Nations Unies

CERD/C/HND/CO/6-8

Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale

Distr. générale

14 janvier 2019

Français

Original : espagnol

Comité pour l’élimination de la discrimination raciale

Observations finales concernant le rapport du Honduras valant sixième à huitième rapports périodiques *

1.Le Comité a examiné le rapport du Honduras valant sixième à huitième rapports périodiques (CERD/C/HND/6-8) à ses 2685e et 2686e séances, les 28 et 29 novembre 2018. À sa 2700e séance, le 10 décembre 2018, il a adopté les observations finales ci-après.

A.Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport de l’État partie valant sixième à huitième rapports périodiques. Il se félicite du dialogue ouvert et constructif qu’il a eu avec la délégation de l’État partie et prend note des informations complémentaires soumises après le dialogue.

B.Aspects positifs

3.Le Comité note avec satisfaction que l’État partie a adhéré au Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels le 16 janvier 2018.

4.Il salue les mesures législatives et institutionnelles ci-après prises par l’État partie pendant la période considérée :

a)L’adoption de la loi sur la protection des défenseurs des droits de l’homme, des journalistes et autres membres des médias et des acteurs de la justice, en avril 2015 ;

b)La création du Conseil national de protection des défenseurs des droits de l’homme, en 2015 ;

c)L’adoption de la politique publique de lutte contre le racisme et la discrimination raciale visant à favoriser le plein épanouissement des peuples autochtones et afro‑honduriens pour la période 2016-2022 ;

d)La création du Ministère des droits de l’homme, qui a entamé ses travaux en janvier 2018.

5.Le Comité constate avec satisfaction que l’État partie a adressé aux titulaires de mandat au titre des procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme une invitation permanente à se rendre dans le pays. À ce sujet, le Comité se félicite que l’État partie ait reçu la visite d’un grand nombre de titulaires de mandat, notamment celle de la Rapporteuse spéciale sur les droits des peuples autochtones en novembre 2015, et il encourage l’État partie à s’assurer que toutes les recommandations qu’elle a formulées dans son rapport (A/HRC/33/42/Add.2) sont dûment appliquées.

C.Sujets de préoccupation et recommandations

Application de la Convention

6.Le Comité note que la Convention a force de loi dans l’État partie et prend acte des renseignements fournis par la délégation concernant l’invocation de la Convention par le Bureau du Procureur chargé des ethnies et du patrimoine culturel dans quelques procès, mais il regrette qu’aucun renseignement précis ni aucun exemple concret de l’application de la Convention par les tribunaux ne lui aient été communiqués (art. 1er et 6).

7. Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures appropriées, notamment en s’appuyant sur la formation, pour garantir que les juges, les procureurs et les avocats connaissent les dispositions de la Convention et qu’ils puissent ainsi les appliquer selon qu’il convient. Il demande à l’État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des exemples précis de cas dans lesquels la Convention a été appliquée par les tribunaux nationaux.

Collecte de données

8.Le Comité prend note des efforts que déploie l’État partie pour établir des statistiques, mais il regrette de ne pas avoir reçu de renseignements complets sur les conditions de vie et la situation socioéconomique des peuples autochtones, notamment afro‑honduriens (art. 2, par. 1).

9. Le Comité recommande à l’État partie de poursuivre ses efforts pour établir des statistiques fiables, à jour et complètes sur la composition démographique et la situation socioéconomique , ventilées par origine ethnique, sexe, âge, département, zone urbaine ou rurale, y compris les zones les plus reculées. Il l’exhorte également à continuer de travailler à l’élaboration d’indicateurs relatifs aux droits de l’homme et d’indicateurs socioéconomiques qui lui permettent d’évaluer la viabilité, la portée et les effets des politiques publiques adoptées en faveur des groupes de population faisant l’objet de discrimination raciale et d’apporter les ajustements voulus à ces politiques, et d’évaluer l’application de la Convention en ce qui concerne les différents groupes qui composent la société.

Mesures législatives

10.Le Comité prend note des modifications apportées au Code pénal, mais il demeure préoccupé par le fait que les dispositions qui ont trait à la discrimination raciale ne comprennent pas tous les éléments des articles 1er et 4 de la Convention (art. 1er et 4).

