Nations Unies

CCPR/C/LBN/CO/3

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

9 mai 2018

Français

Original : anglais

Comité des droits de l ’ homme

Observations finales concernant le troisième rapport périodiquedu Liban *

1.Le Comité des droits de l’homme a examiné le troisième rapport périodique du Liban (CCPR/C/LBN/3) à ses 3460e et 3470e séances (voir CCPR/C/SR.3460 et 3470), les 15 et 22 mars 2018. À sa 3482e séance, le 3 avril 2018, il a adopté les observations finales ci-après.

A.Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le troisième rapport périodique du Liban, bien qu’il ait été soumis avec quinze années de retard, et les renseignements qu’il contient. Il apprécie l’occasion qui lui a été offerte de renouer, après plus de vingt ans, un dialogue constructif avec la délégation de l’État partie au sujet des mesures prises pendant la période considérée pour appliquer les dispositions du Pacte. Il remercie l’État partie des réponses écrites (CCPR/C/LBN/Q/3/Add.1/Rev.1) apportées à la liste de points (CCPR/C/LBN/Q/3), qui ont été complétées oralement par la délégation, ainsi que des renseignements supplémentaires fournis par écrit.

B.Positive aspects

3.Le Comité accueille avec satisfaction l’adoption par l’État partie des mesures législatives et gouvernementales ci-après :

a)L’adoption du Plan d’action national en faveur des droits de l’homme 2014‑2019 ;

b)La création du Ministère des droits de l’homme et du Ministère aux affaires de la femme ;

c)L’adoption de la loi no 28 sur l’accès à l’information, le 10 février 2017.

4.Le Comité note avec satisfaction que l’État partie a ratifié les instruments internationaux ci-après, ou y a adhéré :

a)La Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, le 16 avril 1997 ;

b)La Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et son Protocole facultatif, les 5 octobre 2000 et 22 décembre 2008, respectivement ;

c)Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, le 8 novembre 2004.

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Application du Pacte au niveau national

5.Le Comité note que le Pacte fait partie intégrante du système juridique interne, dans lequel il a le statut de « valeur constitutionnelle », et que, conformément à l’article 2 du Code de procédure civile, il a préséance sur les dispositions du droit ordinaire, mais pas sur la Constitution. Le Comité regrette de ne pas avoir reçu de renseignements précis, comme il l’avait demandé dans ses précédentes recommandations (voir CCPR/C/79/Add.78, par. 30), sur l’application des dispositions du Pacte par les juridictions nationales et sur la manière dont d’éventuels conflits entre la législation interne et les garanties consacrées dans le Pacte ont pu être réglés (art. 2).

6.L ’ État partie devrait donner pleinement effet au Pacte dans l ’ ordre juridique interne et veiller à ce que la législation interne soit interprétée et appliquée conformément aux obligations qui lui incombent au titre du Pacte. Il devrait également intensifier son action aux fins de faire connaître le Pacte aux juges, aux avocats, aux procureurs et aux représentants de l ’ État. Le Comité réitère en outre sa recommandation (voir CCPR/C/79/Add.78, par. 29) tendant à ce que l ’ État partie envisage de ratifier le premier P rotocole facultatif se rapportant au Pacte ou d ’ y adhérer.

Institutions nationales des droits de l’homme

7.S’il prend note avec satisfaction de l’adoption de la loi no 62 du 27 octobre 2006 portant création de la Commission nationale des droits de l’homme, le Comité regrette néanmoins que les membres de celle-ci n’aient toujours pas été nommés et qu’un budget ne lui ait toujours pas été alloué (art. 2).

8. L ’ État partie devrait procéder dans les meilleurs délais à la désignation des membres de la Commission nationale des droits de l ’ homme, qui supervise le Comité de protection contre la torture (le mécanisme national de prévention), et veiller à ce que les deux institutions disposent des ressources humaines et financières nécessaires pour garantir leur autonomie et leur indépendance, conformément aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l ’ homme (Principes de Paris) et au Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture, respectivement, et leur permettre de s ’ acquitter efficacement de leur mandat.

État d’urgence

9.Le Comité demeure préoccupé (voir CCPR/C/79/Add.78, par. 10) de ce que les circonstances dans lesquelles l’état d’urgence peut être proclamé et appliqué en vertu du décret-loi no102 de 1983 sont excessivement étendues et permettent notamment de s’affranchir de dispositions du Pacte qui ne souffrent aucune dérogation (art. 4).

10. L ’ État partie devrait mettre la loi relative à l ’ état d ’ urgence en conformité avec les conditions énoncées à l ’ article 4 du Pacte, conformément à l ’ interprétation qui en est donnée dans l ’ observation générale n o 29 (2001) du Comité sur les dérogations aux dispositions du Pacte en période d ’ état d ’ urgence, en particulier en ce qui concerne les dispositions du Pacte auxquelles il ne peut être dérogé et l ’ obligation de limiter les dérogations à ce qui est strictement exigé par la situation.

Cadre applicable en matière de non-discrimination

11.S’il constate que la Constitution proclame le principe d’égalité en général, le Comité regrette néanmoins que l’État partie ne dispose pas d’une législation complète contre la discrimination qui couvre tous les motifs de discrimination interdits par le Pacte. Il constate également avec préoccupation qu’il n’existe pas de recours utiles pour les victimes de discrimination (art. 2et 26).

