Quarante-deuxième session

20 octobre-7 novembre 2008

Observations finales du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes : Équateur

Le Comité a examiné le rapport unique de l’Équateur, valant sixième et septième rapports périodiques (CEDAW/C/ECU/7) à ses 854e et 855e séances, le 22 octobre 2008. La liste des questions que l’examen de ces rapports a suscitées figure dans le document CEDAW/C/ECU/Q/7 et les réponses de l’Équateur aux questions du Comité ont été publiées sous la cote CEDAW/C/ECU/Q/7/Add.1.

Introduction

Le Comité remercie l’État partie de son rapport unique valant sixième et septième rapports périodiques, qui fait suite aux directives antérieurement formulées par le Comité pour l’établissement des rapports périodiques et se réfère largement aux observations finales précédentes (A/58/38, par. 282 à 336). Il remercie également l’État partie de ses réponses écrites à la liste des questions soulevées par le groupe de travail d’avant-session.

Le Comité félicite l’État partie d’avoir envoyé une délégation dirigée par la Présidente du Conseil national des femmes (CONAMU) et composée de représentantes dudit conseil et du Ministère de la coordination des affaires sociales. Il a apprécié la franchise avec laquelle les problèmes rencontrés dans la mise en œuvre de la Convention ont été évalués dans le rapport, ainsi que les échanges ouverts et constructifs qui ont eu lieu entre la délégation et les membres du Comité, même s’il regrette que certaines des questions posées soient restées sans réponse.

Aspects positifs

Le Comité note avec satisfaction les efforts déployés pour mettre en œuvre la Convention et assurer le suivi des observations finales antérieures par le biais de l’adoption d’un nombre considérable de lois, politiques, plans et programmes, notamment le Code relatif aux enfants et aux adolescents, la loi sur la réforme du Code pénal, la loi sur la réforme du Code du travail, la loi sur l’organisation du secteur de la santé, la réforme de la loi relative aux soins maternels et infantiles gratuits, la réforme de la loi sur l’organisation du service diplomatique, le plan national pour l’égalité des chances, le plan national pour l’élimination des délits sexuels, le plan national pour la prévention et l’élimination des délits sexuels dans les écoles, le plan national de lutte contre l’enlèvement des personnes, le trafic des migrants, l’exploitation sexuelle et économique et toutes les autres formes d’exploitation et de prostitution de femmes, d’enfants et d’adolescents, la pornographie mettant en scène des enfants et la corruption de mineurs, le plan national pour les droits en matière de santé, de sexualité et de procréation, l’arrêté ministériel no 261 interdisant la discrimination sexiste dans le domaine de l’emploi dans les secteurs public et privé, le décret ministériel no 3393 sur la sensibilisation aux délits sexuels et la façon de les aborder au sein du système éducatif et le décret ministériel no 403 sur l’institutionnalisation d’une éducation sexuelle générale.

Le Comité accueille avec satisfaction la création récente d’un Ministère de la justice et des droits de l’homme, qui a notamment pour fonctions de coordonner l’activité de différents acteurs au sein du système judiciaire, notamment les autorités chargées de faire appliquer le cadre national de protection juridique concernant la violence sexuelle et sexiste.

Le Comité se félicite du projet visant à enregistrer toutes les femmes du pays et à leur délivrer des pièces d’identité, y compris dans les régions rurales.

Le Comité note avec satisfaction l’élargissement du système intégré d’indicateurs sociaux, qui englobe deux systèmes connexes, dont l’un concerne les femmes (SIMUJERES) et l’autre les enfants (SINIÑEZ).

Le Comité se félicite de la participation de la société civile aux initiatives visant à mettre au point des projets, programmes et politiques pertinents dans ce domaine, ainsi que de la participation des organisations de femmes à l’établissement du rapport de l’État partie.

Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Tout en rappelant que l’État partie est dans l’obligation de mettre en œuvre les dispositions de la Convention de manière systématique et continue, le Comité estime que les sujets de préoccupation et les recommandations figurant dans les présentes observations finales nécessitent de la part de l’État partie une attention prioritaire. En conséquence, il invite l’État partie à axer ses activités de mise en œuvre sur les domaines mentionnés et à rendre compte des mesures prises et des résultats obtenus dans son prochain rapport périodique. Il invite également l’État partie à faire part des présentes observations finales à tous les ministères concernés, aux autres structures gouvernementales à tous les niveaux, au Parlement et au pouvoir judiciaire, afin de garantir leur mise en œuvre effective.

Tout en réaffirmant que c’est au Gouvernement qu’il incombe au premier chef de pleinement s’acquitter des obligations de l’État partie au titre de la Convention, la Comité souligne que celle-ci lie tous les pouvoirs gouvernementaux et invite l’État partie à encourager son Parlement à prendre, le cas échéant, conformément à son mandat et à ses procédures, les mesures qui s’imposent s’agissant de la mise en œuvre des présentes observations finales et de l’établissement par le Gouvernement du prochain rapport dans le cadre de la Convention.

Le Comité note que l’État partie traverse une période d’évolution complexe due à la promulgation récente d’une nouvelle Constitution. Il souligne que cette période fournit à l’État partie l’occasion de procéder aux réformes structurelles nécessaires pour tenir compte des sujets de préoccupation énumérés dans les présentes observations finales.

Mécanismes nationaux de promotion de la femme

Le Comité reconnaît l’importance du rôle que joue le CONAMU dans la promotion de l’égalité entre les sexes et des droits des femmes en Équateur. Il se félicite, par ailleurs, des efforts déployés pour mettre en place des mécanismes institutionnels et juridiques en faveur de l’égalité des chances à l’échelon local et au sein de certains ministères. Il demeure toutefois préoccupé par le fait que la structure fonctionnelle, la composition, la base juridique, les pouvoirs et les ressources du CONAMU ne lui permettent pas de procéder véritablement à l’intégration intersectorielle d’une perspective sexospécifique dans la structure d’ensemble et les politiques des pouvoirs publics.

Tout en notant avec satisfaction que la nouvelle Constitution prévoit la mise en place d’un mécanisme spécialisé dans la promoti on de l’égalité entre les sexes, le Conseil pour l’égalité , le Comité recommande qu’il soit procédé à son intégration fonctionnelle dans la structure gouvernementale et que lui soient attribués, par un acte de droit dérivé, le mandat et l’autorité juridique nécessaires de façon à ce qu’il soit possible de tenir compte des sexospécifi cité s et d es droits des femmes dans l’ensemble des politiques et des structures de l’État partie. Il recommande également d e doter le Conseil d’ un budget suffisant pour lui permettre de mener ses activités avec efficacité. Il recommande en outre que les femmes autochtones et l es femmes d’ascendance africaine soient représentées comme il convient au sein du Conseil.

Le Comité se félicite de l’élaboration du plan pour l’égalité des chances 2005-2009, qu’un décret exécutif a promu au rang de politique nationale en 2006, ainsi que des efforts déployés par le CONAMU pour que ce plan soit pris en compte dans la planification fonctionnelle des activités de toutes les institutions du secteur public, ainsi que dans les initiatives destinées à promouvoir une décentralisation des plans relatifs à l’égalité des chances au sein de certaines autorités locales. Le Comité continue toutefois de constater avec préoccupation que ce plan ne s’est vu accorder que de ressources limitées et que de nombreux secteurs gouvernementaux continuent d’ignorer son existence. Il demeure également préoccupé par le fait que la mise en œuvre de ce plan accorde une place excessive à des programmes isolés et à des mesures prises a posteriori.

Le Comité recommande à l’État partie de faire en sorte que ce plan et sa mise en œuvre reposent sur des bases juridiques en adopt ant le projet de loi sur l’égalité des chances. Il lui recommande également d e veiller à ce que c e plan ait la proéminence politique et les ressources nécessaires pour promouvoir une conception globale et sans exclusive de l’ensemble des institutions, organisations et services, publics et privés, aux échelons central et local, afin de garantir la validité, l’universalité, l’applicabilité et la protection du principe de l’égalité des sexes et des droits des femmes.

