Nations Unies

HRI/CORE/BEL/2012

Instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme

Distr. générale

3 janvier 2013

Original : français

Document de base faisant partie intégrante des rapports présentés par les États parties

Belgique *

[2 Octobre 2012]

Table des matières

Chapitre Paragraphes Page

I.Données générales sur l’État faisant rapport1–1133

A.Caractéristiques démographiques, économiques, sociales et culturellesde l’État1–163

Structure constitutionnelle, politique et juridique de l’État17–1135

II.Cadre général de la protection et de la promotion des droits de l’homme114–17817

A.Acceptation des normes internationales relatives aux droits de l’homme11417

B.Cadre juridique de la protection des droits de l’homme à l’échelon national.115-11621

C.Cadre de la promotion des droits de l’homme à l’échelon national149–16726

D.Processus d’établissement de rapports à l’échelon national168–17731

E.Autres informations relatives aux droits de l’homme17832

III.Informations concernant la non-discrimination et l’égalité et les recours utiles179–22432

ANon-discrimination et égalité155–16432

B.La lutte contre le racisme, l’extrémisme, la xénophobie et l’antisémitisme165–16934

C.Les droits des personnes LGBT en Belgique170-17335

D.Égalité entre les femmes et les hommes et lutte contre la discrimination fondée sur le sexe174–19336

E.Les droits des personnes handicapées194–19939

Annexe

Schéma de la pyramide des juridictions en Belgique

I.Données générales sur l’État faisant rapport

A.Caractéristiques démographiques, économiques, sociales et culturelles de l’État

1.Cadre général

1.Le territoire de la Belgique, qui s’étend sur 30 519 km², est en contact au nord avec les Pays-Bas, à l’est avec l’Allemagne et le Grand-Duché de Luxembourg et au sud avec la France.

2.La Belgique se situe non seulement dans l’une des régions les plus peuplées et les plus commerciales du monde mais aussi au cœur d’un axe urbain et économique majeur. Cette zone très urbanisée qui va de Londres à Milan regroupe la moitié des grandes villes européennes, soit plus de 80 agglomérations urbaines de plus de 200 000 habitants. C’est aussi le principal axe de communications et d’échanges en Europe.

3.La Belgique occupe ainsi une position carrefour entre la dorsale économique et urbaine européenne et l’importante façade maritime qui s’étend le long de la mer du Nord, du Havre à Hambourg. Le territoire belge possède des réseaux de communications variés et complets couvrant l’ensemble du pays et reliés avec ses pays voisins qui facilitent les déplacements intérieurs et les liens internationaux.

4.Par sa position géographique, la Belgique a toujours été, tout au long de son histoire, un lieu de rencontre et de passage ainsi qu’une terre d’accueil pour les hommes, les idées et les entreprises.

5.Très tôt, le pays s’est ouvert à la coopération internationale. Dès 1921, en signant avec le Grand-Duché de Luxembourg un accord visant la suppression des restrictions touchant les échanges, l’établissement d’un tarif douanier commun et l’adoption d’une même politique financière et commerciale, la Belgique posait les jalons de ce qui allait devenir plus tard la construction européenne. En 1951, elle fut une des nations fondatrices de la Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA) qui envisageait la libre circulation de ces produits entre les six pays de cette communauté. Bruxelles est le siège de plusieurs institutions européennes, de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) ainsi que de près de 850 organisations internationales non gouvernementales.

6.La Belgique, dans le cadre de l’Union économique belgo-luxembourgeoise (UEBL) enregistre, par tête d’habitant, le volume exporté le plus élevé du monde. L’UEBL représente à elle seule 3,4 % du volume total des exportations mondiales, ce qui la place au neuvième rang des puissances économiques du monde. Les exportations de l’UEBL, dont le chiffre d’affaires correspondant représente environ deux tiers du PNB, sont destinées pour 90 % aux autres pays industrialisés dont 75 % aux États membres de l’Union européenne. Les produits exportés se caractérisent par leur diversité : matériel de transport, métaux non précieux, machines et équipements électriques, produits chimiques et pharmaceutiques, plastiques, textiles, pierres précieuses, etc.

2.Population

7.La Belgique a passé, en 2005, le cap des 10,5 millions d’habitants. Il y a un siècle, le pays comptait à peine 6 millions de personnes et croissait régulièrement au rythme de 1 % par an.

8.Actuellement, le pays compte environ 10,8 millions d’habitants. Selon les dernières prévisions du Bureau du Plan, en 2020, la Belgique connaîtra 11,5 millions d’habitants et pourrait atteindre le nombre de 12,6 millions en 2050. L’évolution de la population dépendra beaucoup du nombre d’immigrations.

9.Tout au long du siècle passé, la proportion d’étrangers dans la population a fortement progressé. En 1920 celle-ci ne représentait pas plus de 2 % de la population totale. Aujourd’hui, le contingent d’étrangers dans la population est de plus de 9 %. Il est à prévoir que la proportion d’étrangers dans la population augmentera encore. Durant les 10 dernières années, le solde migratoire annuel a été quintuplé, passant d’environ 11 700 en 1998 à 63 900 en 2008.

10.Mais plus important encore que l’augmentation du nombre d’habitants seront les changements en ce qui concerne la structure de la population. Au milieu du siècle passé, le pourcentage de la population âgée de 65 ans et plus représentait à peine un dixième de la population (11 %) ; aujourd’hui il est de l’ordre d’un cinquième de la population (17 %) et vers l’année 2050 il pourrait atteindre plus d’un quart de la population (26 %).

11.Le phénomène est connu sous le nom de « vieillissement de la population ». Il est observé dans la quasi-totalité de tous les pays industrialisés. Toutefois, le phénomène est très avancé en Belgique. En effet, selon un rapport des Nations Unies sur le vieillissement de la population, basé sur le pourcentage des 60 ans et plus, le pays est parmi les 10 pays ayant la population moyenne la plus vieille de la planète (23 %).

12.Les causes du vieillissement sont connues : une baisse de la mortalité et une chute du niveau de la fécondité. Durant le siècle passé, la Belgique a connu une baisse spectaculaire de la mortalité infantile qui a fait passer le taux de mortalité des moins d’un an, de plus de 150 enfants pour mille en 1900 à moins de 10 enfants pour mille en 2010 (8/1000 pour les garçons et 6/1000 pour les filles). En même temps, il y a eu une prolongation considérable de l’espérance de vie qui a évolué d’une moyenne de 45 ans au début du siècle à 79 ans aujourd’hui (77 ans pour les hommes et 82 ans pour les femmes).

13.L’autre cause du vieillissement de la population est la chute du niveau de la fécondité. Comme dans la plupart des pays industrialisés, depuis de la décennie 1960 la Belgique connaît une baisse du niveau de la fécondité au-dessous de 2 enfants. D’une moyenne de 2,64 enfants par femme pour la période 1960-64, en quelques années, la fécondité a chuté jusqu’à 1,6 enfants seulement pour les années 1980-1999. En ce moment, la fécondité a augmenté aux alentours de 1,8 enfant. Selon les prévisions, d’ici quelques années elle s’élèvera jusqu’à 1,85 enfants, mais, comme dans la plupart des autres pays industrialisés, au moins jusqu’en 2050, le niveau restera très probablement au-dessous du seuil de remplacement des générations (2,1 enfants).

14.Quelques précisions sur le nombre d’habitants par région et l’origine des étrangers : Au 1er janvier 2010, la Belgique comptait 10 839 905 habitants dont 5 527 684 femmes et 5312 221 hommes. Ce chiffre reprend tous les Belges et étrangers dont le domicile principal est fixé dans le pays à l’exception des fonctionnaires internationaux et apparentés et des forces militaires présentes sur le territoire.

15.En 2010, la région flamande comptait 6 251 983 habitants, la région wallonne y compris la région de langue allemande en comptait 3 498 38, et la région de Bruxelles-capitale 1 089 538.

16.Au 1er janvier 2006, le nombre de ressortissants des pays de l’Union européenne vivant en Belgique s’élevait à 625 000 personnes, soit 65 % de la population étrangère totale. En ce qui concerne les étrangers non communautaires, les cinq pays les plus représentés sont le Maroc, la Turquie, les États-Unis, la République démocratique du Congo et l’Algérie. Les ressortissants des pays du Maghreb et de la Turquie représentent 29 % de la population étrangère. Une proportion de 37 % des étrangers établis en Belgique résident en Flandre, 35 % dans la région wallonne du pays et 28 % dans la région de Bruxelles-capitale.

B.Structure constitutionnelle, politique et juridique de l’État

1.Cadre général

17.En 1831, le Constituant instaura un État de droit démocratique basé sur une séparation souple des pouvoirs sous la forme d’une monarchie parlementaire et d’un État unitaire décentralisé (État, provinces, communes).

18.Cette configuration étatique s’est transformée par la constitution d’un État fédéral composé de communautés et de régions.

19.La répartition des pouvoirs publics repose essentiellement sur une dévolution de compétences matérielles et territoriales exercées par l’autorité fédérale, les communautés et les régions.

20.Les communautés et les régions ne sont pas, à l’instar des provinces et des communes, des collectivités subordonnées mais elles se situent au même niveau de pouvoir que l’autorité fédérale. Dans le domaine de leurs compétences, ces entités disposent d’un pouvoir identique à celui de l’autorité fédérale puisque les normes législatives qu’elles élaborent, à savoir les décrets et les ordonnances, ont une valeur équipollente à la loi.

21.La Constitution de 1994 énonce que la Belgique comprend :

(a)trois communautés : la communauté française, la communauté flamande et la communauté germanophone ;

(b)trois régions : la région wallonne, la région flamande et la région de Bruxelles-capitale ;

(c)quatre régions linguistiques : la région de langue française, la région de langue néerlandaise, la région bilingue de Bruxelles-capitale et la région de langue allemande. Chaque commune du Royaume fait partie d’une de ces régions linguistiques.

Les communautés et les régions sont des entités fédérées dotées d’organes politiques. Les régions linguistiques sont de simples divisions politiques du territoire belge.

22.L’autorité fédérale n’a pas seulement des compétences dans les matières que lui attribuent formellement la Constitution et les lois portées en vertu de celle-ci. Elle exerce également les compétences qui ne sont pas expressément attribuées aux communautés et aux régions.

23.L’accord institutionnel du 11 octobre 2011, conclu entre huit partis politiques dont six faisant partie du gouvernement actuel, prévoit une grande réforme de l’État avec un État fédéral plus efficace et des entités plus autonomes. Des compétences fédérales relatives au marché de l’emploi, aux soins de santé et d’aide aux personnes, aux allocations familiales et dans le domaine de la justice seront transférées vers les communautés et les régions. Le système de financement des communautés et des régions sera également profondément revu en donnant plus de responsabilité financière aux entités fédérées, et en prévoyant un juste financement des institutions bruxelloises. Enfin, une solution a été trouvée pour la problématique de l’arrondissement électoral de Bruxelles-Hal-Vilvorde. À l’heure actuelle (juin 2012), les textes de loi au niveau du transfert des compétences n’ont pas encore été déposés au Parlement.

2.Le pouvoir législatif fédéral

24.Ce pouvoir est exercé collectivement par le Roi, la Chambre des représentants et le Sénat.

25.Les membres des deux Chambres représentent la nation et non uniquement ceux qui les ont élus. Pour les cas déterminés dans la Constitution, les membres élus de chaque Chambre sont répartis en un groupe linguistique français et un groupe linguistique néerlandais de la manière fixée par la loi.

26.Les Chambres se réunissent de plein droit chaque année et doivent rester réunies au moins 40 jours. Le Roi prononce la clôture de la session. Il peut ajourner ou dissoudre les Chambres selon les modalités fixées par la Constitution. Tout parlementaire nommé par le Roi en qualité de ministre cesse de siéger et ne reprend son mandat que lorsque ses fonctions ministérielles ont pris fin.

27.Le droit d’initiative appartient à chacune des branches du pouvoir législatif fédéral [dépôt devant l’une des Chambres de projets (textes émanant de l’exécutif) ou de propositions de loi (initiative parlementaire)].

28.Sauf pour le budget et pour les lois qui requièrent une majorité spéciale, un mécanisme dit de sonnette d’alarme vise à prévenir l’adoption d’un projet ou d’une proposition de loi dont les dispositions seraient de nature à porter gravement atteinte aux relations entre les groupes linguistiques. Dans cette hypothèse, la procédure parlementaire est suspendue pendant trente jours dans l’attente d’un avis motivé du Conseil des ministres.

29.La Chambre des représentants compte 150 membres élus au suffrage universel direct. Les conditions d’éligibilité sont les suivantes :

être Belge ;

jouir des droits civils et politiques ;

être âgé de 21 ans, être domicilié en Belgique.

30.La durée du mandat de député est de quatre ans et ce dernier est notamment incompatible avec l’exercice d’un mandat de conseiller régional ou communautaire de même qu’avec une fonction ministérielle.

31.La Chambre des représentants exerce le monopole du contrôle politique de l’action politique du gouvernement fédéral (investiture et motion de méfiance). De même, elle est exclusivement compétente en matière budgétaire puisqu’elle arrête seule la loi des comptes et vote le budget. La Chambre jouit également de compétences exclusives en ce qui concerne l’octroi de la naturalisation, la responsabilité pénale et civile des ministres et la fixation du contingent de l’armée.

