Nations Unies

CRPD/C/PER/CO/1

Convention relative aux droits des personnes handicapées

Distr. générale

16 mai 2012

Français

Original: anglais

Comité des droits des personnes handicapées

Septième session

Genève, 16-20 avril 2012

Examen des rapports soumis par les États partiesen application de l’article 35 de la Convention

Observations finales du Comité des droits des personnes handicapées

Pérou

1.Le Comité a examiné le rapport initial du Pérou à ses 66e et 67eséances tenues le 17 avril 2012, et a adopté les observations finales ci-après à l’issue de sa 72e séance, le 20 avril 2012.

I.Introduction

2.Le Comité remercie l’État partie d’avoir soumis son rapport initial, qui a été rédigé conformément à ses directives concernant l’établissement des rapports (CRPD/C/2/3), ainsi que de ses réponses écrites à la liste des points à traiter (CRPD/C/PER/Q/1/Add.1).

3.Le Comité se déclare satisfait du dialogue constructif engagé avec la délégation. Il salue la présence d’une délégation de haut niveau et, notamment, du Vice-Ministre des femmes et des populations vulnérables, et du Président du Conseil national pour l’intégration des personnes handicapées (CONADIS), expert handicapé, dans ses rangs.

4.Le Comité félicite l’État partie d’avoir ratifié en 2007 le Protocole facultatif se rapportant à la Convention.

II.Aspects positifs

5.Le Comité prend note avec satisfaction des efforts accomplis par l’État partie pour mettre en œuvre la Convention, via l’adoption de lois, de politiques, de plans et de programmes, notamment:

a)La loi no 29392 adoptée en août 2009, qui définit les infractions à la loi générale sur les personnes handicapées et prévoit les sanctions correspondantes;

b)L’adoption du Plan pour l’égalité des chances des personnes handicapées 2009-2018;

c)L’adoption d’un programme pilote sur l’intégration psychosociale des personnes handicapées dans la région de Tumbes;

d)Le projet de loi relatif aux droits des personnes handicapées, soumis au Congrès national en mars 2011;

e)L’adoption de la loi no 29535 sur la langue des signes;

f)Le relèvement du montant des dépenses liées à ses programmes en faveur des personnes handicapées.

III.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

A.Obligations et principes généraux (art. 1er à 4)

6.Le Comité est préoccupé par l’absence de stratégie cohérente et exhaustive pour mettre en œuvre le modèle social consacré par la Convention, y compris des mesures correctives, qui permette d’instaurer l’égalité de facto des personnes handicapées et la pleine réalisation des droits inscrits dans la Convention, à tous les niveaux, y compris en milieu rural. Le Comité est également préoccupé par le fait que le cadre juridique de l’État partie relatif au handicap n’est pas encore pleinement conforme à la Convention, notamment:

a)La loi no 27050 relative aux personnes handicapées, qui définit le handicap sous un angle médical et non pas selon une approche sociale, et qui ne mentionne aucun des principes fondamentaux énoncés aux articles 2 et 3 de la Convention;

b)L’absence de mention du refus d’aménagements raisonnables et de la discrimination par association en tant que formes de discrimination fondée sur le handicap;

c)L’existence de conditions discriminatoires pour l’acquisition de la nationalité péruvienne, qui excluent les personnes atteintes d’un handicap intellectuel ou psychosocial de la procédure.

7. Le Comité recommande à l ’ État partie de proposer une stratégie ambitieuse pour mettre en œuvre tous les droits consacrés par la Convention et d’accélérer l’examen de son cadre juridique en vue de le mettre en conformité avec toutes les dispositions de la Convention, notamment avec les principes fondamentaux qui y sont énoncés, et en particulier de :

a) M odifier la loi n o 27050 de façon à ce qu’elle comporte une définition exhaustive de la personne handicapée ;

b) Définir le refus d’aménagement raisonnable et la discrimination par association comme constituant des formes de discrimination fondée sur le handicap ;

c) Modifier la loi sur les étrangers de façon à en supprimer les obligations qui sont discriminatoires à l’égard des personnes atteintes d’un handicap intellectuel ou psychosocial .

