Nations Unies

CAT/C/JOR/2*

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr. générale

5 octobre 2009

Français

Original: arabe

Comité contre la torture

Examen des rapports présentés par les États parties en application de l’article 19 de la Convention

Deuxième rapport périodique des États parties devant être soumis en 1996

Jordanie**, ***

[3 juillet 2008]

Introduction

Conformément au paragraphe 1 de l’article 19 de la Convention, le Gouvernement du Royaume hachémite de Jordanie présente ci-après, en un seul document, ses deuxième, troisième et quatrième rapports sur l’application de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

La Jordanie a accompli beaucoup de progrès vers le développement humain sous toutes ses formes, notamment par la promotion des droits de l’homme, le renforcement de la démocratie et l’observation des normes internationales relatives aux droits de l’homme, y compris par la lutte contre toute forme de torture, de peine ou de traitement cruel, inhumain ou dégradant.

Ces progrès ont aussi été rendus possibles par des textes législatifs fondés sur la Constitution, ainsi que la Charte nationale, laquelle met en évidence l’importance accordée par ces textes aux libertés publiques et à la protection des droits de l’homme et assoit les principes et les fondements qui garantissent la poursuite du processus démocratique. Au Chapitre 2 de la Charte, il est stipulé au paragraphe 1 de l’Article 1 que «la Jordanie est un État de droit et de démocratie dont la légitimité, le pouvoir et l’efficacité sont l’émanation de la libre volonté de ses citoyens». C’est en outre un État dans lequel les autorités dans leur ensemble veillent à assurer les garanties juridiques, juridictionnelles et administratives requises et à protéger les droits de l’homme et la dignité et les libertés fondamentales de la personne humaine conformément aux principes consacrés par l’Islam et confirmés par la Déclaration universelle des droits de l’homme, ainsi que par tous les instruments internationaux relatifs à la question.

Le Gouvernement est bien conscient des aspects juridique et humanitaire de la torture, qui constitue un crime contraire à la morale et aux valeurs humaines, culturelles et religieuses qu’il observe et défend sur le territoire jordanien et au sein de nombreuses instances internationales. Sachant qu’en Jordanie, comme dans tout autre pays, ces valeurs sont parfois susceptibles d’être violées, le Gouvernement tient à affirmer que de telles violations constituent des actes isolés ne reflétant en aucun cas sa propre politique ou sa position sur la question. Il souhaite aussi réitérer son attachement aux nobles valeurs humaines émanant de la religion musulmane et de la civilisation arabe, ainsi que sa foi absolue dans la noblesse de la cause des droits de l’homme, principe fondamental dont il ne saurait s’écarter, d’autant que de telles pratiques sont rejetées par la société et jurent avec les valeurs éthiques et culturelles de l’humanité.

Le Gouvernement jordanien est satisfait de ce qu’il a accompli dans le sens du renforcement des droits de l’homme, sans prétendre avoir achevé toutes ses ambitions dans ce domaine. En dépit de nombreuses réalisations, il demeure convaincu qu’il reste beaucoup à faire. La poursuite des efforts dans ce domaine nécessite la mise en place d’un véritable partenariat entre le Gouvernement et les organisations de la société civile, mais également un soutien et une compréhension de la part des institutions de la communauté internationale, dont le Comité contre la torture, pour les efforts déployés par le Gouvernement et les circonstances dans lesquelles il opère.

D’autre part, le respect par la Jordanie des règles, des traités et des instruments internationaux (dont la Déclaration universelle des droits de l’homme et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques) auxquels il a adhéré constitue un des fondements du système judiciaire et juridique du pays. En outre, le Gouvernement est bien conscient de la gravité de la torture et du danger que représente le fait de la tolérer.

Mesures prises et progrès accomplis dans l’application de la Convention

1.Comme suite aux efforts déployés ces dernières années pour l’application de la Convention, afin d’en garantir la mise en œuvre sur le terrain, le Gouvernement jordanien a pris récemment une série de mesures importantes qui ont consisté, d’une part, à créer des institutions ou à renforcer celles qui existent déjà et, d’autre part, à apporter à la législation les modifications nécessaires, dont les détails seront présentés ultérieurement. Il convient notamment de mentionner les mesures ci‑après:

2.Création du Centre national des droits de l’homme en 2003, conformément aux Principes de Paris de 1993 relatifs au statut des institutions nationales des droits de l’homme, dont la tâche consiste notamment à recevoir et à traiter les plaintes émanant des citoyens. Le Centre s’est doté d’un groupe chargé des «centres de redressement et de réinsertion» qui a présenté au Gouvernement plusieurs rapports contenant des recommandations pour améliorer la situation des détenus, en application desquelles ce dernier a présenté un plan global prévoyant la construction de nouveaux centres et l’application de mesures pour assurer de meilleures conditions de vie, sanitaires et psychologiques aux détenus (la fermeture de la prison d’Al-Jafr est évoquée plus loin);

3.Le problème des détenus retenant l’attention des plus hautes autorités jordaniennes, le Gouvernement accorde une grande importance aux rapports émanant du Centre national des droits de l’homme et d’autres organisations de la société civile concernant les centres de redressement et de réinsertion et prend les mesures nécessaires pour y améliorer les conditions de détention. Il convient de noter qu’en Jordanie, les prisons sont appelées «centres de redressement et de réinsertion» conformément à la politique du Gouvernement, qui considère que l’objectif premier de ces centres est de réinsérer les prisonniers et de les réadapter et pas uniquement de les punir;

4.Le Gouvernement appréhende avec intérêt et un esprit constructif les rapports rédigés par la plupart des organisations nationales et internationales actives dans le domaine des droits de l’homme et considère que l’établissement d’un dialogue avec ces organisations constitue l’un des moyens essentiels de promouvoir le processus de réforme lancé en Jordanie en vue de protéger et de renforcer les droits de l’homme;

5.D’autre part, le Gouvernement jordanien a créé un service des droits de l’homme dans plusieurs ministères, dont le Ministère des affaires étrangères, le Ministère de l’intérieur et le Ministère de la justice. De même, un service des droits de l’homme a été mis en place à la Direction de la sûreté publique pour recevoir les plaintes contre toute infraction commise par un agent de la force publique. En outre, un Ministère du développement politique a été créé dans le but de sensibiliser les citoyens à toutes les questions relatives à la démocratie et aux droits de l’homme;

6.Création d’un bureau du Médiateur (Diwan al Madhalim) opérant, conformément à la loi, en tant qu’organe de surveillance indépendant chargé d’examiner les plaintes déposées par les citoyens contre des organismes publics, conformément aux normes internationales en vigueur dans ce domaine;

7.Attention particulière accordée en permanence par le Gouvernement, par l’intermédiaire des services concernés, aux centres de redressement et de réinsertion et aux lieux de détention, conformément à la politique de l’État consistant à réhabiliter les prisonniers, à éviter qu’ils ne soient rejetés par la société ou soumis à un traitement cruel ou dégradant, et mobilisation de tous les moyens nécessaires pour atteindre ce noble objectif. Néanmoins, il arrive parfois que soient commises des erreurs ou des violations isolées, dont les auteurs sont poursuivis en justice. Pour plus de clarté et de précision à ce propos, les mesures prises à cet effet son passées en revue ci-après;

8.Mise en place d’ateliers et organisation d’activités agricoles et artisanales dans certains centres de redressement et de réinsertion, en fonction des ressources disponibles, en vue de former les prisonniers, de les occuper à des activités utiles rémunérées et de leur permettre d’obtenir un diplôme professionnel délivré par «le Bureau de la formation professionnelle». Ces activités ont aussi pour but de préserver la dignité des prisonniers et de faciliter leur réinsertion sociale, en leur évitant les stigmates laissés par l’univers carcéral;

9.Aménagement, au sein des centres de redressement et de réinsertion, d’installations récréatives, sportives et culturelles, telles que terrains de sport et bibliothèques; organisation de conférences sur des sujets de culture générale et promotion de la vie spirituelle et religieuse des détenus, au moyen de causeries religieuses, par l’aménagement de salles de prière et la mise à disponibilité de tout le nécessaire pour la célébration des cultes;

10.Garantie de l’accès à une assistance juridique, par l’aménagement de salles spéciales dans l’ensemble des centres de redressement et de réinsertion, pour permettre aux détenus d’exercer leur droit de rencontrer leur avocat en privé au cours des différentes étapes du procès;

11.Autorisation accordée à toute personne habilitée par la loi à surveiller et inspecter les centres de redressement et de réinsertion (à savoir le Procureur général et ses assistants, les présidents des tribunaux et les membres du parquet) à y accéder pour recueillir toute plainte et remarque, contrôler les conditions de détention, remédier aux insuffisances constatées et garantir les droits des détenus et le respect des lois qui leur sont applicables;

12.Mesures prises pour permettre à toutes les organisations de la société civile, dont le Centre national des droits de l’homme et les organisations de défense des droits de l’homme, aux partis politiques et aux associations, ainsi qu’aux organisations internationales de défense des droits de l’homme et à la Croix-Rouge de visiter les centres de redressement et de réinsertion et de discuter avec les détenus en privé. Les autorités responsables de ces établissements enregistrent les observations constructives émises par ces organismes, accordent toute l’attention voulue aux critiques objectives formulées et apportent aux représentants desdits organismes toute l’assistance nécessaire. Plus de 400 visites de ce type ont eu lieu en 2006;

13.Fermeture de la prison d’Al-Jafr le 17 décembre 2006, sur ordre de Sa Majesté le Roi, et sa conversion en centre de formation professionnelle; construction de nouveaux centres de redressement et de réinsertion répondant aux normes internationales pouvant, chacun, accueillir plus de 1 000 personnes. L’un de ces établissements, situé à Al‑Muwaqqar, a été récemment ouvert; un autre, situé à Al-Mafraq, est en construction. L’objectif est de remédier de manière définitive au problème de surpeuplement que connaissent certains établissements et de répartir les détenus en fonction de leur âge, de la nature de l’infraction commise et de leur degré de dangerosité.

