Nom du membre

Nationalité

Mandat venant à expiration le 19 janvier

Nourredine Amir

Algérie

2014

Alexei S. Avtonomov

Fédération de Russie

2016

José Francisco Calí Tzay

Guatemala

2016

Anastasia Crickley

Irlande

2014

Fatimata-Binta Victoire Dah

Burkina Faso

2016

Régis de Gouttes

France

2014

Ion Diaconu

Roumanie

2016

Kokou Mawuena Ika Kana (Dieudonné) Ewomsan

Togo

2014

Huang Yong’an

Chine

2016

Patricia Nozipho January-Bardill

Afrique du Sud

2016

Anwar Kemal

Pakistan

2014

Gun Kut

Turquie

2014

Dilip Lahiri

Inde

2016

Jose A. Lindgren Alves

Brésil

2014

Pastor Elias Murillo Martínez

Colombie

2016

Waliakoye Saidou

Niger

2014

Patrick Thornberry

Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord

2014

Carlos Manuel Vázquez

États-Unis d’Amérique

2016

D.Bureau du Comité

6.En 2012, le Bureau du Comité se composait des membres du Comité suivants:

Président:Alexei S. Avtonomov (2012-2014)

Vice-Présidents:Nourredine Amir (2012-2014)José Francisco Calí Tzay (2012-2014)Dilip Lahiri (2012-2014)

Rapporteur:Anastasia Crickley (2012-2014)

E.Coopération avec l’Organisation internationale du Travail,le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la scienceet la culture, les procédures spéciales du Conseil des droitsde l’homme et les mécanismes régionaux des droits de l’homme

7.Conformément à la décision 2 (VI) du Comité, en date du 21 août 1972, sur la coopération avec l’Organisation internationale du Travail (OIT) et l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO), ces deux organisations ont été invitées à se faire représenter aux sessions du Comité. Conformément à la pratique récente du Comité, le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) a été également invité à s’y faire représenter.

8.Les rapports que la Commission d’experts de l’OIT pour l’application des conventions et recommandations avait présentés à la Conférence internationale du Travail ont été mis à la disposition des membres du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, conformément aux accords de coopération conclus entre le Comité et la Commission. Le Comité a pris note avec satisfaction des rapports de la Commission d’experts, en particulier des chapitres qui traitent de l’application de la Convention no 111 concernant la discrimination (Emploi et profession), de 1958, et de la Convention no 169 relative aux peuples indigènes et tribaux, de 1989, ainsi que d’autres informations intéressant les activités du Comité.

9.Le HCR soumet aux membres du Comité des observations sur tous les États parties dont les rapports sont examinés lorsqu’il y mène des activités. Ces observations se rapportent aux droits de l’homme des réfugiés, demandeurs d’asile, rapatriés (ex-réfugiés), apatrides et autres catégories de personnes qui intéressent le HCR.

10.Des représentants du HCR et de l’OIT assistent aux sessions du Comité et communiquent aux membres du Comité des informations sur les questions qui les intéressent.

11.Farida Shaheed, Rapporteuse spéciale dans le domaine des droits culturels, s’est entretenue avec le Comité en séance privée, à la 2147eséance (quatre-vingtième session), le 27 février 2012.

F.Autres questions

12.Carla Edelenbos, Chef de la Section des demandes et des enquêtes à la Division des traités des droits de l’homme du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH), s’est adressée au Comité à sa 2126e séance (quatre-vingtième session), le 13 février 2012.

13.Ibrahim Salama, Directeur de la Division des traités des droits de l’homme du Haut‑Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH), s’est adressé au Comité à sa 2161e séance (quatre-vingtième session), le 7 mars 2012.

G.Adoption du rapport

14.À sa quatre-vingtième session, afin de s’assurer que ses futurs rapports annuels à l’Assemblée générale seraient traduits à temps, le Comité a décidé de commencer à adopter son rapport annuel à sa session de février/mars plutôt qu’à celle d’août. C’est pourquoi, le rapport annuel actuel comprend des renseignements relatifs à la quatre-vingtième session. Le prochain rapport portera sur les quatre-vingt-unième (août 2012) et quatre-vingt-deuxième (mars/février 2013) sessions. Les rapports suivants suivront le même cycle.

15.À sa 2165e séance (quatre-vingtième session), le 9 mars 2012, le Comité a adopté son rapport annuel à l’Assemblée générale.

II.Prévention de la discrimination raciale, y comprisles mesures d’alerte rapide et la procédure d’action urgente

16.Les travaux du Comité au titre de ses mesures d’alerte rapide et de la procédure d’action urgente ont pour but de prévenir les graves violations de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale et d’intervenir en cas de violation. Un document de travail adopté par le Comité en 1993 et destiné à orienter ses travaux dans ce domaine a été remplacé par de nouvelles directives que le Comité a adoptées à sa soixante et onzième session, en août 2007.

17.Le Groupe de travail sur l’alerte rapide et l’action urgente, créé par le Comité à sa soixante-cinquième session en août 2004, est actuellement composé des membres du Comité suivants:

Coordonnateur:José Francisco Calí Tzay

Membres:Anastasia CrickleyIon DiaconuKokou Mawuena Ika Kana (Dieudonné) EwomsanHuang Yong’an

18.À sa quatre-vingtième session, le Comité a examiné un certain nombre de situations au titre des mesures d’alerte rapide et de la procédure d’action urgente, en particulier les situations ci-après.

19.Le Comité a examiné la situation du peuple maya et ses revendications foncières au Belize. Il a noté avec préoccupation que le Belize semblait continuer à refuser au peuple maya ses droits coutumiers à la terre en dépit des décisions de la Cour suprême et des recommandations de la Commission interaméricaine et du Comité. Dans sa lettre datée du 9 mars 2012, le Comité a demandé à l’État partie de lui fournir des renseignements sur les mesures prises pour veiller à ce que le peuple maya bénéficie des protections nécessaires pour exercer pleinement ses droits à la propriété, dans les mêmes conditions que les autres membres de la population bélizienne.

20.Le Comité a examiné des allégations concernant la construction de nouvelles bases militaires des États-Unis d’Amérique à Okinawa (Japon). Le Comité s’est déclaré préoccupé par le fait que le projet de construction d’une base militaire dans la baie de Henoko/Oura risque de porter gravement atteinte à l’environnement et aux conditions de vie des habitants de Ryukyu/Okinawa. Le Comité a demandé à l’État partie de lui fournir, d’ici au 31 juillet 2012, des renseignements sur l’état actuel d’avancement des projets et sur les mesures prises pour protéger les droits des communautés ethniques vivant dans la région.

21.À la lumière des renseignements reçus, le Comité a examiné la situation de 3 000 personnes du peuple samburu au Kenya, qui auraient été expulsées de leur territoire traditionnel, Eland Downs. Dans une lettre datée du 9 mars 2012, le Comité a demandé à l’État partie de lui fournir, d’ici au 31 juillet 2012, des renseignements sur cette question et sur les mesures prises pour promouvoir et protéger les droits du peuple samburu.

22.Le Comité a examiné des renseignements concernant des affrontements violents qui se seraient produits entre des communautés autochtones et la police lors de manifestations contre des activités d’extraction minière et la construction d’un barrage hydroélectrique dans l’ouest de Panama. Le Comité a noté avec préoccupation que les manifestations des peuples ngabe-buglé avaient fait l’objet d’une violente répression de la part de la police. Le Comité a demandé à l’État partie de lui fournir, d’ici au 31 juillet 2012, des renseignements sur cette question.

23.Le Comité a aussi examiné la situation du peuple saramaka du Suriname. Il a noté avec préoccupation que l’État partie n’avait toujours pas mis en œuvre ses nombreuses recommandations et décisions concernant les peuples autochtones au Suriname, en particulier ses précédentes décisions adoptées en vertu des mesures d’alerte rapide et de la procédure d’action urgente en 2003 (décision 3 (62)), en 2005 (décision 1 (67)) et en 2006 (décision 1 (69)), ainsi que le jugement de la Cour interaméricaine des droits de l’homme dans l’affaire peuple saramaka c. Suriname (2007). Le Comité a regretté que l’État partie n’ait toujours pas soumis de renseignements sur la suite donnée aux recommandations figurant au paragraphe 18 de ses observations finales (CERD/C/SUR/CO/12). Il a demandé à l’État partie de lui fournir, d’ici au 31 juillet 2012, des renseignements sur la situation actuelle du peuple saramaka et sur les mesures prises pour mettre en œuvre le jugement de la Cour interaméricaine des droits de l’homme.

24.Le Comité a examiné des renseignements concernant la situation du peuple autochtone karen, qui aurait été expulsé de force du parc national de Kaeng Krachan en Thaïlande. Il a demandé à l’État partie de lui fournir des renseignements sur la situation du peuple autochtone du parc national de Kaeng Krachan et sur les mesures prises pour améliorer sa situation.

25.Ayant reçu des renseignements actualisés d’une organisation non gouvernementale, le Comité a aussi examiné la situation du peuple shoshone de l’Ouest aux États-Unis d ’ Amérique. Le Comité a demandé à l’État partie de lui fournir des renseignements actualisés sur l’application de sa décision 1 (68) du 7 mars 2006. À la même session, le Comité a aussi examiné des allégations concernant le projet de construction d’une station de ski à San Francisco Peaks, aux États-Unis. Tout en rappelant le paragraphe 29 de ses précédentes observations finales (CERD/C/USA/CO/6) de mars 2008, le Comité s’est déclaré préoccupé par les incidences que pourrait avoir le projet de construction d’une station de ski sur les croyances spirituelles et culturelles des peuples autochtones et s’est inquiété de la façon dont l’État partie avait cherché à obtenir le consentement préalable, libre et éclairé des peuples autochtones au sujet du projet de construction. Le Comité a demandé à l’État partie de lui fournir des renseignements sur les mesures concrètes prises pour veiller à ce que le caractère sacré de ce site pour les peuples autochtones soit respecté.

26.Au cours de la période à l’examen, le groupe de travail sur l’alerte rapide et l’action urgente s’est livré à une réflexion sur ses travaux, et le fruit de ses réflexions a ensuite été partagé et examiné avec le Comité.

III.Examen des rapports, observations et renseignementssoumis par les États parties en application de l’article 9de la Convention

27.Canada

1)Le Comité a examiné les dix-neuvième et vingtième rapports périodiques du Canada, soumis en un seul document (CERD/C/CAN/19-20), à ses 2141e et 2142e séances (CERD/C/SR. 2141 et 2142), tenues les 22 et 23 février 2012. À ses 2161e et 2162e séances (CERD/C/SR.2161 et 2162), tenues les 7 et 8 mars 2012, il a adopté les observations finales ci-après.

A. Introduction

2)Le Comité accueille avec satisfaction les dix-neuvième et vingtième rapports périodiques, qui ont été soumis par l’État partie dans les délais prescrits et établis conformément aux directives révisées du Comité pour l’établissement des rapports périodiques. Il se félicite du dialogue ouvert qui s’est instauré avec la délégation de haut niveau de l’État partie et des efforts de celle-ci visant à fournir des réponses complètes aux questions posées par les membres du Comité durant le dialogue et les réponses complémentaires fournies.

B. Aspects positifs

3)Le Comité prend note avec satisfaction des différentes mesures d’ordre législatif et politique prises par l’État partie afin de lutter contre la discrimination raciale, parmi lesquelles il convient de citer notamment:

a)La nouvelle loi modifiant la loi sur la citoyenneté, qui est entrée en vigueur le 17 avril 2009 et accorde la citoyenneté canadienne aux anciens Canadiens qui l’avaient perdue en raison de dispositions désuètes de la précédente loi sur la citoyenneté, et aux enfants nés à l’étranger d’un parent canadien de la première génération qui n’avaient jamais acquis la nationalité;

b)La modification apportée à l’article 67 de la loi canadienne sur les droits de la personne, qui permet à la Commission canadienne des droits de la personne, depuis juillet 2011, de recevoir des plaintes pour des mesures ou des décisions prises en vertu de la loi sur les Indiens;

c)La loi sur l’équité entre les sexes relativement à l’inscription au registre des Indiens, qui est entrée en vigueur en janvier 2011 et garantit aux petits-enfants éligibles de femmes ayant perdu leur statut d’Indien du fait de leur mariage avec un homme non indien, d’avoir droit à l’inscription (transmission du statut d’Indien);

d)Divers programmes, stratégies et autres initiatives visant à sensibiliser la population à la discrimination raciale, à l’intégration, à la tolérance et au multiculturalisme.

4)Le Comité prend note avec satisfaction des excuses officielles présentées, en juin 2008, par le Premier Ministre du Canada, au nom du Gouvernement canadien, aux anciens élèves, à leur famille et aux communautés pour le rôle du Canada dans le fonctionnement du système des pensionnats indiens. Il prend note aussi avec satisfaction des excuses présentées par le Gouvernement canadien concernant la réinstallation dans l’Extrême-Arctique d’Inuits originaires d’Inukjuak et de Pond Inlet dans les années 1950 et les difficultés, les souffrances et les pertes qu’ils ont endurées.

5)Le Comité prend également note avec satisfaction de l’adhésion du Canada à la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.

6)Le Comité se félicite de la participation active et des contributions de la Commission canadienne des droits de la personne et de nombreuses organisations non gouvernementales lors de l’examen du rapport de l’État partie.

C. Sujets de préoccupation et recommandations

7)Le Comité reste préoccupé par l’absence dans le rapport de l’État partie de données statistiques récentes, fiables et complètes sur la composition de sa population, notamment d’indicateurs économiques et sociaux ventilés par origine ethnique, prenant en considération les peuples autochtones (indigènes), les Afro-Canadiens et les immigrés vivant sur son territoire, de façon à lui permettre de mieux évaluer leur jouissance des droits civils et politiques, ainsi que des droits économiques, sociaux et culturels dans l’État partie.

Conformément aux paragraphes 10 à 12 de ses directives révisées pour l ’ établissement des rapports périodiques (CERD/C/2007/1), le Comité réitère sa recommandation antérieure visant à ce que l ’ État partie collecte et fournisse au Comité, dans son prochain rapport périodique, des statistiques fiables et complètes sur la composition ethnique de sa population et des indicateurs économiques et sociaux ventilés par origine ethnique et par sexe, prenant en considération les peuples autochtones (indigènes), les Afro-Canadiens et les immigrés, de façon à lui permettre de mieux évaluer la jouissance des droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels des différents groupes de sa population.

8)Le Comité, rappelant la recommandation qu’il avait formulée à l’État partie à sa soixante-dixième session, en février 2007, visant à ce qu’il poursuive sa réflexion sur l’emploi de l’expression «minorités visibles», a pris note des efforts déployés par l’État partie pour se conformer à cette demande, notamment la mission confiée à des experts de rédiger des rapports de recherche sur ce sujet, et l’organisation d’un atelier ouvert en 2008 pour examiner cette question. Tout en appréciant les efforts de l’État partie, le Comité continue à avoir des doutes concernant l’usage toujours en vigueur de l’expression «minorités visibles». Cette expression est contestée par certaines minorités qui affirment qu’elle est utilisée à tous les niveaux de la société canadienne et a pour effet d’uniformiser le vécu des différents groupes ethniques. Son manque de précision peut faire obstacle aux mesures visant à réduire efficacement les inégalités socioéconomiques dont souffrent les différents groupes ethniques (art. 1).

Le Comité réitère sa recommandation antérieure visant à ce que l ’ État partie poursuive sa réflexion, eu égard à l ’ article premier de la Convention, sur les incidences de l ’ emploi de l ’ expression «minorités visibles» pour désigner des «personnes, autres que les autochtones, qui ne sont pas de race blanche ou qui n ’ ont pas la peau blanche» (loi sur l ’ équité en matière d ’ emploi de 1995) , de manière à remédier plus précisément aux inégalités socioéconomiques entre les différents groupes ethniques.

9)Le Comité prend note des différents mécanismes et instances du Gouvernement canadien qui participent aux efforts déployés par l’État partie pour faciliter les échanges d’informations aux niveaux fédéral, provincial et territorial concernant la législation, les politiques, les programmes et les meilleures pratiques visant à coordonner la mise en œuvre de la Convention. Ils concernent, entre autres, les immigrés, les autochtones et les questions relatives au multiculturalisme et à l’antiracisme. En dépit de l’existence de ces mécanismes, le Comité est néanmoins préoccupé par le fait qu’il subsiste encore des disparités et des différences dans la mise en œuvre de la Convention entre provinces et territoires (art. 2).

Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre des mesures appropriées pour renforcer la coordination entre tous les mécanismes existants aux niveaux fédéral et provincial afin d ’ éliminer les différences et les disparités dans la mise en œuvre de la législation, des politiques, des programmes et des meilleures pratiques antiracistes, et de garantir la jouissance par tous, dans les mêmes conditions et dans toutes les provinces et tous les territoires, des droits énoncés dans la Convention, notamment en adoptant, si besoin, de nouvelles lois fédérales.

10)Le Comité a noté que les différents programmes, politiques et stratégies adoptés par l’État partie aux niveaux fédéral, provincial et territorial ne donnent pas une image claire et complète des mesures spéciales adoptées par l’État partie pour remédier à la situation des peuples autochtones et des Afro-Canadiens (art. 2 et 5).

Le Comité recommande à l ’ État partie de coordonner ses différents programmes, politiques et stratégies concernant les peuples autochtones et les Afro-Canadiens en adoptant une stratégie globale relative à la situation des peuples autochtones au niveau fédéral, de manière à donner une image cohérente de ses actions et à renforcer leur efficacité, et à veiller à ce que les différences de traitement soient fondées sur des motifs raisonnables et objectifs.

11)Le Comité est préoccupé par les informations selon lesquelles les Afro-Canadiens, en particulier à Toronto, sont soumis au profilage racial et à un traitement plus sévère par la police et le personnel judiciaire en ce qui concerne les arrestations, les interpellations, les fouilles, les remises en liberté, les enquêtes et les taux d’incarcération par rapport au reste de la population, ce qui contribue à la surreprésentation des Afro-Canadiens dans le système canadien de justice pénale (art. 2 et 5).

Rappelant sa Recommandation générale n o  34 (2011) concernant la discrimination raciale à l ’ égard des personnes d ’ ascendance africaine, et à la lumière de sa Recommandation générale n o  31 (2005) concernant la discrimination raciale dans l ’ administration et le fonctionnement du système de justice pénale, le Comité rappelle à l ’ État partie que le profilage racial devrait être évité à tous les stades de la procédure pénale. Le Comité recommande à l ’ État partie de:

a) Prendre les mesures nécessaires pour empêcher les arrestations, les interpellations, les fouilles et les enquêtes, ainsi que l ’ incarcération excessive de différents groupes, en particulier des Afro-Canadiens, en raison de leur origine ethnique;

b) Enquêter sur la pratique du profilage racial et sanctionner ceux qui s ’ y livrent;

c) Sensibiliser les procureurs, juges, avocats et autres membres du personnel judiciaire ainsi que les policiers actifs dans le système de justice pénale aux principes de la Convention;

d) Fournir au Comité des données statistiques sur le traitement des Afro- Canadiens dans le système de justice pénale;

e) Réaliser une étude sur les causes profondes de la surreprésentation des Afro-Canadiens dans le système de justice pénale.

12)Le Comité est préoccupé par les taux anormalement élevés d’autochtones, notamment de femmes, dans les prisons fédérales et provinciales du Canada (art. 2, 5 et 7).

À la lumière de sa Recommandation générale n o  31 (2005), le Comité recommande à l ’ État partie de renforcer les mesures visant à prévenir un recours excessif à l ’ incarcération des autochtones. Le Comité recommande également à l ’ État partie de:

a) Donner la préférence, dans la mesure du possible, aux mesures de substitution à l ’ emprisonnement pour ce qui concerne les autochtones, conformément aux dispositions du paragraphe  1 de l ’ art icle  717 du Code pénal;

b) Appliquer, selon qu ’ il convient, l ’ alinéa  e de l ’ article  718.2 du Code pénal, ainsi que l ’ article  742.1, afin de permettre aux autochtones condamnés de purger leur peine dans leurs communautés;

c) Faire un emploi approprié de la Stratégie de justice applicable aux autochtones (SJA) afin d ’ éviter la surreprésentation des autochtones dans les prisons résultant du fonctionnement du système de justice pénale.

Le Comité engage instamment l ’ État partie à dispenser des formations aux procureurs, juges, avocats et officiers de police concernant les dispositions susmentionnées du Code pénal, et à accroître ses efforts pour lutter contre la marginalisation socioéconomique des autochtones.

13)Le Comité demeure préoccupé par: a) le refus de l’État partie d’introduire dans sa législation une infraction spécifique incriminant et sanctionnant les actes de violence raciste; et b) l’approche de l’État partie consistant à interdire les activités racistes menées par des organisations racistes plutôt que d’interdire et de déclarer illégales de telles organisations (art. 4).

Rappelant ses Recommandations générales n os  1 (1972), 7 (1985) et  15 (1993), selon lesquelles l ’ article 4 a un caractère préventif et obligatoire, le Comité réitère sa recommandation antérieure visant à ce que l ’ État partie modifie sa législation ou adopte une législation pertinente afin de garantir le respect intégral de l ’ article  4 de la Convention.

14)Le Comité note que l’État partie a adopté une stratégie relative à la responsabilité des entreprises mais s’inquiète qu’il n’ait pas encore adopté de mesures concernant les sociétés transnationales enregistrées au Canada dont les activités ont une incidence négative sur les droits des peuples autochtones à l’étranger, en particulier dans le secteur minier (art. 5).

Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre des mesures législatives appropriées pour empêcher les sociétés transnationales enregistrées au Canada de mener des activités ayant une incidence négative sur la jouissance des droits des peuples autochtones à l ’ étranger, et les tenir responsables de telles activités.

15)Le Comité est préoccupé par le fait que le projet de loi C-11, intitulé «Réforme équilibrée pour les réfugiés», qui a reçu la sanction royale en 2010, et qui propose d’établir une liste de «pays d’origine sûrs» et d’accélérer le traitement des demandes d’asile émanant de personnes originaires de «pays sûrs», puisse ne pas être pleinement conforme à la Convention, en ce qu’il ne prévoit pas toutes les garanties procédurales nécessaires ni la protection du principe de non-refoulement. Le Comité est également préoccupé par le projet de loi C-4 en vertu duquel tout migrant ou demandeur d’asile désigné comme «personne arrivée de manière irrégulière» sera soumis à une détention obligatoire d’un an au minimum ou jusqu’à ce que le statut de demandeur d’asile soit établi (art. 1er et 5).

Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre des mesures appropriées pour faire en sorte que les garanties procédurales soient respectées lors du traitement des demandes d ’ asile émanant de personnes considérées comme originaires de «pays sûrs», sans aucune discrimination fondée sur leur origine nationale. Il recommande aussi à l ’ État partie de réviser le projet de loi C-4 de façon à supprimer la disposition relative à la détention obligatoire.

16)Tout en prenant note des diverses mesures prises par l’État partie pour remédier aux inégalités socioéconomiques auxquelles font face les Afro-Canadiens, telles que la loi fédérale sur l’équité en matière d’emploi, la Table ronde sur l’employabilité des Afro-Néo-Écossais, ainsi que les politiques concernant les groupes minoritaires dans l’État partie, le Comité s’inquiète du fait que les Afro-Canadiens continuent de subir une discrimination dans la jouissance des droits sociaux, économiques et culturels, en particulier dans l’accès à l’emploi, au logement, à l’éducation, aux salaires, et à la fonction publique (art. 5).

Rappelant sa Recommandation générale n o  34 (2011) et à la lumière de sa Recommandation générale n o  32 (2009) concernant la signification et la portée des mesures spéciales dans la Convention internationale sur l ’ élimination de toutes les formes de discrimination raciale, le Comité recommande à l ’ État partie de prendre des mesures concrètes propres à favoriser l ’ intégration effective aux niveaux fédéral, provincial et territorial des Afro-Canadiens dans la société canadienne en procédant efficacement à la mise en œuvre de sa législation antidiscrimination, en particulier la loi fédérale sur l ’ équité en matière d ’ emploi, et des politiques concernant l ’ accès à l ’ emploi, des salaires non discriminatoires, le logement et la fonction publique. Il recommande aussi à l ’ État partie de renforcer ses mesures spéciales visant à accroître le niveau d ’ instruction des enfants afro-canadiens, en particulier en empêchant leur marginalisation et en réduisant leurs taux d ’ abandon scolaire. Il prie l ’ État partie de fournir des informations sur les mesures concrètes qu ’ il aura prises à cette fin et sur les résultats concrets de ces mesures.

17)Le Comité prend note des diverses mesures prises par l’État partie pour combattre la violence envers les femmes et les filles autochtones, telles que l’Initiative de lutte contre la violence familiale, la Stratégie pour les autochtones vivant en milieu urbain, et diverses initiatives lancées au niveau provincial ou territorial pour prévenir les meurtres et les disparitions de femmes autochtones. Toutefois, le Comité demeure préoccupé par le fait que les femmes et les filles autochtones sont beaucoup plus souvent victimes de formes de violence mettant leur vie en danger, d’homicides conjugaux et de disparitions (art. 5).

Le Comité recommande à l ’ État partie:

a) D ’ intensifier ses efforts pour éliminer la violence envers les femmes autochtones sous toutes ses formes en mettant en œuvre sa législation et en renforçant ses programmes de prévention et stratégies de protection, notamment le Programme d ’ amélioration des refuges, le Programme de prévention de la violence familiale, le Centre de prospective sur la question des victimes, la Stratégie relative à la justice applicable aux autochtones et le nouveau Centre national de soutien policier pour les personnes disparues;

b) De faciliter l ’ accès à la justice pour les femmes autochtones victimes de violence sexuelle et sexiste, et de mener des enquêtes sur les responsables, les poursuivre et les sanctionner;

c) De mener des campagnes de sensibilisation culturellement adaptées sur cette question, notamment dans les communautés touchées et en consultation avec elles;

d) D ’ envisager d ’ adopter un plan d ’ action national sur la violence sexuelle et sexiste envers les autochtones;

e) De consulter les femmes autochtones et leurs organisations, et de les aider à participer à l ’ élaboration, la mise en œuvre et l ’ évaluation des mesures prises pour lutter contre la violence à leur encontre.

Le Comité recommande en outre à l ’ État partie d ’ apporter un appui aux bases de données existantes, d ’ établir une base de données nationale sur les meurtres et disparitions de femmes autochtones, et de fournir au Comité des données statistiques et des informations sur les résultats concrets de ses programmes et stratégies.

18)Le Comité s’inquiète de ce que l’État partie n’a pas encore supprimé tous les effets discriminatoires des dispositions de la loi sur les Indiens qui touchent les femmes des Premières Nations, notamment celles ayant trait à l’appartenance à la bande et aux biens fonciers matrimoniaux dans les réserves (art. 2 et 5).

Le Comité engage instamment l ’ État partie à adopter et mettre en œuvre dans les meilleurs délais le projet de loi sur les foyers familiaux situés dans les réserves et les droits ou intérêts matrimoniaux, en cours d ’ examen par le Parlement, afin de permettre aux femmes des Premières Nations d ’ exercer leurs droits dans les domaines de la propriété, du mariage et de l ’ héritage.

19)Tout en prenant note des mesures prises par l’État partie, telles que la création du Fonds pour l’adaptation des services de santé à l’intention des autochtones, le Plan d’action économique 2009 du Canada, le nouveau Cadre fédéral pour le développement économique des autochtones et la nouvelle Stratégie de formation pour les compétences et l’emploi destinée aux autochtones, le Comité demeure préoccupé par la pauvreté dans laquelle les autochtones continuent de vivre, et la marginalisation et les difficultés persistantes qu’ils rencontrent en matière d’emploi, de logement, d’eau potable, de santé et d’éducation, en raison de la discrimination structurelle dont les conséquences se font encore sentir (art. 5).

Le Comité recommande à l ’ État partie, en consultation avec les peuples autochtones, de mettre en œuvre et renforcer ses programmes et politiques afin de mieux garantir les droits économiques, sociaux et culturels des peuples autochtones, en particulier au moyen des mesures suivantes:

a) Accélérer la fourniture d ’ eau potable aux communautés autochtones dans les réserves;

b) Intensifier les efforts pour supprimer les obstacles discriminatoires liés à l ’ emploi et les écarts de salaire entre les autochtones et les non-autochtones, en particulier en Saskatchewan et au Manitoba;

c) Achever la construction de logements pour la communauté d ’ Attawapiskat dans le nord de l ’ Ontario et faciliter l ’ accès au logement des peuples autochtones en adoptant et mettant en œuvre le plan en cours d ’ élaboration;

d) Faciliter leur accès aux services de santé;

e) Améliorer l ’ accès des enfants autochtones à l ’ éducation, notamment aux études supérieures, en particulier en généralisant l ’ approche mettant l ’ accent sur un renforcement de la prévention et en lui assurant un financement suffisant;

f) Mettre fin au retrait d ’ enfants autochtones de leur famille et fournir des services de prise en charge aux familles et aux enfants dans les réserves dotés d ’ un financement suffisant;

g) Accorder une réparation appropriée, à l ’ aide d ’ un mécanisme de règlement adéquat, à tous les étudiants qui ont été scolarisés dans les pensionnats indiens, afin de contrer les effets que cette pratique a eus de génération en génération.

Le Comité invite l ’ État partie, en consultation avec les peuples autochtones, à envisager d ’ élaborer et d ’ adopter un plan d ’ action national en vue d ’ appliquer la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.

Le Comité invite également l ’ État partie à lui fournir des renseignements sur les progrès accomplis dans le cadre de ces programmes et politiques, et les résultats concrets obtenus, dans son prochain rapport périodique.

20)Le Comité est préoccupé par les informations selon lesquelles le droit à la consultation tel qu’il est prévu dans la législation et le droit au consentement préalable, libre et éclairé au sujet des projets et initiatives concernant les peuples autochtones ne sont pas pleinement respectés par l’État partie, et peuvent faire l’objet de limitations. Il est également préoccupé par le fait que les peuples autochtones ne sont pas toujours consultés au sujet des projets réalisés sur leurs terres ou ayant une incidence sur leurs droits et que les traités conclus avec les peuples autochtones ne sont pas pleinement respectés ni appliqués. Le Comité est également préoccupé par le fait que les peuples autochtones doivent engager d’importants frais de justice pour des litiges fonciers avec l’État partie en raison des prises de position strictement accusatrices de l’État partie dans ces affaires. Tout en reconnaissant que la mise en place du Tribunal spécial pour les demandes d’indemnisation constitue une mesure positive, le Comité est préoccupé par les informations selon lesquelles ce tribunal ne traite pas des différends relatifs aux droits établis par les traités pour toutes les Premières Nations et n’assure pas le respect de toutes les garanties d’un règlement juste et équitable en droit (art. 5).

À la lumière de sa Recommandation générale n o  23 (1997) concernant les droits des peuples autochtones, le Comité recommande à l ’ État partie, en consultation avec les peuples autochtones, de:

a) Faire appliquer de bonne foi le droit à la consultation et au consentement préalable, libre et éclairé des peuples autochtones lorsque leurs droits peuvent être altérés par des projets réalisés sur leurs terres, conformément aux normes internationales et à la législation de l ’ État partie;

b) Continuer à solliciter de bonne foi la conclusion d ’ accords avec les peuples autochtones concernant les terres et les ressources qu ’ ils revendiquent dans le cadre de procédures judiciaires culturellement adaptées, trouver des moyens d ’ établir des titres de propriété sur leurs terres, et respecter leurs droits consacrés par les traités;

c) Prendre des mesures appropriées pour garantir que les procédures engagées devant le Tribunal spécial sont justes et équitables et envisager sérieusement la création d ’ une commission chargée de régler les questions liées aux droits établis par les traités.

21)Le Comité est préoccupé par le fait que les autochtones et les Afro-Canadiens continuent de faire face à des obstacles lorsqu’ils recourent à la justice, malgré l’existence de programmes aux niveaux provincial et territorial. Le Comité attire également l’attention sur le manque d’informations concernant le mécanisme destiné à remplacer le Programme de contestation judiciaire qui a été supprimé par l’État partie (art. 6).

Le Comité recommande à l ’ État partie de redoubler d ’ efforts pour promouvoir et faciliter l ’ accès à la justice à tous les niveaux des personnes appartenant à des groupes minoritaires, en particulier des autochtones et des Afro-Canadiens. Il l ’ engage aussi vivement à mettre en place dans les meilleurs délais un mécanisme afin de combler le vide laissé par la suppression du Programme de contestation judiciaire, comme le Comité le lui avait recommandé.

22)Tout en notant que l’État partie a institué un «mois de l’histoire des Noirs», le Comité est préoccupé par les informations selon lesquelles les contributions des Afro-Canadiens à l’histoire de l’État partie ne sont pas pleinement reconnues et que cette non-reconnaissance peut contribuer au maintien de stéréotypes et de préjugés discriminatoires à l’égard des Afro-Canadiens (art. 2 et 7).

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ accroître ses efforts pour reconnaître pleinement les réalisations et les contributions de la communauté afro-canadienne à l ’ histoire du Canada. Il l ’ encourage à faire en sorte que la célébration du bicentenaire de la guerre de 1812 mette également en lumière les contributions et le rôle des Afro-Canadiens.

23)Ayant à l’esprit le caractère indivisible de tous les droits de l’homme, le Comité encourage l’État partie à envisager de ratifier les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme qu’il n’a pas encore ratifiés, en particulier ceux dont les dispositions intéressent directement les communautés qui peuvent faire l’objet de discrimination raciale, comme la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, la Convention no 169 (1989) de l’OIT relative aux peuples indigènes et tribaux dans les pays indépendants et la Convention de 1954 relative au statut des apatrides.

24)Le Comité encourage l’État partie à envisager de faire la déclaration prévue à l’article 14 de la Convention.

25)À la lumière de sa Recommandation générale no 33 (2009) concernant le suivi de la Conférence d’examen de Durban, le Comité recommande à l’État partie, quand il incorporera la Convention dans l’ordre juridique interne, de prendre en compte la Déclaration et le Programme d’action de Durban adoptés en septembre 2001 par la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, ainsi que le Document final de la Conférence d’examen de Durban tenue à Genève en avril 2009. Le Comité prie l’État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des informations précises sur les plans d’action et autres mesures prises pour appliquer la Déclaration et le Programme d’action de Durban au niveau national.

26)Le Comité recommande à l’État partie de poursuivre les consultations et de renforcer le dialogue avec les organisations de la société civile qui travaillent dans le domaine de la protection des droits de l’homme, en particulier celles qui luttent contre la discrimination raciale, lors de l’établissement du prochain rapport périodique.

27)Le Comité recommande à l’État partie de mettre ses rapports à la disposition du public dès leur soumission et de diffuser également ses observations finales concernant ces rapports dans les langues officielles et dans les autres langues couramment utilisées, selon qu’il conviendra.

28)L’État partie ayant soumis son document de base en 1998, le Comité l’invite à faire parvenir une mise à jour en se fondant sur les directives harmonisées pour l’établissement de rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, en particulier celles qui visent le document de base commun, adoptées par la cinquième Réunion intercomités des organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme en juin 2006 (HRI/GEN.2/Rev.6, chap. I).

29)Conformément au paragraphe 1 de l’article 9 de la Convention et à l’article 65 de son règlement intérieur modifié, le Comité prie l’État partie de lui faire parvenir, dans l’année qui suit l’adoption des présentes observations finales, des informations sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations figurant aux paragraphes 16, 17, 19 et 21 ci-dessus.

30)Le Comité souhaite également appeler l’attention de l’État partie sur l’importance particulière des recommandations qui figurent aux paragraphes 12, 18, 20 et 22, et le prie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des informations détaillées sur les mesures concrètes qu’il aura prises pour mettre en œuvre ces recommandations.

31)Le Comité recommande à l’État partie de lui soumettre ses vingt et unième à vingt-troisième rapports périodiques en un seul document, au plus tard le 15 novembre 2015, et de les établir en tenant compte des directives concernant l’élaboration du document spécifique à la Convention sur l’élimination de la discrimination raciale qu’il a adoptées à sa soixante et onzième session (CERD/C/2007/1), et en traitant de tous les points soulevés dans les présentes observations finales. Il l’engage également à respecter la limite de 40 pages imposée pour les rapports présentés au titre d’un instrument particulier, et la limite de 60 à 80pages imposée pour le document de base commun (voir les directives harmonisées pour l’établissement de rapports qui figurent dans le document HRI/GEN.2/Rev.6, chap. I, par. 19).

28. Israël

1)Le Comité a examiné les quatorzième à seizième rapports périodiques d’Israël, soumis en un seul document (CERD/C/ISR/14-16), à ses 2131e et 2132e séances (CERD/C/ SR.2131 et 2132), tenues les 15 et 16 février 2012. À sa 2148e séance (CERD/C/SR.2148), tenue le 28 février 2012, il a adopté les observations finales ci-après.

A. Introduction

2)Le Comité se félicite du rapport périodique détaillé, quoiqu’un peu long, de l’État partie et du dialogue franc et constructif instauré avec l’importante délégation de l’État partie durant l’examen du rapport.

3)Le Comité est conscient des problèmes liés à la sécurité et à la stabilité dans la région. L’État partie devrait cependant veiller à ce que, conformément aux principes énoncés dans la Convention, les mesures prises respectent le principe de proportionnalité, ne se traduisent pas par une discrimination, délibérée ou non, à l’égard des citoyens palestiniens d’Israël ou des Palestiniens du territoire palestinien occupé, ou de toute autre minorité, que ce soit en Israël proprement dit ou dans des territoires placés sous le contrôle effectif de l’État partie; et soient mises en œuvre dans le plein respect des droits de l’homme et des principes applicables du droit international humanitaire.

4)Le Comité réaffirme que les colonies israéliennes dans le territoire palestinien occupé, notamment en Cisjordanie, y compris à Jérusalem-Est, non seulement sont illégales en droit international mais entravent également la jouissance des droits de l’homme par tous sans distinction fondée sur l’origine nationale ou ethnique. Les mesures tendant à modifier la composition démographique du territoire palestinien occupé et du Golan syrien occupé sont aussi préoccupantes du fait qu’elles constituent des violations des droits de l’homme et du droit international humanitaire.

B. Aspects positifs

5)Le Comité salue les efforts déployés par l’État partie pour remédier aux inégalités, en particulier dans les domaines de l’emploi et de l’éducation, auxquelles font face les groupes les plus vulnérables de la société israélienne, et prend acte des progrès qu’il a accomplis à cet égard en Israël proprement dit.

6)Le Comité se félicite de la promulgation de la loi de 2008 sur l’interdiction de la violence dans le sport et de la loi no 5771-2011 sur l’amélioration de la représentation des membres de la communauté éthiopienne dans la fonction publique (amendements) le 28 mars 2011.

7)Le Comité se félicite de la mise en place au sein du Cabinet du Premier Ministre de l’office pour le développement économique des populations arabe, druze et circassienne, de l’allocation d’un budget d’exécution correspondant, et de l’adoption d’un plan quinquennal pour le développement économique des localités où vivent des minorités.

8)Le Comité se félicite de l’annonce faite par la délégation concernant la mise en place en 2011 d’une équipe interministérielle conjointe, dirigée par l’un des procureurs généraux adjoints du Ministère de la justice et chargée de donner suite aux observations finales des organes conventionnels concernant Israël, ainsi que de la création par le Ministère de l’intérieur et le Ministre de la sécurité publique d’une équipe ministérielle qui se réunit régulièrement pour traiter des questions relatives aux violences perpétrées par des colons juifs et à leurs conséquences graves.

9)Le Comité se félicite également des mesures d’action positive prises par l’État partie pour favoriser l’intégration des populations arabe et druze dans la fonction publique.

C. Sujets de préoccupation et recommandations

Situation générale

10)Le Comité prend note de la volonté de la délégation de l’État partie de débattre des questions relatives à la Cisjordanie et à la bande de Gaza, mais regrette que le rapport ne contienne aucune information sur la population vivant dans ces territoires. À cet égard, le Comité est profondément préoccupé par le fait que l’État partie estime que la Convention n’est pas applicable à tous les territoires placés sous le contrôle effectif de l’État partie, qui comprennent non seulement Israël proprement dit, mais aussi la Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est, la bande de Gaza et le Golan syrien occupé. Le Comité réaffirme qu’une telle position n’est pas conforme à la lettre et à l’esprit de la Convention, ni au droit international, comme l’ont également affirmé la Cour internationale de Justice et d’autres instances internationales.

Rappelant ses précédentes observations finales (CERD/C/ISR/CO/13, par. 32), le Comité invite instamment l ’ État partie à reconsidérer sa position et à interpréter de bonne foi et en conformité avec le droit international les obligations qui lui incombent en vertu de la Convention . Le Comité exhorte également l ’ État partie à faire en sorte que tous les civils qui se trouv e nt sous son contrôle effectif jouissent de l ’ensemble des droits énoncés dans la Convention, sans discrimination fondée sur l ’origin e ethnique, la nationalité ou l ’ origine nationale.

11)Le Comité note avec une préoccupation croissante qu’il existe toujours en Israël des secteurs juifs et non juifs, ce qui soulève des questions au regard de l’article 3 de la Convention. Les éclaircissements fournis par la délégation ont confirmé les préoccupations du Comité relatives à l’existence de deux systèmes éducatifs, l’un en hébreu l’autre en arabe qui, excepté en de rares circonstances, restent imperméables et inaccessibles à l’autre communauté, ainsi que de municipalités distinctes: les municipalités juives et les municipalités dites «des minorités». La promulgation de la loi sur les Comités d’admission (2011), qui donne à des comités privés toute latitude pour rejeter des demandeurs jugés «inaptes à la vie sociale de la communauté», est un signe clair que les préoccupations relatives à la ségrégation restent d’une actualité brûlante (art. 3, 5 et 7 de la Convention).