Le principe de l’égalité

Le Comité note avec satisfaction que la nouvelle Constitution énonce le principe de l’égalité entre les hommes et les femmes ainsi que le principe de la non-discrimination et qu’elle établit la laïcité de l’État équatorien. Il salue également les réformes législatives menées par l’État partie pendant la période considérée afin d’éliminer un certain nombre de dispositions discriminatoires. Il demeure toutefois préoccupé par la disparité entre la situation de jure et la situation de facto pour ce qui est de la protection juridique des femmes et de l’égalité entre les sexes. Il relève en particulier que, comme le reconnaît l’État partie dans son rapport, « certaines pratiques juridiques et sociales sont discriminatoires [à l’égard des femmes], tant au plan public que privé, et tendent à traiter les hommes de façon plus favorable que les femmes » (par. 98).

Le Comité invite instamment l’État partie à adopter le projet de loi sur l’égalité des chances et à créer des mécanismes permettant d’ en as surer l’application effective. Il recommande également à l’État partie de prendre sans tarder des mesures appropriées pour garantir la pleine mise en œuvre de la législation existante de manière à ce qu’il n’existe pas de discrimination à l’égard des femmes. Il exhorte l’État partie à entreprendre un examen approfondi de la compatibilité de la législation nationale avec la nouvelle Constitution et avec la Convention et d’abroger sur le champ tous les instruments législatifs qui sont discriminat oires vis-à-vis des femmes, y compris les dispositions du Code civil qui sont favorables au mari dans l’administration des affaires conjugales.

Pauvreté et émancipation économique

Le Comité s’inquiète de la persistance des taux élevés de pauvreté et d’exclusion sociale parmi les femmes équatoriennes, en particulier les femmes autochtones et les femmes d’ascendance africaine, ainsi que des obstacles qui entravent l’exercice de leurs droits sociaux de base. Tout en se félicitant des efforts déployés par l’État partie pour faire reculer la pauvreté, notamment par le biais du programme de transfert financier en faveur du développement humain et du Programme de promotion des femmes rurales (PROMUJERES), il demeure préoccupé par l’absence d’intégration d’une perspective sexospécifique dans les plans et programmes nationaux de développement économique et social. Il s’inquiète également du fait que les ressources investies en vue d’améliorer la situation des femmes semblent surtout aller à des activités liées à leur rôle de mères et de prestataires de soins dans le secteur de la santé et qu’il n’existe pas de mécanisme permettant de déterminer systématiquement si les programmes existants ont tendance à reproduire et à perpétuer les rôles stéréotypés attribués à chaque sexe.

Le Comité demande instamment à l’État partie de veiller à ce que les politiques économiques et sociales et les investissements publics tiennent spécifiquement compte de la situation des femmes. Il lui recommande de renforcer le système national d’indicateurs sociaux et de l’adapter pour pouvoir obtenir des données ventilées sur la situation des femmes autochtones et des femmes d’ascendance africaine, en particulier dans les zones rurales, et pour que ces données soient prises en compte dans l’élaboration des politiques pertinentes. Le Comité exhorte également l’État partie à renforcer les mesures visant à encourager les femmes à prendre des initiatives d’ordre économique, sur le modèle du F onds « PROMUJERES », sans perdre de vue la situation de différents groupes de femmes. Il encourage enfin l’État partie à créer des mécanismes pour suivre en permanence l’impact des politiques économiques et sociales sur les femmes.