8.Tout en prenant en considération les évolutions positives telles que la création d’une Commission multisectorielle permanente et la mise en place du CONADIS (Conseil national pour l’intégration des personnes handicapées), le Comité juge regrettable que les personnes handicapées, et en particulier les enfants et les femmes handicapés mais aussi les organisations qui les représentent, ne soient pas véritablement associées à l’élaboration des textes de loi et aux autres processus de détermination des orientations et de prise de décisions.

9. Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures spécifiques pour garantir la participation active des personnes handicapées, y compris des enfants et des femmes handicapés, à la planification, à l’exécution et au suivi des processus de prise de décisions publics à tous les niveaux et, en particulier sur les questions qui les concernent directement .

10.Tout en prenant note avec satisfaction de l’adoption d’un certain nombre de dispositions telles que les lois de finance, qui permettent aux administrations locales et régionales d’affecter 0,5 % de leur budget à la mise en place ou à l’amélioration des dispositifs relatifs à l’accessibilité, le Comité est préoccupé par l’absence d’informations sur le respect par les municipalités de ces dispositions réglementaires.

11. Le Comité invite instamment l’État partie à mettre en œuvre les dispositions de la Convention dans l’ensemble du pays et à évaluer régulièrement le respect et l’impact des politiques et programmes visant à une plus grande égalité des chances pour les personnes handicapées, notamment aux échelons régional et local.

B.Droits spécifiques (art. 5 à 30)

Égalité et non-discrimination (art. 5)

12.Le Comité est préoccupé par le fait que, malgré l’existence d’un grand nombre de groupes ethniques différents au Pérou, les personnes handicapées autochtones et issues de minorités ne sont pas considérées comme étant plus exposées à de multiples formes de discrimination, ainsi que par l’absence de données sur le nombre de ces personnes et leur situation. À cet égard, le Comité s’inquiète de la situation des personnes handicapées autochtones et issues de minorités, s’agissant en particulier des femmes et des enfants handicapés qui vivent dans les zones rurales, ainsi que des personnes handicapées d’ascendance africaine.

13. Le Comité engage vivement l’État partie à perfectionner la collecte de données de façon à disposer de statistiques claires sur les personnes handicapées autochtones et issues de minorités. Le Comité lui recommande de s’attacher à élaborer des politiques et des programmes ciblant les personnes handicapées autochtones et issues de minorités, en particulier les femmes et les enfants qui vivent en milieu rural, ainsi que les personnes d’ascendance africaine, afin de remédier aux multiples formes de discrimination dont ces personnes peuvent souffrir.

Femmes handicapées (art. 6)

14.Le Comité est préoccupé par l’absence, dans la loi no 27050 et dans le Plan national en faveur des personnes handicapées 2009-2018, de mesures visant les femmes handicapées. Il souhaite rappeler à l’État partie que les femmes peuvent être visées par de multiples formes de discrimination, comme le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes l’a déjà fait observer dans ses dernières conclusions (CEDAW/C/PER/CO/6). Le Comité des droits des personnes handicapées note aussi avec préoccupation qu’aucune protection spéciale n’est prévue pour les femmes handicapées dans le Plan national contre la violence à l’égard des femmes pour la période 2009-2015.

15. Le Comité engage vivement l’État partie à redoubler d’efforts pour éliminer et prévenir la discrimination à l’égard des femmes et des filles handicapées, en intégrant les préoccupations relatives au genre et au handicap dans tous ses programmes, et en veillant à ce que ces femmes et ces filles soient associées pleinement et à égalité avec les autres à la prise de décisions. Le Comité préconise à l’État partie de modifier son cadre juridique de façon à ce qu’il offre aux femmes et aux filles handicapées une protection spéciale, et d’adopter des mesures efficaces pour prévenir la violence à l’égard des femmes et des filles handicapées et y remédier.

Enfants handicapés (art. 7)

16.Tout en prenant note que le Code relatif aux enfants et aux adolescents (loi no 27337) consacre certains droits pour les enfants handicapés, le Comité est préoccupé quant à l’exercice de fait de ces droits. Il s’inquiète de l’invisibilité des enfants handicapés, en particulier des enfants autochtones, dans les données statistiques de l’État partie.