Rappelant ses précédentes observations finales (CERD/C/ISR/CO/13, par. 22), le Comité engage instamment l ’ État partie à donner pleinement effet à l ’ article 3 et à n ’ épargner aucun effort pour éradiquer toutes les formes de ségrégation entre les communautés juives et non juives. L ’ État partie est prié de fournir des informations sur les mesures qu’il aura prises à cet égard dans son prochain rapport périodique.

12)Gardant à l’esprit les précisions fournies par la délégation, le Comité regrette l’absence de données statistiques sur la diversité ethnique de la population juive d’Israël.

Rappelant ses précédentes observations finales (CERD/C/ISR/CO/13, par. 15), le Comité recommande vivement à l ’ État partie de donner des renseignements sur la composition de la population juive d ’ Israël, ventilés selon les critères pertinents.

13)Ainsi qu’il l’a mentionné dans ses précédentes observations finales (CERD/C/ISR/CO/13, par. 16), le Comité est préoccupé par l’absence de disposition générale consacrant l’égalité et interdisant la discrimination raciale dans la Loi fondamentale de 1992 relative à la dignité et à la liberté de l’être humain, qui a en Israël le statut d’une déclaration des droits; il s’inquiète aussi de l’absence dans la législation israélienne d’une définition de la discrimination raciale conforme à l’article premier de la Convention. Ces lacunes empêchent grandement l’État partie de protéger tous ceux qui relèvent de sa juridiction en ce qui concerne l’exercice des droits de l’homme dans des conditions d’égalité (art. 2 de la Convention).

Le Comité rappelle ses précédentes observations finales (CERD/C/ISR/CO/13, par.  16) et recommande à l ’ État partie de faire en sorte que l ’ interdiction de la discrimination raciale et le principe de l ’ égalité soient inclus dans la Loi fondamentale et qu ’ une définition de la discrimination raciale soit dûment incorporée dans la législation.

14)Tout en prenant note de l’existence d’une législation pénale relative à l’incitation au racisme, aux organisations racistes et à la participation et l’appui à de telles organisations, le Comité est préoccupé par les limitations qu’elle comporte, notamment la définition restreinte du racisme, la compétence exclusive du Procureur général en matière de poursuites pour les infractions d’incitation au racisme, et l’approche trop stricte de la législation israélienne lorsqu’il s’agit de prouver l’élément intentionnel de ces infractions. Tout en notant les préoccupations de l’État partie au sujet de la liberté d’expression, le Comité rappelle que l’interdiction de diffuser toute idée fondée sur la supériorité ou la haine raciale est compatible avec le droit à la liberté d’opinion et d’expression (art. 2 et 4 de la Convention).

Le Comité recommande à l ’ État partie de modifier sa législation actuelle en ce qui concerne les critères permettant d’établir l’élément intentionnel de l’infraction pénale d ’ incitation au racisme; de mettre en place un mécanisme plus complet de protection en habilitant d ’ autres organ es judiciaire s à mener des enquêtes et à inculper ; et d ’ élargir la définition du racisme de manière à y inclure l ’ incitation au racisme fondée sur l ’ origine ethnique, le pays d ’ origine ou l ’ appartenance religieuse, en cas d ’ intersectionnalité de ces éléments, de manière à protéger de manière égale les Éthiopiens, les Russes, les séfarades, et tous les autres groupes qui ne sont actuellement pas suffisamment protégés par la loi.

15)Le Comité s’inquiète de l’adoption d’un certain nombre de lois discriminatoires sur des questions foncières, qui ont des effets disproportionnés sur les communautés non juives. Le Comité est particulièrement préoccupé par la promulgation de la loi sur l’administration foncière israélienne de 2009; l’amendement de 2010 à l’ordonnance sur les biens fonciers (acquisition à des fins publiques) (1943); l’amendement de 2010 à la loi sur l’Autorité de développement du Néguev (1991); et la loi sur les Comités d’admission (2011) (art. 3 et 5 de la Convention).

Conformément à ses précédentes observations finales (CERD/C/ISR/CO/13, par.  19), le Comité recommande vivement à l ’ État partie de garantir l ’ égalité d ’ accès aux biens fonciers et à la propriété, et, à cette fin, d ’ abroger ou d’annuler toute législation qui ne respecte pas le principe de non-discrimination.

16)Le Comité prend note avec préoccupation de l’adoption de lois et de l’examen de projets de loi faisant dépendre de l’accomplissement du service militaire l’accès à certaines prestations sociales et économiques, ce qui a pour effet d’en exclure les communautés non juives qui sont exemptées de service militaire, telles que les citoyens palestiniens d’Israël. En outre, il regrette l’adoption de l’amendement spécial no 6 de 2009 à la loi sur les conseils régionaux (date des élections générales) (1994), qui pourrait limiter considérablement la participation politique des minorités non juives (art. 2 et 5 de la Convention).

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ abroger toutes les lois discriminatoires et d ’ annuler tous les projets de loi discriminatoire s de manière à garantir aux communautés non juives un accès égal au travail et aux prestations sociales ainsi que le droit de particip er à la vie politique énoncé dans la Convention.

17)Le Comité prend note de l’existence de mécanismes d’État chargés de protéger et promouvoir les droits de l’homme, tels que le Contrôleur de l’État, qui semble également exercer la fonction de Médiateur, ainsi que l’office spécial au sein du Cabinet du Premier Ministre pour le développement économique des populations arabe, druze et circassienne, et le Ministre chargé des minorités, mais les compétences individuelles de ces différents organes et la division des tâches entre ceux-ci ne sont pas claires. Le Comité regrette l’absence d’un organisme spécialement chargé de lutter contre la discrimination raciale ou d’une institution nationale des droits de l’homme conforme aux Principes relatifs au statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris, annexe à la résolution 48/134 de l’Assemblée générale) (art. 2 et 6 de la Convention).

Le Comité rappelle sa précédente recommandation (CERD/C/ISR/CO/13, par.  31) visant à ce que l ’ État partie étudie la possibilité de créer un mécanisme national pour remédier à la discrimination raciale sous la forme, soit d ’ un organisme spécialement chargé de lutter contre la discrimination raciale, soit d ’ une institution nationale d es droits de l ’ homme conform e aux Principes de Paris.

18)Le Comité s’inquiète à nouveau de la persistance de lois discriminatoires visant en particulier les citoyens palestiniens d’Israël, telles que la loi sur la nationalité et l’entrée en Israël (Disposition temporaire). Cette loi exclut temporairement la possibilité, sauf dans de rares exceptions, de regroupement familial entre un citoyen israélien et une personne résidant en Cisjordanie, y compris à Jérusalem-Est, ou dans la bande de Gaza, ce qui a d’importantes incidences sur les liens familiaux et le droit au mariage et au choix du conjoint. Le Comité est particulièrement préoccupé par la récente décision de la Haute Cour de justice, qui a confirmé la constitutionnalité de cette loi (art. 2 et 5 de la Convention).

Le Comité prie instamment l ’ État partie d ’ abroger la loi sur la nationalité et l ’ entrée en Israël (Disposition temporaire) et de faciliter le regroupement familial pour tous les citoyens, quel le que soit leur origine ethnique ou leur origine nationale ou autre.

19)Bien que des efforts aient été faits pour améliorer l’accès des minorités non juives aux droits économiques et sociaux, tels que l’adoption en mars 2010 d’un plan quinquennal pour le développement économique des localités où vivent des minorités et la mise en œuvre de réformes visant à accroître la protection des travailleurs migrants, les disparités socioéconomiques entre les communautés juives et non juives restent préoccupantes. Il est fort préoccupant de constater que ces deux communautés restent souvent cloisonnées, l’une ayant accès à une éducation en hébreu dans des écoles juives, l’autre vivant souvent dans des municipalités distinctes et ayant accès à des écoles arabophones. Une telle séparation fait obstacle à l’égalité d’accès à l’éducation et à l’autonomisation. Le Comité est particulièrement préoccupé par la persistance du faible niveau d’instruction et d’emploi à des postes à responsabilité des femmes non juives dans les secteurs privé et public (art. 2 et 5 e) i) et v) de la Convention).

Conformément à ses précédentes observations finales (CERD/C/ISR/CO/13, par. 24), le Comité recommande vivement à l ’ État partie d ’ assurer aux minorités non juives la jouissance des droits économiques, sociaux et culturels dans des conditions d ’ égalité, en particulier leur droit au travail et à l ’ éducation.

Conformément à sa Recommandation générale n o 25 (2000) concernant la dimension sexiste de la discrimination raciale , le Comité recommande à l ’ État partie de redoubler d ’ efforts pour faire en sorte que les femmes jouissent de tous les droits énoncés dans la Convention dans des conditions d ’ égalité .

20)Le Comité est préoccupé par la situation actuelle des communautés bédouines, en particulier en ce qui concerne la politique de démolitions, notamment de maisons et d’autres structures, et les difficultés croissantes rencontrées par les membres de ces communautés pour accéder dans les mêmes conditions que les habitants juifs aux terres, au logement, à l’éducation, à l’emploi et à la santé publique.

Le Comité recommande à l ’ État partie de s’attaquer vraiment aux problèmes rencontrés par les communautés bédouines, en particulier en ce qui concerne la perte de leurs terres et l ’ accès à de nouvelles terres. Il lui recommande également d ’ intensifier ses efforts pour assurer l ’ égalité d ’ accès à l ’ éducation, au travail, au logement et à la santé publique dans tous les territoires placés sous le contrôle effectif de l ’ État partie. À cet égard, l ’ État partie devrait retirer son projet de loi discriminatoire de 2012 régissant les camps d e Bédouins dans le Néguev, qui aurait pour effet de légaliser la politique actuelle de démolitions d ’ habitations et de déplacement forcé des communautés bédouines autochtones.

21)Malgré certaines informations contenues dans le rapport de l’État partie et les éclaircissements fournis oralement par la délégation, le Comité reste préoccupé par le peu d’intérêt porté à la discrimination de fait et à la discrimination perçue dont sont victimes les minorités au sein de la population juive. Des informations préoccupantes fournies par la société civile et diffusées par les médias mettent en lumière la question de la sous-représentation des groupes juifs mizrahim dans l’enseignement supérieur, à des postes d’encadrement dans le milieu universitaire, et dans le domaine politique et judiciaire. Malgré des efforts accrus visant à remédier à l’inégalité d’accès à l’éducation et à l’emploi des membres des communautés juives arrivées récemment, le Comité demeure particulièrement préoccupé par les allégations selon lesquelles une discrimination s’exercerait à l’égard des Juifs éthiopiens, surtout par des particuliers. Le Comité est également préoccupé par la discrimination liée à l’application des lois religieuses dont sont victimes les femmes appartenant à des minorités juives (art. 5 de la Convention).

Le Comité recommande à l ’ État partie de combattre avec efficacité toutes les formes de discrimination raciale touchant les minorités juives, de manière à garantir l ’ exercice de leurs droits sur un pied d ’ égalité, en particulier dans les domaines du droit à l ’ éducation, au travail et à la représentation politique. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ accorder une attention particulière à la discrimination sexuelle et sexiste dont sont victimes les femmes appartenant à des minorités juives, en particulier celles des classes défavorisées .

22)Le Comité prend note des efforts déployés par l’État partie pour accepter et accueillir des demandeurs d’asile et des réfugiés sur son territoire, ainsi que du cadre mis en place pour protéger les travailleurs migrants contre d’éventuels abus de la part des employeurs. Le Comité est toutefois préoccupé par la stigmatisation des travailleurs migrants en raison de leur pays d’origine, dont laisse supposer la promulgation de la loi de 2012 sur la prévention de l’infiltration en vertu de laquelle les demandeurs d’asile en situation irrégulière peuvent être emprisonnés pendant au moins trois ans à leur arrivée en Israël et les demandeurs d’asile originaires d’«États ennemis» peuvent être condamnés à des peines de réclusion à perpétuité (art. 2 et 5 d) iii) de la Convention).

Rappelant sa Recommandation générale n o 30 (2004) sur la discrimination à l ’ égard des non-ressortissants, le Comité prie instamment l ’ État partie de modifier la loi sur la prévention de l ’ infiltration ainsi que toute autre législation visant à exercer une discrimination à l’égard des demandeurs d ’ asile ou à refuser à des réfugiés, en raison de leur origine nationale, la protection garantie par la Convention de Genève de  1951 relative au statut des réfugiés.

23)Le Comité est préoccupé par la récente augmentation du nombre d’actes, de manifestations et de discours racistes et xénophobes, en particulier à l’encontre de citoyens palestiniens d’Israël, de Palestiniens résidant dans le territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, et de demandeurs d’asile d’origine africaine. Le Comité est fortement préoccupé par l’absence de données précises sur les plaintes, enquêtes, actes d’accusation et poursuites relatives aux dirigeants politiques, aux agents de la fonction publique et aux dirigeants religieux associés à de tels manifestations et discours, et concernant les résultats des procédures relatives à ces plaintes (art. 2, 4, 6 et 7 de la Convention).

Rappelant ses précédentes observations finales (CERD/C/ISR/CO/13, par. 29), le Comité recommande à l ’ État partie, lorsqu ’ il traite des problèmes qui touchent différents groupes sociaux vulnérables, de manifester très clairement, dans ses discours et ses actes , qu ’ il a la volonté politique de promouvoir la compréhension, la tolérance et l ’ amitié entre les citoyens, indépendamment de leur origine.

Le Comité recommande aussi à l ’ État partie d ’ accroître ses efforts et d ’ utiliser tous les moyens dont il dispose pour combattre et endiguer la vague de racisme et de xénophobie dans les déclarations publi que s, en particulier en condamnant fermement tous les propos racistes et xénophobes tenus par des agents de la fonction publique et des dirigeants politiques et religieux, et en mettant en œuvre des mesures appropriées pour lutter contre la prolifération des actes et des manifestations de racisme dirigés en particulier contre des minorités non juives dans les territoires placés sous le contrôle effectif de l ’ État partie.

Rappelant sa Recommandation générale n o 31 (2005) concernant la discrimination raciale dans l ’ administration et le fonctionnement du système de justice pénale, le Comité invite aussi l ’ État partie à rappeler aux procureurs et au système judiciaire dans son ensemble combien il importe de poursuivre de la même façon les auteurs d ’ actes de racisme, indépendamment de leur statut dans la société .

Le territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, et le Golan syrien occupé

24)Le Comité est extrêmement préoccupé par les conséquences des politiques et des pratiques qui s’apparentent à une ségrégation de fait, telles que la mise en place par l’État partie de deux systèmes juridiques et institutionnels entièrement distincts dans le territoire palestinien occupé pour les communautés juives regroupées dans des colonies de peuplement illégales, d’une part, et les populations palestiniennes habitant les villes et les villages palestiniens, d’autre part. Le Comité regrette particulièrement le caractère hermétique de la séparation des deux groupes qui, vivant sur un même territoire, ne bénéficient pas d’un usage équivalent des routes et infrastructures ni d’un accès égal aux services de base et aux ressources en eau. Une telle séparation est concrétisée par la mise en place d’une combinaison complexe de restrictions à la liberté de circulation, à savoir le Mur, des barrages routiers, l’obligation d’emprunter des routes séparées et un régime de permis qui ne s’applique qu’à la population palestinienne (art. 3 de la Convention).

Le Comité attire l ’ attention de l ’ État partie sur sa Recommandation générale n o 19 (1995) concernant la prévention, l ’ interdiction et l ’ éradication de toute s politique s et pratique s de ségrégation raciale et d ’ apartheid, et exhorte l ’ État partie à prendre immédiatement des mesures destinées à interdire et éradiquer toute s politique s ou pratique s ayant des conséquences lourdes et disproportion nées pour la population palestinienne dans le territoire palestinien occupé et enfreignant les dispositions de l ’ article 3 de la Convention.

25)Le Comité est de plus en plus préoccupé par la politique d’urbanisme discriminatoire de l’État partie, en vertu de laquelle des permis de construire sont rarement, sinon jamais, délivrés aux membres des communautés palestinienne et bédouine, alors que les démolitions visent principalement des biens appartenant aux Palestiniens et aux Bédouins. Le Comité est préoccupé par la politique inverse tendant à réserver un traitement préférentiel à l’expansion des colonies israéliennes au moyen de l’utilisation de «terres du domaine public» pour la colonisation, de la construction d’infrastructures telles que des routes et des systèmes d’approvisionnement en eau, la délivrance de nombreux permis d’urbanisme et l’instauration de Comités spéciaux d’urbanisme composés de colons pour gérer les processus consultatifs de prise de décisions. Le Comité est fortement préoccupé par la politique «d’équilibre démographique» de l’État partie, énoncée dans les plans municipaux officiels d’urbanisme, en particulier dans la ville de Jérusalem (art. 2, 3 et 5 de la Convention).

À la lumière de ses précédentes observations finales (CERD/C/ISR/ CO/13, par. 35) et considérant que la politique d ’ urbanisme et d ’ aménagement en Cisjordanie, y compris à Jérusalem-Est, porte gravement atteinte à un certain nombre de droits fondamentaux énoncés dans la Convention, le Comité engage l ’ État partie à réexaminer l’ensemble de sa politique de façon à garantir aux Palestiniens et aux Bédouins le droit à la propriété, l ’ accès à la terre, l ’ accès au logement ainsi que l ’ accès aux ressources naturelles (et principalement aux ressources en eau). Le Comité recommande également que toute politique d ’ urbanisme et d ’ aménagement soit mise en œuvre en concertation avec les populations directement concernées par les mesures qui en découlent. Il demande instamment à l ’ État partie d ’ abandonner toute politique «d ’ équilibre démographique» dans le cadre de son s chéma d ’ ensemble pour Jérusalem et de sa politique d ’ urbanisme et d ’ aménagement dans le reste de la Cisjordanie.

26)En dépit des explications fournies par la délégation durant le dialogue, le Comité demeure préoccupé par les effets dévastateurs et disproportionnés du blocus imposé par les Forces de défense israéliennes et de leurs opérations militaires sur le droit des Palestiniens au logement et aux services de base dans la bande de Gaza. Des faits alarmants ont été rapportés au Comité, selon lesquels seule une minorité d’habitations et d’infrastructures civiles comme des écoles, des hôpitaux et des sites de production d’eau potable a pu être reconstruite du fait de l’embargo imposé par l’État partie sur l’importation de matériaux de construction dans la bande de Gaza (art. 2, 3 et 5 de la Convention).

L ’ État partie devrait respecter scrupuleusement les normes du droit humanitaire dans le territoire palestinien occupé, renoncer à sa politique d ’ embargo et autoriser sans délai l ’ importation dans la bande de Gaza de tous les matériaux indispensables à la reconstruction des habitations et des infrastructures civiles pour respecter les droit s des Palestiniens au logement, à l ’ éducation, à la santé, à l ’ eau et à l’assainissement , conformément à la Convention .

27)Le Comité est extrêmement préoccupé par l’existence de deux types de législation, l’une pour les Palestiniens et l’autre pour les colons juifs qui résident sur le même territoire, à savoir la Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est, mais ne sont pas soumis au même système judiciaire (au pénal comme au civil). Le Comité est particulièrement préoccupé par les informations alarmantes faisant état de l’augmentation du nombre d’arrestations et de détentions d’enfants et des atteintes aux garanties judiciaires dont ils devraient bénéficier, liées notamment au fait que les tribunaux militaires sont compétents pour juger des enfants palestiniens, ce qui est contraire au droit international. Le Comité exprime sa très grande inquiétude face au maintien par l’État partie de la rétention administrative d’enfants et d’adultes palestiniens, sur la base de preuves tenues secrètes pour des raisons de sécurité. Il est en outre préoccupé par les obstacles financiers et physiques auxquels font face les Palestiniens qui cherchent à obtenir réparation auprès des tribunaux israéliens pour les préjudices subis, en particulier du fait de l’opération «Plomb durci» menée par les Forces de défense israéliennes dans la bande de Gaza (art. 3, 5 et 6 de la Convention).

Rappelant sa Recommandation générale n o 31 (2005) concernant la discrimination raciale dans l ’ administration et le fonctionnement du système de justice pénale, le Comité recommande à l ’ État partie de garantir un accès égal à la justice pour tous ceux qui réside nt dans d es territoires placé s sous le contrôle effectif de l ’ État partie. Il prie instamment l ’ État partie de mettre fi n à sa pratique actuelle de la r étention administrative, qui est discriminatoire et constitue une détention arbitraire au regard du droit international des droits de l ’ homme.

28)Le Comité est préoccupé par l’augmentation du nombre d’actes de violence raciste et de vandalisme commis dans le territoire palestinien occupé par des colons juifs à l’encontre de citoyens non juifs, notamment des musulmans et des chrétiens et leurs lieux saints, et par des informations selon lesquelles 90 % des enquêtes de la police israélienne concernant des actes de violence commis par des colons entre 2005 et 2010 ont été classées sans suite. Le Comité est particulièrement alarmé par les informations faisant état de l’impunité de groupes terroristes, comme «Price Tag», qui bénéficieraient d’un soutien politique et juridique de certaines parties de la classe politique israélienne. Le Comité est également préoccupé par les conséquences de la violence des colons sur le droit des femmes et des filles à accéder à des services de base, notamment le droit à l’éducation (art. 4 et 5 de la Convention).

Tout en prenant note avec intérêt de la création de l ’ équipe ministérielle chargée de s’occuper de la violence des colons, le Comité, rappelant ses précédentes observations finales (CERD/C/ISR/CO/13, par. 37), demande instamment à l ’ État partie de veiller à ce que toutes les formes de violence et de harcèlement fassent l ’ objet d ’ enquêtes impartiales par l ’appareil judiciaire, et à ce que les coupabl es soient poursuivis en justice , indépendamment de leur origine nationale, ethnique ou autre.

29)Le Comité demeure préoccupé par la situation vulnérable des habitants syriens du Golan syrien occupé et par leur accès inégal aux terres, au logement et aux services de base. Le Comité est aussi gravement préoccupé par les conséquences que continue d’avoir la loi relative à la citoyenneté sur les liens familiaux, qui continuent d’être brisés du fait de l’annexion illégale de ce territoire en 1981 (art. 2 et 5 de la Convention).

L ’ État partie devrait veiller à ce que tous les habitants des territoires contrôlés par Israël jouissent sur un pied d ’ égalité de leurs droits fondamentaux tels que le droit à la terre et au logement, le droit de se marier et de choisir son conjoint , et la liberté de circulation. Le Comité prie instamment l ’ État partie de trouver une solution satisfaisante au problème de la séparation des familles qui touche particulièrement les habitants syriens du Golan syrien occupé.

30)Ayant à l’esprit le caractère indivisible de tous les droits de l’homme, le Comité encourage l’État partie à envisager de ratifier les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme auxquels il n’est pas encore partie, en particulier ceux dont les dispositions ont un effet direct sur la question de la discrimination raciale, telle que la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille (1990).

31)À la lumière de sa Recommandation générale no33 (2009) concernant le suivi de la Conférence d’examen de Durban, le Comité recommande à l’État partie de donner effet à la Déclaration et au Programme d’action de Durban adoptés en septembre 2001 par la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, en tenant compte du document final de la Conférence d’examen de Durban tenue à Genève en avril 2009, lorsqu’il applique la Convention dans son ordre juridique interne. Le Comité prend note des explications fournies par Israël au sujet de son refus de reconnaître et de respecter la Déclaration adoptée par la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, tenue à Durban (Afrique du Sud) en 2001. Toutefois, compte tenu de l’importance évidente de ce document pour une grande partie de l’humanité, le Comité recommande vivement à Israël de revoir sa position et d’adopter des politiques et des plans d’action appropriés pour appliquer la Déclaration.

32)Le Comité recommande à l’État partie, lors de l’élaboration de son prochain rapport périodique, de poursuivre ses consultations et d’élargir ses concertations avec les associations civiles qui œuvrent pour la protection des droits de l’homme, et qui luttent en particulier contre la discrimination raciale, en Israël proprement dit et dans les territoires placés sous son contrôle effectif.

33)Le Comité encourage l’État partie à envisager de faire la déclaration facultative prévue à l’article 14 de la Convention, reconnaissant la compétence du Comité pour recevoir et examiner des plaintes individuelles.

34)Le Comité recommande à l’État partie de ratifier les amendements au paragraphe 6 de l’article 8 de la Convention, adoptés le 15 janvier 1992 à la quatorzième Réunion des États parties à la Convention et approuvés par l’Assemblée générale dans sa résolution 47/111. À cet égard, le Comité rappelle les résolutions 61/148, 63/243 et 65/200, dans lesquelles l’Assemblée générale a demandé instamment aux États parties d’accélérer leurs procédures internes de ratification de l’amendement à la Convention concernant le financement du Comité et d’informer par écrit le Secrétaire général dans les meilleurs délais de leur acceptation de cet amendement.

35)Le Comité recommande à l’État partie de faire en sorte que ces rapports soient facilement accessibles au public au moment de leur soumission et que les observations du Comité s’y rapportant soient également diffusées dans la langue officielle de l’État partie et les autres langues communément utilisées, selon qu’il convient.

36)Conformément au paragraphe 1 de l’article 9 de la Convention et à l’article 65 de son Règlement intérieur révisé, le Comité demande à l’État partie de lui communiquer, dans un délai d’un an à compter de l’adoption des présentes observations finales, des informations sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations figurant aux paragraphes 16, 18 et 30 ci-dessus.

37)Le Comité souhaite aussi appeler l’attention de l’État partie sur l’importance particulière des recommandations figurant aux paragraphes 11, 12, 21, 26 et 29, et l’invite à fournir des informations détaillées dans son prochain rapport périodique sur les mesures concrètes qu’il aura prises pour y donner suite.

38)Le Comité recommande à l’État partie de présenter ses dix-septième à dix-neuvième rapports périodiques en un seul document d’ici au 2 février 2016, en tenant compte des directives concernant l’élaboration des documents propres au Comité pour l’élimination de la discrimination raciale qu’il a adoptées à sa soixante et onzième session (CERD/C/2007/1), et en traitant tous les points soulevés dans les présentes observations finales. Le Comité l’engage également à respecter la limite de 40 pages fixée pour les rapports présentés au titre d’un instrument et la limite de 60 à 80 pages pour le document de base commun (voir les directives harmonisées figurant dans le document HRI/GEN.2/Rev.6, chap. I, par. 19).

29. Italie

1)Le Comité a examiné les seizième à dix-huitième rapports périodiques de l’Italie soumis en un seul document (CERD/C/ITA/16-18), à ses 2156e et 2157e séances (CERD/C/SR.2156 et 2157), le 5 mars 2012. À sa 2164e séance (CERD/C/SR.2164), tenue le 9 mars 2012, il a adopté les observations finales ci-après.

A. Introduction

2)Le Comité accueille avec satisfaction le rapport de l’État partie et se félicite des échanges réguliers qu’il a eus avec le pays. Il a apprécié le dialogue noué avec la nombreuse délégation italienne qu’il remercie d’avoir apporté des informations orales en complément du rapport. Il est satisfait du dialogue positif et constructif qu’il a eu avec la délégation italienne et des efforts que celle-ci a fournis pour répondre aux questions posées par les membres du Comité.

B. Aspects positifs

3)Le Comité note avec intérêt la révision prochaine de la loi no 482/1999 qui permettra de reconnaître les communautés roms, sintis et «camminantis» comme des minorités.

4)Le Comité prend également note du renforcement du Bureau national de lutte contre la discrimination raciale (UNAR) et des activités que celui-ci a menées durant la période considérée.

5)Le Comité accueille avec satisfaction les mesures législatives renversant la charge de la preuve sur le défendeur dans les affaires de discrimination raciale jugées au civil.

6)Le Comité note avec satisfaction la ratification le 5 juin 2008 de la Convention du Conseil de l’Europe sur la cybercriminalité et la déclaration de l’État partie concernant la modification prochaine du Code pénal afin de régler le problème des discours de haine sur Internet.

7)Le Comité salue la constitution d’un groupe de travail chargé d’élaborer d’ici à septembre 2012 un nouveau plan national d’action contre toutes les formes de discrimination raciale et de mettre en œuvre la Déclaration et le Programme d’action de Durban au niveau national.

8)Le Comité se félicite de l’adoption le 24 février 2012 de la Stratégie nationale pour l’intégration des communautés roms, sintis et «camminantis» dans le cadre de l’Union européenne, qui couvre des secteurs aussi importants que l’éducation, l’emploi, la santé et le logement.

9)Le Comité prend note avec un intérêt particulier des informations fournies par l’État partie sur la création d’un nouveau ministère pour la coopération et l’intégration, qui sera notamment chargé des relations interethniques.

10)Le Comité accueille avec satisfaction l’information selon laquelle l’État partie envisage de retirer sa déclaration concernant l’article 4 de la Convention.

C. Sujets de préoccupation et recommandations

11)Le Comité prend note des données statistiques fournies sur les étrangers et sur les activités de l’UNAR, mais regrette l’absence dans le rapport de données sur la composition ethnique de la population. Il est extrêmement préoccupé par le recensement réalisé à la suite de l’état d’urgence imposé en mai 2008 et par le décret d’urgence concernant les installations de communautés nomades en Italie. L’information selon laquelle des empreintes digitales et des photographies des résidents roms et sintis de campements, y compris des enfants, ont été recueillies au cours de ce recensement l’inquiète. Le Comité prend note de la déclaration faite par l’État partie selon laquelle ces données ont été détruites.

Le Comité invite l ’ État partie à réunir des données ventilées sur la composition ethnique de s a population. À la lumière de sa Recommandation générale n o  8 (1990) concernant l ’ identification avec un groupe racial ou ethnique particulier, il rappelle que les moyens permettant d ’ identifier les individus comme appartenant à des groupes raciaux ou ethniques devraient être définis sur une base volontaire et anonyme, et fondés sur le principe de l’auto-identification par les personnes concernées . Le Comité recommande à l ’ État partie de s ’ abstenir de conduire des recensements d ’ urgence visant les groupes minoritaires.

Le Comité recommande vivement à l ’ État partie d ’ informer les communautés concernées du fait que les données provenant du précédent recensement d ’urgence ont été détruites.

12)Le Comité regrette que les dispositions de l’article 3 de la Constitution italienne concernant l’égalité ne s’appliquent pas également aux non-ressortissants et il ne comprend pas bien si l’infraction de discrimination raciale dans la législation de l’État partie comprend à la fois le but et l’effet des actes interdits (art. 1).

À la lumière de sa Recommandation générale n o  30 (2005) concernant la discrimination contre les non-ressortissants, le Comité engage l ’ État partie à veiller à ce que les non-ressortissants jouissent, dans des conditions d ’ égalité, d ’ une protection et d ’ une reconnaissance devant la loi. Il lui recommande de veiller également à ce que sa législation et ses politiques n’entraînent pas de discriminat ion, délibérée ou non, sur la base de la race, de la couleur, de l ’ ascendance ou de l ’ origine nationale ou ethnique. Il attire l ’ attention de l ’ État partie sur l ’ importance de faire en sorte que les garanties législatives contre la discrimination raciale s ’ appliquent aux non-ressortissants, indépendamment de leur situation migratoire.

13)Le Comité constate avec préoccupation que, malgré l’engagement de l’État partie à créer une institution nationale des droits de l’homme, rien n’a encore été fait. Selon l’information reçue par le Comité, le projet de loi en la matière, actuellement à l’examen dans la seconde Chambre (Chambre des députés), a été finalisé sans que des consultations aient été entreprises, comme il se doit, avec des acteurs de la société civile (art. 2).

Le Comité note l ’ engagement de l ’ État partie à achever au plus vite le long processus visant à créer une institution nationale des droits de l ’ homme indépendante, conformément aux Principes de Paris. Il encourage l ’ État partie à associer activement des acteurs de la société civile à ce processus et à réviser le projet de loi n o  4534 , de façon que l ’ institution soit pleinement conforme aux Principes de Paris. Il l ’ encourage également à solliciter l ’ assistance technique du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l ’ homme.

14)Le Comité se fait l’écho de préoccupations concernant la nécessité d’accroître l’indépendance de l’UNAR, seul organe de promotion de l’égalité créé conformément aux directives de l’Union européenne (art. 2).

Notant l ’ engagement de l ’ État partie à améliorer l ’ indépendance de l ’ UNAR quant à son fonctionnement, à son administration et à sa gestion, le Comité recommande à l ’ État partie de prendre les mesures nécessaires pour garantir l ’ indépendance de cet organe , de façon qu ’ il puisse mener une action plus efficace .

15)Le Comité déplore les expulsions ciblées de communautés roms et sintis qui ont lieu depuis 2008 en vertu du décret d’urgence sur les nomades et s’inquiète de l’absence de voie de recours, malgré la décision du Conseil d’État de novembre 2011 d’abroger ce décret. Il note avec préoccupation qu’à la suite des expulsions forcées plusieurs familles roms ou sintis se sont retrouvées sans abri, et il regrette l’utilisation de personnel de sécurité et de la vidéosurveillance pour accéder à certains de ces camps. Comme il l’a indiqué dans ses précédentes observations finales, il constate avec inquiétude que les membres des populations roms, sintis et «camminantis», ressortissants ou non-ressortissants, vivent de fait dans une situation d’exclusion par rapport au reste de la population, dans des camps souvent dépourvus des installations les plus élémentaires. Il prend note de la déclaration de la délégation sur l’intention d’appliquer une nouvelle politique de logement en faveur des Roms et des Sintis (art. 3).

Le Comité encourage l ’ État partie à prendre les mesures nécessaires pour éviter les expulsions forcées et fournir un autre logement adéquat à ces communautés. Il engage aussi l’ État partie à s ’ abstenir de placer les Roms dans des camps situés en dehors des zones d’ habit ation et dépourvu s d ’ in stallations de base telles que d es services de santé et des structures éducatives. Eu égard à ses R ecommandations générales n o  27 (2000) concernant la discrimination à l ’ égard des Roms et n o  30 (2004), ainsi qu’ à la Stratégie nationale pour l ’ intégration des communautés rom s , sinti s et «cam m inanti s », le Comité encourage l ’ État partie à redoubler d ’ efforts pour éviter la ségrégation d es communautés de Roms et d e Sintis, ressortissants ou non- ressortissants , dans le domaine du logement , et élaborer des programmes de logements sociaux en leur faveur.

Compte ten u de la décision du Conseil d’ État, le Comité recommande à l ’ État partie de prendre les mesures appropriées pour fournir des recours utiles aux membres des communautés rom s et sinti s, afin qu’ils puissent obtenir réparation pour tous les préjudices subis depuis la mise en œuvre du décret d ’ urgence sur les nomades, en leur fournissant notamment des logements adéquats et en veillant à ce que les camp ements éloignés des zones d ’ habitation ne soient pas la seule possibilité de logement dont ils disposent.

16)Bien qu’il note que la loi no 654/1975 punit la discrimination raciale et que la loi no 205/1993 (loi de Mancino) prévoit des circonstances aggravantes pour les délits de droit commun commis pour des motifs fondés sur la race, le Comité s’inquiète de ce que la disposition relative aux circonstances aggravantes soit appliquée lorsque le motif raciste paraît être la seule motivation mais pas lorsqu’il y a plusieurs mobiles. Il regrette également le manque d’informations sur les décisions adoptées en application de cette disposition et sur les peines prévues en cas de propagande sur le thème de la supériorité raciale ou ethnique (art. 4).

Le Comité recommande à l ’ État partie de modifier l ’ article 61 du Code pénal de façon à disposer qu ’ une infraction commise pour un motif raciste constitue une circonstance aggravante, y compris dans les cas où il y a plusieurs mobiles. Il lui recommande aussi de prendre les mesures nécessaires afin de poursuivre et de punir les personnes qui diffusent des idées sur une quelconque supériorité raciale ou qui incitent à la violence ou au crime raciste, conformément aux dispositions de la loi et à l ’ article 4 de la Convention.

17)Le Comité est extrêmement préoccupé par les propos racistes, la stigmatisation et les stéréotypes dont font l’objet les Roms, les Sintis, les Camminantis et les non-ressortissants. Il note avec inquiétude que dans les rares cas où des dirigeants politiques ont été poursuivis pour des propos discriminatoires, des sursis à exécution leur ont été accordés, afin qu’ils puissent continuer leurs activités politiques et se présenter aux élections. Le Comité fait observer que le droit fondamental à la liberté d’expression ne protège pas la diffusion d’idées fondées sur la supériorité raciale ou incitant à la haine raciale. En outre, il note avec inquiétude que la discrimination raciale est de plus en plus répandue dans les médias et sur Internet, en particulier sur les réseaux sociaux (art. 2 et 4).

Le Comité recommande à l ’ État partie de:

a) Prendre d es mesures appropriées afin de poursuivre les personnes, y  compris les dirigeants politi ques , pour les actes visés à l ’ article 4, et de veiller à ce que le principe juridique de sursis à exécution n ’ empêche pas la justice de prévaloir. Le Comité souligne que le droit fondamental à la liberté d ’ expression ne doit pas aller à l’encontre des principes d ’ égalité et de non-discrimination , car l ’ exercice du droit à la liberté d ’ expression comporte des responsabilités particulières, parmi lesquelles l ’ obligation de ne pas diffuser d ’ idées fondées sur la supériorité ou la haine raciale ;

b) Renforcer le mandat de l ’ autorité de contrôle d es médias , afin que les propos racistes soient réprimé s et que les victimes puissent obtenir réparation. Le Comité recommande à l ’ État partie de veiller à ce que les médias ne stigmatisent pas les non-ressortissants et l es minorités ethniques, ni qu ’ ils les caricaturent ou portent des jugements négati fs à leur égard . Il l ’ encourage à inviter les médias à respecter strictement la Charte de Rome afin d ’ éviter tout langage raciste, discriminatoire ou tendancieux. Il l ’ encourage aussi à envisager de ratifier le Protocole additionnel à la Convention européenne sur la cybercriminalité concernant la criminalisation des actes de nature raciste et xénophobe commis au moyen de systèmes informatiques;

c) Sensibiliser les professionnels des médias à leur responsabilité de ne pas diffuser de préjugés et d ’ éviter de rapporter des incidents impliquant des non-ressortissants ou des membres des communautés rom s ou sinti s d ’ une manière qui stigmatise l’ensemble de ces communautés , eu égard à ses R ecommandations générales n o  27 (2000) et n o  30 (2004).

18)Le Comité est profondément préoccupé par plusieurs cas de violence raciste et les meurtres d’un certain nombre de migrants, parmi lesquels des personnes d’ascendance africaine et des membres des communautés roms ou sintis. Il s’inquiète également d’actes de violence raciste commis contre des membres de ces groupes, comprenant aussi la destruction de leurs biens (art. 2, 4 et 6).

Eu égard à sa R ecommandation générale n o  31 (2005) concernant la discrimination raciale dans l ’ administration et le fonctionnement du système de justice pénale, le Comité recommande à l ’ État partie de garantir la sécurité et l ’ intégrité des non-ressortissants, des Roms et des Sintis, sans aucune discrimination, en adoptant des mesures visant à prévenir les actes de violence raci ste à leur encontre, de veiller à ce que la police, les procureurs et les juges réagissent vite , et de s ’ assurer que les auteurs d ’ infractions, y compris les dirigeants politiques, ne restent pas impunis de droit ou de fa it . Il recommande aussi à l ’ État partie de recueillir systématiquement des données sur les infractions de haine raciale.

19)Le Comité regrette que les communautés roms, sintis et «camminantis» continuent d’être victimes de marginalisation et de discrimination. Il déplore que des mesures telles que le décret d’urgence sur les nomades aient renforcé les stéréotypes, les préjugés et les comportements négatifs envers ces communautés. Il regrette la persistance de stéréotypes assimilant les minorités ethniques et les non-ressortissants à la criminalité, et l’islam au terrorisme (art. 3 et 5).

Compte tenu de la Stratégie nationale pour l ’ intégration des communautés rom s , sinti s et «camminanti s », le Comité recommande à l ’ État partie d ’ entreprendre des consultations avec ces communautés ainsi qu ’ avec les organisations les représentant a fin de mettre en œuvre, d e suiv re et d’ évalu er cette stratégie. Une attention particulière devrait être accordée à l ’ exercice de s droit s économiques, sociaux et culturels de ces communautés, ainsi qu ’ à la conduite d ’ activités de sensibilisation à la tolérance, au respect de la diversité, à la cohésion sociale et à la non-discrimination dans la soc iété italienne. Eu égard à ses R ecommandations générales n o  27 (2000) et n o  30 (2004), le Comité invite l ’ État partie à le tenir informé de la mise en œuvre de la stratégie susmentionnée et des résulta ts des actions entreprises dans ce cadre.

Ayant à l ’ esprit la corrélation entre la discrimination raciale et la discrimination religieuse, le Comité recommande à l ’ État partie de redoubler d ’ efforts pour prévenir et combattre la discrimination raciale à l ’ encontre des musulmans et de renforcer le dialogue avec les communautés musulmanes.

20)Le Comité note avec préoccupation que les enfants issus des communautés roms et sintis continuent d’être victimes de discrimination en ce qui concerne l’accès à l’éducation. L’information selon laquelle, en raison des expulsions forcées qui les visent et des conditions de logement médiocres dans lesquelles ils vivent, certains enfants n’ont pu être inscrits à l’école ou suivre les cours l’inquiète. Le Comité est également préoccupé par le taux élevé d’abandon scolaire, le faible nombre d’enfants roms ou sintis inscrits dans le secondaire et le fait que très peu d’entre eux poursuivent des études supérieures (art. 5).

Le Comité encourage l ’ État partie à intensifier ses efforts pour assurer aux enfants roms et sintis ainsi qu ’aux autres groupes vulnérables un accès effectif à l’éducation . Il lui recommande de prendre toutes les mesures nécessaires pour faciliter l ’ intégration de tous les enfants roms et sintis dans le système scolaire. À cet égard, il l’ encourage à éviter de mettre eu œuvre des politiques qui pourraient être indirectement discriminatoires envers ces groupes ou nuire à leur s col arisation . Il lui recommande de faire en sorte que la mesure administrative limitant à 30 % le nombre d ’ enfants étrangers dans chaque classe n ’empêche pas des enfants issus des groupes les plus vulnérables d’aller à l’école .

