Observations finales relatives au sixième rapport périodique de la Lituanie *

Le Comité a examiné le sixième rapport périodique de la Lituanie (CEDAW/C/LTU/6) à ses 1734e et 1735e séances (voir CEDAW/C/SR.1734 et CEDAW/C/SR.1735), tenues le 31 octobre 2019. La liste des points et questions soulevés par le groupe de travail d’avant-session figure dans le document CEDAW/C/LTU/Q/6 et les réponses de la Lituanie dans le document CEDAW/C/LTU/Q/6/Add.1.

A.Introduction

Le Comité accueille avec satisfaction le sixième rapport périodique de l’État partie. Il le remercie également pour son rapport de suivi (CEDAW/C/LTU/CO/5/Add.1) et ses réponses écrites à la liste de points et questions soulevés par le groupe de travail d’avant-session, ainsi que pour l’exposé de la délégation et les éclaircissements supplémentaires donnés en réponse aux questions posées oralement par le Comité durant l’échange de vues.

Le Comité félicite l’État partie pour sa délégation de haut niveau, dirigée par le Vice‑Ministre lituanien de la sécurité sociale et du travail, Eitvydas Bingelis, et comprenant le Représentant permanent de la Lituanie auprès de l’Office des Nations Unies et d’autres organisations internationales à Genève, Andrius Krivas, des représentantes et représentants du Ministère des affaires étrangères, du Ministère de la sécurité sociale et du travail, du Ministère de la santé, du Ministère de la justice, du Ministère de l’intérieur, du Bureau de la police criminelle, de l’Inspection nationale du travail et de l’Agence nationale de l’éducation, un membre de la Commission des droits de l’homme du Seimas (Parlement) et des représentantes et représentants de la Mission permanente de la Lituanie auprès de l’Office des Nations Unies et des autres organisations internationales à Genève.

B.Aspects positifs

Le Comité salue les progrès accomplis, depuis l’examen en 2014 du cinquième rapport périodique de l’État partie (CEDAW/C/LTU/5), dans le domaine de la réforme législative, en particulier l’adoption des modifications suivantes :

a)Modifications de la loi sur l’égalité de traitement et de la loi sur l’égalité des chances entre les femmes et les hommes :

i)Confiant à la Médiatrice pour l’égalité des chances le suivi de l’application de la Convention relative aux droits des personnes handicapées, notamment en ce qui concerne les femmes et les filles handicapées, en 2019 ;

ii)Protégeant contre le harcèlement sexuel non seulement les employé(e)s sous contrat à durée déterminée et les fonctionnaires, mais aussi les demandeurs et demandeuses d’emploi, en 2017 ;

iii)Précisant que la discrimination à l’égard des femmes pour cause de grossesse ou de maternité constitue aussi une forme de discrimination et que, outre le harcèlement sexuel, toute forme de harcèlement est interdite sur le lieu de travail, en 2016 ;

iv)Exigeant des institutions de l’État, y compris au niveau municipal, qu’elles adoptent, dans des documents de planification stratégique ou des plans d’action stratégiques, des mesures visant à assurer l’égalité des chances pour les femmes et les hommes, et à prévenir et combattre le harcèlement sexuel dans les écoles, dans les établissements d’enseignement supérieur et sur le lieu de travail, en 2014 ;

b)Modifications du Code pénal :

i)Érigeant en infraction pénale les actes de discrimination ou d’incitation à la haine fondés, entre autres, sur le sexe, le genre ou l’orientation sexuelle, en 2017 ;

ii)Prévoyant des mesures de protection temporaire dans les cas de violence familiale, notamment la possibilité d’obliger l’auteur à résider séparément de la victime et à ne pas s’en approcher, en 2015 ;

c)Modifications du Code de procédure pénale supprimant l’obligation de se porter partie civile pour les victimes de certaines infractions, de sorte que les femmes victimes de violence fondée sur le genre, y compris de violence familiale, ne soient plus obligées de témoigner au procès pénal correspondant, en 2017 ;

d)Modifications de la loi sur la protection contre la violence familiale visant à améliorer la coordination interinstitutions, la formation multidisciplinaire et la protection des victimes avant l’ouverture d’une enquête préliminaire, en 2016 ;

e)Modifications des dispositions de la loi sur l’approbation, l’entrée en vigueur et l’application du Code des infractions administratives, visant à les harmoniser avec les modifications de la loi sur l’égalité de traitement et de la loi sur l’égalité des chances entre les femmes et les hommes, en 2016.

Le Comité applaudit l’action menée par l’État partie pour améliorer son cadre institutionnel et politique en vue d’accélérer l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et de promouvoir l’égalité des genres, notamment l’adoption des textes suivants :

a)Le plan de mise en œuvre pour la période 2018‑2021 du programme national sur l’égalité des chances entre les femmes et les hommes pour la période 2015‑2021, qui prévoit, entre autres, le financement partiel de projets d’organisations de la société civile éligibles qui œuvrent pour la promotion de l’égalité des femmes et des hommes, ainsi que des mesures visant à éliminer les stéréotypes dans le système éducatif, en 2018 ;

b)Les modifications du plan de mise en œuvre du programme national de prévention de la violence domestique et d’assistance aux victimes 2014‑2020, visant à ne pas aller à l’encontre de l’objet et du but de la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (Convention d’Istanbul), que l’État partie a signée mais pas encore ratifiée, en 2018 ;

c)Les compléments au plan de développement de la base de données d’indicateurs en vue de la publication d’indicateurs statistiques plus détaillés par Statistiques-Lituanie, en 2017 ;

d)Le programme de développement de la sécurité publique pour la période 2015‑2025 et le plan d’action interinstitutionnel pour 2016 y relatif, visant à lutter efficacement contre la traite, notamment des femmes et des filles, et le module de formation spécial du programme sur la prévention de la traite et les enquêtes concernant ces actes, en 2017;

e)Le projet intitulé « Code de réussite des municipalités – Égalité des genres », qui vise à réduire systématiquement les inégalités de genre en ce qui concerne toutes les questions de la compétence des municipalités, en 2016 ;

f)Le plan de lutte contre la traite des êtres humains pour la période 2017‑2019, en 2016.