17. Le Comité recommande à l’État partie d’accorder un rang de priorité élevé aux soins spéciaux et à l’assistance à apporter aux enfants handicapés, en particulier aux enfants autochtones, et d’investir au maximum les ressources disponibles dans l’élimination de la discrimination à leur égard, ainsi que de recueillir des données précises pour surveiller le respect de leurs droits. Le Comité lui recommande en outre de prendre des mesures pour prévenir les actes de violence et les sévices contre des enfants handicapé s et leur éviter les situations de délaissement extrême.

Sensibilisation (art. 8)

18.Tout en prenant note de certaines mesures prises par l’État partie pour sensibiliser aux droits des personnes handicapées, notamment les émissions diffusées sur les stations radio nationales, le Comité demeure préoccupé face à l’insuffisance de ces mesures et à l’existence d’initiatives de levée de fonds privés recourant à des stéréotypes négatifs et faisant appel aux bonnes œuvres (telles que le Téléthon péruvien). Le Comité appelle l’attention de l’État partie sur le fait que, loin de promouvoir les droits des personnes handicapées et de leur conférer une autonomie, de telles campagnes perpétuent et reproduisent les préjugés et, partant, entravent l’édification d’une culture dans laquelle les personnes handicapées sont reconnues comme faisant partie de la diversité humaine et de la société.

19. Le Comité demande à l’État partie de prendre des mesures volontaristes pour mieux faire connaître à tous les niveaux la Convention et le Protocole facultatif s’y rapportant, et d’élaborer des politiques et des programmes visant à garantir l’élimination des stéréotypes et mettant en avant la dignité et les capacités des personnes handicapées et leur contribution à la société.

Accessibilité (art. 9)

20.Le Comité déplore l’absence d’informations sur la mesure dans laquelle est respectée l’obligation de l’État de rendre, d’ici à 2010, 60 % des lieux publics accessibles aux personnes handicapées, ainsi que l’absence d’informations sur le respect par les entreprises privées des normes relatives à l’accessibilité.

21. Le Comité engage vivement l’État partie à accélérer l’exécution des plans et programmes visant à rendre les lieux publics, les communications et les transports publics, en milieu urbain comme dans les zones rurales, accessibles aux personnes handicapées, et à veiller à ce que les entités privées tiennent dûment compte d e toutes les dimensions que revê t l’accessibilité pour les personnes handicapées.

Reconnaissance de la personnalité juridique dans des conditions d’égalité (art. 12)

22.Le Comité est préoccupé par les informations selon lesquelles un certain nombre de personnes handicapées, en particulier parmi celles qui vivent en milieu rural et dans des institutions de long séjour, ne possèdent pas de documents d’identité et que certaines n’ont pas de nom.

23. Le Comité prie instamment l ’ État partie de mettre en place sans délai des programmes en vue de délivrer des documents d ’ identité aux personnes handicapées, y compris dans les zones rurales et les institutions de long séjour, et de collecter des données exactes et complètes au sujet des personnes handicapées vivant en institution qui actuellement sont sans papiers et/ou privées de leur droit à un nom.

24.Le Comité note avec préoccupation que la législation de l’État partie (art. 7 de la Constitution, art. 564 et 565 du Code civil) n’est pas conforme à l’article 12 de la Convention en ce qu’elle prévoit la prise de décisions substitutive et non la prise de décisions assistée et autorise la suspension des droits civils des personnes handicapées dans les cas d’interdiction judiciaire. Le Comité est également préoccupé par le manque d’informations concernant le nombre de personnes qui ont été placées sous tutelle ou sous curatelle et par le manque de recours et garanties juridiques, comme l’examen indépendant et le droit de faire appel, qui permettent de révoquer de telles décisions.

25. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ abolir la pratique de l ’ interdiction judiciaire et de revoir les lois autorisant la mise sous tutelle ou sous curatelle afin de veiller à ce qu ’ elles soient p leinement conformes à l’article  12 de la Convention, et de faire le nécessaire pour remplacer le régime de la prise de décisions substitutive par celui de la prise de décisions assistée , qui respecte l’autonomie de la personne, sa volonté et ses préférences .