Le Comité encourage l ’ État partie à recruter du personnel scolaire parmi les membres des communautés rom s et sinti s , à promouvoir l ’ éducation interculturelle dans les écoles , à fournir une formation au personnel scolaire et à mener des activités de sensibilisation auprès des parents roms et sintis.

21)Le Comité regrette le manque d’informations sur la situation des migrantes et des femmes appartenant aux communautés roms et sintis. Il note avec préoccupation que la situation déjà lamentable de ces groupes quant à l’exercice des droits de l’homme en Italie pourrait être même pire pour les femmes issues de ces communautés (art. 5).

Eu égard à sa R ecommandation générale n o  25 (2000) concernant la dimension sexiste de la discrimination raciale, le Comité recommande à l ’ État partie de lui fournir des données sur les difficultés rencontrées par les femmes sintis et roms ainsi que par les migrantes, et d es informations sur les mesures prises afin de garantir à ces femmes l ’ exercice, dans des conditions d ’ égalité, de leurs droits au titre de la Convention.

22)Le Comité note avec inquiétude que, malgré ses recommandations antérieures, les conditions précaires dans les centres d’assistance, d’accueil et d’identification se sont dégradées avec l’arrivée des migrants d’Afrique du Nord, en particulier ces dernières années. L’information selon laquelle les migrants risquent davantage d’être arrêtés et condamnés à des peines plus sévères que les Italiens l’inquiète. Cette situation s’est peut-être également aggravée avec l’adoption de la loi no 94/2009, qui criminalise l’entrée et le séjour irréguliers en Italie, et de la loi no 129/2011, qui permet la mise en détention des migrants sans papiers pour une période allant jusqu’à dix-huit mois. Le Comité s’inquiète des violations des normes internationales concernant la protection des réfugiés ou des demandeurs d’asile, comme le montre l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme du 23 février 2012 contre l’État partie, à propos de l’expulsion collective de 24 Somaliens et Érythréens (art. 2 et 5).

Le Comité recommande à l ’ État partie de:

a) Prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte que les conditions dans les centres pour réfugiés et demandeurs d ’ asile soient conformes aux normes internationales. Il prend note de la déclaration de l ’ État partie selon laquelle des mesures préliminaires sont prises afin de mettre en application l’arrêt de la Cour européenne des droits de l ’ homme , notamment la conclusion d’accords bilatéraux avec d es pays d ’ Afrique du Nord, de façon à éviter de telle s violations des droits de l ’ homme à l ’ avenir. Il rappelle que l ’ État partie a l ’ obligation, au regard du droit international des droits de l ’ homme, de respecter le principe de non-refoulement et de garantir que les migrants ne s e ro nt pas soumis à des expulsions collectives;

b) S’employ er à éliminer les effets discriminatoires de certains textes législatifs , à empêcher les arrestations et les peines plus lourdes fondées uniquement sur l ’ origine ou la situation de s personnes sur son territoire, à suivre les a ffaire s de discrimination raciale commis es par des agents des forces de l ’ ordre et à en punir les auteurs;

c) Adopter une stratégie globale à long terme pour protéger les réfugiés et les demandeurs d ’ asile en plus de toute mesure d ’ urgence, conformément à la Convention de 1951 et au Protocole de 1967 relatifs au statut des réfugiés.

23)Le Comité constate les difficultés rencontrées par les non-ressortissants pour accéder à certains services sociaux fournis en particulier par les autorités locales. Par exemple, conformément à la loi no 133/2008, ils ne peuvent bénéficier des allocations de logement offertes par l’État partie sans produire de certificat attestant d’un séjour d’au moins dix ans dans le pays. Le Comité note avec préoccupation que la discrimination envers les non-ressortissants sur le marché du travail persiste. Il s’inquiète également du manque de protection juridique adéquate destinée aux migrants, en particulier contre l’exploitation ou les conditions de travail abusives.

Confor mément à sa R ecommandation générale n o  30 (2004), le Comité recommande à l ’ État partie de lever les obstacles qui empêchent l ’ exercice par les non-ressortissants de leurs droits économiques, sociaux et culturels, en particulier leurs droits à l ’ éducation, à un logement adéquat, à l ’ emploi et aux services de santé. Il lui recommande aussi de modifier sa législation afin de permettre aux migrants en situation irrégulière de faire valoir les droits que leur confère tout emploi occupé et de porter plainte quel que soit leur statut migratoire. Il lui recommande en outre de prendre toute autre mesure visant à éliminer la discrimination envers les non-ressortissants en ce qui concerne les exigences à remplir pour pouvoir travailler et les conditions de travail.

Le Comité recomman de à l’État partie d e revoi r certaines de ses politiques administratives et d ’ organiser des activités de sensibilisation auprès des autorités locales et régionales au sujet de l ’ interdiction de la discrimination raciale, en particulier l ’ accès non discriminatoire aux services sociaux.

24)Le Comité constate qu’un certain nombre de Roms venus en Italie à la suite du démantèlement de l’ex-Yougoslavie vivent dans le pays depuis de nombreuses années sans avoir de nationalité, et que leurs enfants se trouvent dans la même situation. Il relève que la nationalité doit encore être accordée aux enfants nés en Italie de parents étrangers (art. 5).

Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre des mesures afin de permettre aux Roms et aux Sintis apatrides , ainsi qu ’ aux non-ressortissants viv a nt en Italie depuis de nombreuses années , d’obtenir plus facilement la nationalité italienne, d’examiner les obstacles existants en la matière et de les lever. Eu égard à la Convention de 1954 relative au statut des apatrides et à la Convention de 1961 sur la réduction des cas d ’ apatridie, il lui recommande également de prendre des mesures afin de réduire les cas d ’ apatridie, en particulier parmi les enfants roms et sintis et les enfants nés en Italie.

25)Le Comité note le nombre toujours très faible de poursuites engagées et de condamnations prononcées pour discrimination raciale, malgré les nombreux actes de discrimination raciale ou ethnique et l’existence de nombreux stéréotypes. Il constate qu’une révision de la loi no 654 est en cours afin de renforcer les voies de recours offertes aux victimes de discrimination raciale mais s’inquiète de ce que l’État partie n’ait pas pris de mesures efficaces pour informer les victimes des moyens de recours dont elles disposent et pour réduire le coût des procédures judiciaires (art. 2 et 6).

Le Comité demande à l ’ État partie de lui fournir des données statistiques sur les plaintes déposées, les poursuites engagées et les condamnations prononcées pour des actes de racisme et de xénophobie, ainsi que sur toute réparation accordée aux victimes de ces actes. Il recommande à l ’ UNAR de poursuiv r e sa collaboration avec les organisations non gouvernementales pour aider les victimes de racisme et encourage l ’ État partie à revoir son système d ’ enregistrement de façon à faciliter l ’ inscription des organisations non gouvernementales sur la «liste», et leur permettre ainsi d’engager des actions en justice au nom des victimes.

Le Comité recommande à l ’ État partie de sensibiliser la population, notamment les groupes sociaux les plus vulnérables, aux moyens de recours juridiques et administratifs , et de renforcer les services juridiques gratuits à leur intention . Il demande à l ’ État partie d ’ inclure dans son prochain rapport périodique un complément d ’ information sur les mesures prises pour améliorer la réparation accordée aux victimes de discrimination raciale.

26)Le Comité note avec inquiétude que les agents des forces de l’ordre ne suivent pas systématiquement de formation spécialisée sur les obligations internationales de l’État partie en vertu de la Convention, ce qui pourrait expliquer le faible nombre de poursuites engagées et de condamnations prononcées pour discrimination raciale, malgré le nombre élevé d’infractions motivées par la haine et d’actes de violence (art. 2, 6 et 7).

Le Comité rappelle que, conformément à l ’ article 2 de la Convention, les États parties doivent veiller à ce que toutes les autorités publiques aux niveaux local et national ne commettent pas d’actes de discrimination raciale. Il recommande vivement que les agents des forces de l ’ ordre suivent une formation intensive afin que, dans l ’ exercice de leurs fonctions, ils respectent et défendent les droits de l ’ homme pour tous , sans discrimination aucune. Il recommande à l ’ État partie de veiller à ce que les plaintes pour discrimination raciale donnent lieu à des enquêtes approfondies et à ce qu ’ elles fassent l ’ objet d ’ un examen indépendant. Il l ’ invite également à encourager l’embauche de personnes appartenant à des groupes ethniques dans la police ou autres organes des forces de l ’ ordre.

27)Le Comité note avec préoccupation que le système fortement décentralisé de l’Italie peut donner lieu à différentes politiques et décisions au niveau des provinces et des régions, en ce qui concerne la discrimination fondée sur la race ou l’origine ethnique. Il constate également la nécessité d’adopter un plan d’action global en faveur des droits de l’homme, au vu de la multiplicité des mesures prises en la matière par les autorités régionales (art. 2 et 5).

Le Comité recommande à l ’ État partie de mettre en place un mécanisme de consultation et de coordination avec les autorités locales, de façon à éviter l’adoption de politiques et de dé cisions contraires aux articles  2 et 5 de la Convention. Il l ’ encourage également à adopter un plan d ’ action global en faveur d es droits de l ’ homme.

28)Compte tenu du caractère indivisible de tous les droits de l’homme, le Comité encourage l’État partie à envisager de ratifier les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme qui ne l’ont pas encore été, en particulier ceux dont les dispositions se rapportent directement à la question de la discrimination raciale, tels que la Convention internationale de 1990 sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.

29)À la lumière de sa Recommandation générale no 33 (2009) concernant le suivi de la Conférence d’examen de Durban, le Comité félicite l’État partie d’avoir donné effet à la Déclaration et au Programme d’action de Durban, adoptés en septembre 2001 par la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, en adoptant en 2006 un plan national d’action contre le racisme et en s’employant actuellement à élaborer un nouveau plan. Le Comité demande à l’État partie d’inclure dans son prochain rapport périodique des informations spécifiques sur la mise en œuvre de ce plan d’action.

30)Le Comité recommande à l’État partie d’engager des consultations et de renforcer son dialogue avec les organisations de la société civile œuvrant dans le domaine de la protection des droits de l’homme, en particulier de la lutte contre la discrimination raciale, dans le cadre de l’élaboration de son prochain rapport périodique, notamment.

31)Le Comité recommande à l’État partie de ratifier les amendements au paragraphe 6 de l’article 8 de la Convention, adoptés le 15 janvier 1992 à la quatorzième Réunion des États parties à la Convention et approuvés par l’Assemblée générale dans sa résolution 47/111. À cet égard, le Comité rappelle les résolutions 61/148, 63/243 et 65/200, dans lesquelles l’Assemblée générale a demandé instamment aux États parties d’accélérer leurs procédures internes de ratification de l’amendement à la Convention concernant le financement du Comité et d’informer rapidement par écrit le Secrétaire général de leur acceptation de cet amendement.

32)Le Comité recommande à l’État partie de faire en sorte que ses rapports soient facilement accessibles au public au moment de leur soumission et que les observations du Comité s’y rapportant soient également diffusées dans la langue officielle de l’État et les autres langues communément utilisées, selon qu’il convient.

33)Relevant que l’État partie n’a pas présenté de document de base, le Comité l’encourage à soumettre un tel document conformément aux directives harmonisées concernant l’établissement des rapports destinés aux organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, en particulier celles concernant l’établissement d’un document de base commun, adoptées à la cinquième Réunion intercomités des organes créés en vertus d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, tenue en juin 2006 (HRI/GEN/2/Rev.6, chap. I).

34)Conformément au paragraphe 1 de l’article 9 de la Convention et à l’article 65 de son règlement intérieur révisé, le Comité demande à l’État partie de lui fournir, dans un délai d’un an à compter de l’adoption des présentes observations finales, des renseignements sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations figurant aux paragraphes 13 et 15 ci-dessus.

35)Le Comité appelle l’attention de l’État partie sur l’importance particulière des recommandations figurant aux paragraphes 12, 18 et 25 ci-dessus et lui demande de fournir, dans son prochain rapport périodique, des renseignements détaillés sur les mesures concrètes qu’il aura prises pour mettre en œuvre ces recommandations.

36)Le Comité recommande à l’État partie de présenter ses dix-neuvième et vingtième rapports périodiques en un seul document d’ici au 4 février 2015, en tenant compte des directives concernant l’élaboration des documents propres au Comité pour l’élimination de la discrimination raciale qu’il a adoptées à sa soixante et onzième session (CERD/C/2007/1), et en traitant tous les points soulevés dans les présentes observations finales. Le Comité l’engage également à respecter la limite de 40 pages fixée pour les rapports propres à un instrument et la limite de 60 à 80 pages pour le document de base commun (voir les directives harmonisées figurant dans le document HRI/GEN/2/Rev.6, chap. I, par. 19).

30. Jordanie

1)Le Comité a examiné les treizième à dix-septième rapports périodiques de la Jordanie soumis en un seul document (CERD/C/JOR/13-17), à ses 2153e et 2154e séances (CERD/C/SR.2153 et CERD/C/SR.2154), tenues les 1er et 2 mars 2012. À sa 2166e séance (CERD/C/SR.2166), tenue le 8 mars 2012, il a adopté les observations finales ci-après.

A. Introduction

2)Le Comité accueille avec satisfaction le rapport de l’État partie, bien qu’il ait été soumis avec retard, et se dit satisfait des réponses orales franches et constructives apportées par la délégation multisectorielle durant l’examen du rapport.

3)Le Comité se félicite du fait que l’État partie a inclus dans son rapport périodique des informations nouvelles et actualisées relatives à la mise en œuvre de la Convention.

B. Aspects positifs

4)Le Comité salue les modifications récentes que l’État partie a apportées à sa législation afin de renforcer la protection des droits de l’homme et de donner effet à la Convention, notamment les modifications apportées à la Constitution jordanienne en septembre 2011, qui ont renforcé la règle de droit, et celles apportées au Code du travail, en août 2010, qui ont élargi la portée du droit du travail pour inclure les domestiques migrants.

5)Le Comité note avec satisfaction la création, en 2002, du Centre national des droits de l’homme conforme aux Principes de Paris.

6)Le Comité note avec intérêt que depuis l’examen de son douzième rapport périodique, l’État partie a ratifié certains instruments internationaux, ou y adhéré, notamment:

a)Le Protocole visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, en juin 2009;

b)La Convention contre la criminalité transnationale organisée, en mai 2009;

c)La Convention relative aux droits des personnes handicapées, en mars 2008;

d)Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés, en mai 2007;

e)Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, en décembre 2006;

f)La Convention no 182 (de 1999) de l’Organisation internationale du Travail (OIT) concernant l’interdiction des pires formes de travail des enfants et l’action immédiate en vue de leur élimination, en avril 2000.

C. Sujets de préoccupation et recommandations

7)Tout en accueillant avec satisfaction les informations contenues dans le rapport périodique de l’État partie, le Comité constate des lacunes en ce qui concerne les renseignements tirés du recensement et souhaite recevoir un complément d’information sur les caractéristiques et la situation particulière des différents groupes ethniques.

À la lumière de sa Recommandation générale n o  8 (1990) relative à l ’ interprétation et à l ’application des paragraphes  1 et 4 de l ’ article premier de la Convention (identification des individus comme appartenant à un groupe racial ou ethnique p articulier), et des paragraphes 10 à  12 des directives pour l ’ établissement du document se rapportant spécifiquement à la Convention présenté par les États parties conformément au paragraphe 1 de l ’ article 9 de la Convention (CERD/C/2007/1) , le Comité prie l ’ État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des données ventilées, y compris par origine ethnique et notamment sur la réalisation du droit à l ’ éducation et sur le développement économique et social.

8)Le Comité note que l’État partie applique le système moniste et que les instruments internationaux, dont la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, sont directement applicables et priment sur les normes de droit interne. Il demeure toutefois préoccupé par le fait qu’il n’existe pas de définition claire de la discrimination directe et indirecte dans la législation de l’État partie (art. 1).

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ introduire une définition claire de la discrimination directe et indirecte dans ses droits administratif, pénal et civil. Ce faisant, il appelle l ’ attention de l ’ État partie sur sa Recommandation générale n o  14 (1993) concernant la définition de la discrimination raciale.

9)Tout en relevant que l’article 6 de la Constitution de l’État partie consacre le principe de l’égalité devant la loi, le Comité note avec préoccupation que la portée et les dispositions de cet instrument («les Jordaniens sont égaux devant la loi») limitent l’application de ce principe aux seuls Jordaniens (art. 5).

Rappelant sa Recommandation générale n o  30 (2004) concernant la discrimination contre les non-ressortissants, le Comité recommande à l ’ État partie d ’ envisager de modifier à nouveau sa Constitution afin que celle-ci s ’ applique à toutes les personnes relevant de sa juridiction, y compris les non-Jordaniens.

10)Réaffirmant ses précédentes observations finales (CERD/C/304/Add.59, par. 7), le Comité demeure préoccupé par le fait que certaines dispositions du Code pénal ne sont pas totalement conformes à l’article 4 de la Convention et ne s’appliquent qu’aux groupes qui constituent la nation, la conséquence étant que les dispositions de l’article 4 ne sont pas pleinement appliquées et que les non-ressortissants ne bénéficient pas des protections envisagées aux alinéas a et b de l’article 5 de la Convention (art. 4 et 5).

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ envisager de modifier son Code pénal, conformément à l ’ article 4 et aux alinéas a et b de l ’ article 5 de la Convention, afin de protéger pleinement tous ceux placés sous la juridiction de l ’ État partie. Ce faisant, le Comité appelle l ’ attention de l ’ État partie sur sa Recommandation générale n o  7 (1985) relative à la législation visant à éliminer la discrimination raciale.

11)Le Comité est préoccupé par le fait qu’en vertu de la loi sur la nationalité jordanienne (loi no 7 de 1954) les enfants de Jordaniennes mariées à des non-ressortissants ne peuvent pas obtenir la nationalité jordanienne à la naissance (art. 5).

Le Comité recommande à l ’ État partie de revoir et de modifier la loi sur la nationalité jordanienne (loi n o  7 de 1954) afin qu ’ une Jordanienne mariée à un non-Jordanien ait le droit de transmettre sa nationalité à ses enfants, dans des conditions d ’ égalité et sans discrimination. Ce faisant, le Comité appelle l ’ attention de l ’ État partie sur sa Recommandation générale n o  25 (2000) concernant la dimension sexiste de la discrimination raciale.

12)Le Comité note les informations communiquées par la délégation de l’État partie selon lesquelles, avant de retirer la citoyenneté des personnes originaires de Cisjordanie dans le territoire palestinien occupé, on vérifie si elles peuvent retourner en Cisjordanie, ce retrait étant en outre susceptible d’appel. Il demeure toutefois vivement préoccupé à l’idée que l’État partie retire leur nationalité à ses ressortissants d’origine palestinienne. De l’avis du Comité, il s’agit là d’une violation de la législation jordanienne comme du droit international, notamment de l’article 24 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et de l’article 7 de la Convention relative aux droits de l’enfant; il s’inquiète donc vivement de ce que les personnes concernées deviennent apatrides et n’aient plus droit à l’éducation, aux soins de santé, à la propriété, ni le droit de résider en Jordanie. Le Comité note également avec préoccupation que les enfants des hommes déchus de leur nationalité perdent automatiquement la leur, même s’ils sont adultes (art. 5).

Conformément au droit international et à la législation même de l ’ État partie sur la nationalité, le Comité prie instamment l ’ État partie d ’ abolir la pratique consistant à retirer la nationalité jordanienne aux personnes originaires du territoire palestinien occupé. Il appelle également l ’ État partie à réintégrer dans leur nationalité les personnes qui ont été et sont actuellement déchues de la leur. Il recommande aussi à l ’ État partie d ’ envisager d ’ adhérer à la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés et au Protocole de 1967 s ’ y rapportant, à la Convention de 1954 relative au statut des apatrides et à la Convention de 1961 sur la réduction des cas d ’ apatridie.

13)S’il juge positive l’adoption, par l’État partie, de la loi électorale de 2010 qui accroît le nombre de sièges de représentants des districts urbains où vivent la plupart des Jordaniens d’origine palestinienne, le Comité s’inquiète toutefois de ce que la structure actuelle du Parlement jordanien demeure disproportionnée, les districts ruraux étant surreprésentés. Il est également préoccupé par l’idée qu’en tant que résidents non ressortissants, les nombreux réfugiés vivant en Jordanie ne peuvent toujours pas participer à la vie politique et à la prise de décisions dans l’État partie. Il note également avec inquiétude que les forces de sécurité, dont les dirigeants n’incluent en général pas de Jordaniens d’origine palestinienne, continuent d’exercer une forte influence sur la vie politique jordanienne d’une manière propre à limiter la liberté d’expression et de réunion des citoyens (art. 5 c)).

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ envisager d ’ apporter de nouvelles modifications à la loi électorale et de modifier la répartition des sièges parlementaires de façon à ce que les Jordaniens de toute origine ethnique, ainsi que les résidents non ressortissants, soient représentés équitablement dans les processus politiques et décisionnels. Il recommande de plus à l ’ État partie d ’ envisager des mesures, notamment l ’ adoption de quotas minimums, pour augmenter la proportion de personnes d ’ origine palestinienne à des postes de commandement dans les forces de sécurité.

14)Le Comité s’inquiète des informations selon lesquelles les travailleurs non- jordaniens seraient victimes de discrimination en matière de salaire minimum et d’accès à la sécurité sociale. De plus, il est préoccupé par le fait que les nouvelles réglementations sur les domestiques migrants, adoptées en août 2009 suite à l’inclusion des domestiques dans le Code du travail en juillet 2008, limitent certains droits fondamentaux, comme la liberté de circulation, des domestiques migrants (art. 5).

Conformément, entre autres, aux alinéas d ix), e i) et ii) de l ’ article 5 de la Convention, le Comité recommande à l ’ État partie d ’ apporter d ’ autres modifications à sa législation du travail pour la rendre pleinement conforme à l ’ obligation de faire en sorte que toutes les personnes employées en Jordanie exercent leurs droits liés au travail, quelle que soit leur origine nationale ou ethnique, y compris les domestiques migrants. Le Comité recommande également à l ’ État partie d ’ envisager d ’ adhérer à la Convention n o 189 (de 2011) concernant le travail décent pour les travailleuses et travailleurs domestiques.

15)S’il note avec satisfaction les efforts déployés actuellement pour appliquer les mesures découlant des modifications apportées par l’État partie à sa Constitution en septembre 2011, le Comité demeure préoccupé par l’inexistence d’une cour constitutionnelle chargée de contrôler la conformité de la législation jordanienne avec la Constitution et la Convention. De plus, réaffirmant sa préoccupation précédente (CERD/C/304/Add.59, par. 10), le Comité reste inquiet de l’absence d’informations sur la pratique de l’État partie concernant les plaintes déposées, les jugements prononcés et les indemnisations accordées dans les affaires de racisme, quelle que soit leur nature (art. 6).

Rappelant sa Recommandation générale n o 26 (2000) concernant l ’ article 6 de la Convention, le Comité prie instamment l ’ État partie de mettre en place au plus vite un ou plusieurs mécanismes opérationnels chargés de recevoir des plaintes pour racisme, d ’ enquêter sur ces actes, ainsi que d ’ imposer des sanctions et d ’ octroyer des indemnisations proportionnelles. Ce faisant, l ’ État partie devrait veiller à doter ces mécanismes des ressources humaines, techniques et financières nécessaires pour leur permettre de fonctionner et de recueillir systématiquement des informations sur les plaintes reçues et les mesures prises pour y répondre. Le Comité recommande également que ces informations, une fois collectées, soient analysées afin que l ’ État partie s ’ en serve de base pour orienter ses politiques et programmes de lutte contre la discrimination, et qu ’ elles soient intégrées dans son prochain rapport périodique au Comité.

16)Tout en notant la création d’un centre national des droits de l’homme conforme aux Principes de Paris, le Comité relève que les ressources humaines, financières et techniques qui lui sont allouées pour bien fonctionner demeurent insuffisantes (art. 6).

Rappelant sa Recommandation générale n o 17 (1993) concernant la création d ’ organismes nationaux pour faciliter l ’ application de la Convention, le Comité recommande à l ’ État partie de prendre des mesures pour allouer au Centre national des droits de l ’ homme les ressources humaines, techniques et financières appropriées. Ce faisant, l ’ État partie devrait également établir, dans le cadre du Centre, des mécanismes pour suivre et évaluer l ’ état d ’ avancement de la mise en œuvre de la Convention aux niveaux national et local, ainsi que pour recevoir et examiner des plaintes et mener des enquêtes. Le Comité recommande également à l ’ État partie de compléter ces mesures par des actions d ’ informations sur ces mécanismes et les moyens d ’ y accéder.

17)Le Comité regrette que l’État partie n’ait pas donné beaucoup plus d’informations concernant l’article 7 de la Convention (art. 7).

Le Comité prie instamment l ’ État partie de procéder à une évaluation interinstitutions systématique des mesures appliquées pour lutter contre les préjugés raciaux et la discrimination. Il recommande en outre que les résultats de ces évaluations servent à l ’ État partie pour orienter ses politiques et programmes de lutte contre la discrimination dans l ’ éducation, la culture et les médias et permettent de mieux faire connaître la Convention.

18)Ayant à l’esprit le caractère indivisible de tous les droits de l’homme, le Comité encourage l’État partie à envisager de ratifier les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme auxquels il n’est pas encore partie, en particulier ceux dont les dispositions ont un effet direct sur la question de la discrimination raciale, tels que la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille (1990).

19)Le Comité encourage l’État partie à envisager de faire la déclaration prévue à l’article 14 de la Convention.

20)Le Comité note les mesures prises par l’État partie pour assurer le suivi de la Conférence d’examen de Durban, notamment son Plan national d’action contre le racisme et des initiatives connexes. À la lumière de sa Recommandation générale no 33 (2009) relative au suivi de la Conférence d’examen de Durban, le Comité recommande à l’État partie de continuer à mettre en œuvre la Déclaration et le Programme d’action de Durban, adoptés en septembre 2001 par la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, en tenant compte du document final de la Conférence d’examen de Durban, tenue à Genève en avril 2009, lorsqu’il intégrera la Convention dans son ordre juridique interne.

21)Le Comité recommande à l’État partie de poursuivre les consultations et d’élargir le dialogue qu’il mène avec les organisations de la société civile œuvrant dans le domaine des droits de l’homme, en particulier de la lutte contre la discrimination raciale, dans le cadre de l’élaboration du prochain rapport périodique.

22)Le Comité recommande à l’État partie de mettre ses rapports à la disposition du public dès leur soumission et de diffuser aussi les observations finales s’y rapportant dans les langues officielles et les autres langues d’usage courant, selon qu’il conviendra.

23)Conformément au paragraphe 1 de l’article 9 de la Convention et à l’article 65 de son règlement intérieur révisé, le Comité prie l’État partie de l’informer dans l’année suivant l’adoption des présentes observations finales de la suite qu’il aura donnée aux recommandations figurant aux paragraphes 7, 11 et 19 ci-dessus.

24)Le Comité souhaite également attirer l’attention de l’État partie sur l’importance particulière que revêtent les recommandations 9, 12 et 14 et le prie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des renseignements détaillés sur les mesures concrètes qu’il aura prises pour y donner suite.

25)Le Comité recommande à l’État partie de soumettre ses dix-huitième à vingtième rapports périodiques en un seul document, d’ici au 6 juin 2015, en tenant compte des directives pour l’établissement du document se rapportant spécifiquement à la Convention adoptées par le Comité à sa soixante et onzième session (CERD/C/2007/1) et en veillant à répondre à tous les points soulevés dans les présentes observations finales. Le Comité engage également l’État partie à respecter la limite de 40 pages fixée pour les rapports spécifiques à un instrument particulier et la limite de 60 à 80 pages indiquée pour le document de base (voir les Directives harmonisées concernant l’établissement des rapports figurant dans le document HRI/GEN.2/Rev.6, chap. I, par. 19).

31. Koweït

1)Le Comité a examiné les quinzième à vingtième rapports périodiques du Koweït (CERD/C/KWT/15-20), présentés en un seul document, à ses 2133e et 2134e séances (CERD/C/SR.2133 et 2134), tenues les 16 et 17 février 2012. À ses 2147e et 2148e séances (CERD/C/SR.2147 et 2148), tenues les 27 et 28 février 2012, il a adopté les observations finales ci-après.

A. Introduction

2)Le Comité se félicite de la présentation, en un seul document, des quinzième à vingtième rapports périodiques de l’État partie. Il constate toutefois que les rapports ne sont pas pleinement conformes aux directives du Comité pour l’établissement des rapports, et regrette que les rapports aient été présentés avec retard, ce qui l’a empêché de suivre la mise en œuvre de la Convention de l’État partie pendant plus de dix ans.

3)Le Comité se déclare satisfait du dialogue franc et constructif instauré avec la délégation plurisectorielle de l’État partie, et prend note avec satisfaction de l’exposé oral et des réponses détaillées fournies par la délégation durant l’examen du rapport.

B. Aspects positifs

4)Le Comité salue les efforts constamment déployés par l’État partie pour réviser sa législation de manière à mieux protéger les droits de l’homme et à donner effet à la Convention, notamment le remplacement de la loi électorale no 35 de 1962 par la loi no 17 de 2005 qui confère à la femme koweïtienne le droit de voter et d’être élue.

5)Le Comité constate avec intérêt que depuis l’examen des treizième et quatorzième rapports périodiques de l’État partie, celui-ci a adhéré à des instruments internationaux et régionaux, ou en a ratifiés, notamment:

a)Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution d’enfants et la pornographie mettant en scène des enfants (26 août 2004);

b)Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés (26 août 2004);

c)La Convention no 182 de l’OIT (1999) concernant l’interdiction des pires formes de travail des enfants et l’action immédiate en vue de leur élimination (15 août 2000);

d)La Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée (12 mai 2006);

e)Le Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants (Protocole de Palerme) (12 mai 2006);

f)Le Protocole contre le trafic illicite de migrants par terre, air et mer, additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée (2000) (12 mai 2006).

6)Le Comité salue aussi les efforts déployés par l’État partie pour modifier ses politiques, programmes et mesures administratives de manière à mieux protéger encore les droits de l’homme et à mettre en œuvre la Convention, notamment:

a)La promulgation par le Ministère des affaires sociales et du travail du décret ministériel no 166 de 2007 concernant l’interdiction de confisquer les documents de voyage des travailleurs dans le secteur privé;

b)La création, en novembre 2010, du Bureau central des résidents en situation irrégulière afin de régler le problème des «Bidouns» (personnes apatrides);

c)La création de la Haute Commission des droits de l’homme en vertu de la décision no 104 de 2008 du Ministère de la justice, et en particulier l’établissement d’un comité de liaison international chargé d’élaborer les rapports périodiques à l’intention des organes conventionnels;

d)La création d’une commission des droits de l’homme par le Ministère de l’intérieur en 2001, qui est compétente pour recevoir des plaintes de particuliers.

C. Sujets de préoccupation et recommandations

7)Le Comité regrette que le rapport périodique de l’État partie ne contienne pas de statistiques sur la composition ethnique de la population vivant sur son territoire.

Conformément aux paragraphes 10 à 12 de ses directives révisées pour l ’ établissement du rapport se rapportant spécifiquement à la Convention (CERD/C/2007/1), le Comité recommande à l ’ État partie de collecter et de publier des données statistiques fiables et complètes sur la composition ethnique de sa population, et des indicateurs socioéconomiques ventilés par origine ethnique, notamment sur les immigrés, à partir d ’ enquêtes ou de recensements nationaux fondés sur l ’ auto-identification et tenant compte des aspects ethniques et raciaux, afin de permettre au Comité de mieux évaluer comment sont exercés les droits consacrés par la Convention au Koweït. Le Comité demande à l ’ État partie de lui fournir ces données ventilées dans son prochain rapport.

8)Le Comité note avec préoccupation que la législation nationale ne comprend pas de définition de la discrimination raciale pleinement conforme à l’article premier de la Convention, ainsi qu’une disposition générale interdisant la discrimination raciale conformément à la Convention (art. 1).

Le Comité recommande à l ’ État partie de modifier sa législation pour y inclure une définition de la discrimination raciale pleinement conforme à l ’ article premier de la Convention.

9)Tout en prenant note de l’explication de la délégation selon laquelle la Convention a été promulguée par décret royal comme faisant partie intégrante du système juridique koweïtien, et a été publiée au Journal officiel, le Comité se demande avec inquiétude si elle est effectivement appliquée par les tribunaux et dans les actes administratifs (art. 1er et 2).

Le Comité demande à l ’ État partie de lui fournir dans son prochain rapport périodique des exemples concernant l ’ application de la Convention par les tribunaux et dans les actes administratifs.

10)Tout en notant que l’État partie a créé, par décret ministériel, un comité spécial chargé d’établir une institution nationale indépendante de promotion et de protection des droits de l’homme, conformément aux Principes de Paris, le Comité constate avec inquiétude que cette institution n’a pas été établie à ce jour (art. 2).

Rappelant sa Recommandation générale n o  17 (1993) concernant la création d ’ institutions nationales pour faciliter l ’ application de la Convention, le Comité recommande à l ’ État partie d ’ établir rapidement une institution nationale indépendante de protection et de promotion des droits de l ’ homme conformément aux Principes de Paris.

11)Le Comité est préoccupé par le fait que l’État partie n’a pas adhéré à la Convention de 1954 relative au statut des apatrides et à la Convention de 1961 sur la réduction des cas d’apatridie (art. 2).

Le Comité invite l ’ État partie à examiner à nouveau la possibilité d ’ adhérer à la Convention de 1954 relative au statut des apatrides et à la Convention de 1961 sur la réduction des cas d ’ apatridie.

12)Rappelant ses précédentes observations finales, le Comité s’inquiète de ce que le Code pénal n’ait pas été modifié pour le rendre pleinement conforme aux dispositions de l’article 4 de la Convention, et de ce qu’aucune loi spécifique n’ait été adoptée pour interdire la diffusion d’idées fondées sur la supériorité ou la haine raciale, l’incitation à la haine et à la discrimination raciales, ainsi que les organisations racistes (art. 4 a) et b)).

Rappelant ses Recommandations générales n o 7 (1985) concernant l ’ adoption d ’ une législation visant à éliminer la discrimination raciale et n o 15 (1993) concernant l ’ article 4, le Comité recommande à nouveau à l ’ État partie de réviser son Code pénal pour adopter et mettre en œuvre une législation pleinement conforme à l ’ article  4 de la Convention qui interdise la diffusion d ’ idées fondées sur la supériorité ou la haine raciale, l ’ incitation à la haine et à la discrimination raciales, ainsi que les organisations racistes.  

13)Tout en notant qu’un projet de loi contre la traite des personnes et le trafic des migrants a été soumis à l’Assemblée nationale, le Comité s’inquiète de ce qu’il n’existe pas de définition de la traite des personnes et de ce que le projet de loi incriminant la traite n’ait pas encore été adopté à ce jour (art. 2 et 6).

Le Comité recommande à l ’ État partie de définir et d ’ incriminer la traite des personnes et d ’ adopter rapidement une législation pour lutter contre la traite des personnes et le trafic des migrants conformément aux normes internationales.

14)Le Comité constate avec inquiétude qu’aucune modification n’a été apportée à ce jour à la loi sur la fonction publique (loi no 15 de 1979) concernant l’interdiction de la discrimination fondée sur le sexe, l’origine, la langue et la religion par les agents de la fonction publique dans tous les organes administratifs de l’État dans le cadre du recrutement de fonctionnaires dans l’administration publique (art. 2 et 4).

  Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ adopter rapidement le projet de loi portant modification de la loi sur la fonction publique (loi n o 15 de 1979) afin d ’ interdire la discrimination fondée sur le sexe, l ’ origine, la langue et la religion en ce qui concerne l ’ emploi dans l ’ administration publique.

15)Le Comité s’inquiète de ce que les restrictions en matière d’établissement de lieux de culte et d’accès aux lieux de culte entraînent une discrimination raciale indirecte fondée sur l’origine ethnique, en particulier à l’égard des non-ressortissants (art. 5).

Le Comité recommande à l ’ État partie de faire en sorte que tous ceux qui se trouvent sur son territoire jouissent du droit d ’ établir leurs lieux de culte et d ’ avoir accès à ces lieux et que tous les cas de restriction soient examinés conformément aux normes internationales relatives aux droits de l ’ homme, notamment les instruments auxquels l ’ État partie a adhéré ou qu ’ il a ratifiés.

16)Le Comité est préoccupé par l’absence de législation spécifique qui protège les travailleurs étrangers et les domestiques, et garantisse leurs droits conformément aux normes internationales. Il s’inquiète de ce que les modifications apportées au Code du travail, notamment la loi no 6 de 2010 régissant l’emploi dans le secteur privé, ne s’appliquent pas aux domestiques, qui sont principalement des étrangers ou des personnes d’origine étrangère, et ne régissent pas l’ensemble de leurs conditions de travail. Il s’inquiète aussi de ce que le décret ministériel no 166 de 2007 du Ministère des affaires sociales et du travail concernant l’interdiction de confisquer les documents de voyage des travailleurs dans le secteur privé ne s’applique pas aux domestiques (art. 2, 5 et 6).

À la lumière de sa Recommandation générale n o 20 (1996) concernant la jouissance des droits et des libertés sans discrimination, le Comité recommande à l ’ État partie d ’ adopter une législation spécifique pour protéger les travailleurs étrangers et les domestiques et garantir leurs droits conformément aux normes internationales, notamment les Conventions de l ’ Organisation internationale du Travail (OIT) auxquelles le Koweït est partie. Il recommande aussi à l ’ État partie de modifier la loi régissant l ’ emploi dans le secteur privé de sorte qu ’ elle s ’ applique aussi aux domestiques et régisse l ’ ensemble de leurs conditions de travail. Le Comité recommande de modifier le décret ministériel n o 166 de 2007 du Ministère des affaires sociales et du travail concernant l ’ interdiction de confisquer les documents de voyage des travailleurs dans le secteur privé afin qu ’ il s ’ applique aux domestiques. Il recommande aussi à l ’ État partie de ratifier la Convention n o 189 de l ’ OIT concernant le travail décent pour les travailleuses et travailleurs domestiques, 2011.   

17)Le Comité est préoccupé par la situation des personnes apatrides, les Bidouns, parmi lesquelles certaines vivent depuis longtemps au Koweït, souhaitent vivement obtenir la nationalité, entretiennent un véritable lien avec l’État, ou servent ou ont servi dans la police, l’armée ou d’autres institutions de l’État, ainsi que par la situation des enfants nés au Koweït de parents étrangers et apatrides. Tout en notant qu’une feuille de route a été élaborée et que le Bureau central des résidents en situation irrégulière soumettra deux listes de candidats à la naturalisation au Cabinet, le Comité est préoccupé par le faible taux de naturalisations et, en particulier, par la situation des Bidouns non enregistrés qui ne possèdent pas de cartes de sécurité. Le Comité note aussi avec inquiétude que tous les Bidouns ne jouissent pas de leurs droits fondamentaux, tels que le droit d’obtenir des documents d’état civil, ainsi que d’avoir accès à des services sociaux, à l’éducation, au logement, à la propriété, à l’enregistrement de leurs activités commerciales et à l’emploi. Il s’inquiète aussi de ce qu’ils n’ont pas toujours le droit de retourner au Koweït, ce qui constitue une violation de leur droit à la liberté de circulation (art. 2, 5 et 6).

  À la lumière de sa Recommandation générale n o 30 (2004) concernant la discrimination à l ’ égard des non-ressortissants, le Comité recommande à l ’ État partie de mettre en œuvre la feuille de route existante et de trouver une solution juste, humaine et globale au problème des Bidouns, en respectant pleinement leur dignité. La Commission mixte de la nationalité koweïtienne devrait envisager de naturaliser les Bidouns, en particulier ceux qui vivent depuis longtemps au Koweït, qui peuvent prouver leur lien véritable avec l ’ État, ou qui servent ou ont servi dans la police, l ’ armée et d ’ autres institutions de l ’ État, ainsi que les enfants nés au Koweït de parents étrangers et apatrides. L ’ État partie devrait envisager de fournir des permis de séjour aux non-ressortissants et de légaliser temporairement leur situation, y compris les Bidouns non enregistrés qui ne possèdent pas de cartes de sécurité. Le Comité recommande à l ’ État partie de délivrer des documents d ’ état civil à tous ceux qui se trouvent sur son territoire et de donner accès aux Bidouns aux services sociaux, à l ’ éducation, au logement, à la propriété, à l ’ enregistrement de leurs activités commerciales et à l ’ emploi. Il recommande à l ’ État partie de veiller à ce que les Bidouns puissent exercer leur droit à la liberté de circulation et puissent revenir au Koweït.

18)Le Comité note avec inquiétude que la législation en vigueur ne permet pas aux femmes koweïtiennes mariées à des étrangers de transmettre leur nationalité à leurs enfants et leurs époux, dans les mêmes conditions que les hommes koweïtiens (art. 2 et 5).

Rappelant ses Recommandations générales n o 25 (2000) concernant la dimension sexiste de la discrimination raciale, n o 29 (2002) concernant la discrimination fondée sur l ’ ascendance et n o 30 (2004), le Comité recommande à l ’ État partie de modifier la loi sur la nationalité afin de permettre aux femmes koweïtiennes mariées à des étrangers de transmettre leur nationalité à leurs enfants et à leurs époux dans les mêmes conditions que les hommes koweïtiens.   

19)Le Comité note avec inquiétude que le système de parrainage (Kafala) pour les domestiques continue d’être appliqué. Il s’inquiète en particulier de l’absence de garanties pour assurer la protection légale des domestiques dans le cadre du système de parrainage ainsi que du manque de responsabilités et d’obligations clairement définies pour les employeurs et les agences d’embauche. Le Comité note aussi avec inquiétude que les domestiques en conflit avec leurs employeurs sont souvent expulsés en vertu de décisions administratives, sans décision de justice ni possibilité d’appel (art. 2, 5 et 6).

