Nations Unies

CRPD/C/DNK/CO/1

Convention relative aux droits des personnes handicapées

Distr. générale

30 octobre 2014

Français

Original: anglais

Comité des droits des personnes handicapées

Observations finales concernant le rapport initial du Danemark *

I.Introduction

Le Comité a examiné le rapport initial du Danemark (CRPD/C/DNK/1) à ses 155e et 156e séances, tenues respectivement les 23 et 24 septembre 2014, et a adopté les observations finales ci‑après à sa 169e séance, le 2 octobre 2014.

Le Comité accueille avec satisfaction le rapport initial du Danemark, comprenant les informations relatives à la fois au Danemark et aux territoires autonomes du Royaume, à savoir les îles Féroé et le Groenland, qui a été rédigé conformément aux directives du Comité concernant l’établissement des rapports, et il remercie l’État partie de ses réponses écrites (CRPD/C/DNK/Q/1/Add.1) à la liste de points élaborée par le Comité.

Le Comité se félicite du dialogue fructueux qu’il a eu avec la délégation de l’État partie au cours de l’examen du rapport. Il remercie l’État partie d’avoir envoyé une délégation de haut niveau, composée de nombreux représentants des ministères concernés, ainsi que de représentants des ministères des îles Féroé et du Groenland chargés de l’application de la Convention relative aux droits des personnes handicapées.

II.Aspects positifs

Le Comité salue les efforts déployés par l’État partie pour réexaminer et modifier sa législation, en particulier l’adoption de la loi de codification no 1093 du 5 septembre 2013 relative aux services sociaux, de la loi de codification no 727 de 2009 relative aux prestations pour l’emploi des personnes handicapées et de la loi no 31 de 2005 relative à l’interdiction de la discrimination sur le marché du travail, ainsi que la modification, en 2013, de la loi relative aux établissements d’enseignement secondaire du deuxième cycle, ayant pour objet l’intégration des personnes souffrant d’autisme. Le Comité félicite le Gouvernement des îles Féroé pour l’adoption de la loi relative à l’interdiction de la discrimination à l’embauche fondée sur le handicap, qui est entrée en vigueur en mai 2011.

Le Comité félicite également l’État partie pour le lancement de programmes relatifs aux droits des personnes handicapées, comme le plan d’action en faveur des personnes atteintes d’un handicap mental, en mai 2014, et pour l’augmentation des allocations de ressources dans ce domaine.

Le Comité rend hommage à l’État partie pour plusieurs de ses réalisations. Il salue la reconnaissance de la langue des signes danoise comme langue officielle, pas important vers la pleine reconnaissance des droits des personnes handicapées dans l’État partie. Il prend acte aussi de la mise en place par l’État partie d’un organe de coordination, le Comité interministériel, qui est chargé de l’application de la Convention dans les différents domaines sectoriels sous l’autorité du Ministère de l’enfance, de l’égalité des chances, de l’intégration et des affaires sociales. Le Comité félicite également l’État partie pour son rôle exemplaire dans le domaine de l’aide internationale au développement et pour l’intégration dans ses activités de coopération de la perspective du handicap. Le Comité rend hommage au Gouvernement groenlandais pour avoir entrepris de créer un centre national du handicap à Sisimiut, au Groenland.

Le Comité relève avec satisfaction que l’État partie a adhéré au Protocole facultatif se rapportant à la Convention relative aux droits des personnes handicapées, avec exclusion territoriale à l’égard du Groenland, le 23 septembre 2014.

III.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

A.Principes généraux et obligations générales (art. 1er à 4)

Le Comité constate avec préoccupation que le Plan d’action national en faveur des personnes handicapées de 2013 ne couvre pas l’ensemble des droits et des domaines de fond visés par la Convention et qu’il demeure relativement général.

Le Comité recommande à l ’ État partie de réviser le Plan d ’ action national en faveur des personnes handicapées pour faire en sorte qu ’ il couvre l ’ ensemble des droits et des domaines de fond visés par la Convention, et d ’ établir, pour l ’ accompagner, des objectifs concrets, des cibles mesurables, un budget suffisant, ainsi que des indicateurs, afin de pouvoir mesurer les progrès accomplis dans la mise en œuvre de la politiq ue gouvernementale du handicap.

