Nations Unies

CAT/C/MUS/CO/4

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr. générale

22 décembre 2017

Français

Original : anglais

Comité contre la torture

Observations finales concernant le quatrième rapport périodique de Maurice *

1.Le Comité contre la torture a examiné le quatrième rapport périodique de Maurice (CAT/C/MUS/4) à ses 1588e et 1591e séances (voir CAT/C/SR.1588 et 1591), les 17 et 20 novembre 2017, et a adopté les observations finales ci-après à sa 1606e séance, le 30 novembre 2017.

A.Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le quatrième rapport périodique de l’État partie, élaboré à partir d’une liste préalable de points à traiter établie par le Comité (CAT/C/MUS/QPR/4). Il sait gré à l’État partie d’avoir accepté de soumettre son rapport conformément à la procédure simplifiée, qui permet d’améliorer la coopération entre l’État partie et le Comité et de mieux cibler l’examen du rapport ainsi que le dialogue avec la délégation.

3.Le Comité se félicite du dialogue constructif qu’il a eu avec la délégation de l’État partie, ainsi que des réponses aux questions et préoccupations soulevées pendant l’examen du rapport. Il remercie également l’État partie de lui avoir fourni des données statistiques supplémentaires, utiles pour le suivi de la mise en œuvre de la Convention au niveau national.

B.Aspects positifs

4.Le Comité salue la volonté manifestée par le Gouvernement de mener des réformes législatives, politiques et institutionnelles dans le cadre de son programme pour la période 2015-2019, qui contribuera à améliorer le respect par l’État partie des obligations qui lui incombent en vertu de la Convention.

5.Le Comité accueille avec satisfaction la ratification en 2011 par l’État partie du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants.

6.Le Comité accueille également avec satisfaction l’adoption par l’État partie de mesures législatives dans des domaines intéressant la Convention, notamment :

a)L’adoption, en 2016, de la loi portant création de la Commission indépendante chargée d’examiner les plaintes contre la police, organe appelé à remplacer la Division des plaintes contre la police de la Commission nationale des droits de l’homme ;

b)La modification, en 2016, de la loi sur la protection contre la violence familiale, qui élargit la définition de la violence familiale ;

c)La modification, en 2013, de la loi sur l’appel pénal, qui permet à un condamné de demander à être rejugé sur la base de preuves nouvelles suffisamment convaincantes ;

d)La modification, en 2012, de la loi sur la protection des droits de l’homme, qui élargit et renforce le mandat de la Commission nationale des droits de l’homme ;

e)L’adoption, en 2012, de la loi sur le mécanisme national de prévention, qui donne effet au Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ;

f)L’adoption en 2012 de la loi portant modification du Code pénal, qui autorise l’interruption de grossesse dans certains cas précis ;

g)La modification, en 2012, de la loi sur l’aide juridictionnelle, qui, entre autres, offre aux personnes démunies la possibilité de bénéficier de l’aide juridictionnelle lorsqu’elles font l’objet d’une enquête de police et si elles souhaitent demander leur libération sous caution.

7.Le Comité accueille avec satisfaction les mesures administratives et autres adoptées par l’État partie pour donner effet à la Convention, notamment :

a)La mise en service de la Division du Mécanisme national de prévention au sein de la Commission nationale des droits de l’homme, en 2014 ;

b)L’adoption du Plan d’action national pour les droits de l’homme 2012-2020, en 2012 ;

c)L’extension des jours d’ouverture du tribunal dénommé Bail and Remand Court (tribunal chargé de la mise en liberté sous caution et de la détention provisoire) qui depuis 2012 fonctionne également le week-end et les jours fériés ;

d)L’ouverture de nouveaux centres de détention, qui a contribué à réduire la surpopulation carcérale ;

e)L’adoption de mesures visant à prévenir la violence entre détenus et le suicide dans les lieux de détention.

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Questions en suspens issues du cycle précédent

8.Le Comité constate avec regret que l’État partie n’a pas fourni de renseignements sur la mise en œuvre des recommandations retenues aux fins du suivi dans ses observations finales précédentes (CAT/C/MUS/CO/3). Il constate également avec regret que ses recommandations concernant la législation relative à la police, les conditions de détention et la publication du rapport relatif à la visite que le Sous-Comité pour la prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (ci-après « le Sous-Comité ») a effectuée en 2007 dans le pays (voir CAT/C/MUS/CO/3), n’ont pas été pleinement mises en œuvre.

Incorporation de la Convention dans la législation interne

9.Le Comité demeure préoccupé par le fait que l’État partie n’a pas pleinement incorporé les dispositions de la Convention dans son droit interne, compte tenu en particulier des lacunes existant dans sa législation relative à la lutte contre la torture (art. 2).