Mise en œuvre des dispositions de la Convention

Première partie

Article premier

14.Les droits de l’homme occupent une place importante dans la Constitution jordanienne, dont les dispositions concernant les droits de l’homme et les libertés sont conformes aux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme. Certains desdits droits figuraient d’ailleurs dans la Constitution jordanienne bien avant l’adoption des déclarations et des conventions internationales sur la question.

15.Depuis sa ratification et sa publication au Journal officiel, la Convention contre la torture fait partie intégrante du système juridique jordanien et a acquis force de loi. Par conséquent, tous les tribunaux nationaux doivent, lorsqu’ils sont saisis d’une affaire relevant de la Convention, se référer à la définition formulée à l’article premier de celle-ci.

16.La législation jordanienne actuellement en vigueur, notamment l’article 208 du Code pénal, a été modifiée pour ériger en infraction la torture, conformément au texte de la Convention. Cet article est désormais libellé comme suit:

1. Quiconque soumet une personne à un acte de torture interdit par la loi, quel qu’il soit, dans l’intention d’obtenir d’elle l’aveu d’un crime ou des informations sur ce crime est passible de six mois à trois ans d’emprisonnement.

2. Aux fins du présent article, le terme «torture» désigne tout acte par lequel une douleur ou des souffrances aiguës, physiques ou mentales sont intentionnellement infligées à une personne afin notamment d’obtenir d’elle ou d’une tierce personne des renseignements ou des aveux, de la punir d’un acte qu’elle ou une tierce personne a commis ou est soupçonnée d’avoir commis, de l’intimider ou de faire pression sur elle ou d’intimider ou de faire pression sur une tierce personne, ou pour tout autre motif fondé sur une forme de discrimination quelle qu’elle soit, lorsqu’une telle douleur ou de telles souffrances sont infligées par un agent de la fonction publique ou toute autre personne agissant à titre officiel ou à son instigation ou avec son consentement exprès ou tacite.

3. Si la torture provoque une maladie ou une blessure grave, la peine encourue est une peine de travaux forcés pour une période déterminée;

4. Nonobstant les dispositions de l’article 54 bis et de l’article 100 du Code pénal, le tribunal ne peut en aucun cas suspendre l’exécution de la peine prononcée dans le cas des crimes visés par le présent article, ni accorder les circonstances atténuantes.

17.En outre, l’article 333 du Code pénal prévoit une peine d’emprisonnement contre toute personne qui, intentionnellement, donne des coups ou inflige des sévices à une autre personne dont résulte une incapacité de travail. De même, la Constitution jordanienne garantit le droit général et absolu de chacun de saisir les tribunaux. Quant à l’article 256 du Code civil, il reconnaît le droit de la victime d’être indemnisée de tout dommage subi.

18.Aux termes de l’article 159 du Code de procédure pénale, tout élément de preuve ou toute information obtenus par la contrainte physique ou psychologique, sous quelque forme que ce soit, sont nuls et non avenus au regard de la loi. De la même manière, le défendeur est en droit de revenir, devant le Procureur général ou le tribunal, sur toute déclaration faite à un officier de la police judiciaire, sous la pression ou la contrainte physique ou psychologique.

19.Le fait que la Constitution jordanienne ne fasse aucune mention du «crime de torture» ne signifie en aucun cas qu’elle l’autorise. En outre, l’absence d’une telle mention dans la Constitution ne saurait être juridiquement interprétée comme un manquement aux obligations qui incombent à la Jordanie en vertu de la Convention contre la torture. Une telle situation ne peut être en effet considérée comme une carence dans la Constitution, et ce pour de nombreuses raisons, dont celles exposées ci‑après:

a)Comme la plupart des constitutions du monde, la Constitution jordanienne contient des règles globales fixant le cadre général dans lequel s’inscrivent les droits et les libertés individuels, laissant aux lois le soin de préciser le contenu desdits droits et libertés. Il est à noter à ce propos que la Convention contre la torture n’oblige pas les États parties à modifier leur constitution de façon à y incriminer la torture;

b)La législation nationale a érigé en infraction la torture, en particulier à l’article 208 du Code pénal qui, dans sa version récemment modifiée, mentionne expressément le crime de torture. Il en va de même pour l’article 49 du Code pénal militaire;

c)Depuis qu’elle a été ratifiée par le Royaume, la Convention contre la torture fait partie de la législation nationale jordanienne;

d)La Constitution jordanienne garantit le droit général et absolu de chacun de saisir les tribunaux. De même, l’article 256 du Code civil reconnaît le droit de la victime d’être indemnisée de tout dommage subi.

Article 2

20.Le Gouvernement jordanien a pris les mesures législatives, administratives et judiciaires nécessaires pour interdire la torture, comme en témoigne, entre autres, l’article 208 du Code pénal, tel que modifié récemment, qui érige en infraction la torture, en tant qu’acte dont l’auteur encourt les peines les plus sévères, comme le requiert la Convention.

21.En ce qui concerne les situations d’urgence exceptionnelles susceptibles de mettre en péril l’existence d’une nation, l’article 124 de la Constitution autorise l’adoption de lois dites «de défense», qui permettent le transfert de certains pouvoirs à une personne désignée par la loi, dont celui de suspendre les lois ordinaires de l’État en vue d’assurer la défense de la patrie. La loi de défense entre en vigueur sur un ordre du roi, agissant en application d’une décision du Conseil des ministres.

22.En 1992, sur ordre de Sa Majesté, il a été décidé de lever la loi martiale qui avait été proclamée pour faire face à des circonstances exceptionnelles. On notera que la loi de défense publiée au Journal officiel en 1992, en vertu de laquelle l’état d’urgence avait été décrété, ne confère que des droits bien déterminés au Premier Ministre et ne contient aucune disposition restreignant l’exercice des droits civils.

Article 3

23.La législation jordanienne est conforme aux dispositions du présent article concernant la liberté de circulation. En effet, l’article 9 de la Constitution dispose qu’il est illégal d’expulser un Jordanien de son pays ou de le contraindre à résider dans un lieu particulier, sauf dans les cas précisés par la loi. Ainsi, l’article 6 de la loi sur l’extradition des délinquants en fuite prévoit ce qui suit:

a)L’extradition d’un délinquant en fuite n’est permise que si l’infraction ne revêt pas un caractère politique ou si le juge de paix auquel l’intéressé est présenté a la preuve que le but de la demande d’extradition est de juger le délinquant ou de le punir pour une infraction politique;

b)L’extradition vers un État étranger d’un délinquant en fuite n’est permise que si la loi dudit État ou un accord conclu avec lui stipule que ledit délinquant ne peut être ni détenu ni poursuivi en justice pour une infraction, commise sur le territoire de cet État avant l’extradition, autre que celle qui est à l’origine de la demande et de l’autorisation d’extradition, sous réserve que le délinquant n’ait pas été renvoyé en Jordanie ou ne soit pas parvenu à y retourner;

c)L’extradition d’un délinquant en fuite n’est pas permise si celui-ci est accusé d’avoir commis en Jordanie une infraction autre que celle pour laquelle la demande d’extradition a été formulée ou s’il est incarcéré à la suite d’un jugement rendu par un tribunal jordanien. Son extradition n’est possible qu’après sa libération une fois qu’il a exécuté sa peine, après qu’il a été innocenté ou pour toute autre raison;

d)L’extradition d’un délinquant en fuite ne peut avoir lieu qu’après l’écoulement d’un délai de quinze jours à compter de la date à laquelle il a été arrêté en prévision de son extradition.

24.Les étrangers résidant légalement en Jordanie ont le droit de circuler librement à travers le Royaume. De même, tout individu est libre de quitter le Royaume à tout moment, sauf s’il lui est interdit de voyager en application d’une décision judiciaire rendue à la suite d’une infraction qu’il aurait commise.

25.Plusieurs décisions rendues par la Haute Cour de justice, dont celles qui portent les numéros 49/2001, 386/2000, 554/99, 385/99 et 86/99, ont entraîné l’annulation d’arrêtés d’expulsion prononcés à l’encontre de non-ressortissants par les autorités compétentes.

Article 4

26.Le Gouvernement a enjoint à l’ensemble des organes de la force publique de diffuser le texte de la Convention auprès de tous les officiers et membres de ces organes et a demandé aux responsables de veiller à ce qu’ils se conforment aux dispositions de la Convention et a appelé leur attention sur la gravité du recours à la torture et aux mauvais traitements.

