Nations Unies

HRI/CORE/CYP/2012

Instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme

Distr. générale

16 avril 2013

Français

Original: anglais

Document de base faisant partie intégrantedes rapports présentés par les États parties

Chypre *

[19 décembre 2012]

Table des matières

Paragraphes Page

I.Territoire et population1–433

A.Géographie1–43

B.Aperçu historique5–153

C.Population16–194

D.Zone restée sous le contrôle effectif du Gouvernement de la République20–245

E.Économie25–315

F.Indicateurs socioéconomiques32−436

II.Structure politique générale44−897

A.Histoire politique récente et faits marquants44−697

B.La structure constitutionnelle70−8911

III.Cadre juridique général de la protection des droits de l’homme90−10713

IV.Information et publicité108−11017

V.Faits nouveaux les plus récents111−12117

Annexes**

I.Territoire et population

A.Géographie

D’une superficie de 9 251 kilomètres carrés, Chypre figure au troisième rang des îles de la Méditerranée et se situe par 33° de longitude est et 35° de latitude nord.

Chypre se trouve à l’extrémité nord-est du bassin méditerranéen, à 360 kilomètres environ à l’est de la Grèce, à 300 kilomètres au nord de l’Égypte, à 105 kilomètres à l’ouest de la République arabe syrienne et à 75 kilomètres au sud de la Turquie.

Chypre est un pays essentiellement montagneux comportant deux massifs: Pentadaktylos, au nord, et Troodos, au sud-ouest (dont le mont Olympe est le point culminant avec une altitude de 1 953 m). La plaine de la Mésorée, la plus grande, s’étend entre ces deux massifs montagneux.

Chypre jouit d’un climat tempéré de type méditerranéen. Les précipitations annuelles sont en moyenne de 500 millimètres et les précipitations qui tombent de décembre à février constituent pratiquement les deux tiers du total annuel. Le pays souffre de temps en temps de sécheresse.

B.Aperçu historique

L’histoire de Chypre s’étend sur neuf millénaires. Au cours du second millénaire avant J.-C., les Achéens ont créé sur l’île des cités-royaumes, sur le modèle mycénien; ils ont apporté la langue et la culture grecques, qui ont été préservées jusqu’à aujourd’hui en dépit des vicissitudes de l’histoire.

Chypre était bien connue du monde antique pour ses mines de cuivre et ses forêts. Du fait de l’importance stratégique de sa position géographique à la croisée de trois continents et de ses richesses, elle a vu se succéder des conquérants, dont les Assyriens (673-669 av. J.-C.), les Égyptiens (560-545 av. J.-C.) et les Perses (545-332 av. J.-C.).

Au Ve siècle avant J.-C., Athènes entretenait des liens étroits avec les cités-États de Chypre, en particulier avec la cité de Salamine.

À la faveur du partage de l’empire d’Alexandre le Grand, Chypre a été intégrée dans l’empire des Ptolémées d’Égypte; la période hellénistique a pris fin en 58 av. J.-C. avec l’invasion romaine.

En l’an 45, Chypre a été christianisée par les apôtres Paul et Barnabé, ce dernier étant Chypriote.

En 330, Chypre est devenue une composante de l’Empire romain d’Orient, puis, en 395, de l’Empire byzantin, auquel elle est restée attachée jusqu’au XIIe siècle.

Durant les croisades, Chypre a été conquise par Richard Cœur de Lion d’Angleterre (1191), qui l’a vendue aux Templiers. Par la suite, les Lusignan ont établi un royaume franc, sur le modèle féodal occidental (1192-1489), royaume auquel a succédé une période sous domination de la République de Venise, qui a pris fin en 1571 avec l’invasion ottomane. La domination ottomane s’est terminée en 1878, année où Chypre a été cédée à la Grande-Bretagne. En 1923, par le Traité de Lausanne, la Turquie a renoncé à tout droit sur Chypre et en a reconnu l’annexion par la Grande-Bretagne, proclamée dès 1914 par le Gouvernement britannique.

Après des efforts politiques et diplomatiques prolongés − pacifiques mais infructueux − ayant donné lieu à un référendum d’autodétermination en 1950, les Chypriotes grecs ont pris les armes en 1955 contre la puissance coloniale.

Le 16 août 1960, en vertu des Accords de Zurich et Londres, Chypre est devenue une république indépendante.

Le 15 juillet 1974, avec la collusion de collaborateurs chypriotes grecs, le régime des militaires alors en place en Grèce a organisé un coup d’État pour renverser le Gouvernement chypriote élu démocratiquement. Le 20 juillet, prenant prétexte du coup d’État et en violation des codes de conduite internationaux établis par les traités qu’elle avait signés, la Turquie a envahi Chypre, prétendument pour restaurer l’ordre constitutionnel. En fait, elle s’est emparée de 36,2 % du territoire de la République, en violation de la Charte des Nations Unies ainsi que des principes du droit international. L’agression militaire turque dont Chypre est la victime se poursuit depuis près de quatre décennies, malgré les résolutions de l’ONU appelant au retrait des troupes étrangères de l’île.

Le 1er mai 2004, Chypre est devenue membre de l’Union européenne (UE).

C.Population

À la fin de 2011, Chypre comptait 862 000 habitants.

La répartition ethnique de la population est la suivante: 71,5 % de Chypriotes grecs, 9,5 % de Chypriotes turcs, 0,4 % d’Arméniens, 0,7 % de membres de la communauté maronite, 0,1 % de personnes appartenant à la communauté latine et 19 % de personnes appartenant à d’autres groupes, c’est-à-dire les résidents étrangers, pour la plupart des Britanniques, des Grecs, d’autres Européens, des Arabes et des personnes originaires d’Asie du Sud-Est.

[Note: Il est à noter que dans ces chiffres ne sont bien entendu pas comptabilisés les quelque 160 à 170 000 colons illégaux amenés de Turquie depuis l’invasion turque de 1974 dans le but de modifier l’équilibre démographique de Chypre, en violation du droit international, ni les forces d’occupation turques (environ 40 000 hommes). Selon les estimations, plus de 57 000 Chypriotes turcs ont émigré depuis 1974.]

Avant l’invasion turque, les deux communautés vivaient ensemble dans chacun des six districts administratifs du pays, qui comptaient tous à peu près quatre Chypriotes grecs pour un turc. Du fait de l’invasion turque et de l’occupation persistante de 36,2 % du territoire de la République de Chypre, les Chypriotes grecs qui vivaient dans le nord-est, zone occupée par l’armée de l’envahisseur, en ont été chassés et vivent désormais dans la région contrôlée par le Gouvernement. Quant aux Chypriotes turcs qui vivaient dans le sud‑est, presque tous ont été poussés par leurs dirigeants à s’installer dans la zone occupée par les troupes turques. La grande majorité des 22 000 Chypriotes grecs et maronites qui se sont retrouvés isolés dans la zone occupée par l’armée turque en ont été expulsés par la suite. Malgré les Accords de Vienne III du 2 août 1975, qui stipulaient que «les Chypriotes grecs qui se trouvent actuellement dans le nord de l’île sont libres d’y rester et recevront toute l’aide dont ils ont besoin pour mener une vie normale…», la partie chypriote turque n’a jamais honoré ses engagements humanitaires et a mis au contraire en œuvre une politique d’expulsion forcée. En juillet 2012, il ne restait dans la zone occupée que 442 personnes, âgées pour la plupart, appartenant à ces deux communautés (332 Chypriotes grecs et 110 maronites).

