Nations Unies

HRI/CORE/KEN/2011

Instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme

Distr. générale

8 mars 2013

Français

Original: anglais

Document de base faisant partie intégrante des rapports présentés par les États parties

Kenya *

[24 août 2011]

Table des matières

Paragraphes Page

I.Informations à caractère général et données statistiques1−474

A.Caractéristiques démographiques, économiques, sociales et culturelles2−354

Caractéristiques démographiques et sociales2−164

Caractéristiques économiques17−287

Criminalité29−3510

B.Structure constitutionnelle, politique et juridique du Kenya36−4711

Lois applicables37−3812

La Constitution de 201037−3812

L’État3912

Composition du Parlement40−4212

Le pouvoir exécutif national4313

L’appareil judiciaire44−4513

Le régime électoral46−4713

II.Cadre général de la protection et de la promotion des droits de l’homme48−15914

A.Acceptation des normes internationales relatives aux droits de l’homme48−5314

a)Ratification des principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme48−5214

b)Réserves et déclarations5318

B.Protection constitutionnelle et incorporation de la Charte des droits54−6918

a)Application de la Charte des droits54−5618

Application de la Charte des droits55−5618

b)Compétence des tribunaux pour défendre et appliquerla Charte des droits5719

c)Recours ouverts en cas de violation des droits de l’homme58−5919

d)Application de la Charte des droits60−6919

Restrictions63−6420

Aide juridictionnelle65−6921

C.Institutions chargées de veiller au respect des droits de l’homme70−8722

Reconnaissance par le Kenya de la compétence des mécanismes régionaux de défense des droits de l’homme85−8726

D.Cadre général de promotion des droits à l’échelon national88−13327

a)Administration provinciale8827

b)Rôle du Parlement et des institutions nationales des droits de l’homme89−9027

c)Publication des instruments relatifs aux droits de l’homme91−9227

d)Promotion des activités de sensibilisation des fonctionnaires aux droits de l’homme93−9628

e)Promotion des activités de sensibilisation aux droits de l’homme par le biais des médias97−9929

f)Rôle de la société civile, notamment des organisations non gouvernementales100−11129

g)Tendances budgétaires en matière de droits de l’homme au titre des différents instruments112−11531

Santé116−11732

Éducation118−11933

Eau12033

Logement12133

Sécurité alimentaire122−12534

h)Coopération et aide au développement en matière de promotion et de protection des droits de l’homme126−13134

Activités du Kenya dans le domaine de la coopération et de l’aide au développement en faveur d’autres pays132−13336

E.Rôle du processus d’établissement des rapports dans la promotion des droits de l’homme à l’échelle nationale134−14337

a)Historique de la pratique du Kenya en matière de présentation de rapports134−13537

b)Participation des différentes parties prenantes à l’établissement des rapports136−14238

Contribution de la Commission nationale des droits de l’homme à l’établissement des rapports soumis par le Kenya14340

F.Autres informations relatives aux droits de l’homme144−15140

a)Politique et plan d’action nationaux en faveur des droits de l’homme144−14640

b)Examen périodique universel (EPU)147−14841

Suivi des conférences internationales149−15141

G.Mise en œuvre des dispositions de fond relatives aux droits de l’homme communes à tous les instruments internationaux ou à plusieurs d’entre eux152−15942

a)Mesures prises pour éliminer la discrimination et garantir l’égalité152−15442

Discrimination à l’égard des femmes155−15643

Mesures législatives contre la discrimination157−15944

I.Informations à caractère général et données statistiques

Le Gouvernement kényan a l’honneur et le plaisir de soumettre le présent document de base établi conformément aux directives harmonisées pour l’établissement de rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, englobant le document de base commun et les rapports ciblés pour chaque instrument (HRI/MC/2005/3). Ces informations serviront de toile de fond aux différents rapports soumis au titre des différents instruments relatifs aux droits de l’homme auxquels le Kenya est partie.

A.Caractéristiques démographiques, économiques, sociales et culturelles

Caractéristiques démographiques et sociales

Le Kenya est un pays d’Afrique de l’Est situé sur l’Équateur, qui s’étend sur 582 650 km2, dont 560 250 km2 de terres et environ 13 400 km2 d’étendues d’eau. Environ 80 % du territoire est aride ou semi-aride, et seulement 20 % est constitué de terres arables.

La société kényane est une société multiraciale, multiethnique, multiculturelle et multireligieuse. La langue nationale est le kiswahili, la langue officielle au côté de l’anglais (mais il existe aussi bien d’autres langues locales). Les personnes d’origine africaine constituent quelque 90 % de la population, qui se répartit entre 42 grands groupes ethniques. Ces groupes appartiennent à trois familles linguistiques: bantoue, couchitique et nilotique. LesBantous regroupent les Kikuyus (22 %), les Luhyas (14 %), les Kambas (11 %), les Merus (6 %), les Embus (1,20 %), les Kisiis (6 %) et les Mijikendas (4,7 %), les Taitas (0,95 %), les Pokomos (0,27 %), les Banjunis (0,20 %), les Bonis-Sanyes (0,05 %), les Tavetas (0,07 %), les Kurias (0,52 %), les Mbeeres (0,47 %), les Basubas (0,50 %); les Nilotes regroupent les Luos (13 %), les Kalenjins (12 %), les Turkanas (1,32 %), les Tesos (0,83 %), les Samburus (0,50 %) et les Masais (1,8 %); les Couchites regroupent les Somalis (0,21 %), les Oromos (0,21 %), les Rendiles (0,12 %), les Borans (0,37 %), les Gabras (0,17 %). Il convient de noter que ces groupes se subdivisent en une multitude de sous-tribus. La plupart des Kényans sont bilingues (anglais et swahili) et beaucoup d’entre eux parlent la langue maternelle de leur groupe ethnique.

Le Kenya a une population totale de 38 610 097 habitants (résultats du recensement de 2009), dont 19 417 639 femmes et 19 192 458 hommes. Ces estimations tiennent compte des effets de la mortalité très élevée due au sida, qui peut entraîner une baisse de l’espérance de vie, la hausse des taux de mortalité, notamment infantile, la chute des taux de croissance démographique et des modifications de la répartition démographique par âge et par sexe. Les zones rurales abritent 67,7 % de la population. Le Kenya dispose d’un grand réservoir de personnes jeunes. En vertu de la politique nationale relative à la jeunesse de 2007, les jeunes s’entendent des personnes âgées entre 15 et 30 ans. Tandis que la notion de jeune est largement associée au passage de l’enfance à l’âge adulte, certaines définitions considèrent le début de la productivité économique et sociopolitique comme le marqueur minimal; 51,2 % des jeunes (4 006 888) sont des femmes et 48,8 % (3 877 758) des hommes.

La population comprend 3,5 % de personnes handicapées (682 623 femmes pour 647 689 hommes). Il convient toutefois de noter que, d’après les données du recensement, ce chiffre se situe en deça de la réalité car seuls les handicaps habituels ont été pris en compte (handicap physique, mental, auditif et visuel, ainsi que les troubles du langage), et que seuls les «ménages traditionnels» ont été sondés. Parmi les personnes handicapées, 51 % sont des femmes et 49 % des hommes. Leur handicap était principalement physique et lié à des difficultés d’autonomie (31 %); suivaient les déficiences visuelles (25 %) et auditives (14 %).

Il est néanmoins important de noter que les estimations varient considérablement selon la documentation consultée et, de façon générale, qu’il n’existe pas de données fiables sur la situation des personnes handicapées au Kenya. Ainsi, d’après l’enquête nationale sur le sujet (Gouvernement kényan, 2008), 3,6 % des jeunes âgés entre 15 et 24 ans étaient porteurs de handicap, essentiellement visuel et physique (1,1 % dans l’un et l’autre cas). Parmi les personnes âgées entre 25 et 34 ans, la prévalence du handicap était de 4 %. Dans ce groupe, les handicaps physiques étaient les plus courants (1,3 %), suivis des déficiences visuelles (1,1 %).

On trouvera dans le tableau ci-après la répartition de la population par tranche d’âge.

Population par tranche d ’ âge

Âge

0-14

15-64

65 et plus

Femmes

8  398 000

10 180 000

602 000

Hommes

8 173  000

10 505  000

730  000

Source : Ministère de la planification, 2011.

La répartition de la population est généralement inégale et varie de 67,2 personnes au km2 dans les zones à fort potentiel à 3 personnes au km2 dans les zones arides. Environ 20 % seulement du territoire consistent en terres agricoles à potentiel élevé à moyen qui répondent aux besoins de 80 % de la population. Les 20 % restants de la population vivent sur 80 % des terres, lesquelles sont arides et semi‑arides. Ce constat traduit la répartition inégale du potentiel agricole et des possibilités d’emploi. D’autres facteurs qui influencent le mode de répartition de la population sont notamment les politiques historiques en matière d’établissements humains. Les zones les plus densément peuplées se situent dans les périmètres urbains et autour du lac Victoria, sur les hauts plateaux et le long de la bande côtière, où les sols sont fertiles et les précipitations bien réparties et régulières. Les zones peu peuplées se situent dans les régions arides et semi-arides, où les sols sont pauvres et le climat inhospitalier.

Sur le plan démographique, le pays se caractérise par des taux de mortalité infantile élevés (53,49 décès pour 1 000 naissances vivantes au total, 50,63 filles pour 56,28 garçons). L’espérance de vie est généralement estimée à 58,82 ans, soit 59,32 ans pour les femmes et 58,33 ans pour les hommes. Le taux de fécondité total est estimé à 4,38. En outre, la proportion de personnes à charge est élevée car 42,3 % de la population sont âgés de moins de 15 ans (estimations datant toutes de 2009).

Les principales religions sont le christianisme (78 %), l’islam (10 %), les religions africaines traditionnelles (10 %), l’hindouisme et le sikhisme (1 %). La religion est de plus en plus perçue par certaines minorités comme un facteur majeur de détermination de la nationalité et l’acquisition des droits liés à la nationalité. Par exemple, certains musulmans font valoir que le Kenya est dirigé comme un pays chrétien. Ceux qui adhèrent aux croyances africaines traditionnelles se plaignent souvent que les droits accordés en vertu du droit anglais prennent le pas sur ceux accordés en vertu des lois coutumières, étroitement associées aux convictions religieuses traditionnelles.

Le système éducatif kényan comprend l’éducation préscolaire, primaire, secondaire et supérieure; il s’agit d’un système réparti selon la formule 8-4-4 (années). En janvier 2003, le Gouvernement kényan a annoncé l’instauration de la gratuité de l’enseignement primaire. De ce fait, le taux de scolarisation dans le primaire a fait un bond de près de 70 %. Dans l’enseignement secondaire et supérieur, la progression n’a pas été comparable parce que les droits de scolarité n’ont pas été supprimés. En 2007, le Gouvernement a publié un communiqué selon lequel, à compter de 2008, il subventionnerait fortement l’enseignement secondaire en prenant à sa charge tous les frais de scolarité.

Les écarts entre filles et garçons dans le secteur de l’enseignement augmentent à mesure que les étudiants passent d’un niveau à l’autre. En 2008, dans le primaire, le taux de scolarisation net des garçons s’élevait à 94,6 % et celui des filles à 90,5 %, le taux de scolarisation national s’établissant à 92,5 %, par comparaison avec les taux de 85,3 % pour les garçons et 83,8 % pour les filles (soit un taux national de 84,5 %) en 2004.

En 2008, les taux nets de scolarisation dans le secondaire étaient nettement plus faibles; il s’élevait à 29,8 % pour les garçons contre 27,9 % pour les filles. Pour les deux sexes, ces chiffres représentent une baisse considérable par rapport aux taux enregistrés dans le primaire, bien qu’ils attestent d’une amélioration par rapport aux chiffres de 2004, avec 19,7 % pour les garçons contre 19,1 % pour les filles. On trouvera ci-après les taux de transition réels du primaire au secondaire pour la période 2000-2008, ventilés par sexe.

Taux de transition du primaire au secondaire par sexe (2000-2008)

Année

Garçons

Filles

Total

2000

43 , 5

42 , 6

43,3

2001

45 , 6

43 , 4

44,5

2002

44 , 5

42 , 5

43,4

2003

49 , 2

55 , 2

51,9

2004

51 , 9

47 , 2

49,6

2005

41 , 8

40 , 2

41,0

2006

47 , 2

44 , 5

46,0

2007

51 , 2

47 , 3

49,3

2008

54 , 6

50 , 0

52,4

Source : Ministère de l ’ éducation, de la science et de la technologie (2009) .

D’après l’Étude économique de 2009, les filles représentaient 40,1 % des étudiants au niveau universitaire (dans le public et le privé), contre 59,8 % de garçons. Ces taux correspondaient grosso modo à ceux de l’année précédente (2007/08). Les établissements techniques se trouvaient dans une situation analogue, à savoir que le nombre d’inscriptions des garçons était plus élevé, avec toutefois un écart plus serré, à savoir 51,5 % pour les garçons et 48,4 % pour les filles.

En ce qui concerne les enfants handicapés, les statistiques du Ministère de l’éducation indiquent que le nombre d’institutions qui offrent des services d’enseignement aux enfants présentant des besoins spéciaux est passé de 926 en 2002 à 1 574 en 2008 (Ministère de l’éducation, 2009). C’est un chiffre record de 143 409 enfants ayant des besoins spéciaux qui ont été scolarisés en 2008. Toutefois, 78 % de ces enfants (111 995) se trouvaient à Nairobi, alors que les 22 % restants étaient répartis dans les sept autres provinces. Les faibles taux d’accès à l’éducation dans la province du nord-est est préoccupante pour le Gouvernement. Effectivement, si des progrès bien réels ont été enregistrés au niveau national, ils concernent davantage les zones urbaines, tandis que de nombreux jeunes des zones rurales et marginalisées n’exercent peut-être pas leur droit à l’éducation.

En outre, certains indices donnent à penser que l’éducation axée sur les besoins spéciaux ne prend en charge que les enfants porteurs d’un handicap «habituel» (mental, physique, visuel et auditif). D’après l’analyse des statistiques du Ministère de l’éducation (2009), sur toutes les institutions qui offrent une éducation aux enfants présentant des besoins spéciaux en 2008, 41 % s’occupaient des enfants ayant un handicap auditif, 40 % de ceux qui présentaient un handicap mental, 11 % un handicap physique et 7 % un handicap visuel. De nombreux apprenants qui souffrent de handicaps dont l’incidence est élevée, tels que difficultés d’apprentissage et difficultés de comportement, se trouvent laissés pour compte, faute d’institutions spécialisées susceptibles de les accueillir.

Caractéristiques économiques

Le Kenya est une économie de marché dotée d’un petit nombre de sociétés d’infrastructures publiques et qui repose sur un système de commerce extérieur libéralisé. Son programme de développement est fondé sur la stratégie Vision 2030. Cette stratégie, qui vise à faire du Kenya un pays nouvellement industrialisé à revenu intermédiaire offrant une qualité de vie élevée à tous ses citoyens d’ici à 2030, comprend trois grands volets, économique, social et politique. Le volet économique vise à atteindre un taux de croissance économique moyen de 10 % par an d’ici à 2012 et à maintenir ce taux jusqu’en 2030 afin de produire davantage de ressources en vue de la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement et des objectifs énoncés dans Vision 2030. Le volet social tend à un développement social juste, solidaire et équitable dans un environnement propre et sûr. Le volet politique recherche l’instauration d’une gouvernance démocratique responsable, qui soit axée sur le fond des problèmes, la population et des résultats.

Vision 2030 repose sur 10 grandes idées dont les sept premières sont étroitement liées aux volets économique et social, à savoir: stabilité macroéconomique aux fins du développement à long terme, équité et multiplication accrue des possibilités de création de richesse pour les populations défavorisées, infrastructure, énergie, science, technologie et innovation, réforme foncière et valorisation des ressources humaines. À ces sept grandes idées d’ordre socioéconomique s’ajoutent trois autres éléments fondamentaux, étroitement liés au volet politique, à savoir: réforme du service public, renforcement de la sécurité et réforme approfondie de la gouvernance.

Le tourisme est la plus grande source de devises étrangères, suivi par les fleurs, le thé et le café. La part de l’agriculture dans le produit intérieur brut (PIB) suit celle du secteur tertiaire, la plus importante. La production de produits de base tels que le maïs est sujette à des fluctuations climatiques sévères. Des ralentissements périodiques de la production expliquent le recours à l’aide alimentaire. Bien que le Kenya soit le pays le plus industrialisé d’Afrique de l’Est, le secteur manufacturier ne représente toujours que 14 % du PIB. L’activité industrielle, concentrée autour des trois grands pôles urbains que sont Nairobi, Mombassa et Kisumu, est dominée par les industries agroalimentaires telles que les minoteries, les brasseries, le traitement de la canne à sucre et la production de biens de consommation, notamment l’assemblage de véhicules. Ce mode d’activité économique a une grande incidence sur l’accès à l’emploi.

Le fait que l’économie soit hautement tributaire de l’agriculture pluviale et du secteur du tourisme la rend vulnérable aux cycles d’expansion et de récession. Le secteur agricole emploie directement et indirectement près de 70 % de la population. La moitié de la production du secteur est destinée à l’autoconsommation. La mauvaise gouvernance et la corruption ont eu des répercussions négatives sur la croissance, en accroissant le coût des affaires. L’indice de perception de la corruption de Transparency International classe le Kenya en mauvaise position, bien que des améliorations sensibles se soient produites récemment. Le VIH/sida continue d’être un risque à long terme pour l’économie. Le Gouvernement a mis en place des programmes de sensibilisation afin de lutter contre la propagation de la maladie. Les malades peuvent se procurer des médicaments antirétroviraux à des tarifs subventionnés par l’État.