Violence contre des femmes

Le Comité salue la création de commissariats pour la femme et la famille et la mise en place de services spécialisés dans la violence familiale et les délits sexuels au sein des bureaux du Procureur dans les principaux districts, ainsi que l’élaboration d’un programme pour la protection des victimes de violences sexuelles et les efforts déployés pour garantir la mise en œuvre de la loi relative à la violence contre les femmes et la famille. Il demeure toutefois préoccupé par la forte incidence de la violence contre les femmes et les filles dans l’État partie, et notamment la violence au sein de la famille et la violence sexuelle, et par les insuffisances dans la couverture et le financement des programmes destinés à protéger les femmes victimes de cette violence. Le Comité s’inquiète du fait qu’en dépit de lois et de plans précis, la violence et le harcèlement sexuels dont les filles sont victimes dans les établissements scolaires demeurent généralisés. Il s’inquiète également de ce que, comme l’indique le rapport de l’État partie (par. 163), la violence contre les femmes « est encore considérée comme une contravention ». Il note aussi avec inquiétude que les châtiments corporels ne sont pas illégaux au sein de la famille et qu’ils constituent une forme de violence contre les enfants, notamment les filles.

Le Comité invite instamment l’État partie à se pencher en priorité sur la conception et la mise en œuvre d’une stratégie globale et dotée de s ressources appropriées afin de combattre et d’éliminer toutes les formes de violence contre les femmes et l es filles et de renforcer la protection des victimes et l’aide à leur apporter , conformément à la recommandation générale 19. Il invite l’État partie à veiller à ce que la législation permettant de lutter contre ce type de violence soit convenablement appliquée. Il recommande en outre à l’État partie d’ajouter la violence au sein de la famille à la liste des délits visés par le Code pénal et de v eiller à ce que ce code interdis e expressément d’infliger des châtimen ts corporels aux enfants, tant au sein de la famille que dans les établissements de soins et de redressement . Il recommande à l’État partie d’observer les dispositions de la Convention de Belém do Pará de 1994 (Convention interaméricaine pour la prévention, la répression et l’élimination de la violence à l’égard des femmes) et d’utiliser les indicateurs qui ont été approuvés lors de la quatrième réunion du Comité d’experts sur la violence de la Commission interaméricaine des femmes, le 15 août 2008. Le Comité invite également l’État partie à fournir dans son prochain rapport périodique des données et des statistiques sur les cas de différentes formes de violence contre les femmes et sur l’accès des victimes à la justice, ainsi que des informations sur la protection et l’aide fournies aux victimes et sur le nombre d’actions en justice et de condamnations.

Trafic et exploitation sexuelle

Tout en prenant acte des initiatives récentes prises par l’État partie afin de régler le problème de la traite et de l’exploitation sexuelle des femmes et des filles, dont l’élaboration d’un plan d’action spécifique et les efforts déployés afin d’enregistrer les femmes sans papiers, le Comité demeure préoccupé par la persistance de la traite des personnes en provenance et à destination de l’État partie. Il s’inquiète tout particulièrement de la situation des migrantes, des demandeuses d’asile et des réfugiées qui, victimes de discrimination, sont poussées vers le secteur parallèle de l’économie, notamment le travail sexuel, et deviennent vulnérables à l’exploitation sexuelle. Il s’inquiète également des informations selon lesquelles les femmes autochtones et les femmes d’ascendance africaine pourraient être particulièrement vulnérables à la traite et à l’exploitation sexuelle.

Le Comité invite l’État partie à consacrer des ressources suffisantes à la mise en œuvre du plan national contre le trafic et l’exploitation sexuelle et à créer un mécanisme permettant d’ en suivre la mise en œuvre et d’ en évaluer l’efficacité. Il encourage l’État partie à s’attaquer aux causes profondes de la traite des personnes, et notamment à la pauvreté, à la discrimination et à l’exclusion sociale, qui rendent certains groupes de femmes particulièrement vulnérables. Le Comité encourage également l’État partie à renforcer la protection contre la discrimination et la violence apportée aux femmes et aux jeunes filles qui s ouhaitent cesser de se prostituer ainsi qu’aux victimes de la traite, à élaborer des programmes de sensibilisation à effectuer des travaux de recherche sur les causes profondes de la traite , à assurer aux femmes d’autres moyens d’existence et à donner une formation appropriée aux hommes de loi, employés des services de justice pénale, agents des services de santé et responsables de l’application des lois pour toutes les questions liées à l’exploitation sexuelle et la traite des personnes. Le Comité invite l’État partie à fournir dans son prochain rapport périodique des d onnées statistiques concernant l’incidence de ces crimes , le nombre de procédures pénales engagées et les sanctions imposées.