32.Le Sénat se compose de 71 sénateurs selon le modèle suivant :

40 sénateurs élus directement par le collège électoral néerlandais et le collège électoral français à concurrence de 25 pour le premier et de 15 pour le second ;

21 sénateurs désignés par les conseils de communauté en leur sein, dont 10 désignés par le Conseil de la communauté flamande, 10 par le Conseil de la communauté française et un sénateur désigné par le Conseil de la communauté germanophone ;

10 sénateurs cooptés, choisis par les deux catégories précédentes à concurrence de 6 par les sénateurs néerlandophones et de 4 par les sénateurs francophones ;

les sénateurs de droit, issus des membres de la famille royale qui sont membres de droit du Sénat à 18 ans et n’ont voix délibérative qu’à l’âge de 21 ans.

33.La configuration du Sénat tente de concilier trois types d’exigence : la nécessité d’une légitimité démocratique (présence de sénateurs élus directement) ; la représentation des entités fédérées (sénateurs émanant des conseils communautaires) ; le symbole de la parité (présence en nombre égal de sénateurs désignés par les conseils communautaires).

34.L’âge requis pour pouvoir être élu sénateur est de 21 ans.

35.Dans certaines matières, le Sénat exerce des pouvoirs identiques à ceux de la Chambre (bicaméralisme parfait), à savoir : la déclaration de la révision de la Constitution et la révision ; le vote de certaines lois considérées comme touchant aux structures et aux intérêts fondamentaux de l’État ; certaines questions touchant aux relations internationales (lois d’assentiment aux traités) ; l’organisation des cours et tribunaux et la législation relative au Conseil d’État ; les lois portant approbation des accords de coopération conclus entre l’État, les communautés et les régions.

36.Le Sénat dispose d’une compétence exclusive en ce qui concerne le règlement des conflits d’intérêts entre les assemblées parlementaires fédérales et fédérées. De plus, les projets d’assentiment aux traités internationaux qui doivent être adoptés par les deux assemblées sont déposés par le gouvernement d’abord au Sénat, ensuite à la Chambre, ce qui doit permettre au premier de jouer un rôle plus important dans la sphère des dossiers internationaux.

3.Le pouvoir exécutif fédéral

37.Le pouvoir exécutif fédéral, tel qu’il est réglé par la Constitution, appartient au Roi. En fait la structure du pouvoir exécutif est bicéphale puisqu’elle inclut le Roi et les ministres. Le Roi se voit reconnaître par la Constitution plusieurs droits dont la portée a évolué au cours du temps, même si le texte de la Constitution n’a pas changé.

38.La personne du Roi est inviolable à la fois :

sur le plan civil : aucune action ne peut être intentée contre lui, si ce n’est pour des affaires se rapportant à son patrimoine, auquel cas il est représenté par l’administrateur de sa liste civile ;

sur le plan pénal : aucune poursuite ne peut être entamée contre lui ;

sur le plan politique : seul le ministre qui contresigne ou couvre l’acte du Roi est responsable. Ces privilèges ne concernent que le Roi lui-même et ne s’étendent pas aux membres de sa famille.

39.Le Roi ne prend possession du trône qu’après avoir prêté serment devant les Chambres réunies. Le Roi nomme et révoque ses ministres dont les fonctions sont réservées exclusivement aux Belges.

40.Le Conseil des ministres compte au maximum 15 membres, autant de ministres d’expression française que d’expression néerlandaise (principe de la parité), le Premier Ministre éventuellement excepté.

41.Les ministres sont responsables devant la Chambre des représentants. Aucun ministre ne peut être poursuivi ou recherché à la suite d’opinions qu’il aurait émises dans l’exercice de ses fonctions.

42.Les ministres sont jugés exclusivement par la cour d’appel pour les infractions qu’ils auraient commises dans l’exercice de leurs fonctions. Il en est de même des infractions qui auraient été commises par les ministres en dehors de l’exercice de leurs fonctions et pour lesquelles ils sont jugés pendant l’exercice de leurs fonctions. La loi détermine le mode de procédure contre eux, tant lors des poursuites que lors du jugement.

43.Le Roi nomme et révoque les Secrétaires d’État fédéraux qui, adjoints à un ministre, sont membres du gouvernement fédéral mais ne font pas partie du Conseil des ministres.

44.Le Roi confère les grades dans l’armée et nomme aux emplois d’administration générale et de relation extérieure sauf les exceptions établies par les lois.

45.Le Roi édicte les règlements et arrêtés nécessaires à l’exécution des lois. Il sanctionne et promulgue les lois.

46.Le Roi nomme les juges et exécute les arrêts et jugements, il dispose de l’exercice du droit de grâce. Il a également le droit de battre monnaie en exécution de la loi, de conférer des titres de noblesse sans pouvoir y attacher aucun privilège, de conférer les ordres militaires en observant les prescriptions de la loi à cet égard.

4.Les communautés

47.Chacune des entités communautaires et régionales dispose d’un parlement et d’un gouvernement.

48.Les compétences de la région flamande sont exercées par les organes de la communauté flamande. Il y a donc une unicité des institutions régionales et communautaires flamandes. Il n’en va pas de même pour les autres entités que sont la communauté française, la communauté germanophone, la région wallonne et la région de Bruxelles-capitale.

(a)Les parlements

49.Le parlement flamand compte 124 membres, c’est-à-dire les 118 qui sont élus directement dans la région flamande et 6 membres du groupe linguistique néerlandais du parlement de la région de Bruxelles-capitale.

50.Le parlement de la communauté française compte 94 membres dont 75 membres du parlement de la région wallonne et 19 membres élus par le groupe linguistique français du parlement de la région de Bruxelles-capitale.

51.Le parlement de la communauté germanophone se compose de 25 élus directs.

52.Le mandat de membre d’un parlement est en principe incompatible avec celui de député ou de sénateur, à l’exception des sénateurs communautaires qui représentent leur communauté au sein du Sénat fédéral. La suppression du double mandat ne vise que le cumul de fonctions parlementaires fédérales et de fonctions parlementaires régionales ou communautaires. La qualité conjointe de membre d’un conseil de région et de membre d’un conseil de communauté reste possible constitutionnellement.

53.Trois parlements (flamand, communauté française et région wallonne) disposent, dans certaines limites, d’une autonomie constitutive, c’est-à-dire que les décrets qu’ils adoptent, à une majorité renforcée, peuvent régler des questions relatives aux élections, à la composition et au fonctionnement des conseils et de leur gouvernement.

54.Les membres des parlements de communauté et de région sont élus pour une période de cinq ans. Ils sont intégralement renouvelés tous les cinq ans ; ils ne peuvent être dissous avant la fin de la législature.

(b)Les gouvernements

55.Les membres de chacun des gouvernements de région ou de communauté sont élus par leur parlement mais pas nécessairement en son sein. Les membres du gouvernement prêtent serment entre les mains du président du parlement qui les a élus. Les responsabilités politiques et judiciaires des membres de ces exécutifs sont calquées sur celles qui sont en cours au niveau fédéral.

(c)Les compétences matérielles des communautés

56.Ces compétences portent sur les matières suivantes :

57.Les matières culturelles. Le constituant n’a pas énuméré de manière détaillée la liste des matières visées par le concept de « matières culturelles ». Le législateur, sur la base d’une loi à majorité spéciale, a fixé dans ce domaine 17 rubriques comme la défense de la langue, les beaux-arts, le patrimoine culturel, le soutien à la presse, la politique de la jeunesse, les loisirs, la formation intellectuelle, morale, artistique et sociale.

58.L’enseignement. La quasi-totalité de l’enseignement, des écoles maternelles jusqu’aux universités, a été transférée aux communautés. Cette compétence vise autant la charge de l’organisation de l’enseignement que la reconnaissance et l’octroi de subventions à l’enseignement dispensé par d’autres pouvoirs organisateurs.

59.Dans ce domaine, les compétences du pouvoir fédéral se limitent à la fixation du début et de la fin de l’obligation scolaire, aux conditions minimales pour la délivrance des diplômes, au régime des pensions.

60.L’emploi des langues. L’article 30 de la Constitution énonce que l’emploi des langues est facultatif ; il ne peut être réglé que par la loi et seulement pour les actes de l’autorité publique et pour les affaires judiciaires.

61.Les communautés françaises et flamandes sont habilitées à réglementer l’emploi des langues pour trois matières : les matières administratives ; l’enseignement dans les établissements créés, subventionnés par les pouvoirs publics ; les relations sociales entre les employeurs et leur personnel, ainsi que les actes et documents des entreprises imposés par la loi et les règlements.

62.Cette compétence communautaire n’est exercée que sur un territoire plus limité que par rapport aux autres compétences communautaires. Le Parlement fédéral est compétent pour la région bilingue de Bruxelles-capitale, la région de langue allemande, les services dont l’activité s’étend au-delà de la région linguistique dans laquelle ils sont établis, les institutions fédérales et internationales désignées par la loi et dont l’activité est commune à plus d’une communauté, les communes à régime linguistique spécial.

63.Les communautés exercent également les compétences internationales pour les matières qui leur sont propres.

64.Le territoire de la Belgique se compose de quatre régions linguistiques :

(a)la région de langue néerlandaise qui comprend les cinq provinces flamandes ;

(b)la région de langue française qui comprend les cinq provinces wallonnes, à l’exception des neuf communes de la région de langue allemande qui font par ailleurs partie de la province de Liège ;

(c)la région bilingue de Bruxelles-capitale qui comprend les 19 communes de l’arrondissement du même nom ;

(d)Le régime spécial de la communauté germanophone.

65.La Constitution lui attribue des compétences identiques aux deux autres communautés mais celles-ci sont élaborées par une loi à majorité simple.

66.Elle peut également exercer certaines compétences en provenance de la région wallonne sur la base d’accords passés par les gouvernements de ces deux entités.

67.Pour éviter la multiplication des instances, le constituant a laissé au législateur la faculté de confier à la communauté germanophone certaines tâches qui, par ailleurs, sont normalement du ressort d’autres autorités administratives.

68.Son parlement comprend 25 membres élus au suffrage universel et son gouvernement, qui compte quatre membres élus par le conseil, dirige une administration propre.

69.Le législateur a accordé des statuts spéciaux, sous forme de « facilités » linguistiques, à des communes contiguës aux limites des régions linguistiques et autour de Bruxelles, comportant de plus ou moins fortes minorités linguistiques.

70.Les matières personnalisables. Ce terme vise des matières qui, par nature, sont étroitement liées aux personnes dans leur épanouissement personnel et social.

71.Une loi spéciale a réparti les matières personnalisables en deux blocs :

(a)la politique de santé qui intègre la politique de dispensation des soins, l’éducation sanitaire et les activités de médecine préventive ;

(b)l’aide aux personnes qui comprend la politique familiale, l’aide sociale, l’accueil et l’intégration des immigrés, la politique des handicapés, du troisième âge, de la jeunesse et l’aide sociale aux détenus.

72.Ces compétences communautaires sont assorties d’exceptions pour lesquelles le pouvoir fédéral reste compétent. L’assurance maladie-invalidité dans le domaine de la politique de la santé et certaines questions de droit civil, de droit pénal et d’organisation judiciaire dans le secteur de la jeunesse relèvent des compétences de ce dernier. Ceci vise également l’application du droit de toute personne à l’aide sociale, notamment par le biais des centres publics d’aide sociale (CPAS).

73.Dans les matières communautaires, les communautés exercent également des compétences dans le domaine de la recherche scientifique, de la coopération au développement et de la tutelle administrative sur les collectivités subordonnées (provinces et communes).

5.Les régions

74.La Belgique comprend trois régions distinctes des trois communautés : la région flamande, la région wallonne et la région de Bruxelles-capitale. Les pouvoirs et les compétences respectifs sont identiques pour les deux premières, la dernière se caractérise par des mécanismes propres du fait, notamment, de la cohabitation sur son territoire de francophones et de néerlandophones et de son statut de capitale.

75.En Flandre, les compétences régionales sont exercées par le parlement et le gouvernement de la communauté flamande.

76.La région wallonne et la région de Bruxelles-capitale disposent d’organes (parlement et gouvernements) qui leur sont propres.

77.Les compétences régionales portent sur les matières suivantes (avec des exceptions en faveur du niveau fédéral) :

(a)l’aménagement du territoire auquel s’ajoute la protection des monuments et des sites ;

(b)l’essentiel des compétences liées à l’environnement et à la politique de l’eau ;

(c)la rénovation rurale et la conservation de la nature ;

(d)le logement et la police des habitations qui constituent un danger pour la propreté et la salubrité publique ;

(e)différentes matières qui ont trait à la politique agricole et à la pêche maritime ;

(f)des compétences d’ordre économique comme la politique économique, les aspects régionaux de la politique du crédit, la politique des débouchés et des exportations et les richesses naturelles. Sur ce point, on notera que les régions doivent exercer leurs compétences dans le respect de l’union économique et de l’unité monétaire dont l’État fédéral reste le gardien et dont le contenu est fixé par la loi et les traités internationaux (cadre de l’Union européenne). Le pouvoir fédéral dispose notamment d’une compétence exclusive dans les domaines suivants : la politique monétaire, la politique financière et la protection de l’épargne, la politique des prix et des revenus, le droit de la concurrence et le droit des pratiques du commerce, le droit commercial et le droit des sociétés, les conditions d’accès à la profession, la propriété industrielle et intellectuelle, les contingents et les licences, le droit du travail et de la sécurité sociale ;

(g)la politique de l’énergie ;

(h)des prérogatives importantes à l’égard des collectivités locales (financement, organisation et tutelle) ;

(i)des compétences en matière d’emploi (placement des travailleurs, élaboration des programmes de remise au travail, application des normes concernant les étrangers) ;

(j)les travaux publics et les transports (routes, voies hydrauliques, ports, digues, transports en commun), équipement et exploitation des aéroports publics à l’exception de l’aéroport de Bruxelles-National ;

(k) dans leur cadre de leurs compétences, et comme pour les communautés, la recherche scientifique y compris celle en exécution d’accords ou d’actes internationaux et supranationaux et la coopération au développement ;

(l)les relations internationales pour ce qui concerne les compétences qui leur sont propres.