10. Rappelant sa précédente recommanda tion (voir CAT/C/MUS/CO/3, par.  7), l e  Comité exhorte l’État partie à incorporer pleinement les dispositions de la Convention dans sa législation interne afin qu’elles puissent être appliquées par les tribunaux nationaux.

Interdiction absolue de la torture

11.Le Comité note que, dans son arrêt en l’affaire Director of Public Prosecutions v .  V. Jagdawo & Ors, la Cour suprême de l’État partie a invoqué le droit intangible de ne pas être soumis à la torture ou à d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et son caractère impératif, mais il relève l’absence dans la législation interne d’une disposition consacrant expressément l’interdiction absolue de la torture (art. 2).

12. L’État partie devrait introduire dans sa législation une disposition établissant l’interdiction absolue de la torture et prévoyant qu’aucune circonstance, quelle qu’elle soit, ne peut être invoquée pour justifier la torture, conformément au paragraphe 2 de l’article 2 de la Convention. Il devrait également faire en sorte que ses lois, notamment les dispositions de l’article 245 du Code pénal sur l’homicide, les blessures et les coups commandés par l’autorité légitime, tiennent compte de cette interdiction absolue. Le  Comité appelle l’attention de l’État partie sur les paragraphes 5 à 7 de son observation générale n o  2 (2007) sur l’application de l’article 2 de la Convention.

Peines pour actes de torture

13.Le Comité se déclare une nouvelle fois préoccupé par le fait que les peines prévues par la législation de l’État partie ne sont pas à la mesure de la gravité de l’infraction et ne tiennent pas compte des circonstances aggravantes (art. 4).

14. L’État partie devrait apporter à sa législation les modifications nécessaires pour que les actes de torture emportent des peines appropriées qui tiennent compte des circonstances aggravantes telles que l’incapacité permanente ou le décès des victimes, conformément à l’article 4 de la Convention.

Impunité des responsables d’actes de torture et de mauvais traitements

15.Le Comité relève que la Cour suprême de l’État partie a fermement condamné la pratique de la torture et toute forme de traitement inhumain ou dégradant par des agents de l’État, mais il est profondément préoccupé par le fait que les responsables du décès de Ramdoolar Ramlogun, qui a été brutalisé et tué en détention, n’ont pas été retrouvés ni dûment poursuivis. Il note que l’État partie a accordé une indemnisation financière dans cette affaire (art. 2 et 12).

16. L’État partie devrait tirer les leçons des procédures judiciaires liées au décès de Ramdoolar Ramlogun et opérer les changements nécessaires pour garantir que les auteurs d’actes de torture aient à répondre de leurs actes.

Non-refoulement

17.Le Comité prend note de l’explication fournie par la délégation selon laquelle la configuration géographique et les ressources de l’État partie restreignent sa capacité d’accueil et d’admission de demandeurs d’asile et de réfugiés. Il relève en outre que des dispositions sur la protection des droits de l’homme et le droit de faire appel d’une décision d’extradition ont été introduites dans la loi de 2017 sur l’extradition. Toutefois, il est préoccupé par l’absence de cadre juridique et procédural permettant de protéger les droits des personnes ayant besoin d’une protection internationale présentes sur le territoire de l’État partie (art. 3).

18. L’État partie devrait mettre en place un cadre juridique et procédural régissant l’expulsion et le refoulement afin de protéger les droits des personnes ayant besoin d’une protection internationale, conformément à l’article 3 de la Convention. Le Comité encourage en outre l’État partie à envisager de ratifier la Convention relative au statut des réfugiés, le Protocole relatif au statut des réfugiés et la Convention de l’Organisation de l’unité africaine régissant les aspects propres aux problèmes des réfugiés en Afrique.

Garanties juridiques fondamentales

19.Le Comité prend note des informations fournies par l’État partie, qui a déclaré que le droit à l’assistance d’un avocat et le droit d’avoir accès à un médecin étaient garantis aux personnes arrêtées et placées en garde à vue et que les renseignements à ce sujet étaient dûment consignés. Il est toutefois préoccupé par le fait que, pour des raisons de sûreté et de sécurité, les visites médicales se déroulent systématiquement sous surveillance (art. 2).

20. L’État partie devrait :

a) Stipuler dans le règlement interne de la police et les autres règlements pertinents que les visites médicales aux personnes arrêtées et détenues doivent se dérouler de manière confidentielle et que, lorsqu’une surveillance est demandée par le médecin, les agents qui en sont chargés doivent se tenir à portée de vue mais non à portée d’ouïe ;

b) Améliorer le mécanisme de surveillance des garanties fondamentales accordées aux détenus en faisant figurer des informations détaillées sur des questions telles que l’accès à un avocat et à un médecin, dans les dossiers transmis au Centre d’information de la police et à la division ou au service des opérations de la police.