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ abolir le système de parrainage (Kafala) et de le remplacer par des permis de séjour pour les domestiques délivrés et contrôlés par le Gouvernement, conformément aux normes internationales. Il recommande aussi à l ’ État partie de modifier encore la loi du 23 décembre 2009 sur l ’ emploi dans le secteur privé et de créer un organisme public qui réglementerait l ’ embauche et l ’ emploi des travailleurs dans le secteur privé et veillerait au respect des garanties en matière de protection des domestiques et des obligations et responsabilités des employeurs et des agences d ’ embauche. L ’ État partie devrait revoir le système d ’ expulsion des domestiques en vertu de décisions administratives et renvoyer ces affaires aux tribunaux, en accordant aux personnes concernées des possibilités d ’ appel.

20)Le Comité s’inquiète de ce que les réfugiés reconnus par le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) et les demandeurs d’asile qui ne peuvent pas régulariser leur situation conformément au cadre juridique actuel régissant l’emploi des étrangers et au système de parrainage se trouvent sans titre de séjour légal dans le pays. Il s’inquiète aussi de ce que le Ministère de l’intérieur ait rétabli le système d’imposition d’amendes journalières pour les réfugiés en situation illégale au Koweït. Il note aussi avec préoccupation que les réfugiés reconnus par le HCR ne peuvent pas exercer leurs droits fondamentaux, notamment les droits à la santé et à l’éducation pour les enfants de réfugiés en raison de leur situation régulière (art. 5 et 7).

À la lumière de ses Recommandations générales n o  22 (1996) concernant l ’ article  5 et concernant les réfugiés et les personnes déplacées, et n o  30 (2004), le Comité recommande à l ’ État partie d ’ octroyer des titres de séjour aux réfugiés reconnus par le HCR et aux demandeurs d ’ asile conformément au cadre juridique régissant l ’ emploi des étrangers. Il recommande aussi que le Ministère de l ’ intérieur abroge le système des amendes journalières pour les réfugiés en situation irrégulière dans le pays afin de montrer son soutien aux réfugiés et au HCR. Le Comité recommande à l ’ État partie de régulariser le statut des réfugiés reconnus par le HCR afin qu ’ ils puissent exercer leurs droits fondamentaux, notamment les droits à la santé et à l ’ éducation pour les enfants de réfugiés.

21)Le Comité s’inquiète de ce que tous les enfants bidouns n’aient pas accès à l’enseignement primaire obligatoire, y compris celui dispensé par le fonds de bienfaisance (art. 5).

Le Comité recommande à l ’ État partie de faire en sorte que tous les enfants se trouvant sur son territoire aient accès à l ’ enseignement primaire obligatoire et de rendre autant que possible l ’ enseignement secondaire accessible.

22)Le Comité s’inquiète de ce que les travailleurs étrangers, en particulier les domestiques, ne soient pas informés de leurs droits et de leurs responsabilités au regard du droit koweïtien et ne sachent pas vers qui se tourner s’ils ont besoin d’une aide (art. 5).

Le Comité recommande à l ’ État partie de fournir des informations à tous les travailleurs étrangers, y compris les domestiques, sur leurs droits et leurs responsabilités au regard du droit koweïtien et de leur indiquer, dans des langues qu ’ ils comprennent, à qui s ’ adresser s ’ ils ont besoin d ’ une aide.

23)Le Comité est préoccupé par les abus dont font l’objet certains domestiques de la part de la police et des agents de l’immigration. Il s’inquiète en particulier de l’ampleur et du type de violence subie par certains domestiques de la part de leurs employeurs. Le Comité est préoccupé par la situation intenable des domestiques exploités, qui ne peuvent changer d’employeurs qu’au bout de trois ans. Le Comité est aussi préoccupé par le manque de voies de recours à la disposition des victimes, notamment en matière d’accès à la justice, d’indemnisation et de réparation (art. 2, 5, 6 et 7).

Le Comité recommande d ’ enquêter sur les auteurs de violence à l ’ encontre de domestiques, de les poursuivre en justice et de les punir, et d ’ accorder aux victimes toutes les voies de recours offertes par la Convention, notamment en matière d ’ indemnisation et de réparation. Rappelant sa Recommandation générale n o  13 (1993) sur la formation des agents chargés de l ’ application de la loi en matière de protection des droits de l ’ homme, le Comité recommande aussi qu ’ une formation de qualité aux droits de l ’ homme soit dispensée aux magistrats chargés de l ’ instruction des affaires, aux agents chargés de l ’ application de la loi et à d ’ autres fonctionnaires. En outre, le Comité recommande à l ’ État partie de créer un mécanisme de surveillance, par exemple de nommer un médiateur des domestiques ou une personne chargée d ’ assurer la protection, et de les habiliter à recevoir des plaintes émanant de domestiques, à protéger les domestiques et à faire appliquer la loi. Il invite l ’ État partie à envisager de modifier la loi autorisant les domestiques à quitter leurs employeurs au bout de trois années de travail seulement, situation intenable en cas d ’ exploitation. Rappelant sa Recommandation générale n o  26 (2000) concernant l ’ article 6 de la Convention, le Comité recommande à l ’ État partie de faire en sorte que les victimes puissent avoir accès à des voies de recours, notamment accès à la justice, à l ’ indemnisation ou à la réparation.

24)Étant donné le caractère indivisible de tous les droits de l’homme, le Comité encourage l’État partie à envisager de ratifier les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme qu’il n’a pas encore ratifiés, en particulier les instruments dont les dispositions intéressent directement la question de la discrimination raciale, tels que la Convention internationale de 1990 sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.

25)À la lumière de sa Recommandation générale no 33 (2009) concernant le suivi de la Conférence d’examen de Durban, le Comité recommande à l’État partie de donner effet à la Déclaration et au Programme d’action de Durban, adoptés en septembre 2001 par la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, en tenant compte du document final de la Conférence d’examen de Durban, tenue à Genève en avril 2009, lors de la mise en œuvre de la Convention dans son ordre juridique interne. Le Comité demande à l’État partie d’inclure dans son prochain rapport périodique des renseignements précis sur les plans d’action et autres mesures qu’il aura adoptés pour appliquer la Déclaration et le Programme d’action de Durban au niveau national.

26)Le Comité recommande à l’État partie de consulter et d’intensifier son dialogue avec les organisations de la société civile qui œuvrent dans le domaine de la protection des droits de l’homme, en particulier de la lutte contre la discrimination raciale, lors de l’élaboration du prochain rapport périodique.

27)Le Comité recommande à l’État partie de ratifier les amendements au paragraphe 6 de l’article 8 de la Convention, adoptés le 15 janvier 1992 à la quatorzième réunion des États parties à la Convention et approuvés par l’Assemblée générale dans sa résolution 47/111. À cet égard, le Comité se réfère aux résolutions 61/148, 63/243 et 65/200, dans lesquelles l’Assemblée générale a demandé instamment aux États parties d’accélérer leurs procédures internes de ratification de l’amendement à la Convention concernant le financement du Comité et d’informer par écrit le Secrétaire général dans les meilleurs délais de leur acceptation de cet amendement.

28)Le Comité invite aussi l’État partie à faire la déclaration prévue à l’article 14 de la Convention concernant les communications émanant de particuliers.

29)Le Comité recommande à l’État partie de faire en sorte que ses rapports soient facilement accessibles au public au moment de leur présentation et que les observations du Comité s’y rapportant soient également diffusées dans la langue officielle de l’État et les autres langues couramment utilisées, selon qu’il convient.

30)Constatant que l’État partie n’a pas soumis de document de base, le Comité encourage l’État partie à soumettre un document de base conforme aux directives harmonisées concernant l’établissement de rapports destinés aux organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, en particulier concernant l’établissement du document de base commun, adoptées par la cinquième réunion des organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, tenue en juin 2006 (HRI/GEN.2/Rev.6, chap. I).

31)Conformément au paragraphe 1 de l’article 9 de la Convention et à l’article 65 de son règlement intérieur révisé, le Comité demande à l’État partie de l’informer dans l’année suivant l’adoption des présentes observations finales de la suite qu’il aura donnée aux recommandations figurant aux paragraphes 13, 14 et 23 ci-dessus.

32)Le Comité souhaite aussi appeler l’attention de l’État partie sur l’importance particulière que revêtent les recommandations figurant aux paragraphes 17, 18 et 21, et lui demande de faire figurer dans son prochain rapport périodique des renseignements détaillés sur les mesures concrètes qu’il aura prises pour les mettre en œuvre.

33)Le Comité recommande à l’État partie de présenter ses vingt et unième à vingt-quatrième rapports périodiques en un seul document, d’ici au 4 janvier 2016, en tenant compte des directives pour l’établissement du document se rapportant spécifiquement à la Convention adoptées par le Comité à sa soixante et onzième session (CERD/C/2007/1), et de répondre à tous les points soulevés dans les présentes observations finales. Le Comité engage aussi l’État partie à respecter la limite de 40 pages fixée pour les rapports spécifiques à un instrument particulier et la limite de 60 à 80 pages indiquée pour le document de base (voir HRI/GEN.2/Rev.6, chap. I, par. 19).

32. République démocratique populaire lao

1)Le Comité a examiné les seizième à dix-huitième rapports périodiques de la République démocratique populaire lao, soumis en un seul document (CERD/C/LAO/16-18), à ses 2149e et 2150e séances (CERD/C/SR.2149 et CERD/C/SR.2150), les 28 et 29 février 2012. À ses 2159e et 2160e séances (CERD/C/SR.2159 et CERD/C/SR.2160), les 6 et 7 mars 2012, il a adopté les observations finales ci-après.

A. Introduction

2)Le Comité accueille avec satisfaction la présentation des seizième à dix-huitième rapports périodiques soumis en un seul document, conformément aux directives du Comité pour l’établissement du document se rapportant spécifiquement à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, et du document de base commun. Il se félicite du dialogue franc et ouvert noué avec la délégation de haut niveau de l’État partie, ainsi que des réponses apportées aux questions soulevées par les membres du Comité durant le dialogue.

B. Aspects positifs

3)Le Comité prend note des mesures législatives et politiques prises par l’État partie, qui contribuent à combattre la discrimination raciale, notamment:

a)L’adoption en 2009 du décret du Premier Ministre sur les associations;

b)L’adoption en 2009 du Plan directeur sur l’instauration de l’état de droit au Laos à l’horizon 2020;

c)La réalisation d’une étude scientifique sur la composition de la population de l’État partie, qui a permis de reconnaître officiellement 49 ethnies classées en quatre groupes ethnolinguistiques.

4)Le Comité salue la ratification par l’État partie des instruments internationaux ci-après, depuis l’examen de ses sixième à quinzième rapports périodiques:

a)Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, le 25 septembre 2009;

b)La Convention relative aux droits des personnes handicapées, le 25 septembre 2009;

c)Le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, le 13 février 2007;

d)Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, le 20 septembre 2006;

e)Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés, le 20 septembre 2006.

5)Le Comité constate également que les groupes ethniques numériquement inférieurs sont mieux représentés dans les organes élus et publics.

C. Sujets de préoccupation et recommandations

6)Le Comité prend note des dispositions de l’article 176 du Code pénal de l’État partie, concernant la discrimination envers les personnes appartenant à des groupes ethniques, et des différents articles sur la non-discrimination contenus dans d’autres textes, tels que le Code du travail et la loi relative aux traitements médicaux, mais il constate avec préoccupation que ces dispositions n’incluent pas tous les éléments de la définition de la discrimination raciale énoncés à l’article premier de la Convention (art. 1, par. 2).

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ introduire dans sa législation une définition complète de la discrimination raciale, qui soit pleinement conforme à l ’ article premier de la Convention, lequel interdit la discrimination fondée sur la race, la couleur, l ’ ascendance ou l ’ origine nationale ou ethnique. Il lui recommande aussi de définir la discrimination directe et indirecte dans les lois civiles et administratives.

7)Le Comité note avec inquiétude que l’État partie n’a pas pris toutes les mesures législatives nécessaires pour incorporer les dispositions de la Convention dans le droit interne, comme le prévoit l’ordonnance présidentielle de 2009 portant sur la conclusion et l’application des traités, et la participation à ces instruments (art. 2).

Le Comité engage l ’ État partie à réviser sa législation et à prendre les mesures les plus appropriées pour incorporer les dispositions de la Convention en droit interne, soit en adoptant une loi générale contre la discrimination raciale, soit en modifiant les lois existantes. Il lui recommande à cet égard de prendre en considération les recommandations pertinentes formulées dans les présentes observations finales.

8)Le Comité note la préoccupation de l’État partie concernant le manque de ressources pour la mise en place d’une institution nationale des droits de l’homme. Il prend aussi note de la diversité des organes chargés de superviser la mise en œuvre des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, énoncés au paragraphe 65 du document de base de l’État partie. Il souligne le rôle crucial qu’une institution nationale des droits de l’homme indépendante joue dans la protection et la promotion des droits de l’homme, et en particulier la lutte contre la discrimination raciale (art. 2).

Rappelant sa recommandation antérieure, le Comité encourage l ’ État partie à mettre en place une institution nationale des droits de l ’ homme qui soit conforme aux principes concernant le statut et le fonctionnement des institutions nationales pour la protection et la promotion des droits de l ’ homme (Principes de Paris). Il l ’ invite à solliciter dans ce domaine l ’ assistance de la communauté internationale, notamment du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l ’ homme.

9)Le Comité regrette le manque d’informations sur la mise en œuvre de l’article 3 de la Convention (art. 3).

  Rappelant sa Recommandation générale n o 19 (1995) concernant l ’ article 3 de la Convention sur la ségrégation raciale, le Comité demande à l ’ État partie d ’ inclure dans son prochain rapport périodique des renseignements sur la répartition géographique des ethnies et sur les mesures prises pour suivre les tendances en la matière et prévenir la ségrégation.

10)Le Comité prend acte de l’explication fournie par l’État partie selon laquelle l’article 66 du Code pénal relatif aux atteintes à la solidarité a été introduit en réponse à la recommandation formulée par le Comité à sa soixante-sixième session en avril 2005, mais il regrette que cet article n’interdise pas la diffusion d’idées fondées sur la supériorité ou la haine raciale, ni l’incitation à la discrimination raciale ni les organisations ou les activités promouvant la discrimination raciale, comme le prescrit l’article 4 de la Convention (art. 4, par. 2).

Rappelant ses Recommandations générales n o  1 (1972) concernant les obligations des États parties, n o  7 (1985) concernant la législation visant à éliminer la discrimination raciale et n o  15 (1993) concernant l ’ article 4 de la Convention, d ’ après lesquelles les dispositions de l ’ article 4 ont un caractère impératif et préventif, le Comité recommande à l ’ État partie d ’ incorporer dans son Code pénal des dispositions donnant pleinement effet à l ’ article 4 de la Convention. Il lui recommande également de définir, à l ’ article 41 de son Code pénal, la motivation raciste d ’ une infraction comme circonstance aggravante. En outre, il demande à l ’ État partie d ’ inclure dans son prochain rapport périodique des informations sur l ’ application de l ’ article 66 du Code pénal.

11)Tout en prenant note de la réponse apportée par la délégation lao, concernant notamment l’enquête conduite sur les allégations de meurtres de jeunes Hmongs dans la zone spéciale de Xaisomboune en mai 2004, le Comité constate avec préoccupation que les allégations d’actes de violence commis à l’encontre de Hmongs ne font pas l’objet d’enquêtes menées en bonne et due forme, et en toute impartialité (art. 5 b)).

Le Comité engage l ’ État partie à conduire sans tarder des enquêtes approfondies et impartiales sur toutes les allégations d ’ actes de violence visant des membres du groupe ethnique hmong. À cet égard, il attire l ’ attention de l ’ État partie sur sa Recommandation générale n o  31 (2005) concernant la prévention de la discrimination raciale dans l ’ administration et le fonctionnement du système de justice pénale.

Le Comité réitère également sa recommandation antérieure selon laquelle l ’ État partie devrait inviter les organes des Nations Unies travaillant dans le domaine de la protection et de la promotion des droits de l ’ homme à visiter les zones où des membres des groupes ethniques hmongs se sont réfugiés.

12)Le Comité prend note des informations fournies par l’État partie dans sa lettre datée du 2 octobre 2009 et au cours du dialogue, concernant les conditions de vie des Hmongs rapatriés au titre d’un accord avec un pays voisin. Néanmoins, il constate avec préoccupation que certaines personnes, considérées par le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) comme relevant de sa compétence, n’ont pas été rapatriées de leur plein gré et que les observateurs internationaux n’ont pas été autorisés à les approcher à leur arrivée dans l’État partie (art. 5 b)).

Le Comité demande à l ’ État partie de veiller à ce que les rapatriements de personnes ou de groupes, considérés comme relevant de la compétence du HCR, soient menés sur une base véritablement volontaire. Il engage l ’ État partie à donner aux observateurs internationaux un accès sans restriction aux rapatriés.

13)Le Comité prend note des efforts déployés par l’État partie pour combattre la traite des êtres humains, notamment par une coopération régionale, mais constate avec préoccupation que la traite des personnes, qui pourrait toucher la population rurale et les groupes ethniques, reste un grave problème (art. 5 b)).

Outre les recommandations formulées dans le cadre de l ’ Examen périodique universel tendant à adopter des mesures pour lutter contre la traite, que l ’ État partie s ’ est engagé de plein gré à suivre, le Comité demande à l ’ État partie de s ’ attaquer aux causes profondes de la traite et à prêter attention à toute manifestation de vulnérabilité face à ce phénomène, en raison de l ’ appartenance à une ethnie ou à la suite d ’ une réinstallation.

14)Prenant en compte la corrélation entre l’appartenance ethnique et la religion dans l’État partie, et renvoyant aux observations du Rapporteur spécial sur la liberté de religion ou de conviction, le Comité s’inquiète de la discrimination dont seraient victimes certains groupes ethniques dans l’exercice de leur droit à la liberté de religion (art. 5 d)).

Le Comité réitère la recommandation qu ’ il a déjà adressée à l ’ État partie de prendre toutes les mesures nécessaires afin que chacun jouisse de son droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion, sans discrimination, conformément à l ’ article 5 de la Convention.

15)Le Comité s’inquiète de la réticence de l’État partie à prendre des mesures pour décourager les pratiques de certains groupes ethniques, concernant en particulier l’héritage et les mariages précoces, qui portent atteinte à l’égalité et à l’exercice des droits, que l’on soit homme ou femme (art. 5 d) et e)).

Rappelant l ’ obligation qui incombe à l ’ État partie de garantir à chacun le droit à l ’ égalité dans la jouissance des droits de l ’ homme, le Comité prie l ’ État partie de tenir compte dans ses politiques publiques de la nécessité d ’ éliminer les coutumes discriminatoires, essentiellement par l ’ éducation et des stratégies adaptées à la culture de chacun. À ce propos, le Comité appelle l ’ attention de l ’ État partie sur sa Recommandation générale n o  25 (2000) concernant la dimension sexiste de la discrimination raciale.

16)Au vu des coutumes et des pratiques traditionnelles des membres des groupes ethniques vivant dans les régions montagneuses, le Comité note avec préoccupation que le régime foncier de l’État partie, selon lequel des terres sont attribuées pour le logement, l’agriculture, le jardinage et le pâturage, ne reconnaît pas de lien entre l’identité culturelle des groupes ethniques et leurs terres (art. 5 e)).

Le Comité appelle l ’ État partie à revoir son régime foncier en vue de reconnaître l ’ aspect culturel de la terre, qui fait partie intégrante de l ’ identité de certains groupes ethniques.

17)Le Comité regrette de ne pas avoir reçu d’informations, au cours du dialogue avec l’État partie, sur la manière dont le droit des communautés à donner préalablement leur libre consentement, en toute connaissance de cause, est garanti dans la pratique, lors de la mise en œuvre de projets qui touchent à l’utilisation de leurs terres et de leurs ressources, en particulier de projets de développement, tels que la construction de centrales hydroélectriques, d’activités d’extraction, ou dans le contexte de concessions foncières et la mise en place de zones économiques spéciales (art. 5 e)).

Le Comité engage l ’ État partie à veiller à ce que le droit des communautés à donner leur libre consentement préalable et éclairé soit respecté lors de la planification et de la mise en œuvre de projets touchant à l ’ utilisation de leurs terres et de leurs ressources. Il le prie de s ’ assurer que les communautés ont les moyens de faire valoir effectivement leurs intérêts lors de la prise de décisions. Il lui recommande également de prendre toutes les mesures nécessaires pour que les communautés puissent obtenir effectivement réparation.

En outre, le Comité prie l ’ État partie de veiller à ce que les lois et les règlements portant sur les consultations, les évaluations d ’ impact, les déplacements et les indemnisations, tels que le décret du Premier Ministre n o  192/PM du 7 juillet 2006, respectent pleinement les droits des membres des communautés vivant dans les zones où des projets de développement doivent être mis en œuvre.

18)Le Comité prend note de l’objectif de développement de la politique de réinstallation, qui vise à rassembler les communautés ethniques dispersées dans les régions montagneuses et à les réinstaller dans les villages des plaines, où il est plus facile d’avoir accès aux services et aux infrastructures publics. Il prend aussi note de l’affirmation de l’État partie selon laquelle les communautés concernées par des projets de réinstallation ont été consultées préalablement et que ces réinstallations ont été menées avec leur consentement. Cependant, il constate avec une profonde préoccupation que la mise en œuvre de la politique a entraîné le déracinement de communautés qui ont dû adopter de nouveaux modes de vie et moyens d’existence. En outre, il regrette de ne pas avoir reçu d’informations sur la mesure dans laquelle il a tenu compte d’autres solutions que la réinstallation et de l’attachement des groupes ethniques à leurs terres dans la mise en œuvre de la politique (art. 1er et 5 e)).

Le Comité réitère sa recommandation antérieure appelant l ’ État partie à étudier toutes les solutions possibles autres que la réinstallation et à prêter attention aux liens culturels de certains groupes ethniques avec leurs terres. En outre, il recommande à l ’ État partie de donner la possibilité aux groupes ethniques numériquement inférieurs de définir le développement dans leurs propres termes et de participer à la prise de décisions concernant la manière d ’ assurer le développement.

Le Comité demande à l ’ État partie d ’ inclure dans son prochain rapport périodique des renseignements sur le nombre de personnes réinstallées, en indiquant leur village d ’ origine et leur appartenance ethnique, ainsi que des informations concernant les effets de la politique de réinstallation sur les moyens d ’ existence et la culture des personnes, des villages et des groupes ethniques concernés.

19)Le Comité note la volonté politique de l’État partie de réduire la pauvreté dans les zones rurales et d’améliorer l’exercice des droits économiques et sociaux par les groupes ethniques, comme le montre la mise en œuvre de politiques et de programmes, tels que la Stratégie pour l’éducation d’ici à 2020 et les programmes d’éducation pour tous, et le Plan stratégique de santé publique pour la période 2000-2020, qui donnent la priorité aux districts défavorisés. Néanmoins, il note avec préoccupation que certains groupes ethniques n’ont pas accès sur le même pied d’égalité aux services publics, notamment dans les domaines de la santé et de l’éducation, soit à cause d’obstacles linguistiques, soit parce que, dans les zones éloignées, ces services sont de faible qualité ou inexistants (art. 5 e)).

Le Comité invite l ’ État partie à continuer de lutter contre les disparités ethniques et géographiques dans la fourniture des services publics et l ’ accès à ces services, et à veiller à ce que ces services soient culturellement adaptés. Eu égard à sa Recommandation générale n o  32 (2009) concernant la signification et la portée des mesures spéciales dans la Convention internationale sur l ’ élimination de toutes les formes de discrimination raciale, il demande à l ’ État partie d ’ inclure dans son prochain rapport périodique des informations sur les mesures spéciales prises pour réduire ces disparités, ainsi que des renseignements sur les résultats des mesures adoptées pour lever l ’ obstacle du langage dans la fourniture de services. Il lui demande également de fournir dans son prochain rapport périodique des données sur l ’ exercice des droits économiques, sociaux et culturels, ventilées par groupe ethnique et par zone rurale/urbaine.

20)Malgré l’explication fournie par l’État partie selon laquelle aucun groupe ethnique n’est considéré comme une minorité, le Comité insiste sur la nécessité, dans une société multiethnique, de reconnaître et de promouvoir les droits des groupes ethniques numériquement inférieurs et en particulier de protéger leur existence et leur identité de façon à prévenir l’assimilation forcée et la perte de leur culture, et de faire en sorte que leurs préoccupations soient prises en considération dans les politiques publiques (art. 1er, 2 et 5).

Conformément à ses précédentes observations finales, le Comité prie l ’ État partie de reconnaître à tous les membres des groupes ethniques numériquement inférieurs au reste de la population, quel que soit le nom donné à ces groupes dans la législation nationale l ’ exercice de tous les droits de l ’ homme énoncés à l ’ article 5 de la Convention sans discrimination fondée sur l ’ origine ethnique.

21)Le Comité s’inquiète de l’insuffisance des mesures prises pour préserver les langues ethniques parlées dans l’État partie, en particulier les langues non écrites, qui font partie du patrimoine culturel national (art. 5 e)).

Le Comité engage l ’ État partie à prendre les mesures nécessaires pour préserver le patrimoine culturel des groupes ethniques, y compris leur langue. À cet égard, il lui recommande d ’ étudier toutes les solutions possibles pour conserver les langues ethniques, les savoirs et les cultures traditionnels, les documenter et développer leur enseignement à l ’ école.

22)Le Comité prend note des mesures prises, telles que l’adoption en 2005 de la loi relative au dépôt de plaintes et la mise en œuvre du Plan directeur sur l’instauration de l’état de droit, en vue d’améliorer l’accès à la justice dans l’État partie. Il s’inquiète néanmoins de l’absence de plaintes pour discrimination raciale, malgré la diversité ethnique de la population lao (art. 6).

Considérant que l ’ absence de plaintes ne signifie pas que la discrimination raciale n ’ existe pas et rappelant sa Recommandation générale n o  31 (2005) concernant la prévention de la discrimination raciale dans l ’ administration et le fonctionnement du système de justice pénale, le Comité recommande à l ’ État partie de rechercher si l ’ absence de plaintes pour discrimination raciale n ’ est pas le résultat d ’ une méconnaissance, de la part des victimes, de leurs droits, de la peur de représailles, d ’ un accès limité aux voies de recours, d ’ un manque de confiance à l ’ égard des autorités de police et de justice, ou d ’ un manque d ’ attention ou de sensibilisation de ces autorités aux affaires de discrimination raciale.

Le Comité recommande à l ’ État partie de revoir les moyens de recours judiciaire et autres à disposition des victimes afin de s ’ assurer qu ’ ils sont bien effectifs. À cette fin, il l ’ invite à prêter une attention particulière aux difficultés supplémentaires rencontrées par les groupes ethniques dans l ’ accès à la justice, telles que l ’ éloignement géographique et les obstacles linguistiques. Il lui recommande également de poursuivre ses activités de sensibilisation à la Convention et aux dispositions du Code pénal lao relatives à la discrimination raciale.

Le Comité demande à l ’ État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des informations sur les plaintes de discrimination raciale, reçues par tous les mécanismes quels qu ’ ils soient, y compris les centres de médiation dans les villages et l ’ Assemblée nationale, ainsi que des renseignements sur les décisions rendues en la matière dans le cadre de procédures pénales, civiles ou administratives, notamment sur la restitution et autres formes de réparation éventuellement accordées aux victimes de tels actes.

23)Tout en prenant note de la mise en œuvre du projet pour le droit international lancé par le Programme des Nations Unies pour le développement, le Comité regrette que les informations fournies dans le rapport et le document de base de l’État partie et pendant le dialogue n’aient pas permis de déterminer dans quelle mesure une formation à la Convention et à ses dispositions a été dispensée aux représentants des pouvoirs publics, au personnel de l’appareil judiciaire, aux responsables de l’application des lois, aux enseignants, aux travailleurs sociaux et à d’autres agents de la fonction publique (art. 7).

Le Comité demande à l ’ État partie d ’ inclure dans son prochain rapport périodique des informations sur les mesures prises pour renforcer la sensibilisation à la Convention et à ses dispositions auprès des personnes concernées par la mise en œuvre de cet instrument, notamment les fonctionnaires, le personnel de l ’ appareil judiciaire, les membres des centres de médiation dans les villages, les responsables de l ’ application des lois, les enseignants et les travailleurs sociaux. Il attire en particulier l ’ attention de l ’ État partie sur sa Recommandation générale n o  13 (1993) concernant la formation des responsables de l ’ application des lois à la protection des droits de l ’ homme.

24)Compte tenu du caractère indivisible de tous les droits de l’homme, le Comité encourage l’État partie à envisager de ratifier les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme qui ne l’ont pas encore été, en particulier ceux dont les dispositions se rapportent directement à la question de la discrimination raciale, tels que la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.

25)À la lumière de sa Recommandation générale no 33 (2009) concernant le suivi de la Conférence d’examen de Durban, le Comité recommande à l’État partie de donner effet, lors de la mise en œuvre de la Convention dans son ordre juridique interne, à la Déclaration et au Programme d’action de Durban adoptés en septembre 2001 à la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, en tenant compte du Document final de la Conférence d’examen de Durban, tenue à Genève en avril 2009. Il prie l’État partie d’inclure dans son prochain rapport périodique des informations spécifiques sur les plans d’action et autres mesures qu’il aura pris pour appliquer la Déclaration et le Programme d’action de Durban au niveau national.

26)Le Comité recommande à l’État partie d’engager un dialogue avec les organisations de la société civile travaillant dans le domaine de la protection des droits de l’homme, et de renforcer encore ce dialogue, en particulier dans l’optique de la mise en œuvre de ces recommandations et de l’élaboration de son prochain rapport périodique.

27)Le Comité encourage l’État partie à envisager de faire la déclaration facultative prévue à l’article 14 de la Convention, reconnaissant la compétence du Comité pour recevoir et examiner des plaintes individuelles.

28)Il recommande à l’État partie de ratifier les amendements au paragraphe 6 de l’article 8 de la Convention, adoptés le 15 janvier 1992 à la quatorzième Réunion des États parties à la Convention et approuvés par l’Assemblée générale dans sa résolution 47/111. À cet égard, il rappelle les résolutions 61/148, 63/243 et 65/200, dans lesquelles l’Assemblée générale a demandé instamment aux États parties d’accélérer leurs procédures internes de ratification de l’amendement à la Convention concernant le financement du Comité et d’informer par écrit le Secrétaire général dans les meilleurs délais de leur acceptation de cet amendement.

29)Le Comité recommande à l’État partie de faire en sorte que ses rapports soient facilement accessibles au public au moment de leur soumission et que les observations du Comité s’y rapportant soient également diffusées dans la langue officielle de l’État et les autres langues communément utilisées, selon qu’il convient.

30)Conformément au paragraphe 1 de l’article 9 de la Convention et à l’article 65 de son Règlement intérieur révisé, le Comité demande à l’État partie de lui fournir, dans un délai d’un an à compter de l’adoption des présentes observations finales, des renseignements sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations figurant aux paragraphes 11, 12 et 13 ci-dessus.

31)Le Comité souhaite aussi appeler l’attention de l’État partie sur l’importance particulière des recommandations figurant aux paragraphes 7, 8 et 17 ci-dessus et lui demande de fournir dans son prochain rapport périodique des renseignements détaillés sur les mesures concrètes qu’il aura prises pour mettre en œuvre ces recommandations.

32)Le Comité recommande à l’État partie de présenter ses dix-neuvième à vingt et unième rapports périodiques en un seul document d’ici au 24 mars 2015, en tenant compte des directives concernant l’élaboration des documents propres au Comité pour l’élimination de la discrimination raciale qu’il a adoptées à sa soixante et onzième session (CERD/C/2007/1) et en traitant tous les points soulevés dans les présentes observations finales. Le Comité l’engage également à respecter la limite de 40 pages fixée pour les rapports présentés au titre d’un instrument et la limite de 60 à 80 pages pour le document de base commun, s’il envisage de le mettre à jour (HRI/GEN/2/Rev.6, chap. I, par. 19).

33. Mexique

1)Le Comité a examiné les seizième et dix-septième rapports périodiques du Mexique, présentés en un seul document (CERD/C/MEX/16-17), à ses 2129e et 2130e séances (CERD/C/SR.2129 et 2130), tenues les 14 et 15 février 2012. À ses 2158e et 2159e séances (CERD/C/SR.2158 et 2159), tenues le 6 mars 2012, il a adopté les observations finales suivantes.

A. Introduction

2)Le Comité accueille avec satisfaction la présentation du rapport de l’État partie et les réponses apportées oralement à ses questions par la délégation de l’État partie, et se félicite du dialogue qu’il a eu avec la délégation.

3)Le Comité salue la participation active des représentants de la société civile à l’élaboration et à l’envoi de précieuses contributions, dans le cadre de l’examen du rapport de l’État partie.

B. Aspects positifs

4)Le Comité félicite l’État partie pour l’entrée en vigueur de la réforme de la Constitution politique des États-Unis du Mexique, notamment en matière d’amparo, de procédure pénale et d’action collective.

5)Le Comité félicite également l’État partie d’avoir élevé les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme ratifiés par lui, dont la Convention, au rang de dispositions constitutionnelles, permettant ainsi leur application directe, étant entendu qu’il reste à adopter les textes d’application permettant de donner pleinement effet à cette réforme en matière de droits de l’homme.

6)Le Comité salue l’organisation en 2010 de la deuxième enquête nationale sur la discrimination au Mexique, initiative visant à appeler l’attention sur la situation des personnes et des groupes qui souffrent de discrimination systématique dans l’État partie.

7)Le Comité note avec satisfaction les programmes et les institutions mis en place dans le pays pour lutter contre la discrimination raciale, en particulier le Conseil national pour la prévention de la discrimination (CONAPRED), la loi générale sur les droits linguistiques des peuples autochtones et le Programme pour le développement des peuples autochtones 2009-2012.

8)Le Comité prend note avec satisfaction de la collaboration suivie de l’État partie avec le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) depuis 2002, et se félicite que cette collaboration se soit affermie d’année en année.

C. Sujets de préoccupation et recommandations

9)Le Comité est très préoccupé de constater que, en dépit du fait que l’État partie dispose d’institutions très abouties pour lutter contre la discrimination raciale, celle-ci demeure une réalité structurelle. Il s’inquiète également de l’absence d’informations sur les effets et les résultats véritables de ces institutions, programmes, plans et stratégies de l’État partie (art. 2).

Le Comité invite l ’ État partie à définir des méthodes pour mesurer les résultats de l ’ application des politiques publiques qui lui permettront d ’ évaluer l ’ efficacité de ses institutions et des mesures qui ont été prises, au moyen notamment d ’ indicateurs relatifs aux droits de l ’ homme. Il lui demande également de présenter des informations sur le sujet dans son prochain rapport, et lui suggère d ’ établir un rapport plus concret et succinct, comportant des tableaux, des données et des informations qui permettent de comprendre le degré d ’ application des recommandations du Comité. En outre, il recommande à l ’ État partie de tenir compte des résultats de sa deuxième enquête nationale sur la discrimination lors de la conception et la mise en œuvre de campagnes visant à lutter efficacement contre les comportements discriminatoires et xénophobes et à renforcer les attributions et les capacités du CONAPRED, afin qu ’ il dispose de plus d ’ éléments pour pouvoir combattre le racisme, la xénophobie et l ’ intolérance qui y est associée.

10)Le Comité note avec préoccupation qu’en dépit de ses recommandations et de ses demandes répétées à ce sujet, la situation des personnes d’ascendance africaine ne reçoit pas l’attention voulue. Il constate avec regret que bien qu’ayant demandé des informations détaillées sur la population d’ascendance africaine en 2006, ces informations ne lui ont pas été fournies par l’État partie dans son rapport périodique (art. 1er).

Compte tenu de la Recommandation générale n o  34 (2011) sur la discrimination raciale à l ’ égard des personnes d ’ ascendance africaine, le Comité demande à nouveau à l ’ État partie de fournir des informations sur ces personnes, qui sont peu nombreuses et vulnérables, et doivent donc bénéficier de toutes les garanties de protection qui sont prévues dans la Convention. Le Comité invite l ’ État partie à envisager la reconnaissance ethnique de la population d ’ ascendance africaine et l ’ adoption de programmes destinés à promouvoir les droits de cette population.

11)Bien que l’État partie ait mené à bien des réformes législatives importantes, le Comité note avec préoccupation que la définition de la discrimination qui figure dans la loi fédérale relative à la prévention et l’élimination de la discrimination ne mentionne pas la discrimination raciale, et n’est pas conforme à la Convention. Il est aussi préoccupé par le fait que les lois relatives aux questions qui concernent les peuples autochtones varient beaucoup d’un État fédéré à l’autre, et que les politiques menées dépendent beaucoup des programmes de l’État fédéral. Il constate de nouveau avec inquiétude l’absence de législation nationale qualifiant de délits toute diffusion d’idées fondées sur la supériorité ou la haine raciale, toute incitation à la discrimination raciale, ainsi que tous actes de violence raciste, en particulier contre les peuples autochtones et les personnes d’ascendance africaine dans l’État partie (art. 1er et 4 a)).

Le Comité prend note avec intérêt du projet de réforme de la loi précitée, dans lequel figure une définition de la discrimination conforme à l ’ article premier de la Convention, et qui vise à promouvoir l ’ adoption de lois locales dans le pays et il encourage vivement l ’ État partie à procéder à l ’ adoption définitive de ce projet. Dans le même ordre d ’ idées, il recommande à l ’ État partie de redoubler d ’ efforts pour harmoniser la législation et les normes concernant les droits des peuples autochtones à tous les niveaux de l ’ État, et d ’ adopter une loi spécifique pour condamner les diverses manifestations de la discrimination raciale conformément aux dispositions de l ’ article 4 de la Convention.

12)Le Comité prend note de la reconnaissance et de l’application du système juridique autochtone dans le système juridique local à travers la notion «d’us et coutumes», notamment lors de l’élection de représentants au niveau local. Il regrette cependant le champ d’application limité des «us et coutumes» des communautés autochtones (art. 5).

Le Comité, compte tenu de sa Recommandation générale n o  31 (2005) concernant la discrimination raciale dans l ’ administration et le fonctionnement du système de justice pénale, exhorte l ’ État partie à respecter les systèmes de justice traditionnels des peuples autochtones conformément aux normes internationales relatives aux droits de l ’ homme, y compris par la mise en place de juridictions autochtones spécifiques.

13)Le Comité prend note avec une vive préoccupation de rapports dont il a eu connaissance sur la violence qui sévit dans l’État partie dans le cadre de la lutte contre la criminalité organisée et les répercussions qu’elle risque d’avoir sur la protection des droits de l’homme, notamment des personnes issues de peuples autochtones et d’ascendance africaine, souvent plus vulnérables (art. 5 b)).

Le Comité exhorte l ’ État partie à prendre les mesures nécessaires pour mettre fin à la violence en veillant strictement au respect des droits de l ’ homme.

14)Si le Comité prend note des efforts déployés par l’État partie dans le cadre de la réforme de la sécurité et du système judiciaire, il se déclare de nouveau préoccupé par les difficultés d’accès à la justice des autochtones, et le nombre alarmant de plaintes pour des irrégularités présumées dans plusieurs affaires impliquant des autochtones, ainsi que la proportion de ces personnes dans le système carcéral. En particulier, il se déclare préoccupé par le nombre insuffisant d’interprètes et de fonctionnaires de justice bilingues maîtrisant les procédures judiciaires, ainsi que par le niveau d’accès et de qualité de l’Institut fédéral de formation des avocats de la défense. Le Comité est préoccupé par le fait que, bien qu’il existe des services d’interprétation, leur prestation ne soit pas accordée en se fondant sur une évaluation sommaire de la maîtrise du castillan par le prévenu. Il prend note avec préoccupation du cas de M. Hugo Sánchez et se félicite que l’affaire ait été portée devant la Cour suprême de justice (art. 5 a)).

Estimant que le manque d ’ interprètes pourrait être l ’ une des causes de la présence disproportionnée d ’ autochtones dans le système carcéral, le Comité recommande à l ’ État partie:

a) De garantir le plein accès de ces personnes à des avocats commis d ’ office et à des fonctionnaires de justice bilingues dans les procédures judiciaires;

b) De garantir le plein accès des autochtones à des services d ’ interprétation culturellement adaptés pendant toute la durée de la procédure judiciaire, même si les personnes possèdent des connaissances du castillan;

c) De continuer d ’ organiser des cours destinés aux juges et aux auxiliaires de justice afin de garantir aux autochtones un accès effectif à la justice, dans des conditions d ’ égalité.

Le Comité attend avec intérêt le règlement de l ’ affaire de M. Sánchez dont est saisie actuellement la Cour suprême de justice et invite l ’ État partie à déterminer s ’ il y aurait lieu de se pencher sur les plaintes déposées pour irrégularités de procédure et/ou condamnation irrégulière dans des affaires concernant des autochtones.

15)Le Comité se déclare vivement préoccupé par des faits graves survenus récemment qui portent atteinte à l’intégrité physique de défenseurs des droits des peuples autochtones, et appelle l’attention, plus particulièrement, sur le meurtre de certains de ces défenseurs (art. 5 b)).

Le Comité recommande à l ’ État partie de poursuivre et sanctionner les auteurs de ces meurtres. Par ailleurs, il exhorte l ’ État partie à accélérer le processus d ’ adoption d ’ une loi spécifique qui garantisse la protection des défenseurs des droits de l ’ homme, y compris les défenseurs des droits des peuples autochtones, et à prendre les mesures voulues pour empêcher ces actes, y compris un mécanisme spécial pour la protection des défenseurs des droits de l ’ homme, compte tenu de la déclaration sur les défenseurs des droits de l ’ homme, adoptée par l ’ Assemblée générale, et des recommandations de la Rapporteuse spéciale sur la situation des défenseurs des droits de l ’ homme.