78.On rappellera que dans l’état actuel des choses, les communautés et les régions ne jouissent que des compétences d’attribution dont les contours ont été définis par une loi spéciale. Outre le pouvoir fiscal qui est le leur, elles disposent néanmoins de compétences accessoires qui leur permettent notamment :

(a)d’adopter les mesures relatives à l’infrastructure nécessaire à l’exercice de leur compétence ;

(b)de créer des services décentralisés, des établissements et des entreprises ou de prendre des participations en capital ;

(c)de prendre des décrets érigeant en infraction les manquements à leurs dispositions et, dans certaines limites, les peines qui punissent ces manquements ;

(d)de procéder à des expropriations publiques.

(a)Le statut spécifique de la région de Bruxelles-capitale

79.Celle-ci, qui comprend 19 communes et est la capitale fédérale du pays, exerce les mêmes compétences que les deux autres régions et est dotée d’un parlement et d’un gouvernement (cinq membres). En raison de sa dualité communautaire, la région de Bruxelles-capitale ne jouit pas de l’autonomie constitutive. Ceci a pour effet que le Parlement ne peut modifier ni sa composition, ni le principe de son fonctionnement, ni le statut de ses membres.

80.L’organisation du parlement repose sur le principe de deux groupes linguistiques qui exercent des pouvoirs propres et impliquent une répartition des responsabilités dans les divers organes du parlement. Le parlement est composé de 89 membres (72 du groupe linguistique français et 17 du groupe linguistique néerlandais). Le Président excepté, la composition du gouvernement est paritaire : deux membres sont francophones et deux néerlandophones. À ces cinq ministres s’ajoutent trois secrétaires d’État, dont au moins un appartenant au groupe linguistique néerlandais, qui ne font pas partie du gouvernement.

81.Des institutions spécifiques sont responsables de l’exercice des compétences communautaires sur le territoire de la région bilingue de Bruxelles-capitale. Il s’agit de la Commission communautaire française (COCOF), de la Commission communautaire flamande et de la Commission communautaire commune.

82.Les matières communautaires qui se rattachent à l’une des deux communautés française ou flamande sont appelées « uni-communautaires » et sont mises en œuvre par la Commission communautaire française ou flamande sous le contrôle de leur communauté respective.

83.Les matières personnalisables qui ne peuvent être rattachées exclusivement à une seule communauté sont qualifiées de « bi-personnalisables » et sont gérées par la Commission communautaire commune, qui est par ailleurs compétente pour les matières communautaires d’intérêt commun.

84.Les matières culturelles qui ne sont pas rattachées à une seule communauté constituent le secteur « biculturel » géré par le pouvoir fédéral (grandes infrastructures pour activités relevant des beaux-arts).

(b)Les relations de collaboration au sein du système fédéral belge et résolution des conflits

85.La Constitution a établi le principe de la loyauté fédérale qui demande à la fédération comme aux entités fédérées de ne pas porter atteinte, dans l’exercice de leurs compétences, à l’équilibre de la construction de l’ensemble. Un réseau très dense de mécanismes et de procédures a été mis sur pied pour permettre la réalisation de cet objectif dont la poursuite conditionne les bonnes relations entre les nombreuses entités institutionnelles dont s’est dotée la Belgique.

86.Trois mécanismes ont notamment été mis en place en vue de prévenir et de résoudre si nécessaire les conflits d’intérêt entre ces entités. Ces types de conflits naissent d’une divergence d’appréciation entre autorités sur le plan politique (initiative d’une composante lésant les intérêts d’une autre ou de plusieurs autres) et non d’une violation d’une règle de droit :

(a)le Comité de concertation qui est composé de 12 membres dont 6 représentent le gouvernement fédéral et 6 autres les gouvernements de communauté et de région. Cet organe dont les compétences sont fixées par la loi délibère selon la procédure du consensus ;

(b)les conférences interministérielles au nombre de 15 sont autant de structures souples de concertation et de dialogue, de même que des lieux privilégiés pour la négociation d’accords de coopération ;

(c)les accords de coopération que les entités étatiques sont autorisées à voir, dans certains cas, obligés de conclure peuvent notamment porter sur la création et la gestion conjointe de services et d’institutions communes, sur l’exercice conjoint de compétences ou sur le développement d’initiatives en commun. C’est ainsi que par exemple dans le domaine des relations internationales, des accords ont été conclus entre les diverses entités compétentes en ce qui concerne la représentation de la Belgique dans les organisations internationales et sur les modalités de conclusion de traités internationaux.

87.La Cour constitutionnelle est notamment habilitée à se prononcer sur les conflits de compétences. Celle-ci, qui se compose de 12 membres (6 francophones et 6 néerlandophones, une moitié composée de membres émanant de l’ordre judiciaire et l’autre de personnes issues des milieux parlementaires) statue par voie d’arrêts dès lors qu’une instance législative a violé les règles répartitrices de compétences ou certains articles précis de la Constitution portant notamment sur le respect du principe de la non-discrimination et la protection des minorités philosophiques et idéologiques.

88.La Cour constitutionnelle peut être saisie par les différents gouvernements et par les présidents des parlements à la demande de deux tiers de leurs membres. Un recours peut également être introduit par toute personne privée justifiant d’un intérêt personnel et dans les six mois qui suivent la publication officielle de la norme attaquée.

6.Organisation judiciaire

89.L’organisation des cours et des tribunaux belges est une compétence fédérale en vertu de la Constitution.

90.Le rôle des magistrats du siège, appelés juges dans les tribunaux et conseillers dans les cours, est de trancher des litiges. Le Code judiciaire détermine si les magistrats professionnels siègent seuls ou à trois. Des magistrats non professionnels siègent au sein des tribunaux du travail, des tribunaux de commerce, des tribunaux de l’application des peines, des cours du travail et des cours d’assises.

91.Le ministère public, ou magistrature debout, assure le respect de la loi et les intérêts de la société et a pour rôle de poursuivre le délinquant en vue de faire appliquer la loi par les juges.

92.Les contestations qui ont pour objet des droits civils sont exclusivement du ressort des tribunaux. Les contestations qui ont pour objet des droits politiques sont du ressort des tribunaux sauf les exceptions établies par la loi. Une juridiction ne peut être établie que par une loi. Les audiences des juridictions sont en principe publiques. Tout jugement est motivé. Il est prononcé en audience publique.

(a)Statut des magistrats

93.Les magistrats sont nommés par le Roi. La Constitution prévoit que les nominations des magistrats et les désignations comme chefs de corps ont lieu sur présentation motivée du Conseil supérieur de la Justice. Le Conseil supérieur de la Justice est un organe sui generis indépendant chargé d’une triple mission :

exercer un contrôle externe sur le fonctionnement de l’ordre judiciaire, y compris le traitement des plaintes ;

soumettre des avis aux responsables politiques, afin d’améliorer le fonctionnement de la magistrature ;

jouer un rôle déterminant dans la politique de nomination au sein de la magistrature, et ce de manière objective.

94.Le Code judiciaire prévoit que les magistrats sont nommés dans un ou plusieurs tribunaux de première instance, un ou plusieurs tribunaux du travail, un ou plusieurs parquets ou un ou plusieurs auditorats du travail. Des juges de complément peuvent être nommés par ressort de cour d’appel ou de cour du travail. Pour devenir magistrat, trois voies sont possibles :

(a)le concours d’admission au stage judiciaire destiné aux juristes ayant une expérience utile d’un an au minimum. Le stage judiciaire donnant à la fois accès direct au siège et au ministère public est de trois ans. Celui donnant uniquement un accès direct au ministère public est de 18 mois ;

(b)l’examen d’aptitude professionnelle s’adresse à des juristes expérimentés et permet un accès direct à la magistrature pour autant que le candidat justifie du nombre d’années d’expérience déterminé par le Code judiciaire. Il s’agit entre autres d’une expérience de 10 ans de barreau pour devenir magistrat du siège et de cinq ans de barreau pour devenir magistrat du ministère public ;

(c)l’examen oral d’évaluation s’adresse aux avocats qui ont exercé leur profession à titre principal pendant 20 ans au moins ou qui l’ont exercée pendant 15 ans et ont en outre exercé durant 5 ans au moins une fonction qui nécessite une connaissance approfondie du droit.

95.Les examens sont organisés par le Conseil supérieur de la Justice.

96.La Constitution belge garantit l’indépendance des magistrats du siège dans l’exercice de leurs compétences juridictionnelles. Le ministère public est indépendant dans l’exercice des recherches et poursuites individuelles, sans préjudice du droit du ministre compétent d’ordonner des poursuites et d’arrêter des directives contraignantes de politique criminelle, y compris en matière de politique de recherche et de poursuite. La Constitution prévoit également que le traitement des membres de l’ordre judiciaire ainsi que l’âge de la pension doivent être fixés par la loi. Les magistrats du siège ne peuvent être privés de leur place ou suspendus que par un jugement. En fonction de la juridiction dont ils sont issus, le Code judiciaire confie actuellement la compétence de destituer les magistrats du siège aux cours d’appel, du travail ou à la Cour de cassation. Le déplacement d’un juge ne peut avoir lieu que par une nomination nouvelle et son consentement.

(b)Magistrats du siège et juridictions

97.Les juridictions de l’ordre judiciaire forment un ensemble hiérarchisé. La Cour de cassation se situe au sommet. Elle ne connaît pas du fond des affaires mais assure l’exacte application du droit. Les juridictions de fond viennent ensuite. Elles connaissent des litiges dans leurs éléments de fait et de droit. On distingue les juridictions du premier degré qui connaissent pour la première fois du procès et les juridictions du second degré ou d’appel qui connaissent du procès déjà jugé en 1ère instance.

(c)Schéma de la pyramide des juridictions en Belgique

[Voir annexe.]

98.Le tribunal de première instance, le tribunal du travail, le tribunal de commerce, la justice de paix et le tribunal de police sont des juridictions de 1er degré. Les cours d’appel et les cours du travail forment les juridictions du second degré.

99.Le tribunal de première instance est divisé en sections : civile, pénale et jeunesse. Des sections dénommées tribunal de l’application des peines sont instituées auprès des tribunaux de première instance d’Anvers, Bruxelles, Gand, Mons et Liège. Outre le président et le ou les vice-présidents, le tribunal de première instance compte un ou plusieurs juges de la jeunesse, juges d’instruction et juges des saisies. Des assesseurs en application des peines, l’un spécialisé en matière pénitentiaire, l’autre en réinsertion sociale, sont désignés dans les tribunaux de l’application des peines pour siéger avec les juges au tribunal de l’application des peines.

100.Le tribunal civil et le tribunal de commerce statuent, suivant les cas, en appel des jugements rendus par le juge de paix et le tribunal de police. Le tribunal correctionnel statue en appel des jugements rendus par le tribunal de police.

101.La Belgique est divisée en cinq grands ressorts : Anvers, Bruxelles, Gand, Mons et Liège. Chaque ressort comprend une cour d’appel et une cour du travail. Ces ressorts sont divisés en 27 arrondissements judiciaires. Il y a un tribunal de première instance, un tribunal du travail et un tribunal de commerce par arrondissement. Les tribunaux du travail sont regroupés en 21 tribunaux et les tribunaux de commerce en 23 tribunaux.

102.Des magistrats non professionnels nommés pour cinq ans en raison de la catégorie professionnelle à laquelle ils appartiennent siègent dans les juridictions du travail (juges et conseillers sociaux) et dans les tribunaux de commerce (juges consulaires) auprès des magistrats professionnels.

103.Il y a une justice de paix par canton judiciaire. Il en existe 187. Il y a au moins un tribunal de police par arrondissement judiciaire. Il en existe 31.

104.Chacune des dix provinces ainsi que l’arrondissement administratif de Bruxelles-capitale compte une cour d’assises. La cour d’assises est constituée à chaque fois que des accusés sont renvoyés devant elle. Elle est composée de trois magistrats professionnels (un président et deux assesseurs) et d’un jury constitué de douze jurés et d’un ou plusieurs suppléants tirés au sort parmi la population.

105.La Cour de cassation, garante du respect du droit par les cours et tribunaux comporte trois chambres : une chambre pour les affaires pénales, une chambre pour les dossiers relatifs au droit du travail et une chambre pour les affaires civiles et commerciales.

(d)Ministère public

106.Le Ministère public se compose des magistrats attachés à un parquet (compétent en matière de droit pénal) ou un auditorat (compétent en matière de droit du travail) qui, dans cette fonction, accomplissent les devoirs de leur office dans le ressort de la cour ou du tribunal où ils sont établis.