Le Comité est préoccupé par l’absence de plans d’action en faveur des personnes handicapées dans les îles Féroé et au Groenland, et il s’inquiète en particulier de ce que les organisations de personnes handicapées du Groenland ne bénéficient pas d’un appui qui leur permettrait d’œuvrer avec le Gouvernement à la mise en œuvre de la Convention.

Le Comité recommande aux Gouvernements des îles Féroé et du Groenland d ’ adopter des plans d ’ action spécifiques en faveur des personnes handicapées afin de mettre en œuvre efficacement la Convention. Il recommande également au Gouvernement groenlandais d ’ appuyer le travail des organisations de personnes handicapées pour leur permettre de participer effectivement aux consultations sur la Convention et à la mise en œuvre de ses dispositions.

Le Comité est préoccupé par le fait que la Convention n’a pas été expressément incorporée dans les législations du Danemark, des îles Féroé et du Groenland. Il s’inquiète aussi de l’insuffisance des informations disponibles concernant l’application de la Convention par les tribunaux et les autorités de l’État partie. Il constate avec préoccupation que les responsables des administrations publiques de l’État, des régions et des communes n’ont pas suffisamment conscience de l’obligation qui leur incombe de promouvoir la mise en œuvre de la Convention.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ incorporer la Convention dans son droit interne de façon qu ’ elle soit applicable en tant que loi du Danemark, des îles Féroé et du Groenland. Il lui recommande également de prendre des mesures pour faciliter l ’ application directe de la Convention par les tribunaux et les autorités administratives, et de mettre en place des programmes de formation pour faciliter l ’ application dynamique de la Convention par les responsables des administrations publiques de l ’ État, des régions et des communes sur l ’ ensemble du territoire du Royaume du Danemark, notamment par l ’ établissement de directives à l ’ intention des municipalités sur l ’ application des lois respectives relatives aux services sociaux en conformité avec les dispositions de la Convention.

B.Droits spécifiques (art. 5 à 30)

Égalité et non‑discrimination (art. 5)

Le Comité prend acte de la création de l’unité de la lutte contre la discrimination du Gouvernement, qui est chargée de surveiller et de prévenir la discrimination à l’égard des personnes handicapées, mais il observe avec préoccupation que l’État partie ne dispose pas d’une loi générale contre la discrimination qui assurerait une protection contre la discrimination fondée sur le handicap dans d’autres domaines que le marché du travail. Le Comité s’inquiète également de l’absence de voies de recours pour les personnes handicapées victimes de violations des droits garantis par la Convention, ainsi que du manque d’informations à ce sujet.

Le Comité demande instamment aux Gouvernements du Danemark, des îles Féroé et du Groenland d ’ adopter une nouvelle loi générale transsectorielle contre la discrimination qui garantisse une protection dans les domaines autres que le marché du travail et dispose que le refus d ’ aménagement raisonnable constitue une forme de discrimination fondée sur le handicap. Il recommande à l ’ État partie de prendre des mesures pour faire en sorte que des aménagements raisonnables soient apportés dans toutes les sphères de la société, sans dérogation; d ’ offrir aux personnes handicapées des voies de recours utiles, y compris la possibilité d ’ adresser des plaintes pour discrimination fondée sur le handicap au Conseil de l ’ égalité de traitement; et de s ’ attacher à mieux faire connaître la Convention auprès des titulaires de droits.

Le Comité s’inquiète de l’absence de données ventilées sur les cas de discrimination multiple ou croisée et de l’insuffisance des dispositifs prévus pour traiter les cas de discrimination croisée, où il y a par exemple conjugaison du handicap et du genre ou de l’appartenance ethnique. Ces dispositifs doivent être développés.

Le Comité recommande à l ’ État partie de collecter et de diffuser des données ventilées sur les cas de discrimination multiple ou croisée, et d ’ adopter des mesures efficaces et spécifiques pour prévenir les discriminations multiples et croisées. L ’ État partie devrait notamment autoriser le dépôt de plaintes pour plusieurs motifs de discrimination, garantir des niveaux d ’ indemnisation plus élevés aux victimes et imposer des peines plus lourdes aux auteurs.