12. L ’ État partie devrait faire en sorte que son cadre législatif  : a) prévoie une protection complète et efficace contre la discrimination dans toutes les sphères, y compris la sphère privée, et interdise la discrimination directe et indirecte, et les discriminations multiples  ; b) comporte une liste des motifs de discrimination interdits qui soit conforme au Pacte et inclue l ’ orientation sexuelle et l ’ identité de genre  ; et c) garantisse l ’ accès des victimes de discrimination à des recours utiles et appropriés.

Discrimination et violence fondées sur l’orientation sexuelle ou l’identité de genre

13.Le Comité est préoccupé de ce que, malgré les informations selon lesquelles la justice aurait statué que l’article 534 du Code pénal ne s’appliquait pas aux lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexes, ces personnes continuent de faire l’objet d’arrestations et de poursuites, notamment pour relations homosexuelles entre adultes consentants, au titre de l’article 534 du Code pénal, qui réprime « toute relation sexuelle contre nature ». Il est également préoccupé par les informations concernant l’ampleur de la discrimination, des discours de haine et des attitudes homophobes dans la société ; le harcèlement, la violence et les extorsions auxquels se heurtent les lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexes ; les atteintes à leur liberté d’expression et de réunion pacifique ; et l’absence de protection contre de tels faits (art. 2, 7, 9, 14, 17, 19, 21 et 26).

14. L ’ État partie devrait interdire expressément la discrimination fondée sur l ’ orientation sexuelle et l ’ identité de genre et veiller à ce que les lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexes bénéficient, en droit et en fait, d ’ une protection suffisante et efficace contre toutes les formes de discrimination, de discours de haine et de violence fondés sur l ’ orientation sexuelle ou l ’ identité de genre, et à ce que les actes de cet ordre donnent lieu à une enquête en bonne et due forme, à ce que les auteurs des faits en cause soient poursuivis et, s ’ ils sont reconnus coupables, condamnés à des peines appropriées. Il devrait dépénaliser les relations sexuelles entre adultes consentants de même sexe, et mettre ainsi sa législation en conformité avec le Pacte, et prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir dans les faits la jouissance effective du droit à la liberté d ’ expression et de réunion pacifique aux lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexes.

Législation régissant le statut personnel

15.Le Comité demeure préoccupé (voir CCPR/C/79/Add.78, par. 18 et 19) de ce que les lois sur le statut personnel qui sont fondées sur la religion établissent une discrimination à l’égard des femmes sur des questions telles que le mariage, les droits patrimoniaux, le divorce, la garde des enfants et la succession. Il est également préoccupé par : a) le peu de contrôle auquel sont soumis les tribunaux religieux chargés de connaître des questions relatives au statut personnel ; b) les différences concernant l’âge légal du mariage selon la confession et la difficulté de faire enregistrer et reconnaître les mariages civils ; et c) le fait que la loi de 1925 sur la nationalité ne permet pas aux Libanaises de transmettre leur nationalité à leurs enfants et à leur conjoint. Le Comité prend note des deux projets de loi visant respectivement à protéger les mineurs des mariages précoces et à permettre aux femmes de transmettre leur nationalité au même titre que les hommes (art. 2, 3, 17 et 18).

16. L ’ État partie devrait abroger toutes les dispositions législatives établissant une discrimination à l ’ égard des femmes et envisager d ’ adopter une loi uniforme sur le statut personnel qui s ’ applique à tous, indépendamment de l ’ appartenance religieuse, et garantisse l ’ égalité entre hommes et femmes et respecte la liberté de pensée, de conscience et de religion. Il devrait également prévoir la possibilité de se marier civilement et faire en sorte que les mariages civils soient légalement reconnus  ; fixer l ’ âge minimum du mariage à 18 ans  ; et modifier la loi sur la nationalité de telle sorte que les femmes aient le même droit que les hommes de transmettre leur nationalité à leurs enfants et à leur conjoint.

Égalité entre hommes et femmes

17.S’il se félicite des mesures qui ont été prises pour promouvoir l’égalité entre hommes et femmes, le Comité constate néanmoins avec préoccupation que des stéréotypes patriarcaux ont encore cours en ce qui concerne le rôle des hommes et des femmes dans la famille et dans la société. Il constate également avec préoccupation que, si la situation s’est quelque peu améliorée en ce qui concerne la représentation des femmes dans la vie publique et politique, en particulier au niveau local, les femmes demeurent à ce jour encore sous-représentées dans les instances législatives et exécutives, ainsi qu’aux fonctions de prise de décisions (art. 2, 3, 25 et 26).

18. L ’ État partie devrait renforcer les mesures visant à garantir l ’ égalité entre hommes et femmes et mettre au point des stratégies pour faire barrage aux attitudes et aux stéréotypes patriarcaux en ce qui concerne le rôle et les responsabilités respectifs des hommes et des femmes dans la famille et dans la société en général. L ’ État partie devrait intensifier son action pour parvenir à une représentation équitable des femmes dans les sphères publique et politique, notamment dans les instances législatives et les organes de l ’ exécutif, en particulier aux fonctions de prise de décision s , au besoin, au moyen de mesures temporaires spéciales appropriées, conformément aux dispositions du Pacte.