107.Un parquet est établi auprès de chaque tribunal de première instance. Il est composé d’un procureur du Roi, de premiers substituts et de substituts. Il y a des substituts spécialisés en matière fiscale, des substituts spécialisés en matière commerciale, des substituts désignés pour exercer des fonctions auprès du tribunal de la jeunesse et, à Anvers, Bruxelles, Gand, Mons et Liège, des substituts spécialisés en application des peines.

108.Un parquet général est établi auprès de la cour d’appel, composé d’un procureur général qui veille à l’exécution des directives en matière de politique criminelle au sein de son ressort età la direction et la surveillance des magistrats du parquet général et de l’auditorat général du travail. Il est assisté d’un premier avocat général et d’avocats généraux et de substituts du procureur général.

109.Un auditorat du travail est établi auprès des tribunaux du travail, composé d’un auditeur du travail, de premiers substituts et de substituts.

110.Un auditorat général est établi auprès de la cour du travail avec à sa tête le procureur général près la cour d’appel. Il est assisté d’un premier avocat général, d’avocats généraux et de substituts généraux.

111.Les fonctions du ministère public auprès de la cour d’assises sont exercées par le procureur général près la cour d’appel qui peut déléguer ses fonctions.

112.À la Cour de cassation, la fonction du ministère public est exercée par leprocureur général près la Cour de cassation assisté par un premier avocat général et des avocats généraux. Il n’exerce pas l’action publique mais a un rôle de conseil auprès de la Cour.

113.Le parquet fédéral est composé d’un procureur fédéral et de magistrats fédéraux. Le procureur fédéral exerce, dans les cas prévus par la loi, toutes les fonctions du ministère public dans les affaires pénales près les cours d’appel, les cours d’assises, les tribunaux de première instance et les tribunaux de police.

II.Cadre général de la protection et de la promotion des droits de l’homme

A.Acceptation des normes internationales relatives aux droits de l’homme

1.Ratification des principaux instruments internationaux relatifs aux droits

114.Les abréviations suivantes sont utilisées au cours de cette section :

ICERD : International Convention on the Elimination of All Forms of Racial Discrimination ;

ICESCR : International Covenant on Economic, Social and Cultural Rights ;

OP-ICESCR : Optional Protocol to ICESCR ;

ICCPR : International Covenant on Civil and Political Rights ;

ICCPR-OP1 : Optional Protocol to ICCPR ;

ICCPR-OP 2 : Second Optional Protocol to ICCPR, aiming at the abolition of the death penalty ;

CEDAW : Convention on the Elimination of All Forms of Discrimination against Women ;

OP-CEDAW : Optional Protocol to CEDAW ;

CAT : Convention against Torture and Other Cruel, Inhuman or Degrading Treatment or Punishment ;

OP-CAT : Optional Protocol to CAT ;

CRC : Convention on the Rights of the Child ;

OP-CRC-AC : Optional Protocol to CRC on the involvement of children in armed conflict ;

OP-CRC-SC : Optional Protocol to CRC on the sale of children, child prostitution and child pornography

ICRMW : International Convention on the Protection of the Rights of All Migrant Workers and Members of Their Families ;

CRPD : Convention on the Rights of Persons with Disabilities ;

OP-CRPD : Optional Protocol to CRPD ;

CED : International Convention for the Protection of All Persons from Enforced Disappearance.

Main international human rights treaties

Date of ratification, accession or succession

Declarations/reservations

Comments

ICERD

7 August 1975

Declaration (art. 4)

ICESCR

21 April 1983

Declaration (art. 2)

OP-ICESCR

Signed, 2009

ICCPR

21 April 1983

Reservation (arts. 10, 14, 19, 21, 22)

Interpretative declaration (arts. 0 and 23).

ICCPR-OP 1

17 May 1994

ICCPR-OP 2

8 December 1998

CEDAW

10 July 1985

OP-CEDAW

17 June 2004

Declaration

CAT

25 June 1999

OP-CAT

Signed, 2005

CRC

16 December 1991

Declaration (arts. 2, 13, 15, 40 and 14)

OP-CRC-AC

6 May 2002

Binding declaration under art. 3: 18 years

OP-CRC-SC

17 March 2006

Declaration

ICRMW

CRPD

2 July 2009

Declaration

OP-CRPD

2 July 2009

CED

2 June 2011

2.Ratification des autres instruments des Nations Unies relatifs aux droits de l’homme

Other UN Human Rights Treaties

Date of ratification, accession or succession

Convention on the Prevention and Punishment of the Crime of Genocide, 1948

5 September 1951

Slavery Convention, 1926 as amended 1955

23 September 1923

Convention for the Suppression of the Traffic in Persons and of the Exploitation and the Prostitution of Others, 1949

22 June 1965

Convention relating to the status of Refugees, 1951

22 July 1953

Protocol relating to the status of refugees, 1967

8 April 1969

Convention relating to the status of stateless Persons, 1954

27 May 1960

Convention on the Reduction of statelessness, 1961

No

Rome Statute of the International Criminal Court, 1998

28 June 2000

United Nations Convention against Transnational Organized Crime, 2000 and its Protocols against the smuggling of migrants by land, sea and air, and to prevent, suppress and punish trafficking in persons, especially women and children

11 August 2004

3.Conventions de l’Organisation internationale du Travail

Conventions of the International Labour Organization

Date of ratification, accession or succession

Weekly Rest (Industry) Convention, 1921 (No. 14)

19 August 1926

Forced or Compulsory Labour Convention, 1930 (No. 29)

20 January 1944

Labour Inspection Convention, 1947 (No. 81)

5 April 1957

Freedom of Association and Protection of the Right to Organize Convention, 1948 (No. 87)

23 October 1951

Migration for Employment Convention, 1949 (No. 97)

27 July 1953

Right to Organize and Collective Bargaining Convention, 1949 (No. 98)

10 December 1953

Equal Remuneration Convention 1951 (No. 100)

23 May 1952

Social Security (Minimum Standards) Convention, 1952 (No. 102)

26 November 1959

Abolition of Forced Labour Convention, 1957 (No. 105)

23 January 1961

Discrimination (Employment and Occupation) Convention, 1958 (No. 111)

23 March 1977

Employment Policy Convention, 1964 (No. 122)

8 July 1969

Labour Inspection (Agriculture) Convention, 1969 (No. 129)

8 September 1997

Holidays with Pay Convention (Revised), 1970 (No. 132)

2 June 2003

Minimum Age Convention, 1973 (No. 138)

19 April 1988

Labour Relations (Public Service) Convention, 1978 (No. 151)

21 May 1991

Occupational Safety and Health Convention, 1981 (No. 155)

28 February 2011

Worst Forms of Child Labour Convention, 1999 (No. 182)

8 May 2002

4.Conventions de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture

Conventions of the UN Educational, Scientific and Cultural Organization

Date of ratification, accession or succession

Convention against Discrimination in Education, 1960

No

5.Conventions de la Conférence de La Haye de droit international privé

Conventions of the Hague Conference on Private International Law

Date of ratification, accession or succession

Convention relating to the settlement of the conflicts between the law of nationality and the law of domicile, 1955

2 May 1962

Convention on the law applicable to maintenance obligations towards children, 1956

26 August 1970

Convention concerning the recognition and enforcement of decisions relating to maintenance obligations towards children, 1958

19 November 1961

Convention on the Civil Aspects of International Child Abduction, 1980

9 February 1999

Convention on Protection of Children and Co-operation in respect of Intercountry Adoption, 1993

26 May 2005

6.Conventions de Genève et autres traités relatifs au droit international humanitaire

Geneva Conventions and other treaties on international humanitarian Law

Date of ratification, accession or succession

Geneva Convention (I) for the Amelioration of the Condition of the Wounded and Sick in Armed

Forces in the Field, 1949

3 September 1952

Geneva Convention (II) for the Amelioration of the Condition of Wounded, Sick and Shipwrecked Members of Armed Forces at Sea, 1949

9 September 1952

Geneva Convention (III) relative to the Treatment of Prisoners of War, 1949

9 September 1952

Geneva Convention (IV) relative to the Protection of Civilian Persons in Time of War, 1949

9 September 1952

Protocol Additional to the Geneva Conventions of 12 August 1949, and relating to the Protection of Victims of International Armed Conflicts (Protocol I), 1977

20 May 1986

Protocol Additional to the Geneva Conventions of 12 August 1949, and relating to the Protection of Victims of Non-International Armed Conflicts (Protocol II), 1977

20 May 1986

Ottawa Convention on the Prohibition of the Use, Stockpiling, Production and Transfer of Anti-Personnel Mines and On Their Destruction, 1987

4 September 1998

7.Ratification d’instruments régionaux relatifs aux droits de l’homme

Council of Europe Conventions

Date of ratification, accession or succession

Convention for the Protection of Human Rights and Fundamental Freedoms, 1950

14 June 1955

Protocol to the Convention for the Protection of Human Rights and Fundamental Freedoms , 1952

14 June 1955

European Social Charter, 1961

16 October 1990

Protocol No. 4 to the Convention for the Protection of Human Rights and Fundamental Freedoms, securing certain rights and freedoms other than those already included in the Convention and in the first Protocol thereto, 1963

21 September 1970

Protocol No. 6 to the Convention for the Protection of Human Rights and Fundamental Freedoms concerning the Abolition of the Death Penalty, 1983

10 December 1998

European Convention for the Prevention of Torture and Inhuman or Degrading Treatment or Punishment, 1987

23 July 1991

Protocol No. 13 to the Convention for the Protection of Human Rights and Fundamental Freedoms, concerning the abolition of the death penalty in all circumstances , 2002

23 June 2003

European Social charter (revised), 1996

2 March 2004

Council of Europe Convention on Action against Trafficking in Human Beings, 2005

27 April 2009

B.Cadre juridique de la protection des droits de l’homme à l’échelon national

1.Dispositions constitutionnelles relatives aux droits de l’homme

115.La Constitution belge dans son titre II « des Belges et de leurs droits » (articles 8 à 32), reconnaît un grand nombre de droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels fondamentaux.

116.Les droits garantis par la Constitution concernent notamment :

l’égalité devant la loi (art.10) et la jouissance sans discrimination des droits et libertés reconnus (art. 11) ;

l’égalité entre hommes et femmes en favorisant notamment leur égal accès aux mandats électifs et publics (art. 11 bis) ;

la liberté individuelle (art. 12) ;

le droit au juge qu’assigne la loi (art. 13) ;

la légalité des peines (art. 14) ;

l’abolition de la peine de mort (art. 14 bis) ;

l’inviolabilité du domicile (art. 15) ;

le droit au respect de la propriété (art. 16) ;

la liberté de pensée, de conscience ou de religion et la liberté d’expression (art.19 et 20) ;

le respect de l’intérêt supérieur de l’enfant (art. 22 bis) ;

le droit de mener une vie conforme à la dignité humaine, ce qui implique le droit au travail, à la sécurité sociale, à un logement décent, à la protection d’un environnement sain et à l’épanouissement culturel et social. (art. 23) ;

la liberté d’enseignement (art. 24) ;

la liberté de presse (art. 25) ;

le droit de s’assembler « paisiblement et sans armes » (art. 26) ;

le droit de s’associer (art. 27) ;

le droit d’adresser des pétitions aux autorités politiques (art. 28) ;

le secret des lettres (art. 29) ;

la liberté de l’emploi des langues (art. 30) ;

protection équivalente aux étrangers à celle prévue pour les nationaux (art. 191).

2.Incorporation des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme en droit interne

117.L’effet juridique des normes d’un traité international dépend également de la place qui est reconnue à celles-ci dans la hiérarchie de l’ordre juridique interne en cas de conflit avec des normes d’origine nationale. En Belgique, plusieurs tentatives ont été faites, lors de procédures de révision constitutionnelle, en vue d’inscrire dans le droit un principe général propre à harmoniser l’autorité des traités avec celles des dispositions de droit interne. Toutes ces tentatives ont échoué à ce jour. Dès lors, c’est la Cour de cassation qui, à l’occasion d’un arrêt rendu le 27 mai 1971 dans l’affaire de la SA Fromagerie Franco-suisse Le Ski, a donné la solution. La Cour y a affirmé la primauté des normes de traités internationaux ayant des effets directs en droit interne sur les normes d’origine nationale, même postérieures. Le juge belge ne peut donc appliquer les normes nationales que si elles sont compatibles avec celles des traités internationaux qui sont directement applicables dans l’ordre interne.

3.Organes compétents en matière de droits de l’homme

118. Dans l’exercice de leurs fonctions, toutes les autorités belges sont compétentes pour appliquer les droits de l’homme inscrits dans les instruments internationaux que la Belgique a ratifiés ainsi que ceux inscrits dans la Constitution et les lois belges.

119.Certaines autorités juridictionnelles sont chargées de contrôler le respect des droits de l’homme :

(a)Cour constitutionnelle

120.La loi spéciale du 9 mars 2003 modifiant la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d’arbitrage (M.B. 11/04/2003) a modifié les compétences de la Cour d’arbitrage, devenue la Cour constitutionnelle depuis la révision constitutionnelle du 7 mai 2007.

121.La Cour constitutionnelle se prononce sur des recours en annulation et des questions préjudicielles notamment quant à la conformité des dispositions législatives (loi, décrets et ordonnances) quant à certaines dispositions de la Constitution.