26.Le Comité constate avec préoccupation que le Code civil de l’État partie refuse le droit de se marier aux «personnes sourdes et muettes, sourdes et aveugles et aveugles et muettes ainsi qu’aux personnes souffrant d’un handicap psychique ou dont l’état psychique se détériore».

27. Le Comité prie instamment l ’ État partie de modifier le Code civil de façon à garantir de manière appropriée l ’ exercice des droits civils, en particulier le droit de se marier, à toutes les personnes handicapées.

Liberté et sécurité de la personne (art. 14)

28.Le Comité note avec préoccupation que l’article 11 de la loi générale sur la santé no 26842 autorise le placement sans leur consentement de personnes souffrant de «problèmes de santé mentale», cette expression étant définie de façon à englober les personnes atteintes de handicaps psychosociaux et les personnes ayant un «handicap supposé» (toxicomanie, alcoolisme).

29. Le Comité invite l ’ Ét at partie à supprimer la loi n o 29737 qui porte modification de l’article 11 de la loi générale sur la santé, afin d ’ interdire la privation de liberté au motif du handicap, y compris du handicap psychosocial, intellectuel ou supposé .

Droit de ne pas être soumis à la torture (art. 15)

30.Le Comité est préoccupé par les informations concordantes faisant état de recours à la médication forcée, y compris l’administration de narcoleptiques, ainsi que du mauvais état matériel dans lequel se trouvent les institutions psychiatriques, comme l’hôpital Larco Herrera où des personnes ont séjourné plus de dix ans sans bénéficier de services de réadaptation appropriés.

31. Le Comité prie instamment l ’ État partie d ’ enquêter sans délai sur les allégations de traitements ou peines cruels, inhumains ou dégradants infligés dans des établissements psychiatriques, d ’ examiner avec soin la légalité du placement de patients dans ces institutions, et de mettre en place des services de traitement de la santé mentale volontaires, afin de permettre aux personnes handicapées d ’ être intégrées au sein de la communauté, et de les retirer des institutions.

Autonomie de vie et inclusion dans la société (art. 19)

32.Le Comité est préoccupé par l’absence de ressources et de services destinés à garantir le droit des personnes handicapées de vivre de manière indépendante et d’être intégrées dans la société, en particulier dans les zones rurales.

33. Le Comité prie instamment l ’ État partie de mettre en œuvre des programmes qui permettent aux personnes handicapées d ’ accéder à une gamme complète de services communautaires, à domicile ou en établissement et à d ’ autres services de réadaptation de proximité , en particulier dans les zones rurales , et d’éviter l’isolement ou la mise à l’écart de la société, en particulier dans les zones rurales .

Respect du domicile et de la famille (art. 23)

34.Le Comité est profondément préoccupé par le fait qu’en vertu de la norme technique de planification familiale no 536/2005 − MINSA du 26 juillet 2005, la stérilisation peut être infligée, comme moyen de contraception, à des personnes souffrant d’«incapacité mentale» sans leur consentement libre et éclairé.

35. Le Comité prie instamment l ’ État partie d ’ abolir les directives administratives sur la stérilisation forcée des personnes handicapées.

Éducation (art. 24)

36.Tout en prenant note avec satisfaction des directives ministérielles qui ont été adoptées pour mettre en place les bases d’un système éducatif qui intègre les enfants handicapés, le Comité s’inquiète des écarts existant dans l’application de fait de ces dispositions, notamment du taux d’analphabétisme au sein des groupes autochtones et des communautés afro-péruviennes, et de l’impact que ceci peut avoir sur les enfants handicapés des communautés autochtones et des minorités.

37. Le Comité recommande à l ’ État partie de prévoir un budget suffisant pour progresser dans la mise en place d ’ un système éducatif qui intègre les enfants et les adolescents handicapés, et de prendre des mesures qui permettent de déceler et faire reculer l ’ analphabétisme chez les enfants handicapés, en particulier au sein des communautés autochtones et afro-péruviennes.

