NATIONS

UNIES

CERD

Convention internationale

sur l'élimination

de toutes les formes

de discrimination raciale

Distr.

GÉNÉRALE

CERD/C/304/Add.84

12 avril 2001

FRANÇAIS

Original : ANGLAIS

COMITÉ POUR L’ÉLIMINATION DELA DISCRIMINATION RACIALECinquante-cinquième session

Examen des rapports prÉsentés par les états partiesconformément à l’article 9 de la Convention

Conclusions du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale

Haïti

Le Comité a examiné les dixième, onzième, douzième et treizième rapports périodiques d’Haïti (CERD/C/336/ Add.1) à ses 1334e et 1335e séances (voir CERD/C/SR.1334 et 1335), les 2 et 3 août 1999. À sa 1354e séance, le 16 août 1999, le Comité a adopté les conclusions ci-après.

A.Introduction

Le Comité prend connaissance avec satisfaction des dixième, onzième, douzième et treizième rapports périodiques soumis par le Gouvernement haïtien en un seul document et se félicite de l’occasion ainsi créée de renouveler son dialogue avec l’État partie. Il note que le rapport s’est conformé aux directives mais estime que les renseignements qui figurent dans le document sont trop concis et que le rapport n’a pas tenu suffisamment compte des observations finales du Comité sur le précédent rapport de l’État partie. Le Comité juge encourageante la présence d’une délégation de haut niveau et se félicite du dialogue constructif qu’il a tenu avec la délégation et des renseignements supplémentaires donnés en réponse aux questions posées.

Facteurs et difficultés qui entravent l’application 

de la Convention

Le Comité note que la situation des droits de l’homme dans l’État partie s’est améliorée malgré les menaces qui continuent à peser sur sa stabilité politique et économique. À ce propos, le Comité appelle l’attention sur les effets négatifs de la crise politique, économique et sociale actuelle dans l’État partie qui a avivé la discrimination entre les différents groupes ethniques de la population. Ces facteurs font gravement obstacle à la pleine application de la Convention.

C.Aspects positifs

Le Comité se déclare satisfait des renseignements donnés dans le rapport de l’État partie selon lesquels les instruments internationaux, dont la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, deviennent partie intégrante du droit interne et sont impératifs pour les autorités judiciaires et autres de l’État.

Le Comité note que la Constitution de l’État partie (1987) consacre les principes exprimés dans la Déclaration universelle des droits de l’homme, y compris l’interdiction de la discrimination raciale.

Le Comité note favorablement que l’État partie exécute un programme de coopération internationale dans le domaine des droits de l’homme en collaboration avec le Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme.

D.Principaux sujets de préoccupation

Il est déclaré préoccupant que l’État partie affirme à plusieurs reprises qu’il n’y a pas de discrimination raciale au sens de l’article premier de la Convention. Sur ce point, le Comité estime que l’absence de réclamations et d’actions en justice émanant de victimes d’actes de racisme peut parfois résulter simplement d’un manque de connaissance des recours juridiques existant dans les cas de discrimination raciale et peut signifier que la population n’est pas suffisamment au courant de la protection contre la discrimination raciale qui leur est accordée par la Convention.

S’il est notable que le droit interne de l’État partie (décret de février 1981) réprime tous les faits de discrimination raciale, il est cependant inquiétant qu’aucun renseignement ne soit donné sur l’application de l’article 4 de la Convention, en particulier sur la manière dont le principe qu’il énonce est appliqué par les juges, les avocats et les fonctionnaires.

Il est noté que la Constitution de l’État partie (1987) garantit la jouissance, sans discrimination, de la plupart des droits prévus à l’article 5 de la Convention mais il est préoccupant de recueillir des indications selon lesquelles des membres de la police haïtienne auraient commis des violations des droits de l’homme et trop peu de dispositions sont prises pour empêcher les personnes de commettre impunément des actes de violence liés à la discrimination raciale. Il est préoccupant également qu’aucune législation interne n’existe pour prévenir, conformément au paragraphe 1, alinéa d), et au paragraphe 5, alinéa e), de l’article 2 de la Convention, les actes de discrimination raciale commis par les individus.

Bien que le Code civil de l’État partie (art. 1168 et 1169) établisse un mécanisme juridique pour l’examen des plaintes de discrimination raciale commises par l’État, il reste inquiétant que cette législation ne soit pas pleinement conforme aux dispositions de l’article 6 de la Convention.

Quant à l’application de l’article 7 de la Convention, il est regrettable que la Convention n’ait pas encore été traduite en créole, qui est l’autre langue officielle.

E.Suggestions et recommandations

Le Comité recommande que l’État partie donne, dans son prochain rapport périodique, des renseignements complets sur la composition démographique de la population, conformément au paragraphe 8 des directives pour l’établissement des rapports, et fournisse des indicateurs socioéconomiques de la situation des différentes communautés ethniques.

Soulignant le rôle du système judiciaire dans l’élimination de la discrimination raciale, tout en notant qu’une réforme de la justice est en cours, le Comité prie l’État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique une description des mécanismes juridiques existants pour engager une action devant les tribunaux en cas de discrimination raciale (par exemple, dans le cadre du décret du 4 février 1981 et des articles pertinents du Code civil). À ce sujet, le Comité recommande également que l’État partie révise sa législation et l’aligne sur les articles 4 et 6 de la Convention.

Au regard des articles 2 et 5 de la Convention, le Comité recommande que l’État partie adopte une législation tendant à prévenir la discrimination raciale dans le secteur privé. À ce propos, le Comité recommande que l’État partie envisage de créer une institution nationale pour faciliter l’application de la Convention conformément à la Recommandation générale XVII du Comité.

Le Comité recommande que l’État partie fasse figurer dans son prochain rapport des renseignements sur les restrictions imposées aux étrangers d’origine raciale ou ethnique différente et aux Haïtiens non autochtones en matière de jouissance des droits énumérés à l’article 5 de la Convention.

Le Comité recommande que l’État partie envisage de donner aux agents des services de répression un enseignement et une formation au sujet de la tolérance raciale et des questions des droits de l’homme conformément à l’article 7 de la Convention et à la recommandation générale XIII du Comité. Il suggère en outre que l’État partie réexamine les mesures disciplinaires applicables aux auteurs de brutalités policières pour les rendre plus sévères.

Le Comité prie l’État partie de donner, dans son prochain rapport, des renseignements sur les mesures prises ou envisagées pour faire mieux connaître la Convention dans le public. Il suggère également que l’État partie utilise l’assistance technique offerte au titre du programme de services consultatifs et d’assistance technique du Haut Commissariat aux droits de l’homme.

Le Comité note que l’État partie n’a pas fait de déclaration prévue à l’article 14 de la Convention et certains membres du Comité ont exprimé le souhait que la possibilité de faire une telle déclaration soit examinée. Le Comité recommande aussi que l’État partie ratifie les amendements du paragraphe 6 de l’article 8 de la Convention adoptés le 15 janvier 1992 à la quatorzième réunion des États parties à la Convention.

Le Comité recommande que le prochain rapport périodique de l’État partie, qui doit être soumis le 18 janvier 2000, soit un rapport de mise à jour et traite des questions soulevées au cours de l’examen du rapport.

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