Quarante-quatrième session

20 juillet-7 août 2009

Observations finales du Comité pour l’éliminationde la discrimination à l’égard des femmes

Libéria

Le Comité a examiné le rapport unique valant rapport initial et deuxième à sixième rapports périodiques du Liberia à ses 901e et 902e séances tenues le 31 juillet 2009. La liste des problèmes et questions soulevés par le Comité figure dans le document CEDAW/C/LBR/Q/6 et les réponses du Gouvernement libérien ont été publiées sous la cote CEDAW/C/LBR/Q/6/Add.1.

Introduction

Le Comité félicite l’État partie d’avoir ratifié la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes sans réserve et d’avoir accepté l’amendement au paragraphe 1 de l’article 20 de la Convention concernant le calendrier des réunions du Comité. Le Comité félicite l’État partie d’avoir soumis un rapport combiné valant rapport initial et deuxième à sixième rapports périodiques qui est conforme aux directives du Comité gouvernant l’établissement des rapports et qui brosse un tableau honnête de la situation des femmes au Liberia. Toutefois, il regrette que le rapport ait été présenté tardivement et qu’il ne se réfère pas aux recommandations générales du Comité. Le Comité remercie également l’État partie de ses réponses écrites à la liste des problèmes et questions suscités par le Groupe de travail présession ainsi que de l’exposé et des réponses orales aux questions posées par le Comité.

Le Comité félicite l’État partie d’avoir envoyé une délégation de haut niveau dirigée par la Ministre de l’intégration des femmes au développement et incluant le Ministre de l’éducation, les vice-ministres de la santé et de l’intégration des femmes au développement, et d’autres représentants de ces ministères et de la société civile couvrant une large gamme de compétences dans les domaines visés par la Convention. Le Comité se félicite du dialogue franc et constructif qui a eu lieu entre la délégation et les membres du Comité.

Le Comité félicite l’État partie d’avoir signé le Protocole facultatif à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes en 2004 et espère qu’il sera ratifié prochainement.

Le Comité reconnaît que l’État partie vient de sortir d’un conflit et prend note des obstacles économiques, sociaux et politiques créés par la guerre qui ont eu un impact négatif sur l’ensemble de la population, en particulier sur les femmes et les filles, et qui continuent d’entraver la pleine application de la Convention.

Aspects positifs

Le Comité note avec appréciation que le rapport combiné a été établi dans le cadre d’un processus de participation qui a fait intervenir des organismes officiels et des organisations non gouvernementales, et qui a compté sur l’assistance technique de la Division de la promotion de la femme de l’ONU.

Le Comité félicite l’État partie de la volonté politique et de l’engagement en faveur de l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et de la réalisation de l’égalité des sexes qu’il a manifestés pendant le dialogue constructif.

Le Comité note avec appréciation les efforts déployés récemment par l’État parti en faveur de la révision des dispositions législatives existantes qui sont discriminatoires à l’égard des femmes et de la promulgation de nouvelles lois, y compris la loi de 2006 sur le viol qui modifie les sections 14.70 et 14.71 du chapitre 14 du nouveau Code pénal, de la loi sur les successions de 2003, et de l’élaboration du projet de loi concernant l’équité et la participation et la représentation égale des femmes dans le processus politique, dont le Parlement est saisi. Il apprécie également les efforts de l’État partie en faveur de la mise en place de plans, politiques et programmes destinés à promouvoir l’égalité des sexes, y compris le Plan d’action national contre la violence sexiste (2006), la Politique de santé nationale (2007), la Politique nationale relative à l’éducation des filles (2006), le Plan d’action stratégique de lutte contre le VIH/sida (2006), la Stratégie pour la réduction de la pauvreté (2008-2011), le Programme national en faveur des femmes rurales (2008) et le Plan national d’action pour la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité, mais note que la mise en œuvre de certains de ces plans et politiques n’a pas encore dépassé le stade initial.

Le Comité se félicite de la coopération régulière et des partenariats avec des organisations non gouvernementales et des organisations communautaires de femmes dans le pays qui aident l’État partie dans ses efforts en faveur de l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes.

Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Rappelant que l’État partie a l’obligation d’appliquer systématiquement et continuellement toutes les dispositions de la Convention, le Comité considère que les préoccupations exprimées et les recommandations formulées dans le cadre de ses observations finales exigent l’attention prioritaire de l’État partie d’ici à la présentation du prochain rapport périodique. Par conséquent, le Comité invite l’État partie à concentrer ses activités en faveur de l’application de la Convention sur ces domaines et de faire rapport sur les mesures prises et les résultats obtenus dans son prochain rapport périodique. Il invite également l’État partie à transmettre les présentes observations finales à tous les ministères compétents, aux autres organismes officiels de tout niveau, au Parlement et aux organismes judiciaires en vue d’assurer leur application effective .