La politique et les pratiques appliquées par la Turquie dans la zone occupée depuis son invasion de Chypre représentent le premier cas de nettoyage ethnique dans l’Europe de l’après-Seconde Guerre mondiale.

D.Zone restée sous le contrôle effectif du Gouvernement de la République

Population dans la région contrôlée par le Gouvernement (fin 2011): 862 000 personnes (hommes: 419 000, femmes: 443 000).

Répartition de la population par âge (fin 2011): 0-14 ans: 16,5 %, 15-64 ans: 70,7 %, 65 ans et plus: 12,8 %.

Pourcentage de la population habitant (fin 2011): en zone urbaine: 67,4 %; en zone rurale: 32,6 %.

Population active en pourcentage de la population âgée de 20 à 64 ans (2011): 75,4 %.

Les langues officielles du pays sont le grec et le turc. La quasi-totalité des Chypriotes grecs sont orthodoxes, les Chypriotes turcs sont musulmans et les membres des minorités arménienne, maronite et latine se réclament respectivement de leur confession chrétienne d’origine. En application du paragraphe 3 de l’article 2 de la Constitution, ces minorités ont choisi d’appartenir à la communauté grecque de Chypre.

E.Économie

L’économie de Chypre repose sur le système de la libre entreprise. Le secteur privé constitue l’épine dorsale de l’activité économique et le Gouvernement se limite à garantir la transparence du cadre dans lequel fonctionnent les mécanismes du marché, à opérer une planification indicative et à assurer le fonctionnement des services publics, ainsi que celui des services sociaux.

Malgré le coup terrible que lui a porté l’invasion turque de 1974, puisque à l’époque la partie occupée contribuait pour près de 70 % au produit intérieur brut (PIB) de Chypre, l’économie du pays a opéré un redressement remarquable. Le recul du volume de la production observé en 1974 a rapidement été inversé et le niveau d’avant 1974 a été dépassé dès 1977. Une fois restaurée la confiance dans l’économie, les investissements ont progressé de manière spectaculaire. Dès 1979, une situation de plein emploi prévalait à nouveau: le taux de chômage, qui approchait les 30 % de la population active au second semestre de 1974, avait été ramené à 1,8 % et les réfugiés avaient été relogés provisoirement en attendant de regagner leur foyer d’origine.

Depuis 1974, l’économie a subi des transformations structurelles majeures. Alors que, durant la seconde moitié des années 1970 et au début des années 1980, le secteur manufacturier représentait l’un des principaux moteurs de la croissance, ce rôle a été repris par le secteur du tourisme dès la fin des années 1980 et par d’autres branches du secteur des services au début des années 1990. Ces modifications structurelles sont reflétées par une différenciation correspondante dans la part respective des secteurs en question dans le PIB et dans l’emploi rémunéré. En résumé, le pays sous-développé dominé par le secteur primaire qu’était Chypre s’est transformé progressivement en une économie de services.

Les échanges internationaux occupent une place importante dans l’économie chypriote. En ce qui concerne la production, le manque de matières premières et de ressources énergétiques et l’absence d’une industrie lourde capable de produire des biens d’équipement rendent nécessaire l’importation de tels produits. Pour ce qui est de la demande, la taille limitée du marché intérieur explique le rôle vital des exportations, qui soutiennent la demande globale de produits agricoles et manufacturés et de services chypriotes. Les principaux partenaires économiques de Chypre sont les pays membres de l’UE, les pays voisins du Moyen-Orient et les pays d’Europe orientale.

Le 1er janvier 2008, la livre chypriote a été remplacée par l’euro en tant que monnaie légale à Chypre, au taux de change fixe et irrévocable de 1 euro pour 0,585274 livre chypriote.

30.Avant le début de la crise économique mondiale, Chypre enregistrait une croissance économique élevée et un environnement macroéconomique stable. Néanmoins, la crise économique internationale a eu un effet important sur l’économie, comme le montrent les principaux indicateurs économiques. Il faut aussi mentionner la tragique explosion de Mari qui, au cours de l’été 2011, a détruit quelque 53 % de la capacité de la production d’électricité. En raison de la crise économique, la conjoncture extérieure, à laquelle l’économie de Chypre, petite et ouverte, est particulièrement exposée, s’est détériorée. L’aggravation de la situation économique de la Grèce, en particulier, a eu des répercussions considérables sur celle de Chypre. Les répercussions négatives de la crise se sont traduites, dans l’économie réelle, par un ralentissement de la croissance économique et par une hausse du taux de chômage, qui a atteint un record. À cause du ralentissement de l’activité économique et de la réduction des recettes publiques, mais aussi d’une politique budgétaire expansionniste destinée à soutenir l’économie réelle, les finances publiques se sont, elles aussi, détériorées. On s’attend donc à une décroissance de l’ordre de 1,5 % en 2012, après une croissance positive de 0,5 % en 2011. On prévoit une hausse de l’inflation, calculée en hausse de l’indice des prix à la consommation, de 2,2 % en 2012, contre 3,3 % en 2011. Le taux de chômage a atteint 7,9 % en 2011, taux considérablement élevé pour Chypre. En raison de la conjoncture difficile dans le secteur du bâtiment et du sentiment négatif en ce qui concerne les perspectives, il est probable que le chômage continue de croître en 2012 et atteigne 11,0 %.

En 2011, le PIB par habitant en termes de pouvoir d’achat s’élève à 92,0 % de la moyenne de l’UE (27 pays).

F.Indicateurs socioéconomiques

Espérance de vie (2011): hommes: 79 ans, femmes: 82,9 ans.

Mortalité infantile pour 1 000 naissances vivantes (2011): 3,1.

Indice synthétique de fécondité (2011): 1,35.

Taux d’alphabétisation (15 ans et plus) (recensement de 2001): global: 97 %, hommes: 99 %, femmes: 95 %.

Produit national brut (2008): 17 155,7 millions d’euros.

Taux d’inflation: 4,7 % (2008), 0,3 % (2009), 2,4 % (2010), 3,3 % (2011).

Dette publique extérieure (2011): 12 720 millions d’euros.

Taux de chômage (moyenne 2011): global: 7,7 %, hommes: 7,8 %, femmes: 7,6 %. En 2010, le taux de chômage s’élevait à environ 6,2 %.

Un médecin pour 348 habitants (2009).

Un lit d’hôpital pour 263 habitants (2009).

Nombre de lignes téléphoniques pour 1 000 habitants (2011): 446.

Nombre de voitures particulières pour 1 000 habitants (2010): 620.

Note: En raison de la présence de l’armée turque, le Gouvernement de la République de Chypre est empêché d’exercer un contrôle effectif dans la zone occupée; les chiffres officiels relatifs à la partie occupée de Chypre ne sont donc pas disponibles.