Groupes de femmes vulnérables

Le Comité s’inquiète de la situation des femmes autochtones et des femmes d’ascendance africaine. Il relève que le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme et des libertés fondamentales des populations autochtones (voir A/HRC/4/32/Add.2) et le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale (CERD/C/ECU/CO/19) sont parvenus à la conclusion que les femmes autochtones continuent d’être victimes d’une double discrimination, en raison à la fois de leur sexe et de leur origine ethnique, et de la violence, ce qui constitue un obstacle à l’exercice effectif de leurs droits fondamentaux et à leur pleine participation à tous les aspects de la vie. Le Comité constate avec inquiétude que les femmes autochtones et les femmes d’ascendance africaine sont touchées par la pauvreté de manière anormalement importante, ont moins accès à l’enseignement supérieur, abandonnent plus souvent l’école, connaissent des taux plus élevés de mortalité maternelle, de grossesse précoce, de chômage et de sous-emploi, reçoivent des salaires plus faibles et participent moins à la vie publique que le reste de la population équatorienne.

Le Comité encourage l’État partie à adopter, dans le cadre de ses politiques et programmes, des mesures concrètes et ciblées, assorties de délais et de critères d’évaluation, afin d’accélérer l’amélioration de la situation des femmes autochtones et des femmes d’ascendance africaine dans tous les domaines. Il invite l’État partie à garantir aux femmes autochtones et aux femmes d’ascendance africaine un plein accès à l’éducation et aux services de santé et une pleine participation aux processus de prise de décision s . Il demande à l’État partie d’inclure dans son prochain rapport périodique des renseignements et des données, notamment des tendances à long terme, concernant la situation des femmes autochtones et des femmes d’ascendance africaine ainsi que l’impact des mesures prises en vue de venir à bout de la discrimination multiforme dont elles font l’objet.

Le Comité s’inquiète de la situation des migrantes, des réfugiées et des demandeuses d’asile, en particulier les sans-papiers, du fait qu’elles ont à faire face à des conditions de travail et de vie très difficiles, sont victimes de violences sexistes et n’ont qu’un accès limité aux services de santé. Il s’inquiète également du fait que de nombreuses réfugiées non enregistrées et sans papiers risquent toujours d’être refoulées vers leur pays d’origine et peuvent se voir refuser la protection internationale à laquelle elles ont droit.

Le Comité recommande à l’État partie de prévoir systématiquement l’inclusion et la protection des demandeuses d’asile, des migrantes et des réfugiées dans la législation nationale, les politiques des pouvoirs publics et les programmes qui portent sur les questions relatives aux droits des femmes, notamment la violence sexuelle et sexiste. Par ailleurs, il exhorte l’État partie à prendre des mesures concrètes en vue d’éliminer toutes les formes de violence et de discrimination contre les migrantes, les demandeuses d’asile, les déplacées et les réfugiées, y compris sur le plan de l’emploi, notamment en favorisant leur intégration dans le secteur structuré. Il encourage l’État partie à faciliter l’accès des réfugiées, demandeuses d’asile, migrantes et déplacées aux services de santé et autres services de protection sociale. Il se félicite de la campagne menée par l’État partie en vue d’enregistrer toutes les personnes vivant à proximité de la frontière septentrionale et de leur fournir des pièces d’identité et il l’encourage à renforcer et à accélérer les formalités d’enregistrement ainsi que la procédure de détermination du statut de réfugié.

Tout en notant que le paragraphe 2 de l’article 11 de la nouvelle Constitution adoptée le 29 septembre 2008 interdit la discrimination contre les minorités sexuelles, le Comité note avec inquiétude que certaines informations font état d’une discrimination à l’égard des femmes appartenant à ces minorités.