Arrestation et détention avant jugement

21.Le Comité est préoccupé par le nombre d’arrestations auxquelles il est procédé dans l’État partie sans que la personne concernée soit raisonnablement soupçonnée d’une infraction. Il prend note de l’explication donnée par la délégation selon laquelle les modalités de la détention provisoire découlent de la complexité des enquêtes sur les infractions liées à la drogue, qui ont des ramifications internationales. Il est néanmoins préoccupé par le fait que, pour cette raison, le recours à la détention provisoire est de plus en plus fréquent et certaines personnes sont en détention provisoire depuis trois ans. Plus généralement, le Comité est préoccupé par la lenteur des procédures judiciaires dans l’État partie (art. 2, 11, 12 et 16).

22. L’État partie devrait :

a) Veiller à ce que les textes qu’il promulgue, notamment la loi sur les procédures policières et les preuves judiciaires qui doit être adoptée prochainement, prévoient des dispositions tendant à garantir que les arrestations et les détentions soient pleinement justifiées, et dispenser une formation à ce sujet aux membres des forces de l’ordre et de l’appareil judiciaire ;

b) Redoubler d’efforts pour promouvoir le recours à des peines de substitution et à des mesures non privatives de liberté afin de réduire le nombre et la longueur des détentions provisoires. La détention provisoire ne devrait être qu’une mesure de dernier ressort, utilisée dans des circonstances exceptionnelles et pour une durée limitée, conformément aux Règles minima des Nations Unies pour l’élaboration de mesures non privatives de liberté (Règles de Tokyo) ;

c) Prendre les mesures nécessaires pour réduire les retards dans les procédures pénales.

Irrecevabilité des déclarations obtenues par la torture

23.Le Comité relève avec préoccupation les informations montrant que la police de l’État partie accorde un poids excessif aux aveux à des fins d’enquête et de poursuites, et qu’elle extorque des aveux par la contrainte. Le Comité regrette en outre l’absence de renseignements sur les affaires dans lesquelles des agents ont été accusés d’avoir forcé des personnes arrêtées à faire des déclarations. Il est de plus préoccupé par la culture judiciaire voulant qu’une juridiction d’appel n’annulera que rarement une condamnation fondée sur une déclaration jugée recevable en première instance (art. 2 et 15).

24. Le Comité prie instamment l’État partie :

a) D’accélérer l’installation de dispositifs d’enregistrement audiovisuel dans les postes de police afin d’assurer une surveillance des procédures d’interrogatoire ;

b) De redoubler d’efforts pour améliorer les méthodes d’enquête fondées sur des preuves scientifiquement établies, notamment pour former les policiers à des méthodes d’interrogatoire non coercitives ;

c) De procéder aux modifications législatives nécessaires pour que les déclarations obtenues au moyen de la torture ou d’autres traitements cruels, inhumains ou dégradants soient considérées comme irrecevables ;

d) D’autoriser les juridictions d’appel à réexaminer la recevabilité des preuves, en s’appuyant sur la jurisprudence de la Cour suprême en l’affaire Rudolph Jean-Jacques c l’État  ;

e) D’enquêter sur toutes les allégations d’extorsion d’aveux par la torture, poursuivre les responsables présumés de ces actes et condamner à des peines ceux qui en sont reconnus coupables, et veiller à ce que les aveux obtenus par la torture ne soient pas considérés comme recevables.

Administration de la justice pour mineurs

25.Le Comité prend note des informations fournies par la délégation de l’État partie concernant la possibilité que les audiences impliquant la participation de mineurs se tiennent à huis clos. Il relève néanmoins avec préoccupation que le paragraphe 2, alinéa b), de l’article 4 de la loi relative à la délinquance juvénile prévoit que, si un mineur est inculpé conjointement avec un adulte, son procès se déroule devant une juridiction ordinaire. Il est également préoccupé de constater que l’âge minimum de la responsabilité pénale n’est pas défini en droit interne (art. 2, 12 et 16).

26. Renvoyant aux Règles minima des Nations Unies concernant l’administration de la justice pour mineurs (Règles de Beijing), le Comité recommande à l’État partie, dans le cadre de la révision des lois pertinentes, notamment du projet de loi sur la justice pour mineurs et du projet de loi sur les enfants :

a) De fixer un âge minimum légal de la responsabilité pénale qui soit compatible avec les normes internationales en la matière  ;

b) De prendre des dispositions pour garantir que les enfants en conflit avec la loi soient jugés devant des tribunaux pour mineurs et par des juges spécialisés.