11.Le Comité recommande à l’État partie de passer en revue la législation pour s’assurer que la définition et l’interdiction de la discrimination raciale comprennent tous les aspects visés à l’article premier de la Convention et s’appliquent aux actes de discrimination tant directe qu’indirecte dans tous les domaines du droit et de la vie publique. Il lui recommande également de s’assurer que sa législation pénale est pleinement conforme à l’article 4 de la Convention. Le Comité renvoie l’État partie à ses recommandations générales n o  14 (1993) concernant le paragraphe 1 de l’article premier de la Convention et n° 29 (2002) concernant la discrimination fondée sur l’ascendance.

Commissaire national aux droits de l’homme

12.Le Comité prend note des efforts qui sont faits pour renforcer l’indépendance du Commissaire national aux droits de l’homme et pour accroître sa dotation budgétaire, mais il constate avec préoccupation, notamment, que la procédure de sélection et de nomination du Commissaire n’est toujours pas suffisamment ouverte, transparente et participative et que les ressources allouées au Commissaire ne sont toujours pas suffisantes pour lui permettre de s’acquitter pleinement de son mandat (art. 2).

13. Le Comité exhorte l’État partie à redoubler d’efforts pour faire en sorte que l’institution du Commissaire national aux droits de l’homme soit pleinement conforme aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris) et que le Commissaire tienne dûment compte des recommandations du Sous-Comité d’accréditation de l’Alliance globale des institutions nationales des droits de l’homme.

Renforcement des institutions

14.Le Comité prend note des informations qu’il a reçues pendant le dialogue au sujet des mesures prises en vue de réactiver la Commission nationale contre la discrimination raciale, le racisme, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée. Il demeure toutefois préoccupé par le fait que cette Commission n’a toujours pas démarré ses activités. Il regrette également que le Ministère des peuples autochtones et afro-honduriens ait été transformé en une direction du Ministère du développement et de l’insertion sociale, ce qui limiterait son rayon d’action et son pouvoir de décision (art. 2).

15. Compte tenu de ses recommandations antérieures (CERD/C/HND/CO/1-5, par. 11 et 12), le Comité recommande à l’État partie de redoubler d’efforts pour réactiver la Commission nationale contre la discrimination raciale, le racisme, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, en tant qu’institution de lutte contre la discrimination raciale, en garantissant sa pleine indépendance et une large représentation des peuples autochtones et afro-honduriens et en veillant à ce qu’elle dispose de ressources humaines, techniques et financières suffisantes pour garantir son plein fonctionnement. Le Comité encourage l’État partie à envisager de redonner à la Direction des peuples autochtones et afro-honduriens rang de ministère et à veiller à ce que les peuples autochtones et afro-honduriens y soient largement représentés.

Discrimination structurelle

16.Le Comité est préoccupé par la discrimination structurelle à laquelle les peuples autochtones et afro-honduriens continuent de se heurter dans l’État partie, comme en témoignent les inégalités dont ils font l’objet par rapport au reste de la population en ce qui concerne l’exercice des droits de l’homme. Le Comité prend note des renseignements communiqués par la délégation quant aux résultats de la mise en œuvre du programme « Vida Mejor » (Une vie meilleure), mais il constate avec préoccupation que les peuples autochtones et afro-honduriens, en particulier ceux qui vivent dans des zones rurales et des régions reculées, sont toujours durement touchés par la pauvreté et l’exclusion (art. 1er, 2 et 5).

