NATIONS UNIES

CERD

Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale

Distr.GÉNÉRALE

CERD/C/LIE/CO/37 mai 2007

FRANÇAISOriginal: ANGLAIS

COMITÉ POUR L’ÉLIMINATIONDE LA DISCRIMINATION RACIALE

Soixante‑dixième session19 février‑9 mars 2007

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 9 DE LA CONVENTION

Observations finales du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale

LIECHTENSTEIN

1.Le Comité a examiné les deuxième et troisième rapports périodiques du Liechtenstein, présentés en un seul document (CERD/C/LIE/3), à ses 1800e et 1801e séances (CERD/C/SR.1800 et 1801), tenues les 27 et 28 février 2007. À sa 1813e séance (CERD/C/SR.1813), tenue le 8 mars 2007, il a adopté les observations finales suivantes.

A. Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport de l’État partie, qui est conforme aux principes directeurs concernant la présentation des rapports. Il se félicite du dialogue ouvert qu’il a pu avoir avec la délégation et des réponses franches et approfondies apportées par l’État partie, oralement et par écrit, aux questions figurant dans la liste des points à traiter qui lui avait été soumise, ainsi qu’au large éventail de questions posées par les membres du Comité. Il se réjouit de la possibilité qui lui a ainsi été offerte de poursuivre un dialogue constructif avec l’État partie.

B. Aspects positifs

3.Le Comité se félicite de l’adoption par l’État partie, en février 2003, d’un plan d’action national contre le racisme.

4.Le Comité se félicite aussi de la mise en place, en juin 2002, du Groupe de travail interdépartements pour l’élaboration d’un plan d’action national contre le racisme (rebaptisé, en août 2005, Groupe de travail contre le racisme, l’antisémitisme et la xénophobie).

5.Le Comité prend note avec satisfaction de la création, en février 2005, du Bureau de l’égalité des chances, assorti d’une commission.

6.Le Comité se réjouit de l’annonce faite par l’État partie de son intention de créer un bureau du Médiateur pour les enfants.

7.Le Comité accueille avec satisfaction l’adoption, en novembre 2004, du texte révisé de l’ordonnance sur la circulation des personnes, qui fait officiellement de l’intégration des étrangers un objectif de l’État, et de l’institution en novembre 2006, au sein du Bureau de l’égalité des chances, d’une équipe spéciale pour l’intégration.

8.Le Comité se félicite de la mise en place par l’État partie, en 2004, du Groupe de travail sur l’intégration des musulmans et des diverses mesures prises par cet organe.

9.Le Comité prend note avec satisfaction de l’institution, en 2001, de la Commission indépendante d’historiens chargée de faire la lumière sur le rôle du Liechtenstein pendant la Seconde Guerre mondiale, et se félicite de la publication, en 2005, de son rapport final et de ses conclusions.

10.Le Comité se réjouit de la création, en février 2007, de la Commission de protection contre la violence, dont le but est d’élaborer une stratégie de lutte contre l’extrémisme de droite.

11.Le Comité salue l’initiative de la société civile qui a abouti à l’adoption d’une pétition parlementaire visant à modifier le Code pénal en vue de réprimer le fait d’exhiber des symboles à connotation raciste.

12.Le Comité accueille avec satisfaction la nomination par l’État partie d’un groupe de projet aux fins d’améliorer l’établissement des statistiques et l’évaluation des données relatives au racisme et à la discrimination.

13.Le Comité prend acte avec satisfaction de la participation de l’État partie à la campagne «Pour une société sans exclusion» menée par la Commission fédérale suisse contre le racisme, en 2005; à la campagne «Tous différents − tous égaux», en 2006, et à l’initiative «Année européenne de l’égalité des chances pour tous», en 2007.

14.Le Comité note avec satisfaction que l’État partie a fait en mars 2004 la déclaration facultative prévue à l’article 14 de la Convention.