Règles applicables à la détermination des peines

27.Le Comité note avec préoccupation que la Cour suprême n’applique pas de règles uniformes concernant la déduction du temps passé en détention provisoire de la durée de la peine (art. 11 et 16).

28.L’État partie devrait fixer dans la loi le principe de la déduction du temps passé en détention provisoire de la durée de la peine, comme préconisé dans l’arrêt rendu de la Cour suprême en l’affaire Kamasho.

Conditions de détention

29.Le Comité est préoccupé par les informations montrant que les conditions d’hygiène sont déplorables et que l’accès à la nourriture et à l’eau laisse à désirer dans les prisons de l’État partie (art. 11 et 16).

30. L’État partie devrait s’employer sans tarder à améliorer les conditions de vie dans ses prisons en garantissant à tous les détenus l’exercice du droit fondamental à l’eau, à l’assainissement et à une nourriture suffisante, conformément à l’Ensemble de règles minima des Nations Unies pour le traitement des détenus (Règles Nelson Mandela) . Le Comité engage en outre l’État partie à publier le rapport du Sous-Comité sur la visite qu’il a effectuée en  2017 dans le pays.

Mécanismes de plainte

31.Le Comité est préoccupé par les informations relatives à des actes de torture et des mauvais traitements imputés à des membres des forces de l’ordre qui, dans certains cas auraient entraîné la mort de la victime. De plus, tout en prenant note du grand nombre de plaintes déposées contre la police, qui témoigne de l’accessibilité des procédures existantes, le Comité constate avec préoccupation que très peu d’affaires ont été transmises au Directeur des poursuites publiques et au Ministre de la justice depuis la création de la Division des plaintes contre la police. Le Comité note en outre que la Division va être remplacée par la Commission indépendante des plaintes contre la police (art. 2, 12 et 13).

32. L’État partie devrait :

a) Mener des enquêtes diligentes, approfondies et impartiales sur toutes les plaintes pour torture et mauvais traitements mettant en cause des membres des forces de l’ordre et, le cas échéant, soumettre ces affaires au ministère public  ;

b) Veiller à ce que la nouvelle Commission indépendante des plaintes contre la police dispose des moyens nécessaires pour mener rapidement des enquêtes impartiales et exhaustives sur les plaintes faisant état d’actes répréhensibles commis par la police et à ce que les difficultés rencontrées par la Division des plaintes contre la police soient prises en considération dans la conception des procédures et du fonctionnement de la nouvelle institution ;

c) Charger la Commission de formuler des recommandations sur les mesures qu’il conviendrait de prendre pour prévenir la commission d’actes répréhensibles par les forces de l’ordre et l’infliction de mauvais traitements aux personnes en arrêtées ou détenues.

Indépendance des organes de contrôle et de plainte

33.Le Comité note avec préoccupation que la législation actuelle ne garantit pas l’indépendance de la Commission nationale des droits de l’homme, y compris de sa Division, qui joue le rôle de mécanisme national de prévention, ni de la Commission indépendante des plaintes contre la police, qui doit bientôt être opérationnelle, en particulier eu égard au pouvoir qu’a le Président de l’État partie de destituer les membres de ces institutions (art. 2 et 11 à 13).

34. L’État partie devrait garantir l’indépendance de la Commission nationale des droits de l’homme et du mécanisme national de prévention qu’est sa Division, ainsi que celle de la Commission indépendante des plaintes contre la police, notamment en garantissant dans la loi la stabilité du mandat de leurs membres. Le Comité renvoie l’État partie aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris).

Réparation et indemnisation

35.Le Comité note avec préoccupation qu’en vertu de la législation de l’État partie, la réparation à laquelle les victimes de la torture peuvent prétendre se limite à une indemnisation financière (art. 14).

36. L’État partie devrait prendre des mesures pour se doter de dispositions et de procédures permettant aux victimes de torture et de mauvais traitements de faire valoir et d’exercer leur droit à une réparation adéquate et appropriée, comprenant notamment la restitution, l’indemnisation, une réadaptation aussi complète que possible, la satisfaction et le droit à la vérité ainsi que les garanties de non-répétition. À  cet égard, le Comité renvoie l’État partie à son o bservation générale  n o  3 (2012) concernant l’application de l’article 14 de la Convention.

Violence à l’égard des policières

37.Le Comité s’inquiète de ce qu’aucune des plaintes pour violence et harcèlement sexuels déposées par des policières n’ait encore donné lieu à des inculpations. Il est également préoccupé par la lenteur du traitement de ces affaires (art. 2, 12 et 13).