Le Kenya est une plaque tournante régionale pour le commerce (importations et exportations) et la finance en Afrique de l’Est. Or l’économie se caractérise par une stagnation de la croissance économique depuis longtemps. Entre 1997 et 2002, elle a progressé à un taux moyen annuel de seulement 1,5 %, chiffre en deçà de la croissance démographique, estimée à 2,5 % par an, d’où une baisse du revenu par habitant. La croissance de l’économie a été grandement compromise du fait que le pays était tributaire de plusieurs grandes cultures marchandes dont les cours sont restés déprimés au niveau mondial. Une sévère sécheresse survenue en 1999-2000 a aggravé les problèmes, conduisant au rationnement de l’eau et de l’énergie et à la baisse de la production dans les secteurs de l’agriculture, de l’élevage et des pêches. De ce fait, le PIB a baissé de 0,2 % en 2000. Le Fonds monétaire international (FMI), qui avait recommencé à accorder des prêts en 2000 pour aider le Kenya surmonter la période de sécheresse, a de nouveau suspendu ses prêts en 2001 lorsque l’État s’est abstenu d’arrêter des mesures de lutte contre la corruption, dont le clientélisme et le népotisme.

En dépit du retour de fortes pluies en 2001, la croissance de l’économie a plafonné à 1,2 % en raison des cours déprimés des produits de base, de la corruption et du déclin de l’investissement. Cette tendance s’est poursuivie en 2002, la croissance s’établissant à 1,1 %, non seulement en raison de pluies irrégulières, de la baisse de confiance des investisseurs et d’un soutien minimal des donateurs, mais également parce qu’il s’agissait d’une année électorale.

Lors des élections de décembre 2002, un nouveau gouvernement d’opposition s’est attelé aux problèmes économiques auxquels le pays était confronté. Après avoir fait rapidement quelques progrès dans la lutte contre la corruption et encouragé le soutien des donateurs, le nouveau gouvernement s’est trouvé déstabilisé par des scandales de corruption passive de haut niveau en 2005 et 2006. En 2005, le taux de croissance économique a atteint 5,8 %. En 2006, la Banque mondiale et le FMI ont retardé le déblocage des prêts en attendant que l’État s’attaque à la corruption. Les institutions financières et les donateurs internationaux ont depuis repris leurs prêts. La violence postélectorale enregistrée début 2008, combinée aux répercussions du ralentissement économique mondial sur les transferts de fonds et les exportations, ainsi que la réduction du PIB, ont ramené la croissance à 2,2 % en 2008, contre 7 % en 2007.

Indicateurs macroéconomiques

Indicateurs

2005

2006

2007

2008

2009

2010

Taux de croissance du PIB réel (%)

5,9

6,3

7

1,6

2,6

5,6

Revenu par habitant (ShK)

40 292

44 899

49 204

54 371

57 887

57 887

Taux de croissance démographique (%)

2,6

2,8

3

3

2,9

2,5

Taux d’inflation annuel moyen (%)

9,87

6,39

4,27

16,27

9,37

9,2

Taux des bons du Trésor (valeur nominale) (%)

8,14

5,83

8,75

8,5

6,82

2,8

Dette publique en % du PIB

51,9

46,8

44,6

48,5

48,1

51

De tte extérieure publique en % du PIB

28,4

23,2

22,5

24,7

21,5

23,2

Dette intérieure pub lique en % du PIB

18,3

19,4

17,4

20,6

23,5

25,9

Source : Annexe statistique de l’exposé budgétaire 2010-2011; Banque centrale du Kenya . Étude  économique mensuelle de mars 2010 .

Néanmoins, la pauvreté reste un obstacle majeur à la satisfaction des besoins essentiels et à l’exploitation de la pleine mesure des capacités de nombreux Kényans, en particulier des femmes et des enfants. En 2009, la population qui vit dans un état de pauvreté absolue est estimée à 46 % (49,1 % et 33,7 % en milieux rural et urbain respectivement), soit une baisse par rapport aux pourcentages enregistrés en 1997 (52,9 % et 42,9 % en milieux rural et urbain respectivement), mais une augmentation par rapport à 1992 (46 % et 29,3 % en milieux rural et urbain respectivement).

Selon les estimations de la pauvreté régionale, la pauvreté varie considérablement d’une région à l’autre et son incidence est particulièrement élevée dans les zones semi-arides. Elle est pluridimensionnelle et recouvre l’insuffisance de connaissances, le déclin de l’espérance de vie et de la qualité de vie. Elle est liée au manque de moyens nécessaires pour répondre aux besoins matériels, et implique une déficience quant à l’exercice des droits économiques et culturels, qui sont essentiel à la survie ou au bien-être, en particulier pour les personnes âgées. Les causes de la pauvreté résident notamment dans un taux de croissance démographique élevé, la faible croissance de l’économie, l’exclusion sociale, l’insécurité et l’absence de maîtrise sur les moyens de production. On trouve parmi les pauvres des personnes âgées, des personnes privées de terres, des éleveurs, des personnes handicapées, des ménages dirigés par une femme, des ménages dirigés par une personne sans éducation formelle, des travailleurs occasionnels non qualifiés, des orphelins du sida, des enfants des rues et des mendiants.

La pauvreté a été aggravée par des taux de chômage élevés, estimés à 40 % (2008). Le chômage est extrêmement préoccupant. Des études donnent à penser qu’il a été aggravé par des facteurs tels que le ralentissement de la croissance économique, la rapidité de la croissance démographique, un mauvais appariement des compétences et des problèmes d’information sur le marché du travail, les effets négatifs des programmes d’ajustement structurel, l’instabilité politique, ainsi que la mauvaise gouvernance.

Au cours des deux dernières années, le Gouvernement s’est engagé à remédier au chômage en élaborant diverses politiques visant à servir de cadre pour la lutte contre ce phénomène. Ces politiques partent du principe que la mise en œuvre de mesures visant à améliorer l’économie permettra la création d’un plus grand nombre d’emplois. Ainsi, la plupart des politiques élaborées portent sur la croissance économique du pays. Depuis l’accession à l’indépendance en 1963, divers documents parlementaires ont été rédigés dans l’optique de la lutte contre le chômage. Ces documents ont tenté de surmonter les difficultés qui font obstacle au développement économique en recensant les mesures susceptibles de contribuer à la lutte contre le chômage.

La Stratégie de redressement économique aux fins de la création de richesse et d’emplois (2003-2007) a eu un effet positif sur l’emploi. En 2007, le Kenya a enregistré un taux de croissance de 7,1 % de son PIB. D’après l’Étude économique de 2009, en 2007, l’emploi, en dehors de l’agriculture et de l’élevage de type familial, a connu une hausse; au total, 485 500 nouveaux emplois ont été créés, soit une augmentation de 5,4 %. Mais l’année suivante, la croissance du PIB est tombée à 1,7 %. Selon les analystes, cette baisse était due à la crise postélectorale de 2008, à la crise financière mondiale et aux cours élevés du pétrole. Ainsi, en 2008, la création d’emplois a reculé de 4,9 % (476 300 emplois). Il existe une corrélation entre le taux d’emploi, les résultats économiques et le développement d’un pays. Au Kenya, la crise postélectorale a eu l’effet d’un frein sur l’activité d’importants secteurs de développement, tels que le tourisme et les transports. L’activité des hôtels, des restaurants et du système de transport a donc ralenti, entraînant une baisse des profits qui, à son tour, a induit une perte d’emplois.

Criminalité

Toutes les régions du Kenya enregistrent un taux élevé de criminalité, et en particulier les grandes villes de Nairobi, Mombasa et Kisumu. On peut attribuer la tendance à la criminalité et à l’insécurité, notamment, à la prolifération des armes légères et à petit calibre en provenance des pays en guerre voisins, à la répartition inéquitable des ressources, à la criminalité organisée, au taux de chômage élevé, à la toxicomanie et aux taux élevés d’analphabétisme et aux technologies de pointe. Toutefois, la plupart des délits les plus courants sont liés à la pauvreté (par exemple, le vagabondage, la préparation, la vente et/ou la consommation de bières locales ou la vente ambulante de marchandises dans les rues sans permis des autorités locales).

Aujourd’hui, le taux de chômage des jeunes atteint 65 %. De nombreux jeunes sont employés sans contrats en bonne et due forme dans le secteur informel, en général non réglementé, où les salaires sont bas et les heures de travail longues. Victimes de la faible croissance économique, les jeunes, bien formés ou non, se tournent de plus en plus vers la criminalité et la violence. La majorité des jeunes en milieu urbain vivent dans des bidonvilles caractérisés par le chômage des jeunes, une saleté repoussante, de mauvaises conditions de logement, l’absence de réseaux d’assainissement et une situation générale de pauvreté. Dans ces zones, les jeunes ne reçoivent pas d’éducation ou de formation adéquate et n’ont donc pas de perspectives d’emploi décent, d’où leur vulnérabilité à la criminalité, à l’abus de drogues, à l’infection au VIH/sida et à la prostitution. Ce sont les jeunes qui ont été les acteurs des violences qui se sont déclenchées au lendemain des élections présidentielles contestées de 2007.

Chacun, au Kenya, risque d’être victime de la criminalité, mais la majorité des victimes de violences sexistes sont les femmes et les enfants. C’est pourquoi le Gouvernement, en collaboration avec des partenaires de développement, a créé à l’hôpital national Kenyatta un centre de rétablissement qui assure une variété de services aux victimes de violences sexistes. Le centre offre des soins médicaux complets et un soutien psychologique aux victimes de viol et de violences sexistes et dispense notamment des soins médicaux d’urgence en cas de viol, recueille et préserve des preuves médico-légales, offre une aide juridique, sensibilise le personnel médical et le grand public aux violences sexistes et milite en faveur d’une évolution des comportements. D’autres centres de même nature devraient voir le jour dans le pays. En attendant, ce centre sensibilise le personnel médical chargé de fournir ces services au sein d’autres grands hôpitaux du pays.

Par ailleurs, un projet de loi sur les victimes de crimes et délits est en cours d’élaboration. Ce texte vise à mettre en application le paragraphe 9 de l’article 50 de la Constitution kényane de 2010, qui porte sur la protection, les droits et le bien-être des victimes. Il doit prévoir des structures, processus et règlements tendant à protéger les droits des victimes et à fournir à celles-ci un soutien psychologique.

Au moment de l’élaboration du présent document, le système de justice pénale fait l’objet d’un examen dans le cadre du Programme de réforme de la justice. La réforme de la magistrature et de l’appareil judiciaire dans son ensemble est au cœur de l’initiative. Le Programme vise le système de justice pénale dans son ensemble et soutient des mesures visant à désengorger les établissements pénitentiaires, faire appliquer les peines de travail d’intérêt général qui tendent à la réinsertion des petits délinquants, renforcer la mission du ministère public, soutenir les initiatives d’aide juridictionnelle et consolider le régime de libération conditionnelle au moyen de services de probation et de suivi.

En renforçant l’appareil judiciaire, le rétablissement de l’ordre public permettra de réduire non seulement la criminalité mais aussi la peur de la criminalité, ce qui suppose notamment de mettre davantage l’accent sur la prévention. Le programme de réforme vient aussi étayer des mesures visant à améliorer les forces de police et autres services de répression. À cet effet, les dotations en matériels doivent aller de pair avec un changement d’attitude vis-à-vis de l’ordre public, moyennant diverses initiatives de renforcement des capacités, tendant notamment à inculquer au personnel la culture du travail, à induire une évolution des comportements et à lancer des opérations de surveillance policières de proximité. L’un des objectifs fixés dans ce secteur consiste à mettre en œuvre une stratégie nationale de prévention de la criminalité.

Bien qu’en chiffres absolus, la criminalité ait baissé en 2009-2010, l’indice de criminalité pour 2010 est élevé car il évolue parallèlement à la population et que celle-ci a augmenté pendant la période considérée.

N o

Crimes et délits

2009

2010

Différence

É volution en pourcentage

1

Homicide

1 864

1 800

-64

-4

2

Atteinte à la moralité

3 496

3 972

476

12

3

Délits contre les personnes

1 767

1 609

-158

-10

4

Vol qualifié

2 462

2 305

-157

-7

5

Vol avec effraction

5 933

5 270

-663

-13

6

Vol de bétail

2 414

1 844

-570

-3

7

Vol

10 115

9 876

-239

-2

8

Vol commis par un employé de maison

2 292

2 121

-171

-8

9

Vol de véhicules, autres vols

1 236

1 124

-112

-10

10

Délit lié aux drogues dangereuses

4 633

4 290

-343

-8

11

Infraction au Code de la route

2 865

2 633

-232

-9

12

Déprédations

51

92

41

45

13

Infraction économique

1 904

2 169

265

12

14

Corruption

149

56

-93

-166

15

Délit commis sur les touristes

3

2

-2

-200

16

Délit commis sur la police

50

30

-20

-67

17

Autre délit relevant du Code pénal

4 145

4 059

-86

-2

18

Total

61 120

578 227

-64

-4

Source : Rapport de la police kényane sur la criminalité nationale, 2010.

B.Structure constitutionnelle, politique et juridique du Kenya

Le Kenya a obtenu l’indépendance en 1963 et est une démocratie constitutionnelle multipartite électorale depuis 1991. En 2002, l’Union nationale africaine du Kenya (KANU) a perdu les élections générales pour la première fois depuis l’indépendance, face à un groupement de 14 partis politiques, la Coalition nationale Arc-en-ciel (NARC). La domination d’un parti unique depuis l’indépendance avait sérieusement compromis la jouissance et l’exercice des droits de l’homme dans le pays.

Lois applicables

La Constitution de 2010

La Constitution kényane, adoptée en 2010, dispose que la Constitution est la loi suprême du pays. Sa validité et sa légalité ne peuvent être contestées par aucun tribunal ou autre organe de l’État. Toute loi, y compris toute règle de droit coutumier, incompatible avec la Constitution, est, dans la mesure de son incompatibilité, considérée comme nulle et tout acte ou omission contraires à la Constitution sont également nuls.

Les règles générales du droit international et tout traité ou toute convention ratifiés par le Kenya font partie intégrante du droit kényan.

L’article 3 de la loi relative à l’administration de la justice (chap. 8 du Recueil des lois du Kenya) énumère les sources premières du droit kényan, à savoir:

La Constitution;

Les lois du Parlement, qui incluent les règlements d’application, les lois spécifiques du Parlement du Royaume-Uni, qui figurent dans l’annexe de la loi relative à l’administration de la justice;

La loi relative au transfert de propriété de 1882 (Inde), qui est le droit procédural applicable lorsque la loi relative à l’enregistrement des titres, la loi relative aux titres fonciers et la loi relative aux terres du domaine public sont appliquées;

Les lois d’application générale en vigueur en Angleterre le 12 août 1897, applicables au Kenya dans la forme qu’elles avaient à la date d’acceptation;

Les règles de la common law et de l’equity, applicables aux habitants du Kenya dans la mesure où les circonstances du pays le permettent;

Le droit coutumier africain, applicable uniquement en matière civile lorsque au moins une des parties concernées est visée par ses dispositions ou en relève et pour autant que celles-ci ne soient pas contraires à la justice et à la morale ou incompatibles avec d’autres dispositions; et

La loi islamique, appliquée par les tribunaux islamiques (cad i s) dans les affaires où toutes les parties sont de confession musulmane et qui portent sur des questions de droit musulman relatives à l’état civil, au mariage, au divorce et à la succession.

L’État

Le présent rapport présente l’État tel qu’il est décrit dans la Constitution de 2010. Le pouvoir de l’État est le partage entre le pouvoir législatif, le pouvoir exécutif et le pouvoir judiciaire.

Composition du Parlement

Le chapitre 8 de la Constitution institue le Parlement, qui comprend l’Assemblée nationale et le Sénat. L’article 94 dispose que le pouvoir législatif de la République, qui émane du peuple kényan, est conféré au Parlement.

L’Assemblée nationale est composée de 290 membres élus qui représentent chacun une circonscription; de 47 femmes élues qui représentent chacune un comté; de 12 membres nommés par les partis politiques représentés au Parlement, en fonction du nombre de sièges obtenus à l’Assemblée nationale, en vue de représenter des intérêts particuliers, notamment ceux des jeunes, des personnes handicapées et des travailleurs; et du Président de l’Assemblée, qui en est membre de droit.

Le Sénat est composé de 47 membres élus et représentant chacun un comté; de 16 femmes nommées par les partis politiques en fonction du nombre de sièges obtenus au Sénat; de 2 membres, un homme et une femme, qui représentent les jeunes; de 2 membres, un homme et une femme, qui représentent les personnes handicapées; et du Président du Sénat, qui en est membre de droit. Selon la Constitution, les élections législatives ont lieu tous les cinq ans.

Le pouvoir exécutif national

Le pouvoir exécutif national de la République est formé du Président, du Vice‑Président et des autres membres du Conseil des ministres. Le Président est le chef de l’État et du Gouvernement et exerce le pouvoir exécutif assisté par le Vice-Président et par les ministres. Le Conseil des ministres se compose du Président, du Vice-Président, du Procureur général et de 14 ministres au minimum et 22 au maximum. Le Président propose et, avec l’accord de l’Assemblée nationale, nomme les ministres. Un ministre ne peut siéger au Parlement. La composition du pouvoir exécutif national doit refléter la diversité régionale et ethnique du peuple kényan.

L’appareil judiciaire

Le chapitre 10 de la Constitution établit un appareil judiciaire indépendant. L’appareil judiciaire se compose de juges des juridictions supérieures, de magistrats et d’autres agents et fonctionnaires. La Constitution prévoit que, dans l’exercice du pouvoir judiciaire, les membres de l’appareil judiciaire n’obéissent qu’à la Constitution et à la loi et ne sont soumis au contrôle ou à la direction d’aucune personne ni d’aucune autorité. De plus, un poste de juge d’une juridiction supérieure ne peut être supprimé tant que le poste est pourvu. La rémunération des juges et les prestations dont ils bénéficient sont financées par le Fonds consolidé de l’État. La rémunération d’un juge et les prestations dont il bénéficie de même que sa pension de retraite ne peuvent être revues à la baisse du vivant du magistrat. Aucun magistrat ne peut être poursuivi au pénal ni au civil pour une action ou une omission commise de bonne foi dans l’exercice légal de ses fonctions.

