sur l’exercice par la population de son droit à la santé, à l’image des problèmes sérieux de santé publique constatés dans des villes minières comme Akjoujt. Le Comité craint que cela ne soit le signe de mesures réglementaires insuffisantes et de moyens d’application trop légers. Il note également avec préoccupation que ces activités extractives et minières n’ont créé jusqu’à maintenant que peu d’emplois pour la population locale (art. 2 et 11).

Le Comité invite l ’ État partie à : a) appliquer l ’ Initiative pour la transparence dans les industries extractives; b)  veiller à ce que des sanctions appropriées soient appliquées en cas de non-respect des clauses environnementales des contrats extractifs et miniers; c) prendre des mesures correctives pour remédier aux risques pour l ’ environnement et la santé créés par des activités extractives et minières; d) garantir l ’ obtention du consentement préalable libre et éclairé de la population dans les processus décisionnels relatifs à des projets extractifs et miniers qui la concernent ; e) veiller à ce que les activités de cette nature , mais aussi les ressources qu ’ elles engendrent, améliorent concrètement la jouissance par la population des droits économiques, sociaux et culturels .

9.Le Comité est préoccupé par la corruption qui touche tous les services de l’État, y compris l’appareil judiciaire, engendrant une perte considérable de ressources nécessaires à la mise en œuvre des droits économiques, sociaux et culturels.

Le Comité demande à l ’ État partie de procéder rapidement à la mise en place de l ’ observatoire national de lutte contre la corruption, et lui recommande de redoubler d ’ efforts dans la lutte contre la corruption et l ’ impunité qui y est associée et de garantir la transparence dans la conduite des affaires publiques, en droit et dans la pratique. Il lui recommande également de prendre des mesures pour sensibiliser les responsables politiques, les parlementaires et les fonctionnaires nationaux et locaux aux coûts économique et social de la corruption, ainsi que les juges, les procureurs et les agents des forces de l ’ ordre à la stricte application de la législation anticorruption.

10.Le Comité note avec une vive préoccupation que, en vertu du Code du statut personnel de 2001, les femmes adultes qui ne sont pas mariées sont placées sous tutelle, ou «hadhana». Le Comité est également profondément préoccupé par les autres dispositions du Code attribuant des rôles, des obligations et des droits différents au mari et à la femme dans les affaires familiales, et des différences de traitement entre filles et garçons, ce qui confère aux femmes et aux filles un statut inférieur dans la société et les prive des droits égaux que leur garantit le Pacte. Le Comité est en outre préoccupé par le fait que l’État partie, invoquant des motifs religieux, se montre réticent à prendre des dispositions pour modifier le Code de 2001 (art. 3 et 10).

Rappelant que la Déclaration de Vienne a réaffirmé l ’ obligation pour les États de lutter contre les pratiques discriminatoires reposant sur la religion ou la croyance et fondées sur le sexe , et que l ’ État partie a l ’ obligation, en vertu du Pacte, de garantir le droit égal qu ’ ont l ’ homme et la femme au bénéfice de tous les droits économiques, sociaux et culturels, le Comité prie instamment l ’ État partie de prendre des mesures en vue de modifier les dispositions du Code du statut personnel de 2001 qui sont discriminatoires en raison du sexe, en particulier à l ’ égard des femmes . Tout particuli è r ement , il invite l ’ État part ie à sensibiliser la population, y compris les responsables religieux , au caractère discriminatoire de la tutelle a insi qu ’ à la différenciation des rôles et des responsabilités des époux dans les affaires familiales , pour autant qu ’ ils soient contraires au Pacte . Il invite également l ’ État partie à définir et interdire dans sa législation toutes les formes de discrimination à l ’ égard des femmes. À  cet égard , il renvoie l ’ État partie à son Observation générale n o  16 (2005) sur le droit égal qu ’ ont l ’ homme et la femme au bénéfice de tous les droits économiques, sociaux et culturels.

11.Le Comité note avec préoccupation que plus de la moitié de la population féminine de l’État partie est illettrée. Il constate également avec préoccupation que seul un pourcentage réduit de cette population est employé à un travail salarié et que peu de femmes occupent des postes élevés au Gouvernement et dans les organes élus, en dépit de la mise en place de quotas. Le Comité est préoccupé également par la réticence de l’État partie à apporter des changements, comme en témoignent les propos de la délégation selon lesquels la place des femmes dans la société n’est pas accomplie par l’emploi ou une carrière professionnelle (art. 3 et 6).