17. Eu égard à ses recommandations générales n° 32 (2009) sur la signification et la portée des mesures spéciales dans la Convention et n° 34 (2011) sur la discrimination raciale à l’égard des personnes d’ascendance africaine, le Comité exhorte l’État partie :

a) À garantir la mise en œuvre effective de la politique publique de lutte contre le racisme et la discrimination raciale visant à favoriser le plein épanouissement des peuples autochtones et afro-honduriens pour la période 2016 ‑2022, notamment par une dotation suffisante en ressources humaines, techniques et financières, la création de mécanismes efficaces de coordination entre les différentes autorités chargées de cette mise en œuvre aux niveaux national et local et la pleine participation des peuples autochtones et afro-honduriens ;

b) À veiller à ce que les programmes sociaux de lutte contre la pauvreté soient appliqués efficacement, en tenant compte des inégalités ainsi que des besoins concrets des peuples autochtones et afro-honduriens, afin de faire sensiblement reculer la pauvreté et les inégalités qui touchent ces peuples, compte tenu des objectifs de développement durable ;

c) À prendre des mesures spéciales ou correctives pour mettre fin à la discrimination raciale structurelle qui touche les peuples autochtones et afro ‑honduriens dans l’État partie.

Consultations préalables

18.Le Comité prend note de l’information fournie par la délégation selon laquelle, avant l’adoption du projet de loi relatif au droit des peuples autochtones et afro-honduriens à la consultation préalable dont le Congrès national est saisi, le processus de dialogue serait élargi, pour répondre aux préoccupations exprimées par certains secteurs. Cependant, outre la nécessité de mener de vastes consultations représentatives au sujet du projet de loi, le Comité constate avec préoccupation qu’il y aurait dans ce texte des lacunes inquiétantes, notamment en ce qui concerne la définition de son champ d’application, les mécanismes de mise en œuvre envisagés, les étapes de la consultation et la notion de consentement. Il est également préoccupé par le fait que le projet de loi en question n’a pas été élaboré en s’appuyant sur un processus approprié de consultation et avec la participation des peuples autochtones et afro‑honduriens. Le Comité constate en outre avec une vive préoccupation que les projets d’investissement menés sur les territoires des peuples autochtones et afro‑honduriens sont exécutés sans que le droit de ceux-ci d’être consultés et d’exprimer leur consentement préalable, libre et éclairé soit pleinement respecté (art. 2 et 5).

19. Le Comité exhorte l’État partie:

a) À élaborer et adopter, en concertation avec les peuples autochtones et les afro-honduriens, un processus et une méthode appropriés qui permettent de garantir le droit de ces peuples d’être consultés au sujet de toute mesure législative ou administrative susceptible d’avoir des incidences sur leurs droits et d’exprimer leur consentement préalable, libre et éclairé, compte tenu également des traditions et caractéristiques culturelles de chaque peuple ;

b) À procéder, avant que le projet de loi relatif à la consultation préalable dont est saisi le Congrès national soit examiné et adopté, à une analyse complète du contenu dudit projet de loi à la lumière des normes internationalement reconnues et avec la participation active, entière et transparente de tous les peuples autochtones et afro-honduriens ;

c) À garantir que soit dûment respecté le droit des peuples autochtones et afro-honduriens d’être consultés de façon qu’ils puissent exprimer leur consentement préalable, libre et éclairé quant à l’exécution de projets de développement économique, énergétiques, touristiques, d’infrastructures et d’exploitation des ressources naturelles susceptibles d’avoir des incidences sur leurs territoires et leurs ressources, et à veiller à ce que de telles consultations soient menées de manière systématique et transparente et à ce que les peuples concernés soient dûment représentés ;

d) À garantir, sans préjudice de la réglementation envisagée, le droit à la consultation préalable selon les conditions énoncées dans la Convention (n° 169) de l’Organisation internationale du Travail (OIT) relative aux peuples indigènes et tribaux et dans les autres normes internationalement reconnues ;

e) À prendre dûment en considération les recommandations formulées par la Rapporteuse spéciale sur les droits des peuples autochtones concernant la consultation préalable.

Terres, territoires et ressources naturelles

20.Le Comité prend note des efforts qui sont faits pour délivrer des titres de propriété aux peuples autochtones et afro-honduriens, mais il s’inquiète de l’absence de mécanismes efficaces pour protéger les droits que ces peuples détiennent sur leurs terres, leurs territoires et leurs ressources. Le Comité est préoccupé par les graves conflits sociaux qui se produisent au sujet de la possession et de l’utilisation de terres et de territoires entre les peuples autochtones et afro-honduriens et des tiers occupant ces terres ou territoires ou souhaitant exploiter les ressources naturelles que ces territoires renferment (art. 2 et 5).