Les juridictions supérieures sont la Cour suprême, la Cour d’appel, la Haute Cour et les tribunaux ayant les compétences de la Haute Cour pour ce qui est de connaître des litiges concernant l’emploi et les relations de travail, l’environnement, l’utilisation et l’occupation des terres et les droits fonciers.

Les juridictions inférieures comprennent les tribunaux d’instance (Magistrates courts); les cadis; les tribunaux militaires et toute autre juridiction ou tribunal local créés en vertu d’une loi du Parlement.

Le régime électoral

La Constitution dispose que tout citoyen est libre de faire des choix politiques, ce qui inclut le droit de fonder un parti politique ou de participer à sa fondation; le droit de participer aux activités d’un parti politique ou de recruter des membres pour ce parti; ou le droit de faire campagne pour un parti politique ou pour une cause politique. De plus, tout citoyen a le droit à ce que des élections libres et justes, au suffrage universel, fondées sur la libre expression de la volonté des électeurs soient organisées régulièrement en vue de pourvoir un siège ou une charge publique dans un organe électif créé en vertu de la Constitution; ou tout poste au sein d’un parti politique dont ce citoyen est membre. Par conséquent, tout citoyen adulte a le droit, sans restriction déraisonnable, d’être inscrit sur une liste électorale, de voter au scrutin secret dans toute élection ou tout référendum; et d’être candidat à une charge publique ou à un poste dans un parti politique dont il est membre et, s’il est élu, d’exercer son mandat.

Afin de donner effet à ces droits, la Constitution dispose que le régime électoral kényan obéit aux principes suivants: liberté pour les citoyens d’exercer leurs droits politiques; pas plus des deux tiers des membres d’organes publics dont les postes sont pourvus par élections ne sont du même sexe; représentation équitable des personnes handicapées; suffrage universel fondé sur le souci d’une représentation équitable et de l’égalité en matière de vote; et élections libres et justes, au scrutin secret, exemptes de violence, d’intimidation, sans influence indue ni corruption, organisées par un organe indépendant (la Commission indépendante chargée des élections et de la délimitation des circonscriptions électorales), transparent et administré d’une manière impartiale, neutre, efficace, juste et responsable.

II.Cadre général de la protection et de la promotion des droits de l’homme

A.Acceptation des normes internationales relatives aux droits de l’homme

a)Ratification des principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme

Le Kenya est partie aux principaux instruments relatifs aux droits de l’homme ci‑après:

Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques;

Le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels;

La Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale;

La Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes;

La Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants;

La Convention relative aux droits de l’enfant;

La Convention relative aux droits des personnes handicapées.

Les instruments internationaux relatifs au droit international humanitaire auxquels le Kenya est partie sont les suivants:

La Convention de Genève (I) pour l’amélioration du sort des blessés et des malades dans les forces armées en campagne, 1949;

La Convention de Genève (II) pour l’amélioration du sort des blessés, des malades et des naufragés des forces armées sur mer, 1949;

La Convention de Genève (III) relative au traitement des prisonniers de guerre, 1949;

La Convention de Genève (IV) relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre, 1949;

Le Protocole additionnel aux Conventions de Genève du 12 août 1949 relatif à la protection des victimes des conflits armés internationaux (Protocole I), 1977;

Le Protocole additionnel aux Conventions de Genève du 12 août 1949 relatif à la protection des victimes des conflits armés non internationaux (Protocole II), 1977.

Le Kenya est également partie à d’autres instruments internationaux qui touchent aux droits de l’homme, notamment:

La Convention des Nations Unies contre la corruption;

La Convention relative au statut des réfugiés, 1951;

Le Protocole relatif au statut des réfugiés, 1967;

Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants;

Le Statut de Rome de la Cour pénale internationale;

La Convention sur l’imprescriptibilité des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité, 1968;

Le Traité sur l’interdiction complète des essais nucléaires;

La Convention sur l’interdiction de la mise au point, de la fabrication, du stockage et de l’emploi des armes chimiques et sur leur destruction, 1993;

La Convention sur l’interdiction de l’emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction (Traité d’Ottawa), 1997;

La Convention internationale contre la prise d’otages, 1979;

La Convention internationale pour la répression du financement du terrorisme, 1999;

La Convention internationale pour la répression des attentats terroristes à l’explosif, 1997.

Le tableau ci-après énumère les Conventions de l’Organisation internationale du Travail (OIT) que le Kenya a ratifiées, en précisant leur statut.

Convention

Date de la ratification

Statut

C2 Convention (no 2) sur le chômage, 1919

13 janvier 1964

Ratifiée

C5 Convention (no 5) sur l’âge minimum (industrie), 1919

13 janvier 1964

Dénoncée le 9 avril 1979

C11 Convention (no 11) sur le droit d’association (agriculture), 1921

13 janvier 1964

Ratifiée

C12 Convention (no 12) sur la réparation des accidents du travail (agriculture), 1921

13 janvier 1964

Ratifiée

C14 Convention (no 14) sur le repos hebdomadaire (industrie), 1921

13 janvier 1964

Ratifiée

C15 Convention (no 15) sur l’âge minimum (soutiers et chauffeurs), 1921

13 janvier 1964

Dénoncée le 9 avril 1979

C16 Convention (no 16) sur l’examen médical des jeunes gens (travail maritime), 1921

9 février 1971

Ratifiée

C17 Convention (no 17) sur la réparation des accidents du travail, 1925

13 janvier 1964

Ratifiée

C19 Convention (no 19) sur l’égalité de traitement (accident du travail), 1925

13 janvier 1964

Ratifiée

C26 Convention (no 26) sur les méthodes de fixation des salaires minima, 1928

13 janvier 1964

Ratifiée

C27 Convention (no 27) sur l’indication du poids sur les colis transportés par bateau, 1929

9 février 1971

Ratifiée

C29 Convention (no 29) sur le travail forcé, 1930

13 janvier 1964

Ratifiée

C32 Convention (no 32) sur la protection des dockers contre les accidents (révisée), 1932

13 janvier 1964

Ratifiée

C45 Convention (no 45) des travaux souterrains (femmes), 1935

13 janvier 1964

Ratifiée

C50 Convention (no 50) sur le recrutement des travailleurs indigènes, 1936

13 janvier 1964

Ratifiée

C58 Convention (no 58) (révisée) sur l’âge minimum (travail maritime), 1936

13 janvier 1964

Dénoncée le 9 avril 1979

C59 Convention (no 59) (révisée) de l’âge minimum (industrie), 1937

13 janvier 1964

Dénoncée le 9 avril 1979

C63 Convention (no 63) concernant les statistiques des salaires et des heures de travail, 1938

13 janvier 1964

Ratifiée

C64 Convention (no 64) sur les contrats de travail (travailleurs indigènes), 1939

13 janvier 1964

Ratifiée

C65 Convention (no 65) sur les sanctions pénales (travailleurs indigènes), 1939

13 janvier 1964

Ratifiée

C81 Convention (no 81) sur l’inspection du travail, 1947

13 janvier 1964

Ratifiée

C86 Convention (no 86) sur les contrats de travail (travailleurs indigènes), 1947

13 janvier 1964

Ratifiée

C88 Convention (no 88) sur le service de l’emploi, 1948

13 janvier 1964

Ratifiée

C89 Convention (no 89) sur le travail de nuit (femmes) (révisée), 1948

30 novembre 1965

Ratifiée

C94 Convention (no 94) sur les clauses de travail (contrats publics), 1949

13 janvier 1964

Ratifiée

C97 Convention (no 97) sur les travailleurs migrants (révisée), 1949

30 novembre 1965

Ratifiée

C98 Convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949

13 janvier 1964

Ratifiée

C99 Convention (no 99) sur les méthodes de fixation des salaires minima (agriculture), 1951

9 février 1971

Ratifiée

C100 Convention (no 100) sur l’égalité de rémunération, 1951

7 mai 2001

Ratifiée

C105 Convention (no 105) sur l’abolition du travail forcé, 1957

13 janvier 1964

Ratifiée

C111 Convention (no 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958

7 mai 2001

Ratifiée

C112 Convention (no 112) sur l’âge minimum (pêcheurs), 1959

9 février 1971

Dénoncée le 9 avril 1979

C118 Convention (no 118) sur l’égalité de traitement (sécurité sociale), 1962

9 février 1971

Ratifiée

C123 Convention (no 123) sur l’âge minimum (travaux souterrains), 1965

20 juin 1968

Dénoncée le 9 avril 1979

C129 Convention (no 129) sur l’inspection du travail (agriculture), 1969

9 avril 1979

Ratifiée

C131 Convention (no 131) sur la fixation des salaires minima, 1970

9 avril 1979

Ratifiée

C132 Convention (no 132) sur les congés payés (révisée), 1970

9 avril 1979

Ratifiée

C134 Convention (no 134) sur la prévention des accidents (gens de mer), 1970

6 juin 1990

Ratifiée

C135 Convention (no 135) concernant les représentants des travailleurs, 1971

9 avril 1979

Ratifiée

C137 Convention (no 137) sur le travail dans les ports, 1973

9 avril 1979

Ratifiée

C138 Convention (no 138) sur l’âge minimum, 1973

9 avril 1979

Ratifiée

C140 Convention (no 140) sur le congé-éducation payé, 1974

9 avril 1979

Ratifiée

C141 Convention (no 141) sur les organisations de travailleurs ruraux, 1975

9 avril 1979

Ratifiée

C142 Convention (no 142) sur la mise en valeur des ressources humaines, 1975

9 avril 1979

Ratifiée

C143 Convention (no 143) sur les travailleurs migrants (dispositions complémentaires), 1975

9 avril 1979

Ratifiée

C144 Convention (no 144) sur les consultations tripartites relatives aux normes internationales du travail, 1976

6 juin 1990

Ratifiée

C146 Convention (no 146) sur les congés payés annuels (gens de mer), 1976

14 septembre 1990

Ratifiée

C149 Convention (no 149) sur le personnel infirmier, 1977

6 juin 1990

Ratifiée

C182 Convention (no 182) sur les pires formes de travail des enfants, 1999

7 mai 2001

Ratifiée

Source : ILOLEX 2011.

Au niveau régional, le Kenya a ratifié les instruments suivants:

La Charte africaine des droits de l’homme et des peuples;

La Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant;

La Convention de l’Organisation de l’unité africaine régissant les aspects propres aux problèmes des réfugiés en Afrique;

La Convention de l’Union africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption;

Le Protocole relatif à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples portant création d’une Cour africaine des droits de l’homme et des peuples;

Le Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, relatif aux droits de la femme en Afrique (Protocole de Maputo);

Le Traité sur la zone exempte d’armes nucléaires en Afrique (Traité de Pelindaba);

La Convention de l’Organisation de l’unité africaine sur la prévention et la lutte contre le terrorisme.

b)Réserves et déclarations

Sur l’ensemble des instruments des Nations Unies relatifs aux droits de l’homme auxquels il est partie, le Kenya a formulé une seule réserve, concernant le paragraphe 2 de l’article 10 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Il a estimé que la question de savoir, en particulier, ce qu’impliquerait une protection spéciale, dans différentes circonstances et celle de savoir ce qu’impliquerait une période de temps raisonnable avant et après la naissance des enfants relevaient d’une négociation entre employeurs et employés et dépendaient des conditions prévues dans chaque contrat de travail et de la branche professionnelle considérée. Cette prise de position va dans le sens du principe de la liberté d’association et de celui de la non-ingérence du Gouvernement dans les différentes branches du secteur privé, de même que dans le sens de la Constitution et du droit du travail kényan.

B.Cadre de la promotion des droits de l’hommeau niveau national

a)Protection constitutionnelle et incorporation de la Charte des droits

L’article 19 de la Constitution de 2010 dispose que la Charte des droits fait partie intégrante de l’État démocratique kényan et qu’elle est le cadre dans lequel s’inscrivent les politiques sociales, économiques et culturelles du pays. Il dispose également que l’objectif de la reconnaissance et de la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales est de préserver la dignité des personnes et des collectivités et de promouvoir la justice sociale et la réalisation du potentiel de tous les êtres humains.

Application de la Charte des droits

La Constitution prévoit que la Charte des droits s’applique à tous et qu’elle s’impose à l’ensemble des organes publics et à tous les individus. Chacun jouit des libertés et des droits fondamentaux consacrés par la Charte des droits dans une mesure compatible avec la nature du droit ou de la liberté fondamentale en question. En conséquence, il incombe à l’État et à tout organe public d’observer, de respecter, de protéger, de promouvoir et de réaliser les droits et les libertés fondamentales garantis par la Charte des droits. L’État est tenu de prendre des mesures législatives, stratégiques et autres, notamment d’établir des normes, afin de faire progressivement appliquer les droits sociaux et économiques garantis par l’article 43 de la Constitution.

Tous les organes publics et les fonctionnaires ont l’obligation de répondre aux besoins des groupes vulnérables de la société, dont les femmes, les personnes âgées, les personnes handicapées, les enfants, les jeunes, les personnes appartenant à une minorité ou un groupe marginalisé et celles appartenant à une minorité ethnique, religieuse ou culturelle. À cet effet, l’État est tenu d’adopter et d’appliquer des lois afin de remplir les obligations internationales qui lui incombent dans le domaine des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

b)Compétence des tribunaux pour défendre et appliquer la Charte des droits

L’article 23 de la Constitution dispose que la Haute Cour a compétence pour statuer sur des demandes de réparation d’un préjudice résultant du déni, de la violation, du non‑respect ou de menaces de violation d’un droit ou d’une liberté fondamentale consacrés dans la Charte des droits. La Constitution habilite aussi le Parlement à adopter des lois accordant compétence en première instance, dans les cas appropriés, aux juridictions inférieures pour statuer sur des demandes de réparation d’un préjudice découlant du déni, de la violation, du non‑respect ou de menaces de violation d’un droit ou d’une liberté fondamentale consacrés dans la Charte des droits.

c)Recours ouverts en cas de violation des droits de l’homme

Tout individu qui se dit victime d’une violation de ses droits peut se voir accorder réparation par un tribunal, lequel peut adopter l’une des mesures ci-après: une déclaration des droits; une injonction; une mesure conservatoire; une déclaration de nullité frappant toute loi qui nie, viole, ne respecte pas ou menace un droit ou une liberté fondamentale consacrés dans la Charte des droits, et dont la teneur ne peut être justifiée par les restrictions prévues par la Constitution; une décision d’indemnisation; ou une décision de réexamen. Il existe un mécanisme d’indemnisation qui intervient dans les cas où l’État est reconnu responsable de violations des droits de l’homme.

En outre, les organes judiciaires ont publié un document d’information destiné aux personnes qui souhaitent porter plainte, la Charte des plaignants, qui contient des renseignements sur le fonctionnement des tribunaux ainsi que sur les droits et obligations des plaignants dans le cadre d’une procédure. On y trouve également des renseignements sur les tribunaux, les procédures judiciaires et la façon dont les particuliers peuvent saisir les juridictions, le tout formulé dans un langage simple. En outre, il est prévu d’informatiser les procédures afin que des versions électroniques de la jurisprudence et des lois puissent être mises à la disposition des avocats, du personnel de l’appareil judiciaire et du public; ce projet en est à un stade avancé.

d)Application de la Charte des droits

La Constitution reconnaît toutes les générations de droits de l’homme, dont les droits économiques, sociaux et culturels. Elle dispose en outre que les traités et les conventions ratifiés par le Kenya ainsi que les normes générales du droit international font partie de l’ordre juridique interne. En conséquence, les dispositions des divers instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme auxquels le Kenya est partie peuvent être invoquées − et elles l’ont déjà été − devant les tribunaux ou d’autres juridictions ou devant des organes administratifs, ou être directement appliquées, et elles n’ont pas besoin d’être incorporées dans la législation ou la réglementation administrative interne pour pouvoir être mises en œuvre.

Toute personne a le droit d’intenter une action en justice si elle estime que ses droits ou ses libertés fondamentales garantis par la Charte des droits ont été déniés, violés ou non respectés ou qu’ils sont menacés. Outre les personnes agissant dans leur propre intérêt, l’action peut être mise en mouvement par les acteurs suivants: une personne représentant une autre personne qui n’a pas la possibilité d’agir à titre personnel; une personne agissant en tant que membre d’un groupe ou d’une catégorie de personnes ou dans l’intérêt de ces dernières; une personne agissant au nom de l’intérêt public; ou une association agissant dans l’intérêt de l’un ou plusieurs de ses membres.

Afin de faciliter l’engagement de ces procédures, le Président de la Haute Cour est chargé d’établir des règles applicables aux procédures judiciaires afin que le droit d’agir en justice puisse s’exercer autrement qu’à titre personnel; que les formalités relatives à la procédure, y compris son ouverture, soient réduites au minimum et, en particulier, que le tribunal puisse entamer une procédure sur la base de documents officieux, le cas échéant; que l’ouverture d’une procédure n’entraîne aucun frais; que le tribunal, tout en respectant les règles de la justice naturelle, ne soit pas indûment entravé dans son action par des points de procédure; et que toute organisation ou personne possédant des compétences particulières puisse, avec l’autorisation du tribunal, comparaître en qualité d’amicus curiae (ami du tribunal) . L’absence de règles ne limite pas le droit reconnu à toute personne d’engager une procédure et de voir sa cause entendue et jugée par un tribunal.