C.Objectifs de développement durable

Le Comité se félicite du soutien apporté par la communauté internationale aux objectifs de développement durable et appelle au respect de l ’ égalité des genres en droit et dans les faits, conformément aux dispositions de la Convention, dans tous les aspects de la mise en œuvre du Programme de développement durable à l ’ horizon 2030. Il souligne l ’ importance de l ’ objectif 5 et de la prise en compte systématique des principes d ’ égalité et de non-discrimination dans la réalisation des 17 objectifs. Il encourage vivement l ’ État partie à reconnaître le rôle moteur des femmes dans le développement durable du pays et à adopter des politiques et des stratégies en conséquence.

D.Parlement

Le Comité souligne le rôle essentiel du pouvoir législatif s ’ agissant de garantir la pleine mise en œuvre de la Convention (voir A/65/38 , deuxième partie, annexe VI). Il invite le Seimas à prendre, dans le cadre de son mandat, les mesures nécessaires pour mettre en œuvre les présentes observations finales avant la soumission du prochain rapport périodique en application de la Convention.

E.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Visibilité de la Convention, du Protocole facultatif s’y rapportant et des recommandations générales du Comité

Le Comité se félicite que l’État partie ait l’intention d’élaborer un plan d’action distinct pour la mise en œuvre des présentes observations finales. Il reste néanmoins préoccupé par :

a)Le manque de données concernant les affaires pour lesquelles la Convention a été invoquée dans les procédures judiciaires ;

b)La méconnaissance parmi la population de la Convention en général, des recommandations générales du Comité et de sa jurisprudence au titre du Protocole facultatif ;

c)Le caractère non systématique des activités de sensibilisation et de formation concernant la mise en œuvre de la Convention.

Rappelant ses recommandations antérieures (voir CEDAW/C/LTU/CO/5 , par. 9), le Comité adresse à l ’ État partie les recommandations suivantes  :

a) Fournir dans son prochain rapport périodique des données détaillées sur le nombre d ’ affaires dans lesquelles la Convention aura été invoquée chaque année devant les tribunaux nationaux depuis la publication des présentes observations finales  ;

b) Diffuser et promouvoir la Convention, le Protocole facultatif, les observations finales et les recommandations générales du Comité ainsi que ses vues et recommandations concernant les communications présentées par des particuliers et les enquêtes menées au titre du Protocole facultatif, et sensibiliser les femmes et les hommes aux droits que leur confère la Convention et aux voies de recours juridiques dont ils disposent  ;

c) Étoffer les programmes de renforcement des capacités des juges, des procureurs, des policiers et des autres responsables de l ’ application des lois, ainsi que des avocats, dans ce domaine.

Définition de l’égalité et de la non‑discrimination

Le Comité reconnaît que l’État partie a amélioré le cadre législatif en vue d’assurer l’égalité entre les femmes et les hommes et d’interdire la discrimination fondée sur le genre, y compris la discrimination directe et la discrimination indirecte fondée sur divers motifs. Il note toutefois avec préoccupation les éléments suivants :

a)La loi sur l’égalité de traitement et la loi sur l’égalité des chances entre les femmes et les hommes ne s’appliquent pas dans les domaines de la famille et de la vie privée, dans lesquels de nombreuses femmes ont besoin d’une protection juridique ;

b)Aucune loi n’interdit spécifiquement expressément la discrimination croisée à l’égard des femmes, et les notions de genre et de sexe ne sont pas définies en droit ;

c)Il n’existe pas de loi interdisant la discrimination fondée sur la réassignation de genre, alors même que ce type de discrimination a été reconnue comme une discrimination fondée sur le sexe dans un certain nombre de décisions de justice.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ envisager l ’ adoption d ’ une législation complète sur l ’ égalité des genres et la non ‑ discrimination. Il recommande en outre à l ’ État partie  :

a) D ’ étendre le champ d ’ application de la législation contre la discrimination et pour l ’ égalité des chances aux questions relatives à la famille et à la vie privée  ;

b) D ’ adopter une législation protégeant explicitement les femmes contre la discrimination croisée et de définir juridiquement les notions de genre et de sexe  ;

c) De reconnaître explicitement dans la loi que la discrimination à l ’ égard des femmes fondée sur la réassignation de genre est une discrimination fondée sur le genre.

Accès à la justice et à des mécanismes juridiques de plainte

Le Comité se félicite de la réforme de l’aide judiciaire de 2019, qui prévoit une aide juridique de première ligne (hors procédures judiciaires) pour toutes les personnes vulnérables, y compris les femmes, et une aide juridique secondaire dans les procédures judiciaires pour toutes les victimes, notamment les victimes de violence fondée sur le genre, dont la violence sexuelle et familiale, et les victimes de crimes de haine, et ce quelle que soit leur situation financière. Toutefois, le Comité note qu’en 2018, le Bureau de la Médiatrice pour l’égalité des chances n’a reçu aucune plainte de femmes ou de filles handicapées et que le nombre total de plaintes pour discrimination fondée sur le sexe ou le genre est faible, notamment parce que le Bureau ne dispose pas d’antennes aux niveaux régional et local.

Compte tenu de sa recommandation générale n o 33 (2015) sur l ’ accès des femmes à la justice, le Comité recommande à l ’ État partie  :

a) D ’ assurer le plein accès à la justice pour les groupes vulnérables ou marginalisés, notamment les femmes appartenant à des minorités, les migrantes, les femmes des zones rurales et les femmes âgées, les femmes handicapées, les lesbiennes, les bisexuelles, les transgenres et les personnes intersexuées  ;

b) De sensibiliser les femmes aux voies de recours dont elles disposent pour faire valoir leurs droits en vertu de la Convention  ;

c) D ’ élargir le champ d ’ action du Bureau de la Médiatrice pour l ’ égalité des chances afin de faciliter l ’ accès à la justice pour toutes les femmes aux niveaux régional et local.

Mécanisme national de promotion des femmes

Le Comité se félicite de l’augmentation constante du financement des organisations non gouvernementales qui promeuvent l’égalité des genres et les droits des femmes. Il applaudit également les amendements au décret portant création de la Commission sur l’égalité des chances pour les femmes et les hommes, qui prévoient, entre autres, la participation de représentantes ou représentants de l’État d’un niveau au moins égal à celui de Vice-Ministre. Le Comité est néanmoins préoccupé par les points suivants :

a)La Commission, en tant qu’organe de suivi et de contrôle, participe aussi directement à l’élaboration et à l’application du plan de mise en œuvre pour la période 2018‑2021 du programme national sur l’égalité des chances entre les femmes et les hommes pour la période 2015‑2021 ;

b)Le mandat de la Médiatrice pour l’égalité des chances a été transformé en mandat non genré ;

c)L’établissement des budgets et l’affectation des crédits budgétaires ne tiennent pas compte de la nécessité de promouvoir l’égalité des genres.