Violences faites aux femmes, notamment la violence familiale et les violences sexuelles

19.S’il constate avec satisfaction que l’article 522 du Code pénal, qui absolvait un violeur de sa responsabilité pénale s’il épousait sa victime, a été abrogé en août 2017, le Comité s’inquiète néanmoins de ce que les articles 505 et 518 du Code pénal continueraient à être appliqués pour exonérer de poursuites et de sanctions les auteurs de viol sur mineur(e) de 15 à 18 ans, lorsque la victime a été promise en mariage par ses parents à l’auteur du viol. Le Comité est également préoccupé par : a) les lacunes de la loi no 293 de 2014 sur la protection des femmes et des autres membres de la famille contre la violence familiale, notamment par la définition restrictive que ce texte donne de la violence familiale ; b) l’absence de dispositions pour réprimer le viol conjugal et le harcèlement sexuel ; c) l’absence de statistiques officielles sur les violences faites aux femmes, notamment sur la violence familiale et les viols ; et d) le caractère limité des enquêtes et des poursuites auxquelles donnent lieu ces affaires. Le Comité relève que des amendements à la loi no 293 de 2014, et des projets de loi visant à réprimer le harcèlement sexuel au travail et à revoir les articles 505 et 518 du Code pénal, sont à l’examen (art. 2, 3, 7 et 26).

20. L ’ État partie devrait  :

a) Veiller à réprimer la violence familiale et à incriminer expressément le viol conjugal et le harcèlement sexuel et veiller à l ’ application effective de la législation correspondante  ;

b) Modifier les articles 505 et 518 du Code pénal de façon que les auteurs de viol soient tenus pénalement responsables sans exception et quel que soit l ’ âge de la victime  ;

c) Renforcer les mesures de prévention, notamment les campagnes de sensibilisation contre les violences faites aux femmes, informer systématiquement les femmes de leurs droits et les encourager à signaler les faits de violence aux représentants des forces de l ’ ordre  ;

d) Veiller à ce que les représentants des forces de l ’ ordre, le personnel judiciaire et les autres intervenants concernés reçoivent une formation appropriée sur les moyens de détecter les violences faites aux femmes et sur la façon de traiter ces affaires  ;

e) Veiller à ce que les cas de violences faites aux femmes soient répertoriés et donnent systématiquement et rapidement lieu à des enquêtes approfondies, à ce que les auteurs des faits en cause soient poursuivis et, s ’ ils sont reconnus coupables, condamnés à des peines appropriées et à ce que les victimes aient accès à une protection et à des recours utiles.

Peine de mort

21.S’il note avec satisfaction que l’État partie n’a procédé à aucune exécution depuis 2004 et n’a pas prononcé de condamnation à mort depuis 2014, et s’il se félicite également que celui-ci envisage d’adopter un moratoire, le Comité s’inquiète de ce que la législation nationale permet d’appliquer la peine de mort pour des infractions qui n’entrent pas dans la catégorie des « crimes les plus graves » au sens du paragraphe 2 de l’article 6 du Pacte (art.6).

22. L ’ État partie devrait maintenir le moratoire sur les exécutions et envisager sérieusement d ’ abolir légalement la peine de mort. En attendant d ’ avoir aboli la peine de mort, l ’ État partie devrait procéder à un examen complet de la législation applicable de façon que la peine de mort ne puisse être appliquée que pour les crimes les plus graves, autrement dit, que pour les crimes d ’ une extrême gravité impliquant un homicide volontaire. Il devrait aussi envisager de ratifier le deuxième P rotocole facultatif se rapportant au Pacte, visant à abolir la peine de mort.

Disparitions forcées

23.S’il salue le décret du Conseil d’État en date du 4 mars 2014 qui reconnaît le droit à la vérité aux proches de personnes disparues ou portées disparues, le Comité constate cependant avec préoccupation : a) que des milliers de cas de personnes disparues ou portées disparues durant la guerre civile n’ont pas encore été réglés et que les faits en cause ne font l’objet d’aucune poursuite ; b) que l’État partie ne dispose pas d’une législation complète sur les personnes disparues ou portées disparues, ni d’un organe national indépendant chargé de rechercher ces personnes ; et c) que la loi d’amnistie n’exclue pas expressément les disparitions forcées de son champ d’application. Le Comité regrette également que l’État partie n’ait pas donné suite au décret no 618 du 8 août 2007 portant projet de loi de ratification de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées. Le Comité note que deux projets de loi, l’un sur la question des personnes disparues et de leur famille et, l’autre, sur le prélèvement et le stockage d’ADN de proches de personnes disparues, sont à l’examen (art. 2, 6, 7, 9 et 16).