Femmes handicapées (art. 6)

Le Comité juge préoccupant que la loi relative à l’égalité des sexes ne traite pas expressément la question des femmes et des filles handicapées. Il observe également avec préoccupation que l’État partie n’a pris aucune initiative spécifique en faveur des femmes et des filles handicapées dans le système éducatif, ni aucune mesure spécifique pour faciliter la recherche d’emploi et le maintien dans l’emploi pour les femmes handicapées.

Le Comité recommande à l ’ État partie de faire en sorte que les perspectives du genre et du handicap soient intégrées dans ses lois et politiques et dans les services fournis dans les différents secteurs, ainsi que dans leur mise en œuvre et leur évaluation. Il lui recommande également de prendre des mesures pour développer les possibilités pour les femmes et les filles handicapées de bénéficier comme il se doit de l ’ éducation et de l ’ emploi.

Enfants handicapés (art. 7)

Le Comité relève avec préoccupation que, selon le Conseil national de l’enfance, les enfants hospitalisés en établissement psychiatrique peuvent être soumis à un traitement forcé.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ abolir le recours, pour les enfants, à l ’ hospitalisation forcée et au traitement forcé en hôpital psychiatrique, et d ’offrir aux intéressés suffisamment de possibilités d ’ information et de consultation pour faire en sorte que tous les enfants handicapés bénéficient de l ’ assistance nécessaire pour exprimer leur point de vue.

Sensibilisation (art. 8)

Le Comité est préoccupé par les informations évoquant l’existence dans la population générale de préjugés à l’égard de diverses formes de handicap, ce qui influe négativement sur la capacité des personnes handicapées à exercer leurs droits dans des conditions d’égalité, notamment dans le domaine de l’emploi.

Le Comité encourage l ’ État partie à concevoir et à adopter une stratégie assortie d ’ objectifs concrets et mesurables, en concertation avec les organisations de personnes handicapées, pour sensibiliser au handicap l ’ ensemble de la société −  la population en général, les secteurs public et privé, et les personnes handicapées  − afin de promouvoir une perception positive des personnes handicapées et de mieux faire connaître leurs droits.

Le Comité relève avec préoccupation que l’on dispose de peu d’informations sur le degré de connaissance par les responsables publics et les acteurs privés du contenu de la Convention, notamment des notions d’aménagement raisonnable et de discrimination fondée sur le handicap.

Le Comité recommande à l ’ État partie de mener, en coopération avec les organisations de personnes handicapées, des campagnes et d ’ autres activités de formation à l ’ intention des responsables publics et des acteurs privés pour développer leur connaissance des droits et obligations qui découlent de la Convention, en particulier s ’ agissant de la notion d ’ aménagement raisonnable, et de procéder régulièrement à des évaluations du travail accompli en la matière.

Accessibilité (art. 9)

Le Comité est préoccupé par l’absence de mesures globales visant à garantir l’accès des personnes handicapées, dans des conditions d’égalité avec les autres, au milieu physique, aux transports, à l’information et aux moyens de communication, ainsi qu’aux autres installations et services ouverts ou fournis au public, tant en milieu urbain qu’en milieu rural. Il s’inquiète aussi de l’absence de respect systématique des règlements de construction et de l’accès limité aux transports. Le Comité relève en outre avec préoccupation que l’information publiée sur les sites Web publics n’est pas systématiquement disponible dans des formats accessibles.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ adopter un plan complet visant à garantir à toutes les personnes handicapées l ’ accès aux installations, à l ’ information et aux services, plan qui devrait prévoir des objectifs concrets, un calendrier, des budgets, des sanctions et une procédure d ’ évaluation, comme il est exposé en détail dans l ’ Observation générale n o  2 (2014) du Comité sur l ’ accessibilité. À ce propos, le Comité recommande à l ’ État partie: a)  d ’ organiser une formation continue sur la conception universelle et les normes d ’ accessibilité, y  compris sur les règlements de construction, à l ’ intention des professionnels concernés, et d ’ infliger systématiquement des sanctions à quiconque n ’ appliquerait pas les normes d ’ accessibilité; b) de veiller à ce que les entités privées qui proposent des moyens de transport publics et d ’ autres services respectent les prescriptions en matière d ’ accessibilité; et c) d ’ adopter des règles en matière d ’ accessibilité numérique et d ’ accès aux technologies de l ’ information et aux moyens de communication, et de faire en sorte que les institutions publiques aient conscience de la responsabilité qui leur incombe de présenter l ’ information et de communiquer sur leurs sites Web dans des formats accessibles, conformément aux normes internationales en vigueur.