Le Comité recommande à l ’ État partie  :

a) D ’ adopter sans tarder les amendements au décret portant création de la Commission sur l ’ égalité des chances pour les femmes et les hommes et de préciser le mandat de celle-ci afin d ’ éviter toute confusion concernant ses fonctions de contrôle et d ’ élaboration des politiques  ;

b) De prendre des mesures pour revenir sur l ’ inscription de la neutralité de genre dans le mandat du Médiateur pour l ’ égalité des chances et de créer une unité spécialisée tenant compte des questions de genre pour mieux protéger les droits des femmes et des filles et promouvoir l ’ égalité des genres  ;

c) D ’ établir des budgets tenant compte de la nécessité de promouvoir l ’ égalité des genres et prévoyant des crédits particuliers pour l ’ application des politiques, stratégies et programmes relatifs à l ’ égalité des genres et à la promotion des femmes dans toutes les régions de l ’ État partie.

Institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme

Le Comité se félicite que le Bureau du Médiateur du Seimas ait obtenu, en 2017, le statut d’accréditation A auprès de l’Alliance globale des institutions nationales des droits de l’homme pour sa conformité avec les principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris). Cependant, il est préoccupé par les éléments suivants :

a)Le Bureau du Médiateur du Seimas n’a que des attributions limitées en ce qui concerne l’examen des plaintes déposées par des femmes, en particulier celles concernant la violence de genre, y compris dans la sphère privée ;

b)Le Bureau du Médiateur du Seimas est sous‑financé.

Le Comité recommande à l ’ État partie  :

a) D ’ élargir le mandat du Médiateur du Seimas pour qu ’ il puisse traiter les plaintes déposées par des femmes, y compris pour des chefs liés à la sphère privée, et formuler des conclusions et des recommandations faisant autorité à ce sujet  ;

b) D ’ augmenter les ressources humaines, techniques et financières allouées au Bureau du Médiateur du Seimas pour lui permettre de s ’ acquitter efficacement de son mandat concernant la promotion et la protection des droits des femmes.

Mesures temporaires spéciales

Le Comité demeure préoccupé de constater que l’État partie n’a pas adopté de mesures temporaires spéciales pour accélérer l’instauration d’une égalité réelle entre les femmes et les hommes, alors même qu’il s’agit là d’un moyen reconnu de remédier aux déséquilibres historiques entre les genres et aux problèmes de discrimination croisée dans l’accès aux droits. Il prend note de l’explication donnée par l’État partie, qui avance que, selon la jurisprudence de sa Cour constitutionnelle, toute restriction des droits de la personne doit s’appuyer sur un fondement juridique, alors que la version actuelle de la loi sur l’égalité des chances entre les femmes et les hommes ne constitue pas un fondement juridique suffisant pour l’adoption de mesures temporaires spéciales, lesquelles nécessitent des dispositions législatives particulières.

Rappelant ses recommandations antérieures (voir CEDAW/C/LTU/CO/5 , par. 9), le Comité adresse à l ’ État partie les recommandations suivantes  :

a) Supprimer les obstacles législatifs à l ’ adoption et à l ’ application de mesures temporaires spéciales, et assurer et encourager le recours à des modalités administratives, fonctionnelles, politiques et programmatiques propres à promouvoir l ’ égalité réelle des femmes et des hommes, conformément aux obligations que lui impose la Convention  ;

b) Sensibiliser les parlementaires, les décideurs politiques et les autres acteurs étatiques et non étatiques, y compris le secteur privé, à l ’ utilisation de mesures temporaires spéciales en tant qu ’ outil essentiel pour lutter contre la discrimination dans tous les domaines et réaliser l ’ égalité réelle  ;

c) Adopter des mesures temporaires spéciales pour promouvoir l ’ égalité réelle des femmes et des hommes dans tous les domaines où les femmes sont sous ‑ représentées ou défavorisées, comme la participation à la vie politique et publique, l ’ éducation et l ’ emploi, et mettre en place un mécanisme de suivi de leur application, conformément au paragraphe 1 de l ’ article 4 de la Convention et à la recommandation générale n o 25 (2004) du Comité sur les mesures temporaires spéciales.

Stéréotypes

Le Comité se félicite que la Médiatrice pour l’égalité des chances ait passé en revue les manuels scolaires et les autres supports pédagogiques, constatant à cette occasion que les stéréotypes sexistes qui y sont véhiculés ont une incidence sur les choix professionnels et les perspectives de carrière des filles et favorisent l’inégalité salariale. Il note que l’État partie a l’intention de donner suite aux recommandations de la Médiatrice. Il se félicite également que des ateliers aient été organisés à l’intention des auteurs et des réviseurs de manuels scolaires et d’outils de formation, que les enseignantes et enseignants aient été formés à la lutte contre les stéréotypes sexistes et que des mesures visant à lutter contre les discours de haine fondés sur le genre aient été prises, notamment pour ce qui est des médias sociaux et d’Internet. Toutefois, le Comité demeure préoccupé par la persistance de stéréotypes sexistes et discriminatoires et de messages patriarcaux et sexistes, ainsi que par les appels au respect des valeurs ancestrales et de la répartition traditionnelle des rôles, relayés y compris dans les médias, comme le note l’enquête menée à ce sujet par la Médiatrice pour l’égalité des chances ; il craint en outre que la loi sur la consolidation des liens familiaux ne renforce les stéréotypes discriminatoires concernant les rôles et responsabilités des femmes et des hommes dans la famille et la société.