Restrictions

Au Kenya, les droits et libertés fondamentales inscrits dans la Charte des droits sont garantis à toute personne et ne sont pas accordés par l’État; ils n’excluent pas les autres droits et libertés fondamentales qui ne figurent pas dans la Charte des droits mais qui sont reconnus ou consacrés par la loi, sauf s’ils sont incompatibles avec les dispositions de la Constitution; ils ne sont soumis qu’aux restrictions prévues dans la Constitution. À cet égard, la Constitution stipule que les droits et libertés fondamentales énoncés dans la Charte des droits ne peuvent être limités qu’en vertu des dispositions de la loi et uniquement dans la mesure où la restriction est raisonnable et se justifie dans une société ouverte et démocratique fondée sur la dignité humaine, l’égalité et la liberté, compte tenu de tous les éléments pertinents, dont:

La nature du droit ou de la liberté fondamentale en question;

L’importance de l’objectif de la restriction;

La nature et la portée de la restriction;

La nécessité de garantir que l’exercice par une personne de ses droits et libertés fondamentales n’empiète pas sur les droits et les libertés fondamentales d’autrui;

La relation entre la restriction et son objectif; et

La question de savoir s’il existe des moyens moins restrictifs d’atteindre l’objectif poursuivi.

Plus précisément, s’agissant des personnels des Forces de défense kényanes ou de la Police nationale, la Constitution prévoit la possibilité de limiter l’exercice des droits et libertés fondamentales ci-après:

Droit au respect de la vie privée;

Liberté d’association;

Liberté de réunion et droit de participer à des manifestations, à des piquets de grève et de soumettre des requêtes;

Droits se rapportant aux relations professionnelles;

Droits économiques et sociaux; et

Droits des personnes arrêtées.

Aide juridictionnelle

Le système juridique kényan pose aux usagers plusieurs problèmes très divers: certains sont liés à la nature du système en tant que tel et à son contexte tandis que d’autres ont trait aux caractéristiques et au statut des personnes pour lesquelles il a été conçu. À titre d’exemple, on peut citer les deux groupes de facteurs ci-après:

Les textes de loi rédigés dans un langage perçu comme étranger, difficile et technique, l’inaccessibilité des recueils de lois et l’existence d’organes judiciaires physiquement éloignés de la majorité des citoyens et onéreux, inefficaces et corrompus;

L’analphabétisme et la méconnaissance du droit au sein de la population, l’absence ou la pénurie de ressources, l’hostilité de la population à l’égard des institutions et la marginalisation de certains groupes de population, en particulier les femmes, les enfants et les personnes handicapées, qui découlent du fait que les lois, les procédures judiciaires et les pratiques au sein des institutions et de la société en général ne tiennent pas compte des besoins des individus. En outre, les avocats susceptibles d’aider les citoyens à recourir utilement aux institutions vivent généralement dans les grandes zones urbaines et leurs honoraires sont élevés.

Dans le passé, les problèmes liés au système judiciaire étaient réglés par des mécanismes philanthropiques, dont le système de représentation des personnes démunies et des services bénévoles limités, offerts par des membres du barreau soucieux de l’intérêt général. On peut toutefois constater que, de plus en plus souvent, ces problèmes sont abordés sous un autre angle. Cette nouvelle approche est fondée sur la notion d’accès à la justice, qui est inscrite dans la Constitution de 2010. Cette dernière prévoit en effet que l’État veille à ce que toutes les personnes aient accès à la justice et que, si des honoraires sont facturés, leur montant doit être raisonnable et ne pas entraver l’accès à la justice.

On entend par «accès à la justice» les possibilités qu’ont les citoyens ordinaires de faire usage des lois, des procédures et des organes judiciaires pour régler leurs problèmes en général et être rétablis dans leurs droits en particulier. Les composantes essentielles de la notion d’accès à la justice sont notamment: l’existence de lois équitables et accessibles aux citoyens par leur forme et leur style; la disponibilité d’un large éventail de mécanismes de règlement des litiges facilement accessibles; l’existence de procédures simples et peu onéreuses permettant d’obtenir justice et d’aboutir à un règlement équitable des litiges; et, surtout, la connaissance par les citoyens de la loi, des organes judiciaires et des procédures et leur capacité à en faire usage sans difficulté.

C’est sur cet arrière-fond que le Gouvernement a mis au point le programme national d’aide juridictionnelle et de sensibilisation, qui a été lancé en tant que projet pilote coordonné sous la direction du Gouvernement et qui devait servir de base à l’élaboration d’un plan national de sensibilisation au droit et d’aide juridictionnelle, et d’un cadre législatif adéquat. Cette initiative a été lancée alors que le secteur de la justice faisait l’objet de réformes. D’autres programmes de réforme plus ambitieux, tendant notamment à réduire la pauvreté, définissent le contexte dans lequel les réformes législatives sont menées. Le programme de sensibilisation au droit et d’aide juridictionnelle ne peut pas être exécuté indépendamment des autres projets de réforme. La création de chambres spécialisées relevant de la Haute Cour et de tribunaux chargés des litiges de gravité mineure, l’introduction de nouvelles procédures au sein des tribunaux pour mineurs ainsi que la réorganisation des greffes sont des occasions de régler la question de l’accès à la justice de manière intégrée.

Les projets pilotes prévus sont les suivants:

Le projet pilote relatif à la chambre des affaires familiales de la Haute Cour de Nairobi. Ce projet est exécuté avec le soutien de la Law society of Kenya (LSK) et la Fédération kényane des femmes juristes. Il a pour objet les affaires portant sur le droit de la famille, les affaires de divorce, les litiges relatifs aux biens matrimoniaux, l’administration des successions et les ordonnances d’éloignement tendant à faire cesser ou à prévenir les violences dans la famille. Les services offerts consistent notamment en aide juridictionnelle (conseil et représentation), médiation familiale et sensibilisation au droit;

Le projet pilote relatif au tribunal pour mineurs de Nairobi. Ce projet est exécuté avec le soutien de la LSK et du Children’s Legal Action Network (CLAN). Il porte sur les enfants en conflit avec la loi et les enfants en contact avec la justice en tant que victimes ou témoins. Les services offerts consistent notamment en sensibilisation au droit, aide juridictionnelle et en services de conseil juridique et en représentation dans le cadre d’un procès;

Le projet pilote de Mombasa concernant les infractions passibles de la peine capitale. Ce projet est exécuté avec le soutien de Christian Legal Education Awareness and Research (CLEAR), le bureau de la LSK de la région côtière et la Haute Cour. Il porte sur les infractions passibles de la peine capitale, en particulier les affaires de vol avec violence portées devant les tribunaux de la région de la côte. Parmi les services offerts, on peut notamment citer les services d’orientation et de conseil juridique, l’assistance et la représentation devant les tribunaux;

Le projet pilote relatif au bureau de conseil des auxiliaires juridiques de Kisumu. Ce projet est exécuté avec le soutien de l’association kényane des auxiliaires juridiques et du bureau de la LSK situé dans la région occidentale du Kenya et a pour objet les affaires dans lesquelles les intérêts des pauvres sont lésés. Il prévoit notamment des services de sensibilisation au droit, d’aide juridictionnelle (conseil et représentation) et de médiation;

Le projet pilote de Nakuru sur la justice pour mineurs. Le projet pilote sur la justice pour mineurs est exécuté avec le soutien du bureau de la LSK mis en place dans la vallée du Rift et porte sur les mineurs en conflit avec la loi et les mineurs en contact avec la justice. Les services prévus consistent notamment en sensibilisation au droit, aide juridictionnelle (conseil et représentation), médiation, recherche des familles et conseil;

Le projet pilote du centre de consultation juridique de l’Université Moi (Eldoret). Ce projet est exécuté avec le soutien du bureau de la LSK mis en place dans le nord de la vallée du Rift et du centre de consultation juridique de l’Université Moi, à Eldoret. Il n’est pas consacré à un domaine en particulier mais vise à offrir un large éventail de services tout en s’attachant à aider les clients pauvres, vulnérables et marginalisés. Les services offerts consistent notamment en aide juridictionnelle, sensibilisation au droit, transfert de dossiers en vue d’un procès et médiation.

C.Institutions chargées de veiller au respect des droits de l’homme

L ’ Institution nationale des droits de l ’ homme. Le Parlement a créé des institutions chargées de surveiller le respect, l’application, la promotion et la protection des droits de l’homme. La Commission nationale des droits de l’homme du Kenya est un organe créé en application d’une loi parlementaire, la loi portant création de la Commission nationale des droits de l’homme de 2002, et conformément aux Principes de Paris. Du point de vue géographique, sa compétence couvre l’ensemble du territoire kényan. En outre, elle est habilitée à s’occuper aussi bien de la promotion que de la protection des droits de l’homme. Elle est dotée d’un vaste mandat et la loi en application de laquelle elle a été créée prévoit que l’expression «droits de l’homme» doit s’entendre des libertés et des droits fondamentaux garantis à tout individu en vertu de la Constitution et de l’ensemble des droits de l’homme protégés par les instruments internationaux auxquels le Kenya est partie.

Promotion de l’égalité des sexes. La Commission nationale sur l’égalité des sexes et le développement, qui a été créée en application de la loi nationale relative à l’égalité et au développement, est chargée de coordonner, d’appliquer et de promouvoir la prise en considération de l’égalité des sexes dans les politiques nationales de développement. La Commission joue un rôle stratégique en élaborant des projets de loi, des mesures et des politiques propres à éliminer la discrimination à l’égard des femmes et en mettant sur pied des mécanismes de promotion d’un traitement équitable et de l’égalité des sexes, en particulier en ce qui concerne l’accès à l’éducation et aux allocations d’études, la santé, l’alimentation, le logement, l’emploi et la maîtrise des ressources économiques et nationales. Bien que la Commission soit habilitée à mener des enquêtes sur l’application des dispositions garantissant l’égalité des sexes et les allégations de violation de ces dispositions ainsi qu’à adresser des recommandations aux autorités concernées, elle n’a pas compétence pour faire appliquer les lois ni pour examiner des plaintes.

Protection des droits de l’enfant. Le Conseil national des services à l’enfance est un organisme public semi-autonome créé en application de la loi relative à l’enfance de 2001. Il a pour mandat de planifier, de réglementer et de coordonner les activités tendant à garantir les droits et le bien-être de l’enfant au Kenya.

Protection des droits des personnes handicapées. Le Conseil national chargé des personnes handicapées a pour mission de veiller à ce que, dans le secteur public et le secteur privé, 5 % de l’ensemble des postes, qu’ils soient temporaires, créés en urgence ou fixes, soient réservés à des personnes handicapées. Le Conseil a également pour mission de s’assurer que, en matière d’éducation, les établissements d’enseignement respectent l’obligation qui leur incombe de tenir compte des besoins spécifiques des personnes handicapées dans plusieurs domaines, notamment en ce qui concerne les critères d’admission et le programme d’études. Pour ce qui est du sport et des loisirs, toutes les personnes handicapées ont le droit d’utiliser gratuitement les équipements récréatifs et les installations sportives qui appartiennent à l’État ou qui sont gérés par les pouvoirs publics lorsque des activités sociales, sportives ou récréatives y sont organisées.

Le Conseil est en outre chargé de veiller au respect de l’obligation de procéder à des aménagements raisonnables afin de faciliter l’accès des personnes handicapées aux bâtiments publics et aux véhicules de transport en commun. Parallèlement à ces activités, le Conseil assume des tâches dans le domaine de la promotion, de la sensibilisation et des politiques et il a pour mandat d’élaborer et de promouvoir des mesures et des politiques conçues pour faire bénéficier les personnes handicapées de l’égalité des chances.

Protection contre les dysfonctionnements administratifs. Le Comité permanent des plaintes, organe créé en juin 2007, est chargé de recevoir, d’enregistrer, de trier, de classer, et d’en établir de bien-fondé, toutes les plaintes déposées contre le personnel des ministères, des entreprises publiques ou semi-publiques, des organismes publics et des institutions publiques. Il est également chargé d’enquêter sur les allégations d’abus d’autorité, de corruption, de comportement contraire à la déontologie, de malhonnêteté, de dysfonctionnement administratif, de retard injustifié, d’injustice, d’impolitesse, de négligence, d’incompétence, de faute, d’inefficacité ou d’incurie dans le service public.

La Commission pour la cohésion nationale et l’intégration, qui a été créée en application d’une loi parlementaire, est chargée d’encourager et de promouvoir l’égalité des chances, les bonnes relations, l’harmonie et la coexistence pacifique entre les différents groupes ethniques et raciaux vivant au Kenya. Toute personne s’estimant lésée dans ses droits tels qu’ils sont garantis par cette loi peut saisir la Commission d’une plainte. Celle-ci peut enquêter sur les plaintes pour discrimination fondée sur l’origine ethnique ou raciale et soumettre au Procureur général, à la Commission des droits de l’homme du Kenya ou à toute autre autorité compétente des recommandations sur les mesures de réparation à adopter lorsque ces plaintes s’avèrent fondées. De plus, elle est chargée de promouvoir et de surveiller la sensibilisation du public à la question de l’harmonie interethnique et interraciale et de faire régulièrement rapport à l’Assemblée nationale.

La Commission kény an e des droits de l’homme et de l’égalité. La Constitution de 2010 prévoit de confier les attributions de la Commission nationale des droits de l’homme, de la Commission nationale sur l’égalité des sexes et le développement et du Comité permanent des plaintes à la Commission nationale des droits de l’homme et de l’égalité, dont le mandat, tel qu’il est défini par la Constitution, consiste dans les tâches suivantes: promouvoir le respect des droits de l’homme et développer une culture des droits de l’homme dans la République; promouvoir le traitement équitable et l’égalité des sexes et coordonner et encourager l’incorporation des questions d’égalité dans les programmes de développement national; promouvoir la protection et le respect des droits de l’homme dans les organes publics et les institutions privées; surveiller le respect des droits de l’homme dans tous les domaines de la vie quotidienne au Kenya, notamment le comportement des organes chargés de la sécurité nationale, et mener des enquêtes et établir des rapports sur cette question; recevoir des plaintes et ouvrir des enquêtes sur les allégations de violation des droits de l’homme et prendre des mesures pour garantir le droit à réparation des victimes de violations des droits de l’homme.

La Commission est aussi habilitée à: enquêter ou mener des investigations, d’office ou sur la base d’une plainte, sur des questions liées aux droits de l’homme et formuler des recommandations afin que des améliorations soient apportées au fonctionnement des organes publics; assumer le rôle de principal organe public chargé de veiller au respect des obligations découlant des traités et des conventions relatives aux droits de l’homme auxquels le Kenya est partie; mener des enquêtes sur les mesures prises dans le cadre de la conduite des affaires publiques ou les actes ou omissions dans les activités de l’administration publique, tous domaines confondus, dont on présume ou soupçonne qu’ils sont préjudiciables ou abusifs ou susceptibles de provoquer un préjudice ou un abus; enquêter sur les plaintes pour abus de pouvoir, inégalité de traitement, injustice manifeste ou comportement illégal, abusif, injuste ou passif dont la responsabilité est imputée à un fonctionnaire; et établir un rapport sur toutes les plaintes ayant fait l’objet d’une enquête et prendre des mesures de réparation. Des fonctions supplémentaires peuvent être conférées à la Commission par une loi parlementaire.

Département des réfugiés. Le Département des réfugiés, organe public créé par le Gouvernement, est chargé de toutes les questions administratives concernant les réfugiés vivant au Kenya et, en cette qualité, il coordonne les activités et les programmes relatifs aux réfugiés. Ces activités consistent notamment dans la reconnaissance, la protection et la prise en charge des demandeurs d’asile et des réfugiés. De concert avec des organismes des Nations Unies placés sous la houlette du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) et d’autres partenaires, le Département des réfugiés veille à ce que des locaux et des services adéquats soient disponibles pour assurer la protection, l’accueil et la prise en charge des réfugiés au Kenya. En outre, il est chargé de trouver, dans la mesure du possible, des solutions durables pour les personnes qui obtiennent l’asile au Kenya. Les programmes de rapatriement volontaire vers le pays d’origine, lorsque la situation le permet, la réinstallation dans un pays tiers et l’intégration dans le pays d’accueil figurent au nombre de ces solutions. Le Département est également chargé de lancer, en collaboration avec ses partenaires de développement, des projets visant à promouvoir la coexistence pacifique et harmonieuse entre la population du pays hôte et les réfugiés. En outre, il est tenu de veiller à ce que les activités économiques et productives des réfugiés n’aient pas de répercussions négatives sur la population, les ressources naturelles ou l’environnement du pays d’accueil.

Protection des droits des personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays. Le Ministère d’État chargé des programmes spéciaux a pour mission de réinstaller les personnes déplacées à l’intérieur du Kenya et d’atténuer les difficultés auxquelles elles se heurtent. Le Gouvernement kényan se fonde sur les Principes directeurs de l’ONU relatifs au déplacement de personnes à l’intérieur de leur propre pays pour déterminer si une personne doit être considérée comme déplacée. Les déplacements à l’intérieur du territoire kényan sont dus aux cinq facteurs clefs suivants: les violences politiques; les catastrophes naturelles (inondations, glissements de terrain, sécheresse); les conflits culturels entre clans; les tensions sociales ou intercommunautaires; et les changements climatiques.

L’annonce, en décembre 2007, du résultat des élections présidentielles a déclenché une vague de violence dans tout le pays. Ce phénomène, qui a pris une dimension ethnique, a duré près de deux semaines et mis le Kenya dans une situation où il devait faire face à un nombre sans précédent de personnes déplacées. D’après le Ministère d’État chargé des programmes spéciaux, 663 921 personnes ont été déplacées par le déferlement de cette vague de violence. Parmi elles, 313 921 ont fui vers des communautés d’accueil, où elles se sont intégrées dans les mois suivants. Les 350 000 autres personnes déplacées ont cherché refuge dans les 118 camps mis en place. On estime à 78 254 le nombre d’habitations qui ont été incendiées dans tout le pays. Au moment de l’établissement du présent document, un peu plus de 16 000 personnes déplacées n’avaient pas encore été réinstallées.

