Nations Unies

A/HRC/RES/28/22*

Assemblée générale

Distr. générale

8 avril 2015

Français

Original: anglais

Conseil des droits de l’homme

Vingt-huitième session

Point 4 de l’ordre du jour

Situations relatives aux droits de l ’ homme qui requièrent l ’ attention du Conseil

Résolution adoptée par le Conseil des droits de l’homme

28/22Situation des droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée

Le Conseil des droits de l ’ homme,

Guidéparla Charte des Nations Unies, la Déclaration universelle des droits de l’homme, les Pactes internationaux relatifs aux droits de l’homme et d’autres instruments relatifs aux droits de l’homme,

Rappelant toutes les résolutions précédentes adoptées par la Commission des droits de l’homme, le Conseil des droits de l’homme et l’Assemblée générale sur la situation des droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée, notamment la résolution 25/25 du Conseil, en date du 28 mars 2014, et la résolution 69/188 de l’Assemblée, en date du 18 décembre 2014, et demandant instamment l’application de ces résolutions,

Ayant à l ’ esprit le paragraphe 3 de la résolution 60/251 de l’Assemblée générale, en date du 15 mars 2006,

Rappelant ses résolutions 5/1 et 5/2en date du18 juin 2007, relatives, respectivement, à la mise en place des institutions du Conseil et au Code de conduite des titulaires de mandat du Conseil au titre des procédures spéciales, et soulignant que tout titulaire de mandat doit s’acquitter de ses fonctions conformément à ces résolutions et aux annexes à celles-ci,

Soulignant l’importance que revêt le suivi des recommandations figurant dans le rapport de la Commission d’enquête sur les droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée, qui a été accueilli avec satisfaction par le Conseil des droits de l’homme et l’Assemblée générale, et transmis aux organes compétents de l’Organisation des Nations Unies, y compris le Conseil de sécurité,

Profondément préoccupé par les violations systématiques, généralisées et flagrantes des droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée, qui constituent des crimes contre l’humanité, ainsi que par l’impunité dont jouissent leurs auteurs, comme décrit dans le rapport de la Commission d’enquête,

Notant avec inquiétude que la situation humanitaire précaire dans le pays est aggravée par le fait que le Gouvernement de la République populaire démocratique de Corée ne fournit pas aux organismes humanitaires un accès libre et sans entrave à toutes les populations dans le besoin et qu’il accorde notamment la priorité, dans ses politiques nationales, aux dépenses militaires plutôt qu’à l’accès des citoyens à l’alimentation,

Réaffirmant qu’il incombe au Gouvernement de la République populaire démocratique de Corée d’assurer le plein exercice de tous les droits de l’homme et libertés fondamentales de la population tout entière, notamment en garantissant l’accès, dans des conditions d’égalité, à une alimentation suffisante, ainsi que, notamment, la liberté de religion et de conviction, la liberté d’expression et la liberté d’association et de réunion,

Conscient de la vulnérabilité particulière des femmes, des enfants, des personnes handicapées et des personnes âgées, et de la nécessité de leur garantir la pleine jouissance de tous les droits de l’homme et libertés fondamentales, en les protégeant contre la négligence, les mauvais traitements, l’exploitation et la violence,

Saluant la participation de la République populaire démocratique de Corée au deuxième Examen périodique universel, notantque le Gouvernement de ce pays a accepté 113 des 268 recommandations issues de cet Examen et s’est engagé à les appliquer et à étudier la possibilité d’en appliquer 58 autres, et soulignant qu’il importe que les recommandations soient acceptées et appliquées afin de lutter contre les graves violations des droits de l’homme commises dans le pays,

Reconnaissant l’importance des travaux menés par les organes conventionnels concernant le suivi de la mise en œuvre des obligations internationales dans le domaine des droits de l’homme, et soulignant que la République populaire démocratique de Corée doit s’acquitter de ses obligations en matière de droits de l’homme et soumettre régulièrement et dans les meilleurs délais des rapports aux organes conventionnels,

Notant l’importance de la question des enlèvements internationaux et du retour immédiat de toutes les personnes enlevées, prenant note de l’issue de la consultation tenue en mai 2014 entre les Gouvernements du Japon et de la République populaire démocratique de Corée, et attendant des résultats concrets et positifs des enquêtes menées par la République populaire démocratique de Corée sur tous les ressortissants japonais, en particulier les victimes d’enlèvement,

Notant l’importance du dialogue intercoréen, qui pourrait contribuer à l’amélioration de la situation des droits de l’homme et de la situation humanitaire en République populaire démocratique de Corée,