Droit à la santé (art. 25)

38.Le Comité constate avec préoccupation, à la lecture des réponses données par l’État partie à la liste des points à traiter, que 81 % de la population souffrant d’un handicap n’a accès à aucun service de réadaptation, et que 1,42 % seulement des personnes handicapées bénéficient de programmes de sécurité sociale. Le Comité s’inquiète également du manque de services de soins, en particulier dans les zones rurales, ainsi que des nombreuses restrictions imposées aux personnes handicapées par le décret suprême no 004-2007-SA sur l’assurance santé globale. Il regrette en outre l’absence de programmes de dépistage précoce de la surdité chez les enfants pour réduire les risques et prévenir d’autres handicaps.

39. Le Comité prie instamment l ’ État partie de mettre en œuvre des programmes de santé globale qui permettent de répondre spécialement aux besoins des personnes handicapées et leur donnent accès à des services de réadaptation et des services de santé en général. Il recommande par ailleurs à l ’ État partie de:

a) Revoir son cadre juridique de façon à s’assurer que les compagnies d’assurance s et d’autres acteurs privés ne pratiquent pas de discrimination à l’égard des personnes handicapées;

b) Consacrer des ressources budgétaires au personnel de santé et développer ses compétences , afin de réaliser effectivement le droit à la santé des personnes handicapées et de veiller à ce que les hôpitaux et les centres de santé soient accessibles aux personnes handicapées;

c) Proposer des services de dépistage précoce du handicap, en particulier de la surdité , qui permett e nt de réduire les risques et de prévenir d ’ autres handicaps, y compris chez les enfants.

Travail et emploi (art. 27)

40.Tout en prenant note avec satisfaction des efforts déployés par l’État partie pour relever le niveau d’emploi des personnes handicapées, en particulier du décret suprême no 027-2007-PCM qui exige des institutions du secteur public qu’elles réservent au moins 3 % de leurs emplois à des personnes handicapées, le Comité demeure préoccupé par les taux élevés de chômage et de sous-emploi des personnes handicapées qui, d’après la réponse du Gouvernement à la liste des points à traiter, atteignent respectivement 60 % et 35,3 %.

41. Le Comité demande instamment à l’État partie d’élaborer de nouvelles politiques qui prônent l’inclusion des personnes handicapées dans le marché du travail, comprenant notamment la mise en place d’incitations fiscales pour les entreprises ou particuliers qui emploient des personnes handicapées, le recrutement de personnes handicapées dans la fonction publique et la mise au point de programmes d’activité professionnelle indépendante. Le Comité lui recommande en outre d’adopter des programmes éducatifs dotant les personnes handicapées des capacités voulues pour leur faire intégrer le marché du travail.

42.Le Comité apprécie que l’État partie se préoccupe de la pauvreté endémique qui touche les personnes handicapées.

43. Le Comité engage vivement l’État partie à remédier aux effets préjudiciables de la pauvreté en réorientant le développement socioéconomique de façon à ce qu’il intègre le handicap.

Participation à la vie politique et à la vie publique (art. 29)

44.Le Comité félicite l’État partie d’avoir adopté, en octobre 2011, une résolution annulant des politiques antérieures qui excluaient des listes électorales les personnes souffrant de certains handicaps psychosociaux et intellectuels, et d’avoir mis à jour le Registre national de l’état civil (RENIEC) en conséquence. Toutefois, le Comité demeure préoccupé par:

a)Le fait que les personnes handicapées qui sont frappées d’interdiction judiciaire continuent d’être privées du droit de voter et que tous les noms des personnes qui avaient été exclues des listes électorales nationales n’y ont pas encore été rétablis;

b)Le manque d’informations sur les mesures prises pour informer les personnes handicapées des faits nouveaux mentionnés ci-dessus et éviter que de telles violations se reproduisent à l’avenir;

c)Le fait que de nombreuses personnes placées en institution n’ont pas pu exercer leur droit de vote parce qu’elles n’avaient pas de documents d’identité, qu’elles n’étaient pas autorisées à quitter l’institution, ne disposaient d’aucune aide spéciale ou que le bureau de vote était trop loin de l’institution.