21. Le Comité recommande à l’État partie :

a) D’établir, en coordination avec les autorités judiciaires, agraires et d’autres institutions compétentes, un mécanisme adéquat et efficace permettant l’examen des revendications foncières et la restitution de terres et territoires ancestraux, et de veiller à ce que ce mécanisme soit doté des ressources humaines, techniques et financières voulues ;

b) De garantir la protection des droits qu’ont les peuples autochtones de posséder, d’utiliser, de mettre en valeur et de gérer leurs terres, territoires et ressources en toute sécurité, y compris au moyen d’un processus approprié d’assainissement de la gestion du territoire, de la reconnaissance légale et de la protection juridique nécessaires, conformément aux normes internationales ;

c) D’intensifier ses efforts pour appliquer effectivement les arrêts de la Cour interaméricaine des droits de l’homme dans les affaires Communauté garifuna de Punta Piedra et Communauté garifuna Triunfo de la Cruz .

Projets économiques

22.Le Comité est gravement préoccupé par les conséquences qu’ont les projets mis en œuvre dans les secteurs de l’énergie, de l’extraction, du tourisme, de l’agro-industrie et des infrastructures sur les territoires et les ressources des peuples autochtones et afro‑honduriens, ainsi que sur leurs modes de vie et de subsistance traditionnels.

23. Soulignant que la protection des droits de l’homme et l’élimination de la discrimination raciale sont un aspect essentiel d’un développement économique durable, et rappelant le rôle que jouent aussi bien le secteur public que le secteur privé à cet égard, le Comité exhorte l’État partie :

a) À s’assurer que, dans le cadre du processus de consultation préalable, des organismes indépendants et impartiaux réalisent des études sur l’incidence sociale, environnementale et culturelle que peuvent avoir les projets de développement économique et d’exploitation des ressources naturelles sur les territoires des peuples autochtones et afro-honduriens, en veillant à ce que ceux-ci participent dûment à ces études, afin de protéger leurs modes de vie et de subsistance traditionnels ;

b) À définir, en concertation avec les peuples autochtones et afro ‑honduriens dont les territoires et les ressources sont concernés, des mesures d’atténuation, d’indemnisation des dommages et des pertes subis et de participation aux bénéfices de ces activités.

Défenseurs des droits de l’homme

24.Si le Comité est conscient des efforts déployés par l’État partie pour renforcer le cadre législatif et institutionnel destiné à protéger les défenseurs des droits de l’homme, il est toutefois gravement préoccupé par l’ampleur de la violence qui s’exerce contre les défenseurs des droits de l’homme, notamment les dirigeants de peuples autochtones et afro‑honduriens. Il n’ignore pas que sept personnes ont été condamnées pour l’assassinat de la dirigeante autochtone du peuple lenca Berta Cáceres, mais s’inquiète néanmoins des difficultés auxquelles continuent de se heurter les défenseurs des droits de l’homme victimes d’agressions en matière d’accès à la justice, ainsi que de la grande impunité dont continuent de faire l’objet les auteurs de violations des droits de ces personnes. Il constate en outre avec préoccupation que les mesures qui sont prises pour protéger les défenseurs des droits de l’homme ne sont pas suffisamment efficaces, en partie faute d’une dotation suffisante pour en assurer la mise en œuvre (art. 2, 5 et 6).