16)S’il prend acte des efforts faits par l’État partie pour garantir la participation des peuples autochtones au processus politique, notamment dans les institutions représentatives, le Comité note une nouvelle fois avec préoccupation le nombre et le niveau des postes occupés par des autochtones, notamment des femmes, au Gouvernement. Il s’inquiète de constater que l’alinéa VII de l’article 2 de la Constitution restreint la possibilité pour les autochtones de choisir leurs représentants politiques selon leurs propres règles au seul échelon municipal, et note le manque d’informations sur la participation politique des personnes d’ascendance africaine (art. 5 c)).

Le Comité, compte tenu de sa Recommandation générale n o  23 (1997) concernant les droits des peuples autochtones, recommande à l ’ État partie de redoubler d ’ efforts pour assurer la pleine participation des autochtones, notamment des femmes, dans toutes les institutions décisionnelles, en particulier les institutions représentatives, ainsi qu ’ aux affaires publiques, et de prendre des mesures effectives pour garantir la participation des autochtones à tous les niveaux de l ’ administration publique. En outre, il recommande instamment à l ’ État partie de prendre aussi des mesures visant à garantir la participation politique et publique des personnes d ’ ascendance africaine. À ces fins, il recommande à l ’ État partie de prendre des mesures spéciales ou préférentielles, conformément à la Convention et à la Recommandation générale n o  32 (2009) du Comité sur la signification et la portée des mesures spéciales dans la Convention.

17)Le Comité note que la Commission nationale pour la promotion des peuples autochtones dispose d’un système de consultation autochtone fondé sur les articles 2 et 26 de la Constitution et la loi relative à cette commission. Il s’inquiète cependant de constater que ce système de consultation ne tient pas compte du principe de «consentement libre, préalable et éclairé». Il est particulièrement préoccupé par les tensions croissantes entre des acteurs extérieurs et des peuples autochtones en rapport avec l’exploitation des ressources naturelles, en particulier l’exploitation minière. Il se déclare une fois encore préoccupé par des informations faisant état de litiges au sujet de terres appartenant historiquement aux peuples autochtones, et par le fait que, dans la pratique, le droit des autochtones d’être consultés avant la mise en exploitation de ressources naturelles se trouvant sur leur territoire n’est pas pleinement respecté. Il note également l’existence de trois initiatives législatives dans ce domaine et regrette que des informations détaillées ne lui aient pas été communiquées sur celles-ci. Le Comité est également préoccupé de constater que des mesures administratives doivent être prises pour garantir le mode de propriété et le régime foncier traditionnels (art. 5 d) v]).

Compte tenu de sa Recommandation générale n o  23 (1997), le Comité recommande à l ’ État partie:

a) De veiller à ce qu ’ il soit procédé à des consultations effectives à chaque étape du processus avec les communautés qui pourraient être concernées par des projets de développement et d ’ exploitation de ressources naturelles afin d ’ obtenir leur consentement libre, préalable et éclairé, en particulier dans les cas d ’ exploitation minière. Il recommande également d ’ accélérer autant que possible le processus d ’ adoption d ’ une loi dans ce domaine, rappelant à l ’ État partie que l ’ absence de textes d ’ application de la Convention n o  169 de l ’ Organisation internationale du Travail (OIT) concernant les peuples indigènes et tribaux dans les pays indépendants (adoptée en 1989) n ’ empêche pas de mettre en œuvre des processus de consultation préalable;

b) De multiplier les tables rondes auxquelles des représentants des pouvoirs publics prendront une part active, dans diverses instances de dialogue avec les peuples autochtones, en veillant à ce que celles-ci débouchent sur des accords concrets, viables et vérifiables qui seront effectivement mis en œuvre; il recommande également de mettre l ’ accent sur les modes parallèles de règlement des différends conformément aux normes internationales en matière de droits de l ’ homme et de droits des peuples autochtones;

c) Dans les cas exceptionnels où le transfert et la réinstallation de peuples autochtones sont estimés nécessaires, de veiller au respect des dispositions prévues dans les normes internationales pour procéder à ces transferts. À cet égard, il demande à l ’ État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des renseignements sur les autochtones et le régime foncier applicable, notamment pour les cas où l ’ on cherche à exploiter des ressources naturelles sur des terres autochtones.

18)Le Comité est très préoccupé par le fait que, selon le rapport publié en 2010 par le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) sur le développement humain des peuples autochtones au Mexique, pour ce qui est des droits à l’éducation, à la santé, à la sécurité sociale, au logement, aux services de base et à l’alimentation, les données montrent que 93,9 % des autochtones sont privés d’au moins un de ces droits, et 64,2 % d’au moins trois de ces droits. Si l’on définit la pauvreté multidimensionnelle comme le pourcentage de personnes démunies dans au moins un domaine social et dont les revenus sont insuffisants, on constate que 70,9 % de la population autochtone appartient à cette catégorie. Le Comité est également très préoccupé par les informations selon lesquelles les autochtones se situent à des niveaux de développement humain inférieurs à ceux de la population non autochtone au regard de l’indice de développement humain (art. 5 e)).

Le Comité exhorte l ’ État partie à prendre des mesures pour mettre fin à la discrimination structurelle et historique pratiquée dans l ’ État au moyen de politiques d ’ intégration sociale qui réduisent les niveaux d ’ inégalité élevés ainsi que les niveaux de pauvreté et d ’ extrême pauvreté afin de garantir pleinement à tous les Mexicains et toutes les Mexicaines, en particulier d ’ origine autochtone, le droit à l ’ éducation, à la santé, à la sécurité sociale, au logement, aux services de base et à l ’ alimentation, en tenant compte de leur origine culturelle, en respectant celle-ci et en consultant les peuples susceptibles d ’ être concernés par ces initiatives de l ’ État.

19)Le Comité reconnaît les efforts déployés par l’État partie pour offrir aux autochtones une couverture de santé qui tienne compte de leurs spécificités culturelles. Il s’inquiète toutefois de voir que les taux de mortalité maternelle et infantile les plus élevés sont ceux de la population autochtone. Il est préoccupé par le fait que les communautés autochtones ne disposent pas de services de santé satisfaisants et faciles d’accès et par l’insuffisance des données sur les indicateurs de santé et sur les mesures adoptées pour améliorer ces indicateurs (art. 5 e)).

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ élaborer, en consultation étroite avec les communautés concernées, une stratégie globale et culturellement adaptée afin que les peuples autochtones reçoivent des soins médicaux de qualité. La mise en œuvre de cette stratégie devrait être garantie par l ’ affectation de ressources suffisantes, l ’ emploi d ’ indicateurs et le suivi transparent des progrès réalisés. Il conviendrait d ’ accorder une attention particulière à l ’ amélioration de l ’ accès des femmes et des enfants autochtones à des soins médicaux. Le Comité souligne la nécessité de disposer d ’ interprètes également dans ce domaine afin de garantir le plein accès des autochtones aux services de santé. Afin d ’ assurer une couverture plus efficace et adaptée à l ’ origine culturelle des bénéficiaires, il est important de veiller à ce que le système de santé se fonde et s ’ appuie sur les systèmes de santé autochtones, à ce qu ’ il s ’ articule autour de ceux-ci et se renforce par leur biais. Le Comité demande à l ’ État partie de produire des données claires sur la mortalité maternelle et l ’ espérance de vie dans les communautés autochtones et d ’ ascendance africaine. Enfin, il recommande à l ’ État partie d ’ accentuer ses efforts en faveur de la santé sexuelle et procréative des femmes autochtones et d ’ ascendance africaine.

20)Le Comité reste préoccupé par la situation des travailleurs migrants principalement originaires de communautés autochtones du Guatemala, du Honduras et du Nicaragua, et des migrants en transit, en particulier des femmes victimes de mauvais traitements. Il se déclare particulièrement préoccupé par la vulnérabilité de ces groupes aux enlèvements, à la torture et aux assassinats et juge aussi très préoccupant que la crainte de réactions discriminatoires et xénophobes dissuade ces personnes de solliciter l’aide et la protection dont elles ont besoin en temps opportun (art. 5 e) i)).

Compte tenu de la Recommandation générale n o  30 (2004) concernant la discrimination à l ’ égard des non-ressortissants, le Comité recommande de nouveau à l ’ État partie d ’ assurer la mise en œuvre effective des programmes et des mesures qu ’ il a adoptés pour la protection des migrants et de leurs droits. Il invite l ’ État partie à faire figurer dans son prochain rapport périodique des informations concernant l ’ amélioration de la situation des travailleurs migrants sur son territoire.

21)Compte tenu de l’indivisibilité de tous les droits de l’homme, le Comité encourage l’État partie à étudier la possibilité d’adhérer au Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.

22)À la lumière de sa Recommandation générale no 33 (2009) sur le suivi de la Conférence d’examen de Durban, le Comité recommande à l’État partie de tenir compte, au moment d’incorporer la Convention dans son ordre juridique interne, de la Déclaration et du Programme d’action de Durban, adoptés en septembre 2001 par la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, ainsi que du Document final de la Conférence d’examen de Durban, tenue à Genève en avril 2009. Il le prie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des informations précises sur les plans d’action et les autres mesures adoptées pour appliquer au plan national la Déclaration et le Programme d’action.

23)Le Comité constate avec satisfaction que l’État partie met ses rapports à la disposition du public en général dès leur soumission et lui recommande de faire de même pour les observations finales du Comité, en les diffusant dans les langues officielles et, le cas échéant, dans les autres langues couramment utilisées.

24)Conformément aux paragraphes 1 de l’article 9 de la Convention et de l’article 65 de son règlement intérieur modifié, le Comité prie l’État partie de lui faire parvenir, dans l’année qui suit l’adoption des présentes observations finales, des informations sur la suite donnée aux recommandations formulées aux paragraphes 10 et 17 ci-dessus.

25)Le Comité souhaite également appeler l’attention de l’État partie sur l’importance particulière des recommandations qui figurent aux paragraphes 14, 15 et 18, et lui demande de faire figurer dans son prochain rapport périodique des informations détaillées sur les mesures concrètes qu’il aura prises pour leur donner effet.

26)Le Comité recommande à l’État partie de lui soumettre ses dix-huitième à vingt et unième rapports périodiques au plus tard le 22 mars 2016 et d’établir ceux-ci en suivant les directives concernant l’élaboration des documents propres au Comité, qu’il a adoptées à sa soixante et onzième session (CERD/C/2007/1); le rapport devra traiter de tous les points soulevés dans les présentes observations finales. Le Comité invite également l’État partie à actualiser son document de base commun (HRI/CORE/MEX/2005). Il l’engage en outre à respecter la limite de 40 pages fixée pour les rapports soumis au titre d’un instrument particulier, et la limite de 60 à 80 pages fixée pour le document de base commun (voir les Directives harmonisées pour l’établissement de rapports, HRI/GEN.2/Rev.6, par. 19).

34. Portugal

1)Le Comité a examiné les douzième à quatorzième rapports périodiques du Portugal, présentés en un seul document (CERD/C/PRT/12-14), à ses 2137e et 2138e séances (CERD/C/SR.2137 et CERD/C/SR.2138), tenues les 20 et 21 février 2012. À sa 2155e séance (CERD/C/SR.2155), le 2 mars 2012, il a adopté les observations finales suivantes.

A. Introduction

2)Le Comité salue la qualité des douzième à quatorzième rapports périodiques de l’État partie, soumis en un seul document. Il se félicite de la présence de la délégation et remercie celle-ci pour les informations actualisées qu’elle lui a apportées oralement en complément du rapport, en tenant compte de la liste de thèmes établie par le rapporteur de pays.

3)Le Comité se félicite également du dialogue franc et constructif qu’il a eu ensuite avec l’État partie ainsi que des réponses très complètes fournies par la délégation aux questions et observations formulées par les membres du Comité.

B. Aspects positifs

4)Le Comité salue un certain nombre de faits nouveaux positifs et d’activités entreprises par l’État partie afin de lutter contre la discrimination raciale et de promouvoir la tolérance et la diversité, notamment:

a)La révision de l’article 246 du Code pénal, qui dispose que quiconque condamné pour discrimination (art. 240) peut être déchu temporairement de son droit de voter et/ou d’être élu;

b)Les modifications apportées à la loi sur la nationalité portugaise par la loi organique no 2/2006 du 17 avril 2006, qui autorisent les immigrés de deuxième ou de troisième génération à acquérir la nationalité portugaise dans certaines conditions et ouvrent la voie à un régime d’obtention de la nationalité lié au droit du sol;

c)L’adoption de la loi no 27/2008 du 30 juin 2008 sur l’asile, en vertu de laquelle l’appel formé pendant l’examen de la recevabilité d’une demande d’asile a un effet suspensif, comme l’avait recommandé le Comité en 2004 (CERD/C/65/CO/6, par. 15).

5)Le Comité se félicite de l’adoption des plans et stratégies ci-après:

a)Les plans nationaux d’action pour l’intégration des immigrés, mis en œuvre depuis 2007;

b)Le deuxième plan national de lutte contre la traite des personnes (2012-2013);

c)La stratégie nationale en faveur de l’inclusion des communautés roms, lancée en décembre 2011;

d)La création d’un organe interministériel chargé de réduire l’arriéré des rapports destinés aux organes conventionnels.

6)Le Comité se félicite de la création du Haut-Commissariat pour l’immigration et le dialogue interculturel (ACIDI) par le décret-loi no 167/2007 du 3 mai 2007. En ce qui concerne les programmes de l’ACIDI, le Comité salue en particulier le projet pilote qui a permis de nommer 28 médiateurs interculturels dans 25 services publics afin de renforcer le dialogue interculturel et de lutter contre les stéréotypes et les préjugés raciaux. Le Comité prend également note des travaux du Haut-Commissariat visant à soutenir et favoriser le dialogue interculturel.

7)Le Comité prend note avec intérêt de la mise en place en 2007 du Bureau d’aide aux communautés roms et des initiatives liées à ce Bureau.

8)Le Comité salue en particulier les politiques, lois et mesures novatrices de l’État partie concernant l’intégration des immigrés, comme l’a confirmé le Rapport mondial sur le développement humain 2009 des Nations Unies et l’Index des politiques d’intégration des migrants (MIPEX).

9)Le Comité se félicite de la création du service national d’information téléphonique de l’ACIDI, «SOS Imigrante», qui fournit des informations dans les langues les plus fréquemment parlées par les immigrés au Portugal, et du service téléphonique de traduction disponible gratuitement dans 60 langues différentes.

C. Sujets de préoccupation et recommandations

10)Tout en notant que la loi portugaise sur la protection des données personnelles (art. 7/1 de la loi no 67/98 du 26 octobre 1998) interdit expressément le traitement de données à caractère personnel portant sur l’origine raciale ou ethnique, le Comité regrette l’absence de données statistiques ventilées sur la composition ethnique de la population, tant pour les ressortissants que les non-ressortissants. Le Comité note que, bien que l’État partie affirme, au paragraphe 2 de son rapport périodique, qu’il n’y a pas de minorités ethniques reconnues comme telles, et que les immigrés vivant au Portugal ne sont pas considérés comme des minorités ethniques mais plutôt comme des étrangers, l’État partie ne conteste pas l’existence de groupes ethniques et raciaux.

Le Comité rappelle sa Recommandation générale n o  8 (1990) concernant l ’ interprétation et l ’ application des paragraphes 1 et 4 de l ’ article premier de la Convention, selon laquelle l ’ identification d ’ un individu comme appartenant à un groupe racial ou ethnique particulier doit être fondée sur la manière dont s ’ identifie lui ‑même l ’ individu concerné.

Le Comité rappelle que le but de la collecte de données ventilées est de permettre aux États parties d ’ évaluer les résultats obtenus et les obstacles rencontrés dans la lutte contre la discrimination raciale dont sont victimes les ressortissants et les non- ressortissants sur son territoire. Conformément à sa Recommandation générale n o 4 (1973) concernant les rapports des États parties et au paragraphe 8 des directives pour l ’ établissement des rapports (CERD/C/2007/1), il invite l ’ État partie à collecter des données statistiques sur la composition démographique de sa population en se fondant sur une auto-identification ethnique anonyme et volontaire des personnes concernées.

11)Le Comité prend note de la référence faite par l’État partie dans sa législation aux principes de la Déclaration universelle des droits de l’homme, mais il s’inquiète du manque de clarté concernant les liens entre la Convention et le droit interne de l’État partie.

Le Comité recommande à l ’ État partie de trouver des moyens légaux d’éclaircir cette question et d ’ accorder la primauté aux instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme, notamment à la Convention internationale sur l ’ élimination de toutes les formes de discrimination raciale.

12)Le Comité prend note des informations fournies par l’État partie concernant le petit nombre de plaintes enregistrées relatives à l’article 240 du Code pénal traitant de la discrimination raciale. Il est particulièrement préoccupé par les informations indiquant que cette situation peut être due, entre autres choses, à un manque de confiance dans le système judiciaire en raison de la longueur et de la complexité des procédures judiciaires et du manque d’information sur les voies de recours (art. 2 et 6).

Gardant à l ’ esprit sa Recommandation générale n o 31 (2005) concernant la discrimination raciale dans l ’ administration et le fonctionnement du système de justice pénale , le Comité recommande à l ’ État partie de:

a) Diffuser la législation existante sur la discrimination raciale au moyen de supports accessibles et, lorsque cela est approprié, en plusieurs langues, et informer le public, en particulier les groupes vulnérables, de tous les recours juridiques disponibles;

b) Prendre des mesures pour accroître sensiblement la confiance de la population dans le système judiciaire, raccourcir les procédures judiciaires lorsque cela est possible et permettre aux victimes d ’ avoir accès à des recours juridiques.

Le Comité invite l ’ État partie à inclure dans son prochain rapport périodique des informations actualisées sur le nombre de plaintes, de poursuites, de condamnations et de peines relatives à des actes de discrimination raciale et sur les recours exercés par les victimes.

13)Le Comité prend note de l’approche globale adoptée par l’État partie pour combattre la discrimination raciale. Bien qu’elle présente de nombreux aspects positifs, le Comité s’inquiète de ce que le caractère général de cette approche de la lutte contre la discrimination raciale ne permette pas d’accorder suffisamment d’attention aux préoccupations des groupes de citoyens ou d’immigrés et d’étrangers qui peuvent être victimes de discrimination directe ou indirecte (art. 2).

Le Comité réitère sa recommandation à l ’ État partie de prendre des mesures spéciales appropriées en faveur des groupes vulnérables, notamment les Tsiganes ( Ciganos ) , les Roms et les personnes d ’ ascendance africaine, conformément à sa Recommandation générale n o  32 (2009) sur la signification et la portée des mesures spéciales dans la Convention internationale sur l ’ élimination de toutes les formes de discrimination raciale , lorsque des actes de discrimination directe ou indirecte touchent de manière disproportionnée des groupes vulnérables, et conformément à s es Recommandation s générale s n o  27 (2000) sur la discrimination à l ’ égard des Roms et n o  34 (2011) sur la discrimination raciale à l ’ égard des personnes d ’ ascendance africaine .

14)En dépit des mesures novatrices prises par l’État partie pour promouvoir l’intégration, ainsi que pour prévenir et combattre la discrimination raciale à l’encontre des communautés moins favorisées, notamment du travail accompli par les médiateurs socioculturels, le Comité est préoccupé par le caractère généralisé des stéréotypes et des préjugés raciaux à l’égard des immigrés, des étrangers et de certains citoyens. Des rapports font état d’actes de discrimination à l’égard des Brésiliens, ainsi que d’autres groupes tels que les Chinois, les ressortissants d’Afrique subsaharienne, et en particulier les Ciganos et les Roms. Le Comité est également préoccupé par l’incidence de propos racistes et xénophobes émanant d’une minorité de partis politiques extrémistes, et par les manifestations de racisme et d’intolérance envers les minorités ethniques dans le cadre d’événements sportifs (art. 2 et 4).

Le Comité engage instamment l ’ État partie à prendre des mesures efficaces pour prévenir et poursuivre les manifestations de racisme, de xénophobie et d ’ intolérance. Il recommande à l ’ État partie de condamner les propos racistes et xénophobes tenus par des dirigeants politiques et de promouvoir la tolérance et la diversité, notamment dans le sport.

15)En dépit des activités de formation aux droits de l’homme organisées par l’État partie et des recommandations précédentes du Comité, ce dernier est préoccupé par les cas signalés de comportements discriminatoires, et les manifestations de stéréotypes et de préjugés racistes à l’égard des personnes d’origine étrangère et d’autres groupes vulnérables à la discrimination raciale de la part des responsables de l’application des lois (art. 2, 5 et 7).

Gardant à l ’ esprit la Recommandation générale n o  13 (1993) concernant la formation des responsables de l ’ application des lois à la protection des droits de l ’ homme , le Comité engage instamment l ’ État partie à veiller à ce que les activités de formation à l ’ intention des responsables de l ’ application des lois rendent ces derniers à même de respecter et protéger pleinement les droits fondamentaux de toutes les personnes sans discrimination fondée sur la race, la couleur ou l ’ origine ethnique ou nationale. Le Comité demande à l ’ État partie d ’ inclure dans son prochain rapport périodique des informations sur les poursuites engagées contre des responsables de l ’ application des lois ou des agents de police pour discrimination raciale.

16.Le Comité est conscient du fait que, selon les statistiques disponibles, la population étrangère est surreprésentée dans les prisons. Il exprime ses préoccupations concernant la discrimination dont pourraient faire l’objet les immigrés et les minorités ethniques dans le système judiciaire, notamment les cas signalés de condamnations plus sévères, de peines d’emprisonnement plus longues et d’un éventuel profilage ethnique (art. 2, 5 et 6).

Le Comité encourage l ’ État partie à évaluer la situation et à prendre des mesures efficaces pour lutter contre la discrimination raciale dans le système judiciaire en gardant à l ’ esprit sa Recommandation générale n o  31 (2005) concernant la discrimination raciale dans l ’ administration et le fonctionnement du système de justice pénale . Le Comité est d ’ avis qu ’ une analyse plus approfondie est nécessaire, ainsi que des mesures appropriées pour s ’ attaquer à ce problème et offrir des recours aux victimes.

17)Le Comité est préoccupé par l’efficacité limitée de la procédure de plainte pour discrimination raciale auprès de la Commission pour l’égalité et contre la discrimination raciale (organe qui s’occupe des affaires de discrimination raciale en vertu de la loi no 18/2004 qui a transposé la directive de l’Union européenne concernant la discrimination raciale). Peu de décisions ont été prises depuis sa création, un certain nombre d’affaires restent en suspens, et, comme l’a indiqué l’État partie, l’examen promis de sa procédure n’a toujours pas été entrepris (art. 6).

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ accélérer la révision de la loi n o 18/2004 de façon à garantir des recours aux victimes de discrimination raciale. Il encourage l ’ État partie à fournir des ressources supplémentaires à la Commission pour l ’ égalité et contre la discrimination raciale afin de réduire l ’ arriéré des affaires et de faire mieux connaître au public les recours juridiques et administratifs disponibles. Il invite l ’ État partie à inclure dans son prochain rapport périodique des informations actualisées sur les mesures prises en vue d ’ accroître l ’ efficacité de cet organe.

18)Le Comité note avec préoccupation que les femmes immigrées et les femmes appartenant à des groupes minoritaires sont victimes de discrimination multiple. Par exemple, selon les statistiques de 2008 du Ministère du travail, le salaire moyen des femmes immigrées est inférieur à celui des citoyens portugais et des hommes immigrés (art. 5).

Le Comité attire l ’ attention de l ’ État partie sur sa Recommandation générale n o 25 (2000) sur la dimension sexiste de la discrimination raciale et l ’ engage instamment à évaluer et contrôler la discrimination raciale à l ’ égard des femmes, en particulier des femmes immigrées et des femmes appartenant à des groupes minoritaires. L ’ État partie a l ’ obligation de garantir à chacun le droit à l ’ égalité dans la jouissance des droits de l ’ homme sans discrimination fondée sur le sexe, la race, la couleur ou l ’ origine nationale ou ethnique.

19)Le Comité prend note des efforts visant à combattre la discrimination à l’égard des peuples ciganos et roms, notamment le lancement en décembre 2011 de la Stratégie nationale pour l’inclusion des communautés roms, conformément aux exigences de l’Union européenne, et les campagnes de sensibilisation du public concernant la non-discrimination à l’égard des communautés roms. Toutefois, il se dit profondément préoccupé par le fait que, comme l’a confirmé l’État partie, les Ciganos et les Roms sont toujours les personnes les plus victimes de discrimination et les plus vulnérables au Portugal. Outre le logement, des problèmes se posent toujours en ce qui concerne leurs droits à l’éducation, à la santé, à l’emploi, à l’accès aux services publics ou à participer à la vie publique (art. 2, 5 et 7).

Le Comité prie instamment l ’ État partie de promouvoir les droits économiques, sociaux et culturels des Ciganos et des Roms, tout en respectant leur culture, en conformité avec le principe de l ’ égalité, et en veillant à ce que toutes les actions et politiques qui les concernent soient conçues, mises en œuvre, suivies et évaluées avec la pleine participation des Ciganos, des Roms et de leurs organisations, en gardant à l ’ esprit la Recommandation générale n o  27 (2000) du Comité sur la discrimination à l ’ égard des Roms.

Le Comité demande à l ’ État partie de fournir des informations sur la mise en œuvre et les effets de la Stratégie nationale pour l ’ inclusion des communautés roms. Dans le cadre de la mise en œuvre de cette S tratégie, l ’ État partie devrait veiller à ce que des mesures concrètes soient prises pour améliorer les conditions de vie des communautés roms en améliorant leur accès à un logement décent, à l ’ éducation, aux services de santé, à l ’ emploi et aux services publics.

Le Comité souhaite également recevoir des informations sur l ’efficacité des campagnes de sensibilisation concernant la non-discrimination à l ’ égard des communautés roms ainsi que les efforts consentis par l ’ État partie pour intégrer les personnes appartenant à ces communautés dans la police ou d ’ autres services publics. Toutes les actions entreprises doivent tenir compte en particulier des droits des femmes ciganos et roms et avoir pour objectif l ’ amélioration et la réalisation de ces droits.

20)Tout en prenant acte des problèmes que pose la crise économique dans l’État partie, le Comité se déclare préoccupé par les effets négatifs que peuvent avoir les compressions budgétaires sur les programmes de sensibilisation et sur les institutions chargées de promouvoir et de protéger les droits de l’homme ainsi que de lutter contre la discrimination raciale, et sur l’appui aux organisations non gouvernementales (ONG) concernées (art. 2 et 7).

En application de sa Recommandation générale n o 33 (2009) concernant le suivi de la Conférence d ’ examen de Durban, le Comité attire l ’ attention de l ’ État partie sur le fait que les mesures qu ’ il prend pour remédier à la crise financière et économique actuelle risquent d’ accroître la pauvreté et de provoquer une montée du racisme, de la discrimination raciale, de la xénophobie et de l ’ intolérance qui y est associée à l ’ encontre des étrangers, des immigrés , des personnes appartenant à des minorités et d ’ autres groupes particulièrement vulnérables. Le Comité prie instamment l ’ État partie de poursuivre et d’intensifier ses efforts pour lutter contre la discrimination raciale et promouvoir la tolérance et la diversité, notamment en apportant un appui aux ONG actives dans ce domaine.

21)Le Comité note que le Médiateur fait office d’institution nationale des droits de l’homme et que la Commission nationale des droits de l’homme mise en place par l’État partie en mars 2010, suite à l’Examen périodique universel réalisé par le Conseil des droits de l’homme, est chargée de coordonner l’établissement en temps voulu des rapports destinés aux organes conventionnels. Le Comité note également que le Médiateur s’occupe surtout de plaintes et n’exerce pas toutes les responsabilités qui incombent à une institution nationale des droits de l’homme (art. 2).

Le Comité encourage l ’ État partie à renommer la Commission nationale des droits de l ’ homme chargée de résorber l ’ arriéré des rapports destinés aux organes conventionnels de façon à éviter toute confusion avec l ’ institution nationale des droits de l ’ homme. Il recommande que les fonctions du Médiateur en tant qu ’ institution nationale des droits de l ’ homme d otée du statut «A» selon les critères des Principes de Paris (annexe à la résolution 48/134 de l ’ Assemblée générale) incluent plus clairement un large éventail d’activités en plus de ses procédures de plainte, en particulier en ce qui concerne la discrimination raciale.

22)Le Comité regrette que des ONG n’aient pas participé à la séance consacrée à l’examen du rapport tout en prenant note de l’engagement pris oralement par l’État partie de les inclure et les associer à l’élaboration en cours du prochain rapport de l’État partie (art. 2).

Le Comité invite l ’ État partie à continuer à encourager la participation des ONG à l ’ établissement du prochain rapport périodique et à faciliter leur participation à la séance d ’ examen de son prochain rapport.

23)Compte tenu du caractère indivisible de tous les droits de l’homme, le Comité encourage l’État partie à envisager de ratifier les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme qui ne l’ont pas encore été, en particulier ceux dont les dispositions se rapportent directement à la discrimination raciale, tels que la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille (1990).

24)À la lumière de sa Recommandation générale no 33 (2009) sur le suivi de la Conférence d’examen de Durban, le Comité recommande à l’État partie de donner effet à la Déclaration et au Programme d’action de Durban, adoptés en septembre 2001 par la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, en tenant compte du Document final de la Conférence d’examen de Durban, tenue à Genève en avril 2009, lorsqu’il incorpore la Convention dans son ordre juridique interne. Il le prie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des informations précises sur les plans d’action et les autres mesures adoptés pour mettre en œuvre la Déclaration et le Programme d’action de Durban au niveau national.

25)Tout en gardant à l’esprit l’approche globale adoptée par l’État partie aux fins de l’établissement de ses rapports, le Comité souhaiterait voir figurer dans son prochain rapport périodique des informations sur les mesures visant à mettre en œuvre la Convention à Madère et aux Açores.

26)Le Comité recommande à l’État partie de ratifier les amendements au paragraphe 6 de l’article 8 de la Convention, adoptés le 15 janvier 1992 à la quatorzième Réunion des États parties à la Convention et approuvés par l’Assemblée générale dans sa résolution 47/111 du 16 décembre 1992. À cet égard, le Comité renvoie aux résolutions 61/148, 63/243 et 65/200, dans lesquelles l’Assemblée générale a demandé instamment aux États parties d’accélérer leurs procédures internes de ratification des modifications relatives au financement du Comité et d’informer par écrit le Secrétaire général, dans les meilleurs délais, de leur acceptation de ces modifications.

27)Le Comité recommande à l’État partie de rendre ses rapports aisément accessibles au public dès leur soumission, et de diffuser également les observations finales du Comité s’y rapportant dans la langue officielle et les autres langues communément utilisées, selon qu’il convient.

28)Conformément au paragraphe 1 de l’article 9 de la Convention et à l’article 65 de son règlement intérieur modifié, le Comité prie l’État partie de lui fournir, dans un délai d’un an à compter de l’adoption des présentes observations finales, des informations sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations figurant aux paragraphes 18, 19 et 20 ci‑dessus.

29)Le Comité attire également l’attention de l’État partie sur l’importance particulière que revêtent les recommandations 12, 14 et 15 et le prie de donner dans son prochain rapport périodique des renseignements détaillés sur les mesures concrètes qu’il aura prises pour les mettre en œuvre.

30)Le Comité recommande à l’État partie de présenter ses quinzième à dix-septième rapports périodiques en un seul document, d’ici au 23 septembre 2015, en tenant compte des directives pour l’établissement du document se rapportant spécifiquement à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, adoptées par le Comité à sa soixante et onzième session (CERD/C/2007/1), et d’y traiter tous les points soulevés dans les présentes observations finales. Le Comité l’engage aussi à respecter la limite de 40 pages fixée pour les rapports présentés au titre d’un instrument particulier et la limite de 60 à 80 pages fixée pour le document de base commun (voir les directives harmonisées figurant au paragraphe 19, chap. I, du document HRI/GEN.2/Rev.6).

35. Qatar

1)Le Comité a examiné les treizième à seizième rapports périodiques du Qatar soumis en un seul document (CERD/C/QAT/13-16), à ses 2151e et 2152e séances (CERD/C/SR.2151 et SR.2152), tenues les 29 février et 1er mars 2012. À sa 2163e séance (CERD/C/SR.2163), tenue le 8 mars 2012, il a adopté les observations finales ci-après.

A. Introduction

2)Le Comité accueille avec satisfaction les treizième à seizième rapports périodiques soumis en un seul document par l’État partie. Il est toutefois à noter que ce rapport n’est pas pleinement conforme aux directives du Comité relatives à l’établissement des rapports. Le Comité a souligné l’importance de soumettre les rapports périodiques dans les délais prescrits afin de garantir une analyse continue de la mise en œuvre de la Convention dans l’État partie.

3)Le Comité se félicite du dialogue franc et constructif qu’il a eu avec la délégation de haut rang de l’État partie et se dit satisfait de la présentation orale faite par celle-ci pendant l’examen du rapport ainsi que des réponses qu’elle a fournies. Il s’est également félicité de la présence d’une délégation de la Commission nationale des droits de l’homme et de sa contribution au dialogue avec l’État partie.

B. Aspects positifs

4)Le Comité note avec satisfaction les efforts permanents de l’État partie pour améliorer son cadre juridique en vue de garantir une meilleure protection des droits de l’homme des citoyens et des résidents étrangers au Qatar, notamment l’adoption des textes suivants:

a)La Constitution permanente de l’État du Qatar en 2004;

b)La loi no 12 de 2008 portant création de la Cour suprême constitutionnelle;

c)Le Code du travail no 14 de 2004.

5)Le Comité se félicite de l’adhésion récente du Qatar à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (29 avril 2009) et à la Convention relative aux droits des personnes handicapées (13 mai 2008).

6)Le Comité note avec satisfaction que, comme il a été dit dans la présentation orale de la délégation, la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale a force de loi dans l’État partie, ce qui permet de l’invoquer directement devant les tribunaux du pays, au même titre que les lois nationales.

7)Le Comité se félicite également des efforts faits par l’État partie pour renforcer la protection des droits de l’homme et la mise en œuvre de la Convention, notamment en créant les organisations ci-après:

a)La Fondation qatarienne pour la lutte contre la traite des personnes;

b)La Fondation qatarienne pour la protection des femmes et des enfants;

c)Le Centre international de Doha pour le dialogue interconfessionnel;

d)Le Centre de Doha pour la liberté de la presse.

8)Le Comité note avec satisfaction la création de la Commission nationale des droits de l’homme en 2002, conformément aux Principes de Paris, et attache une grande valeur à son travail. Il engage vivement l’État partie à accorder toute l’attention voulue aux recommandations formulées par celle-ci.

C. Sujets de préoccupation et recommandations

9)Le Comité regrette l’absence de données statistiques détaillées et ventilées sur la composition ethnique et raciale de la population, y compris les nationaux et les travailleurs migrants dans le pays.

Conformément à sa R ecommandation générale n o 4 (1973) sur la composition démographique de la population et aux paragraphes 10 et  12 de ses directives révisées pour l ’ établissement de rapports (CERD/C/2007/1), le Comité recommande à l ’ État partie de fournir, dans son prochain rapport périodique, des informations ventilées sur la composition raciale et ethnique de sa population, y compris les non-ressortissants, ainsi que des données statistiques sur la situation économique et sociale des différents groupes, afin de l ’ aider à évaluer efficacement les progrès réalisés par l ’ État partie dans la mise en œuvre de la Convention.

10)Le Comité regrette que l’État partie n’ait pas encore adopté de définition de la discrimination raciale conforme à l’article premier de la Convention (art. 1er).

Rappela nt sa R ecommandation générale n o 14 (1993) concernant l ’ article premier, le Comité recommande à l ’ État partie d ’ incorporer dans la législation nationale une définition de la discrimination raciale qui soit conforme à l ’ article premier de la Convention.

11)Le Comité note avec intérêt les informations fournies par l’État partie sur les divers articles traitant de la discorde raciale et religieuse dans la société qatarienne, notamment sur l’article 47 de la loi de 1979 relative à l’édition et aux publications, l’alinéa 11 de l’article 2 de la décision prise en 1992 par le Ministère de l’information et de la culture interdisant la diffusion d’idées fondées sur la haine raciale et l’article 256 du Code pénal. Le Comité s’inquiète toutefois de ce que les dispositions actuelles ne sont pas conformes à l’article 4 de la Convention (art. 4).

Le Comité recommande à l ’ État partie de réviser son Code pénal afin d ’ y introduire et de mettre en œuvre une disposition spécifique pleinement conforme à l ’article  4 de la Convention qui interdise la diffusion d ’ idées fondées sur la supériorité ou la haine raciale et l ’ incitation à la haine et à la discrimination raciales , de même que les organisations qui incitent à la discrimination raciale et qui l ’ encouragent. À cet égard, le Comité appelle l ’ attention de l ’ État partie sur ses R ecommandations générales n o 7 (1985) sur l ’ adoption d ’ une législation visant à éliminer la discrimination raciale et n o 15 (1993) concernant l ’article  4, et lui rappelle qu ’ il a l ’ obligation de veiller à l ’ application effective de cette législation .

12)Le Comité note que l’article 9 du Code du travail dispose que tous les contrats et autres documents et instruments visés par ce Code doivent être en arabe. Il est préoccupé par le fait que la majorité des travailleurs étrangers peuvent avoir des difficultés à comprendre ces documents, ce qui les empêche alors de prendre une décision éclairée concernant leur emploi (art. 5).

Le Comité demande des précisions sur l ’article  9 du Code du travail et recommande à l ’ État partie de réviser cette disposition afin de garantir que les contrats et autres documents concernant l ’ emploi prévus par le Code soient fournis aux travailleurs migrants dans leur langue.

13)Le Comité note avec préoccupation que les domestiques ne sont pas protégés par le Code du travail. Il comprend que le travail de domestique est régi par des accords bilatéraux conclus avec les pays d’origine des travailleurs. Il constate avec inquiétude que ces accords bilatéraux pourraient aboutir à une discrimination interdite par l’article 5 de la Convention, y compris au non-respect du droit à un salaire égal pour un travail égal (art. 5).

Le Comité prie l ’ État partie de lui fournir, dans son prochain rapport périodique, des informations supplémentaires sur le contenu des accords bilatéraux signés avec les pays d ’ origine des travailleurs migrants. Il lui recommande en outre de ratifier la Convention n o 189 (2011) de l ’ Organisation internationale du Travail (OIT) concernant le travail décent pour les travailleuses et travailleurs domestiques.

14)Le Comité prend également note du projet de loi sur les domestiques qui devrait être adopté par le Conseil des ministres en juin 2012 mais regrette qu’aucune information n’ait été fournie concernant la teneur de ce projet (art. 5).

Le Comité demande à l ’ État partie de lu i donner des informations sur la teneur du projet de loi et son processus d ’ adoption. À cet égard, il lui rappell e sa Recommandation générale 25 (2000) concernant la dimension sexiste de la discrimination raciale et le prie instamment de prendre des mesures efficaces pour lutter contre la discrimination multiple dont sont victimes les domestiques migrantes, y compris sur leur lieu de travail.

15)Le Comité salue les efforts réalisés par l’État partie pour améliorer le programme de parrainage afin de mieux protéger les travailleurs migrants. Il note toutefois avec préoccupation qu’en dépit de l’existence de dispositions légales interdisant des pratiques comme la confiscation du passeport ou la retenue du salaire par le parrain, la nature même du programme de parrainage favorise la dépendance des travailleurs migrants à l’égard de leurs parrains, les rendant ainsi vulnérables à diverses formes d’exploitation et d’abus (art. 5 et 6).

Le Comité recommande à l ’ État partie de garantir la pleine application des dispositions légales qui protègent les droits et libertés des travailleurs migrants dans le cadre du programme de parrainage et d ’ offrir des recours juridiques utiles à ceux dont les droits ne sont pas respectés.

16)Le Comité note avec préoccupation la disposition discriminatoire de la loi sur la nationalité empêchant les Qatariennes mariées à des non-ressortissants de transmettre leur nationalité à leurs enfants, au risque de rendre ceux-ci apatrides (art. 5).

Rappela nt sa Recommandation générale n o  30 (2004) concernant la discrimination à l’égard des non-ressortissants et, plus spécialement, le paragraphe 16 de celle-ci consacré à la réduction du nombre de cas d ’ apatridie, en particulier chez les enfants, le Comité recommande à l ’ État partie de réviser sa loi sur la nationalité pour permettre aux Qatariennes de transmettre leur nationalité à leurs enfants sans discrimination.

17)Le Comité se félicite de l’esprit humanitaire dont a fait preuve le Gouvernement qatarien en aidant les réfugiés qui fuyaient le Libéria lors de la crise qui secouait leur pays, ainsi que de son action visant à aider les populations somaliennes déplacées dans leur propre pays et d’autres populations qui avaient besoin d’assistance. Le Comité note toutefois avec préoccupation que le Qatar n’a pas ratifié la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés.

À ce t égard, le Comité rappelle sa Recommandation générale n o 22 (1996) concernant l ’ article 5 et les réfugiés et personnes déplacées, sollicite un complément d ’ information sur le cadre juridique de protection des réfugiés et des demandeurs d ’ asile, et recommande au Qatar de ratifier la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés et les P rotocoles de 1967 s ’ y rapportant.

18)Le Comité prend note avec préoccupation des restrictions imposées aux travailleurs migrants et aux résidents étrangers en matière d’acquisition et de détention de biens au Qatar (art. 5).

Le Comité souhaiterait recevoir un complément d ’ information sur la protection du droit à la propriété des travailleurs migrants. À cet égard, il rappelle sa Recommandation générale n o  30 ( 2004) et rappelle aussi qu’en vertu de l ’article  5 de la Convention , l ’ État partie a l’obligation d ’ interdire et d ’ éliminer la discrimination raciale dans l ’ exercice des droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels.