Articles 5, 6 et 7

27.Toute personne qui affirme être victime d’actes de torture bénéficie d’une assistance dès sa présentation à l’avocat général. L’article 63 du Code de procédure pénale garantit le droit du défendeur d’être assisté par un avocat pour sa défense. Quant à l’article 66/2 de la même loi, il interdit à l’avocat général d’empêcher l’avocat de rencontrer le défendeur.

28.Lorsqu’une personne affirme avoir été torturée par des agents de la police judiciaire, il incombe à l’avocat général d’enregistrer la plainte dans le procès-verbal de l’enquête et de faire examiner, si nécessaire, l’auteur de la plainte par un médecin légiste.

29.En outre, tout détenu est en droit de contester son placement en détention devant le tribunal compétent et peut, également, interjeter appel s’il est maintenu en détention.

30.Le placement en garde à vue, dont la durée fixée par la loi est de vingt-quatre heures, a lieu dans des lieux de détention temporaires déclarés et soumis à l’inspection des autorités judiciaires. De même, selon l’article 112 du Code de procédure pénale, l’interrogatoire doit avoir lieu au cours de ces vingt-quatre heures. Si l’avocat général décide de placer l’accusé en détention, l’incarcération de ce dernier a lieu dans un centre de redressement et de réinsertion soumis à la surveillance et à l’inspection des autorités judiciaires, conformément aux dispositions de la loi no 9 de 2004 sur les centres de redressement et de réinsertion, qui habilite le Ministre (de la justice) ou son représentant à inspecter les centres afin de s’assurer que les dispositions de la loi y sont appliquées. En outre, la même loi fait obligation au directeur de chaque centre d’établir, tous les trois mois, un rapport périodique contenant des informations sur la situation dans son établissement, ainsi que sur les conditions des détenus et les services qui leur sont fournis.

31.Par ailleurs, l’article 8 de la loi sur les centres de redressement et de réinsertion autorise les présidents des tribunaux, le Procureur général et les membres du parquet à visiter les centres et à examiner, selon leur domaine de compétence, les plaintes des détenus contre tout acte de torture ou de mauvais traitement.

32.L’article 113 de la même loi reconnaît à tout individu le droit d’engager des poursuites pour détention arbitraire, telle que définie dans le Code pénal en cas de garde à vue de plus de vingt‑quatre heures sans interrogatoire.

Articles 8, 9 et 10

33.Le Gouvernement œuvre pour la diffusion par le biais des médias des normes relatives aux droits de l’homme au moyen de programmes de sensibilisation. Par ailleurs, l’enseignement de ces normes fait désormais partie des programmes scolaires.

34.Des services de police de proximité ont été créés et leur rôle a fait l’objet d’une campagne de sensibilisation dans les médias dans le but d’instaurer un climat de confiance entre les agents de police et les citoyens et d’associer le citoyen au maintien de la sécurité.

35.Les organes de la force publique forment leurs membres aux questions relatives aux droits de l’homme pour leur permettre d’accomplir leurs tâches de la meilleure manière possible, conformément aux règlements et aux lois, ainsi qu’aux obligations qui incombent à la Jordanie en vertu des instruments relatifs aux droits de l’homme qu’elle a ratifiés.

36.Le personnel des centres de redressement et de réinsertion est le principal bénéficiaire de cette formation, qui est dispensée dans le cadre de programmes et de stages, en partie en Jordanie, dans les locaux de l’École de Police royale, et en partie à l’étranger, dans le cadre de missions d’étude effectuées par des officiers et d’autres membres du personnel des centres dans différents pays.

37.Les forces de sécurité coopèrent avec plusieurs organismes, notamment des organisations non gouvernementales, et avec le Centre national des droits de l’homme, pour assurer la formation de leur personnel. Ainsi, de nombreux stages ont été organisés à l’intention du personnel des centres de redressement et de réinsertion, et des agents de la police judiciaire et du Service des renseignements généraux. Ont également été organisés, en coopération avec Penal Reform International, de nombreux cours de formation consacrés à l’administration des centres, à la protection des droits des détenus et aux règles internationales minimum pour le traitement des détenus.

38.D’autres stages, organisés en coopération avec le Programme des Nations Unies pour le développement, ont porté sur la garantie d’une procédure équitable, conformément aux normes internationales. De même, les agents de la force publique et du Service des renseignements généraux ont participé à des stages portant, entre autres, sur la prévention du crime, les droits de l’homme et la Convention contre la torture. D’autres stages ont été organisés, en collaboration avec des organismes internationaux, tels que le Comité international de la Croix‑Rouge, le Croissant‑Rouge et le Haut‑Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, et différentes organisations non gouvernementales.

39.La création d’un bureau d’information et d’une station de radio (Sécurité FM) à la Direction de la sûreté publique témoignent de la politique d’ouverture médiatique et de transparence vis-à-vis des citoyens, dont les plaintes et les remarques sont recueillies par téléphone et reçoivent des réponses claires et constructives dans des déclarations faites par l’intermédiaire de la presse ou en direct. Ces initiatives facilitent la vie du citoyen en lui évitant de se déplacer pour déposer une plainte ou formuler des critiques.

40.Les différentes réunions d’information, dont les conférences de presse et les colloques, organisées aux quatre coins du Royaume sur le thème de la violence au foyer dénotent une prise de conscience de ce phénomène au sein de la population. À cet égard, les fonctionnaires qui opèrent dans le secteur de la famille, en particulier à la Direction de la protection de la famille et dans d’autres organismes publics concernés, s’efforcent de sensibiliser davantage la société aux méthodes éducatives modernes qui permettent d’éviter la violence. D’autre part, certaines ONG commencent à diffuser des spots publicitaires, à la télévision et à la radio, sur le thème de la violence au foyer et, en particulier de la violence contre les femmes.

41.La Convention contre la torture est désormais inscrite au programme de formation des agents de la police. Son texte a été diffusé à tous les niveaux de la hiérarchie des organes de la force publique. En outre, les responsables de ces organes ont reçu l’ordre d’insister auprès de leurs subordonnés pour qu’ils se conforment aux dispositions de la Convention, et de mettre en évidence la gravité de tout acte pouvant être assimilé à la torture en vertu des dispositions de la Convention, instrument qui fait désormais partie intégrante du système juridique jordanien.

42.L’année passée, la Direction de la sûreté publique a signé un accord avec le Centre de réadaptation et de recherche pour les victimes de la torture (Danemark), en vertu duquel plusieurs ateliers ont été organisés avec l’aide du Centre et en collaboration avec des organisations de défense des droits de l’homme nationales et internationales. Cet accord prévoit que le Centre apporte une assistance technique et une formation aux agents de la force publique pour améliorer leurs qualifications en matière d’enquête et renforcer le respect des droits de l’homme dans le cadre des procédures d’enquêtes. Ce projet durera deux ans.

43.Une formation est dispensée au personnel des centres de redressement et de réinsertion pour qu’il se comporte conformément à la loi et aux règles déontologiques. Des incitations financières lui sont offertes pour l’engager à respecter ces règles. En outre, des critères précis sont fixés en ce qui concerne les qualifications et les qualités que doivent avoir les membres du personnel de ces centres.

44.L’Institut jordanien de la magistrature organise des stages pour former les juges aux dispositions des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, en particulier la Convention contre la torture, afin qu’ils participent à l’effort destiné à prévenir le recours à la torture dans les prisons.

Article 11

45.Le Gouvernement a publié une circulaire à l’intention des autorités concernées pour appeler leur attention sur la nécessité de réduire le nombre d’internements administratifs. En application de cette circulaire, de nombreuses personnes faisant l’objet d’une mesure d’internement administratif ont été libérées.

46.La situation dans les centres de redressement et de réinsertion et les lieux de détention, les conditions de vie au sein de ces établissements et le respect des instructions concernant le traitement des détenus font l’objet d’inspections et d’un contrôle judiciaire. La loi est appliquée dans toute sa force à toute personne susceptible de porter atteinte à l’intégrité et à la sécurité des détenus.

47.Les conditions dans les centres de redressement et de réinsertion et le comportement de leur personnel sont surveillés par les pouvoirs publics, le bureau de l’Inspecteur général, la Direction de la sécurité préventive, l’administration des centres et le bureau du Médiateur pour les droits de l’homme, et les mesures prévues par la loi sont prises contre toute personne reconnue coupable de mauvais traitement à l’encontre d’un détenu, comme le confirment les statistiques officielles publiées par la Direction de la sûreté publique.

48.Des boîtes destinées à recueillir les plaintes ont été placées dans tous les centres de redressement et de réinsertion. Elles sont gérées par le bureau du Médiateur pour les droits de l’homme, et les plaintes qui y sont déposées sont traitées conformément aux dispositions de la loi. Par ailleurs, une salle d’opérations a été créée à la Direction des centres pour assurer le suivi des questions relatives aux procès, aux requêtes et à la comparution devant les tribunaux.