Parlement

Tout en réaffirmant que le Gouvernement porte la principale responsabilité pour la pleine observation des obligations assumées par l’État partie au titre de la Convention et les comptes à rendre à cet égard, le Comité souligne que la Convention est obligatoire pour toutes les branches de l’appareil de l’État et invite l’État partie à encourager le Parlement, dans le cadre de son mandat et de ces procédures, à prendre en tant que de besoin les mesures nécessaires en ce qui concerne la suite donnée aux présentes observations finales et la présentation du prochain rapport du Gouvernement conformément à la Convention.

Statut juridique de la Convention, principe de l’égalité, définitionde la discrimination et lois discriminatoires.

Le Comité s’inquiète de ce que la Convention n’ait pas encore été incorporée dans la législation libérienne et qu’elle ne soit pas exécutoire par les tribunaux libériens, bien que l’État partie ait ratifié la Convention en 1984. Le Comité se préoccupe également de l’absence d’une définition de la discrimination dans la Constitution de l’État partie ou dans sa législation conformément à l’article premier de la Convention, qui couvre à la fois la discrimination directe et indirecte, ainsi que de toute loi énonçant le principe de l’égalité entre les hommes et les femmes, même si l’article 11 b) de la Constitution garantit les droits et libertés fondamentaux de toute personne sans distinction de sexe.

Le Comité engage l’État partie à prendre des mesures immédiates en vue d’assurer la publication de la Convention et de rendre ses dispositions exécutoires directement. Il invite l’État partie à incorporer, à titre prioritaire, dans la loi appropriée, une définition de la discrimination à l’égard des femmes conformément à l’article premier de la Convention. Il invite également l’État partie à incorporer le principe de l’égalité entre les femmes et les hommes, conformément à l’article 2 de la Convention, dans sa Constitution actuellement en cours d’examen.

Tout en notant les efforts déployés par l’État partie, avec le soutien de la Mission des Nations unies au Liberia, en vue d’examiner la législation nationale pour identifier les dispositions discriminatoires à l’égard des femmes, le Comité note avec inquiétude que des lois codifiées et coutumières qui sont discriminatoires à l’égard des femmes à la fois en ce qui concerne leurs buts et leurs effets restent en vigueur, ce qui vaut en particulier pour celles qui figurent dans les règles et règlements révisés qui gouvernent l’arrière-pays du Liberia et qui sont discriminatoires à l’égard des femmes, en violation des obligations assumées par État partie au titre de la Convention. Le Comité s’inquiète également des problèmes existants en ce qui concerne l’accès des femmes à la justice et la protection de leurs droits conformément à la Convention.

Le Comité invite l’État partie à adopter, aux fins de l’examen de la législation et de la Constitution actuellement en cours, une approche holistique à la réforme de la législation qui garantira l’égalité des femmes de jure et de facto. Il engage l’État partie à veiller à ce que toutes les lois discriminatoires, y compris le droit coutumier, soient, à titre prioritaire, modifiées ou abrogées et alignées pleinement sur la Convention et les recommandations générales du Comité. Le Comité invite également l’État partie à éliminer tous les obstacles rencontrés par les femmes en matière d’accès à la justice, en particulier les femmes gouvernées par le droit coutumier, et engage l’État partie à prendre les mesures nécessaires pour améliorer la compétence juridique des femmes et la connaissance de leurs droits, y compris le droit de recourir à la justice. Il demanda à l’État partie de veiller à ce que la Convention et les dispositions législatives connexes fassent partie intégrante de l’enseignement du droit et de la formation des magistrats, y compris les juges, les avocats et les procureurs, des agents de police, des administrateurs de district, des chefs et autres dirigeants traditionnels et communautaires, de manière à créer une culture juridique favorable à l’égalité des femmes et à la non-discrimination. Il invite également l’État partie à diffuser largement la Convention au grand public de manière à mettre la population au courant des droits fondamentaux de la femme et à sensibiliser les législateurs et le grand public à la nécessité d’une réforme judiciaire prioritaire destinée à l’égalité juridique des femmes .