24. L ’ État partie devrait  :

a) Réprimer efficacement les disparitions forcées  ;

b) Établir une autorité nationale indépendante chargée de rechercher les personnes disparues ou portées disparues, et créer un registre central des personnes disparues  ;

c) Enquêter sur tous les cas non résolus de personnes disparues de manière à faire la lumière sur le sort de ces personnes et sur l ’ endroit où elles se trouvent et faire en sorte que les victimes et leurs proches soient informés du déroulement et des résultats de l ’ enquête  ; identifier les responsables et veiller à ce qu ’ ils soient poursuivis et condamnés à des peines appropriées, à la hauteur de la gravité de l ’ infraction commise  ; et veiller à ce que les victimes de disparition forcée et leurs proches obtiennent pleine réparation, ce qui inclut la réadaptation, la satisfaction et des garanties de non-répétition  ;

d) Veiller à ce que le crime de disparition forcée n ’ entre pas dans le champ d ’ application des lois d ’ amnistie  ;

e) Publier les rapports des commissions d ’ enquête sur les personnes disparues ou portées disparues  ;

f) Relancer les démarches en vue de mener à bien le processus de ratification de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées.

Interruption volontaire de grossesse et santé de la procréation

25.Le Comité est préoccupé de ce que les articles 539 et 546 du Code pénal incriminent l’avortement, hormis en cas de grave danger pour la vie de la femme. S’il prend note de l’affirmation de l’État partie selon laquelle les juges peuvent autoriser l’avortement, au cas par cas, le Comité est néanmoins préoccupé par les informations indiquant que des femmes auraient recours à des avortements non médicalisés, qui mettent leur vie et leur santé en péril. Le Comité est également préoccupé par l’obligation qui est faite aux femmes d’obtenir un avis favorable de deux professionnels de santé en plus du médecin ou du chirurgien-conseil, qui peuvent refuser de pratiquer l’avortement par objection de conscience (art. 3, 6, 7, 17 et 26).

26. L ’ État partie devrait modifier sa législation afin de garantir l ’ accès effectif à un avortement légal et médicalisé, lorsque la vie ou la santé d ’ une femme ou d ’ une fille enceinte est menacée, ou lorsque le fait de mener une grossesse à son terme est susceptible de causer des maux ou des souffrances importants à la femme ou la fille en question, tout particulièrement lorsque la grossesse est le fruit d ’ un viol ou d ’ un inceste ou lorsque que le fœtus n ’ est pas viable. L ’ État partie devrait veiller à ce que les femmes et les filles qui ont recours à l ’ avortement et les médecins qui s ’ occupent d ’ elles ne fassent pas l ’ objet de sanctions pénales et lever les obstacles existants, tels que l ’ obligation d ’ obtenir l ’ autorisation de plusieurs médecins et la possibilité pour les médecins d ’ opposer une objection de conscience, car l ’ existence de telles sanctions et de tels obstacles contraint les femmes et les filles à recourir à des avortements non médicalisés qui mettent leur vie et leur santé en péril. L ’ État partie devrait en outre mettre en place des politiques éducatives pour informer les femmes, les hommes et les adolescents sur la santé sexuelle et de la procréation, et garantir l ’ accès à des moyens de contraception et des services de santé de la procréation appropriés et d ’ un prix abordable.

Torture et mauvais traitements

27.Le Comité est préoccupé de ce que la nouvelle loi incriminant la torture, la loi no 65 du 26 octobre 2017, ne remplit pas les conditions énoncées à l’article 7 du Pacte, dans la mesure où elle : a) limite la définition de la torture aux cas dans lesquels une enquête, des interrogatoires, une instruction judiciaire et un procès ont été menés et des peines prononcées ; b) n’incrimine pas les peines et traitements cruels, inhumains ou dégradants ; c) soumet les poursuites pour actes de torture à un délai de prescription ; d) prévoit des sanctions qui ne sont pas en adéquation avec la gravité de l’infraction ; et e) ne prévoit pas de recours utiles et de réparation (art. 2 et 7).

28. L ’ État partie devrait modifier d ’ urgence sa législation pénale afin que sa définition de la torture soit conforme à l ’ article 7 du Pacte et aux autres normes acceptées au niveau international. Il devrait également veiller à ce que le crime de torture ne soit soumis à aucun délai de prescription, à ce que les sanctions pour actes de torture soient en adéquation avec la gravité du crime commis et à ce que les victimes puissent bénéficier, en droit et en fait, d ’ une réparation complète, ce qui inclut la réadaptation, une indemnisation adéquate et la possibilité d ’ intenter une action civile, indépendamment de la procédure pénale.

29.S’il prend note des mesures qui ont été adoptées pour prévenir et combattre la torture, le Comité est préoccupé par les allégations selon lesquelles des membres des forces de sécurité se seraient livrés à des actes de torture sur des personnes privées de liberté ou auraient infligé de mauvais traitements à ces personnes, notamment à des détenus de la prison de Roumieh en juin 2015, lesquels actes auraient coûté la vie à certaines de ces personnes, et il s’inquiète que les responsables ne soient pas tenus davantage responsables de leurs actes (art. 6, 7 et 10).