122.Alors qu’auparavant seuls les articles 10, 11 et 24 de la Constitution étaient visés par ce contrôle de conformité, cette liste a été élargie à :

l’ensemble du titre 2 (articles 8 à 32) « des Belges et de leur droits », reprenant de nombreux droits et libertés fondamentaux (principe de non-discrimination, respect de la vie privée et familiale, respect de l’intégrité morale, psychique et physique, droit à l’enseignement,…) ;

l’article 170 garantissant le principe de légalité de l’impôt ;

l’article 172 selon lequel il ne peut être établi de privilège en matière d’impôts et garantissant qu’une exemption ou une modération d’impôt ne peut être établie que par une loi ;

l’article 191 qui garantit que les étrangers se trouvant sur le territoire de la Belgique jouissent de la protection accordée aux personnes et aux biens, sauf les exceptions établies par la loi.

123.Il convient de remarquer que, suivant la jurisprudence constante de la Cour constitutionnelle, les libertés et droits fondamentaux inscrits dans la Constitution, ainsi que les droits fondamentaux repris dans les traités internationaux ayant un effet direct en droit belge, sont garantis en Belgique sans discrimination. Cette jurisprudence implique que la Cour se considérait déjà compétente pour vérifier la conformité des lois, décrets et ordonnances aux libertés et droits constitutionnels, par le biais d’un contrôle de conformité aux articles 10, 11 et 24 de la Constitution (compétence initiale de la Cour constitutionnelle).

(b)Juridictions administratives

124.Institution à la fois consultative et juridictionnelle, à la croisée des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire, le Conseil d’État doit principalement son existence à la volonté du législateur de procurer à toutes les personnes physiques ou morales un recours efficace contre des actes administratifs irréguliers qui leur auraient causé un préjudice.

125.Suspendre et annuler des actes administratifs (actes individuels et règlements) contraires aux règles de droit en vigueur constituent donc les principales compétences du Conseil d’État. Il statue par voie d’arrêts et d’ordonnances sur les demandes introduites.

126.La protection contre l’arbitraire administratif n’est toutefois pas la seule mission du Conseil. Il a également une fonction d’organe consultatif dans les matières législatives et réglementaires.

127.Le Conseil d’État est aussi juge de cassation qui connaît des recours contre les décisions des juridictions administratives inférieures.

128.Une autre juridiction administrative qu’il est utile de mentionner est le Conseil du contentieux des étrangers.

129.Compétent pour connaître des recours à l’encontre des décisions individuelles prises en application des lois sur l’accès au territoire, le séjour, l’établissement et l’éloignement des étrangers, dont les décisions prises en matière d’asile par le Commissariat général aux réfugié et aux apatrides, il agit comme juridiction de plein contentieux c’est-à dire qu’il peut réformer ou confirmer la décision. Il statue également en annulation sur les recours contre d’autres décisions que celles du Commissariat général aux réfugiés et aux apatrides pour violation des formes substantielles.

130. Les arrêts du Conseil du contentieux des étrangers sont susceptibles de cassation administrative devant le Conseil d’État.

(c)Invocabilité des traités devant les juridictions nationales

131.Lorsqu’aucune disposition d’un traité international ne détermine expressis verbis si tout ou partie de ses normes a un effet direct dans l’ordre interne des États contractants, c’est au juge qu’il appartient, en droit belge, de décider si une norme du traité est directement applicable. Il s’agit d’un problème d’interprétation que le juge doit résoudre en s’inspirant notamment des articles 31 à 33 de la Convention de Vienne du 23 mai 1969 sur le droit des traités. En Belgique, il est admis généralement qu’une norme internationale produit des effets directs lorsqu’elle est claire, complète, qu’elle impose à l’État belge soit de s’abstenir, soit d’agir de manière déterminée, et qu’elle est susceptible d’être invoquée comme source de droit par les particuliers sans qu’aucun complément législatif interne ne soit nécessaire pour permettre cette exécution.

132.Ainsi par exemple, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques ne détermine pas expressément si ses normes ont un caractère directement applicable. Dès lors, conformément aux principes exposés ci-dessus, le problème de l’applicabilité directe doit être tranché par le juge. C’est ce que la Cour de cassation de Belgique a fait dans un arrêt du 17 janvier 1984 en affirmant que l’article 9, paragraphe 2, du Pacte produisait des effets directs dans l’ordre juridique interne pour les particuliers. Depuis lors, la Cour de cassation a confirmé ce caractère d’applicabilité directe pour d’autres dispositions du Pacte.

4.Recours de la personne lésée

(a)Des possibilités pour les victimes d’une infraction de faire valoir leurs droits

133.L’article 4 du Titre préliminaire du Code d’instruction criminelle donne à la victime d’une infraction une option : elle peut porter son action soit devant la juridiction répressive, soit devant la juridiction civile. Ce choix est absolument libre pour la victime. L’action civile et l’action publique sont bien distinctes : l’action publique peut être exercée même si l’infraction n’a pas causé de dommage ou si la victime de l’infraction ne dépose pas une réclamation en dommages et intérêts ; l’action civile peut être exercée même s’il n’y a pas d’action publique qui est mise en route.

134.L’action civile peut être portée devant les juridictions répressives, en principe, à la condition que celles-ci soient saisies de l’action publique « en même temps et devant les mêmes juges ». Pour le juge pénal, l’action civile est l’accessoire de l’action publique.

(b)Dans le cadre des procédures pénales

135.Les victimes d’une infraction ont différentes possibilités d’intervenir dans la procédure pénale. Vous en trouverez ci-après un bref aperçu.

(c)Qualité de personne lésée

136.En faisant une déclaration en personne ou par l’intermédiaire d’un avocat au secrétariat du parquet, la qualité de personne lésée peut être obtenue. La personne lésée a le droit d’être informée de l’éventuel classement sans suite et de son motif, de l’ouverture d’une instruction et de la fixation d’une date d’audience devant la juridiction d’instruction ou de jugement. Elle peut également faire verser au dossier tous les documents qu’elle juge utiles.

137.Si l’affaire est portée devant la juridiction de jugement, le simple fait d’introduire une plainte ou de revêtir la qualité de personne lésée ne suffit pas pour être indemnisé des dommages subis.

138.Elle doit s’adresser à la juridiction de jugement par le biais d’une action civile – appelée constitution de partie civile – ou peut également opter pour une action purement civile en s’adressant au juge civil (voir supra).

(d)Dommages et action civile

139.En se constituant partie civile, la victime peut non seulement demander une indemnisation, mais elle bénéficie également d’un certain nombre de droits dans la procédure pénale :

(i)sous certaines conditions et à des moments précis, elle peut demander au juge d’instruction de consulter le dossier répressif, plus précisément la partie qui a trait aux faits qui ont conduit à la constitution de partie civile ;

(ii)sous certaines conditions également, elle peut demander au juge d’instruction l’accomplissement des actes d’instruction complémentaires.

140.Si la juridiction de jugement déclare son action civile recevable et fondée, elle peut également exercer un certain nombre de droits dans la phase de l’exécution de la peine.

141.La victime peut se constituer partie civile de différentes manières et à différents moments.

142.La victime peut le faire par simple déclaration devant le juge d’instruction. Si aucune instruction n’est en cours, elle doit pour cela consigner une certaine somme d’argent (consignation). Si une instruction est en cours, la partie civile se joint à l’action publique. La victime peut également se constituer partie civile au moment où l’affaire est examinée par la chambre du conseil ou lors de l’audience devant la juridiction de jugement.

(e)Citation directe

143.Pour les contraventions et les délits, il est possible pour la victime de procéder par citation directe. Pour ce faire, l’auteur des faits doit être cité via l’intervention d’un huissier et lors d’audience, la victime doit se constituer partie civile. Une citation directe n’est pas possible à l’égard d’un mineur.

(f)Recours

144.Il existe une possibilité de recours. La victime peut interjeter appel parce que :

la juridiction de jugement a rejeté la demande d’indemnisation ;

la victime estime que le montant octroyé est insuffisant.

145.La victime ne peut toutefois pas interjeter appel parce qu’elle n’est pas d’accord avec la peine imposée. Seul le ministère public peut le faire. L’appel a pour effet de faire réexaminer l’affaire par une instance supérieure.

(g)Dans le cadre d’une procédure civile

146.La victime peut également opter pour une action purement civile en s’adressant au juge civil. Dans ce cas, la victime doit apporter la preuve de la faute qui a été commise et le juge civil doit attendre la clôture de l’affaire devant la juridiction de jugement.

(h)Reconnaissance d’une cour régionale des droits de l’homme

147.La Belgique a signé et ratifié la Convention européenne des droits de l’homme qui a créé la Cour européenne des droits de l’homme chargée de veiller au respect de son application par les États qui l’ont ratifiée. Après avoir connu une première réforme sous le Protocole 11, la Cour européenne des droits de l’homme a connu récemment une seconde réforme sous le Protocole 14, qui vise à faire face au nombre croissant de requêtes individuelles.

148.Les arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme prononcés contre la Belgique sont à l’origine de plusieurs modifications dans la législation belge. À titre d’exemple, la Cour a considéré que le refus de la Cour d’assises de poser des questions individualisées au jury sur l’existence de circonstances aggravantes était une violation de l’article 6 de la Convention qui garantit le droit au procès équitable.Depuis lors, la Cour d’assises procède non seulement à l’individualisation des questions relatives aux circonstances aggravantes mais la Belgique a également modifié son Code d’instruction criminelle afin d’autoriser la réouverture de la procédure pénale en cas de constat de violation. Un autre exemple concerne l’absence de signification des voies et formes du recours contre une procédure par défaut, ce qui a également été considéré comme une violation de l’article 6 de la Convention par la Cour européenne des droits de l’homme.Une circulaire a été adoptée afin de s’assurer que la personne intéressée soit informée des formes et délais de la procédure d’opposition en cas de condamnation par défaut dès la signification de la décision.

C.Cadre de la promotion des droits de l’homme à l’échelon national

1.Parlements et instances délibérantes nationales et régionales

149.Les parlementaires belges de tous les niveaux de pouvoir jouent un rôle important dans la promotion aux droits de l’homme. Ils ont à leur disposition différents leviers qu’ils utilisent de manière différenciée :

(a)légiférer en faveur des enfants : il s’agit d’offrir aux enfants la meilleure protection possible de leurs droits à travers la modification ou l’impulsion de nouvelles législations permettant de réaliser les droits. Un nombre important de lois (« décrets » ou « ordonnances » aux niveaux régional et communautaire) et de résolutions est adopté par les parlements. C’est le cas pour donner un exemple en matière des droits des enfants hospitalisés en pédiatrie et en psychiatrie et dans bien d’autres domaines recourant aux principes du Centre interdisciplinaire des droits de l’enfant (CIDE).

(b)adopter d’autres mesures législatives dans le cadre de leurs compétences.

(c)contrôler l’action des gouvernements : de nombreuses questions orales, écrites et interpellations sont émises par les parlementaires et interrogent ou vérifient l’action des gouvernements relatifs aux droits de l’homme. Des exercices réguliers d’audition des ministres devant le parlement sont également réalisés et notamment sur les plans d’action relatifs aux droits de l’enfant ou sur d’autres plans transversaux, sur les rapports périodiques de l’État partie, sur les rapports d’activité des ombudsmans compétents en matière de droits de l’homme et des droits de l’enfant.

(d)vérifier l’allocation des ressources : il s’agit d’inciter les parlementaires à questionner les ressources allouées aux politiques qui ont un impact sur l’effectivité des droits de l’homme. Cet axe de travail de l’action parlementaire est sans doute à renforcer bien que certains des plans d’action relatifs aux droits de l’enfant indiquent clairement les budgets alloués.

(e)sensibiliser le public : il s’agit notamment de l’organisation de manifestations, de débats publics. Cela se fait notamment dans le cadre des droits de l’enfant par l’instauration à certains niveaux de pouvoir de parlements d’enfants ou d’élèves et de la prise en compte des recommandations des enfants dans le travail parlementaire. Un travail de sensibilisation des enfants et des adultes est également ponctuellement assuré par les différents parlements. Ponctuellement également un groupe de travail dédié aux droits de l’enfant est initié par les parlementaires, c’est le cas également des rencontres interparlementaires avec la société civile.

2.Institutions nationales de défense des droits de l’homme

150.Bien qu’une institution nationale pour les droits de l’homme n’ait pas encore été mise en place, il existe plusieurs mécanismes spécifiques traitant de matières liées aux droits de l’homme.

(a)Le Centre pour l ’ égalité des c hances et la l utte contre le r acisme a pour mission de promouvoir l’égalité des chances et de combattre toutes formes de distinction, exclusion, restriction ou préférence basées sur des critères déterminés,de veiller au respect des droits fondamentaux des étrangers et de stimuler la lutte contre la traite et le trafic des êtres humains. Par ailleurs, il est également habilité à accomplir toute mission confiée par les pouvoirs publics. Dans ce cadre, il a été désigné comme organe chargé des missions confiées par l’article 33.2 de la Convention de l’ONU relative aux droits des personnes handicapées. Il est doté d’un Statut B de la part du Sous-comité d’accréditation du Comité international de coordination des institutions nationales des droits de l’homme.