II.Structure politique générale

A.Histoire politique récente et faits marquants

La République a été instituée le 16 août 1960, avec l’entrée en vigueur de trois importants traités et de la Constitution, instruments dont les origines remontent à l’Accord de Zurich du 11 février 1959 entre la Grèce et la Turquie et à l’Accord de Londres du 19 février 1959 entre la Grèce, la Turquie et le Royaume-Uni. La Constitution de la République et les trois traités ont établi le cadre juridique de l’existence et du fonctionnement du nouvel État. Les trois traités en question sont les suivants:

Le Traité relatif à la création de la République de Chypre, signé par Chypre, la Grèce, la Turquie et le Royaume-Uni. Ce traité prévoyait la création de la République de Chypre et, entre autres, la création et le fonctionnement de deux bases militaires britanniques à Chypre, la coopération des parties pour la défense commune de Chypre et la reconnaissance et le respect des droits de l’homme de toute personne relevant de la juridiction de la République, droits comparables à ceux énoncés dans la Convention européenne des droits de l’homme (Recueil des Traités des Nations Unies, vol. 382 (1960), no 5476).

Le Traité de garantie, signé par Chypre, le Royaume-Uni, la Grèce et la Turquie, par lequel l’indépendance, l’intégrité territoriale et la sécurité de la République de Chypre sont reconnues et garanties, au même titre que le régime instauré par les articles fondamentaux de la Constitution (Recueil des Traités des Nations Unies, vol. 382 (1960), no 5475).

Le Traité d’alliance signé par Chypre, la Grèce et la Turquie, destiné à protéger la République de Chypre contre toute attaque ou agression directe ou indirecte visant à porter atteinte à son indépendance ou à son intégrité territoriale (Recueil des Traités des Nations Unies, vol. 397 (1961), no 5712).

Fondement d’une république indépendante et souveraine, la Constitution chypriote a été décrite en ces termes par de Smith, qui fait autorité en matière de droit constitutionnel: «Unique par sa complexité inextricable et par la multiplicité des garanties par lesquelles elle protège la principale minorité, la Constitution de Chypre se distingue de toutes les autres constitutions du monde.» (S. A. de Smith, «The New commonwealth and its constitutions», Londres, 1964, p. 296).

Il n’est donc pas étonnant qu’en moins de trois ans, l’usage abusif de ces garanties par les responsables chypriotes turcs ait rendu la Constitution totalement inapplicable; les amendements à la Constitution que le Président de la République a été dans l’obligation de proposer ont été rejetés immédiatement par le Gouvernement turc et, ultérieurement, par les dirigeants chypriotes turcs.

Animée par une volonté d’expansion territoriale, la Turquie a incité les responsables chypriotes turcs à s’insurger contre l’État, contraint les Chypriotes turcs membres des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire et de la fonction publique à démissionner de leur poste, et constitué des enclaves militaires à Nicosie et dans d’autres régions de l’île.

Suite à ces événements et aux violences intercommunautaires induites par eux, le Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations Unies a été saisi de la situation. En vertu de la résolution 186 (1964) du 4 mars 1964, une Force de maintien de la paix des Nations Unies a été envoyée à Chypre et un médiateur a été nommé. Dans son rapport (S/6253‑A/6017 du 26 mars 1965), ce médiateur, M. Galo Plaza, a mis en cause le cadre juridique établi en 1960 et proposé des amendements qui, eux aussi, ont immédiatement été rejetés par la Turquie; cette attitude a entraîné une détérioration grave de la situation, la Turquie faisant constamment peser des menaces sur la souveraineté et l’intégrité territoriale de Chypre, menaces qui donnèrent lieu à l’adoption d’une série de résolutions dans lesquelles les Nations Unies demandaient, entre autres, que soient respectées la souveraineté, l’indépendance et l’intégrité territoriale de Chypre.

En 1965, le Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies décrivait ainsi la politique menée par les dirigeants chypriotes turcs: «Les dirigeants chypriotes turcs ont adopté une position strictement opposée à toute mesure pouvant amener les membres des deux communautés à vivre et à travailler ensemble ou risquant de placer les Chypriotes turcs dans une situation où ils seraient tenus de reconnaître l’autorité des agents du Gouvernement. En fait, étant donné que les dirigeants chypriotes turcs se sont fixé comme objectif politique la séparation physique et géographique des communautés, il n’est guère probable qu’ils encouragent les Chypriotes turcs à entreprendre des activités qui pourraient être interprétées comme démontrant les avantages d’une autre politique. Le résultat est une politique apparemment délibérée d’autoségrégation de la part des Chypriotes turcs.» (S/6426 du 10 juin 1965).

En dépit de cette politique, la situation s’était peu à peu normalisée à Chypre et au début de 1974 une importante proportion de Chypriotes turcs côtoyaient leurs concitoyens grecs de souche dans leur vie quotidienne et professionnelle, avec l’appui actif du Gouvernement.

Sous le prétexte du coup d’État perpétré le 15 juillet 1974 contre le Gouvernement de la République de Chypre à l’instigation de la junte militaire alors au pouvoir en Grèce, la Turquie a envahi l’île le 20 juillet. Quarante mille soldats turcs ont débarqué sur l’île, au mépris de la Charte des Nations Unies, des Traités de garantie, de création et d’alliance et des règles et principes pertinents du droit international.

Depuis lors, 36,2 % de l’île environ restent occupés et 40 % des Chypriotes grecs, qui comptaient pour 82 % de la population de la partie occupée de Chypre, en ont été expulsés. Des milliers de personnes, notamment des civils, ont été tuées, blessées ou maltraitées. En outre, on ne connaît toujours pas le sort de centaines de Chypriotes grecs parmi lesquels des femmes, des enfants et d’autres civils, dont il a été établi que beaucoup avaient été faits prisonniers par l’armée turque.

Dans le cadre de la politique concertée turque visant à modifier le caractère des régions de l’île placées sous occupation, une destruction systématique du patrimoine culturel et religieux de Chypre a commencé dans la zone occupée et se poursuit encore à ce jour.

Il y a plus grave encore; en effet, depuis 1974, la Turquie a systématiquement appliqué une politique de colonisation illégale dans la partie occupée, qui s’est traduite par une modification radicale de la structure de la population, dont une grande partie se compose à présent de colons. À l’heure actuelle, quelque 160 à 170 000 colons y résident, dont 110 000 de nationalité turque. À cela s’ajoute la présence permanente de quelque 40 000 militaires des forces d’occupation turques.

Au cours de la même période, 57 000 Chypriotes turcs ont émigré de Chypre et le nombre de Chypriotes turcs vivant dans la partie occupée de l’île a même diminué pour passer de 116 000 en 1974 à 88 000 à l’heure actuelle, alors que l’accroissement naturel de la population aurait dû porter ce nombre à 153 578.

Dans une série de résolutions, l’Assemblée générale et le Conseil de sécurité des Nations Unies ont demandé le respect de la souveraineté, de l’indépendance et de l’intégrité territoriale de la République de Chypre et le retrait de toutes les troupes étrangères. Par ailleurs, les Nations Unies ont condamné tous les actes sécessionnistes, invité tous les États à ne pas reconnaître, faciliter ou aider de manière quelconque l’entité illégale, exigé que les personnes déplacées soient autorisées à rentrer chez elles en toute sécurité et que les personnes disparues soient recherchées, et demandé que les droits de l’homme des Chypriotes soient respectés.

Malgré les appels répétés de la communauté internationale, la Turquie a refusé de respecter ses obligations internationales.