Le Comité recommande à l’État partie d’enquêter à ce sujet et de prendre des mesures pour remédier au problème, conformément à sa Constitution.

Éducation

Le Comité, tout en se félicitant des efforts déployés par le Ministère de l’éducation et de la culture pour éliminer l’analphabétisme, en particulier grâce à des programmes tels que « Yo sí puedo » (Je peux), note avec préoccupation le fort taux d’analphabétisme chez les femmes des zones rurales parlant des langues autochtones. Malgré la volonté de l’État partie d’assurer l’égalité entre les hommes et les femmes dans l’enseignement traditionnel et les progrès réalisés dans ce sens, le Comité reste préoccupé par le fort taux d’abandon scolaire chez les femmes et les filles, en particulier parmi les filles autochtones, et par les écarts entre les hommes et les femmes pour ce qui est de l’accès à l’enseignement supérieur. Il note également avec inquiétude que les choix de filière dans l’enseignement supérieur continuent de correspondre aux préjugés concernant ce qui constitue un domaine d’étude approprié pour les femmes.

Le Comité invite l’État partie à renforcer ses efforts pour éliminer l’analphabétisme, en particulier chez les femmes des zones rurales parlant des langues autochtones. Il l’engage également à prendre des mesures, et notamment à effectuer des études, en vue de traiter les causes de l’abandon scolaire, notamment la pauvreté et les facteurs liés à la discrimination et aux stéréotypes sexistes, et à promouvoir l’accès des femmes à l’enseignement supérieur, notamment grâce à des bourses. Il encourage également l’État partie à renforcer les efforts qu’il déploie pour que les femmes choisissent des carrières non traditionnelles. Il lui demande de fournir dans son prochain rapport des informations sur les crédits budgétaires alloués à l’enseignement public par rapport aux autres secteurs. Il lui demande par ailleurs de fournir des données ventilées par sexe et par groupe ethnique concernant l’accès à l’école, la durée de la scolarisation et le niveau d’études.

Le Comité est alarmé par le nombre important d’actes de violence et de harcèlement sexuels dont sont victimes les filles dans les écoles, ainsi que de cas d’expulsion ou de refus de scolarisation pour cause de grossesse et de violence.

Le Comité invite l’État partie à redoubler d’efforts afin de veiller à ce que l’éducation soit exempte de discrimination et de violence, notamment en sensibilisant et en formant les responsables scolaires et les élèves, en informant les enfants par l’intermédiaire des médias, en encourageant une approche interculturelle dans les services d’éducation et en mettant en place des mécanismes de notification et de responsabilisation pour que les auteurs de violences soient poursuivis.

Emploi

Le Comité est préoccupé par les forts taux de sous-emploi et de chômage des femmes, en particulier dans les zones rurales, et par le fait que les femmes sont cantonnées dans des secteurs où les salaires sont faibles. Il note avec inquiétude que les femmes perçoivent des salaires inférieurs à ceux des hommes, en particulier dans les zones rurales, et que les ménages dirigés par des femmes ont un revenu moyen inférieur à celui des ménages dirigés par des hommes, surtout dans les zones urbaines.

Le Comité recommande d’intensifier les efforts visant à améliorer l’accès des femmes à l’emploi dans le secteur structuré et à éliminer la ségrégation professionnelle dont elles font l’objet, notamment en leur donnant davantage accès à une éducation et une formation débouchant sur des emplois mieux rémunérés. Il engage l’État partie à adopter des mesures permettant de réduire et de supprimer l’écart salarial entre les hommes et les femmes, notamment en procédant à une évaluation des emplois dans le secteur public et augmentant les salaires dans les secteurs où l’emploi féminin domine. Il l’invite à suivre les incidences des mesures prises et les tendances à long terme, et à lui en rendre compte dans son prochain rapport périodique.

