Conseil des droits de l’homme
Quarante et unième session
24 juin-12 juillet 2019
Point 4 de l’ordre du jour
Résolution adoptée par le Conseil des droits de l’hommele 12 juillet 2019
41/22.Situation des droits de l’homme au Bélarus
Le Conseil des droits de l’homme,
S’inspirant des buts et principes de la Charte des Nations Unies, des dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’homme, des Pactes internationaux relatifs aux droits de l’homme et des autres instruments applicables relatifs aux droits de l’homme,
Rappelant toutes les résolutions adoptées par la Commission des droits de l’homme, par l’Assemblée générale et par lui-même sur la situation des droits de l’homme au Bélarus, dont sa résolution 38/14 en date du 6 juillet 2018, et regrettant le manque de coopération du Gouvernement bélarussien et le fait que celui-ci n’a pas donné la suite voulue aux demandes qu’il a formulées dans ses résolutions, notamment à propos de l’accès au pays du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme au Bélarus et d’autres titulaires de mandat au titre des procédures spéciales, tout en prenant note de l’ouverture croissante du Bélarus à la coopération avec le Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, le Conseil de l’Europe, l’Union européenne et des partenaires bilatéraux,
Rappelant également ses résolutions 5/1 et 5/2 en date du 18 juin 2007,
1.Accueille avec satisfaction le rapport de la Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme au Bélarus ;
2.Reste préoccupé par la situation des droits de l’homme et des libertés fondamentales au Bélarus, notamment par les restrictions injustifiées et les procédures excessivement lourdes pesant sur l’exercice des libertés de réunion pacifique, d’association et d’expression, tout en prenant acte de certaines améliorations concernant la liberté d’organiser des manifestations à condition que les autorités responsables en soient informées dans les délais, conformément aux modifications apportées à la loi sur les manifestations collectives entrées en vigueur en janvier 2019 ;
3.Reste également préoccupé par les allégations indiquant que des actes de torture et des traitements inhumains ou dégradants sont commis par des membres des forces de l’ordre et de l’administration pénitentiaire sans donner lieu à des enquêtes en bonne et due forme ; que les défenseurs des droits de l’homme, ainsi que les syndicats et les organisations de la société civile continuent d’être harcelés, beaucoup se heurtant à un refus d’enregistrement et certains étant parfois soumis à des descentes de police ; que des journalistes sont arrêtés et se voient infliger des amendes pour avoir exercé leur travail de journaliste, que la liberté d’expression, notamment des médias, fait l’objet de diverses atteintes, et que des modifications législatives imposant de nouvelles restrictions aux médias en ligne sont entrées en vigueur ; et prie instamment le Gouvernement de respecter pleinement la liberté d’expression, la liberté de réunion pacifique et la liberté d’association ;
4.Déplore la faible réactivité du Gouvernement bélarussien lorsque des militants politiques et des défenseurs des droits sociaux sont arrêtés et détenus de façon arbitraire, la réticence des procureurs à enquêter sur les cas de torture et de traitements cruels, inhumains et dégradants, l’impunité des auteurs d’infractions constituant des violations des droits de l’homme, la pression exercée sur les avocats de la défense et l’absence de voies de recours juridiques efficaces, ainsi que la discrimination qui touche tout particulièrement les personnes appartenant à des groupes vulnérables et à des minorités religieuses ;
5.Demande à nouveau au Gouvernement bélarussien de procéder à une révision complète de la législation, des politiques, des stratégies et des pratiques pertinentes pour faire en sorte que les dispositions qui y figurent soient clairement définies et conformes à ses obligations et à ses engagements au regard du droit international des droits de l’homme et ne soient pas utilisées pour empêcher ou restreindre indûment l’exercice de ces droits, et d’investir dans le renforcement des capacités et la formation appropriée de l’appareil judiciaire et des organes chargés de faire respecter la loi ;
6.Prend note de la préoccupation exprimée par la Rapporteuse spéciale concernant les enfants condamnés pour des infractions liées à la drogue et souligne la nécessité de prendre en considération l’intérêt supérieur de l’enfant ;