Le Comité invite instamment l ’ État partie à remédier aux causes profondes du chômage des femmes, notamment en: a) menant des campagnes de sensibilisation pour changer la perception des rôles dévolus aux hommes et aux femmes dans la société; b) veillant à ce que les filles poursuivent leur éducation à tous les niveaux et aient accès à l ’ enseignement secondaire et supérieur; c) veillant au respect effectif des quotas prévus par la loi; d) éliminant les autres formes de discrimination à l ’ égard des femmes dans l ’ emploi, notamment l ’ impossibilité d ’ accéder à un poste dans la magistrature.

12.Le Comité s’inquiète du fait que, en dépit de l’application de la stratégie nationale 2008-2012 pour l’emploi, le taux de chômage reste élevé dans l’État partie, en particulier chez les jeunes (art. 6).

Le Comité invite instamment l ’ État partie à poursuivre ses efforts de lutte contre le chômage , en particulier celui qui frappe les jeunes, et à veiller à ce que les mesures prises et les ressources investies soient à la hauteur de l ’ ampleur du chômage dans l ’ État partie , en vue d ’ assurer la réalisation progressive du droit au travail . Il invite également l ’ État partie à adopter une approche fondée sur les droits de l ’ homme dans la mise en œuvre des priorités pour 2011-2015 . À cet égard, le Comité invite l ’ État partie à prendre en considération son Observation générale n o  18 (2005) sur le droit au travail.

13.Le Comité s’inquiète de ce qu’un grand nombre de personnes et de familles sont employées dans des conditions d’esclavage de facto, en dépit de l’adoption en 2007 de la loi sur l’esclavage. Il s’inquiète également du nombre très faible de poursuites engagées au titre de cette loi, bien qu’elle soit entrée en vigueur en 2007 (art. 6, 7 et 11).

Le Comité invite instamment l ’ État partie à prendre des mesures énergiques en vue d ’ éliminer l ’ esclavage et à mettre en œuvre les dispositions de la loi sur l ’ esclavage. À cet égard, il invite l ’ État partie à s ’ atteler résolument au plan d ’ action pour l ’ application des recommandations formulées par la Rapporteuse spéciale sur les formes contemporaines d ’ esclavage, y compris leurs causes et leurs conséquences, à la suite de sa mission dans l ’ État partie en 2009. L ’ État partie devrait également sensibiliser la population au fait que tout travail doit être accepté volontairement et doit respecter les droits fondamentaux de la personne humaine ainsi que les droits des travailleurs en matière de sécurité et d ’ hygiène au travail , et de rémunération.

14.Le Comité s’inquiète de l’absence de toute forme de contrôle des conditions de travail dans l’économie informelle et de l’absence de possibilités d’affiliation à la sécurité sociale pour les travailleurs de ce secteur. Il s’inquiète également de ce que l’économie informelle continue d’employer la plus grande partie de la population active, en dépit des mesures adoptées par l’État partie pour favoriser l’enregistrement des entreprises et réglementer le travail domestique (art. 7).

Le Comité recommande à l ’ État partie de redoubler d ’ efforts en vue de l a réduction progressive du taux d ’ emploi dans le secteur in formel, notamment en donnant la possibilité à chaque travailleur de s ’ inscrire et de s ’ affilier aux régimes de sécurité sociale, indépendamment du fait que l ’ employeur soit enregistré ou non. Il recommande également à l ’ État partie de sensibiliser la population au fait que les droits du travail, en particulier le droit à des conditions de travail justes et favorables, s ’ appliquent également à l ’ économie informelle.

15.Le Comité regrette que l’État partie n’ait pas précisé si le niveau du salaire minimum national permet d’assurer un niveau de vie convenable aux travailleurs et à leur famille (art. 7).

Le Comité invite l ’ État partie à prendre des mesures pour garantir que le montant du salaire minimum national soit suffisant pour assurer un niveau de vie convenable à tous les travailleurs et à leur famille.