38. L’État partie devrait :

a) Veiller à ce que les mécanismes de plainte permettant de dénoncer les cas de violence à l’égard de policières soient efficaces et répondent aux besoins et aux préoccupations des femmes  ;

b) Ouvrir d’autres enquêtes pour déterminer les causes de la lenteur des procédures concernant des affaires de violence à l’égard de policières et fournir des renseignements détaillés sur l’état d’avancement de ces enquêtes  ;

c) Prendre des mesures pour prévenir ce type de violence, et notamment organiser des cours de sensibilisation à la discrimination fondée sur le sexe.

Formation

39.Le Comité prend note des différentes formations aux droits de l’homme dispensées aux policiers et aux agents pénitentiaires. Il constate cependant avec regret qu’il existe peu de formations systématiques portant spécifiquement sur la Convention et son Protocole facultatif (art. 10).

40. L’État partie devrait veiller à ce que l’ensemble des fonctionnaires chargés de l’application des lois, civils et militaires, ainsi que le personnel médical, les agents publics et les autres professionnels ayant affaire aux personnes privées de liberté bénéficient des programmes de formation consacrés à la Convention et à son Protocole facultatif. Cette formation devrait porter notamment sur le Manuel pour enquêter efficacement sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (Protocole d’Istanbul). L’État partie devrait en outre évaluer l’impact ou les résultats de ces programmes.

Violence à l’égard des femmes

41.Le Comité relève avec satisfaction que l’État partie a adopté diverses mesures, notamment un plan d’action national visant à éliminer la violence sexiste et une nouvelle disposition élargissant la définition de la violence intrafamiliale et qu’il a reconnu au cours du dialogue constructif que l’élimination de la violence intrafamiliale devait être un objectif à long terme. Toutefois, il est préoccupé par le fait que :

a)Le viol conjugal n’est toujours pas défini comme une infraction pénale ;

b)Les dispositions de l’article 242 du Code pénal concernant l’homicide en cas d’adultère n’ont pas été abrogées ;

c)Les auteurs d’infractions liées à la traite ne sont pas poursuivis et condamnés en vertu de la loi relative à la lutte contre la traite, principalement parce que d’autres textes de loi sont encore appliqués dans ce type d’affaire (art. 1er, 2 et 16).

42. L’État partie devrait poursuivre les efforts qu’il déploie pour moderniser sa législation pénale afin de réprimer la v iolence à l’égard des femmes, y  compris la violence intrafamiliale et la traite, notamment :

a) En faisant du viol conjugal une infraction pénale distincte passible de peines appropriées ;

b) En abrogeant l’article 242 du Code pénal, qui excuse le meurtre d’un conjoint pris en flagrant délit d’adultère ;

c) En faisant mieux connaître la loi relative à la lutte contre la traite et en encourageant son application effective .

Procédure de suivi

43. Le Comité demande à l’État partie de lui faire parvenir au plus tard le 6 décembre 2018 des renseignements sur la suite qu’il aura donnée à ses recommandations concernant les méthodes d’interrogatoire et les aveux obtenus par la contrainte, les conditions de détention et les mécanismes de plainte (voir paragra phes 24 a), b), d) et e), 30 et  32). Dans ce contexte, l’État partie est invité à informer le Comité des mesures qu’il prévoit de prendre pour mettre en œuvre, d’ici la soumission de son prochain rapport, tout ou partie des autres recommandations formulées dans les présentes observations finales.

Autres questions

44. Le Comité recommande à l’État partie d’étudier la possibilité de faire les déclarations prévues aux articles 21 et 22 de la Convention par lesquelles il reconnaîtrait la compétence du Comité pour recevoir et examiner des communications émanant de particuliers relevant de sa juridiction .

45. Le Comité invite l’État partie à ratifier les principaux instruments des Nations Unies relatifs aux droits de l’homme auxquels il n’est pas encore partie.

46. L’État partie est invité à diffuser largement le rapport soumis au Comité ainsi que les présentes observations finales, dans les langues voulues, au moyen des sites Web officiels et par l’intermédiaire des médias et des organisations non gouvernementales.

47. L’État partie est invité à soumettre son cinquième rapport périodique d’ici au 6 décembre 2021. À cette fin, et compte tenu du fait que l’État partie a accepté d’établir son rapport selon la procédure simplifiée, le Comité lui adressera en temps voulu une liste préalable de points à traiter. Les réponses de l’État partie à cette liste constitueront le cinquième rapport périodique qu’il soumettra en application de l’article 19 de la Convention.