Le Comité est préoccupé par les cas de discrimination professionnelle dont sont victimes les femmes, notamment les renvois pour cause de maternité, et par les pratiques discriminatoires en matière d’emploi qu’elles subissent, en particulier lorsqu’elles sont autochtones, migrantes ou d’ascendance africaine.

Le Comité invite instamment l’État partie à prendre des mesures législatives et administratives pour empêcher la discrimination professionnelle à l’égard des femmes, notamment en rendant publiques toutes les affaires ayant donné lieu à des condamnations. Il l’engage en outre à prendre de nouvelles mesures pour faire prendre conscience au public du rôle important des femmes dans le monde du travail. Il lui recommande de ratifier la Convention de l’Organisation internationale du Travail n o  183 concernant la révision de la Convention sur la protection de la maternité (n o  103).

Santé

Le Comité reste préoccupé par les taux élevés de grossesse chez les adolescentes et les jeunes femmes, en particulier dans les zones rurales. Il est également préoccupé par la forte incidence de la mortalité maternelle. Il note avec inquiétude que la deuxième cause de mortalité maternelle est l’avortement et que le nombre d’avortements pratiqués dans de mauvaises conditions dans le pays et leurs effets sur la mortalité maternelle sont sous-déclarés et inconnus. Il accueille avec satisfaction la promulgation de la loi relative aux soins maternels gratuits et la mise en place de comités d’usagers chargés d’en surveiller l’application. Il est cependant préoccupé par le manque de ressources disponibles pour mettre pleinement en œuvre cette loi, en particulier dans les zones rurales.

Le Comité recommande à l’État partie de renforcer les mesures visant à faire face au problème des grossesses précoces, en particulier chez les adolescentes autochtones ou d’ascendance africaine, notamment en allouant de façon ciblée des ressources suffisantes au plan de prévention des grossesses précoces et à des programmes destinés à aider les adolescents, garçons et filles, pendant la grossesse. Il recommande également que le Ministère de la santé publique mène une enquête ou une étude approfondie sur la question des avortements pratiqués dans de mauvaises conditions et leurs incidences sur la santé des femmes, en particulier la mortalité maternelle, qui servira de base à une action législative ou politique permettant de remédier à ce problème. Il invite en outre instamment l’État partie à allouer des ressources suffisantes pour que la loi sur les soins maternels gratuits soit pleinement et effectivement appliquée et à prendre des mesures pour que toutes les femmes puissent avoir facilement accès à des services de santé de bonne qualité et respectueux des différences culturelles.

Le Comité est préoccupé par le nombre croissant de femmes qui contractent le VIH/sida et par l’absence d’information sur l’incidence du VIH/sida des femmes autochtones ou d’ascendance africaine. Il est également préoccupé par le faible pourcentage de femmes faisant l’objet d’un dépistage précoce du cancer de l’utérus, du col de l’utérus ou du sein.

Le Comité recommande à l’État partie d’évaluer l’incidence du VIH/sida chez les femmes autochtones ou d’ascendance africaine ainsi que chez les migrantes et les réfugiées. Il lui demande instamment de renforcer la prévention du VIH/sida et des cancers de l’utérus, du col de l’utérus et du sein. Il l’invite également à fournir dans son prochain rapport des informations supplémentaires concernant en particulier les tendances à long terme; le cycle de vie des femmes, leur état de santé général et en matière de procréation, notamment les taux et les causes de morbidité et de mortalité chez les femmes par rapport à ceux des hommes; les taux d’utilisation de la contraception; l’espacement des naissances; les maladies touchant les femmes et les filles, en particulier les diverses formes de cancer; et les efforts déployés par l’État pour rendre les services de santé, notamment les services de planification familiale et de prévention et de traitement du cancer, plus accessibles aux femmes. Le Comité recommande à l’État partie de renforcer le rôle des autorités locales et de promouvoir une approche interculturelle pour la fourniture des services de santé.