19)S’il relève avec satisfaction les efforts consentis par l’État partie pour sensibiliser toutes les parties prenantes aux droits de l’homme, y compris ceux protégés par la Convention, le Comité note avec regret le peu d’informations communiquées sur les plaintes de discrimination raciale reçues par les divers organes qui s’occupent des droits de l’homme. Il souligne que l’absence de plaintes peut être le signe d’un manque de législation spécifique, d’une méconnaissance des recours existants, de la peur d’une censure sociale ou de représailles ou encore de la réticence des autorités compétentes à engager des poursuites en raison de la vulnérabilité des victimes (art. 6).

Rappelant sa Recommandation générale n o 31 (2005) sur la prévention de la discrimination raciale dans l ’ administration et le fonctionnement du système de justice pénale, le Comité recommande à l ’ État partie de poursuivre son action de sensibilisation à la législation sur la discrimination raciale, de veiller à ce que les membres de groupes vulnérables, en particulier les non-ressortissants, y compris les travailleurs migrants et les domestiques, soient informés de toutes les voies de recours disponibles, de simplifier ces recours et d ’ en faciliter l ’ accès. Le Comité demande également à l ’ État partie de faire figurer, dans son prochain rapport périodique, des données complètes sur les plaintes déposées et les suites données à celles-ci.

20)Le Comité s’inquiète de ce que les citoyens naturalisés ne jouissent pas pleinement de certains droits politiques dans les mêmes conditions que les Qatariens de naissance. Il note également que si ces restrictions ne sont pas appliquées dans la réalité, le simple fait qu’elles existent menace le plein exercice, par tous les citoyens, de leurs droits politiques (art. 5).

Le Comité recommande à l ’ État partie de revoir sa législation relative aux droits politiques, comme le droit de vote et le droit d ’ éligibilité, pour garantir leur plein exercice par tous les citoyens, sans discrimination fondée sur la race, la couleur, l ’ ascendance, l ’ origine nationale ou ethnique, ni d ’ autres critères.

21)Le Comité prend note des mesures et des initiatives prises par l’État partie pour garantir la formation et l’information en matière de droits de l’homme, y compris la constitution d’une association de jeunes pour les droits de l’homme. Il s’inquiète toutefois de la persistance de stéréotypes racistes au Qatar (art. 7).

Le Comité recommande à l ’ État partie d’ accentue r ses efforts de formation aux droits de l ’ homme, en particulier à la lutte contre la discrimination raciale, de même que ses efforts de sensibilisation à la tolérance, à l ’ entente interraciale ou interethnique et aux relations interculturelles auprès des agents chargés de l ’ application des lois, en particulier des personnels de police et de gendarmerie, de la justice, de l ’ administration pénitentiaire, des avocats, ainsi que des enseignants. Il lui recommande également de poursuivre ses initiatives de sensibilisation et d ’ éducation à l ’ importance de la diversité multiculturelle, à l ’ entente et à la tolérance, notamment à l ’égard de certain s group es vulnérables.

22)Ayant à l’esprit le caractère indivisible de tous les droits de l’homme, le Comité encourage l’État partie à envisager de ratifier les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme auxquels il n’est pas encore partie, en particulier ceux dont les dispositions ont un effet direct sur la question de la discrimination raciale, tels que la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille (1990).

23)À la lumière de sa Recommandation générale no 33 (2009) sur le suivi de la Conférence d’examen de Durban, le Comité recommande à l’État partie de donner effet à la Déclaration et au Programme d’action de Durban adoptés en septembre 2001 par la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, en tenant compte du Document final de la Conférence d’examen de Durban, qui s’est tenue à Genève en avril 2009, lorsqu’il applique la Convention dans son ordre juridique interne. Le Comité le prie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des informations spécifiques sur les plans d’action et autres mesures qu’il aura adoptés pour appliquer la Déclaration et le Programme d’action de Durban au niveau national.

24.Le Comité recommande à l’État partie de continuer à tenir des consultations et d’élargir le dialogue qu’il a instauré avec les organisations de défense des droits de l’homme de la société civile, en particulier celles qui luttent contre la discrimination raciale, dans le cadre de l’élaboration de son prochain rapport périodique.

25)Le Comité recommande à l’État partie de ratifier les amendements concernant le paragraphe 6 de l’article 8 de la Convention, adoptés le 15 janvier 1992 à la quatorzième Réunion des États parties à la Convention et approuvés par l’Assemblée générale dans sa résolution 47/111. Il se réfère à cet égard aux résolutions 61/148 et 63/243 dans lesquelles l’Assemblée générale invite instamment les États parties à accélérer leurs procédures internes de ratification de l’amendement à la Convention concernant le financement du Comité et de faire savoir rapidement au Secrétaire général par écrit qu’ils acceptent cet amendement.

26)Le Comité recommande à l’État partie de mettre ses rapports à la disposition du public dès leur soumission et de diffuser ses observations finales sur ces rapports dans les langues officielles et les autres langues communément utilisées, selon qu’il convient.

27)Le Comité, notant que l’État partie n’a pas soumis son document de base, l’engage à en établir une version actualisée conformément aux directives harmonisées pour l’établissement des rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, en particulier celles qui concernent le document de base commun, adoptées à la cinquième Réunion intercomités des organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, tenue en juin 2006 (HRI/GEN/2/Rev.6, chap. I).

28)Conformément au paragraphe 1 de l’article 9 de la Convention et à l’article 65 de son règlement intérieur modifié, le Comité prie l’État partie de l’informer dans l’année suivant l’adoption des présentes observations finales de la suite qu’il aura donnée aux recommandations figurant aux paragraphes 14, 17 et 18 ci-dessus.

29)Le Comité souhaite également attirer l’attention de l’État partie sur l’importance particulière que revêtent les recommandations figurant aux paragraphes 9, 13, 19 et 23 ci‑dessus et le prie de donner dans son prochain rapport périodique des renseignements détaillés sur les mesures concrètes qu’il aura prises pour y donner suite.

30)Le Comité recommande à l’État partie de soumettre ses dix-septième à vingtième rapports périodiques en un seul document le 21 août 2015 au plus tard, en tenant compte des directives pour l’établissement du document se rapportant spécifiquement à la Convention adoptées par le Comité à sa soixante et onzième session (CERD/C/2007/1), et en veillant à traiter tous les points soulevés dans les présentes observations finales. Le Comité l’engage également à respecter la limite de 40 pages fixée pour les rapports spécifiques à un instrument particulier et la limite de 60 à 80 pages indiquée pour le document de base (voir les directives harmonisées présentées au paragraphe 19 du chapitre I du document HRI/GEN.2/Rev.6).

36. Turkménistan

1)Le Comité a examiné les sixième et septième rapports périodiques du Turkménistan soumis en un seul document (CERD/C/TKM/6-7), à ses 2143e et 2144e séances (CERD/C/SR.2143 et CERD/C/SR.2144), tenues les 23 et 24 février 2012. À sa 2163e séance (CERD/C/SR.2163), tenue le 8 mars 2012, il a adopté les observations finales ci‑après.

A. Introduction

2)Le Comité se félicite de la présentation des sixième et septième rapports périodiques du Turkménistan en un seul document, conformément aux directives du Comité pour l’établissement de rapports (CERD/C/2007/1), et apprécie les informations détaillées que le rapport contient sur les réformes législatives et politiques menées.

3)Le Comité se félicite du dialogue ouvert avec la délégation de haut niveau qu’il remercie de son exposé oral et des réponses qu’elle a apportées lors de l’examen du rapport, dont il est ressorti qu’il fallait améliorer la mise en œuvre des garanties législatives et des politiques afin de parvenir à une réelle intégration économique et sociale des minorités ethniques et à une vraie élimination de toutes les formes de discrimination raciale.

B. Aspects positifs

4)Le Comité note avec intérêt que l’État partie s’est efforcé, pendant la période à l’examen, de renforcer le cadre juridique en vue d’améliorer la protection des droits de l’homme et de donner effet aux dispositions de la Convention et d’autres instruments internationaux auxquels le Turkménistan est partie, notamment en adoptant les textes suivants:

a)Une nouvelle Constitution, le 26 septembre 2008; et

b)Le Code de protection sociale (17 mars 2007), le Code du travail (18 avril 2009), le Code de procédure pénale (18 avril 2009), un nouveau Code pénal (10 mai 2010), la loi sur l’égalité en droits des femmes (garanties apportées par l’État en la matière) (14 décembre 2007), la loi relative à la traite (14 décembre 2007), la loi relative aux élections parlementaires (10 novembre 2008), la loi relative à l’enseignement (15 août 2009), la loi relative au barreau et à la fonction d’avocat (10 mai 2010), ainsi que la loi relative aux élections présidentielles et la loi relative à l’élection des membres des conseils populaires et des conseils locaux (25 septembre 2010).

5)Le Comité note avec satisfaction que, depuis l’examen du rapport initial et des deuxième à cinquième rapports périodiques présentés en un seul document, l’État partie a adhéré à plusieurs instruments internationaux ou en a ratifié, notamment:

a)La Convention relative aux droits des personnes handicapées (4 septembre 2008);

b)Le Protocole facultatif à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (18 avril 2009);

c)Le Protocole facultatif se rapportant à la Convention relative aux droits des personnes handicapées (25 septembre 2010);

d)La Convention de l’Organisation internationale du Travail no 182 (1999) concernant l’interdiction des pires formes de travail des enfants et l’action immédiate en vue de leur élimination (25 septembre 2010); et

e)La Convention de 1954 relative au statut des apatrides (7 décembre 2011).

6)Le Comité salue les efforts déployés par l’État partie pour modifier ses politiques, programmes et mesures administratives afin de garantir la protection des droits de l’homme et la mise en œuvre de la Convention, notamment:

a)La mise en place, par ordonnance présidentielle du 24 août 2007, d’une commission interdépartementale chargée de veiller au respect des obligations internationales du Turkménistan en matière de droits de l’homme;

b)Les mesures prises pour faciliter le retour de 7 309 personnes de souche turkmène dans leur pays d’origine, entre 2006 et 2011; et

c)L’octroi de la nationalité à plus de 13 000 réfugiés et de permis de séjour permanent à plus de 3 000 autres réfugiés.

7)Le Comité apprécie également la détermination exprimée par l’État partie à mettre en œuvre les recommandations du Comité et à rendre compte de cette mise en œuvre.

C. Sujets de préoccupation et recommandations

8)Tout en notant que l’article 19 de la Constitution établit l’égalité des droits des citoyens sans distinction aucune fondée sur la race, le sexe, l’appartenance ethnique ou la langue et qu’il s’agit d’une disposition contraignante pour les autorités publiques et les fonctionnaires, le Comité demeure préoccupé par le fait que la législation nationale ne comprend pas de définition de la discrimination raciale pleinement conforme à l’article premier de la Convention ou de norme générale interdisant la discrimination raciale, conformément à la Convention (art. 1er, par. 1, et 2, par. 1 d)).

Le Comité recommande à l ’ État partie de modifier sa législation pour y inclure une définition de la discrimination raciale pleinement conforme à l ’ article premier de la Convention ou d ’ adopter une interdiction générale de la discrimination raciale, conformément à la Convention, qui couvre tous les domaines de la vie sociale.

9)Le Comité regrette que le rapport périodique de l’État partie ne contienne pas de données ventilées sur la situation de chaque groupe minoritaire vivant au Turkménistan par rapport à la population totale du pays, et sur la situation de leurs membres en tant que citoyens, notamment en ce qui concerne les domaines de l’emploi, de l’éducation et des soins de santé (art. 2).

Attirant l’attention sur les paragraphes 10 à 12 de ses directives révisées pour l’établissement de rapports (CERD/C/2007/1), le Comité recommande à l ’ État partie de collecter et de publier des données statistiques fiables et complètes sur la composition ethnique de sa population , en utilisant les indicateurs de la diversité ethnique fondés sur l’auto-identification des personnes et des groupes, afin de permettre au Comité de mieux évaluer comment sont exercés les droits consacrés par la Convention au Turkménistan . Le Comité recommande au Gouvernement de profiter du recensement général de la population et du logement en 2012 pour recueillir des données ventilées et demande à l ’ État partie de les inclure dans son prochain rapport .

10)Attirant l’attention sur la précédente observation finale du Comité relative à la diminution de la proportion des personnes appartenant à des minorités nationales et ethniques entre 1995 et 2005 (CERD/C/TKM/CO/5, par. 9), le Comité redit sa préoccupation quant à l’absence d’informations relatives aux mesures prises pour respecter et protéger l’identité culturelle et ethnique des minorités ethniques et nationales et pour empêcher toute forme d’assimilation forcée, en particulier du groupe minoritaire baloutchi (art. 2, par. 2).

Le Comité recommande à l’État partie d’observer le principe d’auto-identification des membres des minorités ethniques et nationales et de consulter leurs représentants sur leurs sujets de préoccupation et d’adopter, en priorité, si la situation l’exige, des mesures spéciales propres à préserver la langue, la culture, les spécificités religieuses et les traditions de ces groupes, notamment des Baloutchis, conformément à la Recommandation générale n o 32 (2009) du Comité concernant la signification et la portée des mesures spéciales .

11)Le Comité se dit préoccupé par l’absence d’informations relatives à l’applicabilité directe de la Convention dans l’ordre juridique interne de l’État partie, notamment de cas illustrant son application directe et indirecte par les organes judiciaires et administratifs (art. 1er et 2).

Le Comité demande à l’État partie d’inclure des exemples illustrant l’application de la Convention par les tribunaux et les actes administratifs dans son prochain rapport périodique.

12)Rappelant ses précédentes observations finales, le Comité se dit préoccupé par le fait que l’État partie applique l’obligation qui lui incombe en vertu de l’article 2, à savoir l’engagement à ne pas encourager, défendre ou appuyer la discrimination raciale, uniquement aux partis et organisations politiques et non à tous les fonctionnaires de l’État ou à tout individu, ce qui peut expliquer que de hauts responsables de l’État tiennent des propos haineux (art. 2, par. 1 b) et 4 a) et c)).

Rappelant ses R ecommandations générales n o  7 (1985) concernant la législation visant à éliminer la discrimination raciale et n o  15 (1993) concernant l ’ article 4 de la Convention , le Comité recommande à l ’ État partie de prendre immédiatement des mesures visant à enquêter efficacement et à traduire en justice les auteurs de crimes haineux dénoncés, quel que soit leur rang.

13)Tout en notant que le paragraphe 1 de l’article 7 du Code du travail se réfère à certains motifs de discrimination énumérés au paragraphe 1 a) de l’article premier de la Convention, en particulier la race, le Comité note avec préoccupation que la discrimination fondée sur la couleur et l’origine nationale ou ethnique n’est pas interdite. Il note également que, même si le Code du travail interdit la discrimination fondée sur des «motifs sans rapport avec les aptitudes et le comportement professionnel des salariés», il est difficile de savoir si le paragraphe 1 de l’article 7 du Code du travail couvre la discrimination indirecte (art. 1er, par. 1, et 5 e) i)).

Le Comité recommande au Gouvernement d ’ envisager de modifier le Code du travail afin d ’ interdire expressément la discrimination fondée sur la couleur et l ’ origine nationale ou ethnique, conformément au paragraphe 1 de l ’ article premier de la Convention, et la discrimination indirecte.

14)Le Comité se déclare préoccupé par l’absence de renseignements sur les mesures législatives et politiques visant expressément à interdire et condamner «la ségrégation raciale et l’apartheid» conformément à l’article 3 de la Convention (art. 3).

À la lumière de sa R ecommandation générale n o  19 (1995) concernant la ségrégation raciale, le Comité recommande à l ’ État partie de remédier à l ’ exclusion sociale et à la ségrégation motivées par l ’ appartenance ethnique en adoptant les mesures législatives et politiques nécessaires .

15)Étant donné les précédents cas de propos haineux tenus par des fonctionnaires de haut rang à l’encontre de minorités nationales et ethniques, le Comité se dit préoccupé par le fait que les dispositions de l’article 177 du Code pénal et celles du Code des infractions administratives ne répondent pas pleinement aux exigences de l’article 4 de la Convention (art. 4 a), b) et c)).

Le Comité recommande à l ’ État partie de revoir sa législation afin qu ’ elle couvre tous les aspects de l ’ article 4 de la Convention et qu ’ elle contienne les fondements juridiques nécessaires pour sanctionner tous les actes visés par l’article 4 .

16)En outre, le Comité se dit préoccupé par le caractère trop général des dispositions de l’article 177 du Code pénal, par exemple celles qui concernent l’«hostilité» ou l’«atteinte à la fierté ethnique», car elles peuvent interférer de manière injustifiée ou disproportionnée avec la liberté d’expression (art. 4 et 5 d) viii)).

À la lumière de sa R ecommandation générale n o  15 (1993) concernant l ’ article 4 de la Convention et attirant l ’ attention sur l ’O bservation générale n o  34 du Comité des droits de l ’ homme concernant la liberté d ’ opinion et la liberté d ’ expression, le Comité recommande à l ’ État partie de définir clairement les infractions pénales, en particulier celles qui relèvent de l ’ article 177 du Code pénal, de façon à garantir qu ’ il n ’ en résulte pas une interférence injustifiée ou disproportionnée avec la liberté d ’ expression .

17)Tout en notant qu’il y a 20 000 apatrides au Turkménistan, le Comité demeure préoccupé par l’absence d’informations relatives aux mesures prises pour lutter contre l’apatridie et aux résultats du recensement, en 2007 et en 2011, des personnes vivant au Turkménistan sans document d’identité/de citoyenneté et qui sont apatrides ou exposées au risque d’apatridie (art. 2 et 5).

Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre des mesures urgentes contre l ’ apatridie et de fournir des statistiques relatives à l ’ acquisition de la nationalité turkmène, ainsi que des informations relatives au recensement des personnes vivant au Turkménistan sans document d ’ identité/de citoyenneté et qui sont apatrides ou exposées au risque d ’ apatridie. Le Comité encourage l ’ État partie à envisager d ’ adhérer à la Convention sur la réduction des cas d ’ apatridie.

18)Le Comité constate que l’État partie n’accepte pas la double nationalité et qu’il a été mis fin à l’accord de double nationalité avec la Fédération de Russie. Le Comité note avec préoccupation que la non-reconnaissance de la double nationalité peut entraîner l’apatridie, avec toutes les conséquences néfastes que cela suppose (art. 2 et 5).

Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre des mesures pour que le règlement des questions relatives à la nationalité n’entraîne pas une augmentation du nombre d ’ apatrides, qui se trouveraient ainsi privé s d ’ exercer l eurs droits de l ’ homme et l eurs libertés fondamentales.

19)Tout en prenant bonne note de la loi sur l’emploi, le Comité dit sa préoccupation quant à l’absence d’informations relatives aux mesures prises par l’État partie pour garantir l’égalité de chances et de traitement à toutes les personnes vivant dans le pays, dans les secteurs public et privé, notamment l’élection au Parlement et le recrutement dans la fonction publique ou les organes judiciaires, sans distinction de race et d’origine nationale (art. 2 et 5).

Le Comité recommande au Gouvernement de prendre des mesures visant à garantir, dans les faits, l ’ égalité de chances et de traitement à toutes les personnes vivant dans le pays , dans les secteurs public et privé, notamment l ’ élection au Parlement et le recrutement dans la fonction publique ou les organes judiciaires, sans distinction de race et d ’ origine nationale, et d ’ inclure des informations en la matière dans son prochain rapport périodique.

20)Le Comité se dit préoccupé par le fait que les enfants appartenant aux minorités ethniques n’ont toujours qu’un accès limité à un enseignement de et dans leur langue maternelle en raison du manque d’établissements d’enseignement et de manuels scolaires dans les langues minoritaires. En outre, le Comité se dit préoccupé par le fait que les femmes et les filles appartenant à ces groupes demeurent vulnérables et qu’elles sont victimes d’une double discrimination en tant que femmes et en tant que membres de minorités, en ce qui concerne l’éducation, la santé et l’emploi (art. 2 et 5).

Le Comité prie instamment l ’ État partie de prendre les mesures nécessaires pour que les enfants appartenant aux minorités ethniques et nationales aient accès à un enseignement de et dans leur langue maternelle, notamment en créant des établissements d ’ enseignement et en élaborant des manuels dans les langues minoritaires. L ’ État partie devrait également prendre toutes les mesures qui s ’ imposent pour améliorer la situation des femmes et des filles appartenant à des minorités en renforçant leur accès à l ’ éducation, aux soins de santé et à l ’ emploi.

21)Le Comité redit sa préoccupation quant à l’absence d’informations sur la participation de groupes minoritaires aux activités culturelles et aux efforts déployés pour préserver et développer leur culture, afin de conserver leur identité culturelle, conformément à la loi (art. 5 e), v) et 7).

Le Comité prie instamment l ’ État partie de prendre des mesures spécifiques pour préserver et développer la culture des groupes minoritaires afin qu ’ ils puissent conserver leur identité culturelle.

22)Tout en prenant note des informations de l’État partie concernant l’absence d’affaire de discrimination raciale portée devant les tribunaux, le Comité se dit préoccupé par le manque, dans les faits, de voies de recours offertes aux victimes de discrimination raciale, notamment pour obtenir satisfaction ou réparation (art. 2, 4, 5, 6 et 7).

Rappelant sa Recommandation générale n o  26 (2000) concernant l’article 6 de la Convention, le Comité recommande à l’État partie de faire en sorte que les victimes de discrimination raciale puissent se prévaloir de voies de recours pour obtenir satisfaction ou réparation, et que la population soit informée de l’existence de voies de recours. Rappelant sa Recommandation générale n o  31 (2005) concernant la discrimination raciale dans l’administration et le fonctionnement du système de justice pénale, le Comité recommande également à l’État partie d’inclure, dans son prochain rapport, des informations détaillées sur le nombre et la nature des actes de discrimination raciale, les poursuites engagées, les condamnations prononcées et les peines infligées à leurs auteurs.

23)Tout en prenant acte du fait que l’application du Code pénal reste au cœur de la lutte contre la discrimination raciale, le Comité se déclare préoccupé par l’absence d’instruments permettant d’établir les responsabilités civiles et administratives, et notamment de prévoir des sanctions, instruments tout aussi indispensables pour prévenir la discrimination raciale et offrir des voies de recours plus efficaces aux victimes de ces actes (art. 6).

Le Comité recommande à l ’ État partie de modifier le Code civil et le Code des infractions administratives de façon à établir les responsabilité s civile s et administrative s en cas de discrimination raciale et à g arantir des voies de recours, y  compris l ’indemnisation des victimes .

24)Le Comité constate que l’Institut national pour la démocratie et les droits de l’homme relève du Président du Turkménistan, mais ne sait pas bien si des efforts sont actuellement déployés pour mettre en place une institution nationale des droits de l’homme indépendante, conformément aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris) (art. 2).

Rappelant sa Recommandation générale n o 17 (1993) concernant la création d ’ organismes nationaux pour faciliter l ’ application de la Convention , le Comité recommande à l ’ État partie d ’ établir rapidement une institution nationale indépendante chargée de la protection et de la promotion des droits de l ’homme conformément aux Principes de Paris. Le Comité lui recommande également de mettre en place un mécanisme de consultation des représentants des groupes minoritaires sur les questions qui les concern e nt.

25)Le Comité se dit préoccupé par les informations concernant l’accès limité à Internet des organisations non gouvernementales qui œuvrent en faveur de la promotion des droits de l’homme, principalement de ceux des groupes minoritaires, ainsi que des restrictions imposées au fonctionnement des sites, des blogs ou de toute autre source d’information sur Internet, qui constituent une violation de la liberté d’expression consacrée par le droit international (art. 5 d) viii)).

Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre les mesures nécessaires pour que des obstacles arbitraires n ’ empêchent pas de recevoir et de diffuser des informations sur Internet, conformément aux dispositions de la Convention et d ’ autres instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme; et de ne pas restrei ndre le fonctionnement de sites , de blogs ou d ’ autres sources d ’ information sur Internet , car cela constitue une violation de la liberté d ’ expression consacrée par le droit international.

26)Étant donné le caractère indivisible de tous les droits de l’homme, le Comité encourage l’État partie à envisager de ratifier les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme qu’il n’a pas encore ratifiés, telles la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille et la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées.

27)À la lumière de sa Recommandation générale no 33 (2009) concernant le suivi de la Conférence d’examen de Durban, le Comité recommande à l’État partie de donner effet à la Déclaration et au Programme d’action de Durban, adoptés en septembre 2001 par la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, en tenant compte du Document final de la Conférence d’examen de Durban, tenue à Genève en avril 2009, lorsqu’il intégrera la Convention dans son ordre juridique interne. Le Comité prie l’État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des renseignements précis sur les plans d’action et les autres mesures qu’il aura pris pour mettre en œuvre la Déclaration et le Programme d’action de Durban à l’échelon national.

28)Le Comité recommande à l’État partie de mener des consultations et de renforcer son dialogue avec les organisations de la société civile qui œuvrent pour la défense des droits de l’homme et, en particulier, luttent contre la discrimination raciale, dans le cadre de la mise en œuvre des présentes observations finales et de l’élaboration du prochain rapport périodique.

29)Le Comité recommande à l’État partie d’envisager de faire la déclaration facultative prévue à l’article 14 de la Convention en vue de reconnaître la compétence du Comité pour recevoir et examiner des plaintes individuelles.

30)Le Comité recommande à l’État partie de mettre ses rapports à la disposition du public dès leur soumission et de diffuser les observations finales du Comité s’y rapportant dans les langues officielles et les autres langues d’usage courant, selon qu’il conviendra.

31)Le Comité encourage l’État partie à régulièrement mettre à jour son document de base (HRI/CORE/TKM/2009), soumis en 2009, conformément aux directives harmonisées concernant l’établissement des rapports destinés aux organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, en particulier celles concernant l’établissement du document de base commun, adoptées par la cinquième Réunion des organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, tenue en juin 2006 (HRI/GEN.2/Rev.6, chap. I).

32)Conformément au paragraphe 1 de l’article 9 de la Convention et à l’article 65 de son règlement intérieur révisé, le Comité prie l’État partie de l’informer dans l’année suivant l’adoption des présentes observations finales de la suite qu’il aura donnée aux recommandations figurant aux paragraphes 9, 15 et 17 ci-dessus.

33)Le Comité souhaite également attirer l’attention de l’État partie sur l’importance particulière que revêtent les recommandations 8, 10, 13 et 25, et le prie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des renseignements détaillés sur les mesures concrètes qu’il aura prises pour y donner suite.

34)Le Comité recommande à l’État partie de présenter ses huitième à onzième rapports périodiques en un seul document d’ici au 29 octobre 2015, en tenant compte des directives concernant l’établissement du document se rapportant spécifiquement à la Convention adoptées par le Comité à sa soixante et onzième session (CERD/C/2007/1) et en veillant à répondre à tous les points soulevés dans les présentes observations finales. Le Comité engage également l’État partie à respecter la limite de 40 pages fixée pour les rapports spécifiques à un instrument particulier et la limite de 60 à 80 pages indiquée pour le document de base (voir HRI/GEN.2/Rev.6, chap. I, par. 19).

37. Viet Nam

1)Le Comité a examiné les dixième à quatorzième rapports périodiques du Viet Nam, soumis en un seul document (CERD/C/VNM/10-14), à ses 2139e et 2140e séances (CERD/C/SR.2139 et SR.2140), les 21 et 22 février 2012. À sa 2159e séance (CERD/C/SR.2159), le 6 mars 2012, il a adopté les observations finales ci-après.

A. Introduction

2)Le Comité accueille avec satisfaction les rapports périodiques soumis en un seul document par l’État partie. Ceux-ci s’étant fait beaucoup attendre, le Comité prie l’État partie d’avoir à l’esprit les délais fixés pour la présentation des prochains rapports afin d’honorer les obligations qui sont les siennes en vertu de la Convention.

3)Le Comité accueille également avec satisfaction les informations complémentaires fournies oralement par la délégation de haut niveau ainsi que la reprise d’un dialogue constructif avec l’État partie depuis l’examen du précédent rapport périodique (CERD/C/357/Add.2) en 2001.

B. Aspects positifs

4)Le Comité se félicite des mesures, y compris législatives, prises par l’État partie:

a)L’adoption de la loi relative à la résidence (2006);

b)L’adoption de la loi relative à l’égalité des sexes (2006);

c)La modification de la loi relative à la nationalité (2008);

d)La création d’un conseil ethnique dans le cadre de la loi sur l’organisation de l’Assemblée nationale (2002);

e)La mise en œuvre du programme 135 sur le développement socioéconomique des communes rencontrant des difficultés particulières (1998-2010) et du programme national de réduction de la pauvreté (2006-2010);

f)L’application de la décision 82/2010/QD‑TTg, de la décision 134/2004/QD‑TTg et de la décision 167/2008/QD‑TTg, relatives aux mesures spéciales destinées aux minorités ethniques les plus pauvres dans les domaines du logement, de l’éducation et de l’apprentissage des langues.

5)Le Comité se félicite de l’allocation de 100 milliards de dông du budget de l’État pour aider cinq groupes ethniques (Si La, Pu Peo, O du, Brau et Ro Man).

6)Le Comité accueille avec satisfaction la ratification par l’État partie, le 20 décembre 2001, des deux Protocoles facultatifs à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés et concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants. Le Comité se félicite également de ce que l’État partie envisage d’adhérer à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

C. Sujets de préoccupation et recommandations

7)Le Comité s’inquiète de ce que la Convention n’ait pas été pleinement intégrée au droit interne et, particulièrement, de l’absence d’une définition de la discrimination raciale. Il constate avec préoccupation que l’État partie n’a toujours pas adopté une loi spécifique et complète contre la discrimination (art. 1er et 2).

Rappelant ses recommandations antérieures (A/56/18, par. 414 et 415), le Comité recommande à l’État partie d’intégrer la Convention dans son droit interne en adoptant notamment une loi complète contre la discrimination qui comprendra une définition de la discrimination raciale conforme à celle du paragraphe 1 de l’article premier de la Convention, et qui couvrira tous les droits protégés par celle-ci.

8)Le Comité se félicite de ce que les traités internationaux auxquels le Viet Nam est partie priment le droit interne en cas de conflit. Il regrette cependant que la Convention n’ait pas été appliquée par les juridictions nationales (art. 2 et 7).

Le Comité recommande à l’État partie de redoubler d’efforts pour faire mieux connaître la Convention , en particulier au moyen de formations et de séminaires destinés au milieu judiciaire, de sorte que les tribunaux l’appliquent. L’État partie devrait en outre fournir des informations à jour sur des cas d’application de la Convention dans son prochain rapport périodique.

9)Le Comité s’inquiète de l’absence d’informations sur des plaintes de discrimination raciale dont les juridictions ou d’autres autorités compétentes auraient été saisies, alors qu’il est régulièrement fait état de discrimination à l’égard de membres de certains groupes minoritaires. Le Comité, tout en prenant note de l’existence du comité chargé des affaires relatives aux minorités ethniques (organe responsable au niveau des ministères de l’élaboration générale de stratégies et de la mise en œuvre des politiques du Gouvernement relatives aux minorités ethniques), regrette l’absence dans l’État partie d’un mécanisme de dépôt de plaintes complet, efficace et indépendant (art. 2, 4, 5 et 6).

Le Comité recommande à l’État partie:

a) D’examiner les raisons du petit nombre de plaintes ayant trait à la discrimination raciale et de voir si cela pourrait être dû à la méconnaissance de leurs droits par les victimes, à des obstacles linguistiques, à la peur de représailles, à un accès limité aux mécanismes existants, ou au manque d’attention et de compréhension de la part des autorités à l’égard des cas de discrimination raciale;

b) D’aider activement les victimes de discrimination raciale cherchant réparation, et d’informer le public, notamment les représentants des forces de l’ordre et les groupes minoritaires, sur les recours juridiques disponibles dans le domaine de la discrimination raciale;

c) De m ettre en place un mécanisme complet, efficace et indépendant de plaintes;

d) De f ournir, dans le prochain rapport périodique, des informations à jour sur les plaintes de discrimination raciale et sur les décisions judiciaires rendues, ainsi que des données statistiques sur les plaintes, poursuites et peines prononcées contre les actes interdits par l’article 4 de la Convention.

10)Le Comité s’inquiète de ce que les cadres juridiques, politiques et institutionnels destinés à combattre la discrimination raciale ne soient pas véritablement appliqués dans la pratique. Il note également avec préoccupation la formulation vague de certaines dispositions, notamment de l’article 87 du Code pénal, et une possible utilisation détournée de ces dispositions contre certaines minorités ethniques (art. 2 et 4).

Rappelant sa Recommandation générale n o 31 (2005) concernant la discrimination raciale dans l’administration et le fonctionnement du système de justice pénale, le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures plus efficaces pour faire en sorte que les dispositions existantes permettant de lutte r contre la discrimination soient effectivement mises en œuvre et que les infractions à caractère raciste fassent l’objet d’ enquêtes et de poursuites efficaces. Le Comité recommande également, conformément à sa Recommandation générale n o 15 (1993) concernant l’article 4 de la Convention, à l’État partie de procéder à un examen complet de la législation existante, de l’aligner pleinement sur les dispositions de l’article 4 a) et b) de la Convention, et d’envisager la révision de l’article 87 du Code pénal afin qu’il soit bien clair que l’objectif principal de cette disposition est de protéger les minorités ethniques et les autres minorités vulnérables face à la discrimination.

11)Le Comité regrette qu’aucune mesure concrète n’ait été prise et qu’aucun calendrier n’ait été fixé en vue de créer une institution nationale des droits de l’homme conforme aux principes applicables au statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris). Il se félicite de l’engagement oral pris par la délégation d’envisager concrètement la création d’une telle institution dans un avenir proche (art. 2 et 6).

Le Comité encourage l ’ État partie à créer dans les plus brefs délais une institution des droits de l ’ homme indépendante , convenablement financée et dotée du personnel nécessaire, conformément aux Principes de Paris, dont la mission portera sur l ’ ensemble des droits de l ’ homme et , plus précisément , sur la lutte contre toutes les formes de discrimination.

12)Bien que l’État partie ait soutenu l’adoption de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, le Comité constate sa réticence à engager un débat transparent et ouvert à tous sur la reconnaissance de ces peuples. Il se félicite de l’engagement pris par la délégation visant à ce que l’État partie examine les observations des membres du Comité sur la nécessité de promouvoir le droit à l’auto-identification des peuples autochtones, conformément aux normes internationales (art. 2 et 5).

Le Comité recommande à l ’ État partie de respecter et de protéger l ’ existence et l’ identité culturelle de tous les groupes ethniques se trouvant sur son territoire. En particulier, rappelant sa Recommandation générale n o 21 (1990) concernant le droit à l ’ autodétermination et sa Recommandation générale n o 23 (1997) concernant les droits des populations autochtones, le Comité invite l ’ État partie à prêter une plus grande attention au principe de l ’auto-identification par les individus concernés, y  compris les Khmers Kroms et les Degars (Montagnards), et à envisager la ratification de la Convent ion de l ’ Organisation internationale du Travail n o 169 (1989) relative aux peuples indigènes et tribaux dans les pays indépendants .

13)Tout en prenant note des différentes mesures prises par l’État partie pour réduire la pauvreté, y compris les programmes 134 et 135, et de son important développement économique, le Comité s’inquiète toujours du fait que toutes les communautés ne tirent pas profit de la croissance. Le Comité est profondément préoccupé par les inégalités socioéconomiques considérables entre les minorités ethniques défavorisées et la majorité kinh, même lorsqu’il s’agit de personnes vivant dans la même zone montagneuse, et leurs effets négatifs sur l’exercice par les peuples autochtones et minoritaires de leurs droits économiques, sociaux et culturels, particulièrement dans les domaines de l’emploi, de l’éducation et de la santé (art. 5 e)).

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ intensifier ses efforts pour réduire la pauvreté parmi les groupes marginalisés et la discrimination pour des motifs ethniques dans le cadre de l ’ exercice de s droits économiques, sociaux et culturels. L ’ État partie devrait prendre des mesures pour promouvoir l ’ égalité des chances de tous et pour stimuler la croissance et le développement économique en faveur des groupes ethniques minoritaires et d es communautés autochtones , particulièrement dans le s domaine s de l ’ emploi, de l ’ éducation et de la santé. Le Comité recommande en outre à l ’ État partie de garantir la participation active des bénéficiaires concernés en les consultant et en leur faisant prendre part aux décisions qui concernent leurs droits et intérêts.

14)Le Comité s’inquiète des inégalités en ce qui concerne l’accès à l’éducation et la qualité de celle-ci, ainsi que les résultats scolaires, entre les élèves de la majorité kinh et les élèves des minorités ethniques. Il déplore également les taux élevés d’analphabétisme et d’abandon scolaire parmi les minorités ethniques, particulièrement chez les femmes et les filles. Le Comité regrette en outre l’accès limité des minorités ethniques à une éducation dans leur langue maternelle (art. 5 e)).

Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre des mesures énergiques pour garantir à tous, dans les mêmes conditions, l ’ exercice du droit à l ’ éducation , en augmentant notamment l ’ aide financière destinée aux élèves de familles défavorisées dans toutes les communautés, et en améliorant la qualité de l’enseignement et des programme s . L ’ État partie devrait par ailleurs accroître le nombre de programmes d ’ éducation bilingue pour les enfants appartenant aux minorités ethniques ainsi que de formations en langues locales pour les enseignants kinh s dans les zones où vivent des minorités ethniques; recruter plus d ’ enseignants appartenant à des minorités ethniques; permettre l ’ enseignement des langues des minorités ethniques ainsi que leur utilisation comme moyen d ’ instruction dans les écoles; et soutenir les programmes d ’ éducation sur la culture des groupes ethniques minoritaires.

15)Le Comité note avec préoccupation le déplacement de minorités et la confiscation de terres ancestrales sans le consentement préalable des intéressés et sans compensation adéquate (art. 5).

Le Comité appelle l ’ État partie à prendre des mesures pour garantir les droits des peuples autochtones sur leurs terres ancestrales et à poursuivre ses efforts , avec les communautés concernées, en vue du règlement des litiges fonciers, y  compris par l ’ octroi de compensations adéquates, en tenant compte à cet égard de la Recommandation générale n o  23.

16)Le Comité prend note des assurances fournies par l’État partie selon lesquelles le droit à la liberté de conviction et de religion des minorités ethniques est bien protégé par l’article 70 de la Constitution ainsi que d’autres lois et politiques pertinentes (art. 2, 4 et 5 a), b) et d)). Le Comité est toutefois préoccupé par les points suivants:

a)Des informations nombreuses et cohérentes faisant état d’actes de discrimination et de restrictions concernant les pratiques religieuses dont font l’objet certaines confessions chrétiennes et bouddhistes parmi les Khmers Kroms, les Degars (Montagnards) et les Hmongs, qui se manifestent dans la législation, dans des règles d’enregistrement, par la surveillance ou l’emprisonnement;

b)L’existence de dispositions apparemment discriminatoires, tant pour des motifs ethniques que religieux, notamment les articles 8 et 15 de l’ordonnance sur les croyances et les religions (2004), qui interdit les activités religieuses considérées comme «portant atteinte à la sécurité nationale» et «à l’unité du peuple ou aux nobles traditions culturelles de la nation»;

c)Le système d’enregistrement des ménages (hộ khẩu), qui aboutit à une discrimination à l’égard des minorités ethniques appartenant à des groupes religieux «non reconnus» dans les domaines de l’emploi, de la sécurité sociale, des services de santé, de l’éducation et de la liberté de circulation;

d)Des cas d’attaques violentes et de menaces contre des groupes religieux et des activités religieuses, par exemple les attaques qui auraient eu lieu contre le monastère de Bat Nha, dont s’est fait l’écho le Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l’intolérance qui y est associée (A/HRC/15/53, par. 10).

Compte tenu des liens étroits entre l’appartenance ethnique et la religion, comme il est expliqué dans la Recommandation générale n o  32 (2009) sur la signification et la portée des mesures spéciales dans la Convention internationale sur l ’ élimination de toutes les formes de discrimination raciale, le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures pour s’attaquer au phénomène de la double discrimination dont font l’objet les minorités ethniques appartenant à des groupes religieux non reconnus et pour garantir le droit de chacun à professer et pratiquer librement sa religion en public ou en privé, indépendamment de son statut du point de vue de l’enregistrement, entre autres par les moyens suivants:

a) Envisager la modification du système d’enregistrement des ménages;

b) Revoir l’ordonnance sur les croyances et les religions (en particulier le paragraphe 2 de l’article 8 et l’article 15) et le décret n o  22 sur les religions, qui imposent des contrôles stricts sur les religions, de manière à les aligner pleinement sur les dispositions de l’article 5 d) de la Convention;

c) Enquêter immédiatement et de manière approfondie sur les cas allégués de menaces et d’attaques contre des minorités ethniques et religieuses, et fournir, dans le prochain rapport périodique, des renseignements à jour sur le résultat de ces enquêtes et sur toutes peines ou sanctions infligées aux auteurs ainsi que sur les réparations apportées aux victimes.

17)Le Comité est préoccupé par: a) les informations faisant toujours état d’arrestations et de détentions arbitraires de groupes minoritaires pour des activités ayant trait à l’exercice pacifique de leur religion et de leur liberté d’expression, ainsi que de mauvais traitements en détention, y compris des cas dont ont été saisis plusieurs détenteurs de mandat au titre des procédures spéciales (voir, par exemple, A/HRC/16/52/Add.1, par. 249); b) l’absence de véritables enquêtes sur ces allégations; et c) l’absence de véritables réparations pour les victimes. À cet égard, le Comité note avec préoccupation l’existence de certains textes juridiques, dont l’ordonnance no 44 réglementant la justice administrative, qui autorise le placement en détention administrative pour une durée pouvant aller jusqu’à deux ans sans procès des auteurs soupçonnés d’atteintes à la «sécurité nationale»; le décret 38/2005/ND-CP sur l’ordre public, qui interdit les manifestations devant les bureaux d’organismes d’État et les bâtiments publics; et la circulaire 09/2005/TT-BCA, qui interdit les rassemblements de plus de cinq personnes sans l’autorisation des pouvoirs publics (art. 2 et 5 b), d)).