45. Le Comité recommande à l’État partie:

a) De rétablir le droit de vote de toutes les personnes handicapées qui sont exclues des listes électorales nationales, y compris les personnes handicapées frappées d ’ une interdiction judiciaire;

b) D ’ aller au-devant des personnes vulnérables et de protéger les personnes handicapées de telles violations à l ’ avenir, y compris au moyen de formations appropriées;

c) De garantir le droit de voter des personnes handicapées vivant en institution, en veillant à ce qu ’ il leur soit donné physiquement la possibilité de se rendre dans le bureau de vote qui leur est assigné et qu ’ elles disposent de l ’ accompagnement voulu pour ce faire, ou à ce que d ’ autres possibilités leur soient offertes.

C.Obligations spécifiques (art. 31 à 33)

Statistiques et collecte des données (art. 31)

46.Le Comité regrette qu’il n’existe que peu de données ventilées par sexe au sujet des personnes handicapées. Il rappelle que de telles informations sont indispensables pour comprendre la situation de chacun des différents groupes de personnes handicapées dans l’État partie, qui peuvent être soumis à divers degrés d’exclusion, en particulier les groupes autochtones, les femmes et les enfants handicapés et les personnes vivant en milieu rural, et qu’elles sont aussi nécessaires pour mettre au point des lois, des politiques et des programmes adaptés à leur situation et évaluer la mise en œuvre de la Convention.

47. Le Comité recommande à l ’ État partie de rendre systématique s la collecte, l ’ analyse et la diffusion de données ventilées par sexe, âge et type de handicap, d ’ accentuer les efforts de renforcement des capacités en la matière et de mettre au point des indicateurs modulés en fonction du genre afin d ’ appuyer l ’ élaboration de lois et de politiques et le renforcement d ’ institutions permettant de suivre les progrès accomplis dans la mise en œuvre des diverses dispositions de la Convention , et d ’ en rendre compte , en tenant compte de l’abandon du modèle médical pour le modèle social .

Application et suivi au niveau national (art. 33)

48.Le Comité est préoccupé par le manque de clarté des fonctions de la Commission multisectorielle permanente et du CONADIS et de la répartition des tâches entre eux, ainsi que par le fait qu’ils ne sont pas conformes aux Principes de Paris.

49. Le Comité recommande à l ’ État partie de désigner spécialement un mécanisme national de surveillance qui soit en conformité avec les Principes de Paris et de veiller, à titre de priorité, à ce que les personnes handicapées et les organisations qui les représentent participent pleinement au processus de surveillance.

Suivi des observations finales et diffusion

50.Le Comité demande à l’État partie de mettre en œuvre ses recommandations telles qu’énoncées dans les présentes observations finales. Il lui recommande de transmettre ses observations finales aux membres du Gouvernement et du Parlement, aux responsables des ministères compétents, à l’administration judiciaire et aux membres des professions concernées, tels que les professionnels de l’éducation, de la santé et de la justice, ainsi qu’aux autorités locales, au secteur privé et aux médias, pour examen et suite à donner, en recourant pour ce faire aux stratégies de communication sociale modernes.

51.Le Comité prie l’État partie de diffuser largement les présentes observations finales, notamment auprès des organisations non gouvernementales et des organisations qui représentent les personnes handicapées, et auprès des personnes handicapées et des membres de leur famille, sous une forme accessible.

52.Le Comité encourage vivement l’État partie à associer les organisations de la société civile, en particulier les organisations de personnes handicapées, à l’élaboration de son deuxième rapport périodique.

53.Le Comité prie l’État partie de lui fournir, dans les deux années qui suivent et conformément au paragraphe 2 de l’article 35 de la Convention, des informations écrites sur les mesures qu’il aura prises pour appliquer les recommandations formulées aux paragraphes 23, 29 et 35.

Coopération technique

54.Le Comité recommande à l’État partie de faire appel à la coopération technique des organisations membres du Groupe d’appui interorganisations pour la Convention afin d’obtenir des conseils et une assistance aux fins de la mise en œuvre de la Convention et des présentes observations finales.

Prochain rapport

55.Le Comité prie l’État partie de lui faire tenir son prochain rapport périodique d’ici à avril 2016.