Protection des personnes âgées. Le Département de l’égalité des sexes et des services sociaux, qui relève du Ministère de l’égalité des sexes, de l’enfance et du développement social, est chargé d’élaborer et d’appliquer des politiques de promotion des droits et du bien-être des personnes âgées. Le Kenya est signataire du Plan d’action international sur le vieillissement, adopté en 1982 à Vienne (Autriche), dans le cadre de la première Assemblée mondiale sur le vieillissement. Depuis, le Gouvernement s’est engagé à respecter les Principes des Nations Unies pour les personnes âgées, qui consacrent les droits des personnes âgées à l’indépendance, à la participation, aux soins, à l’épanouissement personnel et à la dignité.

Par l’intermédiaire du Ministère de l’égalité des sexes, de l’enfance et du développement social, le Kenya a encouragé l’élaboration d’un projet de politique nationale en matière de protection sociale qui est en attente d’approbation par le Conseil des ministres. Cette politique concrétise l’intention du Gouvernement de mettre en place un programme national de protection sociale axé sur l’amélioration des conditions de vie des personnes démunies et vulnérables. Cette politique a été élaborée sur la base d’expériences locales et internationales. Le Kenya a ratifié la Déclaration universelle des droits de l’homme, qui dispose que toute personne a droit à la sécurité sociale et dont les articles 22 à 26 portent spécifiquement sur la protection sociale. La Commission de l’Union africaine a constaté que les transferts sociaux étaient un moyen clef de combattre la pauvreté extrême en Afrique subsaharienne. Le Kenya est signataire de la Déclaration de Livingstone de 2006. La Conférence de Livingstone a engagé les États, sous les auspices de l’Union africaine (UA), à améliorer l’exécution des programmes de protection sociale. Dans l’appel à l’action de Livingstone, les États africains ont convenu d’intégrer les transferts sociaux dans les programmes et budgets nationaux en faveur du développement dans les deux à trois ans suivant à la réunion de 2006.

Le Comité directeur national de la protection sociale s’est constitué en 2007 sous la présidence du secrétaire permanent du Ministère de l’égalité des sexes, de l’enfance et du développement social. Il s’emploie actuellement à mettre au point une stratégie nationale en matière de protection sociale conformément au document directif. En 2009, le Gouvernement a lancé un programme de protection sociale en vertu duquel les personnes de 65 ans et plus touchent une allocation mensuelle de 1 500 shillings kényans par ménage, versée en liquide. Ce programme est l’un des outils mis en place par le Ministère de l’égalité des sexes pour répondre aux besoins de la population âgée et vulnérable. Ces aides en liquide visent à renforcer la capacité des bénéficiaires à avoir un meilleur niveau de vie en faisant baisser l’indice de pauvreté intégré au moyen de mécanismes durables de protection sociale.

Reconnaissance par le Kenya de la compétence des mécanismes régionaux de défense des droits de l’homme

Le Kenya se soumet aux décisions de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples. Bien que quelques communications mettant en cause le Kenya aient été soumises à la Commission, une seule a fait l’objet d’une décision. Le Gouvernement kényan était attaqué en l’espèce pour avoir procédé dans les années 1970 à l’expulsion du peuple endorois, communauté traditionnelle d’éleveurs, de ses terres situées dans la région du lac Bogoria, dans le centre du pays, afin d’y créer une réserve nationale et d’y construire des infrastructures touristiques. La Commission a considéré que l’indemnisation accordée aux personnes touchées par cette expulsion avait été minime et que cette mesure avait constitué une violation de divers droits dont jouissaient les Endorois en tant que peuple autochtone, dont les droits relatifs à la propriété, à la santé, à la culture, à la religion et aux ressources naturelles. La Commission a enjoint au Kenya de restituer aux Endorois leurs terres ancestrales et de les indemniser. Au moment de l’élaboration du présent document, des consultations étaient en cours afin de trouver le meilleur moyen d’appliquer la décision de la Commission.

Comme il est indiqué précédemment, le Kenya est partie à la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant dont le Comité africain d’experts sur les droits et le bien‑être de l’enfant suit l’application. Le Comité est actuellement le seul organe au monde chargé du suivi d’un instrument relatif aux droits de l’enfant qui ait compétence pour recevoir des plaintes contre des États parties. Le Kenya soumet au Comité des rapports périodiques sur les mesures prises pour appliquer les dispositions de la Charte. En 2009, le Comité a été saisi de la communication Enfants d’ascendance nubienne au Kenya c. Kenya. L’examen de cette communication était à l’ordre du jour du Comité à sa dix-septième session ordinaire, tenue à Addis-Abeba du 21 au 25 mars 2011. Le Comité a conclu que le Kenya avait violé le droit des enfants d’ascendance nubienne de ne pas faire l’objet de discrimination, ainsi que leur droit à la nationalité et à une protection contre l’apatridie. Au moment de l’élaboration du présent document, le Comité n’avait pas encore publié son rapport détaillé et motivé dans lequel il s’est engagé à recommander des mesures propres à promouvoir et à protéger l’intérêt supérieur des enfants d’ascendance nubienne au Kenya.

Le Kenya est également signataire du Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples portant création d’une Cour africaine des droits de l’homme et des peuples. La mission confiée à la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples complète le mandat de protection assumé par la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples. La Cour est habilitée à prononcer des décisions définitives et contraignantes sur les affaires de violation des droits de l’homme.

D.Cadre général de promotion des droits à l’échelon national

a)Administration provinciale

Les Services de l’administration provinciale font partie des cinq départements du Ministère d’État à l’administration provinciale et à la sécurité intérieure, au sein du Cabinet du Président. Les fonctions du Ministère ont évolué au fil du temps pour faire face aux problèmes nouveaux. Ces services, décentralisés à l’échelon local, facilitent l’interprétation, la diffusion et la mise en œuvre rapide des politiques gouvernementales. En 2002, l’administration provinciale a été restructurée pour permettre le recrutement d’un plus grand nombre de fonctionnaires dotés d’une formation professionnelle et sa mission a été élargie aux actions en cas de catastrophe et d’urgence, l’objectif étant de garantir la protection des droits de l’homme et particulièrement des droits à l’éducation, à la santé, à la propriété et à la salubrité de l’environnement. Ce service a joué un rôle particulièrement important dans la lutte contre les violences sexistes, les mariages d’enfants et les mutilations génitales féminines.

b)Rôle du Parlement et des institutions nationales des droits de l’homme

À l’échelon national, les commissions des droits de l’homme ont un rôle clef à jouer dans la promotion et la protection des droits de l’homme au Kenya, qui comptent parmi leurs principales responsabilités. Les commissions parlementaires compétentes apportent elles aussi une contribution importante. En suivant de très près l’action du Gouvernement kényan et en lui demandant des comptes, elles font, avec compétence, office de contrepoids.

Les institutions dont il est question aux paragraphes 58 à 67 du présent rapport ont joué un rôle majeur dans la promotion des différents droits de leur ressort. En vertu de la Constitution kényane de 2010, le Parlement affectera des fonds suffisants à la Commission kényane des droits de l’homme et de l’égalité, qui doit être créée en vertu de la Constitution, afin de lui permettre de s’acquitter de ses fonctions, et le budget de la Commission doit faire l’objet d’un vote distinct. Il s’agit d’une grande avancée dans la mesure où, auparavant, le financement de la Commission nationale des droits de l’homme dépendait du Ministère de la justice, de la cohésion nationale et des affaires constitutionnelles. Les dispositions de la Constitution selon lesquelles la rémunération et les prestations versées aux membres de commission seront imputées sur le Fonds consolidé de l’État et ne sauraient être revues à la baisse pendant la durée de leur mandat sont également de nature à préserver l’indépendance des membres de commission.

c)Publication des instruments relatifs aux droits de l’homme

Il existe différents moyens de diffuser la documentation touchant aux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme à travers le pays. Les rapports concernant le respect des obligations internationales du Kenya au titre des instruments des Nations Unies relatifs aux droits de l’homme sont établis avec les organes compétents et des membres de la société civile, puis mis à leur disposition. Le département kényan responsable du contrôle de la mise en œuvre et du respect de ces instruments mène également des activités de diffusion. Il en va de même pour la législation nationale relative aux droits de l’homme, le département compétent étant également chargé de diffuser le texte des projets.

D’une manière générale, le Kenya n’a pas pour pratique de publier et traduire les instruments relatifs aux droits de l’homme. Toutefois, il a fait des efforts pour publier et traduire en kiswahili, l’une des langues nationales, la plupart des recommandations concernant le Kenya, formulées par les organes chargés du suivi des traités. En outre, de nombreuses organisations de la société civile élaborent des versions simplifiées d’extraits de différents instruments relatifs aux droits de l’homme que même des organismes gouvernementaux ont utilisées pour sensibiliser la population à certains droits énoncés dans lesdits instruments. Le Gouvernement a publié et traduit en kiswahili la politique nationale en matière de droits de l’homme. Les pouvoirs publics prévoient par ailleurs de coopérer avec des organisations locales aux fins de la traduction de ces documents dans les langues locales.

d)Promotion des activités de sensibilisation des fonctionnaires aux droits de l’homme

L’adoption de la Constitution kényane de 2010 a été un événement marquant dans l’histoire juridique et constitutionnelle du Kenya. Elle a permis aux tribunaux d’appliquer directement les droits énoncés dans les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme auxquels le Kenya est partie. L’application de ces nouvelles dispositions nécessite la mise en place d’un important programme de formation que devront suivre toutes les personnes travaillant dans le système judiciaire et les fonctionnaires dont la mission est de garantir la réalisation des droits des citoyens. Au moment de l’élaboration du présent rapport, le Ministère de la justice, de la cohésion nationale et des affaires constitutionnelles jouait un rôle prépondérant dans la présentation d’un programme national d’instruction civique axée sur la Constitution.

Le Ministère d’État au service public a pour mandat de gérer et mettre en valeur les capacités de tous les fonctionnaires. À ce titre, il a lancé des programmes visant différents corps de fonctionnaires pour garantir le professionnalisme et l’honnêteté dans la prestation de services destinés à la population kényane. En collaboration avec la Commission nationale des droits de l’homme, il a intégré une composante «droits de l’homme» à la plupart des programmes de formation. Il y a lieu de souligner le professionnalisme de ces mesures.

La Commission nationale des droits de l’homme a contribué à promouvoir la compréhension des droits de l’homme dans la fonction publique au Kenya, en spécialisant progressivement les différents services. Elle a mené de nombreuses activités de formation tendant à faciliter la compréhension des droits de l’homme et une prise de conscience de ces droits par les fonctionnaires. Elle a ciblé les personnels de l’appareil judiciaire, de la police et des services pénitentiaires, des écoles publiques et des établissements publics, des Ministères de l’information, de la planification, de la santé, de l’eau, du travail, de l’agriculture, des travaux publics et des routes. L’action de ces entités a effectivement de profondes répercussions sur la protection et l’exercice des droits de l’homme. À partir d’une approche fondée sur les droits dans le domaine de la programmation, la Commission nationale donne aux titulaires de devoirs au sein des pouvoirs publics et de la société civile des moyens d’action pour intégrer les principes des droits de l’homme dans la prestation de services au public.

La Commission a également travaillé avec le Gouvernement pour incorporer les questions relatives aux droits de l’homme aux programmes scolaires et aux manuels de formation des établissements de formation publics, notamment les écoles de police et d’agents pénitentiaires. Avec d’autres acteurs, elle a œuvré pour sensibiliser le public et améliorer la compréhension des droits de l’homme à l’occasion de salons de l’agriculture, de séminaires sur les droits de l’homme et de colloques sur la responsabilité des pouvoirs publics, en particulier dans des zones marginalisées du pays. De concert avec les forces de police du Kenya, la Commission nationale a conçu et produit plus d’une centaine d’affiches sur les droits des personnes arrêtées pour informer les citoyens de leurs droits et devoirs au moment de l’arrestation et après. Ces affiches ont été dressées dans des lieux stratégiques, où le public et les personnes arrêtées peuvent les voir.

e)Promotion des activités de sensibilisation aux droits de l’homme par le biais des médias

Les médias kényans ont joué un rôle de premier plan dans la dénonciation des violations des droits de l’homme et ont ainsi encouragé l’adoption de mesures visant à mettre fin à ces violations. Le Gouvernement a conscience du fait que les médias font partie des institutions démocratiques indispensables à la diffusion d’une culture démocratique respectueuse des droits de l’homme. Le programme de réforme du secteur de la gouvernance, de la justice, du droit et du maintien de l’ordre, qui s’inscrit dans les meilleures pratiques à l’échelon international et a institué le prix Marekebisho pour l’excellence dans les médias (Marekebisho Media Awards for Excellence), en est un bon exemple. Il s’agit d’une étape importante dans la promotion de partenariats avec les médias en vue d’édifier une société mieux informée et plus active − associée à la prestation et à l’utilisation des services fournis par les institutions qui participent à ce programme de réforme.

Les Marekebisho Media Awards for Excellence visent à distinguer et promouvoir l’excellence dans le journalisme à thème dans la mesure où celui-ci contribue à renforcer la confiance du public dans les services dispensés par les ministères du secteur de la gouvernance, de la justice, du droit et du maintien de l’ordre, les départements et les organismes de ce secteur, ainsi que les services d’état civil, de police, d’immigration, d’administration provinciale et judiciaires. Le prix est parrainé par le programme de réforme et décerné en collaboration avec les médias participants, les établissements de formation de journalistes, les partenaires de développement internationaux et d’autres institutions partenaires dans les domaines de la gouvernance, de la justice, du droit et du maintien de l’ordre.

Pendant l’élaboration de la politique et du plan d’action nationaux du Kenya en faveur des droits de l’homme, le Ministère de la justice, de la cohésion nationale et des affaires constitutionnelles, en collaboration avec la Commission nationale des droits de l’homme et avec l’appui de partenaires de développement internationaux, s’est fortement appuyé sur la presse écrite, la radio et la télévision pour faire connaître ces documents et provoquer une prise de conscience de l’importance des droits de l’homme, en communiquant non seulement dans les deux langues officielles mais aussi dans les langues locales. Le Gouvernement compte traduire la politique et le plan d’action dans le plus grand nombre possible de langues locales, en partenariat avec la société civile.

f)Rôle de la société civile, notamment des organisations non gouvernementales

Les organisations de la société civile et les organisations non gouvernementales jouent un rôle clef dans la protection, la promotion et le progrès dans le domaine des droits de l’homme. Le Gouvernement tient à entretenir des relations de travail étroites avec ces organisations dans le cadre de la formulation des politiques nationales relatives aux droits de l’homme et les consulte avant la tenue de réunions intergouvernementales. Ces organisations jouent également un rôle important dans la prestation de services de formation dans le domaine des droits de l’homme aux hauts fonctionnaires et au grand public.

Au Kenya, la société civile joue un rôle important dans la promotion de la bonne gouvernance et du développement socioéconomique. De nombreuses organisations de la société civile dynamiques, dont des médias et des organisations confessionnelles, jouent le rôle de chef de file, recueillent des ressources et assurent la coordination des activités de soutien. La société civile joue un rôle particulièrement actif dans la promotion de la légalité dans les domaines de la gestion de l’environnement, de la prestation de services de santé, de l’éducation, de la lutte contre le VIH/sida, de la gestion de l’eau, ainsi que de la défense des droits des femmes, des enfants et des groupes vulnérables. Selon un rapport établi au titre du Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD), le Mécanisme africain d’évaluation par les pairs considère le dynamisme de la société civile kényane comme l’un des atouts de ce pays (NEPAD, 2006).

Le cadre juridique et réglementaire national relatif aux ONG est régi par la loi relative à la coordination des ONG de 1990 et ses règlements d’application de 1992. Cette loi était censée être le seul texte à encadrer l’enregistrement des ONG au Kenya et en réglementer l’activité. Elle est entrée en vigueur le 15 juin 1992. Depuis lors, le rôle économique des ONG en tant que prestataires de services de santé et d’éducation, de services sociaux et de services liés à l’environnement n’a cessé de s’étendre. Les salariés du secteur des ONG représentent environ la moitié (43 %) de l’ensemble des employés du secteur public (loi relative à la société civile internationale, 2008). En 2000, les dépenses de ce secteur s’élevaient à 270 millions de dollars. La main-d’œuvre (salariés et volontaires) représente plus de 290 000 employés à plein temps, soit 2,1 % de la population active kényane.

Le Gouvernement kényan a joué un rôle central dans la définition de l’orientation prise par la société civile kényane, en particulier pour ce qui est de sa vitalité. Toutefois, dans le Kenya de l’ère postcoloniale, la société civile, en particulier le secteur des ONG, a subi une véritable mutation. Peu après avoir accédé à l’indépendance, le Kenya s’est heurté à toutes sortes de problèmes de développement qu’il n’a pas pu surmonter faute de ressources. C’est l’une des raisons pour lesquelles l’action des ONG et des autres parties prenantes de la société civile, encouragées par l’État, s’est orientée principalement sur les activités de développement pendant la période 1964-1978. Toutefois, à partir de 1978, de nombreuses ONG et mouvements de la société civile se sont lancés aussi dans l’activisme politique et la défense des droits. Pour de nombreux commentateurs, l’autoritarisme excessif et la personnalisation du pouvoir par le Gouvernement en place à l’époque expliquaient en partie l’engagement des organisations dans l’action politique d’opposition et, de manière générale, le militantisme politique. Ces organisations étaient soutenues par la communauté internationale, qui avait augmenté son aide financière pour les aider à demander au Gouvernement de rendre des comptes en matière de droits de l’homme et de gouvernance en général.