Soulignant que le regroupement des familles séparées de part et d’autre de la frontière est une préoccupation humanitaire d’urgence pour l’ensemble du peuple coréen qui doit être réglée sans plus attendre, et exprimant l’espoir que la République populaire démocratique de Corée, la République de Corée et les membres de la diaspora coréenne prendront les dispositions nécessaires pour que de nouveaux regroupements puissent avoir lieu régulièrement à plus grande échelle,

Réaffirmant qu’il importe que les États participent pleinement et de manière constructive au processus de l’Examen périodique universel ainsi qu’aux autres mécanismes du Conseil des droits de l’homme, aux fins de l’amélioration de leur situation dans le domaine des droits de l’homme,

Condamne avec la plus grande fermeté les violations persistantes, systématiques, généralisées et flagrantes des droits de l’homme et autres atteintes aux droits de l’homme qui sont actuellement commises en République populaire démocratique de Corée, et se déclare profondément préoccupé par les conclusions détaillées formulées par la Commission d’enquête dans son rapport, notamment:

a)Le déni du droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion, ainsi que des droits à la liberté d’opinion, d’expression et d’association, qui se manifeste par le monopole absolu sur l’information et un contrôle total de la vie sociale organisée, et par la surveillance arbitraire et illégale de l’État qui imprègne jusqu’à la vie privée de l’ensemble de la population;

b)La discrimination fondée sur le système songbun, selon lequel les individus sont classés non seulement en fonction de leur naissance et de la classe sociale que leur assigne l’État, mais aussi de leurs opinions politiques et de leur religion; la discrimination à l’égard des femmes, notamment l’inégalité d’accès à l’emploi, les lois et les réglementations discriminatoires, et la violence contre les femmes;

c)Les violations de tous les aspects du droit à la liberté de circulation, notamment l’assignation forcée d’un lieu de résidence et de travail fixé par l’État, souvent fondé sur le système songbun, et le déni du droit de quitter son pays;

d)Les violations systématiques, répandues et graves du droit à l’alimentation et d’autres aspects du droit à la vie, aggravées par la famine et la malnutrition généralisées;

e)Les violations du droit à la vie et les actes d’extermination, de meurtre, de réduction à l’esclavage, de torture, de détention, de viol et d’autres formes graves de violence sexuelle et de persécution fondés sur des motifs politiques, religieux et sexistes commis dans des camps de prisonniers politiques et dans des prisons ordinaires, et la pratique répandue des châtiments collectifs, qui inflige des sanctions sévères à des innocents;

f)Les enlèvements systématiques, le refus de rapatriement et la disparition forcée de personnes, y compris de ressortissants d’autres pays, qui s’inscrivent dans le cadre d’une politique de l’État à grande échelle;

Exhorte le Gouvernement de la République populaire démocratique de Corée à reconnaître les violations des droits de l’homme commises dans le pays et à prendre immédiatement des mesures pour mettre un terme à toutes ces violations et atteintes, notamment en mettant en œuvre les recommandations pertinentes formulées dans le rapport de la Commission d’enquête, y compris, mais pas seulement, les mesures suivantes:

a)Garantir le droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion, ainsi que les droits à la liberté d’opinion, d’expression et d’association, notamment en autorisant l’établissement de journaux et autres médias indépendants;

b)Mettre un terme à la discrimination à l’égard des citoyens, notamment à la discrimination fondée sur le système songbun cautionné par l’État, et prendre immédiatement des mesures pour garantir l’égalité des sexes et protéger les femmes contre la violence;

c)Garantir le droit à la liberté de circulation, notamment la liberté de choisir son lieu de résidence et de travail;

d)Promouvoir l’accès, dans des conditions d’égalité, à l’alimentation, notamment en garantissant la pleine transparence de la fourniture de l’aide humanitaire de sorte que cette aide parvienne vraiment aux personnes vulnérables;

e)Mettre immédiatement un terme à toutes les violations des droits de l’homme dans des camps de prisonniers, notamment la pratique du travail forcé, démanteler tous les camps de prisonniers politiques et libérer tous les prisonniers politiques, et veiller à ce que des réformes dans le secteur de la justice permettent de garantir le droit à un procès équitable et à une procédure régulière;

f)Régler d’une manière transparente la question de toutes les personnes qui ont été enlevées ou qui ont été victimes de disparitions forcées, ainsi que leurs descendants, notamment en leur permettant de rentrer immédiatement chez elles;