16.Le Comité constate avec préoccupation que la création d’un syndicat est subordonnée à une autorisation, comme le disposent les articles 75 et 276 du Code du travail de 2004. Il constate également avec préoccupation que l’exercice des droits syndicaux n’est pas garanti pleinement en pratique, comme en témoignent l’exclusion des syndicats du dialogue social et les informations faisant état d’agissements antisyndicaux de la part de sociétés multinationales présentes dans l’État partie (art. 8).

Le Comité demande instamment l ’ État partie de mettre sa législation sur les droits syndicaux en conformité avec l ’ article 8 du Pacte et les dispositions des C onventions n o s 87 (1948) et 98 (1949) de l ’ Organisation internationale du Travail (OIT). Il l ’ engage également à protéger les droits syndicaux , en particulier dans le secteur privé , et à enquêter de manière efficace sur toutes les allégations de violation des droits syndicaux portées à son attention.

17.Le Comité note avec préoccupation que le système de sécurité sociale de l’État partie s’adresse à la partie de la population occupant les emplois les plus stables. Il relève également avec préoccupation qu’il n’existe actuellement aucun système pour la majeure partie de la population dont le risque de perte de revenus est le plus élevé ou qui est sans revenus. Il est également préoccupé de constater que le système existant ne prévoit pas de couverture pour les prestations de chômage et de vieillesse (art. 9).

Le Comité invite l ’ État partie à prendre les mesures nécessaires pour améliorer la couverture du système de sécurité sociale. En particulier, il recommande à l ’ État partie: a) d ’ améliorer la gestion des institutions de protection sociale existantes; b) d ’ étendre la couverture du système au chômage et à la vieillesse et de mettre au point des systèmes non contributifs ; c)  d ’ adopter les mesures législatives et réglementaires nécessaires pour mettre en place d ’ autres formes de programmes contributifs, notamment des programmes à gestion privée et des programmes communautaires ou mutuels; d) d ’ appuyer la mise en place de programmes qui soient abordables, d ’ implantation locale et adaptés à des revenus irréguliers. Le Comité renvoie l ’ État partie à son Observation générale n o 19 (2008) sur le droit à la sécurité sociale.

18.Le Comité note avec préoccupation que le mariage précoce reste courant dans l’État partie et qu’une personne sans capacité juridique peut être contrainte de se marier sans y consentir si le tuteur estime que c’est dans son intérêt (art. 10).

Le Comité invite instamment l ’ État partie à lutter contre le mariage précoce avant l ’ âge minimal légal de 18 ans, et à modifier l ’ article 6 du Code du statut personnel de façon à garantir que le mariage sera consenti librement par les futurs époux.

19.Le Comité relève avec préoccupationqu’un grand nombre de naissances ne sont pas enregistrées dans l’État partie et que la réforme de l’état civil engagée en 2010 pose des obstacles supplémentaires à l’enregistrement des naissances, y compris en exigeant les documents de mariage des parents (art.10).

Le Comité invite instamment l ’ État partie à simplifier les procédures d ’ enregistrement des naissances de façon à tenir compte des contraintes auxquelles se heurte la population, notamment d es obstacles géographiques et de la difficulté à obtenir ou à fournir des documents officiels , y compris lorsqu ’ il s ’ agit d ’ enfants nés hors mariage . Le Comité invite aussi l ’ État partie à faciliter l ’ enregistrement des naissances en autorisant l ’ enregistrement tardif sans pénalité, ainsi que l ’ enregistrement par l ’ intermédiaire du système de soins de santé , et en associant aux campagnes de vaccination systématique des campagnes de promotion de l ’ enregistrement des naissances.

20.Le Comité est préoccupé par la situation de vulnérabilité dans laquelle se trouvent les enfants qui vivent dans la rue ainsi que ceux qui travaillent dans l’État partie (art.10).