Article 12

49.L’article 3 du Code pénal énonce en ces termes le principe de légalité des infractions: «Il n’y a pas de crime ni de peine en l’absence d’un texte pénal.». Il dispose également que toute loi imposant des peines plus lourdes ne peut être appliquée à des infractions commises avant son entrée en vigueur. En revanche, une nouvelle loi, qui supprime ou réduit une peine, est appliquée aux infractions commises avant son entrée en vigueur, conformément au principe de «la loi la plus favorable à l’accusé», comme le stipule l’article 4 du Code pénal, aux termes duquel «toute loi modifiant une peine à l’avantage du défendeur est applicable aux actes commis avant son entrée en vigueur et au sujet desquels aucun jugement définitif n’a été prononcé».

50.Toute personne qui affirme avoir été victime d’actes de torture est en droit, conformément à la loi, de saisir la justice en déposant une plainte (elle peut également intenter une action au civil en réparation du dommage causé). Ce droit est fondé sur le principe de l’égalité des Jordaniens devant la loi, en vertu duquel les tribunaux sont accessibles à tous sans distinction. Il existe ainsi des moyens équitables d’accès à la justice prévus dans le Code de procédure pénale et le Code de procédure civile.

51.Les allégations de certains détenus, qui affirment avoir été victimes de torture au cours de leur interrogatoire, ont fait l’objet d’une enquête sérieuse et transparente. Il s’est avéré que la majeure partie de ces plaintes étaient mal intentionnées et que les marques de blessures constatées sur le corps des détenus étaient dues, soit à des coups reçus lors de bagarres avec d’autres détenus, soit au recours contraint des gardiens à la force pour maîtriser des détenus qui leur avaient résisté avec violence. Or, le recours à la force en cas de nécessité fait partie des pouvoirs conférés à la police par l’article 9 de la loi sur la sûreté publique. Dans d’autres cas, certains prévenus ont prétendu à leur procès qu’ils avaient été victimes d’actes de torture ou de mauvais traitements, dans le but d’éviter une condamnation. Dans d’autres encore, il est apparu, à la suite d’enquêtes approfondies et d’examens médicaux, que les plaintes étaient fondées. Les policiers impliqués dans ces affaires ont été traduits en justice pour répondre de leurs actes. C’est dire que les membres des forces de sécurité ne jouissent d’aucune impunité en cas de plainte pénale quelle que soit l’infraction, surtout lorsqu’il s’agit d’actes de torture ou de mauvais traitements.

Article 13

52.Un nouveau dispositif a été mis en place afin d’organiser la procédure de plainte pour les personnes détenues dans les centres de redressement et de réinsertion et d’autres lieux de détention. Ce dispositif permet, notamment, d’organiser l’inspection assurée par le bureau du Procureur général, de gérer les visites mensuelles ou hebdomadaires des différents établissements qu’y effectuent l’avocat général, d’établir un registre spécial des plaintes reçues par les services du Procureur général et d’instaurer un environnement propice au traitement et au suivi de ces plaintes par les organes compétents, en coordination avec la Direction des droits de l’homme du Ministère de la justice. En outre, les plaintes reçues par le Ministère de la justice sont transférées, par l’intermédiaire du Centre national des droits de l’homme et de l’Organisation arabe de défense des droits de l’homme, au Procureur général pour enquête et décision.

Plaintes récemment traitées par le Ministère de la justice

N o

Provenance de la plainte

Date du dépôt de la plainte

Objet de la plainte

Mesures prises par le Ministère de la justice

1.

Centre national des droits de l’homme

26 août 2007

Mauvais traitements infligés dans la prison de Swaqa

Plainte transférée au Procureur général

2.

Organisation arabe de défense des droits de l’homme

3 septembre 2007

Organisations islamiques de la prison de Swaqa

Plainte transférée au Procureur général

3.

Organisation arabe de défense des droits de l’homme

4 septembre 2007

Maltraitance dans plusieurs centres de redressement

Plainte transférée au Procureur général

53.Un bureau du Médiateur des droits de l’homme, relevant directement du Directeur de la sûreté publique, a été créé à la Direction de la sûreté publique. Il est chargé de recevoir les plaintes des citoyens victimes de traitements cruels ou humiliants, de poursuivre toute personne reconnue coupable d’abus d’autorité ou d’utilisation abusive de la loi et de veiller à l’application des normes internationales relatives aux droits de l’homme dans les centres de redressement et de réinsertion, les lieux de détention et toutes les unités des services de la sûreté publique concernées par les questions relatives aux droits de l’homme. Par ailleurs, une Direction des droits de l’homme a été récemment mise en place au Ministère de l’intérieur pour assurer le suivi des affaires et des plaintes relatives aux droits de l’homme.

54.Il existe plusieurs organisations de défense des droits de l’homme en Jordanie, qui reçoivent les plaintes des citoyens et suivent leur examen par les autorités. La plus importante est le Centre national des droits de l’homme, créé en vertu d’une loi qui garantit son indépendance et l’habilite à s’occuper des questions relatives aux droits de l’homme. Le Centre est doté d’un service de surveillance qui assure le suivi des plaintes déposées par les citoyens auprès des autorités et effectue des visites inopinées dans tous les centres de redressement et les lieux de détention du Royaume.

55.Lorsqu’une personne affirme avoir été torturée par des agents de la police judiciaire, le Procureur général est tenu de consigner la plainte dans un procès‑verbal et de faire examiner, si nécessaire, l’auteur de la plainte par un médecin légiste.

56.Conformément aux dispositions de la loi no 9 de 2004 sur les centres de redressement et de réinsertion, le Ministre, ou son représentant, est habilité à inspecter les centres pour s’assurer de l’application de la loi. Il incombe aux directeurs de centre de publier, tous les trois mois, un rapport périodique sur la situation dans chaque centre, les conditions de vie des détenus et les services dont ils bénéficient.

57.L’article 8 de la même loi autorise également les présidents des tribunaux, le Procureur général et les membres du parquet, chacun selon son domaine de compétence, à visiter les centres de redressement et de réinsertion et à assurer le suivi des plaintes déposées par les détenus qui affirment avoir été victimes de torture ou de mauvais traitements.

58.Les plaintes des victimes présumées de torture sont examinées par le Procureur général de la police et le tribunal de la police qui relèvent tous deux de la Cour de cassation.

59.Selon les statistiques de la Direction de la sûreté publique, de nombreuses plaintes contre des policiers ont fait l’objet d’une enquête judiciaire menée par le Procureur de la police ou le tribunal de police.

Plaintes déposées contre des policiers ces trois dernières années:

1er janvier-31 décembre 2005:

28 affaires:

14 condamnations;

14 affaires classées sans suite.

1er janvier-21 juin 2006:

8 affaires:

3 procédures en cours;

3 condamnations;

2 affaires classées sans suite.

Article 14

60.La loi jordanienne garantit le droit d’être indemnisé de tout dommage subi, quel qu’en soit l’auteur et même si ce dernier est incapable de discernement. En effet, l’article 256 du Code civil dispose ce qui suit: «Toute personne, même incapable de discernement, ayant causé un dommage à autrui, est tenue de dédommager la victime.».

61.En outre, la Constitution jordanienne reconnaît à toutes les personnes qui résident au Royaume le droit d’intenter une action en justice pour réclamer un droit.

62.Les tribunaux jordaniens ont prononcé de nombreux jugements ordonnant le dédommagement de victimes de mauvais traitements, dont l’arrêt no4433 rendu en 2003 par la Cour de cassation.

Article 15

63.Les tribunaux spéciaux ont été établis conformément à la Constitution. Ils sont soumis au contrôle de la Cour de cassation, de la même manière que toute autre juridiction ordinaire. La Cour de cassation a déjà rendu plusieurs arrêts invalidant certains jugements prononcés par ces tribunaux au motif que les accusés avaient été soumis à des pressions physiques et morales lors de l’enquête. Suit un résumé de certains de ces arrêts:

64.Arrêt de la Cour de cassation no450/2004 du 17 mars 2004 contenant ce qui suit: «Si la juridiction de jugement parvient à la conclusion que les aveux de l’accusé à la police ont été obtenus dans des circonstances qui jettent un doute sur leur authenticité ou que des traces de coups et de tortures sont visibles, elle est en droit de ne pas tenir compte de ces aveux.».

65.Arrêt de la Cour de cassation no1513/2003 en date du 4 mai 2006 contenant ce qui suit: «Les déclarations obtenues par la violence et la contrainte ne peuvent être utilisées pour condamner un prévenu.».

66.Il est également possible de se reporter à de nombreux arrêts de la Cour de cassation annulant des jugements prononcés par les tribunaux spéciaux; certains de ces arrêts sont énumérés ci‑après:

a)Arrêt no 820/2003 du 23 novembre 2003;

b)Arrêt no 552/99 du 23 août 1999;

c)Arrêt no 256/98 du 19 mai 1998;

d)Arrêt no 51/98 du 23 mars 1998, qui contient ce qui suit: «S’il existe des preuves irréfutables que les déclarations d’un prévenu ont été obtenues sous la contrainte ou la torture et sans son libre consentement, elles doivent être écartées car elles ne sont pas valables.»;

e)Arrêt no746/97 du 20 janvier 1998;

f)Arrêt no 327/94 du 22 août 1994;

g)Arrêt no 271/91 du 1er octobre 1992.