En 1982, des modifications apportés à la Constitution ont fait du Kenya un État à parti unique de jure. Des modifications ultérieures ont abouti à l’instauration d’un régime autoritaire, qui a commis de nombreuses atteintes aux droits de l’homme, en procédant notamment à des détentions sans jugement et des actes de torture. Étant donné qu’il n’y avait qu’un seul parti politique et en l’absence d’organisations politiques officielles capables de faire contrepoids, les ONG et la société civile sont devenues le seul interlocuteur possible. Les pressions croissantes que celles-ci ont exercées sur le Gouvernement se sont finalement soldées, en décembre 1991, par une modification de la Constitution qui a permis de rétablir le multipartisme.

Les premières élections multipartites ont eu lieu en 1992. Aux yeux de nombreux observateurs, elles ont été entachées d’irrégularités. Aussi les Kényans ont-ils eu le sentiment que le cadre constitutionnel et juridique en vigueur ne leur permettrait pas d’approfondir leur expérience de la démocratie. Des réseaux et des coalitions d’organisations partageant le même point de vue se sont alors formés pour réclamer un changement à la faveur d’une nouvelle constitution. C’est grâce à l’action de ces coalitions et à l’arrivée au pouvoir de la National Rainbow Coalition (NARC) que les Kényans ont pu adopter une nouvelle Constitution en 2010.

La société civile s’est concentrée sur la démocratisation du processus de réforme constitutionnelle, la production d’informations justes et pertinentes et, sur le plan intellectuel, a pris la direction du processus de réforme. Elle a joué un rôle de premier plan dans le débat national sur la réforme constitutionnelle en publiant un modèle de constitution, en organisant des ateliers et des séminaires, en montant des pièces de théâtre interactives et non interactives pour renforcer les secteurs de la société, en jouant un rôle de chef de file dans la campagne sur les droits fondamentaux et l’éducation civique et en publiant de nombreuses plaquettes, affiches, prospectus et autres matériels didactiques.

Dans son document de session de 2006, le Gouvernement kényan a explicitement reconnu que les ONG étaient une puissante force au service du développement social et économique, de sérieux partenaires du développement national et de précieux agents de promotion du développement qualitatif et quantitatif du produit intérieur brut (PIB). Ce document a été publié plus de quinze ans après l’adoption de la loi relative à la coordination des ONG. Comme le souligne le document de session no 1 de 2006, la politique relative au secteur des ONG prévoit un examen de la loi en question, auquel les ONG participeront.

En décembre 2008, le Gouvernement a créé un Groupe de travail sur la collaboration entre le Gouvernement et les organisations de la société civile, dans lequel sont représentés huit ministères travaillant en étroite coopération avec les ONG, ainsi que 12 ONG. Le Groupe est animé par un comité de coordination composé du Conseil des ONG, du Ministère d’État au patrimoine national et à la culture et d’une ONG appelée Pact Kenya.

À l’issue d’une série de discussions, le Groupe de travail s’est prononcé sur les enjeux auxquels se heurte la collaboration entre le Gouvernement et les organisations de la société civile et a élaboré les principes appelés à régir cette collaboration. Ces principes doivent servir de directives et donner des moyens d’action au Gouvernement kényan et aux acteurs de la société civile à tous les niveaux pour mener à bien leurs initiatives conjointes. Le travail législatif peut prendre appui sur ces principes qui sont autant de lignes d’action pour les principales parties prenantes, à savoir le Gouvernement kényan et les ONG.

Le Gouvernement est conscient du fait que les organisations de la société civile kényane promeuvent et défendent depuis longtemps les droits des personnes défavorisées et vulnérables. Il a donc nommé les représentants des organisations s’occupant de différents problèmes relatifs aux droits de l’homme membres du Comité consultatif national sur les obligations internationales en matière de droits de l’homme. Le Comité a pour mission de conseiller le Gouvernement au sujet du respect des obligations découlant des instruments auxquels le Kenya est partie et d’appeler son attention sur les instruments que le Kenya devrait ratifier.

En outre, des mesures ont été prises pour définir le cadre et l’espace de la participation au développement des organisations de la société civile en général et des ONG en particulier. Ainsi, pour encourager et resserrer la collaboration des acteurs non étatiques avec le Gouvernement kényan sur les questions de développement, celui‑ci a négocié et adopté le programme d’appui aux acteurs non étatiques. Il s’agit d’un programme de gouvernance démocratique mis en œuvre par le Ministère de la justice, de la cohésion nationale et des affaires constitutionnelles, qui bénéficie du financement du neuvième Fonds européen de développement (FED) de l’Union européenne. Le programme vise à renforcer les mécanismes, les réseaux et les capacités voulus pour approfondir et élargir la participation aux processus de développement des acteurs non étatiques (y compris les acteurs culturels).

g)Tendances budgétaires en matière de droits de l’homme au titre des différents instruments

La Stratégie de redressement économique aux fins de la création de richesse et d’emplois a été lancée.

Le lancement début 2003, de cette stratégie par la National Rainbow Coalition Administration (NARC) a marqué un tournant important dans la politique socioéconomique du Kenya. L’accent a été délibérément placé à la fois sur la prospérité économique et sur la croissance du secteur social, comme en témoigne l’attention accordée à la fois aux stratégies de création de richesse et aux mesures destinées à atténuer la pauvreté, prises en vertu du document de stratégie de réduction de la pauvreté. Le nouveau gouvernement était disposé à tout faire pour redynamiser une économie en panne, reconstruire des infrastructures en ruine et améliorer la qualité des services sociaux et l’accès à ces services (principalement aux soins de santé primaires et à l’éducation de base).

On trouvera dans le présent rapport une brève description des tendances en matière de dotations budgétaires en faveur des droits fondamentaux suivants: santé, éducation, eau, logement et sécurité alimentaire. À l’heure actuelle, il est difficile d’obtenir des données globales ventilées par sexe. L’idée de ventiler les données commence à peine à être envisagée.

Au Kenya, le travail budgétaire commence par l’établissement par le Trésor de plafonds de dépenses pour les groupes de travail sectoriels composés de parties prenantes, appelées à approuver les dotations budgétaires au sein du groupe, en tenant compte des priorités sectorielles fixées dans les plans d’action et le Plan de développement national. Les autorités partent du principe que la diversité des membres de ces groupes de travail sectoriels est suffisante pour que les priorités nationales et infranationales puissent s’exprimer. Toutefois, dans la pratique, l’information émanant des échelons sous‑sectoriels et infranationaux ne parvient pas jusqu’aux groupes de travail sectoriels et il arrive souvent que les préoccupations infranationales restent méconnues. C’est pourquoi, les groupes sous‑sectoriels, qui ne peuvent s’appuyer sur de puissants groupes de pression politiques, ont peu de chances d’exercer une influence sur les décisions budgétaires des groupes de travail sectoriels.

Santé

En 2001, le Kenya a signé la Déclaration d’Abuja, dans laquelle les chefs d’État et de Gouvernement africains se sont engagés à consacrer au moins 15 % des budgets nationaux au secteur de la santé. À ce jour, la part du secteur de la santé dans le budget national n’a cependant jamais dépassé 10 % du montant total des dépenses publiques. Bien que le montant total brut du budget de la santé ait augmenté depuis, il a connu des fluctuations. Depuis 2003/04, la part du Ministère de la santé représente moins de la moitié du pourcentage de 15 % recommandé dans la Déclaration d’Abuja. De même, le montant des dépenses de santé par habitant est très inférieur au taux recommandé par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), à savoir 34 dollars des États-Unis par personne en 2007. Bien que les dépenses par habitant aient augmenté entre 2005/06 et 2007/08, elles ne représentaient en 2007/08 que 40 % du montant recommandé par l’OMS. Toutefois, depuis la mise en place du Fonds pour le développement des collectivités en 2003, la plupart des collectivités ont créé et équipé des établissements locaux de santé, facilitant ainsi l’accès des citoyens aux soins de santé. Il existe à présent 16 établissements de santé pour 100 000 personnes et 11 dispensaires pour 1 000 kilomètres carrés.

Les dépenses récurrentes ont attiré la plus grande partie du budget de la santé, bien que cette proportion ait chuté de 94 % du budget en 2002/03 à 70 % en 2007/08. Au moment de l’élaboration du présent rapport, le montant total des dépenses de santé par habitant s’élevait à environ 500 shillings kényans (6,2 dollars des États-Unis) ce qui signifie que les dépenses de santé restent très inférieures aux 34 dollars par habitant recommandés par l’OMS. Ces dépenses sont également inférieures au pourcentage que le Gouvernement kényan s’est engagé à consacrer au secteur de la santé, à savoir 15 % du budget total, conformément à la Déclaration d’Abuja. Le financement insuffisant du secteur de la santé a donc amoindri la capacité de ce secteur d’assurer à la population un niveau de prestations suffisant.

Éducation

Le Kenya s’approche du niveau de référence établi dans le cadre d’action de Dakar(2000) qui invite les pays à consacrer jusqu’à 26 % de leur budget national à l’éducation. Le secteur de l’enseignement a été l’un des principaux bénéficiaires du budget national au fil des années. Pendant l’exercice 2005/06, l’enseignement a reçu 19 % du budget total de l’État, 18,5 % en 2006/07, 17,3 % en 2007/08, et 18,43 % en 2008/09, respectivement. Dans le budget 2009/10, un montant complémentaire de 9,6 milliards de shillings kényans (126 millions de dollars) a été accordé au secteur de l’enseignement. Environ 17 % de ce budget a été consacré au recrutement d’auxiliaires de l’enseignement pour faire face à l’augmentation du nombre d’inscriptions. Dans le budget 2011/12, le Ministère de l’éducation a reçu la part du lion, soit environ 200 milliards de shillings kényans, contre 70 milliards l’année précédente. En présentant le budget, le Ministre des finances a déclaré que cette augmentation s’expliquait par la volonté du Gouvernement de relever les taux de scolarisation et de passage d’un niveau à l’autre et d’améliorer l’égalité dans l’accès à l’éducation.

Pour la première fois dans l’histoire de l’enseignement au Kenya, le Ministère a affecté 300 millions de shillings kényans à la fourniture de serviettes hygiéniques aux élèves défavorisées du primaire. De nombreuses jeunes filles et familles des zones rurales ont rarement les moyens d’acheter des serviettes hygiéniques en raison du prix relativement élevé de ces articles, ce qui empêche les jeunes filles d’aller à l’école, parfois pendant une semaine. En leur fournissant des serviettes hygiéniques, le Ministère permet aux filles de ne pas interrompre leur scolarité et de rester propres et, par la même occasion, d’accroître leur confiance en elles-mêmes et en leur propre valeur.

Eau

Le Kenya fait partie des pays où l’eau est rare, la quantité d’eau par habitant y est inférieure au niveau de référence mondial de 1 000 mètres cubes et les précipitations y sont peu importantes. Aujourd’hui, pas plus d’environ 46 % de la population rurale et 70 % des résidents des zones urbaines ont accès à l’eau propre. Des progrès considérables ont été faits dans l’amélioration de l’accès à l’eau depuis l’entrée en vigueur de la loi relative à l’eau de 2002. Depuis 2006-2010, les investissements réalisés dans ce secteur ont régulièrement augmenté. Le montant consacré à ces investissements s’est élevé à 8,5 milliards, pendant l’exercice 2006/07, 11,6 milliards en 2007/08, à 18,2 milliards en 2008/09, à 24,7 milliards en 2009/10, à 50,35 milliards en 2010/11, et, ce montant a atteint 56,9 milliards en 2011/12. L’absorption par le Ministère de l’eau et de l’irrigation des crédits alloués a également augmenté. Ces cinq dernières années, l’utilisation moyenne du budget ordinaire a été de 89,4 %, alors que seulement 69,06 % du budget moyen consacré au développement a été utilisé. Avec l’augmentation des dépenses, le montant disponible pour les investissements (budget de développement) a été presque multiplié par 3, passant de 140 shillings kényans par habitant à 391 shillings kényans (Gouvernement kenyan, 2009).

Logement

Les statistiques actuelles indiquent que plus de 47 % des habitants des bidonvilles habitent dans des baraquements de fortune, dans des zones où le chômage et la criminalité sont élevés et les cas de VIH/sida en augmentation. La vie s’y déroule dans une pauvreté abjecte et c’est pourtant là que vivent la majorité des personnes âgées. Reconnaissant que le logement décent contribue au bien-être de tous les groupes d’âges et plus encore des personnes âgées, le Gouvernement kényan a mis en place des programmes visant à améliorer les conditions de logement dans les établissements spontanés des zones urbaines. Le budget consacré au logement est passé de 2,97 milliards de shillings kényans en 2009/10 à 3,4 milliards en 2010/11. Toutefois, d’après l’Étude économique de 2010, la contribution du secteur du logement au PIB s’est contractée, passant de 5,2 % en 2008 à 5,1 % en 2009. La croissance du secteur du logement a également reculé, passant de 3,7 % en 2008 à 3 % en 2009.

Sécurité alimentaire

La sécurité alimentaire au Kenya a toujours été associée à la disponibilité du maïs, produit agricole de base le plus cultivé. Toutefois, une majorité de la population rurale souffre de plus en plus de la malnutrition en raison d’importantes carences en protéines. Au fil des années, le Gouvernement a mis en place des mesures visant à améliorer la sécurité alimentaire. Le programme de relance économique dans le cadre du budget 2009/10 a représenté une mesure d’austérité positive et a permis d’améliorer la sécurité alimentaire. La composante «alimentation» du programme de relance visait à renforcer la sécurité alimentaire en remettant en état les réseaux d’irrigation et, partant, à stabiliser la réserve céréalière stratégique du Kenya. L’objectif est également d’améliorer l’offre de maïs et de riz tout en contribuant à améliorer la nutrition et la santé. Les ministères concernés par cette composante sont le Ministère de l’agriculture, le Ministère de l’eau et de l’irrigation, les autorités chargées du développement régional, le Ministère de la jeunesse et des sports. Des crédits complémentaires ont été accordés aux composantes liées à l’alimentation pendant l’exercice 2010/11.

L’irrigation, la collecte de l’eau et la sécurité alimentaire ont reçu des crédits plus importants pendant l’exercice 2011/12 car le Gouvernement s’emploie à améliorer la sécurité alimentaire et à enrayer la hausse des prix au Kenya. Environ 1,5 milliard de shillings kényans seront consacrés à la construction de 15 bacs servant à la collecte de l’eau (100 000 mètres cubes pour chaque terrain non aride et semi-aride, pour un coût de 1,5 million de shillings kényans par bac). Seulement 5 % des terres du Kenya sont irriguées et il reste à mettre en valeur les 30 % de terres irrigables. Un montant de 1,3 milliard de shillings kényans a donc été réservé à l’extension des zones irriguées sur 11 000 acres (4 451,5 hectares) et une autre somme de 4,3 milliards de shillings kényans à l’installation de réseaux d’irrigation sur 16 000 acres (6 475 hectares), en plus des 600 millions de shillings kényans consacrés à la mise au point de 91 nouveaux dispositifs d’irrigation.

Pour continuer d’améliorer la sécurité alimentaire, le Trésor a affecté un montant complémentaire de 845 millions de shillings kényans à l’achat de deux sacs de jute par ménage, qui doivent servir à des activités agricoles dans les bidonvilles. Cette mesure atténuera les effets de la hausse continue des cours des denrées alimentaires et des combustibles, l’un des principaux facteurs de la hausse de l’inflation, qui en juin 2011, atteignait 12,95 % au lieu des 5 % que la Banque centrale kenyane s’était donné pour objectif.

Les pouvoirs publics ont aussi fait le nécessaire pour renforcer les capacités des Ministères de l’agriculture, de l’irrigation et de l’eau en affectant des fonds au recrutement d’agents de vulgarisation agricole et à la dotation de 120 collectivités en entrepôts frigorifiques pour faire suite à la mise en place réussie d’étangs de pisciculture au titre du budget 2009/10, dans le cadre du programme de relance économique. Au titre du budget 2010/11, le nombre des collectivités dotées d’étangs passera à 140.

h)Coopération et aide au développement en matière de promotion et de protection des droits de l’homme

Le Kenya a bénéficié de la coopération et de l’aide au développement dans de nombreux domaines en lien avec le développement, dont le domaine des droits de l’homme. Depuis qu’il a accédé à l’indépendance, le Kenya a eu de nombreux partenaires de développement dont les activités, en particulier dans le domaine des droits de l’homme, se sont intensifiées avec l’arrivée du nouveau gouvernement au pouvoir, en 2002. L’aide représente des milliards de shillings kényans car certains partenaires contribuent à des initiatives mises en œuvre dans des secteurs entiers et appuient également des projets et des programmes isolés.

En septembre 2007, le Gouvernement kényan, la communauté des donateurs et la société civile ont signé les Principes relatifs au partenariat et lancé la Stratégie d’aide conjointe au Kenya dans l’esprit de la Déclaration de Paris et de l’assistance sous forme de dons. L’objectif est de réduire le fardeau que représentent pour le Gouvernement la gestion des nombreux donateurs, l’harmonisation, la mise en conformité et la coordination de la coopération et de l’aide au développement. Cette mesure a été suivie de la signature, en septembre 2010, d’une déclaration d’intention conjointe, qui constitue un nouvel engagement d’accroître l’efficacité de l’aide. Ainsi, le Plan-cadre des Nations Unies pour l’aide au développement (PNUAD) du Kenya pour la période 2009-2013 vise à faciliter la concrétisation des priorités nationales, la promotion des droits de l’homme et la réalisation des principes et des valeurs énoncés dans la Déclaration du Millénaire, ainsi que des objectifs du Millénaire pour le développement. Il a également pour objectif l’élaboration d’un programme et d’un cadre communs à tous les partenaires de développement, au système des Nations Unies et au Gouvernement kényan, afin de leur permettre de travailler ensemble à la réalisation de ces objectifs et encourage une approche globale des enjeux à surmonter, sous la responsabilité du Kenya.