Le Comité recommande à l ’ État partie: a) d ’ appliquer strictement la législation existante contre le travail des enfants et d ’ accélérer l ’ adoption du projet de loi sur l ’ interdiction du travail des enfants ; b) d ’ envisager d ’ étendre à l ’ enseignement secondaire les dispositions relatives à l ’ enseignement obligatoire comme moyen de prévenir le travail des enfants et d e réduire le nombre d ’ enfants qui vivent dans la rue; c) de s ’ attaquer aux causes profondes du travail des enfants et de la situation des enfants des rues , dans le cadre de la stratégie de réduction de la pauvreté de l ’ État partie; d) d ’ augmenter la capacité d ’ accueil du Centre de protection et d ’ intégration sociale des enfants. Le Comité demande à l ’ État partie de donner, dans son prochain rapport périodique, des informations, y compris des données statistiques, sur les poursuites engagées contre les auteurs d ’ infractions ayant trait au travail des enfants .

21.Le Comité constate avec préoccupation que la pratique des mutilations génitales féminines (MGF) demeure très répandue dans l’État partie, malgré les mesures prises (art.10).

Le Comité engage l ’ État partie à mettre réellement en œuvre la stratégie nationale en faveur de l’élimination de la pratique des MGF.Il recommande à l ’ État partie d ’étendre le champ d’application de la nouvelle législation pénale relative au viol à toutes les formes de violence sexuelle, y compris le viol conjugal, et d ’ assurer aux victimes une protection suffisante pour leur éviter de nouveaux traumatismes aux différents stades de la procédure judiciaire. Il recommande également à l ’ État partie de fournir aux victimes de la violence sexuelle une assistance et des services de réadaptation appropriés .

22.Le Comité relève avec préoccupation que, malgré les progrès accomplis en matière de réduction de la pauvreté, une grande partie de la population, en particulier les femmes, les anciens esclaves et les descendants d’esclaves, vit encore dans la pauvreté, y compris l’extrême pauvreté. Le Comité est particulièrement préoccupé par le fait que les disparités entre les différentes régions (wilayas) demeurent importantes, en dépit de la mise en œuvre des programmes régionaux de réduction de la pauvreté (art. 11).

Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour réduire encore la pauvreté et , en particulier, éliminer l ’ extrême pauvreté, en accordant une attention particulière aux femmes, aux anciens esclaves et aux descendants d ’ esclaves ainsi qu ’aux personnes et aux groupes défavorisé s et marginalisés vivant dans les wilayas les plus touchées par la pauvreté. Le Comité demande à l ’ État partie de faire figurer dans son prochain rapport pé riodique des données ventilées et comparatives, par année et par wilaya , sur le pourcentage de la population qui vit dans la pauvreté et l ’ extrême pauvreté. Le Comité appelle l ’ attention de l ’ État partie sur sa déclaration sur la pauvreté et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels .

23.Tout en étant conscient de la grande sécheresse dont souffre souvent l’État partie, le Comité exprime sa préoccupation devant les fréquentes crises alimentaires qui surviennent dans l’État partie ainsi que devant l’insécurité alimentaire chronique qui a touchéquelque 500 000 à 2 millions de personnes au cours des cinq dernières années. De plus, le Comité est préoccupé par le fait que, malgré les mesures prises par l’État partie pour faire face à la pénurie alimentaire, notamment les programmes d’action rapide, il n’a reçu aucune information sur les mesures prises pour s’attaquer aux causes structurelles de l’insécurité alimentaire, telles qu’établies par le Commissariat à la sécurité alimentaire(art. 11).

Le Comité invite instamment l ’ État partie à renforcer se s mécanismes en faveur de la sécurité alimentaire, de la production à la distribution. Il demande à l ’ État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des informations sur les mesures prises à cet égard et sur les résultats obtenus. Le Comité renvoie l ’ État partie à son Observation générale n o 12 (1999) sur le droit à une nourriture suffisante.

24.Le Comité regrette que l’État partie n’ait pas fourni d’informations sur le phénomène des sans-abri, le recours aux expulsions forcées et la pénurie de logements sociaux, pas plus que sur les mesures prises pour y remédier (art. 11).

Le Comité demande à l ’ État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des informations détaillées sur les mesures prises pour remédier à la situation des sans-abri, aux expulsions et à la pénurie de logements sociaux, aussi bien dans les zones urbaines que dans les zones rurales.