(b)L ’ Institut pour l ’ égalité des femmes et des hommes est chargé de garantir et de promouvoir l’égalité des femmes et des hommes et de combattre toute forme de discrimination et d’inégalité basée sur le sexe. Il adresse des recommandations aux pouvoirs publics, organise le soutien aux associations actives en la matière et peut agir en justice dans les litiges qui concernent l’égalité des femmes et des hommes.

(c)Le Médiateur fédéral, ainsi que les médiateurs des entités fédérées, responsables devant leurs parlements respectifs, traitent les réclamations relatives aux actes et au fonctionnement des autorités administratives de leur ressort. Ils peuvent ainsi connaître des réclamations concernant de possibles violations des droits de l’homme par les autorités administratives.

(d)Le Comité permanent de contrôle des services de police (Comité P) est l’organe externe chargé du contrôle du fonctionnement global des services de police, d’inspection ou de contrôle et de l’exécution de la fonction de police par l’ensemble des fonctionnaires compétents. Il rend compte au Parlement.

(e)La Commission de la protection de la vie privée est chargée de veiller à la protection de la vie privée lors du traitement de données à caractère personnel. Elle a pour mission principale de répondre aux demandes d’informations et de traiter les plaintes qui lui sont adressées sur base de la loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée à l’égard des traitements de données à caractère personnel.

(f)La Commission interministérielle de droit humanitaire coordonne les mesures d’application des instruments internationaux de droit humanitaire.

(g)La Commission nationale pour les droits de l ’ enfant, créée en 2005 et opérationnelle depuis 2007, est une plate-forme de concertation, rassemblant les autorités fédérales, communautaires et régionales ainsi que les associations travaillant sur les droits de l’enfant. Sa mission principale est la rédaction et la présentation du rapport quinquennal concernant l’application de la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant et de contribuer à l’élaboration d’autres documents au sujet des droits de l’enfant que l’État belge est tenu de présenter devant des instances internationales. Elle examine et surveille aussi la mise en œuvre des recommandations du Comité des droits de l’enfant et peut faire des propositions ou des recommandations non contraignantes aux autorités compétentes.

(h)Institutions indépendantes dans le domaine des droits de l ’ enfant au niveau régional : le Commissariat aux droits de l’enfant auprès du Parlement flamandet le Délégué général aux droits de l’enfant institué auprès du Gouvernement de la communauté française. Ils reçoivent et traitent des plaintes et peuvent faire des recommandations relatives à leur mandat.

3.Diffusion des instruments relatifs aux droits de l’homme

151.Les textes officiels relatifs à l’application des droits de l’homme sont à tous les niveaux de pouvoir traduits dans les langues officielles de l’État partie, transmis aux différents parlements ainsi que de manière diverse aux autorités, services publics et professionnels qui réalisent sur le terrain les droits de l’homme. Les textes officiels sont également rendus publics par une publication permanente sur les sites internet des différentes institutions susmentionnées.

152.Certaines autorités publiques ont également initié deux autres démarches récurrentes : la prise en charge des frais de publication et de diffusion des rapports alternatifs ou évaluations des droits de l’homme des ONG et la traduction dans un langage et sous une forme accessibles aux enfants ou aux adultes qui ne maîtrisent pas l’écrit ou qui ont des besoins spécifiques, des textes officiels ou des recommandations de l’ONU relatifs aux droits de l’homme.

4.Action de sensibilisation des agents publics et d’autres professionnels aux droits de l’homme

153.Les actions de sensibilisation et de formation aux droits de l’homme sont investies de manière différenciée par les différentes autorités publiques. Certains professionnels jouissent à la fois d’une formation initiale et d’une formation continue systématisée très développée, où les compétences relatives aux droits de l’homme sont attendues et évaluées. C’est le cas par exemple des enseignants ou des avocats spécialisés en droit de la jeunesse de certains niveaux de pouvoir ou des animateurs des écoles de devoirs et centres de vacances à d’autres niveaux. Il reste cependant du travail à faire pour amplifier, systématiser ou renforcer ces actions vis-à-vis des corps de métiers appropriés.

5.Action de sensibilisation aux droits de l’homme au moyen de programmes éducatifs et par la diffusion d’informations avec le soutien des pouvoirs publics

154.Les compétences relatives aux droits de l’homme sont des compétences attendues et évaluées comme buts de l’éducation à certains niveaux de pouvoir, par exemple en communauté flamande où un décret a fixé certains objectifs finaux en ce qui concerne les droits de l’homme, les droits de l’enfant et la citoyenneté active. En outre, les différentes communautés prêtent beaucoup d’attention à la transmission de la mémoire des crimes de génocide dans l’éducation,

155.Des progrès majeurs vont cependant encore être réalisés dans l’État partie car une attention accrue est portée à l’information, l’éducation et la formation aux droits de l’homme et spécifiquement aux droits de l’enfant ces dernières années. C’est ainsi que différents niveaux en font un axe prioritaire des plans d’action nationaux, régionaux ou communautaires.

6.Action de sensibilisation aux droits de l’homme par le canal des médias

156.Les organes d’information de masse sont très actifs dans l’information et l’éducation aux droits de l’homme et s’associent régulièrement aux institutions ou associations pour mieux faire connaître les principes relatifs aux droits de l’homme au grand public. Ces actions sont réalisées en toute autonomie, bien qu’il soit possible qu’elles soient financées ou subventionnées dans le cadre des politiques des différents niveaux de pouvoir (européen, fédéral, fédérés).

7.Rôle de la société civile, dont les organisations non gouvernementales

157.La société civile est reconnue et soutenue dans son rôle de promotion des droits de l’homme par tous les niveaux de pouvoir par l’octroi de moyens humains ou financiers.

158.Elle a une place de choix dans le processus décisionnel qui permet la réalisation des droits fondamentaux en Belgique car elle est un interlocuteur officiel des différentes autorités publiques dans la mise en œuvre des instruments de contrôle, de suivi et d’évaluation du respect, de la protection et de la réalisation des droits fondamentaux. La participation de la société civile se fait en amont, pendant et en aval des décisions des autorités publiques relatives aux politiques de promotion des droits de l’homme.

159.Il s’agit entre autres de :

(a)La ligue des droits de l ’ homme/de Liga voor Mensenrechten : Ces deux organisations combattent les injustices et les atteintes portées aux droits fondamentaux. Elles sensibilisent le public au respect de ces droits (violences institutionnelles, accès à la justice, respect des minorités, droit des femmes...), interpelle le pouvoir politique et s’investit dans la formation des adultes (dans le cadre de ses activités d’éducation permanente) et dans la mise sur pied d’outils pédagogiques et de formation à l’attention des acteurs de l’éducation.

(b)La CODE / de Kinderrechtencoalitie Vlaanderen vzw :  Ces deux organisations sont des réseaux d’associations qui ont pour point commun de développer une action de promotion ou de défense des droits de l’enfant en Belgique et dans le monde.

(c)UNICEF Belgique  : Cette organisation est la section belge d’UNICEF. En matière de droits de l’enfant, elle investit dans la promotion du Centre interdisciplinaire des droits de l’enfant, en particulier à l’égard des enfants. Via le projet « What Do You Think? », elle veut permettre aux enfants de faire entendre leur voix auprès du Comité des droits de l’enfant. Sur la base des résultats du projet, Unicef Belgique rédige le rapport des enfants et des jeunes de Belgique, en concertation avec les conseils de la jeunesse, qui est communiqué au Comité des droits de l’enfant dans le cadre de l’examen du rapport périodique de la Belgique.

(d)La vzw Vormenest un centre d’expertise en ce qui concerne l’éducation aux droits de l’enfant et aux droits de l’homme en communauté flamande, qui la soutient financièrement. Cette association sans but lucratif développe des matériaux et des méthodes pour aborder les différents thèmes à l’école et ailleurs.

(e)La vzw Kenniscentrum Kinderrechten (KeKi) et le Centre i nterdisciplinaire des d roits de l ’ e nfant (CIDE)sontdeux partenariats qui font entre autres de la recherche et de la formation en vue de largement diffuser les savoirs disponibles en matière de droits de l’enfant et de promouvoir la réflexion multidisciplinaire.

160.Il existe également toute une série d’organes (conseils supérieurs, commissions d’avis,…) composés de manière pluridisciplinaire : représentants des gouvernements, experts académiques et représentants de la société civile, qui ont pour mission de relayer et d’informer les institutions gouvernementales sur les matières relatives aux droits de l’homme.

8.Affectation de crédits budgétaires et évolution en la matière

161. Vu la complexité de la structure institutionnelle de la Belgique, il n’est pas possible de déterminer le montant des crédits budgétaires consacrés expressément à la mise en œuvre des obligations souscrites dans le domaine des droits de l’homme.

9.Coopération et assistance dans le domaine du développement

162.Les interventions de la coopération belge au développement s’insèrent dans le cadre de la poursuite des objectifs du Millénaire pour le développement (OMD), axés sur le développement humain durable et la lutte contre la pauvreté. La Belgique estime que l’atteinte des OMD est directement liée à la promotion et au respect des droits de l’homme dans ses pays partenaires. Presque toutes les interventions de la Direction générale de la coopération au développement du Service public fédéral affaires étrangères contribuent directement ou indirectement à la réalisation des droits sociaux et économiques.

163.Chaque année la coopération belge au développement subventionne des activités spécifiques liées aux droits de l’homme dans les pays en développement, par exemple via un appui aux élections ou via un appui au secteur de la justice.

164.Via la coopération multilatérale, la coopération au développement soutient et finance des organisations actives dans la promotion des droits de l’homme, notamment le Bureau du Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH), UNICEF (droits de l’enfant), UNIFEM/ONU Femmes (égalité des sexes et autonomisation des femmes) et FNUAP (droits sexuels et reproductifs).

165.Dans le cadre de la coopération bilatérale, la coopération belge au développement est active de diverses façons en matière de promotion et protection des droits de l’homme dans ses 18 pays partenaires. Le Ministre en charge de la coopération au développement réalise pour le Parlement belge des rapports annuels sur la situation des droits de l’homme au sein des pays partenaires. Les droits de l’homme font régulièrement l’objet de démarches et sont abordés dans le cadre du dialogue politique, tant aux niveaux européen \ que bilatéral. Les nouveaux PIC (Programme indicatif de coopération) avec les pays partenaires incluent systématiquement une clausule dans laquelle les deux pays s’engagent à promouvoir la bonne gouvernance, les droits de l’homme, la démocratie et l’état de droit.

166.La coopération au développement belge appuie également des ONG et des organisations de la société civile actives dans la promotion des droits de l’homme. Ceci est possible via un appui direct aux organisations de la société civile dans les pays partenaires, mais aussi via l’appui aux programmes des acteurs indirects belges (ONG, syndicats, …) qui à leur tour soutiennent leurs organisations partenaires à promouvoir la connaissance et le respect des droits de l’homme dans leurs pays. C’est aussi via les acteurs indirects que la coopération belge subventionne plusieurs initiatives de sensibilisation du public belge sur les droits de l’homme dans les pays en développement.

167.L’égalité entre hommes et femmes, l’autonomisation des femmes et les droits des enfants sont pris en compte comme thèmes transversaux dans les actions de la coopération belge au développement. En particulier, la Belgique a quadruplé les contributions non affectées à l’UNICEF depuis 2009, et finance un programme visant les violations graves à l’encontre des droits de l’enfant, y compris les violences sexuelles durant les conflits armés. En ce qui concerne les femmes, la coopération belge concentre ses efforts sur la santé et les droits sexuels et reproductifs des femmes ; les femmes, la paix et la sécurité, y compris la lutte contre la violence sexuelle envers les femmes, l’éducation des filles et la formation des femmes ainsi que l’autonomisation économique des femmes issues de milieux ruraux.

D.Processus d’établissement de rapports à l’échelon national

168.Au niveau belge, le partenaire et correspondant de l’Organisation des Nations Unies en ce qui concerne l’élaboration et la transmission des rapports est le SPF Affaires étrangères. C’est également cette instance qui organise concrètement le processus d’élaboration de ces rapports.

169.La première étape du processus d’élaboration des rapports consiste à faire l’inventaire des thèmes qui font l’objet du rapport en question et à déterminer, pour chaque thème, les niveaux de pouvoir, ministères ou instances compétents ou concernés. Pour chaque thème est proposée alors une « administration pilote », qui est considérée comme la mieux placée pour avoir une vue d’ensemble du thème considéré. Cette « administration pilote » sera en charge de rédiger, pour le thème considéré, la contribution qui sera insérée dans le rapport global. La décision quant au choix de cette instance pilote est prise dans le cadre d’une procédure de coordination (réunion de coordination) : elle a donc vocation à être consensuelle.

170.Deux remarques s’imposent à ce stade :

(a)dans un pays fédéral comme la Belgique, les niveaux de pouvoir, ministères ou instances compétents ou concernés par un thème dans son ensemble peuvent être variés et nombreux. C’est à ce niveau qu’une procédure de coordination prend toute son importance et tout son sens. Cette procédure se doit d’être large quant à ses participants, et neutre : il importe en effet que la synthèse puisse être faite des différents points de vue ;

(b)il doit être également précisé que ce sont les instances ou administrations relevant du pouvoir exécutif, au niveau fédéral ou fédéré, qui ont pour vocation de parler au nom de la puissance publique. Les instances de type représentatif ou consultatif n’ont pas la prérogative d’engager la puissance publique et de parler en son nom, même si leur apport dans le cadre de cette procédure est le bienvenu. Les instances représentatives ou consultatives peuvent bien entendu s’exprimer et communiquer leur point de vue à l’« administration pilote ». Les projets de texte ainsi que les textes finaux seront donc rédigés par des acteurs du pouvoir exécutif.