7.Salue l’adoption par le Gouvernement bélarussien, le 24 octobre 2016, d’un plan interinstitutions sur les droits de l’homme pour la période 2016-2019 concernant la mise en œuvre des recommandations qu’il a acceptées lors du deuxième cycle de l’Examen périodique universel concernant le Bélarus et des recommandations de certains organes conventionnels, encourage le Gouvernement à examiner et à modifier ce plan en incluant les recommandations formulées par les mécanismes des droits de l’homme et en tenant compte des suggestions faites par les organisations de la société civile, se félicite de l’enregistrement d’un syndicat indépendant en janvier 2019, et salue également la coopération du Bélarus avec le Comité des droits de l’homme pour la première fois depuis vingt et un ans, ainsi que l’examen du rapport du Bélarus par le Comité contre la torture en avril 2018 ;
8.Prend note de l’attention que la Rapporteuse spéciale continue d’accorder à la question de la peine de mort au Bélarus et, en particulier, exprime sa vive préoccupation face à son application sans les garanties d’une procédure régulière et au peu d’informations pertinentes concernant son application et, sachant que la transparence est indispensable pour que la justice pénale soit équitable et efficace, demande à la Rapporteuse spéciale de continuer de suivre l’évolution de la situation et de faire des recommandations ;
9.Prie instamment le Gouvernement bélarussien de prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir l’indépendance et l’impartialité totales du pouvoir judiciaire, le droit à un procès équitable et le droit de faire examiner par une juridiction supérieure les déclarations de culpabilité et les condamnations, ainsi que le droit de tout prévenu de choisir librement un représentant légal tout au long de la procédure ;
10.Rappelle qu’il a salué la libération de prisonniers politiques, en août 2015, et a appelé au plein rétablissement des droits civils et politiques des anciens prisonniers politiques, mais que ces droits n’ont pas été rétablis et que les militants politiques continuent d’être maltraités et d’avoir à répondre d’accusations discutables et fondées sur des motifs politiques, tandis qu’aucun progrès n’a été fait dans quatre affaires non élucidées de disparition forcée d’opposants politiques remontant aux années 1999 et 2000 ;
11.Encourage vivement le Bélarus à engager sans délai la réforme globale de son cadre juridique électoral et à remédier aux défaillances systémiques de longue date concernant ce cadre juridique et les pratiques en la matière, comme suite aux recommandations formulées par le Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise) et la Rapporteuse spéciale, en particulier eu égard aux prochaines élections législatives qui auront lieu en novembre 2019 et à l’élection présidentielle qui doit se tenir en 2020 ;
12.Encourage à nouveau vivement le Gouvernement bélarussien à mettre en place une institution nationale des droits de l’homme conformément aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris) et à continuer de s’employer activement à mettre en œuvre le Programme de développement durable à l’horizon 2030 ;
13.Décide de prolonger le mandat de la Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme au Bélarus pour une période d’un an, et prie la Rapporteuse spéciale de lui soumettre à sa quarante-quatrième session, et de soumettre à l’Assemblée générale à sa soixante-quinzième session, un rapport sur la situation des droits de l’homme au Bélarus ;
14.Prie instamment le Gouvernement bélarussien de coopérer pleinement avec la Rapporteuse spéciale, notamment en lui permettant de se rendre dans le pays et de rencontrer librement les parties prenantes concernées, y compris la société civile, en sa qualité officielle, de façon à ce qu’elle puisse l’aider à s’acquitter de ses obligations internationales relatives aux droits de l’homme, et en envisageant d’appliquer ses recommandations, et le prie aussi instamment d’apporter son entière coopération aux titulaires de mandat au titre des procédures spéciales thématiques ;
15.Prie le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme de fournir à la Rapporteuse spéciale l’aide et les ressources dont elle a besoin pour s’acquitter de son mandat et prie cette dernière de continuer à suivre l’évolution de la situation et de faire des recommandations.
41 e session 12 juillet 2019
[Adoptée par 20 voix contre 6, avec 21 abstentions, à l’issue d’un vote enregistré.
Les voix se sont réparties comme suit :
Ont voté pour :
Argentine, Australie, Autriche, Brésil, Bulgarie, Chili, Croatie, Danemark, Espagne, Fidji, Hongrie, Islande, Italie, Japon, Mexique, Pérou, Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, Slovaquie, Tchéquie, Ukraine.
Ont voté contre :
Chine, Cuba, Égypte, Érythrée, Inde, Philippines.
Se sont abstenus :
Afghanistan, Afrique du Sud, Angola, Arabie saoudite, Bahamas, Bahreïn, Bangladesh, Burkina Faso, Cameroun, Iraq, Népal, Nigéria, Pakistan, Qatar, République démocratique du Congo, Rwanda, Sénégal, Somalie, Togo, Tunisie, Uruguay.]