30. L ’ État partie devrait prendre des mesures fortes pour éradiquer la torture et les mauvais traitement s , et notamment  :

a) Dispenser au personnel des forces de sécurité et des autres institutions de la force publique une formation adéquate sur la prévention de la torture et sur ce en quoi consiste un traitement humain  ;

b) Veiller à ce que le Comité de protection contre la torture assure un suivi effectif et procède à des inspections régulières de tous les lieux de privation de liberté  ;

c) Faire en sorte que le procureur puisse engager des poursuites pénales d ’ office dès lors qu ’ il ou elle reçoit des informations indiquant que des actes de torture ont été commis  ;

d) Veiller à ce que toutes les allégations de torture ou d ’ autres mauvais traitements et de décès en détention donnent rapidement lieu à une enquête approfondie menée par un mécanisme efficace et totalement indépendant, à ce que les auteurs des faits en cause soient poursuivis et, s ’ ils sont reconnus coupables, condamnés à des peines correspondant à la gravité de l ’ infraction commise et à ce que les victimes et, le cas échéant, leurs proches reçoivent pleine réparation et bénéficient notamment d ’ une réadaptation et d ’ une indemnisation adéquate  ;

e) Répertorier les cas de torture et de mau vais traitements, ainsi que les poursuites engagées et les condamnations prononcées, et publier cette information.

Liberté et sécurité de la personne

31.Le Comité est préoccupé par les informations selon lesquelles : a) les forces de sécurité procéderaient à des arrestations et des placements en détention arbitraires et extrajudiciaires, y compris des détentions au secret, sans que les intéressés aient la possibilité de consulter un avocat ; b) dans bien des cas, le délai légal de quarante‑huit heures dans lequel une personne soupçonnée d’une infraction doit être présentée à un juge ne serait pas respecté et des exceptions seraient faites au délai de quarante-huit heures prévu à l’article 108 du Code de procédure pénale dans des cas d’atteintes à la sûreté de l’État et de crimes présentant un grave danger ; c) un grand nombre des personnes placées en détention avant jugement, parfois pour une période prolongée, n’auraient pas la possibilité de consulter un avocat ; et d) des enfants seraient placés en détention avant jugement, en particulier pour des infractions pénales commises avec des adultes. Le Comité s’inquiète aussi de ce qu’un(e) avocat(e) de la défense ne serait pas autorisé à assister à l’interrogatoire de son client durant l’enquête préliminaire (art. 9 et 14).

32. L ’ État partie devrait mettre sa législation et sa pratique en conformité avec l ’ article  9 du Pacte, compte tenu de l ’ observation générale n o 35 (2014) du Comité sur la liberté et la sécurité de la personne. Il devrait notamment  :

a) Veiller à ce que la durée maximale de détention avant présentation à un juge et les limites de la détention avant jugement prévues par la loi soient strictement observées dans la pratique, et à ce que la détention avant jugement de mineurs soit évitée dans toute la mesure possible  ;

b) Recourir davantage, dans la pratique, à des mesures de substitution à la détention avant jugement qui ne soient pas privatives de liberté  ;

c) Veiller à ce que toutes les personnes privées de liberté puissent, dans la pratique, consulter un avocat dès leur placement en détention.

Droit au respect de la vie privée et surveillance

33.Le Comité est préoccupé par les informations faisant état d’atteintes à la vie privée, notamment par les allégations selon lesquelles les communications numériques feraient l’objet d’une surveillance généralisée, des autorisations seraient délivrées directement par le Premier Ministre pour intercepter des communications privées et consulter des données sans l’autorisation préalable de la justice requise par la loi, et les agences de sécurité se verraient accorder le plein accès aux données relatives aux télécommunications depuis que le Conseil des ministres a renoncé à la prérogative de statuer sur les demandes de cet ordre. Le Comité est également préoccupé par le caractère insuffisant de la protection des données biométriques prévue par le cadre législatif actuel et relève qu’un projet de loi sur le sujet a été soumis au Bureau du Parlement (art. 2 et 17).

34. L ’ État partie devrait veiller à ce que toutes les lois régissant les activités de surveillance, l ’ accès aux données personnelles et aux informations concernant les communications (métadonnées) et toute autre ingérence dans la vie privée soient pleinement conformes au Pacte, en particulier à son article 17, notamment aux principes de légalité, de proportionnalité et de nécessité, et à ce que dans leur pratique, les pouvoirs publics se conforment à ces principes. Il devrait, entre autres choses, veiller à ce que  : a) la surveillance, la collecte, la consultation et l ’ utilisation de données et d ’ informations concernant les communications répondent à des buts précis et légitimes, soient limitées à un nombre précis de personnes et soient soumises à une autorisation judiciaire  ; b) des mécanismes de contrôle efficaces et indépendants soient en place pour éviter une ingérence arbitraire dans la vie privée  ; et c)  les personnes concernées aient un accès effectif à des recours utiles en cas d ’ abus. L ’ État partie devrait aussi mettre en place des garanties concernant la protection des données biométriques, conformément à l ’ article  17 du Pacte.