Article 16

67.Le nombre d’infractions passibles de la peine de mort a été réduit. En 2006, le Gouvernement avait soumis, à cet effet, des projets d’amendements à l’Assemblée nationale en vue d’abolir la peine de mort et la remplacer par les travaux forcés à perpétuité pour certaines infractions visées à l’article 38 du Code pénal, à l’alinéa a de l’article 11 de la loi sur les armes à feu et les munitions et aux articles 8 et 9 de la loi sur les stupéfiants et les substances psychotropes. Ces projets ont été adoptés et publiés au Journal officiel en 2006. Par ailleurs, la peine de mort n’est pas appliquée aux personnes de moins de 18 ans, aux femmes enceintes et aux malades mentaux. En outre, la possibilité d’amnistie et de grâce est prévue par le Code pénal (art. 50 et 51), ainsi que par l’article 38 de la Constitution, qui donne au roi le droit d’amnistie et de grâce, ainsi que celui de réduire la peine, sachant que le nombre de condamnés à mort est en diminution constante, comme l’indiquent les statistiques ci‑après.

68.Affaires dans lesquelles la Cour d’assises a prononcé la peine capitale entre 1999 et 2006.

Année

Nombre d’affaires dans lesquelles la peine de mort a été prononcée

Nombre de condamnés pour lesquels la sentence a été exécutée

Hommes

Femmes

1999

25

14

0

2000

10

4

0

2001

13

7

0

2002

16

3

1

2003

13

7

0

2004

7

0

1

2005

5

9

0

2006

12

1

0

2007

Total

101

45

2

69.L’application de la peine de mort est limitée aux infractions pénales les plus graves telles que le meurtre, les actes terroristes et le viol de mineur. Elle n’est exécutée qu’au terme d’une série de procédures conformes aux normes établies par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Dans le cas des infractions passibles de la peine de mort, le Code de procédure pénale impose en effet au président du tribunal l’obligation de demander à l’accusé s’il a choisi un avocat pour le défendre. S’il ne l’a pas déjà fait, le tribunal en désigne un aux frais de l’État. En application de l’article 275 c) du même code, la Cour de cassation réexamine toute condamnation à la peine capitale, même si le condamné n’en a pas fait la demande. Si la Cour constate que la loi n’a pas été dûment appliquée ou estime que les preuves ne sont pas suffisantes pour condamner l’accusé, elle annule la condamnation et renvoie l’affaire devant le tribunal qui a prononcé la décision pour qu’il la réexamine. Une fois que la condamnation à mort est devenue définitive, le Procureur général transmet le dossier de l’affaire au Ministre de la justice, accompagné d’un rapport contenant un exposé des circonstances de l’affaire, des preuves sur lesquelles est fondée la décision et des motifs nécessitant l’exécution de la peine de mort ou sa commutation en une autre peine. Le Ministre de la justice transmet à son tour le dossier de l’affaire, accompagné du rapport, au Premier Ministre pour qu’il le présente en Conseil des ministres. Ce dernier examine alors les documents mentionnés et le rapport du Procureur général et exprime son avis quant à la nécessité d’exécuter la peine capitale ou de la commuer en une autre peine puis transmet sa décision accompagnée de l’exposé de son avis à Sa Majesté le Roi. Si le roi l’approuve, l’exécution a lieu dans l’enceinte de la prison ou dans tout autre lieu désigné par la volonté royale.

Deuxième partie

Réponses aux questions posées par le Comité pendant l’examendu rapport de la Jordanie

Question 1

70.Pour ce qui est d’inscrire la Convention contre la torture dans l’ordre juridique jordanien, il y a lieu de noter que la plupart des articles de la Convention figurent sous une forme ou une autre dans la législation jordanienne. Pour faire en sorte que la Convention fasse partie de l’ordre juridique jordanien, le Gouvernement l’a publiée au Journal officiel en 2006.

Question 2

71.Concernant le statut juridique de la Charte jordanienne et sa relation avec la Constitution, il faut préciser que la Charte ne remplace pas la Constitution, mais repose sur les mêmes principes. Elle est le repère qui guide nos actes et la norme par laquelle nous déterminons si nous sommes sur la bonne voie. La Charte est donc un document qui clarifie les articles de la Constitution, dont le texte remonte à plus de cinquante ans, et représente le cadre de référence sur lequel se fondent le législateur et le décideur jordaniens dans tous les domaines.

72.Les articles de la Charte sont en harmonie avec les dispositions de la Constitution, dont ils complètent et clarifient les points difficiles à interpréter. Dans cette optique, certains textes législatifs, tels que la loi sur les partis, le Code de l’édition et les publications et la loi sur la protection de l’environnement, émanent essentiellement de la Charte.

73.Les principes de la Charte nationale sont appliqués au moyen de textes législatifs qui en expriment concrètement les dispositions.

Question 3

74.En ce qui concerne l’observation selon laquelle il n’existe pas de définition de la torture dans la loi jordanienne et en réponse à la recommandation sur la question, l’article 208 du Code pénal jordanien a été modifié et contient désormais une définition de la torture. De même, afin d’assurer l’adoption intégrale de la définition de la torture énoncée dans la Convention, le Gouvernement jordanien a donné suite à la recommandation du Comité en incorporant la Convention à la législation jordanienne et en en publiant le texte au Journal officiel.

75.Le Code pénal jordanien traite de l’ensemble des cas de torture et autres peines ou traitements inhumains ou cruels mais sous forme d’articles et de sanctions ou en définissant chaque infraction pénale ou délit. Pour cette raison le texte du Code pénal, qui érige la torture en infraction, ne décrit parfois pas en détail la nature des comportements visés. Il se borne à mentionner l’acte criminel, étant entendu que tout comportement constitutif d’un tel acte est visé par l’interdiction et que la nature de l’acte lui-même définit les types de comportement constitutifs de cet acte.

76.Il arrive que le Code pénal jordanien ne définisse pas certaines infractions. Il se contente d’un énoncé des différentes infractions. Mais puisque l’objet de la définition, qui figure dans la Convention, est couvert par les textes législatifs et appliqué dans la pratique, le but visé par cette définition est atteint.

Question 4

77.Concernant l’obligation pour les forces armées et les forces de sécurité de suivre des stages de formation, il y a lieu de signaler que les membres des forces armées participent à de nombreux cours et missions d’étude en Jordanie et à l’étranger, dont certaines sont du niveau de la licence et d’autres du niveau de la maîtrise. Cette formation couvre tous les domaines, notamment les conventions internationales et le droit international humanitaire; s’y ajoutent divers cours organisés par les facultés et les universités relevant des forces armées qui sont ouverts aux membres des forces de sécurité d’autres pays, en particulier des pays voisins, ainsi qu’il a été précisé précédemment.

78.S’agissant de l’appareil de sûreté publique, une grande attention est accordée à la formation des officiers et agents de ce corps, le but étant d’améliorer les compétences de ses membres, notamment ceux qui sont en contact direct avec les citoyens. Différentes sessions sont organisées: certaines visent à dispenser une formation de base, d’autres une formation spécialisée. Le programme de ces sessions comprend des conférences sur la police scientifique, les sciences juridiques, les relations publiques et les droits de l’homme, destinées à doter les participants des compétences voulues. Les questions relatives aux droits de l’homme, dont celle de la lutte contre la torture, constituent un des principaux modules.

79.Il y a une coopération et une coordination entre la Direction de la sûreté publique et les diverses organisations gouvernementales et associations bénévoles locales et internationales actives dans le domaine des droits de l’homme. Dans ce cadre, plusieurs sessions de formation ont été organisées dans les diverses régions du pays à l’intention des officiers de la police judiciaire et de leurs assistants issus de la Direction de la sûreté publique.

Question 5

80.En ce qui concerne les lois destinées à assurer une protection temporaire aux réfugiés et la non-expulsion d’étrangers vers des pays où ils risquent d’être soumis à la torture, il y a lieu de préciser que même s’il n’existe pas de lois sur l’asile en Jordanie, les réfugiés y reçoivent un traitement bien meilleur que celui qui leur est réservé dans de nombreux autres pays, de l’aveu même d’organismes internationaux tels que l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) et le Haut‑Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés. Pour éclairer le Comité sur la question, quelques remarques s’imposent sur la situation des réfugiés en Jordanie.

81.Le pays a accueilli de grandes vagues de réfugiés au cours des cent dernières années, dont les premières ont été celles des Tcherkesses, des Tchétchènes et des Arméniens en provenance de l’Asie centrale et du Caucase, suivies par celles des Palestiniens, dont le problème qui remonte à 1947, année où l’ONU a adopté la décision de partition de la Palestine historique, s’est poursuivi en 1967 avec l’occupation de la Cisjordanie et de la bande de Gaza et dure jusqu’à nos jours. La Jordanie est considérée comme la principale destination des réfugiés palestiniens, ceci pour un certain nombre de raisons dont les plus importantes sont le bon traitement dont ils bénéficient, leurs affinités et liens de parenté avec les Jordaniens, la simplicité des procédures et l’attitude positive des autorités à leur égard qui repose sur des principes humanitaires plutôt que juridiques.