Mécanisme national chargé de la promotion de la femme

Tout en notant avec appréciation que le mécanisme national chargé de la promotion de la femme a été créé au niveau ministériel et dispose d’un mandat clair, le Comité note avec inquiétude que le Ministère de l’intégration des femmes au développement ne dispose pas d’une capacité et de ressources suffisantes pour coordonner l’application de la stratégie d’intégration d’une perspective sexospécifique dans tous les secteurs et à tous les niveaux de l’État. Le Comité se préoccupe également de la lenteur des progrès concernant l’élaboration et l’adoption du projet de la deuxième politique nationale en faveur de l’égalité des sexes, qui servira de base pour les activités du mécanisme national.

Le Comité demande à l’État parti d’accorder la priorité au renforcement du mécanisme national et de lui fournir les ressources humaines et financières et l’autorité dont il a besoin pour catalyser et coordonner l’application de la Convention et l’utilisation efficace de la stratégie d’intégration d’une perspective sexospécifique dans tous les ministères et secteurs du Gouvernement à tous les niveaux. En outre, il invite le Gouvernement à adopter et à appliquer sans tarder la politique nationale de promotion de l’égalité des sexes. Il engage l’État partie à surveiller systématiquement l’impact de ses efforts en matière d’intégration d’une perspective sexospécifique, à fixer des repères et des calendriers concrets à cet égard et à soumettre au Comité dans son prochain rapport des informations sur résultats atteints, les obstacles rencontrés et des mesures prises pour les surmonter .

Stéréotypes et pratiques culturelles

Le Comité s’inquiète vivement de la persistance de pratiques traditionnelles nuisibles, d’attitudes patriarcales et de stéréotypes profondément enracinés concernant le rôle, les responsabilités et l’identité des femmes et des hommes dans tous les domaines de la vie. Le Comité craint que ces normes, coutumes et pratiques ne puissent justifier et perpétuer la discrimination à l’égard des femmes, la violence à l’encontre des femmes et la persistance de pratiques traditionnelles nuisibles, y compris les mariages précoces et forcés et l’épreuve par le supplice. Il regrette l’absence de mesures soutenues et systématiques de la part de l’État partie en faveur de la modification ou de l’élimination de ces pratiques traditionnelles nuisibles, attitudes patriarcales et stéréotypes.

Le Comité invite l’État partie à considérer la culture comme une dimension dynamique de la vie du pays et du tissu social sujette, au cours du temps, à de nombreuses influences et, partant, à des changements. Il demande à l’État partie de mettre en place sans tarder une stratégie complète énonçant des objectifs clairs et des calendriers pour leur réalisation et destinée à modifier ou à éliminer des pratiques culturelles et des stéréotypes négatifs qui sont nuisibles et discriminatoires à l’égard des femmes, et de promouvoir la pleine jouissance de leurs droits fondamentaux par les femmes conformément aux articles 2 f) et 5 a) de la Convention. La stratégie doit inclure la promulgation de lois et l’adoption de programmes d’éducation et de sensibilisation concrets qui ciblent les femmes et les hommes à tous les niveaux de la société, y compris les fonctionnaires, les chefs et d’autres dirigeants traditionnels et communautaires, ainsi que les femmes chefs de la société Sande. Elle devrait avoir pour but de créer un environnement favorable à la transformation des stéréotypes et des valeurs culturelles, attitudes et pratiques discriminatoires. Le Comité encourage également l’État partie à mettre en place des mécanismes de surveillance aux fins de l’évaluation régulière des progrès accomplis vers la réalisation de ces objectifs.

Le Comité s’inquiète vivement de la persistance de la mutilation génitale féminine qui représente une grave violation du droit fondamental des filles et des femmes à l’intégrité corporelle et à la santé et des obligations assumées par l’État partie au titre de la Convention, et regrette l’absence d’une loi interdisant cette pratique. Le Comité craint également que la délivrance, par le Ministère de l’intérieur, des permis à des praticiens ne puisse être considérée comme un appui explicite à cette pratique, sapant ainsi tous les efforts en faveur de son élimination.

Le Comité demande à l’État partie de promulguer sans tarder et à titre prioritaire une loi interdisant la mutilation génitale féminine et de veiller à ce que ses praticiens soient poursuivis et punis compte tenu de la gravité de la violation. Le Comité invite également l’État partie à faire cesser immédiatement la délivrance de permis à des praticiens par le Ministère de l’intérieur. Il encourage l’État partie à élargir et accélérer la mise en œuvre des programmes destinés à sensibiliser les personnes qui gagnent leur vie en pratiquant la mutilation génitale féminine et à leur fournir d’autres sources de revenus. Il engage l’État partie à renforcer ses activités d’éducation et de sensibilisation à l’intention à la fois des femmes et des hommes, y compris les fonctionnaires de tous niveaux, les chefs et autres dirigeants traditionnels et communautaires, ainsi que les Zoes, en vue d’éliminer la mutilation génitale féminine et ses justifications culturelles sous-jacentes .