Traitement des détenus

35.Bien que prenant note des mesures qui ont été adoptées par l’État partie pour remédier à la surpopulation carcérale et améliorer les conditions de détention, notamment le réaménagement des établissements pénitentiaires existants et la construction de nouveaux établissements, ainsi que la création de la Direction des prisons qui a été chargée de surveiller l’état des prisons, le Comité demeure préoccupé (voir CCPR/C/79/Add.78, par. 17) par la persistance d’un surpeuplement important et de conditions inappropriées dans les locaux de détention de la police et dans les prisons. Il est également préoccupé par les 81 décès survenus dans des prisons entre 2012 et 2016 et regrette de ne pas avoir reçu davantage d’informations sur les enquêtes menées sur ces décès qui sont, d’après l’État partie, dus à des causes naturelles. Il s’inquiète en outre de ce que la mise à l’isolement peut être appliquée à titre disciplinaire pour une période pouvant aller jusqu’à trente jours consécutifs, au titre de l’article 104 du décret no 14310 de 1949. À cet égard, le Comité prend note de la proposition de ramener à quinze jours la durée maximale de la mise à l’isolement (art. 6, 7 et 10).

36. L ’ État partie devrait prendre des mesures efficaces pour remédier à la surpopulation dans les lieux de détention, notamment en recourant davantage à des mesures de substitution à la détention, et faire en sorte que les personnes privées de liberté soient traitées avec humanité et avec respect de la dignité inhérente à la personne humaine. À cet égard, il devrait redoubler d ’ efforts pour améliorer les conditions de détention, conformément au Pacte et à l ’ Ensemble de règles minima des Nations Unies pour le traitement des détenus (Règles Nelson Mandela). Il devrait également revoir les règles régissant la mise à l ’ isolement, de manière qu ’ il n ’ y soit recouru que dans les circonstances les plus exceptionnelles et pour des périodes strictement limitées.

Réfugiés et demandeurs d’asile

37.Le Comité salue le rôle important que joue l’État partie qui accueille un grand nombre de demandeurs d’asile et de réfugiés et sa détermination non démentie à leur prêter assistance et protection, et n’ignore pas la charge que cela représente. Il salue également la loyauté de l’État partie au principe de non-refoulement et lui sait gré de ne pas procéder à l’expulsion de ressortissants syriens dont le statut juridique est arrivé à échéance ou qui n’ont pas de papiers en règle. Pour autant, le Comité est préoccupé par :

a)Les règles strictes d’admission aux frontières qui sont en place depuis janvier 2015 et se sont traduites par une restriction de l’accès à l’asile et des renvois à la frontière avec la République arabe syrienne, qui pourraient être constitutifs de refoulement, et par les informations selon lesquelles des demandeurs d’asile et des réfugiés originaires de pays autres que la République arabe syrienne risqueraient d’être expulsés ou refoulés, en particulier lorsque ces personnes n’ont pas de possibilité de réinstallation ;

b)Les informations faisant état du maintien prolongé de demandeurs d’asile et de réfugiés autres que des ressortissants syriens, notamment des enfants, en détention administrative, sans respect des garanties prévues par la loi, et de leur expulsion ;

c)Les vastes pouvoirs discrétionnaires octroyés à la Direction de la sûreté générale, en vertu des articles 17 et 18 de la loi de 1962 sur les conditions d’entrée et de sortie, en ce qui concerne les décisions consistant à placer des individus en détention sans mandat judiciaire ou à les expulser du Liban, et par l’absence de voies de recours contre de telles décisions ;

d)Les informations faisant état d’expulsions, de couvre-feux et de rafles visant en particulier les réfugiés syriens ;

e)Le champ d’application limité de la politique d’exonération des frais de résidence (art. 2, 7, 9, 13 et 24).

38. L ’ État partie devrait  :

a) Veiller à ce que le principe de non-refoulement soit strictement observé dans les faits, à ce que tous les demandeurs d ’ asile soient protégés contre les re n vois à la frontière et aient accès aux procédures de détermination du statut de réfugié  ;

b) Mettre sa législation et ses pratiques relatives à la détention de demandeurs d ’ asile et de réfugiés en conformité avec l ’ article  9 du Pacte, compte tenu de l ’ observation générale n o 35 (en particulier son paragraphe 18)  ;

c) Prévoir des voies de recours contre les décisions de placement en détention et les arrêtés d ’ expulsion  ;

d) Veiller à protéger efficacement les réfugiés contre les expulsions forcées  ;

e) Veiller à ce que les couvre-feux, s ’ il y est recouru, ne soient appliqués qu ’ à titre exceptionnel, pour une durée brève et dans une zone précise, et à ce qu ’ ils soient légaux et strictement justifiés au regard du Pacte, notamment au regard des articles 9, 12 et 17  ;

f) Étendre l ’ exonération des frais de résidence aux réfugiés qui ne sont pas pris en compte actuellement.