Le Comité recommande à l’État partie de revoir sa réglementation et ses politiques relatives à la protection de la liberté d’expression, du droit de réunion pacifique et de la liberté d’association afin de les aligner pleinement sur les dispositions de l’article 5 d) de la Convention. Par ailleurs, à la lumière de la recommandation de l’Experte indépendante sur les questions relatives aux minorités (A/HRC/16/45/Add.2, par. 97), le Comité appelle l’État partie à envisager de libérer les personnes placées en détention pour des activités qui, au regard du droit international, constituent l’exercice pacifique des droits susmentionnés.

18)Le Comité est préoccupé par l’absence de dispositions relatives à la protection des réfugiés ou des demandeurs d’asile ainsi que par des informations faisant état de rapatriements forcés, en collaboration avec les gouvernements d’États voisins, de personnes appartenant à des peuples autochtones ou à des minorités ethniques cherchant refuge. Le Comité constate avec regret que l’article 91 du Code pénal incrimine le fait de «s’enfuir à l’étranger pour y rester dans le but de s’opposer à l’administration du peuple», ce qui est contraire à l’article 68 de la Constitution vietnamienne et à l’article 5 de la Convention (art. 5 d)).

Le Comité recommande à l’État partie de revoir sa politique à l’égard des réfugiés dans le but d’offrir une meilleure protection aux droits des personnes appartenant à des peuples autochtones et à des minorités ethniques qui cherchent refug e ou asile. Il lui recommande pour cela d’élaborer une législation nationale sur l’asile ainsi que des procédures destinées à la protection des réfugiés et des demandeurs d’asile conformes aux règles applicables en droit international des droits de l’homme. Le Comité encourage par ailleurs l’État partie à envisager d’adhérer à la Convention de 1954 relative au statut des apatrides, à la Convention de 1961 sur la réduction des cas d ’ apatridie , à la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés ainsi qu’à son Protocole de 1967.

19)Le Comité est profondément préoccupé par le fait que les représentants de l’État et l’opinion publique en général ne reconnaissent pas l’existence de la discrimination raciale et de l’inégalité entre les groupes ethniques ainsi que par la persistance de comportements sociaux négatifs et de stéréotypes visant des personnes d’origine ethnique minoritaire (art. 7).

Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures concrètes , dont des campagnes éducatives, pour éradiquer les perceptions erronées et les stéréotypes discriminatoires qui stigmatisent et marginalisent les minorités ethniques, l’objectif étant d’aider les représentants de l’État à mieux protéger les droits et intérêts des groupes minoritaires.

20)Ayant à l’esprit le caractère indivisible de tous les droits de l’homme, le Comité encourage l’État partie à envisager de ratifier les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme auxquels il n’est pas encore partie, en particulier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille et la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

21)À la lumière de sa Recommandation générale no 33 (2009) sur le suivi de la Conférence d’examen de Durban, le Comité recommande à l’État partie de donner effet à la Déclaration et au Programme d’action de Durban adoptés en septembre 2001 par la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, en tenant compte du Document final de la Conférence d’examen de Durban, qui s’est tenue à Genève en avril 2009, lorsqu’il applique la Convention dans son ordre juridique interne. Le Comité le prie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des informations spécifiques sur les plans d’action et autres mesures qu’il aura adoptés pour appliquer la Déclaration et le Programme d’action de Durban au niveau national.

22)Le Comité recommande à l’État partie de dialoguer plus, lors de l’élaboration du prochain rapport périodique, avec les organisations de la société civile travaillant dans le domaine de la protection des droits de l’homme, en particulier de la lutte contre la discrimination raciale.

23)Le Comité, qui accueille avec satisfaction les informations données par la délégation selon lesquelles l’État partie envisage de faire la déclaration facultative prévue à l’article 14 de la Convention et de reconnaître ainsi la compétence du Comité pour recevoir et examiner les communications émanant de particuliers, encourage l’État partie à le faire sans délai.

24)Le Comité recommande à l’État partie de ratifier les amendements au paragraphe 6 de l’article 8 de la Convention, adoptés le 15 janvier 1992 à la quatorzième Réunion des États parties à la Convention et approuvés par l’Assemblée générale dans sa résolution 47/111. Il rappelle les résolutions 61/148 et 63/243 dans lesquelles l’Assemblée générale a demandé instamment aux États parties d’accélérer leurs procédures internes de ratification de l’amendement à la Convention concernant le financement du Comité et d’informer par écrit le Secrétaire général, dans les meilleurs délais, de leur acceptation de cet amendement.

25)Le Comité recommande à l’État partie de mettre ses rapports à la disposition du public dès leur soumission et de diffuser également les observations finales s’y rapportant dans les langues officielles et les autres langues couramment utilisées, selon qu’il conviendra.

26)L’État partie est invité à soumettre son document de base conformément aux directives harmonisées concernant l’établissement des rapports destinés aux organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, en particulier celles qui visent le document de base commun, adoptées par la cinquième Réunion intercomités des organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, tenue en juin 2006 (HRI/GEN.2/Rev.6, chap. I).

27)Conformément au paragraphe 1 de l’article 9 de la Convention et à l’article 65 de son règlement intérieur modifié, le Comité demande à l’État partie de l’informer dans l’année suivant l’adoption des présentes observations de la suite qu’il aura donnée aux recommandations figurant aux paragraphes 12, 15 et 17 ci-dessus.

28)Le Comité attire également l’attention de l’État partie sur l’importance particulière que revêtent les recommandations figurant aux paragraphes 13, 14 et 16 ci-dessus, et le prie de donner dans son prochain rapport périodique des renseignements détaillés sur les mesures concrètes qu’il aura prises pour les mettre en application.

29)Le Comité recommande à l’État partie de soumettre ses quinzième à dix-septième rapports périodiques en un seul document le 9 juillet 2015 au plus tard, en tenant compte des directives concernant l’établissement du document se rapportant spécifiquement à la Convention adoptées par le Comité à sa soixante et onzième session (CERD/C/2007/1), et en veillant à traiter tous les points soulevés dans les présentes observations finales. Le Comité l’engage également à respecter la limite de 40 pages fixée pour les rapports spécifiques à un instrument et la limite de 60 à 80 pages indiquée pour le document de base commun (HRI/GEN.2/Rev.6, chap. I, par. 19).

IV.Suivi de l’examen des rapports présentés par les États parties conformément à l’article 9 de la Convention

38.En 2012, M. Thornberry a rempli la fonction de coordonnateur chargé du suivi de l’examen des rapports présentés par les États parties.

39.Le mandat du coordonnateur chargé du suivi et les directives concernant le suivi, qui seront adressées à chaque État partie avec les observations finales du Comité, ont été adoptés par le Comité à ses soixante-sixième et soixante-huitième sessions, respectivement.

40.À la 2163e séance (quatre-vingtième session), tenue le 8 mars 2012, le coordonnateur chargé du suivi a présenté au Comité un rapport sur ses activités.

41.Depuis la clôture de la soixante-dix-neuvième session, des rapports sur la suite donnée aux recommandations au sujet desquelles le Comité avait demandé des renseignements ont été reçus des États parties suivants: Estonie (CERD/C/EST/CO/8-9/Add.1), Lituanie (CERD/C/LTU/CO/4-5/Add.1), Maroc (CERD/C/MAR/CO/17-18/Add.1), Pays-Bas (CERD/C/NLD/CO/17-18/Add.1 et Corr.1) et Ouzbékistan (CERD/C/UZB/CO/6-7/Add.2).

42.À sa quatre-vingtième session, le Comité a examiné les rapports de suivi de l’Australie, du Danemark, de l’Estonie, de la France, des Pays-Bas et de l’Ouzbékistan, et a poursuivi le dialogue constructif engagé avec ces États parties en leur adressant des lettres contenant des observations et des demandes de renseignements supplémentaires.

V.Examen de l’application des dispositions de la Convention dans les États parties dont les rapports sont très en retard

A.Rapports en retard d’au moins dix ans

43.Les rapports des États parties ci-après sont en retard d’au moins dix ans:

Sierra Leone

Quatrième rapport périodique attendu depuis 1976

Libéria

Rapport initial attendu depuis 1977

Gambie

Deuxième rapport périodique attendu depuis 1982

Somalie

Cinquième rapport périodique attendu depuis 1984

Papouasie-Nouvelle-Guinée

Deuxième rapport périodique attendu depuis 1985

Îles Salomon

Deuxième rapport périodique attendu depuis 1985

République centrafricaine

Huitième rapport périodique attendu depuis 1986

Afghanistan

Deuxième rapport périodique attendu depuis 1986

Seychelles

Sixième rapport périodique attendu depuis 1989

Sainte-Lucie

Rapport initial attendu depuis 1991

Malawi

Rapport initial attendu depuis 1997

Burkina Faso

Douzième rapport périodique attendu depuis 1997

Niger

Quinzième rapport périodique attendu depuis 1998

Swaziland

Quinzième rapport périodique attendu depuis 1998

Burundi

Onzième rapport périodique attendu depuis 1998

Iraq

Quinzième rapport périodique attendu depuis 1999

Gabon

Dixième rapport périodique attendu depuis 1999

Haïti

Quatorzième rapport périodique attendu depuis 2000

Guinée

Douzième rapport périodique attendu depuis 2000

République arabe syrienne

Seizième rapport périodique attendu depuis 2000

Saint-Siège

Seizième rapport périodique attendu depuis 2000

Zimbabwe

Cinquième rapport périodique attendu depuis 2000

Lesotho

Quinzième rapport périodique attendu depuis 2000

Tonga

Quinzième rapport périodique attendu depuis 2001

Maurice

Quinzième rapport périodique attendu depuis 2001

B.Rapports en retard d’au moins cinq ans

44.Les rapports des États parties ci-après sont en retard d’au moins cinq ans:

Soudan

Douzième rapport périodique attendu depuis 2002

Bangladesh

Douzième rapport périodique attendu depuis 2002

Érythrée

Rapport initial attendu depuis 2002

Belize

Rapport initial attendu depuis 2002

Bénin

Rapport initial attendu depuis 2002

Algérie

Quinzième rapport périodique attendu depuis 2003

Sri Lanka

Dixième rapport périodique attendu depuis 2003

Saint-Marin

Rapport initial attendu depuis 2003

Guinée équatoriale

Rapport initial attendu depuis 2003

Hongrie

Dix-huitième rapport périodique attendu depuis 2004

Chypre

Dix-septième rapport périodique attendu depuis 2004

Égypte

Dix-septième rapport périodique attendu depuis 2004

Timor-Leste

Rapport initial attendu depuis 2004

Jamaïque

Seizième rapport périodique attendu depuis 2004

Honduras

Rapport initial attendu depuis 2004

Trinité-et-Tobago

Quinzième rapport périodique attendu depuis 2004

Mali

Quinzième rapport périodique attendu depuis 2005

Comores

Rapport initial attendu depuis 2005

Ouganda

Onzième rapport périodique attendu depuis 2005

Ghana

Dix-huitième rapport périodique attendu depuis 2006

Libye

Dix-huitième rapport périodique attendu depuis 2006

Côte d’Ivoire

Quinzième rapport périodique attendu depuis 2006

Bahamas

Quinzième rapport périodique attendu depuis 2006

Arabie saoudite

Quatrième rapport périodique attendu depuis 2006

Cap-Vert

Treizième rapport périodique attendu depuis 2006

Saint-Vincent-et-les Grenadines

Onzième rapport périodique attendu depuis 2006

Liban

Dix-huitième rapport périodique attendu depuis 2006

C.Décisions prises par le Comité pour assurer la présentationdes rapports des États parties

45.À sa quarante-deuxième session, le Comité, ayant souligné que la soumission tardive des rapports par les États parties l’empêchait de suivre correctement l’application de la Convention, a décidé de continuer de procéder au bilan de l’application des dispositions de la Convention par les États parties dont les rapports étaient en retard de cinq ans ou plus. Conformément à la décision qu’il avait prise à sa trente-neuvième session, il est convenu que cette procédure se fonderait sur le dernier en date des rapports présentés par l’État partie concerné et sur son examen par le Comité. À sa quarante-neuvième session, il a décidé, en outre, que des dates seraient prévues pour faire le bilan de l’application de la Convention dans les États parties dont les rapports initiaux étaient en retard de cinq ans ou plus. Il est convenu qu’en l’absence de rapport initial, il examinerait tous les renseignements communiqués par l’État partie à d’autres organes des Nations Unies ou, à défaut, les rapports et renseignements émanant des organes des Nations Unies. Dans la pratique, il examine également des informations pertinentes émanant d’autres sources, notamment d’organisations non gouvernementales, qu’il s’agisse d’un rapport initial ou d’un rapport périodique très en retard.

VI.Examen des communications présentées conformémentà l’article 14 de la Convention

46.En vertu de l’article 14 de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, les personnes ou groupes de personnes qui s’estiment victimes de violations par un État partie de l’un quelconque des droits énoncés dans la Convention et qui ont épuisé tous les recours internes disponibles peuvent adresser des communications écrites au Comité pour l’élimination de la discrimination raciale. On trouvera à la partie B de l’annexe I la liste des 54 États parties qui ont reconnu la compétence du Comité pour examiner ces communications.

47.Les séances du Comité au cours desquelles sont examinées les communications qui lui sont soumises en vertu de l’article 14 de la Convention se tiennent à huis clos (art. 88 du Règlement intérieur du Comité). Tous les documents en rapport avec les travaux du Comité au titre de l’article 14 (communications émanant des parties et autres documents de travail du Comité) sont confidentiels.

48.Au moment de l’adoption du présent rapport, le Comité avait, depuis 1984, enregistré 49 requêtes concernant 54 États parties, dont 1 avait été classée et 17 déclarées irrecevables. Le Comité avait adopté des décisions sur le fond pour 28 requêtes et constaté que 12 d’entre elles faisaient apparaître des violations de la Convention. Il avait encore à examiner 3 plaintes.

49.À sa quatre-vingtième session, le 6 mars 2012, le Comité a examiné la communication no 46/2009 (Dawas et Shava c.Danemark), qui concernait l’agression (accompagnée de dégâts matériels, de coups et blessures, et d’insultes) d’une famille de ressortissants iraquiens reconnus comme réfugiés au Danemark par 35 jeunes Danois. Les requérants, qui ont été blessés, insultés et ont vu endommager une partie de leurs biens lors de ces événements, ont porté plainte contre les agresseurs, qui ont fait l’objet d’une enquête policière. Les requérants se déclaraient victimes de violations par le Danemark de l’article 6 de la Convention, lu conjointement avec le paragraphe 1 a) de l’article 2, et les articles 3 et 4 de la Convention.

50.LeComité a estimé que dans des circonstances aussi graves que celles de cette affaire, où les requérants avaient été victimes, à leur domicile, d’une agression violente de la part de 35 personnes, parmi lesquelles certaines étaient armées, il existait suffisamment d’éléments pour justifier une enquête approfondie des autorités publiques sur le caractère éventuellement raciste de l’agression. Le Comité a rappelé sa jurisprudence, selon laquelle lorsque des menaces de violence sont proférées, en particulier en public et par un groupe de personnes, l’État partie a le devoir d’enquêter rapidement et avec diligence. Cette obligation est applicable a fortiori à la présente affaire, dans laquelle 35 personnes ont effectivement pris part à l’agression de la famille. Le Comité a donc conclu que l’article 6 et le paragraphe 1 d) de l’article 2 avaient été violés. Il a recommandé à l’État partie de revoir sa politique et ses procédures concernant les poursuites dans les cas d’allégation de discrimination raciale ou d’actes de violence à caractère raciste à la lumière de ses obligations au titre de l’article 4 de la Convention.

VII.Suivi des communications individuelles

51.À sa soixante-septième session, après avoir examiné la question sur la base d’un document établi par le secrétariat (CERD/C/67/FU/1), le Comité a décidé de mettre en place une procédure de suivi des opinions et recommandations adoptées à l’issue de l’examen des communications émanant de particuliers ou de groupes de particuliers.

52.À la même session, le Comité a décidé d’ajouter à son Règlement intérieur deux nouveaux paragraphes présentant cette procédure de façon détaillée. Le 6 mars 2006, à la soixante-huitième session, M. Sicilianos a été désigné Rapporteur chargé du suivi des opinions, fonction dans laquelle M. Régis de Gouttes lui a succédé à partir de la soixante-douzième session. Le Rapporteur chargé du suivi des opinions présente régulièrement au Comité un rapport assorti de recommandations sur les mesures supplémentaires à prendre. Ces recommandations, qui sont annexées au rapport annuel du Comité à l’Assemblée générale, se réfèrent à toutes les requêtes en rapport avec lesquelles le Comité a constaté des violations de la Convention ou a formulé des suggestions ou recommandations.

53.Le tableau ci-dessous donne une vue d’ensemble des réponses reçues des États parties au sujet du suivi des opinions et recommandations. Dans la mesure du possible, il indique si les réponses sont ou ont été jugées satisfaisantes ou insatisfaisantes, ou si le dialogue entre l’État partie et le Rapporteur chargé du suivi des opinions se poursuit. Le classement des réponses des États parties n’est pas toujours chose facile. En général, les réponses sont jugées satisfaisantes si elles montrent que l’État partie est désireux d’appliquer les recommandations du Comité ou d’offrir un recours approprié au plaignant. Les réponses qui ne tiennent pas compte des recommandations du Comité ou qui ne prennent en considération que certains aspects de celles-ci sont généralement considérées comme insatisfaisantes.

54.Lors de l’adoption du présent rapport, le Comité avait adopté des opinions finales sur le fond concernant 28 plaintes et constaté des violations eu égard à 12 d’entre elles. En ce qui concerne 9 d’entre elles, le Comité avait formulé des suggestions et des recommandations tout en ne constatant pas de violation de la Convention.

Renseignements reçus à ce jour sur la suite donnée aux affaires dans lesquelles le Comité a constaté des violations de la Convention ou, n’ayant pas constaté de violation, a formulé des suggestions ou des recommandations

État partie et nombre d’affaires dans lesquelles des violations ont été constatées

Numéro et auteur de la communication

Réponse de l’État partie concernant la suite donnée

Réponse satisfaisante

Réponse insatisfaisant e

Pas de réponse sur le suivi

Poursuite du dialogue sur le suivi

Danemark (6)

10/1997, Habassi

X (A/61/18)

X

16/1999, Kashif Ahmad

X (A/61/18)

X

34/2004, Mohammed Hassan Gelle

X (A/62/18)

X (A/62/18)

40/2007, Er

X (A/63/18)

X (A/63/18)

43/2008, Saada Mohamad Adan

X (A/66/18) 6 décembre 2010 28 juin 2011

X En partie satisfaisante

46/2009, Mahali Dawas et Yousef Shava

La date butoir fixée pour la réponse n’est pas encore arrivée.

Pays-Bas (2)

1/1984, A. Yilmaz-Dogan

X (le Comité n’a fait aucune demande)

4/1991, L. K.

X (le Comité n’a fait aucune demande)

Norvège (1)

30/2003, Communauté juive d’Oslo

X (A/62/18)

X

Serbie-et-Monténégro (1)

29/2003, Dragan Durmic

X (A/62/18)

X

Slovaquie (2)

13/1998, Anna Koptova

X (A/61/18, A/62/18)

X

31/2003, L. R. et al.

X (A/61/18, A/62/18)

X

Requêtes pour lesquelles le Comité n’a pas constaté de violation de la Convention mais a formulé des recommandations

État partie et nombre de requêtes concernées

Numéro et auteur de la communication

Réponse reçue de l’État partie concernant la suite donnée

Réponse satisfaisante

Réponse insatisfaisante

Pas de réponse sur le suivi

Poursuite du dialogue sur le suivi

Australie (3)

6/1995, Z. U. B. S.

X (le Comité n’a fait aucune demande)

8/1996, B. M. S.

X (le Comité n’a fait aucune demande)

26/2002, Hagan

X 28 janvier 2004

Danemark (4)

17/1999, B. J.

X (le Comité n’a fait aucune demande)

20/2000, M. B.

X (le Comité n’a fait aucune demande)

27/2002, Kamal Qiereshi

X

41/2008, Ahmed Farah Jama

X

Norvège (1)

3/1991, Narrainen

X (le Comité n’a fait aucune demande)

Slovaquie (1)

11/1998, Miroslav Lacko

X (le Comité n’a fait aucune demande)

VIII.Décision prise par l’Assemblée généraleà sa soixante-sixième session

55.Le Comité a examiné ce point de l’ordre du jour à sa quatre-vingtième session. Pour l’examen, il était saisi de la résolution 66/144 de l’Assemblée générale en date du 19 décembre 2011, dans laquelle l’Assemblée, entre autres; a) a réaffirmé que l’adhésion universelle à la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale et l’application intégrale des dispositions de cet instrument sont d’une importance primordiale pour lutter contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, et promouvoir l’égalité et la non-discrimination dans le monde; b) a constaté avec une vive préoccupation que l’objectif de la ratification universelle de la Convention n’a pas encore été atteint, en dépit des engagements pris dans la Déclaration et le Programme d’action de Durban, et a demandé aux États qui ne l’ont pas encore fait d’adhérer à la Convention de toute urgence; c) s’est déclarée préoccupée par les retards considérables pris dans la soumission des rapports qui auraient déjà dû être présentés au Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, ce qui nuit à l’efficacité de ce dernier, a engagé vivement tous les États parties à la Convention à s’acquitter de leurs obligations conventionnelles, et a réaffirmé qu’il importe de fournir aux pays qui en font la demande l’assistance technique dont ils ont besoin pour établir les rapports qu’ils présentent au Comité; d) a invité les États parties à la Convention à ratifier l’amendement à son article 8 relatif au financement du Comité et demandé que des ressources supplémentaires adéquates soient prévues au budget ordinaire de l’Organisation des Nations Unies pour permettre au Comité de s’acquitter pleinement de son mandat; e) a exhorté tous les États parties à la Convention à redoubler d’efforts pour s’acquitter des obligations auxquelles ils ont souscrit aux termes de l’article 4 de la Convention, en prenant dûment en considération les principes de la Déclaration universelle des droits de l’homme et l’article 5 de la Convention; f) a rappelé que le Comité considère que l’interdiction de diffuser des idées fondées sur la notion de supériorité raciale ou la haine raciale est compatible avec le droit à la liberté d’opinion et d’expression énoncé à l’article 19 de la Déclaration universelle des droits de l’homme et à l’article 5 de la Convention; g) a noté avec satisfaction les travaux que le Comité a menés pour combattre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée dans le cadre du suivi de la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée et les recommandations destinées à renforcer l’application de la Convention ainsi que son propre fonctionnement; h) a demandé aux États Membres de faire tout leur possible pour que les mesures qu’ils prennent face à la crise financière et économique actuelle n’entraînent pas une aggravation de la pauvreté et du sous-développement et une montée éventuelle du racisme, de la discrimination raciale, de la xénophobie et de l’intolérance qui y est associée à l’égard des étrangers, des immigrés et des personnes appartenant à des minorités nationales, ethniques, religieuses et linguistiques partout dans le monde; i) et a réaffirmé que la privation de citoyenneté en raison de la race ou de l’ascendance est considérée comme une violation des obligations des États parties d’assurer la jouissance sans discrimination du droit à la nationalité.

IX.Suivi de la Conférence mondiale contre le racisme,ladiscrimination raciale, la xénophobie et l’intolérancequiyest associée et de la Conférence d’examen de Durban

56.Le Comité a examiné la question du suivi de la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, à sa quatre-vingtième session.

57.M. Kemal a participé à la réunion de haut niveau de l’Assemblée générale pour célébrer le dixième anniversaire de l’adoption de la Déclaration et du Programme d’action de Durban, qui s’est tenue le 22 septembre 2011.

58.M. Murillo Martínez a participé au débat thématique de haut niveau organisé par le Secrétaire général le 6 décembre 2011, au Siège de l’ONU à New York, à l’occasion de la clôture de l’Année internationale 2011 des personnes d’ascendance africaine.

59.À sa 2165e séance (quatre-vingtième session), le Comité a adopté une déclaration sur sa contribution au Programme d’action de la Décennie des personnes d’ascendance africaine (voir annexe VII).

X.Débats thématiques et recommandations d’ordre général

60.En application de la résolution 64/169 de l’Assemblée générale en date du 18 décembre 2009 proclamant l’année commençant le 1erjanvier 2011 Année internationale des personnes d’ascendance africaine, le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale a tenu, à sa soixante-dix-huitième session, un débat thématique sur la discrimination raciale à l’égard des personnes d’ascendance africaine. Ont participé à ce débat des représentants d’États parties à la Convention, d’organisations internationales, dont l’UNESCO, le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés et la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes, et d’organisations non gouvernementales. Les comptes rendus analytiques des débats tenus ont été publiés sous les cotes CERD/C/SR.2080 et CERD/C/SR.2081.

61.À la même session, le Comité a décidé de s’atteler à la rédaction d’une recommandation générale sur la discrimination raciale à l’égard des personnes d’ascendance africaine, compte tenu des difficultés observées dans la réalisation des droits des personnes d’ascendance africaine lors de l’examen des rapports périodiques par le Comité et à titre de contribution à la célébration de l’Année internationale des personnes d’ascendance africaine. À sa soixante-dix-neuvième session, le Comité a adopté sa Recommandation générale no 34 (2011) sur la discrimination raciale à l’égard des personnes d’ascendance africaine.

62.À sa quatre-vingtième session, le Comité a décidé d’organiser un débat thématique sur les discours d’incitation à la haine raciale à sa quatre-vingt-unième session, qui se tiendra à Genève du 6 au 31 août 2012. Le Comité a nommé M. Diaconu et M. Thornberry Rapporteurs du débat thématique.

XI.Méthodes de travail du Comité

63.Les méthodes de travail du Comité sont fondées sur son règlement intérieur, adopté conformément à l’article 10 de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, tel que modifié, et sur la pratique établie du Comité, telle que consignée dans ses documents de travail pertinents et ses directives.

64.À sa soixante-seizième session, le Comité a débattu de ses méthodes de travail et de la nécessité d’améliorer le dialogue avec les États parties. Il a décidé que, au lieu d’envoyer une liste de points à traiter avant la session, le Rapporteur pour le pays ferait parvenir à l’État partie concerné une courte liste de thèmes en vue de guider et de structurer le dialogue entre la délégation de l’État partie et le Comité lors de l’examen du rapport de l’État partie. Cette liste de thèmes n’appelle pas de réponses écrites.

65.À sa soixante-dix-septième session, le 3 août 2010, le Comité a tenu une réunion informelle avec des représentants d’organisations non gouvernementales pour discuter des moyens de renforcer la coopération. Il a décidé de tenir des réunions informelles avec des organisations non gouvernementales au début de chaque semaine de chacune de ses sessions, lorsque des rapports d’États parties sont examinés.

66.À sa soixante-dix-septième session, le Comité a examiné ses méthodes de travail et, en particulier, les moyens de faire face à sa charge de travail croissante. Tout en notant avec satisfaction que l’augmentation de sa charge de travail s’expliquait par le plus grand nombre de rapports périodiques soumis par les États parties ainsi que par le nombre élevé (175) d’États parties à la Convention, le Comité s’est déclaré préoccupé par l’arriéré persistant de rapports en attente d’examen. Compte tenu de la résolution 63/243 de l’Assemblée générale en date du 24 décembre 2008 sur la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, qui autorise le Comité à se réunir pendant une semaine supplémentaire à chacune de ses sessions à compter d’août 2009 et jusqu’en 2011, et du grand nombre de rapports périodiques reçus récemment, le Comité, après avoir été informé des incidences financières, a décidé de demander à l’Assemblée générale d’approuver une semaine supplémentaire de temps de réunion par session à compter de 2012.

67.À sa soixante-dix-neuvième session, le 25 août 2011, le Comité a tenu sa troisième réunion informelle avec les États parties à laquelle ont participé 78 États parties, y compris les délégations basées à New York sans bureaux à Genève, grâce à une liaison vidéo. La réunion visait à tenir les États parties informés des méthodes de travail du Comité, à améliorer le dialogue entre le Comité et les États parties et à encourager les États parties à collaborer avec le Comité tout au long du cycle de présentation de rapports.

68.Le Comité apprécie que l’Assemblée générale lui ait octroyé une semaine supplémentaire de temps de réunion par session, ce qui a facilité l’examen des rapports en attente.

Annexes

Annexe I

État de la Convention

A.États parties à la Convention internationale sur l’éliminationde toutes les formes de discrimination raciale (175)à la date du 9 mars 2012a

Afghanistan, Afrique du Sud, Albanie, Algérie, Allemagne, Andorre, Antigua-et-Barbuda, Arabie saoudite, Argentine, Arménie, Australie, Autriche, Azerbaïdjan, Bahamas, Bahreïn, Bangladesh, Barbade, Bélarus, Belgique, Belize, Bénin, Bolivie (État plurinational de), Bosnie-Herzégovine, Botswana, Brésil, Bulgarie, Burkina Faso, Burundi, Cambodge, Cameroun, Canada, Cap-Vert, Chili, Chine, Chypre, Colombie, Comores, Congo, Costa Rica, Côte d’Ivoire, Croatie, Cuba, Danemark, Djibouti, Égypte, El Salvador, Émirats arabes unis, Équateur, Érythrée, Espagne, Estonie, États-Unis d’Amérique, Éthiopie, ex-République yougoslave de Macédoine, Fédération de Russie, Fidji, Finlande, France, Gabon, Gambie, Géorgie, Ghana, Grèce, Guatemala, Guinée, Guinée-Bissau, Guinée équatoriale, Guyana, Haïti, Honduras, Hongrie, Îles Salomon, Inde, Indonésie, Iran (République islamique d’), Iraq, Irlande, Islande, Israël, Italie, Jamahiriya arabe libyenne, Jamaïque, Japon, Jordanie, Kazakhstan, Kenya, Kirghizistan, Koweït, Lesotho, Lettonie, Liban, Libéria, Liechtenstein, Lituanie, Luxembourg, Madagascar, Malawi, Maldives, Mali, Malte, Maroc, Maurice, Mauritanie, Mexique, Monaco, Mongolie, Monténégro, Mozambique, Namibie, Népal, Nicaragua, Niger, Nigéria, Norvège, Nouvelle-Zélande, Oman, Ouganda, Ouzbékistan, Pakistan, Panama, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Paraguay, Pays-Bas, Pérou, Philippines, Pologne, Portugal, Qatar, République arabe syrienne, République centrafricaine, République de Corée, République démocratique du Congo, République démocratique populaire lao, République deMoldova, République dominicaine, République tchèque, République-Unie de Tanzanie, Roumanie, Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, Rwanda, Sainte-Lucie, Saint-Kitts-et-Nevis, Saint-Marin, Saint-Siège, Saint-Vincent-et-les Grenadines, Sénégal, Serbie, Seychelles, Sierra Leone, Slovaquie, Slovénie, Somalie, Soudan, Sri Lanka, Suède, Suisse, Suriname, Swaziland, Tadjikistan, Tchad, Thaïlande, Timor-Leste, Togo, Tonga, Trinité-et-Tobago, Tunisie, Turkménistan, Turquie, Ukraine, Uruguay, Venezuela (République bolivarienne du), Viet Nam, Yémen, Zambie et Zimbabwe.

B.États parties qui ont fait la déclaration prévue au paragraphe 1de l’article 14 de la Convention (54) à la date du 9 mars 2012

Afrique du Sud, Algérie, Allemagne, Andorre, Argentine, Australie, Autriche, Azerbaïdjan, Belgique, Bolivie (État plurinational de), Brésil, Bulgarie, Chili, Chypre, CostaRica, Danemark, Équateur, Espagne, Estonie, ex-République yougoslave de Macédoine, Fédération de Russie, Finlande, France, Géorgie, Hongrie, Irlande, Islande, Italie, Kazakhstan, Liechtenstein, Luxembourg, Malte, Maroc, Mexique, Monaco, Monténégro, Norvège, Pays-Bas, Pérou, Pologne, Portugal, République de Corée, République tchèque, Roumanie, Saint-Marin, Sénégal, Serbie, Slovaquie, Slovénie, Suède, Suisse, Ukraine, Uruguay et Venezuela (République bolivarienne du).

C.États parties qui ont accepté les amendements au paragraphe 6de l’article 8 de la Convention adoptés à la quatorzième réuniondes États partiesb (43) à la date du 9 mars 2012

Allemagne, Arabie saoudite, Australie, Bahamas, Belize, Bahreïn, Bulgarie, Burkina Faso, Canada, Chine, Chypre, Colombie, Costa Rica, Cuba, Danemark, Équateur, Finlande, France, Guinée, Iran (République islamique d’), Iraq, Irlande, Islande, Libéria, Liechtenstein, Luxembourg, Mexique, Nouvelle-Zélande, Norvège, Pays-Bas (également Antilles néerlandaises et Aruba), Pologne, République arabe syrienne, République de Corée, République tchèque, Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, Saint-Siège, Seychelles, Slovaquie, Suède, Suisse, Trinité-et-Tobago, Ukraine, Zimbabwe.

Annexe II

Ordre du jour de la quatre-vingtième session(13 février-9 mars 2012)

1.Engagement solennel des membres nouvellement élus du Comité conformément à l’article 14 du Règlement intérieur.

2.Élection du Bureau, conformément à l’article 15 du Règlement intérieur.

3.Adoption de l’ordre du jour.

4.Questions d’organisation et questions diverses.

5.Prévention de la discrimination raciale, y compris les mesures d’alerte rapide et la procédure d’action urgente.

6.Examen des rapports, observations et renseignements présentés par les États parties conformément à l’article 9 de la Convention.

7.Présentation de rapports par les États parties conformément au paragraphe 1 de l’article 9 de la Convention.

8.Examen des communications présentées conformément à l’article 14 de la Convention.

9.Procédure de suivi.

10.Suivi de la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée.

11.Procédure d’examen périodique universel du Conseil des droits de l’homme.

12.Rapport du Comité à l’Assemblée générale à sa soixante-septième session.

Annexe III

Opinion adoptée par le Comité en application de l’article 14 de la Convention à la quatre-vingtième session

concernant la

Communication no46/2009

Présentée pa r:

Mahali Dawas et Yousef Shava (représentéspar un conseil)

Au nom de:

Les auteurs

État partie:

Danemark

Date de la communicatio n:

16 juin 2009 (date de la lettre initiale)

Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, créé en vertu de l’article 8 de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale,

Réuni le 6 mars 2012,

Ayant achevé l’examen de la communication no 46/2009 présentée au Comité pour l’élimination de la discrimination raciale par Mahali Dawas et Yousef Shava en application de l’article 14 de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale,

Ayant tenu compte de toutes les informations qui lui ont été communiquées par les auteurs de la communication, leur conseil et l’État partie,

Adopte ce qui suit:

Opinion

1.1Les auteurs sont Mahali Dawas et Yousef Shava, citoyens iraquiens ayant obtenu le statut de réfugié au Danemark et respectivement nés en 1959 et 1985. M. Dawas a huit enfants, dont M. Shava, l’autre auteur de la communication. Ils affirment être victimes de violations par le Danemark du paragraphe 1 d) de l’article 2, de l’article 3, de l’article 4 et de l’article 6 de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale. Ils sont représentés par un conseil, Niels Erik Hansen.

1.2Conformément au paragraphe 6 a) de l’article 14 de la Convention, le Comité a transmis la communication à l’État partie le 21 décembre 2009.

Rappel des faits présenté par les auteurs

2.1Dans la soirée du 21 juin 2004, un groupe de 15 à 20 jeunes ont agressé les auteurs à leur domicile, dans la ville de Sorø. Des fenêtres ont été cassées et la porte d’entrée de l’immeuble a été endommagée. L’un des intrus a réussi à pénétrer au domicile des deux auteurs, qui ont été violentés et frappés. À l’extérieur, d’autres agresseurs ont crié «Rentrez chez vous!»a et proféré des insultes. Après cette agression, la famille et ses huit enfants ont dû quitter leur domicile et demander à être relogés ailleurs par la municipalité.

2.2Une enquête de police a été effectuée et une procédure pénale engagée auprès du tribunal de district de Sorø. Le 26 janvier 2005, le tribunal a condamné quatre personnes pour violence, vandalisme et détention illégale d’armes. Toutefois, seules de petites peines d’emprisonnement avec sursis ont été prononcées, aucune indemnisation n’a été accordée aux victimes et le caractère possiblement raciste de l’agression n’a pas été pris en compte.

2.3Les auteurs ont intenté ensuite une procédure civile pour préjudice moral en faisant valoir la motivation raciste de l’infraction comme circonstance aggravante. Parmi d’autres éléments, ils ont insisté sur le fait qu’un panneau «Interdit aux Noirs» avait été posé près de leur domicile peu avant les faits. D’après leur témoignage, l’un des agresseurs avait téléphoné à un autre avant l’incident, lui demandant de le rejoindre parce qu’il «avait des problèmes avec des perkere»b.

2.4Le 11 septembre 2007, le tribunal de district de Naestved a rendu sa décision et estimé qu’aucun élément de preuve ne permettait d’établir le caractère raciste de l’agression contre les auteurs. Le tribunal considérait en outre que le degré de violence et de dommages subis n’était pas suffisant pour établir une violation de la loi sur la responsabilité civile.

2.5Le 3 octobre 2008, la Haute Cour du Danemark oriental a confirmé le jugement du tribunal de district de Naestved, et les auteurs ont été condamnés à s’acquitter des frais de justice d’un montant de 20 000 couronnes danoises (DKr)c. Le 12 décembre 2008, l’autorisation leur a été refusée de former un recours auprès de la Cour suprême danoise. Les auteurs affirment en conséquence avoir épuisé les recours internes.

Teneur de la plainte

3.1Les auteurs affirment qu’en n’enquêtant pas sur le caractère raciste de l’agression dont ils ont été victimes et en ne leur offrant pas un recours légal utile pour les violations subies, l’État partie les a privés de leur droit d’obtenir réparation pour les souffrances et les humiliations subies, en violation de l’article 6 de la Convention, lu conjointement avec le paragraphe 1 d) de l’article 2d.

3.2Ils font aussi valoir que l’agression violente et les actes de vandalisme dont ils ont été victimes, ainsi que leur motivation raciste et leur objectif (obliger la famille à partir et à s’installer ailleurs) équivalent à une violation par l’État partie de l’article 3 et de l’article 4 de la Convention.

Observations de l’État partie sur la recevabilité et sur le fond

4.1Le 22 mars 2010, l’État partie a présenté ses observations sur la recevabilité et sur le fond de la communication. Il fait valoir que les auteurs n’ont pas démontré, aux fins de la recevabilité, qu’il y avait matière à plainte. Subsidiairement, il considère que les allégations des auteurs sont dénuées de fondement et qu’elles doivent être rejetées au fond.

4.2Concernant les faits, l’État partie rappelle que la police a été appelée à se rendre au domicile des auteurs le 21 juin 2004, après que ceux-ci ont signalé qu’un groupe de jeunes s’étaient réunis devant chez eux et faisaient preuve d’un comportement agressif. Lorsque la police est arrivée au domicile des auteurs, le groupe était déjà partie. La police a procédé à une enquête préliminaire et a ouvert, le jour suivant, une enquête approfondie. Elle a rencontré M. Shava à son domicile le 22 juin 2004 et a pu constater que des vitres avaient été brisées sur la façade avant de l’immeuble et sur la porte d’entrée. La police a interrogé des témoins et les victimes, dont M. Shava, qui a signalé qu’un groupe de jeunes danois avait fait irruption dans le hall d’entrée, qu’un énorme pot de fleurs avait été jeté et avait atterri sur la jambe de son père et qu’il avait lui-même reçu un coup de poing au visage et avait été frappé au bras droit avec une sorte de batte. Le groupe d’agresseurs prétendait qu’un membre de la famille des auteurs leur avait volé un collier et que les plus jeunes membres de la famille avaient abîmé un casque de moto appartenant à l’un des membres du groupe. D’après les auteurs, toutes ces allégations étaient fausses.

4.3La police a interrogé un certain nombre de témoins, notamment O. R., qui a déclaré le 23 juin 2004 qu’il était ami avec les auteurs et que ceux-ci l’avaient appelé au secours pendant l’incident car il parlait danois et pourrait les aider. Un des jeunes a dit à O. R. que les auteurs lui avaient volé un collier et avaient abîmé son casque de moto. O. R. a demandé au groupe d’attendre l’arrivée de la police mais ils ont refusé, prétendant qu’ils voulaient régler eux-mêmes le problème et en découdre avec la famille. O. R. a alors demandé à la famille d’appeler la police. D’après O. R., lorsqu’ils ont appelé la police la première fois, la communication a été coupée car la police ne souhaitait pas parler à M. Shava. Lorsque O. R. a appelé lui-même une seconde fois, il a eu le sentiment que la police n’était pas intéressée par l’affaire. Alors que O. R. parlait à la police, le groupe de jeunes a tenté de pénétrer au domicile des auteurs. O. R. a demandé à la police d’envoyer une patrouille. Après avoir raccroché, les agresseurs lui ont dit qu’ils allaient se servir dans les affaires des auteurs afin de compenser la perte de leurs biens ou bien de l’argent pouvait leur être donné à titre d’indemnisation. Le groupe a aussi déclaré que la famille vivait dans cet immeuble gratuitement et qu’elle bénéficiait d’aide sans rien donner en échange.

4.4M. Dawas a réaffirmé le 25 juin 2004 que sa famille vivait sur le lieu de l’incident depuis plus d’un an et qu’elle avait eu plusieurs problèmes avec deux jeunes voisins danois, notamment R. L., qui vivait à l’autre bout de l’immeublef. La famille n’avait jamais eu de confrontation avec ces personnes mais avait demandé l’aide de la municipalité de Sorø, qui avait contacté les voisins. La situation s’était améliorée les jours suivants mais des problèmes s’étaient à nouveau posésg. M. Shava, également interrogé par la police, a indiqué qu’à la suite de la plainte déposée par sa famille auprès des autorités locales, un panneau «Interdit aux Noirs» avait été placé sur les portes des deux voisins. L’État partie précise aussi que l’un des suspects, K. B., après avoir été interrogé par la police, avait affirmé que le jour des faits, il avait parlé à R. L. et que celui-ci lui avait dit qu’il avait des «problèmes avec des perkere». R. L. lui avait demandé de le rejoindre pour se rendre au domicile des auteurs avec l’un de ses amis. Une personne s’était approchée des victimes et leur avait demandé de rendre les objets volés ou de leur donner de l’argent. L’ami de R. L. avait déclaré qu’ils étaient danois et que c’était eux qui commandaient, que les victimes n’avaient rien à dire et qu’elles avaient été «expulsées» de leur pays d’origine.