Le Comité adresse à l ’ État partie les recommandations suivantes  :

a) Renforcer l ’ application des mesures de lutte contre les stéréotypes dans le système éducatif, comme prévu dans le plan de mise en œuvre pour la période 2018-2021 du programme national sur l ’ égalité des chances entre les femmes et les hommes pour la période 2015-2021, élaborer et mettre en œuvre un plan d ’ action distinct pour donner suite à l ’ examen du matériel scolaire par la Médiatrice pour l ’ égalité des chances et faire participer des spécialistes des questions de genre et des représentantes et représentants des organisations non gouvernementales de femmes aux évaluations et réformes des programmes scolaires  ;

b) Mieux appliquer le mandat conféré à la Médiatrice pour l ’ égalité des chances par la loi sur l ’ égalité de traitement et consistant à modifier les comportements sociaux et culturels des hommes et des femmes afin d ’ éliminer les stéréotypes discriminatoires relatifs aux rôles et responsabilités des femmes et des hommes dans la famille et dans la société  ;

c) Sensibiliser les médias et renforcer leurs capacités, notamment afin de lutter contre les stéréotypes sexistes dans la publicité, la couverture médiatique, les médias sociaux, les programmes de radio et de télévision, en renforçant la coopération entre le Médiateur pour l ’ éthique des médias et la Médiatrice pour l ’ égalité des chances à cet égard, et en associant les femmes, notamment les représentantes des organisations non gouvernementales de femmes, à l ’ évaluation et à l ’ élaboration du contenu des programmes de radio et de télévision, pour encourager les médias à présenter les femmes sous un jour positif, comme des participantes actives à la vie publique et privé  ;

d) Mener une étude évaluant l ’ effet de la loi sur la consolidation des liens familiaux sur l ’ enracinement des stéréotypes discriminatoires concernant les rôles et responsabilités des femmes et des hommes dans la famille et dans la société et fournir des informations sur les résultats de cette étude dans son prochain rapport périodique.

Violence à l’égard des femmes fondée sur le genre

Le Comité accueille avec satisfaction les mesures législatives adoptées par l’État partie pour lutter contre la violence à l’égard des femmes, notamment la violence sexuelle et la violence dans la famille, y compris celles qui sont inspirées par la Convention d’Istanbul, comme le projet de loi sur le harcèlement. Toutefois, le Comité note avec préoccupation :

a)Que la ratification de la Convention d’Istanbul, signée par l’État partie en 2013, est toujours à l’examen au Parlement ;

b)Que la loi portant modification de la loi sur la médiation conciliatrice dans les litiges civils risque de pénaliser une seconde fois les femmes et les filles ayant été victimes de violence sexiste ;

c)Que les autorités chargées des enquêtes traitent de manière inadéquate les affaires de violence à l’égard des femmes fondée sur le genre, en particulier de violence sexuelle ou familiale, en ne menant pas à bien les enquêtes ou en n’engageant pas de poursuites pénales ;

d)Qu’un policier ne peut demander des mesures restrictives ou des mesures de protection des victimes de violences familiales qu’après l’ouverture d’une enquête préliminaire et que l’application des mesures de protection et le contrôle de leur respect ne sont pas assurés, ce qui expose les femmes victimes de telles violences à de nouveaux risques ;

e)Qu’il n’existe pas de procédure civile distincte de protection des victimes de violence familiale ;

f)Que les centres d’assistance spécialisée pour les femmes victimes de violence de genre sont sous-financés et que le nombre de centres spécialisés dans les zones rurales est insuffisant.

Rappelant ses recommandations précédentes ( CEDAW/C/LTU/CO/5 , par. 23) et sa recommandation générale n o 35 (2017) sur la violence à l ’ égard des femmes fondée sur le genre, portant actualisation de la recommandation générale n o 19, le Comité recommande à l ’ État partie  :

a) D ’ accélérer la mise en conformité de la législation relative à la lutte contre la violence à l ’ égard des femmes fondée sur le genre vis-à-vis de la Convention, notamment en adoptant le projet de loi sur le harcèlement et en ratifiant la Convention d ’ Istanbul  ;

b) De donner la priorité aux poursuites pénales sur la réconciliation ou la médiation dans les procédures pénales relatives à des affaires de violence familiale, de vérifier si la nouvelle législation sur la réconciliation et la médiation a un effet négatif sur les femmes qui ont été victimes de violence familiale et de fournir des informations sur les résultats de cette évaluation dans son prochain rapport périodique  ;

c) De suivre et d ’ évaluer la réactivité des membres de la magistrature, des procureurs et de la police dans les affaires de violence de genre, y compris la violence sexuelle et la violence familiale, de mettre en place des activités obligatoires de renforcement des capacités des juges, des procureurs, des policiers et des autres membres des forces de l ’ ordre concernant l ’ application stricte des dispositions du droit pénal relatives à la violence à l ’ égard des femmes fondée sur le genre et les procédures d ’ enquête tenant compte des questions de genre et de poursuivre et de sanctionner effectivement les auteurs de toute forme de violence de genre  ;

d) D ’ abroger la disposition imposant qu ’ une enquête préliminaire soit ouverte avant que la police puisse demander des mesures restrictives ou des mesures de protection et de renforcer l ’ application de ces mesures pour protéger les femmes victimes de violence de genre, notamment en renforçant les capacités des juges, des procureurs et des policiers  ;

e) D ’ adopter une loi établissant une procédure civile distincte de protection des victimes de violence familiale  ;

f) D ’ allouer aux centres d ’ assistance spécialisée pour les femmes victimes de violence de genre un financement suffisant pour leur permettre de fonctionner convenablement et d ’ augmenter le nombre de centres spécialisés dans les zones rurales.

Traite et exploitation de la prostitution

Le Comité applaudit les efforts déployés par l’État partie pour lutter contre la traite des personnes, en particulier des femmes et des filles, y compris en s’appuyant sur la coopération internationale. En particulier, il se félicite de la création d’un poste de rapporteur national chargé de collecter et de publier des statistiques, ainsi que de la création d’une Association nationale contre la traite des êtres humains, organisation non gouvernementale chargée d’aider les victimes et de mobiliser des fonds pour les organisations de la société civile concernées. Il note que l’État partie a l’intention d’organiser une formation spécialisée à l’intention du personnel du Centre d’accueil pour les réfugiés et les demandeurs d’asile pour que les victimes de la traite, en particulier les filles et les garçons non accompagnés, soient détectées dès que possible et orientées vers les services appropriés, et d’adopter un nouveau plan d’action national pour la période 2020‑2023. Cependant, il est préoccupé par les points suivants :

a)Les victimes de la traite, y compris les femmes, ne sont pas suffisamment protégées pendant l’enquête et le procès, et les organismes publics compétents n’ont pas une connaissance et une compréhension suffisantes des indicateurs relatifs à la traite des enfants, notamment des filles ;

b)Les mécanismes de détection et d’orientation des victimes manquent de cohérence, en particulier dans les zones rurales ;

c)Les trafiquants ciblent de plus en plus les personnes au chômage ou issues de familles à faible revenu par le biais des médias sociaux et d’Internet ;

d)Il n’existe pas d’informations et de données exhaustives sur le nombre d’enquêtes diligentées, de poursuites engagées et de verdicts de culpabilité rendus contre des auteurs de traite, ainsi que sur les peines prononcées à leur encontre.