Le 15 novembre 1983, l’administration locale subordonnée illégale, mise en place par la Turquie dans la partie de Chypre occupée, a publié une déclaration unilatérale par laquelle elle prétendait créer un État indépendant («la République turque de Chypre Nord»). La Turquie a immédiatement reconnu l’entité sécessionniste, mais aucun autre État n’a agi dans ce sens. D’autres mesures sécessionnistes ont été prises par la suite. Dans ses résolutions 541 (1983) et 550 (1984), le Conseil de sécurité des Nations Unies a condamné la proclamation unilatérale et tous les actes sécessionnistes qui ont suivi, les a déclarés illégaux et nuls et a exigé leur retrait immédiat. Il a également invité tous les autres États à ne pas reconnaître le prétendu État et à ne lui apporter ni collaboration ni aucune autre forme d’assistance.

La Commission européenne des droits de l’homme, elle aussi saisie de la question, a estimé que le Gouvernement turc était responsable de violations graves, massives et continuelles des droits de l’homme à Chypre et en particulier d’assassinats, de viols et d’expulsions, et qu’il était coupable d’avoir refusé à plus de 180 000 réfugiés chypriotes grecs − soit près du tiers de la population totale − l’autorisation de reprendre possession de leur domicile et de leurs biens dans la zone occupée (cf. rapport de la Commission européenne des droits de l’homme en date du 10 juillet 1976 faisant suite aux requêtes de Chypre contre la Turquie nos6780/74 et 6950/75 et rapport en date du 4 octobre 1983 faisant suite à la requête de Chypre contre la Turquie no 8007/77).

De plus, dans l’affaire Chypre c. Turquie (requête no 25781/94), la Cour européenne des droits de l’homme a statué sur les conséquences juridiques globales de l’invasion de Chypre par la Turquie et de sa présence militaire continue sur l’île. Dans son arrêt du 10 mai 2001, la Cour a réitéré un certain nombre de principes fondamentaux, dont les plus importants sont les suivants:

a)Le Gouvernement de la République de Chypre est l’unique Gouvernement légitime de Chypre;

b)De l’avis de la communauté internationale et de la Cour, la «République turque de Chypre-Nord» ne constitue pas un État au regard du droit international;

c)L’administration locale subordonnée de «Chypre-Nord» ne survit que par l’occupation militaire par la Turquie et d’autres formes d’appui de la part de cette dernière;

d)La Turquie «exerçant en pratique un contrôle global sur “Chypre-Nord”» est responsable de toutes les violations des droits de l’homme commises par ses soldats, ses fonctionnaires ou l’administration locale.

La Cour européenne des droits de l’homme a en outre rendu des arrêts importants au titre de requêtes individuelles formées par des Chypriotes. Dans un arrêt qui a fait date, relatif à l’affaire Loizidou c. Turquie, qui a marqué un nouveau point de départ dans sa jurisprudence, la Cour a ordonné au Gouvernement turc d’indemniser la requérante pour la période pendant laquelle elle avait été privée de l’utilisation de ses biens et de lui assurer la jouissance pacifique de ses biens à Kyrenia et le plein accès à ceux‑ci.

La Turquie a refusé de respecter l’arrêt de la Cour pendant un certain nombre d’années et, bien qu’elle ait versé des dommages et intérêts en décembre 2003, Ankara ne s’est toujours pas conformée à l’arrêt accordant à la requérante la pleine jouissance de ses biens et un accès sans restriction à ceux‑ci. Le droit des propriétaires déplacés sur leurs biens a été depuis reconfirmé à maintes reprises dans toute une série de plaintes portées contre la Turquie par des propriétaires chypriotes grecs de biens sis dans la partie occupée, dont les plus récentes ont fait l’objet d’arrêts fin 2009.

Avec l’adhésion de Chypre à l’Union européenne le 1ermai 2004, c’est l’ensemble du territoire de la République de Chypre qui a adhéré à l’UE, mais en vertu du Protocole no 10 annexé au Traité d’adhésion de 2003, «[l]’application de l’acquis est suspendue dans les zones de la République de Chypre où le Gouvernement de la République de Chypre n’exerce pas un contrôle effectif». Dans l’arrêt qu’elle a rendu dans l’affaire Meleti o s Apostolides c. David Charles Orams et Linda Elizabeth Orams (28 avril 2009), la Cour européenne de justice a réaffirmé l’intégrité territoriale de la République dans la mesure où elle a reconnu la juridiction de la République et de ses tribunaux dans les zones de la République où le Gouvernement n’exerçait pas un contrôle effectif. Les Chypriotes grecs qui possèdent des biens dans les zones occupées de la République demeurent les propriétaires légaux de ces biens, malgré l’occupation illégale turque, et ont la faculté de saisir la justice pour en empêcher toute exploitation illicite.

Compte tenu de la poursuite de l’occupation turque, il est clair que le Gouvernement de la République de Chypre est empêché par la force armée d’exercer son autorité et son contrôle dans la zone occupée et d’y assurer l’exercice et le respect des droits de l’homme.

Désireux de parvenir à une solution pacifique, le Gouvernement de la République de Chypre a accepté, malgré la poursuite de l’occupation illégale du pays, que des négociations intercommunautaires soient menées conformément aux résolutions susmentionnées, dans le cadre de la mission de bons offices du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies. Des efforts sont faits dans ce sens jusqu’à aujourd’hui, mais n’ont toujours pas abouti à cause des projets séparatistes de la Turquie.

Le Gouvernement de la République de Chypre aspire à une solution juste, viable, globale et fonctionnelle, dans le cadre d’une structure fédérale bicommunautaire et bizonale garante de l’indépendance, de l’intégrité territoriale, de l’unité et de la souveraineté de Chypre sans troupes d’occupation et sans colons illégaux, c’est-à-dire une solution propre à assurer la réunification de l’île et l’entier respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales de tous les Chypriotes, indépendamment de leur origine ethnique ou de leur religion.

B.La structure constitutionnelle

La Constitution a institué un régime présidentiel dans lequel le président est un Chypriote grec, et le vice‑président un Chypriote turc, tous deux élus pour cinq ans par leur communauté respective (art. 1).

Le président et le vice‑président de la République garantissent l’exercice du pouvoir exécutif par le Conseil des ministres ou par chaque ministre. Le Conseil des ministres se compose de 7 ministres chypriotes grecs et de 3 ministres chypriotes turcs, proposés respectivement par le président et par le vice‑président, mais nommés conjointement par ces derniers. Le Conseil des ministres exerce le pouvoir exécutif dans tous les domaines, à l’exception de ceux qui, en vertu de dispositions expresses de la Constitution, relèvent de l’autorité du président, du vice‑président ou des chambres de chaque communauté (art. 54).

Aux termes de la Constitution, la Chambre des représentants est l’organe législatif monocaméral de la République. La communauté grecque élit 56 des 80 membres qui la composent et la communauté turque 24, pour un mandat de cinq ans; le président de la Chambre est Chypriote grec, le vice‑président Chypriote turc et tous deux sont élus séparément.

La Chambre des représentants exerce le pouvoir législatif dans tous les domaines, à l’exception de ceux que la Constitution (art. 61) réserve expressément aux Chambres de communauté.

La Constitution institue deux Chambres de communauté devant exercer des fonctions législatives et administratives dans certains domaines restreints, dont les affaires religieuses, les questions culturelles et d’éducation et les taxes et impôts locaux perçus pour assurer le fonctionnement des organes et institutions relevant de l’autorité de la Chambre (art. 86 à 90).