4.5D’après l’État partie, la violence du groupe a atteint son paroxysme quand ils ont découvert que la sœur de M. Shava avait filmé l’incident avec une caméra vidéo depuis une lucarne du toit. D’autres personnes ont rejoint le groupe, qui a rassemblé plus de 35 individus à un moment donné. Le groupe exigeait qu’on lui donne la cassette vidéo et a réussi à pénétrer dans le hall de l’immeuble. R. L. a saisi un pot de fleurs et l’a jeté sur M. Dawas. Un autre homme a frappé M. Shava au visage et à la poitrine avec le poing puis lui a frappé le bras droit avec une batte qu’il avait sur lui. Les agresseurs sont sortis de l’immeuble, laissant M. Dawas presque inconscient sur le sol. Le groupe est resté devant l’immeuble et a brisé le double vitrage d’une fenêtre de la porte d’entrée et de trois autres fenêtres en hurlant. Il a fini par quitter les lieux, laissant la famille dans un état de choc et de terreur. La police est arrivée quelque vingt minutes plus tard, et a interrogé plusieurs témoins et les victimes.

4.6En ce qui concerne les conclusions objectives, l’État partie signale que d’après le certificat médical établi par le médecin compétent, M. Shava présentait un hématome de la taille d’une amande à l’extérieur de l’arcade sourcilière gauche et une petite enflure au niveau du cinquième métacarpe, et souffrait de douleurs indirectement liées à l’examen médical. Le certificat médical établi pour M. Dawas indiquait qu’il était très anxieux et en état de choc. Légèrement enflée, sa cheville gauche lui faisait mal et présentait deux lésions. M. Dawas souffrait aussi de maux d’estomac, pour lesquels il avait déjà été soigné, mais son état avait pu empirer après l’incident.

4.7Le 30 juillet 2004 a été adressée au tribunal de district de Sorø une demande de comparution de quatre suspectsh accusés de violence en groupe, en vertu de l’article 245 1) du Code pénali, et d’effraction de domicile en vertu de l’article 264 1) i) du Code pénalj. Les défendeurs K. B. et R. H. étaient aussi accusés de violation de l’article 291 1) du Code pénal pour avoir prétendument brisé les vitres du domicile des auteursk.

4.8Le 20 août 2004, le Centre de documentation et d’orientation sur la discrimination racialel a écrit à la police de Ringsted au nom des auteurs pour lui demander de tenir compte de la motivation possiblement raciste des agresseurs. Le Centre a aussi demandé à la police si le Service danois de la sécurité et du renseignement avait été informé de l’incidentm. Le 25 août 2004, le parquet a informé le Centre que la police avait enquêté sur l’incident en se fondant sur les déclarations recueillies, et que le tribunal pourrait invoquer l’article 81 1) vi) du Code pénaln si les faits montraient que les agresseurs avaient agi pour des motifs raciaux. Le parquet a aussi indiqué au Centre que l’incident serait signalé au Service de la sécurité et du renseignement. Le 15 septembre 2004, une nouvelle demande de comparution a été adressée au tribunal, dans laquelle le défendeur K. B. était aussi accusé d’avoir enfreint le décret exécutif sur les armes et les munitions parce qu’il détenait une batte en bois.

4.9Le 21 septembre 2004, une première audience s’est tenue, au cours de laquelle l’enregistrement vidéo de l’incident a été diffusé, et les suspects ont fait les mêmes déclarations que celles initialement faites à la police. Le 1er novembre 2004, le parquet a demandé au conseil si l’affaire pouvait être jugée selon une procédure simplifiée. Le 2 novembre 2004, le parquet a demandé au tribunal de fixer une nouvelle date d’audience pour que l’affaire soit jugée selon une procédure simplifiée, étant donné que les accusés plaidaient coupables, et de requalifier les chefs d’accusation pour invoquer une violation de l’article 244 du Code pénal au lieu de l’article 245 1)o. Dans une décision du 26 janvier 2005, le tribunal de district de Sorø a reconnu coupables les quatre accusés compte tenu de leurs aveux de culpabilitép. Tous les accusés ont été condamnés à cinquante jours de prison. Étant donné leur jeune âge et leur situation personnelleq, le tribunal a jugé opportun d’accorder le sursis, à condition que les reconnus coupables n’enfreignent aucune loi pendant une période d’un an, et a accepté qu’ils soient placés sous la supervision des autorités locales en ce qui concerne K. B., R. H. et M. N., et du Service de l’administration pénitentiaire et de la probation en ce qui concerne R. L.

4.10Le 26 janvier 2005, les auteurs ont demandé 57 000 DKr de dommages et intérêts aux accusésr, montant correspondant au prêt contracté par la famille afin de couvrir les frais de déménagement et pouvoir changer de municipalité après l’incident de juin 2004. Les auteurs ont aussi réclamé à deux accusés un montant de 15 000 DKr en faveur de M. Dawas et à l’un des accusés un montant de 15 000 DKr en faveur de M. Shava. Selon l’État partie, le dossier du tribunal ne contient aucune pièce indiquant qu’il a été fait droit à la demande de dommages et intérêts, et le jugement ne fait aucune référence au paiement de dommages et intérêts aux auteurs, ce qui donne à penser que le tribunal a renvoyé l’affaire au civil.

4.11L’État partie indique en outre au Comité que, dans un courrier reçu par la Commission d’indemnisation des victimes d’infractions pénales le 21 février 2005, les auteurs ont demandé à être indemnisés pour les souffrances résultant de l’incident du 21 juin 2004. Dans une lettre du 2 février 2006 adressée au conseil, la Commission d’indemnisation a demandé des preuves médicales qui étaieraient la demande des auteurs, conformément à l’article 3 de la loi sur la responsabilité pour dommages, qui dispose qu’une personne blessée n’a droit à réparation que si elle a fait l’objet d’un traitement médical. D’après l’État partie, le conseil n’a pas répondu à la demande de la Commission d’indemnisation.

4.12Le 23 mai 2006, les auteurs ont engagé une procédure civile auprès du tribunal de district de Naestved pour obtenir des quatre accusés le paiement de 30 000 DKr à chacun des auteurs à titre d’indemnisation pour dommages non pécuniaires. À l’appui de leur demande, les auteurs ont fait valoir qu’ils avaient subi des souffrances physiques et psychologiques à la suite de l’agression du 21 juin 2004. L’état de santé de M. Dawas, qui souffrait déjà de traumatismes liés à la persécution politique dont il avait été victime en Iraq, s’était encore détérioré depuis l’agression. Son épouse était atteinte de dépression depuis l’incident. Les autorités locales de Sorø avaient certes autorisé la famille à déménager dans une autre municipalité, mais celle-ci avait dû s’acquitter de tous les frais liés au déménagement. D’après l’État partie, dans leur action au civil, les auteurs ont invoqué la loi sur la responsabilité pour dommagess, lue à la lumière des articles 4 et 6 de la Convention, compte tenu du caractère raciste des actes, qu’ils ont jugé très offensants et préjudiciables à leur réputation. Les preuves fournies par les accusés correspondent à ce qu’ils ont déclaré à la police et lors du procès. Les auteurs ont fait à nouveau valoir qu’un panneau à connotation raciste avait été placé sur les portes des deux accusés, que l’un des accusés avait déclaré que les auteurs ne devaient pas venir au Danemark pour «prendre des emplois», et que les membres du groupe parlaient d’eux avec mépris et les désignaient comme des «Pakis» (Pakistanais), d’une manière préjudiciable à leur réputation, sans parler de l’agression physique subie.

4.13Le 11 septembre 2007, le tribunal de district de Naestved a rejeté la demande des auteurs au motif qu’ils n’avaient pas fourni la preuve que l’agression commise avait une motivation raciale ou était expressément liée à des motifs de race, de nationalité ou d’origine ethnique. Le tribunal a aussi considéré que si les actes avaient causé beaucoup d’anxiété et d’insécurité, il n’y avait eu aucune violation des droits des auteurs ouvrant droit à indemnisation pour dommages non pécuniaires en vertu de la loi sur la responsabilité pour dommages. La décision, examinée en appel par la Haute Cour du Danemark oriental, a été confirmée le 3 octobre 2008. Le 16 décembre 2008, la Commission des requêtes n’a pas autorisé les auteurs à faire appel de la décision en troisième instance.

4.14En ce qui concerne les griefs présentés par les auteurs au Comité, l’État partie fait valoir que la communication doit être déclarée irrecevable car les auteurs n’ont pas démontré qu’il y avait matière à plainte aux fins de la recevabilité en vertu de l’article 14 de la Conventiont. Pour qu’elle relève du champ d’application de la Convention, l’agression commise le 21 juin 2004 devrait constituer un acte de discrimination raciale à l’égard des auteurs. De l’avis de l’État partie, opinion également partagée par les juridictions nationales, rien ne prouve que l’agression ait une motivation raciale et il n’est pas du ressort du Comité d’examiner comment des organes judiciaires indépendants et compétents interprètent et utilisent la législation danoiseu. L’État partie ajoute que dans toutes les déclarations des témoins à la police et durant le procès, y compris dans les déclarations des auteurs, il n’est jamais fait mention de l’origine ethnique de ceux-ci comme motif de l’agression, et que les tribunaux ont estimé qu’il n’avait pas été établi que le voisin était celui qui avait placardé le panneau «Interdit aux Noirs». Par exemple, d’après sa déclaration à la police, M. Shava pensait que les agresseurs s’étaient ainsi comportés parce que sa famille s’était plainte aux autorités locales du bruit qu’ils faisaient. Il ressort aussi de la quasi-totalité des déclarations que les agresseurs accusaient la famille d’avoir volé un collier et abîmé un casque de moto. Les agresseurs sont devenus plus agressifs lorsqu’ils se sont rendu compte qu’un membre de la famille des auteurs avait enregistré l’incident par vidéo. L’État partie indique aussi que le fait que la police ait transmis l’affaire au Service de la sécurité et du renseignement, conformément au mémorandum sur la notification des infractions pénales pouvant avoir une motivation raciale ou religieuse, ne prouve pas que l’agression ait eu une motivation raciale car le mémorandum avait uniquement trait à la notification des infractions pénales pouvant avoir une motivation raciale ou religieuse. Par conséquent, lors du procès, on avait estimé que les conditions n’étaient pas réunies pour invoquer l’article 81 1) vi) du Code pénal aux fins de la détermination de la peine. L’État partie estime qu’il n’y a aucune raison de contester ces conclusions, qui ont été confirmées par la suite lors de la procédure civile intentée par les auteurs. Pour ces raisons, l’État partie réaffirme que la communication devrait être déclarée irrecevable en vertu de l’article 14 de la Convention et de l’article 91 du règlement du Comité, les auteurs n’ayant pas démontré qu’il y avait matière à plainte.

4.15L’État partie rejette l’opinion des auteurs selon laquelle l’agression doit être considérée comme relevant de «la ségrégation raciale et de l’apartheid» visée à l’article 3 de la Convention. L’allégation des auteurs selon laquelle ils ont été agressés dans le but de leur faire quitter le quartier n’a été étayée d’aucune façon par les faits. L’État partie fait aussi valoir que les auteurs n’ont pas invoqué l’article 3 de la Convention devant les juridictions nationales et qu’ils n’ont donc pas épuisé les recours internes en la matière.

4.16L’État partie rejette aussi les griefs des auteurs au titre de l’article 4 de la Convention, qu’il juge irrecevables faute d’être étayés.

4.17À titre subsidiaire, sur le fond, l’État partie estime qu’il n’y a pas eu violation de la Convention car les auteurs ont eu accès à un recours utile conformément à l’article 6 de la Convention. Tant la police que les instances judiciaires se sont occupées avec diligence et efficacité de l’infraction d’agression violente contre les auteurs. Le fait que l’action civile intentée par les auteurs n’ait pas abouti au résultat escompté, à savoir l’obtention d’une indemnisation, n’est pas pertinent dans la mesure où la Convention ne garantit aucun résultat concret dans les cas d’allégation de discrimination raciale. Juste après le signalement de l’incident par les auteurs le 21 juin 2004, la police a ouvert une enquête et interrogé des témoins, et conclu que l’on ne pouvait en déduire que l’agression avait une motivation raciale. Les agresseurs ont été jugés et condamnés chacun à cinquante jours de prison avec sursis. En conséquence, l’État partie réaffirme que la façon dont les autorités publiques, la police comme les tribunaux, ont géré l’affaire satisfait aux exigences du paragraphe 1 d) de l’article 2 et de l’article 6 de la Convention.

Commentaires des auteurs sur les observations de l’État partie

5.1Le 31 mai 2010, les auteurs ont contesté l’affirmation de l’État partie selon laquelle l’agression n’avait aucune motivation raciale. Ils ont rappelé qu’un panneau «Interdit aux Noirs» avait été placardé près de leur domicile, que le groupe avait crié «Rentrez chez vous!» et que l’un des voisins avait dit, lors d’une conversation téléphonique avec un autre agresseur avant l’incident, qu’il avait «des problèmes avec des perkere». Selon les auteurs, la police a clairement compris, à partir des déclarations des témoins et des lettres reçues du conseil des auteurs, que l’agression avait une motivation racialev. D’ailleurs, la police a signalé l’incident au Service de la sécurité et du renseignement en tant qu’infraction pouvant avoir une motivation raciale. Les auteurs rejettent aussi l’argument de l’État partie selon lequel l’incident a été notifié au même titre que «toutes infractions pénales pouvant avoir une motivation raciale ou religieuse»w et évoquent une affaire d’homicide datant de 2008, dans laquelle des jeunes Danois ont agressé un étrangerx et l’Inspecteur en chef de la police de Copenhague a expressément rejeté l’idée que cet homicide avait une motivation raciale et religieuse, refusant ainsi de signaler l’incident au Service de la sécurité et du renseignement. En conséquence, les auteurs soutiennent qu’en l’espèce, il ne fait aucun doute que la police était consciente du caractère raciste de l’infraction mais n’avait pourtant pas mené l’enquête qui s’imposait sur un crime haineux, en violation des articles 2, 3, 4 et 6 de la Convention.

5.2S’agissant de l’affirmation de l’État partie selon laquelle les auteurs n’ont pas épuisé les recours internes parce qu’ils n’ont pas invoqué l’article 3 de la Convention devant les tribunaux nationaux, les auteurs affirment qu’ils n’ont pas eu la possibilité d’invoquer la Convention durant la procédure pénale.

5.3D’après les auteurs, les autorités publiques souhaitaient que l’affaire soit réglée rapidement, et ont opté pour une procédure accélérée en se fondant sur les «aveux de culpabilité» des accusés. La police a tardé à se rendre sur le lieu de l’infraction et n’est arrivée qu’une fois l’agression terminée, et elle n’a donc pas pu protéger la famille. Parmi les 35 agresseurs, seuls quatre suspects ont été interrogés et accusés d’avoir participé à l’agression raciste. Le procureur n’a posé aucune question aux agresseurs qui aurait permis de reconnaître le caractère raciste de leurs actes et n’a cherché qu’à leur faire avouer les actes de violence et de vandalisme et la détention illégale d’armes.

5.4Les auteurs soulignent aussi que la procédure pénale s’est déroulée en leur absence et qu’ils n’ont donc pas pu témoigner devant le tribunal de district de Sorø. La procédure civile engagée par la suite devant le tribunal de district de Naestved n’a pas permis de satisfaire leurs demandes. En outre, un certain nombre de témoins et d’accusés, tels que K. B., n’ont pas comparu devant le tribunal de district de Naestved ni devant la Haute Cour du Danemark oriental en appel. Il n’a donc pas été possible de l’interroger sur les conversations téléphoniques qu’il avait eues avant l’agressiony. Les auteurs contestent donc l’affirmation de l’État partie selon laquelle les éléments de preuve présentés lors du procès par les accusés correspondaient aux déclarations qu’ils avaient faites à la policez étant donné que l’un des accusés n’était pas présent au procès. D’après les auteurs, en pareilles circonstances, le tribunal de district de Naestved aurait dû se prononcer en leur faveur.

5.5Concernant l’argument de l’État partie selon lequel les auteurs n’ont pas soumis correctement leur demande à la Commission d’indemnisation des victimes d’infractions pénalesaa, les auteurs indiquent que cette procédure était superflue étant donné qu’ils auraient dû invoquer une décision judiciaire au pénal ou au civil en leur faveur pour pouvoir présenter une demande valable de dédommagement. Les auteurs ayant été déboutés au pénal et au civil, la Commission d’indemnisation ne pouvait leur offrir réparation.

5.6En conclusion, les auteurs réaffirment qu’en l’espèce, l’État partie a violé l’article 6, lu conjointement avec le paragraphe 1 d) de l’article 2 ainsi qu’avec les articles 3 et 4 de la Conventionbb. Ils réaffirment qu’ils ont été privés d’un recours utile contre les actes de violence raciste dont ils ont été victimes, y compris de leur droit d’obtenir réparation et satisfaction pour les dommages causés par la discrimination subie, indépendamment de la sanction imposée aux agresseurscc.

Délibérations du Comité

Examen de la recevabilité

6.1Avant d’examiner toute plainte soumise dans une communication, le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale détermine, en application du paragraphe 7 a) de l’article 14 de la Convention, si la communication est recevable.

6.2Le Comité observe tout d’abord que les auteurs n’ont pas étayé, aux fins de la recevabilité, leur allégation selon laquelle l’intention des agresseurs de les faire partir de la municipalité pouvait être qualifiée d’acte de ségrégation raciale ou d’apartheid au sens de l’article 3 de la Convention. Par conséquent, cette partie de la communication est irrecevable en vertu du paragraphe 1 de l’article 14 de la Convention. Étant parvenu à cette conclusion, le Comité n’a pas besoin d’examiner l’allégation de l’État partie selon laquelle les auteurs n’ont pas épuisé les recours internes dans la mesure où ils n’ont pas invoqué l’article 3 de la Convention devant les juridictions nationales.

6.3Le Comité prend note de l’argument de l’État partie selon lequel les auteurs n’ont pas démontré, aux fins de la recevabilité, qu’il y avait matière à plainte, étant donné que l’agression ne peut être qualifiée d’acte de discrimination raciale au sens de la Convention. Le Comité estime toutefois que la question de savoir si l’agression a constitué ou a entraîné un acte de discrimination à l’égard des auteurs, en raison de leur origine nationale ou de leur appartenance ethnique, et, si tel était le cas, de savoir s’ils ont eu accès à un recours utile, a trait à l’essence même de la communication et doit donc être examinée au fond. En conséquence, le Comité considère que les auteurs ont suffisamment étayé leurs griefs de violation du paragraphe 1 d) de l’article 2 ainsi que des articles 4 et 6 de la Convention aux fins de la recevabilité, et procède à leur examen quant au fond, en l’absence d’autres objections concernant la recevabilité de la communication.

Examen au fond

7.1Agissant en vertu du paragraphe 7 a) de l’article 14 de la Convention, le Comité a examiné les informations soumises par les auteurs et par l’État partie.

7.2La question qui se pose au Comité est de savoir si l’État partie s’est acquitté de son obligation d’enquêter en bonne et due forme sur l’agression dont les auteurs ont été victimes le 21 juin 2004 et de poursuivre les responsables, compte tenu également de son obligation, en vertu de l’article 2 de la Convention, de prendre des mesures efficaces contre les incidents signalés de discrimination raciale. Le Comité rappelle que ce n’est pas son rôle d’examiner la manière dont les juridictions internes interprètent les faits et la législation nationale, à moins que les décisions aient été manifestement arbitraires ou aient constitué un déni de justicedd. En l’espèce, le Comité constate qu’à la suite de l’enquête menée par la police, le parquet a demandé que les quatre suspects soient jugés selon une procédure accélérée, en se fondant sur les aveux de culpabilité des accusés, et a décidé de requalifier les chefs d’accusation pour ne plus invoquer une violation de l’article 245 l), qui pénalise les actes d’agression particulièrement sauvage, brutale ou dangereuse passibles d’une peine maximale d’emprisonnement de six ans, mais une violation de l’article 244 du Code pénal, qui pénalise les actes de violence en général et prévoit une peine plus clémente pouvant aller jusqu’à trois ans d’emprisonnement. Les accusés ont finalement été condamnés à cinquante jours de prison (avec sursis). Le Comité constate qu’en raison de la procédure accélérée et de la requalification des chefs d’accusation le caractère éventuellement raciste de l’infraction avait déjà été écarté au stade de l’enquête pénale et n’a pas été examiné lors du procès. Le Comité observe en outre que le 11 septembre 2007, le tribunal de district de Naestved a rejeté la demande d’indemnisation des auteurs pour préjudice moral, au motif qu’ils n’avaient pas suffisamment fourni la preuve que l’agression commise avait une motivation raciale ou était expressément liée à des motifs de race, de nationalité ou d’origine ethnique.

7.3Le Comité observe que nul ne conteste que 35 agresseurs ont lancé une attaque contre le domicile des auteurs le 21 juin 2004, et que ceux-ci ont été à plusieurs reprises victimes d’insultes à caractère raciste dans le contexte ou non de leur agression. Nul ne conteste non plus que la police a signalé l’incident au Service de la sécurité et du renseignement en application du mémorandum sur la notification des infractions pénales pouvant avoir une motivation raciale ou religieuse. Le Comité note que l’État partie n’a fourni aucune information sur le résultat de cette notification, ce qui aurait permis en particulier de savoir si une enquête avait été menée pour déterminer si l’agression constituait une incitation à la discrimination raciale ou un acte de cette nature.

7.4Le Comité estime que dans des circonstances aussi graves que celles de la présente affaire, où les auteurs ont été victimes, à leur domicile, d’une agression violente de la part de 35 personnes, parmi lesquelles certaines étaient armées, il existait suffisamment d’éléments pour justifier une enquête approfondie des autorités publiques sur le caractère éventuellement raciste de l’agression. Or, cette possibilité a été écartée au stade de l’enquête pénale et la question n’a pu être examinée lors du procès. Le Comité estime que l’État partie était tenu de procéder à une enquête pénale efficace, au lieu de transférer la charge de la preuve aux auteurs dans le cadre d’une procédure civile. Le Comité rappelle sa jurisprudence, selon laquelle lorsque des menaces de violence sont proférées, en particulier en public et par un groupe de personnes, l’État partie a le devoir d’enquêter rapidement et avec diligenceee. Cette obligation est applicable a fortiori à la présente affaire, dans laquelle 35 personnes ont effectivement pris part à l’agression de la famille.

7.5Si, compte tenu des informations dont il dispose et étant donné que les faits sont contestés entre les parties, le Comité ne peut conclure qu’il y a eu une violation distincte de l’article 4 a) de la Convention, il est d’avis que l’enquête menée a été incomplète. Étant donné que les auteurs n’ont pas été efficacement protégés contre un acte allégué de discrimination raciale, et qu’aucune enquête en bonne et due forme n’a été menée, ce qui a privé les auteurs de leur droit à une protection efficace et à des recours utiles contre l’acte de discrimination raciale dénoncé, le Comité conclut que l’article 6 et le paragraphe 1 d) de l’article 2 ont été violés.

8.Dans les circonstances de l’espèce et compte tenu de sa Recommandation générale XXXI (2005) sur la discrimination raciale dans l’administration et le fonctionnement du système de justice pénaleff, le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, agissant en vertu du paragraphe 7 a) de l’article 14 de la Convention, estime que les faits dont il est saisi font apparaître une violation du paragraphe 1 d) de l’article 2 et de l’article 6 de la Convention par l’État partie.

9.Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale recommande à l’État partie d’octroyer aux auteurs une indemnisation adéquate pour le préjudice matériel et moral causé par la violation susmentionnée de la Convention.

10.Le Comité recommande en outre à l’État partie de revoir sa politique et ses procédures concernant les poursuites dans les cas d’allégation de discrimination raciale ou d’actes de violence à caractère raciste à la lumière de ses obligations au titre de l’article 4 de la Conventiongg. L’État partie est également prié de diffuser largement l’opinion du Comité, y compris auprès des procureurs et des organes judiciaires.

11.Le Comité souhaite recevoir de l’État partie, dans un délai de quatre-vingt-dix jours, des renseignements sur les mesures qu’il aura prises pour donner effet à la présente opinion.

[Adopté en anglais (version originale), en espagnol, en français et en russe. Paraîtra ultérieurement en arabe et en chinois dans le rapport annuel du Comité à l’Assemblée générale.]

Annexe IV

Renseignements sur la suite donnée aux communications pour lesquelles le Comité a adopté des recommandations

On trouvera dans la présente annexe une synthèse des renseignements reçus par le Comité sur la suite donnée aux communications individuelles depuis le dernier rapport annuel, ainsi que les décisions prises par le Comité concernant la nature de ces réponses.

É tat partie :

Danemark

Affaire :

Saada Mohamed Adan, 43/2008

Date d ’ adoption de l ’ opinion :

13 août 2010

Questions soulevées et violations constatées :

Absence d’enquête effective pour déterminer si la requérante a été victime d’une discrimination fondée sur la race: violation du paragraphe 1 d) de l’article 2 et de l’article 4 de la Convention. L’absence d’enquête effective sur la plainte déposée par la requérante en vertu de l’article 266 b) du Code pénal constitue une violation distincte de ses droits en vertu de l’article 6 de la Convention.

Réparation recommandée :

Le Comité a recommandé à l’État partie d’octroyer à la requérante une indemnisation adéquate pour le dommage moral causé par lesdites violations de la Convention. Le Comité a rappelé sa Recommandation générale no30, dans laquelle il engage les États parties à prendre «des mesures énergiques pour combattre toute tendance à viser, stigmatiser, stéréotyper ou caractériser par leur profil les membres de groupes de population “non ressortissants” sur la base de la race, la couleur, l’ascendance et l’origine nationale ou ethnique, en particulier de la part des responsables politiques […]». Tenant compte de la loi du 16 mars 2004 qui a introduit, entre autres, une nouvelle disposition à l’article 81 du Code pénal faisant de la motivation raciale une circonstance aggravante, le Comité a recommandé à l’État partie de veiller à ce que la législation existante soit appliquée efficacement de façon à éviter que des violations analogues ne se reproduisent dans l’avenir. L’État partie a également été prié de diffuser largement l’opinion du Comité, y compris auprès des procureurs et des instances judiciaires.

Date de l ’ examen du ( des) rapport(s) depuis l ’ adoption :

Le Comité a examiné les dix-huitième et dix-neuvième rapports périodiques du Danemark en août 2010; ses vingtième et vingt et unième rapports sont attendus en 2013.

Date limite pour la réponse de l ’ État partie :

25 février 2011

Date de la réponse :

13 décembre 2010, 27 juin 2011

Observations de l ’É tat partie :

L’État partie informe le Comité que, premièrement, le Gouvernement a considéré qu’il était justifié d’indemniser l’auteur d’une communication pour les frais raisonnablement engagés afin d’obtenir une aide judiciaire. La loi no940, de décembre 1999, relative à l’aide judiciaire dont peuvent bénéficier les auteurs de plaintes formées auprès d’organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme prévoit que l’aide judiciaire couvre les frais équitablement encourus par les requérants lorsque l’organe conventionnel compétent demande à l’État partie de lui communiquer des informations sur une affaire. En l’espèce, il a été accordé à la requérante un montant de 45 000 couronnes danoises, soit environ 8 300 dollars des États-Unis.

L’État partie explique que le Gouvernement danois est disposé à indemniser la requérante de tout dommage pécuniaire subi, conformément au principe général établi en la matière par la législation danoise. Or, en l’espèce, la requérante n’a pas subi de tel dommage.

S’agissant de l’indemnisation du dommage non pécuniaire, notamment le préjudice moral, l’État partie explique qu’après un examen approfondi, le Gouvernement a conclu que les actes de discrimination qu’aurait subis la requérante ne sont pas de nature à exiger le versement d’une indemnisation. Pour parvenir à cette conclusion, le Gouvernement a attaché une grande importance au fait que dans la présente affaire, contrairement à d’autres, telles que L .  K .c.Pays-Bas ou Habassi c. Danemark, les propos tenus par M. Espersen à la radio ne visaient pas personnellement la requérante. L’État partie affirme qu’en l’espèce, les conclusions du Comité constituent une réparation suffisante et équitable.

Se référant également à la procédure de suivi menée dans le cadre de l’affaire Moha m med Hassan Gelle c.Danemark (communication no34/2004), l’État partie rappelle qu’il avait également décidé de ne pas indemniser le requérant des dommages non pécuniaires, notamment parce que les actes discriminatoires allégués ne visaient pas personnellement l’auteur. Dans l’affaire Gelle, le Comité a jugé satisfaisante la réponse de l’État partie et décidé de ne pas poursuivre l’examen de cette affaire.

S’agissant de l’application effective de la législation en vigueur, l’État partie fait observer que conformément à l’article 99 de la loi sur l’administration de la justice, le Directeur du parquet général est hiérarchiquement supérieur aux procureurs qui sont placés sous sa supervision. À ce titre, le Directeur du parquet général peut régir les activités des procureurs, intervenir dans certaines affaires et ordonner de poursuivre ou non. Le Directeur du parquet général a émis l’instruction no9/2006 concernant le traitement des affaires relatives à des violations de l’article 266 b) du Code pénal danois, notamment. Cette instruction dispose que toute plainte relevant de l’article 266 b) du Code pénal rejetée par la police en raison de l’absence d’éléments justifiant l’ouverture ou la poursuite d’une enquête doit être transmise au Procureur régional. Les décisions de celui-ci confirmant les conclusions de la police sont susceptibles d’appel auprès du Directeur du parquet général. En vertu de ladite instruction, toutes les affaires ayant donné lieu à l’ouverture d’une enquête préliminaire sont communiquées au Directeur du parquet général pour déterminer les accusations qui seront finalement retenues.

L’État partie explique que le Directeur du parquet général examine actuellement s’il faut modifier l’instruction no9/2006. L’opinion rendue par le Comité à propos de cette affaire a été communiquée au Directeur du parquet général qui a reçu pour instruction d’en tenir compte lors de la révision de ladite instruction.

Enfin, l’État partie indique que l’opinion du Comité a aussi été transmise au Procureur public régional de Copenhague et au chef de la police de Copenhague, soit aux trois autorités du Service du parquet général concernées par l’affaire.

L’opinion du Comité a également été adressée à la Police nationale danoise et à l’administration judiciaire danoise, de sorte que le parquet et les instances judiciaires ont été informés des conclusions du Comité. L’État partie a également informé le conseil de la requérante des mesures prises pour donner effet aux recommandations du Comité.

Observations de l ’ auteur :

Le conseil de la requérante a commenté les observations de l’État partie le 28 février 2011. Il relève, en premier lieu, que ce n’est pas la première fois que l’État partie refuse d’accorder une indemnisation et que dans les affaires Gelle (communication no34/2004) et Murat Er (communication no40/2007), l’État partie a agi de même, refusant d’indemniser les requérants des dommages non pécuniaires.

Le conseil estime que les arguments invoqués par l’État partie concernant l’octroi d’une aide judiciaire dans la présente affaire sont sans rapport avec la recommandation du Comité qui a demandé à l’État partie d’indemniser la requérante et souligne qu’aucune réparation ne peut être obtenue par l’entremise de l’aide judiciaire. Deuxièmement, le refus de l’État partie d’octroyer à la requérante une indemnisation pour préjudice non pécuniaire au motif que la discrimination alléguée n’est pas de nature à donner droit au versement d’une indemnisation montre, selon le conseil de l’auteur, que l’État partie confond deux choses. Selon lui, il n’est pas pertinent de chercher à savoir si les propos tenus par M. Espersen à la radio visaient personnellement la requérante. Le préjudice moral causé à la requérante n’était pas dû aux propos eux-mêmes mais à l’absence de mesures effectives prises par l’État partie. Les déclarations de M. Espersen n’ont jamais fait l’objet d’un examen quant au fond par un tribunal. De plus, comme l’a établi le Comité dans son opinion, l’État partie ne s’est pas acquitté de l’obligation positive qui lui incombe de prendre des mesures effectives eu égard aux faits dénoncés. Le conseil estime par conséquent que le préjudice moral subi par la requérante est imputable à l’État partie.

Il ajoute que l’État partie n’a nullement tenu compte des conclusions du Comité quant au fond, en particulier celle par laquelle le Comité conclut à une violation par l’État partie des droits de la requérante consacrés à l’article 6 de la Convention.

Quant aux affaires antérieures citées par l’État partie pour démontrer que ses réponses ont été jugées satisfaisantes par le Comité, le conseil note que le terme «satisfaisant» signifie que le Comité n’a pas requis d’autres informations de l’État partie mais pas nécessairement qu’il a été satisfait des mesures prises.

S’agissant de l’application effective de la législation en vigueur de façon à éviter que des violations analogues ne se reproduisent à l’avenir, le conseil note que le Directeur du parquet général l’a informé que l’instruction no9/2006 était en révision et qu’il serait tenu compte de l’opinion rendue par le Comité à cet égard. Le conseil explique qu’il n’a toutefois pas été informé des modifications envisagées et remarque que les opinions du Comité dans les affaires Moha m med Hassan Gelle c.Danemark ou Saada Adan c. Danemark auraient également pu permettre d’éviter que des violations analogues se reproduisent, ce qui n’a pas été le cas.

S’agissant de la diffusion de l’opinion du Comité, le conseil note que l’État partie l’a communiquée à la police, aux procureurs et à l’administration judiciaire danoise. Il considère cependant que cela n’est pas conforme à la recommandation du Comité, qui a prié l’État partie de diffuser largement l’opinion en question, y compris mais pas seulement aux instances judiciaires.

Le conseil prie le Comité d’intervenir et d’expliquer à l’État partie que sa réponse est insatisfaisante et que les mesures prises ne sont pas pleinement conformes à ses recommandations.

Réponse additionnelle de l ’É tat partie :

Dans une lettre du 27 juin 2011, l’État partie rappelle les informations figurant dans sa réponse de décembre 2010 sur les mesures prises pour donner effet à l’opinion du Comité. En ce qui concerne la question de l’indemnisation, l’État partie rappelle qu’un montant de 45 000 couronnes danoises (8 300 dollars É.-U.) a été alloué à la requérante au titre de l’aide judiciaire.

Observations additionnelles de l’auteur:

Dans une lettre du 20 juillet 2011, le conseil indique que l’État partie s’est borné à réitérer les observations qu’il avait faites en décembre 2010. Il considère que l’État partie ne présente aucun argument juridique valide pour justifier son refus d’indemniser la requérante. Il considère que la position de l’État partie repose sur des considérations politiques et demande au Comité de poursuivre le dialogue avec l’État partie.

Décision du Comité :

La dernière communication du conseil a été transmise à l’État partie le 2 août 2011.

Autres décisions proposées/décisions du Comité :

Le Comité a examiné l’affaire à sa soixante-dix-neuvième session (août 2011). Il a salué les mesures prises jusqu’à présent par l’État partie, mais a estimé que la fourniture d’une aide judiciaire ne pouvait pas être considérée comme une mesure d’indemnisation. Il a invité l’État partie à rechercher des moyens d’indemniser la requérante, et a adressé une note verbale à l’État partie à ce sujet le 15 septembre 2011. Le dialogue se poursuit, en attendant de recevoir d’autres renseignements.

Annexe V

Rapporteurs pour les États parties dont le Comité a examiné les rapports ou la situation au titre de la procédure de bilan, à sa quatre-vingtième session

Rapports initiaux et périodiques examinés par le Comité

Rapporteur de pays

CanadaDix-neuvième et vingtième rapports périodiques(CERD/C/CAN/19-20)

M. Kemal

IsraëlQuatorzième à seizième rapports périodiques(CERD/C/ISR/14-16)

M. Kut

ItalieSeizième à dix-huitième rapports périodiques(CERD/C/ITA/16-18)

M. Amir

JordanieTreizième à dix-septième rapports périodiques(CERD/C/JOR/13-17)

M. Thornberry

KoweïtQuinzième à vingtième rapports périodiques(CERD/C/KWT/15-20)

M. Avtonomov

MexiqueSeizième et dix-septième rapports périodiques(CERD/C/MEX/16-17)

M. Murillo Martínez

PortugalDouzième à quatorzième rapports périodiques(CERD/C/PRT/12-14)

Mme Crickley

QatarTreizième à seizième rapports périodiques(CERD/C/QAT/13-16)

M. Calí Tzay

République démocratique populaire laoSeizième à dix-huitième rapports périodiques(CERD/C/LAO/16-18)

M. de Gouttes

TurkménistanSixième et septième rapports périodiques(CERD/C/TKM/6-7)

M. Diaconu

Viet NamDixième à quatorzième rapports périodiques(CERD/C/VNM/10-14)

M. Huang

Annexe VI

Liste des documents publiés pour la quatre-vingtième session du Comité

CERD/C/80/1

Ordre du jour provisoire annoté de la quatre-vingtième session du Comité

CERD/C/80/2

Situation en ce qui concerne la présentation de rapports par les États parties conformément au paragraphe 1 de l’article 9 de la Convention

CERD/C/SR.2126, 2128-2165 et Add.1

Comptes rendus analytiques de la quatre-vingtième session du Comité

CERD/C/CAN/19-20

Dix-neuvième et vingtième rapports périodiques du Canada

CERD/C/ISR/14-16

Quatorzième à seizième rapports périodiques d’Israël

CERD/C/ITA/16-18

Seizième à dix-huitième rapports périodiques de l’Italie

CERD/C/JOR/13-17

Treizième à dix-septième rapports périodiques de la Jordanie

CERD/C/KWT/15-20

Quinzième à vingtième rapports périodiques du Koweït

CERD/C/LAO/16-18

Seizième à dix-huitième rapports périodiques de la République démocratique populaire lao

CERD/C/MEX/16-17

Seizième et dix-septième rapports périodiques du Mexique

CERD/C/PRT/12-14

Douzième à quatorzième rapports périodiques du Portugal

CERD/C/QAT/13-16

Treizième à seizième rapports périodiques du Qatar

CERD/C/TKM/6-7

Sixième et septième rapports périodiques du Turkménistan

CERD/C/VNM/10-14

Dixième à quatorzième rapports périodiques du Viet Nam

Annexe VII

Texte des déclarations adoptées par le Comité pendantla période considérée

Déclaration sur la contribution du Comité au Programme d’actionde la Décennie des personnes d’ascendance africaine

Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale,

Saluant la résolution 66/144 de l’Assemblée générale,

Rappelant la résolution 64/169 dans laquelle l’Assemblée générale a proclamé l’année 2011 Année des personnes d’ascendance africaine,

Reconnaît que la proclamation de l’Année internationale des personnes d’ascendance africaine a offert une valeur ajoutée aux efforts déployés par les États et par la communauté internationale tout entière pour garantir la reconnaissance, la justice et le développement des personnes d’ascendance africaine aux niveaux national, régional et international, et qu’étant donné le caractère structurel des problèmes auxquels se heurtent ces personnes, la Décennie des personnes d’ascendance africaine est un bon moyen d’intensifier l’action menée.

À cet égard, le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale estime que les termes de «reconnaissance, justice et développement» sont suffisamment vagues pour décrire les thèmes de la Décennie des personnes d’ascendance africaine, et recommande au Groupe de travail d’experts sur les personnes d’ascendance africaine d’envisager de prendre les mesures suivantes lorsqu’il élaborera et adoptera le programme d’action pour la Décennie des personnes d’ascendance africaine:

1.Promouvoir l’application effective de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, et tenir compte des recommandations générales ci-après du Comité: no 34 sur la discrimination raciale à l’égard des personnes d’ascendance africaine; no 32 (2009) sur la signification et la portée des mesures spéciales dans la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale; et no 31 (2005) sur la prévention de la discrimination raciale dans l’administration et le fonctionnement du système de justice pénale; et engager les États parties à mettre en œuvre ces recommandations générales, en prêtant particulièrement attention aux problèmes des enfants et des femmes d’ascendance africaine, à l’élimination de la pauvreté, à la jouissance pleine et effective des droits économiques, sociaux et culturels, à la participation politique, aux mesures spéciales, à l’accès effectif à la justice, à la prévention de la discrimination raciale dans l’administration du système de justice, et à une meilleure connaissance et un plus grand respect de la culture et du patrimoine des personnes d’ascendance africaine;

2.Proposer d’élaborer une déclaration sur la promotion et le plein respect des droits fondamentaux des personnes d’ascendance africaine;

3.Faire réaliser des études sur les thèmes de la Décennie des personnes d’ascendance africaine par les organismes, organes et institutions spécialisées des Nations Unies, tels que l’Organisation des Nations Uniespour l’alimentation et l’agriculture, le Groupe de la Banque mondiale, l’Organisation internationale du Travail, l’Organisation mondiale de la santé, l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture, et les programmes et fonds des Nations Unies tels que le Programme des Nations Unies pour le développement et le Fonds des Nations Unies pour l’enfance, ainsi que par le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme. En outre, durant la Décennie à venir, les institutions spécialisées, programmes et fonds des Nations Unies devraient être encouragés à faire de la question des personnes d’ascendance africaine un élément central des études menées à l’échelon mondial;

4.Inviter l’Assemblée générale à envisager d’organiser un sommet mondial sur les personnes d’ascendance africaine, avec la collaboration des États, des institutions spécialisées, programmes et fonds des Nations Unies, et des représentants de la société civile, en mettant l’accent sur les droits des personnes d’ascendance africaine, afin d’évaluer les progrès réalisés dans le cadre de la Décennie des personnes d’ascendance africaine.