25.Le Comité constate avec préoccupation que, malgré la mise en œuvre du Plan d’action national (2009-2011), l’accès aux services de santé de base demeure limité dans les zones rurales et reculées. De plus, le Comité exprime sa préoccupation quant à la pénurie de personnel qualifié et de matériel médical. Il constate également avec préoccupation que les soins de santé sont d’un coût prohibitif pour la majorité de la population et que seuls les fonctionnaires et les parlementaires peuvent adhérer au régime d’assurance maladie de l’État partie (art. 12).

Le Comité recommande à l ’ État partie d’entreprendre la décentralisation des ressources et activités relatives à la santé en vue de parvenir à l’universalité des services de soins de santé. Il invite également l’État partie à mettre en œuvre le plan national pour les ressources humaines , en mettant l ’ accent sur la q ualité de l’enseignement médical et des programmes de formation continue des professionnels de santé et sur le maintien du personnel dans les zones reculées . Le Comité engage vivement l ’ État partie à mettre au point des plans d ’ assurance maladie de façon que les services de santé soient financièrement accessibles à tous et que le s dépenses de santé ne pèse nt pas de manière disproportionnée sur les ménages les plus pauvres. Le Comité renvoie l ’ État partie à son Observation générale n o 14 (2000) sur le droit au meilleur état de santé susceptible d ’ être atteint.

26.Le Comité est préoccupé par l’insuffisance du suivi et du contrôle exercés par l’État partie sur le fonctionnement des prestataires de services médicaux privés ainsi que sur le prix et la qualité des fournitures médicales mises sur le marché. Il est également préoccupé par l’absence de législation adéquate régissant la pratique de la médecine traditionnelle (art. 12).

Le Comité prie instamment l ’ État partie de prendre les mesures appropriées pour appliquer de façon effective la législation existante aux services de santé privé s ainsi qu ’ au coût et à la qualité des fournitures médicales mises sur le marché. Le Comité demande à l ’ État partie de réglementer la pratique de la médecine traditionnelle de façon à satisfaire aux critères de qualité et d ’ accessibilité requis pour respecter le droit à la santé. Le Comité appelle l’attention de l ’ État partie sur son Observation générale n o 14 (2000) .

27.Le Comité est préoccupé par le fait que, bien que l’État partie soit parvenu à contenir la propagation du virus, la prévalence du VIH/sida est exceptionnellement élevée chez les travailleurs du sexe et les détenus. Le Comité est également préoccupé par des facteurs de risque tels que la connaissance limitée qu’ont les femmes des méthodes de prévention et la très faible utilisation de préservatifs, en particulier parmi les jeunes hommes sexuellement actifs (art. 12).

Le Comité encourage l ’ État partie à poursuivre les efforts entrepris dans le cadre de la lutte contre le VIH/sida et l ’ engage à prendre des mesures spécifiques pour protéger l es travailleurs du sexe et l es détenus, et à diffuser des informations sur les moyens de prévenir efficacement le VIH/sida , notamment l’utilisation de préservatifs . Le Comité recommande à l ’ État partie de décentraliser la fourniture de traitements antirétroviraux en confiant cette tâche aux hôpitaux et aux centres de soins régionaux.

28.Le Comité constate avec préoccupation que la mortalité maternelle et infantile demeure élevée malgré l’amélioration des services de santé maternelle fournis. Le Comité est également préoccupé par le très faible taux de recours à la contraception dans l’État partie (art. 12).

Le Comité demande à l ’ État partie de continuer d ’ élargir l ’ offre de soins obstétriques et néonata ls ainsi que l ’ offre de services de santé sexuelle et procréative, en particulier dans les zones rurales et reculées .

29.Le Comité constate avec préoccupation que l’accès à l’eau potable continue de poser problème malgré les investissements considérables que l’État partie a faits. Le Comité constate également avec préoccupation que l’absence de services d’assainissement adéquats a provoqué la contamination des rares ressources en eau de l’État partie dans certaines régions (art. 12).