25. Le Comité recommande à l’État partie :

a) De prendre des mesures efficaces et opportunes pour prévenir les actes de violence contre les défenseurs des droits de l’homme, y compris les dirigeants de peuples autochtones et afro-honduriens, et protéger la vie et l’intégrité de ces personnes ;

b) De veiller à ce que toutes les plaintes portant sur des atteintes à la vie, des actes de violence, des menaces, des brimades, des actes de harcèlement ou des actes de diffamation dont ont été victimes des défenseurs des droits de l’homme, notamment des dirigeants de peuples autochtones et afro-honduriens, donnent lieu à des enquêtes approfondies, impartiales et efficaces, de façon que les responsables soient jugés et dûment sanctionnés ;

c) De garantir l’application effective de la loi sur la protection des défenseurs des droits de l’homme, des journalistes et autres membres des médias et des acteurs de la justice, ainsi que le bon fonctionnement du mécanisme de protection et du Bureau du procureur spécial chargé de protéger les défenseurs des droits de l’homme, les journalistes et autres membres des médias et les acteurs de la justice, entre autres choses grâce à l’affectation de ressources suffisantes et à la révision et à l’amélioration des stratégies actuelles de protection, en tenant compte des besoins, des différences culturelles et régionales et du caractère collectif des droits des peuples autochtones et afro-honduriens, et en veillant à ce que les bénéficiaires soient dûment consultés quant aux mesures de protection prévues ;

d) De mener des campagnes d’information et de sensibilisation sur le travail essentiel qu’accomplissent les défenseurs des droits de l’homme, de manière à créer un climat de tolérance qui leur permette d’échapper à toute forme d’intimidation, de menaces et de représailles.

La Mosquitia

26.Le Comité prend acte des mesures citées par la délégation en ce qui concerne le développement de la région de La Mosquitia, mais constate toutefois avec préoccupation que celles-ci ne permettent pas de remédier pleinement à la pauvreté et à l’exclusion sociale dont sont victimes les peuples autochtones de cette région. Il réaffirme sa préoccupation (CERD/C/HND/CO/1-5, par. 19) quant à la situation déplorable des plongeurs misquitos, qui continuent de travailler dans des conditions précaires et ne bénéficient pas de mesures adéquates pour assurer leur sécurité au travail. Il est également préoccupé par les informations selon lesquelles des plongeurs en nombre croissant seraient victimes d’accidents liés à la pratique de la pêche sous-marine (art. 2 et 5).

27. Le Comité exhorte l’État partie :

a) À adopter des politiques publiques adaptées sur le plan culturel pour combattre dans leur globalité la pauvreté et l’exclusion sociale dont sont victimes les peuples autochtones et afro-honduriens habitant la région de La Mosquitia , de manière que ceux-ci puissent jouir pleinement de leurs droits de l’homme, et en particulier de leurs droits économiques, sociaux et culturels ;

b) À prendre les mesures qui s’imposent pour que les plongeurs misquitos bénéficient en droit et en fait, de conditions de travail justes et satisfaisantes, notamment d’une rémunération qui permette à ceux-ci et aux membres de leur famille de vivre dans des conditions décentes, et qu’ils aient accès à la sécurité sociale ;

c) À redoubler d’efforts pour renforcer le système d’inspection du travail dans cette région et établir des mécanismes appropriés et efficaces pour que les plongeurs misquitos puissent signaler les abus et l’exploitation dont ils sont victimes et que des enquêtes soient menées et des sanctions prononcées.

Documents d’identité

28.S’il prend note des efforts déployés par l’État partie, le Comité est néanmoins préoccupé par les informations selon lesquelles les personnes qui habitent des régions frontalières reculées connues sous le nom de « bolsones » auraient du mal à obtenir des documents d’identité (art. 2 et 5).

29. Le Comité recommande à l’État partie d’intensifier son action pour que tous ceux de ses citoyens qui vivent dans des régions reculées, en particulier dans les zones frontalières connues sous le nom de «  bolsones  », aient accès à des documents d’identité, de manière qu’ils puissent jouir effectivement de leurs droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels.

Droit à la santé

30.Le Comité est préoccupé par l’insuffisance des infrastructures, la pénurie de médicaments, le manque de qualité et la rareté des services de soins de santé dans les zones rurales et les régions reculées principalement habitées par des peuples autochtones (art. 5).

31. Le Comité recommande à l’État partie de prendre les mesures voulues pour parvenir à une couverture universelle en ce qui concerne l’accès à la santé et garantir l’accessibilité, la disponibilité et la qualité des services et prestations de santé, notamment des médicaments essentiels, compte tenu en particulier des besoins, des traditions et des différences culturelles des peuples autochtones.