Se déclare à nouveau profondément préoccupé par les conclusions de la Commission concernant la situation des réfugiés et des demandeurs d’asile renvoyés en République populaire démocratique de Corée et d’autres citoyens de ce pays après leur rapatriement, qui ont fait l’objet de sanctions comprenant notamment des mesures d’internement, des actes de torture, des traitements cruels, inhumains et dégradants, des violences sexuelles, des disparitions forcées ou la peine capitale et, à cet égard, engage vivement tous les États à respecter le principe fondamental du non‑refoulement, à traiter avec humanité ceux qui cherchent refuge et à garantir l’accès sans entrave du Haut‑Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés et du Haut-Commissariat en vue de protéger les droits de l’homme de ceux qui cherchent refuge, et demande une nouvelle fois instamment aux États parties de s’acquitter des obligations que leur imposent le droit international des droits de l’homme, la Convention relative au statut des réfugiés et les Protocoles s’y rapportant en ce qui concerne les ressortissants de la République populaire démocratique de Corée qui sont visés par ces instruments;

Souligne et réaffirme avec une profonde consternation le constat de la Commission selon lequel l’ensemble des témoignages recueillis et les informations reçues permettent de penser que des crimes contre l’humanité ont été commis en République populaire démocratique de Corée, dans le cadre de politiques établies au plus haut niveau de l’État depuis des décennies; ces crimes contre l’humanité sont notamment l’extermination, le meurtre, la réduction en esclavage, la torture, la détention, le viol, les avortements forcés et autres violences sexuelles, les persécutions fondées sur des motifs politiques, religieux, raciaux et sexistes, les déplacements forcés de populations, les disparitions forcées et la pratique inhumaine de l’exposition prolongée et intentionnelle à la faim;

Souligne que les autorités de la République populaire démocratique de Corée n’ont pas engagé de poursuites contre les auteurs de crimes contre l’humanité et d’autres violations des droits de l’homme, et encourage les membres de la communauté internationale à coopérer aux efforts d’établissement des responsabilités et à veiller à ce que ces crimes ne restent pas impunis;

Accueille avec satisfaction la résolution 69/188 de l’Assemblée générale, dans laquelle l’Assemblée a décidé de soumettre le rapport de la Commission d’enquête au Conseil de sécurité et encouragé ce dernier à examiner les conclusions et recommandations pertinentes de la Commission et à prendre les mesures voulues pour établir les responsabilités, notamment en envisageant de renvoyer à la Cour pénale internationale la situation en République populaire démocratique de Corée et en envisageant la possibilité de sanctions ciblées contre ceux qui semblent porter la plus grande part de responsabilité dans les actes dont la Commission a déclaré qu’ils pouvaient constituer des crimes contre l’humanité;

Accueille aussi avec satisfaction la décision du Conseil de sécurité d’ajouter la situation en République populaire démocratique de Corée à la liste de questions dont il est saisi, ainsi que la tenue, le 22 décembre 2014, d’une séance publique du Conseil au cours de laquelle la situation des droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée a été examinée, et attend du Conseil qu’il continue de s’investir activement sur cette question;

Félicite le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée pour les activités qu’il a menées à ce jour et pour les efforts constants qu’il a déployés dans l’exercice de son mandat, bien qu’il n’ait pas eu accès au pays;

Accueille avec satisfaction le rapport que le Rapporteur spécial a soumis au Conseil des droits de l’homme à sa vingt‑huitième session, dans lequel le Rapporteur spécial propose, entre autres, une stratégie pour régler sous tous ces aspects le problème des enlèvements internationaux, des disparitions forcées et autres questions connexes, notamment en organisant une conférence internationale à ce sujet;

Accueille aussi avec satisfaction l’appel lancé par le Rapporteur spécial au Conseil des droits de l’homme pour qu’il poursuive son action soutenue sur cette question, notamment en organisant une table ronde pour rassembler les parties prenantes intéressées;

Décide d’organiser une table ronde sur la situation des droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée, y compris le problème des enlèvements internationaux, des disparitions forcées et autres questions connexes, à sa trentième session, et demande au Haut‑Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme de consulter les États et l’ensemble des parties prenantes, notamment les organismes, fonds et programmes des Nations Unies compétents, les organes conventionnels, les titulaires de mandat au titre des procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme, les institutions nationales des droits de l’homme et la société civile, afin d’assurer leur participation à la table ronde;

Décide aussi de proroger d’un an le mandat du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée conformément à la résolution 25/25 du Conseil des droits de l’homme;