Violence à l’encontre des femmes

Le Comité note avec une vive inquiétude la portée, l’intensité et la prévalence de la violence à l’encontre des femmes au Liberia, en particulier la violence survenue à la fois pendant et après le conflit. Il note également que pendant le conflit, les femmes et les filles étaient particulièrement vulnérables à la violence sexuelle. Il se félicite des grands progrès accomplis par l’État partie en ce qui concerne l’élaboration de politiques et la mise en place de mécanismes pour la lutte contre la violence généralisée dont souffrent les femmes du pays, mais s’inquiète de l’absence d’un cadre juridique destiné à prévenir et à éliminer toutes les formes de violence à l’encontre des femmes, et de l’absence de services et d’une protection adéquates pour ses victimes.

Le Comité demande instamment à l’État partie d’accorder la priorité à l’élaboration et à la mise en place d’un cadre juridique complet destiné à combattre toutes les formes de violence à l’encontre des femmes, y compris la violence familiale, et d’accélérer l’application des mesures existantes. Il encourage l’État partie à tirer parti pleinement de la recommandation générale nº 19 du Comité et l’engage à organiser des programmes d’éducation et de sensibilisation de la population diffusés par les médias qui soulignent que toutes les formes de violence à l’encontre des femmes, y compris la violence familiale, sont inacceptables .

Le Comité s’inquiète du fait que les mesures destinées à combattre et à éliminer la violence à l’encontre des femmes ne sont pas appliquées dans la pratique, ne sont pas coordonnées et sont concentrées dans les zones urbaines. Il se préoccupe également du fait que la police, la magistrature et les prestataires des soins de santé n’ont pas la capacité nécessaire pour répondre de manière adéquate à la violence à l’encontre des femmes et des filles en dépit des efforts déployés en vue de les former et de les sensibiliser. Il note également l’existence d’un arriéré important de cas auprès des tribunaux; en conséquence, les victimes n’ont pas accès à la justice et les délinquants restent le plus souvent impunis.

Le Comité invite instamment l’État partie à poursuivre ses efforts qui visent à former les juges, les forces de l’ordre, les juristes, les assistants sociaux et les agents sanitaires en ce qui concerne la violence à l’encontre des femmes de manière à ce que ses auteurs soient poursuivis et punis effectivement avec la sévérité et la rapidité voulues, et à fournir aux victimes un soutien efficace et sensible aux besoins des femmes. Le Comité demande également à l’État partie d’éliminer les obstacles qui empêchent les victimes de recourir à la justice à tous les niveaux et dans toutes les régions du pays. Il invite également l’État partie à prendre des mesures de soutien aux victimes, y compris un abri et une assistance juridique, médicale et psychologique, en particulier aux femmes et aux filles touchées par la violence pendant le conflit, et à poursuivre leurs efforts en faveur de leur réadaptation et de leur réinsertion. Le Comité demande à l’État partie de fournir, dans son prochain rapport, des informations sur les lois, politiques et programmes destinés à combattre toutes les formes de violence à l’encontre des femmes et sur les résultats atteints à cet égard, ainsi que des données sur l’évolution de la prévalence des différentes formes de violence .

Traite des êtres humains

Tout en notant la promulgation de la loi contre la traite des êtres humains en 2005, le Comité s’inquiète de l’état et de l’efficacité des mesures prises en faveur de l’application pratique de la loi. Il se préoccupe également de l’absence de clarté concernant la portée du problème dans le pays.

Le Comité invite l’État partie à accélérer les efforts en faveur de l’application pleine et efficace de la loi de 2005 contre la traite des êtres humains. Ces efforts doivent incorporer en particulier des poursuites efficaces contre les trafiquants et leur punition. Le Comité recommande également à l’État partie de renforcer l’assistance et l’appui apportés aux femmes victimes de la traite, ainsi que ses efforts de prévention, en s’attaquant aux causes profondes de la traite et en améliorant la situation économique des femmes de manière à éliminer leur vulnérabilité à l’exploitation et à la traite. Il invite également l’État partie à intensifier sa coopération avec les pays de la région dans la prévention et la lutte contre la traite des femmes et des filles, et à conduire des études sur la prévalence de la traite dans le pays .