Rappelant ses recommandations antérieures (voir CEDAW/C/LTU/CO/5 , par. 27), le Comité adresse à l ’ État partie les recommandations suivantes  :

a) Poursuivre ses efforts pour renforcer la formation des juges, des procureurs, des policiers, des gardes-frontières, des travailleurs sociaux, des psychologues, des agents de protection de l ’ enfance et des spécialistes de l ’ enfance, notamment au niveau municipal, à tous les aspects de la traite des personnes, en particulier des femmes et des filles, en tenant compte des questions de genre  ;

b) Améliorer les procédures de détection précoce et d ’ orientation des victimes de la traite, en particulier les filles, vers les services appropriés, et renforcer les services de protection et d ’ appui aux victimes et aux témoins, y compris les soins médicaux, les conseils psychosociaux et les programmes de réadaptation et de réinsertion, indépendamment de la capacité ou de la volonté des victimes de coopérer avec les autorités chargées des poursuites  ;

c) Sensibiliser la population aux risques de la traite, y compris dans les écoles et au sein des familles, notamment aux risques de recrutement de personnes au chômage ou issues de familles à faible revenu par le biais des médias sociaux et d ’ Internet  ;

d) Poursuivre et punir effectivement les auteurs d ’ actes de traite et fournir des données statistiques pertinentes, ventilées par sexe, âge, origine nationale, emploi et statut social, dans son prochain rapport périodique.

Le Comité note que la demande de prostitution est passible de poursuites au titre du Code des infractions administratives. Toutefois, il est préoccupé par l’absence d’informations sur les mesures prises par l’État partie pour réduire la demande et par l’absence de programmes de soutien pour les femmes qui souhaitent sortir de la prostitution. Il regrette également le manque d’informations permettant de savoir si les femmes exploitées dans la prostitution sont reconnues comme victimes et si leur identité est protégée, y compris lorsqu’elles sont citées comme témoins dans des procédures pénales.

Le Comité recommande à l ’ État partie de mettre en place des programmes de soutien aux femmes qui souhaitent sortir de la prostitution, notamment en les aidant à trouver d ’ autres sources de revenus, de fournir dans son prochain rapport périodique des informations sur l ’ ampleur de la prostitution dans l ’ État partie et les mesures prises pour réduire la demande de prostitution, de dépénaliser la prostitution et de reconnaître comme victimes les femmes qui se prostituent, notamment en leur offrant une protection lorsqu ’ elles témoignent dans des procès pénaux.

Participation à la vie politique et à la vie publique

Le Comité constate avec satisfaction que les femmes sont largement représentées dans la fonction publique de l’État partie. Il note qu’au plus haut niveau de l’État, le pourcentage de femmes parlementaires est de 42 % et que le pourcentage de femmes élues au Parlement européen est passé à 27 %. Il prend note également des mesures adoptées par l’État partie pour promouvoir la participation des femmes à la vie politique, telles que l’organisation de manifestations sur la prise de responsabilité des femmes en tant que dirigeantes, les initiatives visant à assurer l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée et la promotion d’un environnement de travail favorable aux femmes. Toutefois, le Comité est préoccupé de constater que le Gouvernement ne compte qu’une seule femme sur 14 ministres et qu’un seul parti politique a mis en place des quotas volontaires de candidatures féminines aux récentes élections nationales. Enfin, le Comité prend note de l’explication de l’État partie selon laquelle les barrières qui empêchent l’accès des femmes à des postes de responsabilité dans la vie publique ont diminué, quoique pas aussi rapidement qu’on le souhaiterait.

Rappelant ses précédentes recommandations ( CEDAW/C/LTU/CO/5 , par. 29), le Comité recommande à l ’ État partie de redoubler d ’ efforts pour renforcer la participation des femmes à la vie politique et d ’ adopter des mesures temporaires spéciales, notamment des quotas de candidatures féminines à la tête des partis politiques et des municipalités, afin d ’ accroître la participation des femmes, en particulier les femmes des zones rurales, les femmes appartenant à des minorités ethniques et les femmes handicapées, à la vie politique et publique, y compris en ce qui concerne le niveau le plus élevé de la diplomatie, la représentation nationale ainsi que les municipalités, conformément à sa recommandation générale n o 23 (1997) sur les femmes dans la vie politique et publique.

Les femmes et la paix et la sécurité

Le Comité se félicite que l’État partie appartienne à un certain nombre de groupes d’amis informels sous les auspices de l’ONU. Il note que la Lituanie élabore actuellement son deuxième plan d’action national pour l’application du programme du Conseil de sécurité sur les femmes et la paix et la sécurité et que 3,5 % des Lituaniens participant aux opérations de maintien de la paix sont des femmes.

Le Comité recommande à l ’ État partie de fixer un calendrier précis pour la finalisation du deuxième plan d ’ action national pour l ’ application de la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité, en coopération avec les représentantes des organisations de femmes, et de veiller à prendre en considération toutes les priorités adoptées en ce qui concerne les femmes et la paix et la sécurité, telles qu ’ elles figurent dans les résolutions 1820 (2008) , 1888 (2009) , 1889 (2009) , 1960 (2010) , 2106 (2013) , 2122 (2013) , 2242 (2015) , 2467 (2019) et 2493 (2019) du Conseil de sécurité.

Nationalité

Le Comité se félicite de la diminution constante du nombre d’apatrides, y compris de femmes apatrides, dans l’État partie depuis 2012 et note que les Lituaniennes peuvent transmettre leur nationalité à leur mari étranger. Toutefois, il est préoccupé par la neutralité de genre dans la législation sur la nationalité et par le fait qu’aucun changement n’a été apporté à cette législation, contrairement à ce qui avait été recommandé précédemment.