Droit à l’éducation

32.Le Comité est préoccupé par les difficultés persistantes auxquelles se heurtent les peuples autochtones et afro-honduriens en ce qui concerne l’accès à l’éducation, et en particulier :

a)Par l’état de délabrement dans lequel se trouvent les écoles des régions principalement habitées par des peuples autochtones et afro-honduriens, et par les carences de ces établissements en matière d’équipement, de personnel et d’infrastructure ;

b)Par le taux élevé d’abandon scolaire chez les enfants et les adolescents autochtones et les enfants et les adolescents afro-honduriens ;

c)Par les lacunes que présente la mise en œuvre de l’enseignement interculturel bilingue, en particulier dans certaines régions telles que La Mosquitia ;

d)Par la forte proportion de personnes qui ne savent ni lire ni écrire au sein de la population autochtone (art. 5).

33. Le Comité recommande à l’État partie de prendre les mesures voulues pour garantir effectivement le droit à l’éducation, en particulier des enfants et des adolescents autochtones et afro ‑honduriens. Il exhorte en particulier à l’État partie :

a) À ouvrir davantage d’écoles dans les zones rurales et les régions reculées où la population autochtone et afro-hondurienne est proportionnellement plus nombreuse, et à améliorer la qualité et l’infrastructure de ces établissements ;

b) À prendre les mesures qui s’imposent pour faire diminuer le taux d’abandon scolaire chez les enfants et les adolescents autochtones et afro-honduriens ;

c) À veiller à l’application effective de la Loi fondamentale sur l’enseignement interculturel bilingue, en s’assurant que celle-ci n’entraîne pas une assimilation des peuples autochtones et afro-honduriens, notamment grâce à l’élaboration de programmes d’enseignement interculturels qui répondent à l’objectif de promotion et de préservation de l’identité culturelle des peuples autochtones et afro-honduriens ;

d) À redoubler d’efforts pour éradiquer l’analphabétisme, et à procéder pour ce faire à une évaluation de la mise en œuvre du plan national pour l’alphabétisation obligatoire, la prise en charge du retard scolaire et l’éducation populaire H onduras 2014-2017, en vue de définir de nouvelles cibles, de nouveaux objectifs et de nouvelles stratégies.

Participation à la vie politique

34.Le Comité prend note avec satisfaction des informations indiquant que le nombre de députés autochtones ou afro-honduriens a augmenté, et se félicite qu’un projet de loi visant à établir des quotas pour favoriser la participation à la vie politique de différents groupes au nombre desquels les peuples autochtones et afro-honduriens ait été déposé au Congrès. Pour autant, il demeure préoccupé par le nombre limité d’autochtones et d’Afro‑Honduriens qui occupent des postes de décision dans l’administration publique (art. 5).

35. Le Comité recommande à l’État partie, en concertation avec les peuples autochtones et afro-honduriens et avec leur participation active, de mener le processus d’adoption du projet de loi visant à établir des quotas pour favoriser la participation à la vie politique qui a été mentionné au cours du dialogue. Il lui recommande également de mettre en place des mécanismes adéquats pour garantir l’application effective de ce texte et assurer aux autochtones et aux Afro-Honduriens l’égalité des chances en ce qui concerne la représentation à tous les niveaux et dans tous les organes de l’administration publique, y compris aux postes de décision, et ce, aux niveaux tant national que local, de manière à favoriser l’élaboration et la mise en œuvre de politiques publiques qui garantissent les droits de ces personnes. Le Comité recommande en outre à l’État partie de s’employer à sensibiliser les autochtones et les Afro-Honduriens à l’importance de participer activement à la vie publique et politique.

Discrimination multiple

36.Le Comité est préoccupé par la discrimination raciale multiple à laquelle continuent de se heurter les femmes autochtones et afro-honduriennes dans l’État partie, comme en témoignent les obstacles qu’elles rencontrent en matière d’accès à l’emploi, à l’éducation et à la santé, et en particulier à la santé sexuelle et procréative. Il prend également note avec préoccupation de la participation limitée des femmes autochtones et afro‑honduriennes à la vie politique. Le Comité est vivement préoccupé par l’ampleur des violences faites aux femmes, lesquelles touchent massivement les femmes autochtones et afro‑honduriennes (art. 5 et 6).