C. Sujets de préoccupation et recommandations

15.Le Comité note que l’État partie craint qu’étant donné l’exiguïté de son territoire, la ventilation des données statistiques selon l’origine ethnique ou nationale porte atteinte à l’intimité de la vie privée. Le Comité n’en est pas moins préoccupé, eu égard à la proportion importante de non‑ressortissants dans la population de l’État partie (34 %), par l’absence de données socioéconomiques ventilées par nationalité et groupe ethnique, lesquelles faciliteraient l’évaluation des politiques et des programmes existants. Le Comité relève aussi l’absence de données sur la représentation politique des groupes ethniques dans l’État partie, pour des raisons de protection des données (art. 2 et 5 c)).

Le Comité recommande à l’État partie, conformément au paragraphe 8 des Principes directeurs concernant la présentation des rapports, de prendre les mesures nécessaires pour recueillir des données statistiques ventilées qui permettraient d’évaluer la situation socioéconomique des différents groupes ethniques de la population. Le Comité prie par ailleurs l’État partie de fournir, dans son prochain rapport périodique, des informations statistiques sur la représentation des divers groupes ethniques dans les institutions et organismes publics.

16.Tout en se félicitant de la création de la Commission de l’égalité des chances, le Comité constate que cet organe ne satisfait pas pleinement aux critères énoncés dans les Principes relatifs au statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris, résolution 48/134 de l’Assemblée générale, annexe) et regrette que l’État partie n’envisage pas de se doter d’une institution nationale des droits de l’homme qui soit conforme à ces principes (art. 2).

Le Comité invite l’État partie à envisager de créer une institution nationale des droits de l’homme indépendante conforme aux Principes de Paris qui, entre autres, contribuerait à la surveillance et à l’évaluation des progrès accomplis dans la mise en œuvre de la Convention.

17.Le Comité note avec préoccupation que, selon la loi sur la naturalisation facilitée (2000), l’octroi de la nationalité liechtensteinoise requiert une durée de résidence permanente de trente ans, période qui lui paraît excessivement longue. Il est également préoccupé par le fait que la procédure accélérée, pour laquelle la durée de résidence permanente exigée est de cinq ans et qui est subordonnée à l’issue favorable d’un scrutin populaire organisé dans la commune où réside le demandeur, peut être discriminatoire étant donné l’absence de critères objectifs pour l’adoption des décisions en la matière (art. 2).

Compte tenu de sa Recommandation générale XXX (2004) concernant la discrimination contre les non ‑ressortissants, le Comité recommande à l’État partie d’envisager de modifier la loi sur la naturalisation facilitée ( 2000 ) en vue de réduire la durée de résidence exigée pour la naturalisation et de faire en sorte que des groupes particuliers de non ‑ressortissants ne subissent pas de discrimination en matière d’accès à la nationalité. Le Comité prie aussi instamment l’État partie de prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte que les résultats des scrutins populaires municipaux concernant les demandes de naturalisation de non ‑ressortissants soient soumis à un contrôle juridictionnel et pour garantir le droit de recours contre les décisions prises.

18.Le Comité est conscient des efforts entrepris par l’État partie, notamment avec la création de la Commission de protection contre la violence, pour lutter contre les actes délictueux relevant de l’extrémisme de droite ou de l’antisémitisme, mais il s’inquiète de la montée des tendances xénophobes et d’extrême droite chez les jeunes et des liens croissants qu’un noyau dur d’extrémistes de droite du Liechtenstein entretient avec des groupes à l’étranger (art. 2).

Le Comité encourage l’État partie à continuer de surveiller toutes les tendances susceptibles de donner naissance à des comportements racistes et xénophobes et lui recommande de diligenter une étude sociologique du phénomène des activités d’extrême droite pour se faire une idée plus précise du problème et de ses causes profondes. Le Comité prie l’État partie de lui faire rapport sur les résultats de l’étude, ainsi que sur les mesures prises et les progrès accomplis.

19.Tout en notant que l’article 283 du Code pénal réprime l’appartenance à des organisations qui incitent à la discrimination raciale ou qui l’encouragent, le Comité est préoccupé par l’absence dans la législation pénale de l’État partie d’une disposition interdisant les organisations racistes, selon les prescriptions de la Convention (art. 4 b)).