Participation à la vie politique et publique

Tout en notant les efforts déployés en faveur de la participation des femmes à la vie politique publique à tous les niveaux, en particulier dans le contexte de la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité sur les femmes, la paix et la sécurité, le Comité s’inquiète du faible niveau de la participation des femmes aux niveaux les plus élevés de la prise des décisions, et de l’absence de mesures concrètes en faveur de l’élimination des causes profondes de ce problème, y compris les attitudes sociales et culturelles prédominantes.

Le Comité engage l’État partie à prendre des mesures concrètes pour renforcer la participation des femmes dans tous les secteurs et à tous les niveaux de l’État conformément aux articles 7 et 8 de la Convention et à la recommandation générale nº 28 du Comité sur la participation des femmes dans la vie politique et publique, entre autres grâce à l’adoption de mesures temporaires spéciales conformément au paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention et à la recommandation générale n o  25. Le Comité encourage l’État partie à tenir compte, dans le cadre de l’examen du projet de loi sur l’équité et la participation et la représentation égale des femmes dans le processus politique, des articles 7 et 8 de la Convention ainsi que des recommandations générales n o  23 et 25. Il encourage également l’État partie à organiser des campagnes de sensibilisation en vue de mettre en relief l’importance que la représentation pleine et égale des femmes aux postes de décision de tous niveaux revêt pour la société. Le Comité invite l’État partie à surveiller attentivement l’impact des mesures prises et les résultats obtenus et à présenter dans son prochain rapport périodique des informations à cet égard .

Nationalité

Le Comité note avec inquiétude que certaines dispositions de la loi révisée sur les étrangers et la nationalité de 1973 sont discriminatoires à l’égard des Libériennes. En particulier, conformément à cette loi, un enfant né à l’étranger d’une mère libérienne et d’un père non libérien ne reçoit pas automatiquement la nationalité de la mère.

Le Comité demande instamment à l’État partie d’éliminer, dans le cadre de la réforme législative actuelle, toutes les lois discriminatoires en matière de nationalité conformément à l’article 9 de la Convention.

Éducation

Le Comité note que l’éducation est un facteur essentiel dans la promotion de la femme et que le faible niveau d’instruction des filles et des femmes constitue toujours l’un des obstacles majeurs à la pleine jouissance de leurs droits par les femmes et à leur autonomisation. Tout en reconnaissant les efforts déployés actuellement en faveur de l’amélioration de la scolarisation et de la persévérance des filles, ainsi que les progrès accomplis en ce qui concerne l’élimination de l’écart entre les taux de scolarisation primaire des garçons et des filles, le Comité s’inquiète de la persistance d’obstacles structurels et autres à une éducation de qualité qui affectent surtout les filles et les jeunes femmes. Parmi ces obstacles, on peut citer l’absence de l’infrastructure physique, la persistance des stéréotypes sexistes dans les livres scolaires et des programmes d’études qui renforcent les attitudes discriminatoires à l’égard des femmes dans la société, ainsi que le manque d’enseignants formés et qualifiés. Le Comité se préoccupe également de la persistance de la violence et du harcèlement sexuels des filles dans les écoles et des conséquences négatives des pratiques traditionnelles nuisibles, telles que les mariages précoces et forcés, pour l’éducation des filles, et les obstacles qui empêchent les filles enceintes de fréquenter l’école.

Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures pour améliorer l’infrastructure de l’éducation, notamment dans les zones rurales, et de sensibiliser la population à l’importance de l’éducation en tant que droit fondamental et en tant que base de l’autonomisation des femmes. Il recommande également à l’État partie de prendre des mesures qui garantissent l’égalité d’accès des femmes et des filles à tous les niveaux de l’éducation et la persévérance des filles dans des écoles, entre autres grâce à l’adoption de mesures temporaires spéciales conformément au paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention et à la recommandation générale n o  25. Il invite également l’État partie à veiller à l’élimination et à la répression de la violence et du harcèlement sexuels dans les écoles, et à éliminer tous les obstacles à la scolarisation des filles enceintes et des jeunes mères. Il encourage l’État partie à s’employer à surmonter les attitudes traditionnelles qui entravent l’accès des filles et des femmes à l’éducation, et à élaborer des programmes d’études non stéréotypées qui s’attaquent aux causes structurelles de la discrimination à l’égard des femmes. Le Comité engage l’État partie à déployer de gros efforts en vue d’améliorer le niveau d’alphabétisation des filles et des femmes grâce à l’adoption de programmes d’études complets à la fois dans l’enseignement scolaire et non scolaire, et grâce à l’éducation et la formation des adultes.