Le Comité engage l ’ État partie à investir davantage de ressources dans l ’ amélioration de l ’ accès à l ’ eau potable et à prendre des mesures pour protéger les sources d ’ eau de la contamination, et à veiller à ce que l ’ eau fournie à la population soit saine. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ améliorer l ’ accès des groupes les plus défavorisés et marginalisés à des services d ’ assainissement sûrs, en particulier dans les zones rurales. Le Comité invite l ’ État partie à s ’ assurer que les mesures relatives à l ’ eau et à l ’ assainissement anticipent l ’ augmentation de la demande qui ne saurait tarder dans les zones urbaines du fait de la sédentarisation des nomades et de l ’ exode rural . Le Comité renvoie l ’ État partie à son Observation générale n o 15 (2002) sur le droit à l ’ eau et à sa déclaration sur le droit à l ’ assainissement.

30.Le Comité demeure préoccupé par le taux élevé d’abandon scolaire et par la faible qualité de l’enseignement, malgré l’augmentation du taux d’inscription dans l’enseignement primaire. Le Comité est préoccupé par le faible taux d’alphabétisation qui en résulte dans l’État partie.Il est également préoccupé par le fait que moins d’enfants, en particulier moins de filles, ont accès à l’enseignement secondaire (art.13).

Le Comité engage l ’ État partie à continuer de se pencher sur les divers obstacles qui entravent l ’ exercice du droit à l ’ éducation, y compris la distance à parcourir pour se rendre à l ’ école , le coût de l ’ éducation et les facteurs sociaux et culturels en jeu , tels que les tâches domestiques confiées aux filles. Le Comité engage également l ’ État partie à intensifier ses efforts en faveur de la réinsertion scolaire des enfants qui ont abandonné l ’ école, à investir dans la formation des enseignants, à améliorer l ’ acc essibilité aux enseignements secondaire et universitaire ainsi qu ’ à la formation continue, et à mettre en place des programmes de bourses . Le Comité encourage l ’ État partie à tenir compte de la présente recommandation lors du prochain examen du secteur éducatif.

31.Tout en prenant acte du bilinguisme arabe-français pratiqué dans le système éducatif de l’État partie, le Comité constate avec préoccupation que l’enseignement et l’utilisation des autres langues nationales − pulaar, soninké et wolof − ne sont pas suffisamment promus.

Le Comité engage l ’ État partie à promouvoir l ’ enseignement du pul a ar, du soninké et du wolof à l’école ainsi que leur utilisation dans les documents officiels pour éviter toute discrimination à l ’ éga rd des non- arabophones.

32.Le Comité regrette de ne pas avoir reçu d’informations sur les mesures concrètes prises pour promouvoir le patrimoine culturel propre aux minorités ethniques de l’État partie, à savoir lesminorités pulaar, soninké et wolof (art. 15).

Le Comité demande à l ’ État partie de fournir dans son prochain rapport périodique des informations sur les mesures prises et les sommes prélevées sur le budget de la culture pour promouvoir le patrimoine culturel des minorités ethniques. À cet égard, le Comité renvoie l ’ État partie à son Observation générale n o 21 (2009) sur le droit de chacun de participer à la vie culturelle.

33. Le Comité encourage l ’ État partie à continuer de promouvoir la participation de la population à la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels, notamment en instaurant un système déclaratif permettant aux organisations non gouvernementales de s’enregistrer gratuitement et, ainsi, de fonctionner en toute indépendance, et en levant les restrictions que la loi sur la libéralisation des radios impose aux stations de radio sans but lucratif .

34. Le Comité encourage l ’ État partie à envisager de signer et de ratifier le Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.

35. Le Comité demande à l ’ État partie de diffuser largement les présentes observations finales dans tous les secteurs de la société, en particulier au sein de l ’ administration, de l ’ appareil judiciaire et des organisations de la société civile, de les faire traduire et de leur donner la plus large publicité possible, et de l ’ informer dans son prochain rapport périodique des mesures qu ’ il aura prises pour y donner suite. Il invite également l ’ État partie à continuer d ’ associer tous les acteurs concernés, notamment l ’ institution nationale des droits de l ’ homme, les organisations non gouvernementales et d ’ autres membres de la société civile , au processus de discussion au niveau national avant la soumission de son prochain rapport périodique.

36. Le Comité prie l ’ État partie de soumettre son deuxième rapport périodique, établi conformément aux directives révisées du Comité concernant l ’ établissement des rapports adoptées en 2008 (E/C.12/2008/2), d ’ ici au 30 novembre 2017.