La stratégie globale du système des Nations Unies en ce qui concerne la réalisation de ces objectifs vise à une action concertée en vue d’une prestation unifiée. La coordination des activités étant assurée par l’équipe de pays des Nations Unies, les organismes des Nations Unies mettront en œuvre des programmes conjoints, des activités communes de surveillance et d’évaluation et veilleront à ce que les ressources soient utilisées de manière transparente et responsable. À partir des travaux d’analyse présentés dans un bilan commun de pays complémentaire, le PNUAD a défini un ensemble de priorités qui tiennent compte de la Stratégie Vision 2030 élaborée par le Gouvernement kényan, dont l’objectif est de faire du Kenya d’ici à 2030, par paliers de cinq ans chacun, un pays prospère, de revenu intermédiaire et compétitif à l’échelle mondiale. Les résultats du PNUAD correspondent aux domaines dans lesquels le système des Nations Unies possède un savoir-faire collectif et des atouts qui lui sont propres. L’accent sera placé sur les besoins des groupes les plus vulnérables et sur l’égalité des chances, ce qui permettra de contribuer à la réalisation progressive des droits des femmes, des hommes et des enfants. Le PNUAD repose sur trois domaines prioritaires et trois thèmes transversaux qui sont intégrés dans les domaines prioritaires, les domaines d’action et les résultats:

Améliorer la gouvernance et la réalisation des droits de l’homme: renforcement progressif de la gouvernance démocratique et des droits de l’homme, notamment de l’égalité des sexes (résultats du PNUAD fondés sur le volet politique 1 de Vision 2030);

Donner des moyens d’action aux personnes défavorisées et réduire les inégalités et les facteurs de vulnérabilité: accès et utilisation plus équitables des services sociaux essentiels de qualité et des services de protection, l’accent étant mis sur les groupes marginalisés et vulnérables; réduction des effets sur la situation humanitaire des catastrophes naturelles et causées par l’homme, et des risques en la matière; lutte contre le VIH fondée sur des éléments établis scientifiquement et harmonisée à l’échelon national, permettant d’obtenir une réduction constante du nombre des nouvelles infections, de transposer à une plus grande échelle les traitements, les soins et l’aide et de renforcer l’efficacité des mesures visant à atténuer les incidences de la maladie (Vision 2030 volet social 2);

Promouvoir une croissance économique durable et équitable pour réduire la pauvreté et la faim, l’accent étant mis sur les groupes vulnérables: amélioration et pérennisation des moyens de subsistance équitables et de la sécurité alimentaire des groupes vulnérables; amélioration de la gestion de l’environnement au service de la croissance économique, associée à un accès équitable aux services énergétiques et réaction aux changements climatiques;

(Résultats du PNUAD fondés sur les volets économique et social de Vision 2030);

Thèmes transversaux, dont l’égalité des sexes, le VIH/sida, les migrations et les déplacements, ainsi que les changements climatiques.

Les activités de coopération pour le développement entre la Suède et le Kenya sont un exemple des autres formules qui mettent l’accent sur un domaine thématique particulier. La stratégie de la Suède est fondée sur la Stratégie conjointe d’aide au Kenya, approuvée par le Gouvernement kényan et ses principaux partenaires de développement. Le programme d’aide suédois privilégie la gouvernance démocratique et les droits de l’homme (35 %), les ressources naturelles et l’environnement (54 %), le développement urbain (6 %) et un appui continu aux initiatives relatives au VIH/sida (3 %) et aux activités de réfection du réseau routier en milieu rural (2 %).

Le coût des activités de coopération pour le développement menées au Kenya par la Suède devrait s’élever à environ 350 millions de couronnes suédoises (3,5 milliards de shillings kényans) par an, dont l’intégralité est versée sous forme de dons. La Suède travaille avec le Gouvernement kényan à la promotion des réformes institutionnelles et avec la société civile aux activités de défense des droits, de dialogue et de prestation de services.

Les activités de coopération pour le développement menées par la Suède contribuent également à l’amélioration de la prestation de services, à la création de revenu et de débouchés pour les personnes défavorisées, à la gestion des ressources en eau, à la réfection du réseau routier en zone rurale et à la prévention du VIH/sida, ainsi qu’à la prestation de soins aux personnes qui vivent avec la maladie. L’aide fournie par la Suède en faveur de la gouvernance démocratique se concentre sur le développement des institutions et la réforme de la justice et du secteur juridique, l’amélioration de la gestion des finances publiques et la mise en place d’une administration publique axée sur les résultats. En tenant compte des ressources naturelles et de l’environnement, les activités entreprises par la Suède tendant au premier chef à soutenir la réforme foncière, assurer l’accès aux ressources en eau, à l’eau potable, à augmenter la productivité de l’agriculture et la commercialisation des produits agricoles et à améliorer la gestion de l’environnement. Pour le secteur urbain, la Suède appuie les travaux menés pour améliorer les conditions de vie et la réalisation du droit des populations défavorisées des zones urbaines de participer sur un pied d’égalité à la prise de décisions et d’accéder plus facilement à un logement abordable.

Activités du Kenya dans le domaine de la coopération et de l’aide au développement en faveur d’autres pays

L’engagement du Kenya pour la paix et la sécurité dans la région est exemplaire. Le Kenya est l’un des membres fondateurs de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD), créée à Djibouti en 1986. Les pourparlers de paix entre le Gouvernement soudanais et le Mouvement/Armée de libération du peuple soudanais (SPLM/A) ont tous été menés sous les auspices de l’IGAD. Le Président du Kenya préside le sous-comité de l’IGAD sur le Soudan. En janvier 2005, un accord de paix global a été signé à Nairobi [UNTERM]. Depuis 2005, le Kenya a mené pendant cinq ans une navette diplomatique entre Juba et Khartoum, les capitales du Sud‑Soudan et du Nord‑Soudan, respectivement, pour encourager les deux parties à rester sur la bonne voie. Le Kenya a dépêché 35 000 instituteurs au Sud, laissé à l’abandon et déchiré par les combats pendant des décennies. En outre, le Kenya a détaché certains de ses fonctionnaires les plus qualifiés et expérimentés pour aider Juba à mettre en place une administration professionnelle.

En Somalie, l’engagement naturel du Kenya dans le processus de paix est lié en partie au fardeau que fait peser sur le Kenya la présence de réfugiés somalis dans différents camps de réfugiés et différentes villes kényanes. L’instauration de la paix en Somalie est indispensable à la stabilité du Kenya et de la région, le conflit ayant provoqué la multiplication d’armes légères et de petit calibre entre de mauvaises mains. Le Kenya a soutenu les processus de paix prévoyant la pleine participation des parties intéressées, accueilli des réunions de négociation et fourni une aide logistique aux acteurs internationaux des processus de paix depuis 2001. Son engagement a été couronné en 2004, par l’ouverture du processus de paix en Somalie, qui a abouti à la décision de mettre en place un nouveau parlement national en Somalie et d’organiser des élections présidentielles. Après la formation du Gouvernement fédéral de transition et avant son installation en Somalie, le Kenya a accueilli le Gouvernement fédéral de transition pendant plusieurs mois. Le Kenya reste attaché à l’idée d’une solution durable du conflit en Somalie.

E.Rôle du processus d’établissement des rapports dans la promotion des droits de l’homme à l’échelle nationale

a)Historique de la pratique du Kenya en matière de présentation de rapports

L’année 2003 a marqué une rupture dans la pratique du Kenya en matière de présentation de rapports. En 1993, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a examiné l’application par le Kenya du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels en l’absence de rapport. Stimulé par ce défi, le Kenya a soumis son rapport initial (E/1990/5/Add.17) au Comité, qui l’a examiné à ses 12e et 28e séances les 9 et 20 mai 1994. Après avoir examiné les informations contenues dans le rapport et compte tenu des réponses données oralement aux questions posées pendant le dialogue, le Comité a invité le Kenya à établir un nouveau rapport complet conformément à ses directives pour l’établissement des rapports. Au cours de la période antérieure à 2003, le Kenya a également soumis son rapport initial en vertu de la Convention relative aux droits de l’enfant (janvier 2000), lequel était attendu en 1992. Le rapport couvrait la période 1990-1997. Le pays a également soumis son rapport initial et son deuxième rapport périodique en vertu de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, respectivement en 1999 et en 2002. Il convient de noter que si le Kenya a pu soumettre les rapports en vertu de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et de la Convention relative aux droits de l’enfant, il le doit en grande partie à l’aide de donateurs étrangers. La participation des ministères chargés spécifiquement des questions relatives à la condition des femmes et des enfants a également été utile.

À compter de 2003, après des décennies d’autoritarisme et de violations des droits de l’homme, inhérentes à ce type de régime, le Gouvernement kényan a affiché sa volonté de rompre avec le passé et de mettre en place un environnement favorable à la réalisation des droits de l’homme pour tous, sans distinction. Le Gouvernement a entrepris de signer et de ratifier tous les instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l’homme en vue d’assurer aux citoyens la meilleure protection possible de leurs droits. Une plus grande attention a été accordée aux obligations qui découlaient de ces instruments, notamment en matière d’établissement de rapports. À la date où le présent rapport a été élaboré, le pays avait soumis des rapports sur les mesures prises pour mettre en œuvre les instruments suivants:

La Convention relative aux droits de l’enfant; deuxième rapport périodique examiné en janvier 2007;

La Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, cinquième et sixième rapports combinés en un seul document, examinés en juillet 2007; le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes a examiné le septième rapport périodique du Kenya à sa quarante-huitième session (17 janvier-4 février 2011);

Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, mars 2005; le troisième rapport périodique soumis par le Kenya en vertu de cet instrument est en attente d’examen;

La Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, mai 2007;

Le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants; rapports examinés en novembre 2008;

La Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale; le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale a examiné le rapport initial du Kenya à sa soixante-dix-neuvième session (août 2011).

b)Participation des différentes parties prenantes à l’établissement des rapports

Il existe au Kenya un comité consultatif national sur les obligations internationales relatives aux droits de l’homme, composé de représentants de plusieurs ministères, de la Commission nationale des droits de l’homme, de la Commission nationale sur l’égalité des sexes et le développement, du Conseil national pour les personnes handicapées, d’un institut de recherche sur les politiques, et d’organisations de la société civile, qui s’occupent des questions relatives aux droits de l’enfant, aux droits de la femme, aux droits civils et politiques et aux droits des minorités. Ce comité identifie les parties prenantes les plus indiquées pour diriger l’établissement d’un rapport sur l’application d’un instrument relatif aux droits de l’homme donné. Il s’agit de celles qui sont le plus directement concernées par les dispositions de l’instrument considéré, par exemple les femmes, les enfants, les minorités ethniques ou religieuses, les autochtones, les personnes handicapées, les membres des partis politiques et les travailleurs. Des universitaires et des chercheurs sont toujours invités à participer au processus.

L’identification des parties prenantes est suivie des étapes ci-après:

Introduction à l’instrument concerné pour assurer une bonne compréhension des obligations qui en découlent en matière d’établissement de rapports;

Identification des données et informations requises aux fins de l’établissement du rapport et des sources pertinentes auprès desquelles les obtenir;

Compilation des données aux fins de l’établissement d’un avant-projet de rapport, qui permet de repérer d’éventuelles lacunes dans les informations recueillies;

Diffusion du projet de rapport pour commentaires aux ministères responsables d’assurer le respect des différentes obligations découlant de l’instrument considéré et aux autres parties prenantes;

Finalisation du projet de rapport;

Validation du projet et atelier en vue de la diffusion du rapport;

Finalisation du rapport.

Les différents ministères responsables du suivi de l’application des droits garantis par les instruments relatifs aux droits de l’homme ont un rôle primordial à jouer dans la collecte des données ainsi que dans la diffusion des instruments pertinents et des rapports soumis par le pays aux organes conventionnels.

Le tableau ci-après dresse la liste des ministères qui ont dirigé le processus d’établissement des rapports soumis en vertu des principaux instruments des Nations Unies ratifiés par le Kenya ainsi que dans le cadre de l’Examen périodique universel (EPU).

Instrument des Nations Unies

Ministère chef de file

Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale

Ministère de la justice, de la cohésion nationaleet des affaires constitutionnelles

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Ministère de la justice, de la cohésion nationaleet des affaires constitutionnelles

Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels

Ministère de la justice, de la cohésion nationaleet des affaires constitutionnelles

Convention contre la torture

Ministère de la justice, de la cohésion nationaleet des affaires constitutionnelles

Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes

Ministère de l’égalité des sexes

Convention relative aux droits de l’enfant

Ministère des services à l’enfance

Convention relative aux droits des personnes handicapées

Égalité des sexes et développement social

EPU

Ministère de la justice, de la cohésion nationaleet des affaires constitutionnelles

Les organisations de la société civile participent aux réunions et aux tables rondes thématiques organisées dans le pays pour recueillir des informations aux fins de l’établissement des rapports périodiques. Pour renforcer la participation de ces organisations, le Gouvernement n’encourage pas seulement les partenaires de développement à leur apporter leur soutien; il a également négocié avec l’Union européenne la création d’un Fonds pour les acteurs non étatiques, qui est une source de financement indépendante visant à permettre à la société civile de participer aux décisions des pouvoirs publics ayant une forte incidence sur la réalisation des droits de l’homme.

Le Gouvernement a mis en place des partenariats avec les organisations de la société civile afin que celles-ci vulgarisent et diffusent les rapports aux organes conventionnels via leur réseau très étendu, tandis que les ministères concernés les affichent sur leur site Web. Cette stratégie n’est pas facile à mettre en œuvre, mais le Ministère de la justice, de la cohésion nationale et des affaires constitutionnelles cherche des moyens d’atteindre le plus large public possible, qui n’excluent pas la possibilité de solliciter les partenaires de développement.

Au Kenya, il est admis que si les organisations de la société civile participent à l’établissement des rapports de l’État en tant que parties prenantes, elles n’en ont pas moins le droit et l’obligation d’établir et de soumettre des rapports parallèles aux différents organes conventionnels. Alors que l’établissement des rapports s’intègre progressivement dans la culture du pays, la collaboration entre le Gouvernement et la société civile et leurs contributions respectives donnent des résultats. Les pays et les organisations ont ainsi été nombreux à citer le Kenya comme un exemple de bonne pratique à l’issue de l’examen de son rapport national dans le cadre de l’Examen périodique universel. Du fait qu’elles sont systématiquement informées du contenu des rapports du Gouvernement, les organisations de la société civile sont de leur côté davantage disposées à partager avec le Gouvernement les informations contenues dans leurs propres rapports.

Contribution de la Commission nationale des droits de l’homme à l’établissement des rapports soumis par le Kenya

Comme il est expliqué plus haut, la Commission nationale des droits de l’homme joue le rôle de conseiller principal du Gouvernement dans le domaine des droits de l’homme. Elle mène ses activités et fonctionne de manière indépendante, conformément aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris). Le Comité international de coordination des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (qui a son siège à Genève, au Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme) lui a accordé le statut A, gage de sa conformité aux Principes de Paris. La Commission est également membre du Comité consultatif national sur les obligations internationales relatives aux droits de l’homme. Elle peut ainsi avoir facilement accès aux rapports soumis par le Gouvernement aux organes conventionnels et prendre une part active au suivi de la mise en œuvre des observations finales/Observations générales de ces organes à l’échelle nationale.

F.Autres informations relatives aux droits de l’homme

a)Politique et plan d’action nationaux en faveur des droits de l’homme

Le Gouvernement kényan, sous la direction du Ministère de la justice, de la cohésion nationale et des affaires constitutionnelles et de la Commission nationale des droits de l’homme, a élaboré une politique et un plan d’action nationaux en faveur des droits de l’homme. Il met ainsi en œuvre la recommandation issue de la Conférence mondiale des Nations Unies sur les droits de l’homme tenue à Vienne en 1993, qui préconise que «chaque État examine s’il est souhaitable d’élaborer un plan d’action national prévoyant les mesures par lesquelles il améliorerait la promotion et la protection des droits de l’homme». Le Gouvernement a en effet reconnu que les gouvernements précédents n’avaient pas suffisamment œuvré pour la protection et la promotion des droits de l’homme, et que l’absence de stratégie claire visant à réaliser les droits de l’homme et à en faire une partie intégrante de tous les aspects du développement national avait encore aggravé la situation.

Le Kenya a élaboré la politique et le plan d’action nationaux en faveur des droits de l’homme en se fondant sur les principes suivants:

L’amélioration durable de la promotion et de la protection des droits de l’homme dépend fondamentalement du Gouvernement;

L’élaboration d’une politique et d’un plan d’action nationaux en faveur des droits de l’homme est un processus consultatif dont le résultat final, en plus de donner des orientations au Gouvernement, doit permettre d’évaluer les actions menées par l’État en faveur de la réalisation des droits de l’homme pour tous les Kényans et de l’obliger à en rendre compte. Les consultations, aussi bien sectorielles que régionales, ont joué un rôle déterminant pour favoriser l’adhésion nécessaire sans laquelle la mise en œuvre du plan d’action national serait très difficile. Le processus a été largement ouvert, et le Gouvernement, la société civile et le secteur privé ont été représentés à toutes les étapes. Des rencontres régionales ont été organisées dans les districts de toutes les provinces pour recueillir les vues de la population locale, qui a ainsi pu participer de manière effective et directe.