Demande une nouvelle fois à toutes les parties concernées, y compris les organes de l’Organisation des Nations Unies, d’envisager de donner suite aux recommandations formulées par la Commission d’enquête dans son rapport en vue de remédier à la situation critique des droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée;

Salue les mesures prises par le Haut‑Commissariat pour établir en République de Corée une structure sur le terrain afin de mieux surveiller la situation des droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée et de recueillir davantage de données, d’établir les responsabilités, d’apporter un soutien accru au Rapporteur spécial, d’intensifier la participation et le renforcement des capacités des gouvernements de tous les États concernés, de la société civile et des autres parties prenantes, et de continuer à appeler l’attention sur la situation des droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée, notamment grâce à des activités régulières de communication, de sensibilisation et d’information, et demande au Haut‑Commissariat de lui présenter oralement, à sa trentième session, des informations actualisées et de lui soumettre, à sa trente et unième session, un rapport complet sur le rôle et les réalisations du Haut-Commissariat, y compris sur la structure opérant sur le terrain;

Demande à tous les États de veiller à ce que la structure mise en place sur le terrain par le Haut-Commissariat puisse fonctionner en toute indépendance, dispose de ressources suffisantes et ne fasse l’objet ni de représailles ni de menaces;

Demande au Haut-Commissariat de rendre compte de ses activités de suivi dans le rapport annuel du Secrétaire général à l’Assemblée générale sur la situation des droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée, à compter de la soixante-neuvième session de l’Assemblée;

Prie le Rapporteur spécial de soumettre régulièrement au Conseil des droits de l’homme et à l’Assemblée générale des rapports sur l’exécution de son mandat, y compris sur les efforts de suivi déployés pour mettre en œuvre les recommandations de la Commission d’enquête;

Reconnaît que le Rapporteur spécial a tenu un dialogue avec les représentants de la République populaire démocratique de Corée à New York le 27 octobre 2014, et demande instamment au Gouvernement de la République populaire démocratique de Corée, au moyen d’un dialogue continu, d’inviter le Rapporteur spécial, de coopérer pleinement avec lui, et de lui permettre, avec ses collaborateurs, d’effectuer librement des visites dans le pays et de leur apporter toutes les informations dont ils ont besoin pour s’acquitter de leur mandat, et aussi de promouvoir la coopération technique avec le Haut‑Commissariat;

Encourage le système des Nations Unies, y compris ses institutions spécialisées, les États, les organisations intergouvernementales régionales, les institutions intéressées, les experts indépendants et les organisations non gouvernementales à instaurer un dialogue et une coopération constructifs avec les titulaires de mandat au titre des procédures spéciales, dont le Rapporteur spécial, et avec la structure du Haut-Commissariat sur le terrain;

Encourage tous les États qui ont des relations avec la République populaire démocratique de Corée à user de leur influence pour inciter celle-ci à prendre immédiatement des mesures visant à mettre fin à toutes les violations des droits de l’homme, notamment en fermant les camps de prisonniers politiques et en procédant à des réformes institutionnelles de fond;

Prie le Secrétaire général de fournir au Rapporteur spécial et au Haut‑Commissariat, eu égard à sa structure sur le terrain, toute l’assistance nécessaire et le personnel suffisant pour leur permettre de s’acquitter efficacement de leur mandat, et de veiller à ce que le titulaire de mandat bénéficie de l’appui du Haut‑Commissariat;

Décide de transmettre tous les rapports du Rapporteur spécial à tous les organes compétents de l’Organisation des Nations Unies et au Secrétaire général pour suite à donner.

5 7 e séance 27 mars 2015

[Adoptée par 27 voixcontre 6, avec 14 abstentions, à l’issue d’un vote enregistré. Les voix se sont réparties comme suit:

Ont voté pour:

Albanie, Allemagne, Argentine, Botswana, Brésil, Côte d’Ivoire, El Salvador, Émirats arabes unis, Estonie, États-Unis d’Amérique, ex‑République yougoslave de Macédoine, France, Ghana, Irlande, Japon, Kazakhstan, Lettonie, Maldives, Maroc, Mexique, Monténégro, Paraguay, Pays-Bas, Portugal, République de Corée, Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, Sierra Leone

Ont voté contre:

Bolivie (Étatplurinational de), Chine, Cuba, Fédération de Russie, Venezuela (République bolivarienne du), Viet Nam

Se sont abstenus:

Afrique du Sud, Algérie, Arabie saoudite, Bangladesh, Congo, Éthiopie, Gabon, Inde, Indonésie, Kenya, Namibie, Nigéria, Pakistan, Qatar]