Travailleurs domestiques migrants

39.Le Comité constate avec préoccupation que les travailleurs domestiques migrants sont exclus de la protection du droit interne du travail et sont victimes d’abus et d’exploitation dans le cadre du système de parrainage (kafala), au nombre desquels la rétention de leurs papiers d’identité, la séquestration, le refus de repos, l’application d’horaires de travail excessifs, le retard voire l’absence de paiement, les violences verbales, physiques et sexuelles, et les cas de servitude qui sont le fruit de l’exploitation par les shawish. Il est également préoccupé par l’absence de recours utiles contre ces abus et par le risque d’emprisonnement et d’expulsion auquel sont exposés les travailleurs migrants qui intentent une action contre leur employeur, en raison du système restrictif concernant les visas. Le Comité est en outre préoccupé par les informations portant sur les suicides et tentatives de suicides observés en 2016 chez les travailleurs domestiques migrants, les arrestations arbitraires dont ces travailleurs seraient victimes, sans possibilité de consulter un avocat et les expulsions auxquelles il serait procédé, y compris de travailleurs ne résidant pas chez leur employeur ou en représailles de leur militantisme syndical. Le Comité relève que le projet de loi sur le travail aurait entre autres choses pour effet de protéger les travailleurs domestiques migrants de l’exploitation et des abus (art. 2, 7, 8, 9, 12, 22 et 26).

40.L ’ État partie devrait étendre la protection du droit du travail aux travailleurs domestiques, assurer l ’ accès à des recours juridiques utiles pour protéger les droits des travailleurs domestiques migrants sans que ceux-ci aient à craindre de subir des représailles ou d ’ être expulsés, abolir le système de parrainage (kafala) et réformer les modalités de recrutement afin de garantir le respect des droits des travailleurs domestiques et de protéger ces personnes de l ’ exploitation et des abus, et intensifier les mesures de sensibilisation aux droits des travailleurs migrants et aux moyens de protection existants.

Indépendance de la justice et droit à un procès équitable

41.Le Comité est préoccupé par la pression politique qui serait exercée sur le pouvoir judiciaire, en particulier pour ce qui est de la désignation de procureurs et de juges d’instruction essentiels, et par les allégations selon lesquelles des responsables politiques useraient de leur influence pour protéger leurs partisans de poursuites. Il regrette de ne pas disposer d’informations complètes sur les procédures et les critères en vigueur en ce qui concerne la sélection, la nomination, la promotion, la suspension et la révocation des juges, ainsi que sur les sanctions disciplinaires applicables et relève que des projets de loi visant à garantir l’indépendance de la justice sont à l’examen (art. 2 et 4).

42. L ’ État partie devrait prendre toutes les mesures nécessaires pour préserver, en droit et en fait, la pleine indépendance et la pleine impartialité de la justice, notamment en veillant à ce que les procédures de sélection, de nomination, de promotion, de suspension et de révocation des juges, ainsi que les procédures disciplinaires applicables, soient conformes aux principes d ’ indépendance et d ’ impartialité consacrés par le Pacte. L ’ État partie devrait redoubler d ’ efforts pour garantir que la justice puisse remplir sa fonction sans aucune forme d ’ ingérence politique.

Tribunaux militaires

43.Le Comité demeure préoccupé (voir CCPR/C/79/Add.78, par. 14) par l’étendue de la compétence des tribunaux militaires, laquelle s’applique aux civils, enfants compris. Il est également préoccupé par : a) le manque d’indépendance et d’impartialité dont feraient preuve les juges des tribunaux militaires ; et b) les allégations selon lesquelles le droit à un procès équitable et les garanties juridiques essentielles ne seraient pas respectés, notamment dans la mesure où des interrogatoires seraient conduits sans la présence d’un avocat, des actes de torture et des extorsions d’aveux seraient pratiqués, notamment sur des enfants, certains verdicts seraient arbitraires et le droit de faire appel des décisions des tribunaux militaires serait restreint. Le Comité constate que trois projets de loi sur l’abolition des tribunaux militaires sont à l’examen (art. 2, 7, 9, 14 et 24).

44. L ’ État partie devrait déchoir, sans plus attendre, les tribunaux militaires de leur compétence en matière civile. Il devrait également  : a) veiller à ce que les affaires concernant des civils en instance dans les tribunaux militaires soient traitées dans des conditions offrant toutes les garanties énoncées à l ’ article  14 du Pacte et dans l ’ observation générale n o 32 (2007) sur le droit à l ’ égalité devant les tribunaux et les cours de justice et à un procès équitable  ; et b) enquêter sur toutes les violations qui auraient été commises par des membres de l ’ armée et offrir des recours utiles aux victimes.

Liberté d’expression

45.Le Comité est préoccupé par : a) l’incrimination pénale de la diffamation, de l’outrage et des critiques visant des responsables publics, ainsi que du blasphème, qui sont passibles de peines d’emprisonnement; b) les allégations selon lesquelles le Centre de lutte contre la cybercriminalité des forces de sécurité intérieures ferait une interprétation très large du concept de cybercriminalité dans le but de restreindre la liberté d’expression ; c) les informations selon lesquelles des personnes qui auraient critiqué les autorités ou des personnalités politiques, notamment sur les médias sociaux, auraient été arrêtées et auraient fait l’objet de poursuites ; et d) les vastes pouvoirs discrétionnaires dont jouit la Direction générale de la sécurité publique en matière de censure et par l’interdiction d’un certain nombre d’œuvres artistiques, au nombre desquelles figurent des films. Le Comité constate également avec préoccupation que l’État partie n’a pas donné suite à sa précédente recommandation (voir CCPR/C/79/Add.78, par. 25) tendant à ce qu’il revoie la loi no 382 de 1994 sur la diffusion radiophonique et télévisée et le décret no 7997 de 1996 à ce sujet et établisse une autorité indépendante chargée de délivrer les licences d’exploitation aux stations de radiodiffusion et de télédiffusion (art. 9 et 19).