Emploi et autonomisation économique des femmes

Le Comité s’inquiète du fait que les Libériennes ne jouissent pas de la plénitude de leurs droits énoncés à l’article 11 de la Convention. Il se préoccupe également du manque de clarté en ce qui concerne l’existence et la portée de la législation et des politiques en matière de travail dans le pays et le degré de leur application. Il s’inquiète en particulier de la situation des femmes travaillant dans le secteur privé, y compris dans les plantations d’hévéas, ainsi que du grand nombre de femmes employées dans le secteur non structuré, ainsi que de l’absence de droits et d’avantages sociaux, y compris en matière de protection de la maternité. Alors que le Comité reconnaît que l’État a pris des mesures pour renforcer l’autonomisation économique des femmes et améliorer leur accès à l’emploi, il s’inquiète également de la situation défavorable des femmes sur le marché du travail. Il note, par exemple, la création du programme d’emploi d’urgence et du programme d’action pour l’emploi, mais observe que seulement 900 femmes en ont bénéficié sur un nombre total de 83 000 emplois créés.

Le Comité invite l’État partie à prendre toutes les mesures appropriées pour assurer l’égalité des chances entre les femmes et les hommes sur le marché du travail conformément à l’article 11 de la Convention, entre autres grâce à l’utilisation de mesures temporaires spéciales conformément au paragraphe 1 de l’article 4 et à la recommandation générale n o  25. Le Comité engage l’État partie à ratifier la Convention n o  100 de l’Organisation internationale du travail, et à incorporer le principe du salaire égal pour un travail de valeur égale dans sa législation et ses politiques en matière de travail. Il demande à l’État partie d’envisager l’adoption d’une loi sur un travail décent, d’assurer l’élimination sans tarder de toutes les dispositions dans les lois et les politiques en vigueur qui sont discriminatoires à l’égard des femmes et de veiller à ce que les lois révisées portent à la fois sur les secteurs public et privé et à ce qu’elles soient appliquées pleinement. Il engage également l’État partie à garantir que les femmes bénéficient d’avantages et de services sociaux adéquats. Il recommande à l’État partie de corriger la situation défavorable des femmes sur le marché du travail et d’intensifier les efforts en faveur de l’amélioration de l’accès des femmes à l’emploi dans le secteur structuré, entre autres grâce à l’amélioration des possibilités d’éducation et de formation. Tous les programmes de création d’emplois devraient être sensibles aux problèmes de l’égalité des sexes et profiter pleinement aux femmes.

Santé

Le Comité s’inquiète vivement des effets extrêmement préjudiciables que le conflit a entraînés pour l’infrastructure sanitaire et qui représentent un obstacle majeur à l’accès des femmes et des filles à des soins et des services de santé équitables et égaux, en particulier dans les zones rurales. Alors qu’il reconnaît que la communauté internationale et les organisations non gouvernementales jouent un rôle crucial en fournissant des soins et des services de santé, et que l’État partie vient de prendre des mesures dans le domaine de la santé, par exemple en mettant en place d’un ensemble des services de santé primaire et en adoptant une feuille de route destinée à accélérer la réduction de la mortalité des mères et des nouveaux nés, le Comité craint que l’État partie ne dispose pas des ressources et de la capacité de base nécessaires pour assurer la pleine jouissance des droits des femmes prévus à l’article 12 de la Convention. Il s’inquiète en particulier des taux alarmants de la mortalité maternelle, du nombre élevé de grossesses d’adolescentes et des taux élevés d’infections des femmes et des filles par le VIH. Il se préoccupe également du manque d’accès des femmes aux soins et services d’hygiène sexuelle et de santé procréative, y compris une aide qualifiée lors de l’accouchement et des soins postnatals adéquats, en particulier dans les zones rurales.

Le Comité encourage l’État partie à continuer sa collaboration avec la société civile et la communauté internationale dans le domaine des soins de santé, notamment en ce qui concerne le développement de l’infrastructure physique et la mise en valeur des ressources humaines, en vue de renforcer sa propre capacité à fournir des soins et des services de santé de base, y compris la santé mentale, et d’améliorer l’accès des femmes et des filles dans des conditions d’équité et d’égalité. À ce propos, Comité encourage l’utilisation systématique de sa recommandation générale n o  24 concernant les femmes et la santé. Il engage l’État partie à faire tout son possible pour améliorer l’accès des femmes aux établissements sanitaires et aux soins donnés par un personnel qualifié, en particulier en ce qui concerne l’aide lors de l’accouchement et les soins postnatals, notamment dans les zones rurales. Le Comité recommande à l’État partie d’intensifier ses efforts en faveur de la réduction de la mortalité maternelle et de la grossesse d’adolescentes, et de continuer ses initiatives de sensibilisation en matière d’hygiène sexuelle et de santé et de droits procréatifs, y compris celles qui ciblent les adolescentes, une attention spéciale étant accordée à la prévention des maladies transmissibles sexuellement et du VIH/sida. Il propose que l’État partie examine les véritables causes de la mortalité maternelle et de la propagation du VIH/sida, et qu’il fixe des repères et des objectifs assortis de calendriers en vue de leur réduction.