Réitérant sa recommandation antérieure ( CEDAW/C/LTU/CO/5 , par. 31), le Comité encourage l ’ État partie à modifier sa législation afin de prévoir l ’ octroi automatique de la nationalité à tous les enfants nés en Lituanie, y compris les enfants roms, qui seraient apatrides autrement, et de mettre sa législation nationale en conformité avec la Convention de 1961 sur la réduction des cas d ’ apatridie. Il recommande à l ’ État partie de veiller à ce que le droit des femmes à la nationalité ne soit en aucune façon affecté par la neutralité de la législation sur la nationalité à l ’ égard des femmes, notamment en dispensant une formation sur la prise en compte des questions de genre et l ’ égalité des genres à tous les fonctionnaires travaillant sur cette question.

Éducation

Le Comité se félicite de la création, en 2019, de l’Agence nationale pour l’éducation, qui a également pour mandat de promouvoir l’égalité des genres et de lutter contre les stéréotypes sexistes, ainsi que du lancement du projet « Miser sur la qualité », qui vise à améliorer les résultats scolaires des élèves, notamment des filles. Il note le pourcentage élevé de chercheuses dans les universités et le nombre croissant d’étudiantes qui s’inscrivent dans des domaines d’études auparavant à prédominance masculine. Toutefois, il demeure préoccupé par le faible nombre de femmes occupant des postes de direction dans le monde universitaire. Il regrette le manque d’informations sur les efforts visant à améliorer l’inclusion scolaire des filles appartenant à des groupes minoritaires, en particulier les filles roms, et des filles handicapées, ainsi que sur l’effet de la réforme de l’enseignement supérieur menée en 2017 sur l’adéquation de la formation des femmes aux besoins du marché du travail, notamment la nécessité de restructurer les programmes de formation professionnelle des femmes.

Rappelant ses recommandations précédentes ( CEDAW/C/LTU/CO/5 , par. 33) et sa recommandation générale n o 36 (2017) sur le droit des filles et des femmes à l ’ éducation, le Comité recommande à l ’ État partie de sensibiliser les filles et les garçons, les parents, les enseignants et les dirigeants politiques à l ’ importance de l ’ éducation des filles à tous les niveaux pour leur autonomisation, ainsi que  :

a) De continuer à prendre des mesures pour éliminer les stéréotypes sexistes discriminatoires et les obstacles structurels qui peuvent dissuader les filles de choisir des domaines d ’ études et des parcours professionnels non traditionnels à tous les niveaux d ’ enseignement  ;

b) D ’ envisager d ’ adopter des mesures temporaires spéciales, telles que le recrutement et la promotion à titre prioritaire de femmes, afin d ’ accélérer leur nomination à des postes de direction dans le monde universitaire  ;

c) De renforcer les mesures visant à améliorer l ’ intégration des filles et des garçons roms, ainsi que des filles et des garçons handicapés, dans le système éducatif ordinaire, plutôt que de les placer dans des écoles et des classes pour enfants ayant des besoins spéciaux, et de fournir des informations ventilées par sexe sur le taux de fréquentation scolaire et le taux d ’ abandon des enfants roms et des enfants handicapés dans son prochain rapport périodique  ;

d) De fournir dans son prochain rapport périodique des informations sur les incidences de la réforme de l ’ enseignement supérieur effectuée en 2017 sur l ’ adéquation de la formation des femmes aux besoins du marché du travail.

Emploi

Le Comité se félicite de constater que le taux d’emploi des femmes dans l’État partie est le plus élevé de l’Union européenne et qu’il est presque égal au taux d’emploi des hommes, et note avec satisfaction l’introduction d’un plancher d’assurance sociale qui prévoit notamment que les femmes qui travaillent, y compris à temps partiel, doivent être socialement assurées au niveau du salaire minimum, ainsi que l’inversion de la charge de la preuve, qui impose à l’employeur de prouver qu’il respecte le principe de l’égalité de rémunération pour un travail de valeur égale. Il relève qu’il est prévu de faire passer l’âge de la retraite à 65 ans pour les femmes et les hommes en 2026 et prend note des mesures visant à promouvoir la participation des femmes à des postes de direction et l’entrepreneuriat des femmes. Il demeure toutefois préoccupé par :

a)L’écart de rémunération qui persiste entre les femmes et les hommes et le fait que cet écart se traduit par une baisse des prestations de retraite et des salaires dans les professions traditionnellement à prédominance féminine ;

b)La ségrégation professionnelle verticale et horizontale et les difficultés d’intégration des femmes migrantes, des femmes roms, des femmes des zones rurales, des femmes âgées et des femmes handicapées sur le marché du travail ;

c)L’absence de mécanisme permettant de contrôler la qualité des plans d’égalité des chances que les entreprises publiques et privées ont l’obligation de mettre en place en application du Code du travail révisé.

Rappelant ses recommandations antérieures (voir CEDAW/C/LTU/CO/5 , par. 35), le Comité adresse à l ’ État partie les recommandations suivantes  :

a) Faire respecter le principe de l ’ égalité de rémunération pour un travail de valeur égale, afin de réduire et, à terme, de combler l ’ écart de rémunération entre les sexes, en réexaminant régulièrement les salaires dans les secteurs où les femmes sont les plus nombreuses, en procédant régulièrement à des inspections du travail, en appliquant des méthodes non sexistes de classification des postes et d ’ évaluation des emplois et en réalisant régulièrement des enquêtes sur les rémunérations et des campagnes de sensibilisation, en coopération avec les associations d ’ employeurs et les syndicats  ;

b) Renforcer les mesures visant à lutter contre la ségrégation professionnelle horizontale et verticale et à améliorer l ’ accès des femmes au marché du travail, y compris les femmes ayant atteint l ’ âge de la retraite et les groupes défavorisés de femmes comme les femmes migrantes, les femmes roms, les femmes des zones rurales, les femmes âgées et les femmes handicapées, notamment dans le cadre du plan d ’ action pour l ’ intégration des Roms dans la société lituanienne pour la période 2015-2020, qui vise aussi à l ’ émancipation économique des femmes roms  ;

c) Mettre en place des mécanismes efficaces de suivi et de responsabilité pour que les entreprises publiques et privées s ’ acquittent dûment de l ’ obligation que le Code du travail leur impose d ’ élaborer des plans d ’ égalité des chances  ;

d) Ratifier la Convention de 2011 sur les travailleuses et travailleurs domestiques (n o 189) de l ’ Organisation internationale du Travail.