Les objectifs de la politique et du plan d’action nationaux en faveur des droits de l’homme, sorte de document d’orientation pour l’application de la Charte des droits de l’homme figurant dans la Constitution, sont les suivants:

Contribuer à l’élaboration de mesures visant à assurer le respect des droits de l’homme et à l’évaluation de leur mise en œuvre;

Analyser les points forts, les points faibles et le potentiel du pays en ce qui concerne la protection, le respect, la réalisation et la promotion des droits de l’homme, ainsi que les facteurs qui constituent des obstacles dans ces domaines;

Aider le Gouvernement à définir selon des critères rationnels des objectifs et des priorités en matière de droits de l’homme qui soient réalisables dans des délais raisonnables, et à mettre au point des activités, processus, stratégies et réformes ciblés pour y parvenir;

Contribuer à une répartition et à une gestion des ressources qui soient compatibles avec les priorités définies aux fins de la promotion, de la protection et du respect des droits de l’homme au Kenya. La politique et le plan d’action nationaux en faveur des droits de l’homme permettront ainsi de lier étroitement les droits de l’homme à la planification et au programme de développement du pays;

Contribuer à évaluer le respect par le pays de ses obligations internationales relatives aux droits de l’homme et à en assurer le suivi; encourager la ratification des instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l’homme et leur incorporation dans le droit interne, conformément aux obligations incombant au Kenya.

b)Examen périodique universel (EPU)

Le 6 mai 2010, le Kenya a soumis son rapport national aux fins de l’Examen périodique universel. Le rapport était le fruit d’un vaste processus consultatif entre le Gouvernement, la Commission nationale des droits de l’homme, et diverses institutions nationales, organisations non gouvernementales, organisations de la société civile et autres parties prenantes, parmi lesquelles des universités et des instituts de recherche sur les politiques. Le rapport final a été soumis aux parties prenantes pour validation. La direction du processus et sa coordination ont été assurées respectivement par le Comité consultatif national sur les obligations internationales en matière de droits de l’homme et le Ministère de la justice, de la cohésion nationale et des affaires constitutionnelles.

Cinquante-cinq délégations ont fait des déclarations pendant le dialogue. Vingt-deux (22) autres déclarations, qui n’ont pas pu être prononcées à cette occasion, ont été publiées sur l’Extranet de l’Examen périodique universel. Cent cinquante (150) recommandations ont été adressées au Kenya, qui les a toutes acceptées, à l’exception de celle en faveur de la dépénalisation des relations homosexuelles. À ce sujet, il convient toutefois de noter que nul n’est tenu de déclarer son orientation sexuelle pour avoir accès à un service. L’accès aux services publics et à la protection de l’État sont garantis à tous, sans distinction.

Suivi des conférences internationales

Tout au long du rapport, il est fait référence aux décisions et engagements internationaux que les mesures prises par le Kenya visent à mettre en œuvre. Par exemple, la décision du Kenya d’élaborer une politique et un plan d’action nationaux en faveur des droits de l’homme faisait suite à la Conférence mondiale sur les droits de l’homme de 1993; les progrès constants que le Kenya continue d’accomplir pour améliorer la condition de la femme s’inscrivent dans le prolongement de la quatrième Conférence mondiale sur les femmes de 1995, et les mesures prises en faveur de la promotion, de la protection et du respect des droits de l’enfant, dans celui du Sommet mondial pour les enfants de 1990.

Le Sommet du millénaire de 2000 a également eu un impact considérable sur la situation des droits de l’homme au Kenya. Après avoir signé la Déclaration du Millénaire, le Kenya a lancé en 2002 un processus en vue de la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement (OMD), auquel il a consacré depuis, avec l’aide de ses partenaires de développement, d’importantes ressources. Le Gouvernement a fait du financement des OMD une priorité en allouant davantage de fonds aux secteurs directement liés à ces objectifs. La stratégie Vision 2030 élaborée par le Kenya s’inspire pour beaucoup des OMD.

Depuis le lancement du processus de mise en œuvre, le Kenya a établi régulièrement des rapports de situation sur la réalisation des OMD − en 2003, 2005, 2007 et 2009. Ces rapports mettent en évidence les principales avancées réalisées ainsi que les difficultés rencontrées. Quelques exemples des progrès accomplis sont donnés ci-après.

Éducation primaire pour tous: Le taux brut de scolarisation a augmenté, passant de 82,2 % à 110 % en 2009. Le taux d’achèvement du cycle d’enseignement primaire est passé de 62,8 % en 2002 à 83,2 % en 2009. Le taux de passage du primaire au secondaire était de 64,1 % en 2009, contre 59,9 % en 2008. Le taux de scolarisation des filles est quasiment identique à celui des garçons. Ces progrès ont été possibles grâce à la gratuité de l’enseignement primaire, à l’instauration de la scolarité gratuite dans l’enseignement secondaire et à des investissements continus dans l’infrastructure de base des établissements du cycle d’enseignement primaire.

Accès à l’eau potable: Le taux d’accès à l’eau potable est passé de 57 % en 2006 à 60,4 % en 2009. Toutefois, la prolifération des bidonvilles reste un problème que le Kenya s’efforce de résoudre dans le cadre du projet d’assainissement des bidonvilles.

Taux de mortalité infantile: Le taux de mortalité infantile a diminué, passant de 77 ‰ en 2003 à 52 ‰ en 2009. Le taux de vaccination, qui était de 56,8 % en 2003, a atteint 77,4 % en 2009. Le taux de mortalité maternelle demeure préoccupant, bien que la proportion de naissances assistées par du personnel de santé qualifié ait augmenté, passant de 42 % en 2003 à 43,8 % en 2009.

G.Mise en œuvre des dispositions de fond relatives aux droits de l’homme communes à tous les instruments internationaux ou à plusieurs d’entre eux

a)Mesures prises pour éliminer la discrimination et garantir l’égalité

La Constitution kényane de 2010 consacre l’égalité de tous devant la loi et le droit de chacun à l’égale protection et à l’égal bénéfice de la loi. L’égalité s’entend de la pleine jouissance, dans des conditions d’égalité, de l’ensemble des droits et des libertés fondamentales. Le droit à l’égalité de traitement est acquis aux hommes et aux femmes, notamment le droit à l’égalité des chances dans les domaines politique, économique, culturel et social. L’État a interdiction d’établir une discrimination, directe ou indirecte, fondée sur quelque critère que ce soit, la race, le sexe, la grossesse, la situation matrimoniale, l’état de santé, l’origine ethnique ou sociale, la couleur de peau, l’âge, le handicap, la religion, les valeurs, les croyances, la culture, le vêtement, la langue ou la naissance. Toute discrimination exercée directement ou indirectement par une personne à l’égard d’une autre pour l’un des motifs énumérés ci-dessus est également interdite. En vue de donner pleinement effet aux droits garantis par cette disposition, la Constitution fait obligation à l’État de prendre des mesures législatives et autres, y compris des programmes et des politiques en faveur des personnes ou des groupes qui sont défavorisés en raison de la discrimination dont ils ont été victimes dans le passé.

La Constitution définit en outre les fondements des valeurs et de la gouvernance nationales comme suit: dignité humaine, équité, justice sociale, ouverture, égalité, droits de l’homme, non-discrimination et protection des personnes ou des groupes marginalisés. En conséquence, tous les organes et les agents de l’État ont le devoir de répondre aux besoins des groupes vulnérables, notamment des femmes, des personnes âgées, des personnes handicapées, des enfants, des jeunes, des personnes issues de minorités ou de communautés marginalisées, et des personnes appartenant à une communauté ethnique, religieuse ou culturelle particulière.

Les dispositions susmentionnées sont importantes car les inégalités sont multiples au Kenya. Il y a des écarts de revenus et de prestations sociales entre les régions, entre les hommes et les femmes, et même entre certains secteurs de la population. Les inégalités touchent également aux droits de l’homme et à la gouvernance démocratique car, sous certaines formes, elles s’apparentent à de la discrimination. Leur persistance s’explique en partie par le manque d’efficacité des mécanismes de contrôle et de sanction et par le fait que les groupes vulnérables ou exclus ne savent pas comment faire pour influer sur les décisions qui les concernent. Cela leur est d’autant plus difficile que les inégalités entre hommes et femmes et au détriment des personnes handicapées et d’autres catégories vulnérables persistent et que les structures juridiques, formelles et informelles, existantes y sont peu sensibles. Le Gouvernement reconnaît le problème et a placé la lutte contre ces inégalités au cœur de la Stratégie de redressement économique (2003-2007), puis de la Stratégie Vision 2030, qui vise à instaurer une société juste et équitable et à promouvoir l’égalité en éliminant la discrimination.

Discrimination à l’égard des femmes

Au Kenya, l’importance du rôle que jouent les femmes dans le développement socioéconomique et politique du pays est de plus en plus reconnue. Toutefois, un certain nombre d’obstacles entravent encore la pleine participation des femmes au développement, et les maintiennent, par rapport aux hommes, dans une position défavorable qui les empêche de réaliser intégralement leur potentiel et de jouir pleinement de leurs libertés. L’Étude économique de 2011 (Economic Survey 2011) montre que le taux d’alphabétisation global est relativement élevé (85,1 %) mais que, d’après certaines estimations, il est nettement plus élevé chez les hommes (90,6 %) que chez les femmes (79,7 %). Bien que les hommes et les femmes soient égaux devant la loi, en matière d’accès à la propriété, la règle qui prévoit que l’homme acquiert la propriété des biens de son épouse ou en obtient la tutelle existe toujours en droit coutumier. Au Kenya, 4 % seulement des terres appartiennent à des femmes.

Avant 2010, le Kenya a tenté à plusieurs reprises de faire adopter des lois pour lutter contre la discrimination à l’égard des femmes, sans succès. En août 2010, 66 % des Kényans ont voté en faveur d’une nouvelle constitution qui, si elle est pleinement mise en œuvre, améliorera considérablement le sort des femmes, en particulier grâce aux dispositions suivantes:

Interdiction expresse de toutes les formes de discrimination, y compris la violence, à l’égard des femmes;

Droit de posséder et d’hériter des terres;

Protection des biens matrimoniaux pendant le mariage et après sa dissolution;

Abolition des dispositions législatives, coutumes et pratiques discriminatoires en matière d’accès à la terre;

Reconnaissance de l’égalité dans le mariage;

Garanties concernant la représentation des femmes en politique;

Droit des femmes ayant épousé un étranger de transmettre la nationalité kényane à leur époux ou à leurs enfants nés à l’étranger;

Partage égal des responsabilités parentales entre le père et la mère;

Augmentation du nombre de femmes dans tous les organes de prise de décisions, y compris au gouvernement, les organes électifs ne devant pas compter plus de deux tiers de membres du même sexe.

Mesures législatives contre la discrimination

Les lois énumérées plus bas contiennent des dispositions importantes concernant l’égalité devant la loi, l’égale protection de la loi et l’interdiction de la discrimination. La législation interdit en règle générale la discrimination directe, la discrimination indirecte, la persécution et le harcèlement. Elle interdit la discrimination fondée sur les motifs définis par la Constitution dans les domaines de l’emploi (et les domaines connexes), de l’éducation, de la fourniture de biens, d’équipements et de services, des partis politiques et de l’exercice de fonctions publiques.

La législation impose aussi aux autorités publiques des obligations positives visant à promouvoir l’égalité des chances au regard de la diversité ethnique, du handicap ou du sexe. Elles doivent pour cela éliminer les causes profondes de la discrimination et promouvoir l’égalité des chances dans la conception et l’exécution des politiques et dans la prestation de services, ainsi qu’en leur capacité d’employeurs. L’exécution de ces obligations peut exiger des autorités publiques qu’elles prennent des mesures en faveur des groupes défavorisés afin de promouvoir l’égalité dans tous les domaines relevant de leur compétence.

La loi no 12 relative à la cohésion nationale et à l’intégration de 2008 interdit la discrimination fondée sur des motifs ethniques, qu’elle définit comme toute discrimination fondée sur la couleur de peau, la race, la religion, la nationalité ou l’origine ethnique ou nationale.

La loi sur les personnes handicapées interdit également aux employeurs et à toute autre personne d’exercer une discrimination au motif d’une coutume ou d’une pratique liée à l’origine ethnique, à l’appartenance à une communauté, à la culture ou à la religion.

La loi portant création de la Commission nationale sur l’égalité des sexes et le développement de 2003 vise également à combattre la discrimination fondée sur le sexe. En vertu de la Constitution, cette commission sera renommée «Commission pour l’égalité des sexes».

La loi relative à l’enfance régit les questions relatives à la responsabilité parentale, au placement familial, à l’adoption, à la garde, à la pension alimentaire, à la tutelle, à la prise en charge et à la protection des enfants. Elle contient des dispositions sur l’administration des établissements qui accueillent des enfants et donne effet aux principes énoncés dans la Convention relative aux droits de l’enfant et la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant. Elle prévoit que nul enfant ne sera l’objet de discrimination en raison de son origine, de son sexe, de sa religion, de ses croyances, de ses coutumes, de sa langue, de ses opinions, de ses valeurs, de sa couleur de peau, de sa naissance, de sa situation sociale, politique, économique ou autre, de sa race, de son handicap, de sa tribu, de son lieu de résidence ou autre circonstance le rattachant à un lieu.

La loi relative aux partis politiques promeut la diversité régionale et ethnique, une représentation plus équilibrée des hommes et des femmes et la représentation des minorités et des groupes marginalisés dans les partis politiques.

La loi relative aux réfugiés de 2006 interdit la discrimination à l’égard des réfugiés ou des demandeurs d’asile, auxquels elle garantit le droit d’exercer leurs droits fondamentaux sans aucune discrimination.

La loi relative à l’emploi vise à promouvoir l’égalité des chances dans le domaine de l’emploi et à éliminer la discrimination dans toutes les politiques et pratiques en matière d’emploi; à promouvoir et à garantir l’égalité des chances à l’égard des travailleurs migrants et des membres de leur famille qui séjournent légalement dans le pays; à interdire la discrimination, directe ou indirecte, ainsi que toute forme de harcèlement à l’égard d’un(e) employé(e) ou d’un(e) candidat(e) à un emploi en raison de sa race, de sa couleur de peau, de son sexe, de sa langue, de sa religion, de ses opinions politiques ou autres, de sa nationalité, de son origine ethnique ou sociale, de son handicap, de sa grossesse, de son état mental ou de sa séropositivité.

La loi relative à la prévention et au contrôle du VIH/sida de 2006 porte création d’un tribunal chargé de citer des témoins, d’examiner les preuves et de recommander des sanctions contre quiconque est reconnu coupable de discrimination à l’égard de personnes infectées par le VIH/sida.

La Constitution kényane de 2010 prévoit des mesures de grande envergure en faveur de l’égalité qui ne sont pas seulement destinées à des personnes mais également à des groupes et à des régions. Il en est de même du projet de Stratégie Vision 2030.

La Constitution prévoit qu’il incombe à l’État de modifier les lois en vigueur, d’en adopter de nouvelles et de prendre d’autres mesures pour donner pleinement effet aux principes d’égalité et d’élimination de la discrimination, notamment les mesures suivantes:

i)Création de la Commission nationale des droits de l’homme et de l’égalité dans un délai d’un an à compter de l’entrée en vigueur de la Constitution (art. 59).

ii)Adoption de lois aux fins de l’exécution des obligations internationales du Kenya relatives aux droits de l’homme et aux libertés fondamentales (art. 21, par. 4)).

iii)Mesures législatives et autres visant à donner effet à la règle qui limite à deux tiers la proportion de personnes du même sexe pouvant siéger aux organes dont les postes sont pourvus par élection ou par nomination (art. 27, par. 8)).

iv)Mesures législatives, politiques et autres, notamment normatives, visant à la réalisation progressive des droits socioéconomiques (art. 21, par. 2) et par. 43)).

v)Mesures législatives et autres, y compris programmes et politiques en faveur de personnes ou de groupes défavorisés en raison de la discrimination dont ils ont été victimes dans le passé (art. 27, par. 6)).

vi)Mesures visant à garantir la mise en œuvre progressive du principe selon lequel 5% au moins des membres des organes dont les postes sont pourvus par élection ou par nomination doivent être des personnes handicapées (art. 54, par. 2)).

vii)Programmes d’action positive visant à garantir la participation des minorités et des groupes marginalisés à la direction des affaires publiques et aux autres domaines de la vie et leur représentation dans ces différents domaines; facilitation de leur accès à l’éducation et à l’emploi par des mesures spéciales; préservation de leurs valeurs culturelles, de leur langue et de leurs pratiques; et accès raisonnable de ces populations à l’eau, aux services de santé et aux infrastructures (art. 56, 54, al. d, 7, par. 3) a) et b)).

viii)Adoption de lois sur le transfert de terres domaniales à des communautés identifiées suivant des critères ethniques, culturels ou autres (art. 63).

ix)Adoption de lois sur l’enregistrement, le fonctionnement et le financement des partis politiques imposant à tous les partis politiques l’obligation de respecter le droit de chacun, y compris des minorités et des groupes marginalisés, de participer à la vie politique, d’assurer l’égalité et le traitement équitable des hommes et des femmes, et leur interdisant d’exercer une quelconque discrimination fondée sur la religion, la langue, la race, l’origine ethnique, le sexe ou l’origine régionale ou d’inciter à la haine pour l’un ou l’autre de ces motifs (art. 92).

x)Adoption de lois visant à promouvoir la représentation des femmes, des personnes handicapées, des jeunes, des minorités ethniques et autres et des communautés marginalisées au Parlement et dans les assemblées de comtés (art. 100).

xi)Répartition équitable du revenu entre le Gouvernement central et les autorités locales en fonction notamment des disparités économiques qui existent entre les comtés et au sein d’un même comté, et adoption de mesures pour remédier à ces inégalités; mise en œuvre de mesures en faveur des régions et des groupes défavorisés (art. 202 et 203).

xii)Création du Fonds pour l’égalité (art. 204). Ce fonds servira exclusivement à financer les travaux nécessaires pour assurer aux régions marginalisées des services de base − approvisionnement en eau, routes, établissements de santé et électricité  − d’une qualité équivalente à celle des services fournis dans le reste du pays.