La Constitution a prévu la mise en place d’une Cour constitutionnelle suprême, composée d’un président neutre, d’un juge chypriote grec et d’un juge chypriote turc nommés par le président et par le vice‑président de la République, et d’une Haute Cour composée de 2 juges chypriotes grecs, de 1 juge chypriote turc et de 1 président neutre, tous trois nommés de la même façon.

La Cour suprême constitutionnelle a compétence pour statuer sur toutes les questions de droit d’ordre constitutionnel et administratif. La Haute Cour est l’instance d’appel suprême. Elle a un pouvoir de révision et peut rendre des ordonnances d’habeas corpus et autres ordonnances du même type. La compétence ordinaire en matière civile et pénale est exercée en première instance par les tribunaux de district et les cours d’assises. La Constitution interdit en toutes circonstances la création de comités judiciaires ou de juridictions spéciales ou d’exception.

Les hauts fonctionnaires de la République indépendants sont le procureur général et son adjoint, le vérificateur général des comptes et son adjoint et le gouverneur et le vice‑gouverneur de la Banque centrale, également nommés par le président et le vice‑président de la République selon un critère d’appartenance communautaire. La fonction publique doit se composer de 70 % de Chypriotes grecs et de 30 % de Chypriotes turcs, de même que la Commission de la fonction publique, responsable des nominations, des promotions, de la discipline, etc.

La Constitution a donné le droit à chacune des deux communautés d’entretenir des relations privilégiées avec, respectivement, la Grèce et la Turquie et, en particulier, de recevoir des subventions des Gouvernements grec ou turc pour leurs institutions respectives consacrées à l’enseignement, à la culture, aux sports et aux œuvres de bienfaisance; elles peuvent en outre recevoir et employer des maîtres d’école, des professeurs et des ministres du culte fournis par les Gouvernements grec ou turc (art. 108).

La communautarisation affirmée qu’instituait la Constitution se retrouvait dans le système électoral. Toutes les élections devaient se tenir sur la base de listes électorales présentées séparément par chacune des communautés (art. 63 et 94) et de scrutins séparés (art. 1er, 39, 62, 86, 173 et 178). À présent, les élections reposent sur le principe de la représentation proportionnelle.

En raison du retrait des responsables et des fonctionnaires chypriotes turcs et de leur refus d’exercer leurs fonctions, le gouvernement du pays a cessé d’être en conformité avec certaines des dispositions de la Constitution.

La crise a éclaté lorsque les présidents neutres de la Cour suprême constitutionnelle et de la Haute Cour ont démissionné, respectivement en 1963 et 1964, ce qui a paralysé le fonctionnement de ces deux institutions. Il est à noter que les juges chypriotes turcs des tribunaux de district et des juridictions supérieures sont restés à leur poste jusqu’en 1966, date à laquelle les autorités chypriotes turques les ont contraints à démissionner, à la suite de quoi la moitié d’entre eux ont fui à l’étranger.

La situation décrite ci-dessus a poussé à l’adoption de mesures législatives correctrices. Ainsi, en 1964, une nouvelle loi sur l’administration de la justice (dispositions diverses) a été adoptée, par laquelle a été créée une nouvelle Cour suprême réunissant les compétences de la Cour suprême constitutionnelle et de la Haute Cour. Le premier président de la Cour suprême a été un Chypriote turc, doyen des juges à la Haute Cour. La même loi a rétabli dans ses fonctions le Conseil supérieur de la magistrature, chargé d’assurer l’indépendance de la justice.

La constitutionalité de la loi de 1964 sur l’administration de la justice (dispositions diverses) a été contestée devant la Cour suprême qui, dans l’affaire Attorney  General of the Republic v. Mustafa Ibrahim (1964) (Cyprus Law Reports, p. 195), a estimé que cette loi se justifiait par la doctrine de la nécessité, compte tenu de la situation anormale qui régnait à Chypre. Par la suite, l’administration de la justice a repris son fonctionnement normal.

Parmi les autres domaines d’importance dans lesquels des mesures législatives ont dû être prises en vertu de la même doctrine pour remédier à des situations analogues figurent la Chambre de communauté, la Commission de la fonction publique et la composition de la Chambre des représentants.

En raison du refus de participation de l’une des deux communautés chypriotes, l’exécutif et le législatif ne sont en fait pas bicommunautaires (voir par. 53 à 56 concernant les événements de la période 1963‑1964). Mais lorsque, en 1985, le nombre de sièges à la Chambre des représentants a été relevé de 50 à 80, 24 sièges ont été attribués aux représentants censés être élus par la communauté turque aux termes de l’article 62 de la Constitution. Ces sièges sont pour l’instant vacants. C’est ainsi que la communauté grecque élit en fait des représentants pour 56 de ces sièges seulement.

En 2006, une loi spéciale, intitulée «Loi relative à l’exercice du droit de vote et à l’éligibilité des membres de la communauté turque ayant leur résidence habituelle dans les zones libres de la République (dispositions temporaires)» [L.2(1)/2006] a été adoptée; en vertu cette loi, les Chypriotes turcs résidant dans la zone contrôlée par le Gouvernement ont reçu le droit d’élire et d’être élus à toutes les élections nationales (municipales, parlementaires et présidentielles). Pour ce qui est des élections parlementaires, il s’agit de pourvoir aux 56 sièges attribués à la communauté grecque. En vertu de la loi relative à l’élection d’un membre du Parlement européen de 2004 [L.10(I)/2004, telle que modifiée], les Chypriotes turcs ont le droit d’élire et d’être élus aux élections au Parlement européen, quel que soit leur lieu de résidence à Chypre.

En vue de sauvegarder les droits de certaines catégories de personnes qui, d’une manière ou d’une autre, pouvaient prétendre à la citoyenneté chypriote mais ne correspondaient pas à la définition donnée dans la Constitution de l’une et l’autre communautés (grecque/turque) de Chypre (voir art. 2), la Constitution a fait de ces catégories des groupes religieux, c’est-à-dire des «groupes de personnes résidant habituellement à Chypre, professant la même religion, soit qu’elles appartiennent au même rite, soit qu’elles sont soumises à la même juridiction religieuse, et comptant, à la date de l’entrée en vigueur de la Constitution, plus d’un millier de membres, dont au moins 500 sont devenus à cette date citoyens de la République». En 1960, les maronites, arméniens et latins chypriotes rentraient dans cette définition des groupes religieux et ont été reconnus citoyens chypriotes.

Ces groupes ont eu alors à choisir entre l’une ou l’autre communauté pour pouvoir exercer leurs droits politiques conformément au principe du partage du pouvoir convenu entre les deux communautés (voir par. 24). Tous ont choisi d’appartenir à la communauté grecque.

Chaque groupe religieux a le droit additionnel d’élire un représentant chargé de le représenter à la Chambre des représentants, qui exerce des fonctions consultatives en ce qui concerne la législation qui lui est applicable.

III.Cadre juridique général de la protectiondes droits de l’homme

Le système juridique chypriote repose sur la common law et sur les principes d’équité applicables à l’époque de l’accession à l’indépendance et modifiés ou complétés depuis par la législation de la République et par la jurisprudence. Par ailleurs, l’indépendance a permis la mise en place et le développement d’un droit administratif et constitutionnel de type romaniste.