Santé

Le Comité se félicite que les 48 dispensaires créés sur le territoire de l’État partie en collaboration avec les organisations non gouvernementales, les communautés et les familles promeuvent des modes de vie sains pour les femmes et les filles et traitent des questions sanitaires particulières dans les municipalités, notamment la prévention du suicide. Il se félicite également du programme de vaccination contre le papillomavirus humain lancé en 2016 à destination des filles de 11 ans, bien que le taux de participation reste faible. Il note que l’État partie prévoit de mettre à jour les réglementations ministérielles sur l’interruption de grossesse en 2020. Il relève également la mise en œuvre du programme général d’éducation sanitaire, sexuelle et familiale pour la période 2017-2019 et note que le remboursement de certains types de contraceptifs pour les filles et les femmes âgées de 15 à 19 ans est actuellement examiné par la Commission du remboursement du Ministère de la santé. Le Comité est néanmoins préoccupé de constater que, malgré l’existence d’un système d’assurance maladie obligatoire, l’accès effectif aux services de santé de base, y compris aux services de santé sexuelle et reproductive et aux contraceptifs modernes, demeure limité pour les filles et les jeunes femmes, y compris les filles et les femmes des zones rurales, ainsi que les filles et les femmes roms, et que l’accès à des soins obstétriques de qualité reste également limité pour les femmes sans papiers, qui ne sont pas éligibles à l’assurance maladie obligatoire dans l’État partie.

Le Comité adresse à l ’ État partie les recommandations suivantes  :

a) Veiller à ce que l ’ éducation à la santé et aux droits en matière de sexualité et de procréation à tous les niveaux de l ’ éducation tienne compte des questions de genre, soit adaptée à l ’ âge des enfants et favorise un comportement sexuel responsable, en vue de prévenir les grossesses précoces et les maladies sexuellement transmissibles  ;

b) Garantir l ’ accès de toutes les filles et jeunes femmes à des services de santé sexuelle et reproductive et à des contraceptifs modernes et abordables, en particulier dans les zones rurales  ;

c) Garantir aux femmes migrantes sans papiers un accès abordable, voire gratuit si nécessaire, aux soins obstétricaux, y compris les soins anténatals  ;

d) Réglementer l ’ interruption de grossesse par voie législative plutôt que par règlement ministériel, légaliser l ’ avortement en cas de viol, d ’ inceste, de menaces à la vie ou à la santé de la femme enceinte ou d ’ atteinte fœtale grave, dépénaliser l ’ avortement dans tous les autres cas et donner aux femmes l ’ accès à des services sûrs en cas d ’ avortement et après avortement, en particulier en cas de complications dues à un avortement non médicalisé.

Avantages économiques et sociaux et autonomisation économique des femmes

Le Comité se félicite de l’adoption, en juin 2019, de l’ensemble de services essentiels destinés aux familles, qui vise à renforcer le statut socioéconomique des femmes et à fournir des prestations sociales supplémentaires aux mères de cinq enfants ou plus. En outre, il prend note avec satisfaction des plans visant à rendre les deux premiers mois de congé parental incessibles pour les deux parents, qu’il s’agisse du congé maternel ou du congé paternel, apprécie que ce type de congé soit également ouvert aux grands-parents et se réjouit de l’augmentation rapide du nombre de pères ayant recours au congé paternel ou au congé parental. Toutefois, il est préoccupé de constater que les gains découlant du développement économique rapide de l’État partie n’ont pas été partagés également, en particulier avec les femmes et les filles appartenant à des groupes minoritaires, les femmes des zones rurales, les femmes âgées et les femmes handicapées, et par l’effet négatif du déclin démographique et du vieillissement de la population sur la protection sociale des femmes, en particulier dans les zones rurales.

Le Comité adresse à l ’ État partie les recommandations suivantes  :

a) Reconnaître le travail domestique non rémunéré des femmes, y compris les soins aux enfants et aux autres personnes à charge, en particulier en milieu rural, et l ’ imputer sur leurs droits à pension et leurs prestations sociales, et poursuivre ses efforts pour permettre aux femmes de concilier responsabilités familiales et professionnelles, notamment en mettant en place des structures d ’ accueil pour enfants abordables et accessibles en nombre suffisant, notamment dans les zones rurales  ;

b) Élaborer des politiques et des programmes pour que les femmes bénéficient du développement économique de l ’ État partie et pour atténuer les effets du déclin démographique et du vieillissement de la population sur les pensions et les prestations sociales des femmes, en particulier des femmes âgées  ;

c) Concevoir des mesures spécifiques pour tirer parti des possibilités d ’ autonomisation économique des femmes des zones rurales, notamment en créant davantage d ’ emplois en dehors du secteur agricole, qui reste prédominant, et en améliorant l ’ accès à l ’ enseignement supérieur, aux technologies de l ’ information et des communications et aux transports subventionnés, et veiller à ce que les femmes participent à la conception de ces stratégies et programmes en les considérant non pas seulement comme des victimes ou des bénéficiaires, mais comme des personnes aptes à participer activement à la formulation et à l ’ application des politiques, conformément à la recommandation générale n o 34 (2016) du Comité sur les droits des femmes rurales  ;

d) Accélérer la ratification de la Convention de 1952 concernant la sécurité sociale (norme minimum) (n o 102) de l ’ Organisation internationale du Travail.