37. Le Comité recommande à l’État partie de veiller à ce que les politiques de lutte contre la discrimination raciale soient mises en œuvre dans un souci d’égalité entre hommes et femmes, de manière à faire cesser les discriminations multiples et croisées auxquelles se heurtent les femmes autochtones et afro-honduriennes. Il lui recommande aussi de prendre des mesures assorties d’une perspective interculturelle pour garantir aux femmes autochtones et afro-honduriennes : a) l’accès à l’éducation, à l’emploi et à la santé, notamment à la santé sexuelle et procréative ; b) la participation à la prise de décision et, en particulier, aux processus de consultation préalable ; et c) l’accès à la justice et aux mécanismes de protection voulus lorsqu’elles sont l’objet de violences sexistes. Le Comité renvoie l’État partie à sa r ecommandation générale n o  25 (2000) concernant la dimension sexiste de la discrimination raciale.

Accès à la justice

38.Le Comité relève que, malgré les efforts que l’État partie a déployés pour renforcer le Bureau du procureur spécial chargé des ethnies et du patrimoine culturel, les ressources qu’il lui alloue demeurent limitées. Il constate également avec préoccupation que les peuples autochtones et afro-honduriens continuent à avoir du mal à accéder à la justice, entre autres choses du fait de la connaissance limitée que le personnel judiciaire et les avocats ont de la Convention et des droits des peuples autochtones et afro-honduriens, du manque d’indépendance de la justice et du manque de capacités pour mener des enquêtes approfondies (art. 6).

39. Le Comité exhorte l’État partie :

a) À redoubler d’efforts pour continuer à renforcer le Bureau du procureur spécial chargé des ethnies et du patrimoine culturel, grâce à l’affectation des ressources humaines, techniques et financières nécessaires pour en garantir le plein fonctionnement et la pleine couverture au niveau national et faciliter ainsi l’accès des peuples autochtones et afro-honduriens à la justice ;

b) À prendre les mesures qui s’imposent pour garantir l’indépendance et la sécurité de la justice de manière à protéger la jouissance des droits de l’homme et à combattre la discrimination raciale ;

c) À dispenser une formation systématique aux fonctionnaires, aux juges, aux magistrats et aux agents des forces de l’ordre afin de garantir l’application effective de la Convention et des lois relatives à la discrimination raciale, et à veiller à ce que, dans l’exercice de leurs fonctions, ces personnes respectent et défendent tous les droits de l’homme, et prennent des mesures propres à faire cesser les actes et les pratiques relevant de la discrimination raciale ;

d) À mener, auprès des titulaires de droits, des campagnes d’information sur les dispositions de la Convention et le système juridique concernant la protection contre la discrimination raciale.

Lutte contre les préjugés raciaux

40.Le Comité réaffirme sa préoccupation quant à la persistance, dans la société, de stéréotypes et de préjugés contre les peuples autochtones et afro-honduriens qui continuent à entraver l’édification d’une société multiculturelle (art. 7).

41. Le Comité exhorte l’État partie à mener des campagnes de sensibilisation et d’éducation de la société en général quant aux effets préjudiciables de la discrimination raciale, afin d’enrayer la propagation de stéréotypes et de préjugés contre les peuples autochtones et afro-honduriens et de promouvoir la tolérance entre les différents groupes ethniques. Il appelle l’attention de l’État partie sur sa r ecommandation générale n o  35 (2013) sur la lutte contre les discours de haine raciale.

D.Autres recommandations

Ratification d’autres instruments

42. Compte tenu du caractère indivisible de tous les droits de l’homme, le Comité encourage l’État partie à ratifier le Protocole facultatif à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant établissant une procédure de présentation de communications, ainsi que la Convention interaméricaine de 2013 contre le racisme, la discrimination raciale et les formes connexes d’intolérance et la Convention interaméricaine de 2013 contre toutes les formes de discrimination et d’intolérance.