Le Comité recommande à l’État partie d’adopter un texte législatif spécifique, conformément à l’article 4 b) de la Convention, et souligne le rôle préventif d’un tel texte.

20.Le Comité constate avec préoccupation que, selon l’ordonnance sur la circulation des personnes, le droit au regroupement familial est subordonné aux moyens financiers du demandeur, ce qui constitue à son avis une discrimination indirecte à l’égard de groupes minoritaires qui font généralement l’objet d’une marginalisation socioéconomique, et en particulier des femmes appartenant à de tels groupes. Le Comité déplore par ailleurs que, faute de disposer de statistiques concernant les demandes de regroupement familial rejetées, ventilées selon l’appartenance ethnique ou la nationalité des demandeurs, l’État partie ne puisse pas évaluer dans quelle mesure les restrictions qu’impose la législation actuelle en matière de regroupement familial ont donné lieu à une discrimination indirecte (art. 5 d) iv)).

Le Comité recommande à l’État partie de réexaminer sa législation pour faire en sorte que le droit au regroupement familial soit garanti à chacun, sans discrimination fondée sur l’origine nationale ou ethnique. Par ailleurs, le Comité prie instamment l’État partie d’évaluer, notamment par le recueil de données statistiques, dans quelle mesure les conditions financières auxquelles est soumis le regroupement familial peuvent constituer une discrimination indirecte à l’égard de groupes minoritaires qui sont généralement victimes d’une marginalisation socioéconomique, et de lui faire rapport à ce sujet dans son prochain rapport périodique.

21.Tout en saluant les efforts que fait l’État partie pour faciliter l’apprentissage de l’allemand par les enfants migrants et leurs mères afin d’améliorer les résultats scolaires des enfants de langue maternelle étrangère, qui sont relativement médiocres, le Comité note avec préoccupation que le handicap de la langue n’est peut‑être pas l’unique raison des difficultés que ces enfants connaissent dans le système scolaire. Il relève à ce propos la remarque de l’État partie selon laquelle les enfants de parents étrangers ont davantage besoin de structures de soutien (réponses écrites à la lite des points à traiter, p. 15 du texte anglais) (art. 5 e) v) et 7).

Le Comité recommande à l’État partie qu’en plus d’organiser des cours intensifs d’allemand destinés à aider les enfants migrants et leurs parents à apprendre cette langue, il envisage de prendre des mesures complémentaires pour remédier au handicap particulier dont souffrent ces enfants en matière d’apprentissage, et notamment de veiller à ce que les services d’aide à l’enfant et les autres services sociaux tiennent compte des besoins particuliers des parents d’origine étrangère, et de former les enseignants à des méthodes pédagogiques adaptées aux sensibilités culturelles des élèves.

22.Le Comité recommande à l’État partie de rendre ses rapports périodiques aisément accessibles au public dès qu’ils sont soumis et de publier de la même manière les observations finales du Comité.

23.Le Comité recommande à l’État partie, lorsqu’il incorpore dans son ordre juridique interne les dispositions de la Convention, en particulier celles des articles 2 à 7, de continuer de tenir compte des passages pertinents de la Déclaration et du Programme d’action de Durban, et d’inclure dans son prochain rapport périodique des renseignements sur les plans d’action ou autres mesures supplémentaires qu’il aura adoptés pour donner effet à la Déclaration et au Programme d’action au niveau national.

24.Le Comité invite l’État partie à soumettre son document de base commun, selon les prescriptions énoncées en la matière dans les Directives harmonisées pour l’établissement de rapports récemment approuvées par les organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme (HRI/MC/2006/3 et Corr. 1).

25.L’État partie devrait adresser au Comité dans un délai d’un an des renseignements sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations figurant aux paragraphes 17 et 18 ci‑dessus, conformément au paragraphe 1 de l’article 65 du Règlement intérieur du Comité.

26.Le Comité recommande à l’État partie de soumettre ses quatrième et cinquième rapports périodiques en un seul document, au plus tard le 22 mars 2009, et d’y traiter tous les points soulevés dans les présentes observations finales.

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