Il était naturel que Chypre, pays dont l’histoire et la tradition de civilisation et de culture remontent à des temps très anciens, accorde, dès son indépendance du pouvoir colonial, une importance capitale au droit international et plus particulièrement aux normes relatives aux droits de l’homme. Compte tenu de la primauté des instruments internationaux, le droit international des droits de l’homme est venu enrichir et renforcer la législation interne relative à la protection des droits de l’homme et des libertés. L’une des premières tâches de la République a donc consisté à examiner les traités étendus à son territoire par la Grande-Bretagne et à faire savoir, selon les cas, si elle entendait rester liée par ces traités; elle a également examiné les instruments régionaux et internationaux existants relatifs aux droits de l’homme, et elle y a adhéré ou les a ratifiés dans la plupart des cas, politique qui demeure inchangée à ce jour.

La reconnaissance de la prédominance du droit international, des objectifs et des principes de la Charte des Nations Unies, en particulier du règlement pacifique des différends sur la base du respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales, occupe une place centrale dans la conduite des relations internationales de Chypre.

La République de Chypre est devenue partie à la plupart des instruments internationaux fondamentaux et autres relatifs aux droits de l’homme adoptés aux niveaux international et régional européen. Les normes et obligations découlant de ces instruments font partie intégrante de l’ordre juridique de Chypre. La liste actualisée des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme auxquels Chypre est partie figure en annexe.

Tout en appliquant les règles nécessaires à la promotion des droits de l’homme et en assurant une séparation des pouvoirs et plus particulièrement l’indépendance du pouvoir judiciaire, les institutions chypriotes participent d’un communautarisme porteur d’une séparation et même d’une polarisation des communautés.

La Constitution de 1960, loi suprême de la République, est l’instrument principal de la reconnaissance et de la protection des droits de l’homme. Le titre II de la Constitution, intitulé «Libertés et droits fondamentaux», reprend et développe la Déclaration universelle des droits de l’homme et la Convention européenne des droits de l’homme.

Si les autorités législatives, exécutives et judiciaires sont toutes tenues, conformément à l’article 35 de la Constitution, de veiller, dans les limites de leurs compétences respectives, à la mise en œuvre effective des droits de l’homme, c’est le pouvoir judiciaire qui, en toute indépendance et en dernier ressort, protège les droits de l’homme et les libertés.

La législation en général et la législation et la procédure pénales en particulier ont pour objet et effet de protéger les droits de l’homme. La Cour suprême déclare inconstitutionnelle toute loi ou disposition qui est contraire aux droits de l’homme de quelque manière que ce soit, ce qu’elle a déjà fait à maintes reprises.

Toute restriction ou limitation des droits de l’homme garantis par la Constitution doit être prévue par la loi et être absolument nécessaire dans l’intérêt de la sécurité de la République, de l’ordre constitutionnel, de la sécurité, de l’ordre ou de la santé publics ou de la protection des droits garantis par la Constitution à tout individu. Les dispositions relatives à de telles restrictions ou limitations doivent être interprétées de façon stricte. Dans l’affaire Fina Cyprus Ltd. v. The Republic (RSCC, vol. 4, p. 33), la Cour suprême constitutionnelle a estimé que la législation ayant des incidences sur les droits et libertés fondamentaux garantis par la Constitution ainsi que son interprétation étaient régies par le principe établi selon lequel de telles dispositions doivent, en cas d’incertitude, être interprétées en faveur desdits droits et libertés.

Dès lors qu’une mesure positive a été envisagée, dans le cadre de la Constitution ou d’autres instruments, en ce qui concerne certains droits, et principalement les droits économiques, sociaux ou culturels, ladite mesure doit être prise dans un délai raisonnable.

Les recours accessibles au particulier qui estime que ses droits ont été violés sont les suivants:

a)Droit de recours et recours hiérarchique;

b)Pourvoi devant la Cour suprême en vue de l’annulation de tout acte, omission ou décision d’un organe ou d’une autorité (tant en première instance qu’en révision);

c)Contestation, par l’une des parties à un procès, de la constitutionnalité d’une loi ou d’une décision; le tribunal est alors tenu de renvoyer la question devant la Cour suprême et de surseoir à statuer;

d)Procédure civile en vue d’une indemnisation, d’une restitution ou d’un jugement déclaratoire. En cas de préjudice irréparable, une injonction peut être accordée;

e)Poursuites pénales engagées par des particuliers;

f)Droit de faire appel, dans les affaires civiles comme pénales;

g)Ordonnances d’habeas corpus, de certiorari, d’interdiction, de mandamus et de quo warranto;

h)Les juridictions pénales peuvent accorder réparation aux victimes d’infractions, à concurrence de 3 000 livres chypriotes dans le cas des cours d’assises;

i)La responsabilité de la République est engagée pour tout autre acte ou omission illicite ayant causé un préjudice qui a été commis par ses fonctionnaires ou autorités dans l’exercice ou le prétendu exercice de leurs fonctions;

j)Le Conseil des ministres peut ordonner la création d’une commission d’enquête pour enquêter et faire un rapport sur les allégations faisant état de fautes graves, en particulier de violations des droits de l’homme;

k)Dans le cadre de l’exercice de leurs fonctions, en particulier du contrôle parlementaire, la Chambre des représentants et les commissions parlementaires examinent régulièrement des allégations faisant état d’atteintes aux droits de l’homme ou des situations ayant entraîné des atteintes aux droits de l’homme;

l)Le Procureur général de la République est particulièrement tenu de veiller au respect de la légalité et de la primauté du droit; il peut fréquemment, d’office ou à la demande d’un plaignant, ordonner des enquêtes ou donner des avis sur les moyens d’action;

m)Le Commissaire à l’administration (Médiateur) peut, entre autres, enquêter sur les plaintes émanant de particuliers dont les droits ont été violés par l’administration ou lorsque celle-ci a agi de façon contraire à la loi ou par négligence; ses compétences ayant été élargies, il enquête également sur les plaintes pour discrimination sexuelle;

n)La Commission indépendante pour l’examen des plaintes contre les agents des forces de police est habilitée à examiner les plaintes déposées contre des policiers et à enquêter à leur sujet. Elle est indépendante et se compose de membres possédant les qualifications requises et les plus hautes valeurs morales, nommés par le Président de la République;

o)L’Institution nationale pour la protection des droits de l’homme est chargée d’instruire les plaintes déposées par les particuliers dénonçant des violations des droits de l’homme et d’en informer les autorités directement concernées. Dans chaque cas, elle recommande aussi des mesures correctives spécifiques aux autorités compétentes. Le Président de cette institution jouit par ailleurs de la prérogative d’ouvrir d’office des enquêtes même en l’absence de plainte préalable, s’il décide qu’il existe un motif suffisant;

p)Les particuliers qui ont épuisé tous les recours internes peuvent engager un recours ou présenter des communications dans le cadre des procédures facultatives mises en place en application de divers instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, dont la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, le Protocole facultatif se rapportant à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, la Convention européenne des droits de l’homme, le premier Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques et la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants;

q)Chypre a également accepté la juridiction obligatoire de la Cour européenne des droits de l’homme et reconnu la juridiction obligatoire de la Cour internationale de Justice en vertu de la clause facultative figurant au paragraphe 2 de l’article 36 du Statut de la Cour.