46. L ’ État partie devrait  : a) dépénaliser le blasphème, l ’ outrage et les critiques visant des responsables publics  ; b)  envisager de dépénaliser totalement la diffamation et, en tout état de cause, circonscrire l ’ application de la législation pénale aux cas les plus graves, en gardant à l ’ esprit, comme indiqué par le Comité d ans son observation générale n o 34 (2011) sur la liberté d ’ opinion et la liberté d ’ expression, que l ’ emprisonnement ne constitue jamais une peine appropriée en cas de diffamation  ; c) veiller à ce que l ’ interprétation du concept de cybercriminalité ne remette pas en cause la liberté d ’ expression  ; d)  s ’ abstenir d ’ étouffer l ’ expression d ’ opinions dissidentes et de censurer l ’ expression artistique au-delà des seules restrictions autorisées par l ’ article 19 du Pacte  ; et e) revoir et modifier le s dispositions de la loi n o 382/94 sur la diffusion radiophoniq ue et télévisée et le décret n o 7997/96 à ce sujet et établir une autorité indépendante chargée de délivrer les licences d ’ exploitation aux stations de radiodiffusion et de télédiffusion, qui ait compétence pour examiner les demandes et délivrer les licences en fonction de critères raisonnables et objectifs.

Enregistrement des naissances

47.Le Comité est préoccupé par la complexité de la procédure d’enregistrement des naissances, qui génère des coûts importants et s’accompagne d’exigences strictes de présentation de documents, en particulier pour les enregistrements tardifs d’enfants de plus de 1 an qui supposent de déposer des demandes d’enregistrement à la fois auprès des tribunaux civils et des tribunaux religieux (art. 12 de la loi de 1951 sur l’enregistrement du statut personnel). S’il prend note avec satisfaction de la dérogation mise en place en septembre 2017 à l’obligation de résider légalement au Liban pour enregistrer la naissance d’enfants syriens au Liban et de l’autorité exceptionnelle conférée au Ministre de l’intérieur en février 2018 pour prendre toutes les mesures voulues pour faciliter l’enregistrement tardif des naissances d’enfants syriens nés au Liban après 2011, le Comité regrette néanmoins que le cadre législatif et administratif demeure inchangé pour les demandeurs d’asile et les réfugiés d’autres nationalités, les étrangers, les apatrides et les ressortissants libanais (art. 2, 13, 16 et 24).

48. L ’ État partie devrait réformer le cadre législatif et administratif applicable aux enregistrements civils de manière à garantir le droit de tout enfant né sur le territoire de l ’ État partie à ce que sa naissance soit enregistrée, sans discrimination et indépendamment du statut juridique de ses parents, et à permettre aux enfants de jouir de leur droit d ’ acquérir une nationalité. Il devrait veiller à ce que l ’ enregistrement des naissances, en particulier l ’ enregistrement ordinaire des naissances, soit gratuit et faire en sorte que la procédure d ’ enregistrement tardif des naissances soit accessible à tous et d ’ un coût abordable pour tous.

D.Diffusion et suivi

49. L ’ État partie devrait diffuser largement le texte du Pacte, de son troisième rapport périodique , des réponses écrites à la liste des points établie par le Comité et des présentes observations finales auprès des autorités judiciaires, législatives et administratives, de la société civile et des organisations non gouvernementales présentes dans le pays, ainsi qu ’ auprès du grand public afin de les sensibiliser aux droits consacrés par le Pacte.

50. Conformément au paragraphe 5 de l ’ article 71 du Règlement intérieur du Comité, l ’ État partie es t invité à faire parvenir, le 6  avril 2020 au plus tard, des renseignements sur la suite qu ’ il aura donnée aux recommandations formulées aux paragraphes 20 (violences faites aux femmes, notamment la violence familiale et les violences sexuelles), 38 (réfugiés et demandeurs d ’ asile) et 40 (travailleurs domestiques migrants).

51. Le Comité demande à l ’ État partie de lui soumettre son p rochain rapport périodique le 6  avril 2023 au plus tard et d ’ y faire figurer des renseignements précis et à jour sur la suite qu ’ il aura donnée aux autres recommandations formulées dans les présentes observations finales et sur l ’ application du Pacte dans son ensemble. Il demande également à l ’ État partie, lorsqu ’ il élaborera ce rapport, de tenir de vastes consultations avec la société civile et les organisations non gouvernementales présentes dans le pays. Conformément à la résolution 68/268 de l ’ Assemblée générale, ce document ne devra pas compter plus de 21 200 mots. L ’ État partie peut aussi indiquer au Comité, avant le 6 avril 2019, qu ’ il accepte d ’ établir son rapport en suivant la procédure simplifiée. En pareil cas, le Comité transmet une liste de points à l ’ État partie avant que celui-ci ne soumette son rapport. Les réponses de l ’ État partie à cette liste constitueront son rapport périodique suivant à soumettre en application de l ’ article 40 du Pacte.