82.Le Royaume hachémite de Jordanie a accordé la pleine citoyenneté aux premières vagues de réfugiés, y compris les réfugiés palestiniens. La Jordanie est d’ailleurs considérée comme le premier pays en ce qui concerne le nombre de réfugiés naturalisés par rapport à la population locale. Les réfugiés qui vivent en Jordanie peuvent être classés en deux catégories selon l’organisme dont ils relèvent, à savoir:

Les réfugiés palestiniens

83.Il y a 13 camps de réfugiés palestiniens et l’Office international de secours propose ses services dans 10 d’entre eux seulement, tandis que le Gouvernement jordanien s’occupe intégralement des 3 autres, qui sont le camp de Maadaba, le camp de Hayy al-Amir Hassan et le camp de Sokhna. La Jordanie fournit à l’ensemble des camps des services que ce soit directement ou indirectement, ces camps ayant été aménagés sur des terrains appartenant à l’État ou des terrains privés loués par l’État jordanien et où la Jordanie continue à assumer la responsabilité du maintien de l’ordre, ainsi que de la mise en place et de l’entretien de l’infrastructure. Seulement 18 % des réfugiés palestiniens enregistrés à l’UNRWA en Jordanie résident dans ces camps, la majorité d’entre eux vivant à l’extérieur. Alors que l’UNRWA fait face à une crise financière aiguë, qui rend difficile la continuation de ses services aux réfugiés, la Jordanie est devenue à la fois le principal pays d’accueil et le principal pourvoyeur de fonds pour les réfugiés palestiniens. La part allouée à la Jordanie dans le budget de l’UNRWA ne dépasse pas 21 %, bien que le pays accueille plus de 42 % du nombre total des réfugiés palestiniens.

84.La réduction des services de l’Office international de secours et de travaux pour les réfugiés palestiniens due au manque de fonds a alourdi le fardeau du Gouvernement jordanien, qui a été obligé de suppléer l’UNRWA.

85.Pour donner une idée de la baisse de la quantité et de la qualité des services fournis par l’UNRWA, nous signalerons que l’allocation que l’Office verse à chaque réfugié est passée d’environ 200 dollars des États‑Unis dans les années 70 à seulement 70 dollars actuellement. La diminution du financement et des services assurés par l’UNRWA a des effets sur les réfugiés et sur les pays d’accueil, à qui il incombe de prendre en charge la plus grande partie des prestations non fournies par l’UNRWA dans les domaines de la santé, de l’éducation et des autres services sociaux, situation à laquelle il n’est possible de remédier qu’en augmentant le budget de l’Office pour couvrir les coûts des services requis.

86.Il est difficile d’énumérer tous les services qu’a fournis et continue de fournir le Gouvernement jordanien aux réfugiés palestiniens en Jordanie ou de donner des estimations précises de leur valeur, car les réfugiés palestiniens en Jordanie sont des citoyens jordaniens. Ils ont la nationalité jordanienne et ils ont tous les droits et tous les devoirs afférents à cette citoyenneté en attendant que leur problème trouve une solution. Selon les estimations officielles, le montant de ces services se chiffre à environ 600 millions de dollars pour l’année 2007.

Réfugiés autres que les Palestiniens

87.En ce qui concerne les réfugiés non palestiniens, qui relèvent du Haut‑Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (UNHCR), le Gouvernement jordanien n’a jamais rejeté une demande d’asile au point de mettre la vie d’un réfugié en danger. Il respecte les droits de l’homme et observe les principes humanitaires universellement reconnus. Il coopère étroitement en ce qui concerne les réfugiés et les demandeurs d’asile avec le bureau du HCR à Amman, avec lequel il a signé un mémorandum d’accord qui contient plusieurs dispositions correspondant dans une certaine mesure à celles de la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés et de son protocole additionnel de 1967.

88.Comme mentionné précédemment, la Jordanie a accueilli de nombreuses vagues d’émigrants de diverses nationalités, la dernière en date étant celle des Iraquiens, dont l’exode massif a débuté environ avec la deuxième guerre du Golfe (guerre de libération du Koweït), en sorte que le nombre des Iraquiens en Jordanie dépassait parfois le million.

89.Le Gouvernement jordanien ne traite pas les Iraquiens résidant en Jordanie comme des réfugiés ou comme des résidents étrangers, mais comme des hôtes contraints de quitter leur pays par les événements qui s’y sont produits. Pour cette raison, il accorde aux Iraquiens un traitement spécial.

90.Le Gouvernement jordanien coopère avec les organismes internationaux et les organisations non gouvernementales s’occupant des réfugiés pour assurer à ceux-ci le maximum possible de protection. Parmi ces organismes et organisations figurent le Haut‑Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, la Croix-Rouge et le Croissant-Rouge.

91.La Jordanie coopère avec ces organismes pour assurer aux Iraquiens dans ses hôpitaux et dispensaires des soins de santé équivalant à ceux dont bénéficient les citoyens jordaniens dans le cadre de l’assurance maladie de l’État.

92.Les enfants iraquiens ont la possibilité d’étudier dans les établissements d’enseignement public jordaniens de la même façon que les élèves jordaniens et leur scolarité est gratuite. Les élèves iraquiens ont même été exemptés des frais de scolarité et du coût des manuels dont s’acquittent leurs camarades jordaniens. Ils ont également été exemptés des conditions relatives à la résidence légale dans le pays que les élèves non jordaniens doivent remplir pour être admis dans les établissements scolaires publics. Il y a aussi d’innombrables autres services fournis par le Gouvernement jordanien que nous ne mentionnons pas ici.

93.En ce qui concerne l’expulsion des personnes non reconnues comme réfugiées par le Haut‑Commissariat, il y est procédé conformément à la loi. La personne qui contrevient à la loi sur la résidence et les étrangers est priée de quitter le pays, après avoir régularisé sa situation au regard de la loi, vers tout pays dans lequel elle souhaite et peut se rendre sans aucune restriction.

94.Certaines catégories de personnes, notamment les travailleurs migrants, mus par des considérations économiques, affirment qu’ils risquent de subir des actes de torture ou des mauvais traitements en cas de renvoi dans leur pays d’origine. C’est au Haut‑Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés qu’il incombe de déterminer si ces affirmations sont fondées. Un fonctionnaire compétent du Haut‑Commissariat examine la situation pour déterminer s’il y a effectivement un risque que la personne soit soumise à la torture et à des brutalités ou autres traitements cruels, inhumains ou dégradants.

95.Si les affirmations s’avèrent infondées, l’intéressé est renvoyé vers le pays de son choix. Certains des travailleurs ont résidé plusieurs années dans le pays de manière illégale, sans même tenter de régulariser leur situation au regard de la loi. Les autorités se voient alors dans l’obligation de procéder à leur expulsion vers le pays où ils souhaitent et peuvent se rendre, qui n’est pas nécessairement leur pays d’origine. Nous avons signalé plus haut quelques cas dans lesquels le Gouvernement a invalidé la décision des autorités concernées d’expulser des étrangers.

Question 6

96.Pour ce qui est d’alourdir les peines dont sont passibles les actes de torture, la Jordanie continue de revoir sa législation et a modifié plusieurs lois déjà mentionnées précédemment.

Questions 7, 8 et 9

97.En ce qui concerne le réexamen des modalités de détention et les enquêtes sur la pratique de la torture, il convient de signaler qu’un bureau spécial de l’inspection et des plaintes a été créé à la Direction de la sûreté publique. Ce bureau relève directement du Directeur de la sûreté publique et un de ses objectifs principaux est de s’assurer de la régularité des procédures policières et de leur bonne exécution dans le cadre de la loi et dans un esprit de justice et d’équité. Les attributions de ce bureau sont les suivantes:

1.Réception des plaintes des citoyens concernant tout abus ou comportement répréhensible de la part des agents de la force publique portant atteinte aux droits des citoyens ou empiétant sur leurs libertés individuelles;

2.Coordination avec les organismes concernés au sujet de ces plaintes;

3.Enquête sur les plaintes conformément à la loi et communication des conclusions au Directeur de la sûreté publique;

4.Réception des rapports émanant des bureaux de dépôt des plaintes des différents départements de la police et adoption des mesures requises au sujet de ces rapports;

5.Présentation d’un rapport au Directeur de la sûreté publique exposant les plaintes reçues et les mesures prises et formulant les recommandations voulues;

6.Suivi de l’examen de la plainte et notification des résultats à l’auteur;

7.Publication de bulletins périodiques à l’intention des chefs des unités de la police contenant des informations sur les pratiques répréhensibles constatées au sein de ces unités. Ces bulletins renferment en outre des directives émises par le Directeur de la sûreté publique à des fins de sensibilisation et d’orientation.

98.S’agissant de leur comportement et des infractions qu’ils commettent, les agents de police sont traités exactement comme des citoyens ordinaires. Ils sont soumis aux dispositions du Code pénal et à toutes les autres lois, ainsi qu’à la loi sur la sûreté publique et au Code pénal militaire, le but étant de les dissuader de commettre des abus, d’enfreindre les règlements militaires ou de porter atteinte à la réputation de l’appareil de sûreté publique.

99.Lorsqu’un membre de la police commet une infraction quelle qu’elle soit, il est jugé et puni conformément à la loi. La peine prévue lui est appliquée, qu’elle soit privative de liberté (emprisonnement) ou pécuniaire (amende). La peine n’est infligée qu’après détermination de la nature de l’infraction et comparution de l’accusé devant une juridiction compétente conformément à la loi. L’ensemble des jugements prononcés par le tribunal de police en matière pénale sont soumis au contrôle de la Cour de cassation.