En cas de guerre ou de danger public menaçant l’existence de tout ou partie de la République, certains des droits fondamentaux garantis par la Constitution peuvent être suspendus durant la période d’urgence par une proclamation de l’état d’exception émanant du Conseil des ministres. Cette proclamation doit être faite devant la Chambre des représentants, qui a la possibilité de la rejeter. Peuvent être suspendus les droits suivants:

a)L’interdiction du travail forcé et obligatoire;

b)Le droit à la liberté et à la sécurité des personnes;

c)La liberté de circulation;

d)L’inviolabilité du domicile;

e)Le secret de la correspondance;

f)La liberté de parole et d’expression;

g)Les droits à la liberté de réunion et d’association;

h)Le droit à la propriété, à condition que les réquisitions de biens s’accompagnent de mesures rapides d’indemnisation;

i)Le droit d’exercer la profession ou toute activité de son choix; et

j)Le droit de grève.

Il convient de noter que, depuis son accession à l’indépendance, Chypre n’a jamais proclamé l’état d’exception, pas même lorsque le pays a été envahi et en partie occupé par la Turquie, situation qui perdure à ce jour.

Les conventions internationales que la République de Chypre a ratifiées ou auxquelles elle a adhéré sont incorporées dans le droit interne et acquièrent la primauté sur toutes les autres lois dès leur publication au Journal officiel. Elles sont directement applicables dans le pays et peuvent être (et sont effectivement) invoquées devant les tribunaux et les autorités administratives, qui peuvent en assurer directement la mise en œuvre (voir décision rendue le 20 janvier 1986 par la Cour suprême en appel dans l’affaire civile no6616, Malachtou c . Aloneftis). Si une convention internationale contient des dispositions ne pouvant s’appliquer automatiquement, le pouvoir législatif est juridiquement tenu d’adopter les lois permettant d’aligner le droit interne sur ladite convention afin de rendre celle-ci totalement applicable.

En outre, le Commissaire aux lois (l’actuel titulaire de ce poste est l’ancien chef du Département Union européenne du Bureau juridique de la République), responsable en toute indépendance de la mise à jour de la législation, est également chargé de veiller à ce que Chypre s’acquitte de ses obligations en matière d’établissement de rapports en vertu des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme; il a de plus pour mission de relever les domaines où il y a incompatibilité entre le droit interne et la pratique administrative, d’une part, et ces instruments et les normes internationales en vigueur dans le domaine des droits de l’homme, d’autre part, et de proposer les mesures nécessaires.

Chypre est une démocratie pluraliste qui veille au respect absolu des droits et libertés de l’individu. Elle s’efforce continuellement de progresser dans le domaine des droits de l’homme en surmontant les difficultés, dont la plus importante est l’occupation étrangère permanente de plus d’un tiers de son territoire. Grâce à une action positive, et en particulier à la formation et à l’éducation, l’État lutte contre les derniers préjugés, notamment en matière d’égalité des sexes.

Il existe plusieurs organisations non gouvernementales, qui travaillent dans tous les domaines de la vie, notamment des associations de défense des droits de l’homme. Il existe également un certain nombre d’organismes publics tels que l’organisme chargé de la promotion et de la protection des droits de la femme, le Conseil consultatif tripartite chargé des questions d’emploi et le Conseil pour les prix et les revenus.

Le rôle des médias dans la promotion et la protection des droits de l’homme est considérable. La presse est entièrement libre et les journaux et revues (quotidiens, hebdomadaires et autres) appartiennent au secteur privé. Il en va de même pour l’audiovisuel, à l’exception d’une station de radio et d’une chaîne de télévision qui appartiennent à l’État, mais dont le fonctionnement est assuré par une société indépendante.

IV.Information et publicité

Les conventions et traités internationaux auxquels Chypre devient partie sont tous publiés au Journal officiel. Les médias, la presse écrite et la presse électronique en assurent la publicité en mentionnant, le cas échéant, que Chypre a accepté, dans le cadre de procédures facultatives, que des recours soient formés devant les organes conventionnels ou que des communications leur soient soumises.

Les droits de l’homme sont considérés comme une question d’une grande importance; aussi, des efforts particuliers sont-ils constamment mis en œuvre pour sensibiliser l’opinion publique et les autorités concernées aux droits énoncés dans les divers instruments relatifs aux droits de l’homme. La sensibilisation, nécessaire, entre autres, pour faire valoir des droits ou pour prévenir les abus, s’opère principalement par le moyen de l’éducation: l’enseignement des droits de l’homme est présent dans les programmes d’enseignement à tous les niveaux, dans la formation des enseignants et des membres de la police, dans les centres d’orientation parentale et autres institutions de même nature.

L’État, les médias et le secteur privé publient des ouvrages et des brochures consacrés à la question de la promotion des droits de l’homme, ainsi qu’au problème de leur violation. Des affiches et des brochures sont distribuées dans les établissements publics, les écoles et les centres et organismes pour les jeunes. Des communiqués de presse spéciaux consacrés aux droits de l’homme sont publiés chaque fois que nécessaire pour informer le public des événements locaux et internationaux, y compris les conférences, séminaires, exposés, colloques et autres manifestations du même ordre. Des articles consacrés aux droits de l’homme paraissent régulièrement dans les journaux et dans la presse spécialisée, notamment dans les publications du barreau et des organisations s’occupant des droits de l’homme.

V.Faits nouveaux les plus récents

Malgré les changements survenus dans le paysage international depuis l’invasion et l’occupation turques de 36,2 % du territoire en 1974, la nature du problème politique demeure intacte. Il s’agit du recours à la force contre un État souverain, d’une invasion, de la partition forcée découlant d’une agression et d’une occupation étrangères, de la violation massive et persistante des droits de l’homme, de la destruction ou de la profanation de biens religieux et culturels, de la colonisation illicite et de la modification de la démographie, de l’usurpation et de l’exploitation illégale de biens, de la ségrégation forcée de la population et d’efforts sécessionnistes persistants pour projeter l’existence d’une entité illégale séparée dans la zone occupée.

L’adhésion de Chypre à l’Union européenne en 2004 a donné une nouvelle dimension aux efforts déployés pour parvenir à un règlement. Bien que le cadre global du règlement demeure du ressort de l’ONU, la contribution de l’UE est devenue plus que jamais essentielle. Les principes et les valeurs de l’UE devraient être pleinement intégrés dans un futur règlement politique et l’acquis communautaire devrait sauvegarder le bon fonctionnement de l’État, protéger les droits de tous les citoyens et garantir la qualité de vie dont tous les citoyens européens jouissent aujourd’hui.

C’est dans ce contexte qu’en décembre 2004 Chypre a consenti à l’ouverture de pourparlers d’adhésion à l’UE avec la Turquie, partenaire clef de tout règlement du problème de Chypre, puisqu’elle continue d’occuper plus du tiers du pays, État membre de l’UE. Ce faisant, le Gouvernement était mû par la conviction que ce processus servirait les intérêts bien compris de Chypre, et celui de chacune des parties intéressées, en l’occurrence la Turquie et l’UE. Le Gouvernement était enclin à penser que les démarches d’adhésion de la Turquie à l’UE produiraient un effet d’entraînement, à Ankara, en suscitant la volonté politique nécessaire de la Turquie de renoncer à l’idée qu’elle se faisait de Chypre qui, d’adversaire, deviendrait un partenaire, un voisin précieux et un allié potentiel au sein de l’UE. Pareil changement d’attitude rendrait anachroniques les considérations qui avaient conduit la Turquie à maintenir son armée d’occupation à Chypre et qui nourrissaient son intransigeance.