171.Ensuite, les administrations pilotes rédigent leur projet de contribution. Dans ce travail, elles peuvent recueillir toute information qui leur semble opportune. Et les autres niveaux de pouvoir, instances ou administrations sont libres de leur communiquer les éléments qu’ils jugent pertinents.

172.Ces différents projets de contributions sont ensuite globalisés et font l’objet d’une consultation dans le cadre d’une structure permanente «  Coormulti » de coordination qui a son siège au SPF Affaires étrangères. Les niveaux de pouvoir, administrations ou instances compétents ou concernés ont ainsi l’opportunité, à ce stade, de communiquer au service pilote en charge de la rédaction du projet les remarques ou suggestions qu’ils auraient.

173. Si besoin est, les contributions sont alors retravaillées et le projet final peut à son tour faire l’objet d’une procédure de coordination en vue de son approbation finale.

174. Signalons que la société civile est consultée, ce qui se fait régulièrement dans le cadre de l’élaboration de rapports relatifs aux droits de l’homme. Dans ce cadre, les organisations coupoles de la société civile constituent des partenaires privilégiés, mais non exclusifs.

175.Pour autant que des engagements soient pris, le rapport final peut faire l’objet d’un aval politique ultérieur au niveau des différents gouvernements fédéral et fédérés, afin de lui conférer un poids politique plus important. La procédure de coordination implique les gouvernements et ministres compétents, ce qui suffit à garantir l’aval politique au rapport qui est l’objet de la procédure de coordination.

176.Toutefois, la rédaction du rapport périodique belge relatif à la CRC est intégralement coordonnée par la Commission nationale pour les droits de l’enfant qui est caractérisée par une large représentation de la société civile.

177.Les principes et règles énumérés ci-dessus ont été d’application pour l’élaboration du « Core document ».

E.Autres informations relatives aux droits de l’homme

178.La politique des droits de l’homme de la Belgique s’inscrit dans le cadre plus général de la promotion et de la défense des droits de l’homme par l’Union européenne. Les droits de l’homme, la démocratie et l’état de droit sont des valeurs essentielles pour l’Union. Ancrées dans son traité fondateur, elles ont été renforcées par l’adoption de la Charte des droits fondamentaux. Les pays membres ou qui souhaitent adhérer à l’Union européenne doivent respecter les droits de l’homme. La politique des droits de l’homme de l’Union met l’accent sur les droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels. Elle vise en outre à promouvoir les droits des femmes et des enfants, ainsi que ceux des minorités et des personnes déplacées.

III.Informations concernant la non-discrimination et l’égalité et les recours utiles

A.Non-discrimination et égalité

179.Sous l’impulsion des directives européennes (2000/43 et 200/78), la Belgique a connu un processus d’harmonisation législative des mesures visant à lutter contre les discriminations tant au niveau de l’État fédéral que des entités fédérées. Les différents législateurs ont adopté des dispositifs très semblables, ce qui permet de faciliter la lisibilité nonobstant le nombre important de textes qui traitent de ces matières :

Loi du 30 juillet 1981 visant à réprimer certains actes inspirés par le racisme et la xénophobie modifiée par la loi du 10 mai 2007 ;

Décret de la communauté flamande du 8 mai 2002 (modifié en 2004, 2007 et 2009) relatif à la participation proportionnelle sur le marché de l’emploi ;

Décret de la communauté germanophone du 17 mai 2004 (modifié en 2007) relatif à la garantie de traitement sur le marché du travail ;

Décret de la Commission communautaire française du 22 mars 2007 relatif à l’égalité de traitement entre les personnes dans la formation professionnelle ;

Loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contre certaines formes de discrimination ;

Décret de la communauté flamande du 10 juillet 2008 créant un cadre pour l’égalité des chances et l’égalité de traitement en région flamande ;

Ordonnance de la région de Bruxelles-capitale du 4 septembre 2008 visant à promouvoir la diversité et lutter contre la discrimination dans la fonction publique ;

Ordonnance de la région de Bruxelles-capitale du 4 septembre 2008 relative à la lutte contre la discrimination et à l’égalité de traitement en matière d’emploi ;

Décret de la région wallonne du 6 novembre 2008 (tel que modifié par le décret du 19 mars 2009, modifié par le décret du 12 janvier 2012) relatif à la lutte contre certaines formes de discrimination ;

Décret de la communauté française du 12 décembre 2008 relatif à la lutte contre certaines formes de discrimination ;

Ordonnance de la région de Bruxelles-capitale du 19 mars 2009 modifiant le code bruxellois du logement ;

Décret de la Commission communautaire française du 3 juillet 2010 relatif à la lutte contre certaines formes de discrimination et à la mise en œuvre du principe de l’égalité de traitement ;

Décret de la communauté germanophone du 19 mars 2012 visant à lutter contre certaines formes de discrimination.

180.Sont des Critères protégés :  La prétendue race, la couleur de peau, l’ascendance, l’origine nationale ou ethnique, la nationalité, l’âge, l’orientation sexuelle, l’état-civil, la naissance, la fortune, la conviction religieuse ou philosophique, la conviction politique, la langue, l’état de santé actuel ou futur, le handicap, la caractéristique physique ou génétique, l’origine sociale. Suite à un arrêt de la Cour constitutionnelle, la loi du 10mai 2007 a intégré le critère de la conviction syndicale.

181.Constituent des Comportements interdits :  La discrimination directe, la discrimination indirecte, l’injonction de discriminer, le harcèlement et le refus d’aménagement raisonnable pour les personnes avec un handicap. Un mécanisme de justification est prévu avec des exigences variables tant en raison du critère protégé que du champ d’application. Le mobile abject constitue une circonstance aggravante pour toute une série d’infractions pénales. La loi antiracisme (30 juillet 1981) comporte également des infractions pénales spécifiques.

182.Le Champ d ’ application: L’emploi, les biens et services, la sécurité sociale et la protection sociale, la mention dans une pièce officielle ou un procès-verbal et l’accès et la participation à toute activité économique, sociale, culturelle ou politique accessible au public.

183.Les sanctions : Au civil, une action en cessation est prévue. Elle permet de prononcer la cessation d’une discrimination (éventuellement sous astreinte), d’accorder des dommages et intérêts à la victime, de prononcer la nullité d’une clause discriminatoire ou encore d’assurer la publication ou l’affichage du jugement. Au niveau pénal, des peines d’amende et/ou de prison sont prévues. Signalons également la possibilité de prononcer la déchéance des droits civils et politiques.

184.Les mécanismes de protection : À certaines conditions (de forme), les victimes et les témoins peuvent être protégés contre des représailles éventuelles et ce tant en matière d’emploi qu’en dehors du secteur de l’emploi.

185.Le pouvoir d ’ ester en justice est reconnu aux associations qui défendent les droits de l’homme et/ou lutte de contre les discriminations, aux organisations représentatives ou professionnelles (syndicats,…) et au Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme. Concernant, ce dernier, il faut signaler que le pouvoir d’ester en justice est limité au niveau des lois fédérales.

186.Suite à l’adoption des législations anti-discrimination en Wallonie (6 novembre 2008) et en communauté française (12 décembre 2008), deux protocoles de collaboration ont été signés (2009) entre ces deux entités fédérées et le Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme et l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes. Quatorze points de contacts (meldpunten) ont été créés dans les principales villes flamandes. Il s’agit pour chaque citoyen de pouvoir accéder aisément à un lieu où il peut obtenir des informations et un soutien dans le cadre de signalements relatifs à la discrimination ou au racisme. Une convention a également été signée entre le Pacte territorial pour l’emploi et le Centre pour l’égalité des chances dans le cadre des ordonnances en matière emploi dans la région de Bruxelles-capitale. Il s’agit de définir les modalités de collaborations dans les matières relevant de la lutte contre les discriminations et des politiques de diversité. La communauté germanophone a enfin désigné l’asbl PRISMA et le Conseil économique et social comme organe chargé de la mise en œuvre du décret relatif à la garantie de l’égalité de traitement sur le marché de l’emploi.

187.La loi du 15 février 1993 a créé le Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme. Le Centre publie chaque année des données statistiques relatives aux signalements et aux dossiers qu’il traite dans le cadre de ses compétences. Ces données statistiques reprennent des informations tant par critère protégé que par secteur (emploi, logement, …). Certains phénomènes spécifiques (antisémitisme, islamophobie, haine sur Internet, …) font également l’objet d’un rapportage. Enfin, les données émanant des services de police et des parquets en matière de discrimination et de délits de haine sont également publiés dans les rapports annuels du Centre.

188.Le Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme participe à la promotion de l’égalité et la lutte contre les discriminations à travers des formations, la production et la diffusion d’outils d’information (brochures, outils sur internet, …) et des campagnes de sensibilisation.

B.La lutte contre le racisme, l’extrémisme, la xénophobie et l’antisémitisme

1 ..Lutte contre le racisme, la xénophobie et l ’ extrémisme

189.Le 14 juillet 2004 le gouvernement fédéral a approuvé le principe d’une action fédérale contre la violence inspirée par le racisme, la xénophobie et l’antisémitisme, afin d’intégrer ainsi les recommandations de la Conférence mondiale contre le racisme (Durban 2001).

190.Le plan qui engage tous les gouvernements se concentre sur les points suivants : la mise en œuvre de la législation, l’Internet comme moyen pour la diffusion d’idéologies racistes et antisémites, le suivi des plaintes, le fait de contrecarrer les préjugés, les médias, la police, des mesures pour la protection de groupes cibles et la mise en place d’un baromètre de la tolérance.

191.Le Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme a été chargé du suivi de ce plan.

192.S’agissant du suivi des plaintes, dans chaque arrondissement judiciaire un magistrat de référence pour le racisme a été nommé en charge des questions de racisme et de discrimination.

2. Lutte contre l ’ antisémitisme

193.Les autorités belges sont conscientes du problème de l’antisémitisme et ont pris des mesures pour tenter de l’éliminer, notamment par la création d’un organe de surveillance. Le 26 avril 2004 la « cellule de veille antisémitisme » a été créée et elle est composée de représentants du gouvernement et de la communauté juive. La présidence et le secrétariat ont été confiés au Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme.

194.Outre la discussion sur les tendances et le suivi des dossiers ouverts, les priorités suivantes ont été identifiées :

la lutte contre l’antisémitisme et le négationnisme sur Internet ;

le développement d’une circulaire en vue de mieux identifier les infractions inspirées par le racisme ;

la lutte contre le racisme organisé, en se concentrant sur la lutte contre les idées racistes et antisémites, lors des concerts néo-nazis ;

une étude exploratoire sur « l’impact du conflit dans la bande de Gaza sur les relations interculturelles et le degré d’antisémitisme en Belgique ».

C.Les droits des personnes LGBT en Belgique

195.La fin des années 1980 a vu, dans la foulée de l’instauration du partenariat de couple de même sexe instauré au Danemark en 1989, un réel début de débat autour du contrat de cohabitation légale. L’enjeu était à l’époque d’offrir aux couples de même sexe une reconnaissance de leur union qui instaure une série de protections comparables à celles des couples hétérosexuels mariés. Ce qu’on a appelé les « années sida » a révélé de manière aiguë la précarité du statut légal et social des couples du même sexe : problèmes d’héritage, de droits de succession, de reconnaissance de l’union par les proches, etc. En Belgique, l’adoption de la loi sur la cohabitation légale, le 23 novembre 1998, fut un premier pas vers l’égalité juridique entre les couples homosexuels et hétérosexuels et les effets successoraux relatifs à la cohabitation légale ont été réglés en 2007.

196.L’ouverture du mariage civil aux personnes de même sexe, en 2003, a représenté le début d’une réelle égalité de droits : droits de succession, procédure de divorce, déclaration d’impôts commune, etc. Une différence subsiste cependant. Lorsque, dans un couple hétérosexuel, la femme donne naissance à un enfant, l’époux est supposé être le père. Ce n’est pas le cas pour les couples homosexuels. Si une lesbienne mariée donne naissance à un enfant, son épouse ne sera pas considérée comme le deuxième parent. Néanmoins, la Belgique est devenue le deuxième pays au monde à reconnaître le droit de se marier aux couples homosexuels. Evidemment, l’ouverture au mariage de personnes de même sexe n’étant pas en vigueur dans une série d’autres États, il n’est pas rare que des couples se voient confrontés à des problèmes de reconnaissance de leur mariage à l’étranger.

197.La transposition de la directive européenne anti-discrimination 2000/78 par la Belgique en 2003 fut un nouveau pas en avant dans la marche vers l’égalité, la Belgique ayant saisi cette occasion pour instaurer un cadre plus large que celui imposé par l’Europe. En effet, la discrimination s’est vue interdite non seulement dans le champ de l’emploi mais aussi dans l’accès aux biens et services. La loi anti-discrimination adoptée comportait tant des leviers pénaux que des leviers civils afin de lutter contre les discriminations et les crimes de haine liés, entre autres, à l’orientation sexuelle. Suite à un recours en annulation devant la Cour constitutionnelle, la loi anti-discrimination a été modifiée, mais confirmée dans ses principes par les lois du 10 mai 2007. La transposition par les diverses entités fédérées est, à quelques exceptions près, finalisée et permet l’application du principe de non-discrimination dans diverses compétences communautaires et régionales.