100.Le tribunal de la police a déjà rendu des jugements dans de nombreuses affaires d’atteinte aux libertés publiques des citoyens condamnant les accusés au paiement d’une amende ou à des peines d’emprisonnement et de rétrogradation, s’ajoutant aux mesures administratives et disciplinaires prises par la Direction de la sûreté publique. Toutes condamnations pénales prononcées par ce tribunal sont susceptibles de recours devant la Cour de cassation. Ce point a été évoqué en détail plus haut.

101.L’allégation selon laquelle la Cour de la sûreté de l’État a prononcé des condamnations à mort sur la base d’aveux obtenus sous la contrainte ou la torture est sans fondement et l’article 1/148 du Code de procédure pénale autorise seulement le juge à ne tenir compte des déclarations présentées au cours du procès et qui ont été examinées dans le cadre d’une procédure contradictoire. Les condamnations sont susceptibles d’appel ou de pourvoi en cassation devant les tribunaux civils et si elles sont confirmées par ces tribunaux, leur exécution requiert l’accord du Premier Ministre puis l’approbation du roi.

102.Le Centre national des droits de l’homme et le bureau du Médiateur (Diwaan al ‑Mazaalem)ont été créés en tant qu’organismes de suivi des affaires de ce type, sans parler du rôle joué par les autres organisations non gouvernementales.

Question 10

103.En ce qui concerne l’indemnisation des victimes d’actes de torture, l’article 256 du Code civil couvre tous les aspects du dommage matériel et moral et du manque à gagner pouvant résulter de cette pratique. Aux termes de cet article, «Tout préjudice causé à autrui exige réparation de la part de son auteur, même s’il est incapable de discernement.».

Question 11

104.S’agissant du châtiment corporel mentionné dans la loi sur les prisons, il y a lieu de signaler que cette loi a été modifiée.

Question 12

105.En réponse à la préoccupation du Comité au sujet du maintien de la peine de mort, on notera que la Jordanie, conformément à la recommandation du Comité, a réduit le nombre de crimes passibles de cette peine. Toutefois, à l’heure actuelle aucune initiative n’a été prise pour abolir la peine de mort, qui est appliquée dans les cas les plus extrêmes, à un nombre d’infractions très limité, et soumise à des conditions et des procédures strictes qui excluent la possibilité d’erreur. Elle n’est exécutée que lorsqu’il n’y a pas le moindre doute et au terme d’une procédure équitable conforme à la loi. Son exécution dépend du bon vouloir du roi, ce qui rend son application extrêmement difficile.

Question 13

106.La Cour de la sûreté de l’État est un tribunal spécial qui tire sa légitimité de la Constitution jordanienne. L’instruction et le procès devant cette Cour se déroulent conformément aux dispositions de la loi. L’avocat général veille à l’application des dispositions du Code de procédure pénale (loi no 9 de 1961).

107.Ses jugements sont susceptibles de pourvoi devant la Cour de cassation. Ils sont annulés s’il s’avère que des dispositions du Code de procédure pénale ont été violées à un stade ou un autre de la procédure, ce qui garantit et renforce le respect des droits de l’homme et confirme l’obligation de procéder aux arrestations dans le respect des lois en vigueur et non pas de façon arbitraire. En outre, la compétence de ce tribunal est limitée à un nombre restreint d’infractions telles que l’atteinte à la sûreté de l’État ou à l’ordre public. Cette façon de procéder est admise par les instruments internationaux et prévue à l’alinéa b du paragraphe 2 de l’article 19 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, qui autorise certaines dérogations, à condition qu’elles soient expressément fixées par la loi ou qu’elles soient nécessaires. Ces principes sont dûment appliqués par la Jordanie.

108.La loi sur la Cour de la sûreté de l’État stipule que cette juridiction est composée de magistrats civils et/ou militaires; actuellement deux magistrats civils sont membres permanents de la Cour, alors que le tribunal militaire se compose lui de trois magistrats, dont un magistrat civil. Tous exercent leurs fonctions en toute indépendance. Chaque juge a le droit de s’écarter de l’avis de la majorité en exprimant une opinion dissidente, étant entendu que les décisions de la Cour de la sûreté de l’État sont rendues à la majorité lorsqu’il n’y a pas unanimité.

109.En outre, la Cour de la sûreté de l’État examine depuis longtemps ce genre d’affaires. Elle est devenue une juridiction spécialisée, dont les juges possèdent l’expérience nécessaire pour trancher ces affaires et rendre la justice. De même, la compétence restreinte de la Cour lui permet de consacrer le temps suffisant à ces affaires et de les trancher avec diligence.

110.La procédure devant la Cour de la sûreté de l’État est identique à celle des tribunaux ordinaires et ses décisions sont susceptibles de recours auprès de la Cour de cassation qui a une double fonction de juridiction de jugement et de juridiction d’appel.

111.La loi sur la Cour de la sûreté de l’État stipule que le nombre des juges de la Cour de cassation qui examinent les décisions de la Cour de la sûreté de l’État ne peut être inférieur à cinq. Par ailleurs, le pourvoi en cassation contre les jugements de la Cour de la sûreté de l’État est également autorisé dans les affaires correctionnelles contrairement à la règle appliquée devant les tribunaux civils, sauf circonstances spéciales.

112.En résumé, la Cour de cassation statue en dernier ressort et peut invalider la décision de la Cour de la sûreté de l’État et innocenter l’accusé ou confirmer cette décision en s’appuyant sur les informations contenues dans le dossier de l’affaire, ou encore se prononcer sur ce que la Cour de la sûreté de l’État aurait dû trancher. La Cour de la sûreté de l’État ne peut que se soumettre à la décision de la Cour de cassation et accepter la conclusion à laquelle elle est parvenue.

Question 14

113.En ce qui concernelesconditions de détention au secret et de détention provisoire, les attributions du Service des renseignements généraux et la prolongation de la durée de la détention tous les quinze jours, il convient de noter que l’arrestation de tout accusé se fait conformément à un mandat délivré par un procureur général dans le cadre de ses attributions énoncées par la loi. La Constitution jordanienne garantit à l’accusé ce droit sur la base de trois principes: le principe de la responsabilité pénale individuelle, à savoir que seul l’auteur des faits est tenu d’en répondre, le principe de la légalité des infractions, autrement dit qu’il n’y a ni crime ni peine sans texte de loi et le pouvoir législatif est le seul habilité à définir les actes passibles d’une peine et les peines qu’encourent leurs auteurs, le principe de non-rétroactivité des lois pénales.

114.L’article 8 de la Constitution jordanienne stipule ce qui suit: «Nul ne peut être détenu ou arrêté de façon non conforme à la loi…». Quant à l’article 103 du Code de procédure pénale, il dispose ce qui suit: «Nul ne peut être détenu ou arrêté si ce n’est sur ordre des autorités habilitées à le faire par le présent Code.». La publicité des procès, le droit de l’accusé de charger un avocat de sa défense et l’application de la loi la plus favorable à l’accusé sont également garantis.

115.La Constitution et les lois jordaniennes préservent les principes de la légalité des infractions et des peines, de la non‑rétroactivité des lois pénales et de l’individualité de la peine. Ce sont les mêmes principes que ceux qui sont consacrés par les articles 7 à 11 de la Déclaration universelle des droits de l’homme. Il incombe au Procureur général, qui est l’autorité judiciaire dont émane le mandat d’arrêt, de demander à l’accusé avant le début de l’enquête s’il souhaite choisir un avocat. Au cas où il n’en aurait pas les moyens ou refuserait de le faire, un conseil est désigné par le tribunal aux frais de l’État.

116.La loi sur les prisons s’applique à l’ensemble des centres de redressement et de réinsertion du pays. Ces centres, dont la prison du Service des renseignements généraux, sont soumis à une inspection administrative faite par des magistrats compétents et à un contrôle périodique lors des visites effectuées par des organisations non gouvernementales nationales et internationales, ainsi que par le Centre national des droits de l’homme et le Comité international de la Croix-Rouge. Au cours de ces visites, des entretiens individuels ont lieu avec les détenus en privé et l’ensemble des procédures appliquées par l’administration des centres et les conditions de détention sont examinées avec les détenus eux-mêmes.

117.Le juge est l’autorité compétente pour décider du maintien en détention ou de la remise en liberté. Lorsqu’elle appréhende une personne, la police judiciaire ne peut la garder en détention aux fins de l’enquête plus de vingt-quatre heures, au terme desquelles, l’intéressé doit être présenté à l’autorité judiciaire habilitée à poursuivre l’enquête, à savoir le bureau du Procureur général.

118.La compétence du Service des renseignements généraux se limite aux affaires concernant la sûreté de l’État et le terrorisme. À la fin de l’enquête, l’accusé est présenté, avec les conclusions des enquêteurs, au tribunal compétent pour être jugé conformément à la loi, sans ingérence du Service des renseignements généraux. Le rôle du service se limite à celui de la police judiciaire. Ce sont aux tribunaux qu’il appartient de se prononcer sur toute accusation qui leur est transmise par le Service des renseignements généraux.