Le 3 septembre 2008, de véritables négociations sur le problème de Chypre ont débuté, sous les auspices de l’ONU, entre les dirigeants des deux communautés, le Président de la République, Demetris Christofias, et le dirigeant d’alors de la communauté chypriote turque, Mehmet Ali Talat. D’emblée, il a été convenu avec le Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies qu’il ne serait fixé aucun délai artificiel et qu’il n’y aurait aucune intervention extérieure sous forme d’arbitrage ou de soumission de solutions toutes faites. Il a aussi été réaffirmé que la réunification de Chypre devait être fondée sur un État de Chypre doté d’une souveraineté, d’une personnalité internationale et d’une citoyenneté uniques, son indépendance et son intégrité territoriale étant garanties, et composé de deux communautés politiquement égales, telles qu’elles sont décrites dans les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, au sein d’une fédération bicommunautaire et bizonale, et selon laquelle un tel règlement devait exclure l’union, en totalité ou en partie, avec un autre pays, ou toute autre forme de partition ou de sécession (résolution 1251 (1999) du Conseil de sécurité). Ce règlement devait aussi être compatible avec les principes sur lesquels l’UE était fondée, et conforme au droit international, y compris aux résolutions des Nations Unies sur Chypre.

Presque quatre ans plus tard, les négociations directes n’avaient toujours pas abouti aux résultats escomptés. Malheureusement, seuls des progrès limités ont été enregistrés en ce qui concerne certaines dimensions internes des négociations (c’est-à-dire la gouvernance et le partage du pouvoir, les questions touchant à l’UE et l’économie), à l’époque où le dirigeant et négociateur chypriote turc était M. Talat. Même ces points de convergence ont largement disparu quand M. Talat a été remplacé par M. Eroglu, en mai 2010. Du reste, aucun progrès n’a été enregistré dans les autres chapitres (biens immobiliers, territoire, sécurité, garanties, colons) qui sont d’une importance critique dans le cadre global d’un règlement juste et durable. Les propositions soumises par la partie chypriote turque au cours des négociations sont malheureusement restées clairement en dehors de la base convenue et n’ont pas favorisé de nouvelles avancées.

Motivé par le désir de promouvoir de façon décisive les efforts consentis en vue de parvenir à une solution, en juillet 2010, le Président Christofias a soumis une proposition globale comportant trois volets qui, si elle avait été acceptée par la Turquie et la partie chypriote turque, aurait relancé le processus de négociation. La première partie de la proposition vise à relier l’examen des trois chapitres de la négociation, à savoir les biens immobiliers, les ajustements territoriaux et le chapitre relatif à la citoyenneté, aux étrangers, à l’immigration et à l’asile (colons). La deuxième partie concerne Famagouste et prévoit la remise de l’enceinte de Famagouste à l’ONU. La République de Chypre entreprendrait de restaurer cette zone afin de permettre à ses habitants légitimes d’y retourner. En même temps, elle assumerait la responsabilité de la restauration de la ville de Famagouste qui, avec ses remparts, constitue un patrimoine commun aux deux communautés, et autoriserait le fonctionnement légal de son port, sous les auspices de l’UE, de sorte que les Chypriotes turcs puissent y mener des transactions commerciales. Troisièmement, le Président a proposé la tenue d’une conférence internationale pour débattre des aspects internationaux du problème une fois qu’un accord sur les aspects internes du problème serait sur le point de se dégager. Cette conférence se tiendrait sous les auspices du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies, avec la participation des membres permanents du Conseil de sécurité des Nations Unies, des États garants, de l’Union européenne, de la République de Chypre et des deux communautés. Ces propositions bénéficieraient à toutes les parties concernées et instaureraient un climat politique plus favorable, qui ferait progresser l’ensemble du processus. Malheureusement, le dirigeant chypriote turc et le Gouvernement turc les ont rejetées.

Le Secrétaire général des Nations Unies, Ban Ki‑moon, s’est réuni personnellement avec les deux dirigeants, le Président Christofias et M. Eroglu, à cinq reprises depuis novembre 2010, la dernière réunion, de deux jours, ayant eu lieu à Greentree (New York), en janvier 2012. Malgré les efforts du Secrétaire général et son appel répété en faveur d’avancées résolues dans les négociations sur les aspects internes, c’est-à-dire la gouvernance et le partage du pouvoir, les biens immobiliers dans le contexte des ajustements territoriaux et la citoyenneté, la poursuite de la prévarication de la partie chypriote turque est restée un obstacle insurmontable à des progrès tangibles. Sur la base de la résolution 2026 (2011) du Conseil de sécurité, les convergences sur les aspects internes sont une condition sine qua non pour passer à l’étape suivante des négociations: la convocation d’une conférence internationale pour traiter des aspects internationaux de la question chypriote (la sécurité, les garanties et les ajustements territoriaux). L’intransigeance chypriote turque reste donc la principale pierre d’achoppement des négociations.

Depuis 2003, le Gouvernement de la République de Chypre a adopté unilatéralement plusieurs séries de mesures au profit des Chypriotes turcs, qui se sont traduites par des avantages économiques et autres concrets pour les Chypriotes turcs. Ces mesures, dont le coût s’élève à 35 millions d’euros par an, comprennent notamment la gratuité des soins médicaux et des produits pharmaceutiques, et d’autres prestations sociales en faveur des Chypriotes turcs. De plus, la majorité écrasante des Chypriotes turcs, titulaires de documents d’identité de la République de Chypre (passeports, cartes d’identité et certificats de naissance) peuvent travailler, étudier, voyager et/ou résider partout dans l’Union européenne, en tant que citoyens d’un État membre de l’UE, et, d’une manière générale, bénéficier de tous les privilèges et avantages qui découlent de l’adhésion de Chypre à l’Union européenne.

La réglementation de l’Union européenne relative à la «Ligne verte», assortie des avantages dont bénéficient les Chypriotes turcs grâce à la réglementation sur l’aide financière de l’Union européenne et les multiples initiatives politiques, répétées, mises en œuvre par le Gouvernement de la République de Chypre en faveur de la communauté chypriote turque, sont propices à des avancées économiques et sociales non négligeables et à la prospérité des Chypriotes turcs, ainsi qu’à une coopération accrue entre les deux communautés, ce qui facilite le processus de réconciliation et de rétablissement de la confiance dans la population. Grâce à ces mesures, le revenu par habitant de la communauté chypriote turque a été pratiquement multiplié par quatre depuis 2002, en passant de 3 500 euros à près de 12 500 euros aujourd’hui.

Depuis la levée partielle des restrictions au passage des lignes de cessez-le-feu par l’armée d’occupation turque, en 2003, et le train de mesures arrêté par le Gouvernement, on a assisté à l’apparition d’une société civile dynamique des deux côtés de la ligne de partition, qui coopère dans de nombreux domaines. Depuis avril 2003, on a comptabilisé plus de 15 millions de passages des lignes de cessez-le-feu sans incidents, preuve s’il en est de la faillite de la politique turque de séparation.

Plus de 10 000 Chypriotes turcs, qui gagnent environ 150 millions de dollars par an, passent ces lignes chaque jour pour aller travailler dans la zone placée sous le contrôle effectif du Gouvernement de la République de Chypre (soit plus de 12 % de la population chypriote turque vivant dans la zone occupée).