Femmes rurales

Tout en se félicitant du programme national en faveur des femmes rurales actuellement en cours d’exécution et de l’attention accordée à l’égalité des sexes dans la Stratégie de réduction de la pauvreté récemment adoptée, le Comité s’inquiète de la situation précaire des femmes vivant dans les zones rurales. Ces femmes constituent la majorité des Libériennes et sont affectées de manière disproportionnée par l’absence de services de santé, de moyens d’éducation, de possibilités économiques, de prestations sociales et par le manque d’accès à des conditions de vie adéquates, en particulier en matière d’approvisionnement en eau et d’assainissement de base. Comme cela a été noté précédemment, le Comité s’inquiète vivement du manque d’accès des femmes rurales a la justice et de la non observation de leurs droits prévus dans la Convention qui découlent des dispositions coutumières discriminatoires figurant dans les règles et règlements révisés qui régissent l’arrière-pays du Liberia et qui gouvernent les femmes rurales. Il exprime des préoccupations particulières à l’égard de la prévalence des pratiques traditionnelles nuisibles et de la persistance de coutumes et de traditions dans les zones rurales qui enfreignent les droits fondamentaux des femmes et des filles et qui entravent la réalisation de leur égalité et leur progrès.

Le Comité engage l’État partie à prendre des mesures appropriées en vue d’éliminer toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes rurales, les pratiques traditionnelles nuisibles et les coutumes et traditions qui les justifient et les perpétuent. Il invite instamment l’État partie à accorder une attention spéciale aux besoins des femmes rurales, à assurer leur participation à la prise des décisions, y compris au niveau communautaire et dans la planification du développement, et à veiller à ce qu’elles aient un accès égal aux services et à l’infrastructure de base ainsi qu’aux possibilités économiques, y compris aux projets générateurs de revenus et au facilités de crédit, dans des conditions d’égalité et d’équité avec les hommes et avec leurs homologues urbaines. Le Comité demande d’une nouvelle fois à l’État partie de veiller à ce que toutes les lois coutumières discriminatoires soient abrogées ou modifiées et rendues entièrement conformes à la Convention et aux observations générales du Comité, et engage l’État partie à éliminer tous les obstacles susceptibles d’entraver l’accès des femmes rurales à la justice. Le Comité engage l’État partie à prendre des mesures spéciales pour sensibiliser les femmes rurales à leurs droits, y compris leur droit de recourir à la justice.

Rapports de famille

Le Comité se préoccupe de la persistance de dispositions discriminatoires dans le droit coutumier et de la prévalence de pratiques traditionnelles nuisibles qui sont contraires aux articles 15 et 16 de la Convention. Il se félicite de l’harmonisation du droit codifié et du droit coutumier en ce qui concerne les droits patrimoniaux de la femme qui découle de l’adoption de la loi de 2003 sur les successions, mais craint que ces droits ne demeurent limités. Le Comité s’inquiète également du fait que les femmes ne peuvent pas se présenter devant les tribunaux traditionnels sans leur mari, de la prévalence des mariages précoces et forcés et de l’inégalité des sexes dans le mariage coutumier. En outre, il se préoccupe de l’absence d’informations sur le veuvage et le divorce.

Le Comité invite instamment l’État partie à éliminer, conformément aux articles 15 et 16 de la Convention et à sa recommandation générale n o  21, toutes les dispositions discriminatoires du droit codifié et du droit coutumier, de manière à ce que les femmes aient les mêmes droits dans le mariage que les hommes. Il engage également l’État partie à veiller à ce que la procédure des tribunaux traditionnels soit compatible avec les normes des droits fondamentaux de manière à garantir aux femmes un accès égal à ces tribunaux. Il invite l’État partie à incorporer des informations sur le veuvage et le divorce dans son prochain rapport.

Collecte et analyse des données

Tout en notant les récents efforts destinés à améliorer la collecte de données ventilées par sexe, y compris la promulgation récente de la stratégie nationale de développement de la statistique qui vise à rétablir la capacité statistique nationale et à renforcer la coordination entre les ministères et agences responsables de la collecte de données, le Comité s’inquiète de l’absence ou de la disponibilité limitée de données ventilées par sexe dans plusieurs domaines visés par la Convention. Ces données sont indispensables pour l’adoption de politiques ciblées et la surveillance et l’évaluation systématiques des progrès accomplis vers l’égalité de fait des femmes et l’évaluation exacte de la situation des femmes et de son évolution dans tous les domaines couverts par la Convention.