Participation à la vie publique

Le Comité accueille avec satisfaction la loi sur la participation à la vie politique et note avec satisfaction que, pour la première fois depuis sa promulgation, cette loi a été pleinement appliquée lors des élections à l’Assemblée constituante en 2007. Il se félicite également des progrès accomplis en ce qui concerne la représentation des femmes dans tous les secteurs de la vie publique. Il reste toutefois préoccupé par la persistance d’obstacles structurels, politiques, culturels et socioéconomiques à la participation des femmes, en particulier des femmes autochtones ou d’ascendance africaine, dans de nombreux domaines de la vie publique.

Le Comité invite instamment l’État partie à appliquer de façon systématique la législation visant à assurer la participation des femmes à la vie publique et à prendre d’autres mesures dans ce sens, en particulier en faveur des femmes autochtones ou d’ascendance africaine. Il l’engage à prendre des mesures temporaires spéciales conformément au paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention et à sa recommandation générale n o  25. Il l’invite à fournir dans son prochain rapport périodique des données détaillées concernant la participation des femmes à tous les domaines de la vie publique.

Déclaration et Programme d’action de Beijing

Le Comité exhorte l’État partie à s’acquitter des obligations qui lui incombent en vertu de la Convention en s’appuyant sans réserve sur la Déclaration et le Programme d’action de Beijing, qui renforcent les dispositions de la Convention, et il le prie de lui fournir des informations à ce sujet dans son prochain rapport périodique.

Objectifs du Millénaire pour le développement

Le Comité souligne qu’il est indispensable de donner pleinement effet à la Convention pour atteindre les objectifs du Millénaire pour le développement. Il invite l’État partie à prendre en compte la problématique hommes-femmes et à appliquer sans réserve les dispositions de la Convention dans toutes les initiatives visant à atteindre les objectifs du Millénaire et le prie de lui fournir des informations à ce sujet dans son prochain rapport périodique.

Ratification d’autres instruments

Le Comité note qu’en adhérant aux neuf principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme , les États permettent aux femmes d’exercer plus pleinement leurs libertés et droits fondamentaux à tous les égards. Il encourage donc le Gouvernement équatorien à ratifier les traités auxquels il n’est pas encore partie, à savoir la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées et la Convention relative aux droits des personnes handicapées et son protocole facultatif.

Diffusion des observations finales

Le Comité demande que les présentes observations finales soient largement diffusées en Équateur pour que la population du pays, en particulier les fonctionnaires, les responsables politiques, les parlementaires, les organisations féminines et celles de défense des droits de l’homme, soient au fait des mesures prises pour assurer l’égalité de jure et de facto entre les sexes et des dispositions qui restent à prendre à cet égard. Il demande également à l’État partie de continuer à diffuser largement, surtout auprès des organisations féminines et de celles qui défendent les droits de l’homme, le texte de la Convention, de son protocole facultatif, des recommandations générales du Comité, de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing, ainsi que du Document final de la vingt-troisième session extraordinaire de l’Assemblée générale intitulée « Les femmes en l’an 2000 : égalité entre les sexes, développement et paix pour le XXI e  siècle ».

Article 20, paragraphe 1

Le Comité engage l’État partie à accepter dès que possible l’amendement au paragraphe 1 de l’article 20 de la Convention concernant la durée des réunions du Comité.

Suivi des observations finales

Le Comité demande à l’État partie de lui fournir, dans un délai de deux ans, des informations écrites sur les mesures qu’il aura prises pour mettre en œuvre les recommandations énoncées aux paragraphes 13 et 15 ci-dessus. Il demande également à l’État partie d’envisager de faire appel, s’il y a lieu, à la coopération et à l’assistance techniques, et notamment à des services consultatifs, le cas échéant, pour assurer la mise en œuvre des recommandations ci-dessus.

Date du prochain rapport

Le Comité demande à l’État partie de faire suite, dans le prochain rapport périodique qu’il établira en application de l’article 18 de la Convention, aux préoccupations exprimées dans les présentes observations finales. Il l’invite à présenter en 2012 son rapport valant huitième et neuvième rapports périodiques.