Femmes handicapées

Le Comité note avec satisfaction l’existence d’un quota obligatoire pour l’emploi des personnes handicapées, y compris les femmes, dans les entreprises sociales et leur consultation dans les processus législatifs. Cependant, il est préoccupé par les points suivants :

a)Des informations indiquent qu’il arrive que des femmes handicapées soient victimes d’avortement forcé ou de stérilisation forcée, stérilisées sans leur consentement, se voient retirer leur bébé, subissent des atteintes sexuelles perpétrées par leurs soignants ou d’autres résidents dans des établissements de soins, que leurs besoins médicaux et psychologiques soient négligés ou qu’elles soient placées sans leur consentement dans des établissements psychiatriques ou des foyers sociaux ;

b)Il n’existe aucun dispositif de protection spéciale pour les femmes handicapées (y compris celles qui ont une déficience intellectuelle ou un handicap psychosocial) qui sont victimes de violence à l’égard des femmes fondée sur le genre, en particulier de violence sexuelle, et aucun service ne leur est spécialement consacré ;

c)Les femmes handicapées doivent faire face à de multiples obstacles pour accéder à l’emploi ;

d)Plus de 4 500 femmes handicapées dans l’État partie, y compris des femmes souffrant de déficiences intellectuelles et psychosociales, sont en situation d’incapacité juridique ou ont une capacité juridique limitée, ce qui les empêche de participer aux élections, les prive de tout droit au mariage et leur retire la garde de leurs enfants.

Rappelant ses recommandations antérieures [ voir CEDAW/C/LTU/CO/5 , par. 39 d) ] , le Comité adresse à l ’ État partie les recommandations suivantes  :

a) Renforcer les mesures visant à faire en sorte que les femmes handicapées ne soient pas victimes de la violence de genre  ;

b) Veiller à ce que les femmes et les filles handicapées ne fassent pas l ’ objet de traitements ou de procédures médicales sans leur consentement préalable, libre et éclairé, et faire que toute personne qui effectuerait sur une femme ou une fille handicapée un acte médical inutile sans le consentement de l ’ intéressée ait à répondre de ses actes  ;

c) Garantir que les femmes handicapées aient le droit exclusif de déterminer librement et en toute responsabilité le nombre et l ’ échelonnement des naissances  ;

d) S ’ assurer que les femmes et les filles handicapées aient le droit d ’ exercer un contrôle sur toutes les questions liées à leur sexualité, y compris leur santé sexuelle et procréative, et d ’ en décider librement et en toute connaissance de cause, sans aucune contrainte, discrimination et violence  ;

e) Renforcer les mesures visant à garantir un meilleur accès à l ’ emploi pour les femmes et les filles handicapées  ;

f) Modifier le Code Civil pour abroger toute disposition relative à l ’ incapacité juridique des personnes handicapées, y compris les femmes handicapées.

Mariage et rapports familiaux

Le Comité demeure préoccupé par ce qui suit :

a)Les modèles familiaux non traditionnels ne sont pas reconnus dans l’État partie ;

b)À la suite d’une évaluation du Service public de protection des droits de l’enfant et de l’adoption, les tribunaux peuvent réduire l’âge minimum du consentement au mariage de 18 ans à 16 ans, voire à un âge encore plus bas dans des cas exceptionnels, lorsque des circonstances importantes l’exigent, notamment lorsque la fille est enceinte ; dans la pratique, les mariages d’enfants concernent beaucoup plus les filles, en particulier les filles roms. Le Comité prend note de l’explication de l’État partie selon laquelle il n’a pas l’intention de relever l’âge minimum du mariage à 18 ans sans aucune exception.

Rappelant ses recommandations antérieures (voir CEDAW/C/LTU/CO/5 , par. 41), le Comité adresse à l ’ État partie les recommandations suivantes  :

a) Reconnaître les modèles familiaux non traditionnels autres que le mariage, notamment les unions homosexuelles et les unions libres, conformément à ses recommandations générales n o 21 (1994) sur l ’ égalité dans le mariage et les rapports familiaux et n o 29 (2013) sur les conséquences économiques du mariage et des liens familiaux et de leur dissolution  ;

b) Modifier le Code civil pour porter l ’ âge minimum du mariage à 18 ans, tant pour les femmes que pour les hommes, sans exception possible.

Collecte et analyse de données

Le Comité se félicite du projet conjoint entre la Médiatrice pour l’égalité des chances et Statistiques‑Lituanie visant à produire davantage de données ventilées par sexe et par genre et à publier une carte statistique de l’égalité des genres et note que Statistiques‑Lituanie a l’intention d’améliorer son portail statistique en y ajoutant une nouvelle rubrique consacrée à l’égalité des genres. Le Comité est toutefois préoccupé par le fait que les données ventilées par sexe et par âge restent trop rares en ce qui concerne les femmes et les filles rurales.

Le Comité recommande à Statistiques - Lituanie d ’ améliorer sans tarder son portail de statistiques officielles en y ajoutant une nouvelle rubrique consacrée à l ’ égalité des genres et d ’ inclure dans son prochain rapport périodique des données détaillées ventilées par sexe et par âge, notamment en ce qui concerne les femmes et les filles rurales.

Déclaration et Programme d’action de Beijing

Le Comité invite l ’ État partie à s ’ appuyer sur la Déclaration et le Programme d ’ action de Beijing et à continuer d ’ évaluer l ’ application de la Convention dans le contexte de l ’ examen, après 25 ans, de la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme en vue de parvenir à une réelle égalité entre hommes et femmes.

Diffusion

Le Comité prie l ’ État partie de veiller à diffuser rapidement les présentes observations finales, dans la langue officielle de l ’ État partie, aux institutions publiques concernées à tous les niveaux (national, régional et local), en particulier au Gouvernement, aux ministères, au Seimas et au corps judiciaire, afin d ’ en permettre la pleine application.

Ratification d’autres instruments

Le Comité souligne que l ’ adhésion de l ’ État partie aux neuf principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme contribuerait à promouvoir l ’ exercice effectif des droits individuels et libertés fondamentales par les femmes dans tous les aspects de la vie. Il l ’ encourage donc à ratifier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, à laquelle il n ’ est pas encore partie.

Suite donnée aux observations finales

Le Comité prie l ’ État partie de lui communiquer par écrit, dans un délai de deux ans, des informations sur les mesures qu ’ il aura prises pour appliquer les recommandations énoncées aux paragraphes 23 c) et e), 37 b) et 43 d) ci ‑ dessus.

Établissement du prochain rapport

Le Comité invite l ’ État partie à soumettre son septième rapport périodique en novembre 2023, comme prévu. Il devra être remis dans les délais et porter sur toute la période se terminant au moment de sa soumission.

Le Comité invite l ’ État partie à se conformer aux directives harmonisées pour l ’ établissement de rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme, dont le document de base commun et les rapports correspondant à chaque instrument (voir HRI/GEN/2/Rev.6 , chap. I).