198.Le dernier chantier en date est celui de l’adoption, droit reconnu en mai 2006. Divers pays introduisaient, dans les années 2000, le droit à l’adoption aux couples de même sexe : les Pays-Bas, la Grande-Bretagne, le Danemark, etc. Derrière le droit à l’adoption, il y a l’enjeu de la reconnaissance de nombreuses situations de fait nées de situations individuelles telles que l’insémination d’une des deux partenaires ou l’adoption monoparentale.

D.Égalité entre les femmes et les hommes et lutte contre la discrimination fondée sur le sexe

1. Cadre général

199.Depuis février 2002, la Constitution belge garantit explicitement le principe d’égalité des femmes et des hommes. Les législateurs au sein des différents pouvoirs y sont par ailleurs encouragés à adopter des mesures spécifiques garantissant aux citoyens et citoyennes l’égal exercice des droits et libertés et à favoriser un accès égal des femmes et des hommes aux mandats électifs et publics.

200.Grâce à l’instauration de quotas fixés par plusieurs lois et décrets depuis 2002 imposant la parité sur les listes électorales et l’alternance de candidats des deux sexes aux deux premières places de celles-ci, on observe des avancées très sensibles en faveur des femmes dans le domaine de la prise de décision politique. Une règle de composition 1/3-2/3 est aussi généralement imposée au sein des organes de gestion et d’avis.

201.Les différents pouvoirs légifèrent et développent des politiques en matière d’égalité entre les femmes et les hommes dans le cadre de leurs compétences respectives.

202.Une réforme profonde des législations visant à lutter contre les différentes formes de discrimination, dont la discrimination fondée sur le sexe, a été menée en 2007 et 2008 par tous les niveaux de pouvoirs en vue d’améliorer la protection des personnes. Les discriminations fondées sur le sexe, en ce compris la grossesse, la maternité, l’accouchement et le changement de sexe ainsi que l’incitation à discriminer sont sanctionnées sur le plan civil et pénal.

203.Les mécanismes institutionnels consacrés à la lutte contre les discriminations fondées sur le sexe et la promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes ont été renforcés de manière substantielle.

204.L’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes a été créé fin 2002 au niveau fédéral pour veiller au respect de l’égalité des femmes et des hommes et combattre toute forme de discrimination et d’inégalité basée sur le sexe. Cet organisme est notamment compétent pour aider et accompagner les victimes de discrimination dans leurs démarches en justice, conduire des études, faire des recommandations aux pouvoirs publics.

205.Des bureaux de plaintes en matière de discrimination ont été instaurés dans 12 villes en région flamande, ainsi qu’un à Bruxelles depuis juillet 2008. Dans le cadre des protocoles conclus avec la région wallonne et la communauté française, l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes développe un réseau analogue en Wallonie. Le Gouvernement wallon a créé en 2003 un Conseil de l’égalité entre hommes et femmes qui a un rôle consultatif. Un guichet anti-discrimination destiné aux demandeurs d’emploi et aux employeurs existe depuis 2001 dans la région de Bruxelles-capitale.

206.L’institutionnalisation de la stratégie du gender mainstreaming a été effectuée par la plupart des pouvoirs. Citons par exemple la loi fédérale du 12 janvier 2007 (appelée « loi gender mainstreaming » imposant l’intégration de la dimension de genre de manière transversale et systématique dans les différentes phases du processus décisionnel et opérationnel.

2 . L ’ égalité entre hommes et femmes sur le lieu de travail

207.L’élimination de l’écart salarial entre les femmes et les hommes est au cœur des priorités des responsables politiques et des partenaires sociaux en Belgique depuis plusieurs années. À ce titre, un rapport est publié annuellement. Selon le rapport 2010, en moyenne, les travailleuses gagnent 11 % de moins par heure que leurs équivalents masculins. Sur une base annuelle, cette différence monte jusqu’à 24 %, parce que les femmes travaillent plus souvent à temps partiel. Les chiffres relatifs à l’écart salarial pour l’année 2007 sont comparables à ceux de 2006, mais une diminution évidente se marque par rapport à 2004 et 2005.

208.La Belgique a également développé un projet visant le développement d’un système de classification de fonctions, pilier de la formation des salaires, qui soit sexuellement neutre. Souvent, en effet, les systèmes sous-évaluaient des fonctions et des caractéristiques de fonction typiquement féminines, cet outil d’évaluation, permet aux employeurs de contrôler facilement leur système.

209.La Belgique a aussi adopté une série de mesures visant à augmenter la participation féminine dans divers domaines de la vie publique.Une étude intitulée « Femmes au sommet » réalisée en 2008 a notamment analysé la représentation féminine dans ces différents secteurs. En outre, afin de soutenir la mise en œuvre concrète du gender mainstreaming, une base de données sur les formations en matière de genre (base de données Genderbase) a été actualisée tandis qu’une autre relative aux femmes expertes dans différents domaines (base de données VEGA) a été mise en ligne.

210.En septembre 2009, la charte gender mainstreaming conclue par les syndicats a été massivement diffusée afin de célébrer son cinquième anniversaire. Cette charte a pour but d’inciter les syndicats à prêter plus d’attention à la dimension de genre dans leurs actions, ce qui permet de sensibiliser les patrons à traiter les femmes et les hommes sur un pied d’égalité.

211.La Belgique a donné une nouvelle impulsion à la thématique de l’égalité salariale avec les autres États membres de l’Union européenne à l’occasion de sa présidence du Conseil de l’Union européenne au 2ème semestre de 2010.

3. Protection des droits de l ’ homme pour les personnes transsexuelles

212.La Belgique dispose d’un arsenal juridique en vue de garantir la protection des droits des personnes transsexuelles et de les protéger contre la discrimination fondée sur le changement de sexe.

213.La loi du 10 mai 2007 (Moniteur Belge du 11 juillet 2007) relative à la transsexualité stipule que les personnes qui ont la conviction intime, constante et irréversible d’appartenir au sexe opposé à celui qui est indiqué dans l’acte de naissance peuvent, sous certaines conditions énoncées dans le Code civil et par simple procédure administrative, faire adapter la désignation du sexe dans leur acte de naissance. De même, la loi du 15 mai 1987 relative aux noms et prénoms prévoit la possibilité pour ces personnes – également sous certaines conditions – d’introduire une demande de changement de prénom où le changement de prénom n’est pas une faveur, mais un droit fondamental.

214.Concernant la protection contre la discrimination fondée sur le changement de sexe d’une personne, tant l’État fédéral que les entités fédérées ont adopté des législations anti-discrimination qui protègent les personnes transsexuelles. Par exemple, la loi fédérale du 10 mai 2007 (Moniteur Belge du 30 mai 2007) tendant à lutter contre la discrimination entre les femmes et les hommes (art. 4, par. 2), le décret du 6 novembre 2008 de la région Wallonne relatif à la lutte contre certaines formes de discrimination, et ce compris la discrimination entre les femmes et les hommes en matière d’économie, d’emploi et de formation professionnelle (art. 3, par. 2), le décret du 12 décembre 2008 de la communauté française relatif à la lutte contre certaines formes de discrimination (art. 2, par. 3), le décret du 10 juillet 2008 de la communauté flamande portant le cadre de la politique flamande de l’égalité des chances et de traitement (art. 16, par. 5) et les ordonnances du 4 septembre 2008 de la région de Bruxelles-Capitale visant à promouvoir la diversité et à lutter contre la discrimination dans la fonction publique régionale bruxelloise ainsi qu’à l’égalité de traitement en matière d’emploi.

4. Lutte contre les violences sexospécifiques et les viol ences en général

215.Depuis 2001, la loi belge sanctionne le fait de pratiquer, faciliter ou favoriser toute forme de mutilation des organes génitaux d’une personne de sexe féminin, avec ou sans son consentement, d’une peine d’emprisonnement de trois à cinq ans. En 2007 la Belgique s’est également dotée d’une législation qui incrimine les mariages forcés.

216.Le 23 novembre 2010, la Belgique a adopté un nouveau plan d’action national de lutte contre la violence entre partenaires et d’autres formes de violences intrafamiliales pour la période 2010-2014. Son champ d’action vise la violence entre partenaires, les mariages forcés, les violences liées à l’honneur et les mutilations génitales féminines.

217.À travers ce nouveau plan associant l’État fédéral, les communautés et les régions, la Belgique s’est engagée à mettre en œuvre plus de 120 nouvelles mesures s’articulant autour des cinq objectifs globaux suivants : développer la connaissance et améliorer la compréhension de la problématique ; informer et sensibiliser ; prévenir et détecter ; assurer une assistance aux victimes et un suivi adaptés aux auteurs et enfin, prévoir une approche policière et judiciaire adaptées.

218.En outre, la lutte contre la violence (en général) est une priorité pour la police. Le plan national de sécurité 2008-2011 requiert notamment une approche intensive et de qualité du parquet et de la police pour des faits de violence graves non organisés (en particulier les assassinats et les meurtres), les délits sexuels (en particulier les viols) et autres atteintes graves à l’intégrité physique.

E.Les droits des personnes handicapées

219.La Belgique a ratifié la Convention de l’ONU relative aux droits des personnes handicapées et son Protocole facultatif le 2 juillet 2009. Depuis lors, les différentes autorités compétentes ont développé les mécanismes de suivi, conformément à l’article 33 de la Convention, pour soutenir le rapportage (en 2011, la Belgique a déposé auprès du Comité pour les droits des personnes handicapées son premier rapport périodique dans le cadre de cette Convention) et la mise en œuvre de la Convention :

différents points focaux ont été mis en place, aux différents niveaux de pouvoir ;

un point de coordination interfédéral se situe au sein du SPF sécurité sociale ;

mécanisme indépendant : un accord a été conclu entre le gouvernement fédéral et les différentes communautés et régions pour confier les missions relevant de l’article 33.2 de la Convention au Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme (CECLR) ;

participation de la société civile : il existe une étroite collaboration avec les personnes handicapées elles-mêmes et leurs représentants, ainsi qu’avec d’autres associations qui sont actives dans le domaine de l’égalité des chances, le combat contre la discrimination, les droits de l’homme…

220.La concrétisation de ces travaux devrait soutenir une politique large et cohérente en faveur d’un plus grand respect des droits de l’homme des personnes handicapées.

221.L’égalité des personnes handicapées et la protection contre la discrimination sont établies dans la Constitution belge (articles 10 et 11) et dans les législations prises par les différents niveaux de pouvoirs. Au niveau fédéral, le dispositif anti-discrimination est mis en œuvre dans les trois lois anti-discrimination du 10 mai 2007 : la loi générale anti-discrimination, la loi antiracisme et la loi sur le genre. La loi du 10 mai 2007 visant à lutter contre certaines formes de discrimination interdit toute forme de discrimination directe ou indirecte, d’injonction de discriminer ou d’intimider, entre autres sur la base d’un handicap ou de l’état de santé actuel ou futur. Elle impose de procéder à des aménagements raisonnables pour les personnes handicapées. Le refus de procéder à ces aménagements peut également être considéré comme un acte discriminatoire. La loi anti-discrimination s’applique à de nombreux domaines de la vie publique : l’emploi, le secteur des biens et des services, toute activité économique, sociale, culturelle ou politique, la sécurité sociale et la protection sociale. Elle permet aux victimes de discrimination de faire valoir leurs droits et de porter l’affaire devant un tribunal civil : tribunal du travail, tribunal du commerce ou de première instance.

222.Conformément à la loi du 15 février 1993 portant création du Centre pour l’égalité des chances et de la lutte contre le racisme (CECLR), telle que modifiée par les lois du 25 février 2003 et du 10 mai 2007, le CECLR est chargé de traiter des cas de discrimination, basés par exemple sur un handicap. Mi-2009, le CECLR a mis en service un nouveau système électronique d’enregistrement et de traitement des signalements et des dossiers individuels en rapport avec la législation anti-discrimination (METIS). Ces chiffres sont présentés dans les rapports annuels et d’activités du CECLR. Tous les signalements de cas de discrimination sont ainsi centralisés en Belgique.

223.Au-delà de la répartition des compétences entre les entités fédérées et l’État fédéral sur le plan du handicap, les préoccupations politiques et les initiatives législatives vont unanimement, depuis une dizaine d’années, dans le sens d’une plus grande inclusion des personnes handicapées dans la société ordinaire et de la prise en charge de leurs besoins dans un certain nombre de domaines de la vie (mainstreaming du handicap, également appelé handistreaming). Cela est parfaitement conforme au changement de paradigme inhérent à la Convention des Nations Unies.

224.Sous l’angle de l’égalité des chances pour tous, mais compte tenu aussi des besoins spécifiques des personnes handicapées, une attention toute particulière a ainsi été consacrée à l’accessibilité de l’environnement bâti, des transports et des technologies de l’information et de la communication (normalisation contraignante), à l’emploi des personnes handicapées (activation et lutte contre les pièges à l’emploi, élaboration de mesures de soutien à l’emploi) mais aussi au soutien aux étudiants ayant des limitations fonctionnelles (non seulement dans l’enseignement spécialisé mais aussi plus récemment dans l’enseignement général, en ce compris supérieur).

Annexe

Schéma de la pyramide des juridictions en Belgique