Suite donnée aux recommandations et conclusions du Comité

Recommandation 1

119.Il a été demandé à la Jordanie de réexaminer sa position au sujet des articles 21 et 22 de la Convention. Le Gouvernement jordanien n’a pas l’intention à l’heure actuelle de revoir sa position concernant ces deux articles. Ils seront peut-être examinés à l’avenir lorsque les conditions deviendront propices, sachant que nous vivons dans une région instable en proie à des troubles. Chacun sait que la stabilité juridique dans un pays passe par la stabilité politique au niveau régional sans laquelle un État a du mal à exercer son autorité sans entrave et à l’abri de circonstances exceptionnelles exigeant l’adoption de lois et de règlements spéciaux. Ces deux articles risquent aussi d’être exploités à des fins politiques, sans rapport avec les objectifs de la Convention.

Recommandation 2

120.Pour ce qui est des mesures que le Comité recommande de prendre pour assurer l’incorporation de la Convention dans la législation interne, il y a lieu de signaler que la Convention a été publiée au Journal officiel en 2006 afin qu’elle soit applicable par les tribunaux jordaniens. En outre, les articles de cet instrument trouvent leur expression d’une façon ou d’une autre dans les lois et les règlements jordaniens par le biais desquels ils sont appliqués, sachant que la plupart des dispositions de la Convention représentent des principes plutôt que des textes juridiques.

Recommandation 3

121.En ce qui concerne la recommandation tendant à renforcer les mesures pour assurer la protection des droits des détenus et à ériger la torture en infraction spécifique, il a déjà été question plus haut des mesures prises pour y donner suite.

Recommandation 4

122.Concernant la Cour de la sûreté de l’État, le Gouvernement ne voit pas la nécessité de l’abolir car la procédure devant cette juridiction fait l’objet des mêmes garanties que celles qui sont appliquées devant les tribunaux ordinaires; cette procédure est aussi conforme au Code de procédure pénale qui s’applique à l’ensemble des tribunaux du pays et assure la protection des libertés et des droits du citoyen consacrés par la Constitution jordanienne.

123.De même, la compétence de la Cour est limitée extrêmement, ses décisions sont susceptibles de recours devant la Cour de cassation et les procès menés devant elle sont régis par le Code de procédure pénale qui s’applique à tous les tribunaux. Elle examine un nombre très restreint d’affaires et est composée de magistrats civils et militaires. Pour ces raisons, le Gouvernement n’a pas l’intention d’abolir cette juridiction, à propos de laquelle de plus amples informations ont été fournies plus haut. Sa principale fonction est de se prononcer rapidement sur les affaires dont elle est saisie.

Recommandation 5

124.En ce qui concerne la séparation entre la détention et l’interrogatoire, il y a lieu de faire les observations ci-après.

125.L’interrogatoire est mené sous l’autorité du bureau du Procureur général conformément aux procédures énoncées à l’article 63 du Code de procédure pénale, qui confère au prévenu le droit de ne répondre qu’en présence d’un avocat et requiert que les détails de l’interrogatoire soient consignés dans un procès-verbal. Une des fonctions du Procureur général est la supervision des centres de détention et des locaux de la police et leur inspection à tout moment.

Recommandation 6

126.En ce qui concerne les châtiments corporels, se référer aux informations sur les modifications apportées à la loi sur les centres de redressement et de réinsertion.

Recommandation 7

127.En ce qui concerne l’expulsion d’une personne vers un pays où elle court le risque d’être torturée, il y a lieu de signaler que nul n’est expulsé de Jordanie avant de vérifier qu’il ne court aucun risque d’être torturé ou brutalisé dans le pays de destination. Ceci se fait en coopération avec des organismes internationaux tels que le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, le Comité international de la Croix-Rouge et l’Office des migrations internationales; dans la plupart des cas, des organismes internationaux comme la Croix-Rouge et l’Office des migrations internationales organisent le départ des personnes concernées vers leur pays d’origine ou vers un pays tiers. La priorité est donnée aux souhaits et choix de ces personnes; ce sujet a d’ailleurs déjà fait l’objet d’un exposé détaillé plus haut.

Recommandation 8

128.Divers programmes d’éducation et de formation de vaste portée sont organisés, notamment par:

a)Des organismes publics;

b)Des organismes semi‑publics;

c)Des organisations non gouvernementales nationales et internationales;

d)Des organismes internationaux tels que la Croix-Rouge et le Croissant-Rouge et le Haut‑Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés et autres;

e)Certains programmes sont exécutés avec le soutien d’États étrangers.

129.Ces programmes concernent en particulier la police judiciaire. Les exemples sont nombreux et il serait trop long de les aborder ici; certains ont déjà été mentionnés plus haut.

Recommandation 9

130.En ce qui concerne la diffusion de la Convention auprès du public, il y a lieu de faire les remarques ci-après.

131.Il y a lieu de noter que différentes entités tant nationales qu’étrangères assurent la diffusion de la Convention et la sensibilisation de la population aux questions relatives aux droits de l’homme dans leur ensemble et, notamment, aux principes de cet instrument; les médias audiovisuels et la presse écrite jouent un grand rôle en ce domaine.

132.De même, les organisations non gouvernementales jordaniennes, arabes et internationales jouent un rôle de premier plan dans la sensibilisation de l’ensemble des segments de la société aux questions relatives aux droits de l’homme, y compris la Convention contre la torture, par la tenue de séminaires, de sessions de formation et de conférences, ainsi que par la production de brochures et d’autres publications.

Recommandation 10

133.Pour ce qui est de la diffusion du rapport présenté au Comité et des observations du Comité, les remarques ci-après s’imposent.

134.Le Ministère des affaires étrangères a procédé à la diffusion de ce rapport et des recommandations émises par le Comité auprès de toutes les parties concernées, dont les différents médias, pour qu’elles en prennent connaissance et soient informées des conclusions du dialogue avec le Comité. Ces parties ont demandé que les recommandations du Comité soient dans toute la mesure possible mises en œuvre.

Difficultés rencontrées dans la mise en œuvre de la Convention

135.Les principaux obstacles rencontrés dans la mise en œuvre de la Convention peuvent se résumer comme suit:

a)Certaines habitudes et traditions qui sont incompatibles avec une partie des normes de la Convention. Dans ce contexte, le Gouvernement jordanien et plusieurs organisations de la société civile organisent des campagnes de sensibilisation visant à éliminer certaines habitudes et traditions héritées du passé;

b)Certaines contraintes juridiques dues à la multiplication des lois et au conflit entre les intérêts à l’origine de leur formulation. À cela s’ajoutent les obstacles à l’adoption de certaines lois dus à l’opposition du Parlement ou à la formulation d’amendements risquant de vider les lois visées de leur substance, situation qui entrave la mise en œuvre de certains droits;

c)Le manque de moyens techniques pour assurer une meilleure application de la Convention auquel s’ajoute un manque de ressources sur le plan judiciaire;

d)Les conditions économiques et le manque de moyens qui entrave la mise en œuvre de certains droits ou leur renforcement;

e)Les conditions politiques et les crises auxquelles est en proie le Moyen‑Orient, notamment les États voisins, et leur effet sur la mise en œuvre de certains droits et la fourniture de certains services.

Conclusions

136.La Jordanie a déjà accompli de sérieux progrès dans ses efforts pour appliquer la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, convaincue qu’elle est de l’importance de la Convention pour le renforcement et la protection des droits de l’homme.

137.La Convention fait partie intégrante de la législation jordanienne depuis sa publication au Journal officiel le 15 juin 2006, et la Jordanie a modifié ses textes législatifs pour les mettre en conformité et en harmonie avec la Convention. Parmi les modifications les plus importantes, il convient de mentionner celles apportées à l’article 208 du Code pénal.

138.Concernant la mise en œuvre de la Convention et de ses objectifs dans la pratique, la Jordanie a accompli des avancées sur les plans institutionnel et administratif qui permettent d’appliquer cet instrument et d’interdire la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Le renforcement des institutions concernées et de leurs ressources humaines et leur sensibilisation accrue à la Convention, à son importance et à la nécessité de s’y conformer ont rendu possible une grande amélioration de l’action de ces institutions dans le domaine de la lutte contre la torture en vue de la réalisation du noble objectif que la Jordanie s’efforce d’atteindre consistant à interdire définitivement la torture sur l’ensemble de son territoire.

139.Le renforcement des droits de l’homme étant un processus continu et global, la Jordanie poursuit avec persévérance ses efforts pour lutter contre la torture en s’appuyant sur les divers moyens juridiques, éducatifs et culturels dont elle dispose; à cette fin, elle coopère et dialogue avec les institutions et les instances internationales concernées, ainsi qu’avec les organisations non gouvernementales jordaniennes et étrangères.

140.La présentation par la Jordanie de ce rapport au Comité contre la torture témoigne de l’importance qu’elle attache à la coopération et au dialogue pour la mise en œuvre de la Convention. De même, les nombreuses mesures concrètes qui ont été prises et celles qu’il est possible de prendre à l’avenir traduisent la volonté et le désir de la Jordanie d’appliquer la Convention et de lutter contre la torture sous toutes ses formes.

Annexes

Liste des participants à l’élaboration du présent rapport

Ministère des affaires étrangères

Ministère de l’intérieur

Ministère de la justice

Ministère du développement social

Direction de la sûreté publique

Service des renseignements généraux