Déclaration visée à l’article 14 de la Convention

43. Le Comité encourage l’État partie à faire la déclaration facultative visée à l’article 14 de la Convention, par laquelle les États parties reconnaissent la compétence du Comité pour recevoir et examiner des communications individuelles.

Amendement à l’article 8 de la Convention

44. Le Comité recommande à l’État partie de ratifier l’amendement au paragraphe 6 de l’article 8 de la Convention, adopté le 15 janvier 1992 à la quatorzième Réunion des États parties à la Convention et approuvé par l’Assemblée générale dans sa résolution 47/111.

Suite donnée à la Déclaration et au Programme d’action de Durban

45. À la lumière de sa r ecommandation générale n o  33 (2009) sur le suivi de la Conférence d’examen de Durban, le Comité recommande à l’État partie, lorsqu’il transpose les dispositions de la Convention dans la législation nationale, de tenir compte de la Déclaration et du Programme d’action de Durban, adoptés en septembre 2001 par la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, ainsi que du Document final de la Conférence d’examen de Durban, tenue à Genève en avril 2009. Le Comité demande à l’État partie d’inclure dans son prochain rapport périodique des renseignements précis sur les plans d’action qu’il aura adoptés et les autres mesures qu’il aura prises pour mettre en œuvre la Déclaration et le Programme d’action de Durban au niveau national.

Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine

46. À la lumière de la résolution 68/237 de l’Assemblée générale proclamant la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine pour 2015-2024 et de la résolution 69/16 sur le programme d’activités de la Décennie, le Comité salue l’adoption par le Honduras du Plan d’action et du Programme d’activités relatifs à la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine et invite l’État partie à prendre des mesures concrètes pour en assurer la mise en œuvre effective. Le Comité demande également à l’État partie d’inclure dans son prochain rapport des renseignements précis sur les résultats concrets obtenus à cet égard, compte tenu de sa r ecommandation générale n o  34.

Diffusion d’information

47. Le Comité recommande à l’État partie de mettre ses rapports à la disposition du public dès leur soumission et de diffuser les présentes observations finales dans sa langue officielle et dans les autres langues couramment utilisées dans l’État partie.

Consultations avec la société civile

48. Le Comité recommande à l’État partie de tenir des consultations et d’élargir le dialogue avec les organisations de la société civile qui travaillent dans le domaine de la protection des droits de l’homme, en particulier celles qui luttent contre la discrimination raciale, dans le cadre de l’élaboration du prochain rapport périodique et du suivi des présentes observations finales.

Suite donnée aux présentes observations finales

49. Conformément au paragraphe 1 de l’article 9 de la Convention et à l’article 65 de son règlement intérieur modifié, le Comité demande à l’État partie de fournir, dans un délai d’un an à compter de l’adoption des présentes observations finales, des renseignements sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations formulées aux paragraphes 19, alinéas d) et e) (consultations préalables), 21, alinéa c) (terres, territoires et ressources naturelles) et 25, alinéas a) et b) (défenseurs des droits de l’homme).

Paragraphes d’importance particulière

50. Le Comité souhaite appeler l’attention de l’État partie sur l’importance particulière des recommandations formulées aux paragraphes 17 (discrimination structurelle), 33 (droit à l’éducation), 37 (discrimination multiple) et 39 (accès à la justice), et lui demande de faire figurer dans son prochain rapport périodique des renseignements détaillés sur les mesures concrètes qu’il aura prises pour y donner suite.

Élaboration du prochain rapport périodique

51. Le Comité recommande à l’État partie de soumettre son rapport valant neuvième à onzième rapports périodiques le 9 novembre 2023 au plus tard, en tenant compte des directives pour l’établissement des documents destinés spécifiquement au Comité que celui-ci a adoptées à sa soixante et onzième session (CERD/C/2007/1), et en traitant tous les points soulevés dans les présentes observations finales. À la lumière de la résolution 68/268 de l’Assemblée générale, le Comité demande instamment à l’État partie de respecter la limite de 21 200 mots fixée pour les rapports périodiques.