Le Comité demande instamment à l’État partie d’accorder la priorité à la collecte systématique de données complètes ventilées par sexe et d’indicateurs quantifiables en vue de déterminer l’évolution de la situation des femmes et leur progrès vers l’égalité de fait, et, à ce propos, appelle son attention sur la recommandation générale nº 9. Il invite l’État parti à solliciter, en tant que de besoin, une assistance internationale pour ses activités de collecte et d’analyse des données, et à veiller à ce que ces activités répondent aux besoins des utilisateurs des données. Le Comité le prie d’inclure dans son prochain rapport des données et des analyses statistiques, ventilées par sexe et par zones rurale et urbaine, qui indiquent l’impact des mesures prises et les résultats obtenus.

Déclaration et Programme d’action de Beijing

Le Comité engage l’État partie à se prévaloir pleinement, en s’acquittant des obligations qu’il a assumées au titre de la Convention, de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing, qui renforcent les dispositions de la Convention, et invite l’État partie à incorporer des informations sur cette question dans son prochain rapport périodique .

Objectifs du Millénaire pour le développement

Le Comité souligne que l’application pleine et effective de la Convention est indispensable pour la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement. Il appelle l’intégration d’une perspective sexospécifique et des dispositions de la Convention dans tous les efforts destinés à atteindre les objectifs du Millénaire pour le développement et invite l’État partie à incorporer des informations sur cette question dans son prochain rapport périodique.

Ratification d’autres traités

Le Comité note que l’accession des États aux neuf principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme renforce la jouissance de leurs droits et libertés fondamentaux par les femmes dans tous les domaines de la vie. Par conséquent, il encourage le Gouvernement libérien à ratifier les traités auxquels il n’est pas encore partie, à savoir la Convention relative aux droits des personnes handicapées, qu’il a signée en 2007, et la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées.

Diffusion des observations finales

Le Comité demande que les présentes observations finales soient diffusées largement au Liberia, en vue d’informer les fonctionnaires, les personnalités politiques, les parlementaires, les organisations de femmes et les organisations de défense des droits de l’homme des mesures prises en faveur de l’égalité de jure et de facto des femmes, ainsi que des mesures additionnelles qui sont nécessaires à cet égard. Il invite l’État partie à continuer à améliorer la diffusion, en particulier aux organisations de femmes et aux organisations de défense des droits de l’homme, de la Convention, de son Protocole facultatif, des recommandations générales du Comité, de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing et des résultats de la vingt-troisième session extraordinaire de l’Assemblée générale réunie sous la devise «Les femmes en 2000 : égalité des sexes, développement été pour le XXIe siècle ».

Protocole facultatif à la Convention

Le Comité encourage l’État partie à ratifier le Protocole facultatif à la Convention qu’il a signé en 2004 .

Suite donnée aux observations finales

Le Comité demande à l’État partie de lui soumettre, dans un délai de deux ans, des informations écrites sur les mesures qu’il a prises pour donner suite aux recommandations figurant aux paragraphes 13 et 21 ci-dessus .

Assistance technique

Le Comité recommande à l’État partie de continuer de se prévaloir de l’assistance technique dans l’élaboration et l’application d’un programme complet destiné à donner suite aux recommandations formulées ci-devant et à appliquer la Convention dans son ensemble. Le Comité est disposé à poursuivre son dialogue avec l’État partie, entre autres grâce à une visite du pays par des membres du Comité dans le but de donner des orientations additionnelles concernant la suite donnée à ces recommandations et l’observation des obligations que l’État partie a assumées conformément à la Convention. Il invite également l’État partie à renforcer plus avant sa coopération avec les institutions et programmes du système des Nations Unies, y compris le Programme des Nations unies pour le développement, le Fonds des Nations Unies pour la femme, le Fonds des Nations unies pour l’enfance, le Fonds des Nations Unies pour la population, l’Organisation mondiale de la santé, le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme, et la Division de statistique et la Division de la promotion de la femme du Département des affaires économiques et sociales du Secrétariat.

Date du prochain rapport

Le Comité invite l’État partie à répondre aux inquiétudes exprimées dans les présentes observations finales dans son prochain rapport périodique soumis conformément à l’article 18 de la Convention. Il prie l’État parti de soumettre ses septième et huitième rapports combinés en 2013.