Le Comité juge préoccupant que les émissions télévisées diffusées sur la chaîne de service public KVF, dans les îles Féroé, ne soient sous-titrées ou traduites en langue des signes que si elles sont considérées comme présentant un intérêt majeur ou une grande importance pour la société.

Le Comité demande au Gouvernement des îles Féroé de garantir l ’ accès des personnes sourdes et des personnes malentendantes à toutes les émissions diffusées sur  KVF.

Situations de risque et situations d’urgence humanitaire (art. 11)

Le Comité juge inquiétant que l’État partie ne renseigne pas sur la participation des personnes handicapées et des organisations qui les représentent à l’élaboration, à la mise en œuvre et à l’évaluation de la Stratégie du Danemark pour l’action humanitaire 2010‑2015, et il s’inquiète de l’absence de dispositifs ou de protocoles d’alerte spécifiques permettant de fournir aux personnes handicapées le soutien et la protection nécessaires dans les situations de risque et les situations d’urgence.

Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre des mesures pour faire en sorte que le dispositif de réduction des risques de catastrophe tienne pleinement compte les personnes handicapées, élaborer des dispositifs ou protocoles d ’ alerte accessibles et les faire appliquer, et organiser des formations à l ’ intention des personnels des opérations de sauvetage et de secours afin qu ’ ils soient en mesure de fournir aux personnes handicapées le soutien et la protection dont elles ont besoin dans les situations de risque et les situations d ’ urgence.

Reconnaissance de la personnalité juridique dans des conditions d’égalité (art. 12)

Le Comité note que la loi relative à l’incapacité juridique et à la tutelle autorise toujours la prise de décisions substitutive, ce qui restreint l’exercice, par les personnes concernées, de droits tels que le droit de vote, l’accès à la justice et le consentement au traitement médical.

Le Comité recommande à l ’ État partie de réexaminer la loi relative à l ’ incapacité juridique et à la tutelle et d ’ intégrer dans sa législation le système de la prise de décisions assistée, qui respecte les droits, la volonté et les préférences de la personne concernée, en pleine conformité avec l ’ article 12 de la Convention, notamment le droit de chacun de donner et de retirer son consentement éclairé à recevoir un traitement médical, d ’ accéder à la justice, de voter, de se marier et de travailler.

Liberté et sécurité de la personne (art. 14)

Le Comité est préoccupé par la distinction que fait l’État partie entre condamnation à une peine et obligation de soins, selon laquelle les personnes considérées comme inaptes à être jugées en raison de leur handicap ne se voient pas imposer de peine, mais sont condamnées à suivre un traitement. L’obligation de soins est une sanction qui relève du contrôle social et il conviendrait d’y substituer des sanctions pénales formelles dans le cas des personnes dont la participation à une infraction a été établie. La procédure appliquée pour déterminer si une personne doit faire l’objet d’une obligation de soins ne comporte pas les garanties dont devrait assortie toute procédure pénale qui peut conduire à infliger une sanction à une personne. Le fait de condamner un individu à suivre un traitement est donc incompatible avec les dispositions de l’article 14.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ adopter une politique en vue d ’ entreprendre un réexamen structurel des procédures appliquées pour sanctionner les personnes handicapées qui commettent des infractions pénales. Il conviendrait que le système respecte les garanties générales établies dans le cadre du système de justice pénale pour toute personne accusée d ’ avoir commis une infraction, notamment le principe de la présomption d ’ innocence, le droit à la d éfense et le droit à un procès  équitable.

Le Comité juge préoccupant que la loi relative à la psychiatrie prévoie qu’une personne présentant des troubles de santé mentale puisse être obligée, contre sa volonté, de se faire hospitaliser ou de subir un traitement dans un établissement médical si elle est considérée comme présentant un danger pour elle-même ou pour autrui, ce qui relève de la privation de liberté ou de sécurité fondée sur le handicap, laquelle est contraire aux dispositions de l’article 14 de la Convention.

Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre toutes les mesures nécessaires, y compris de réviser la loi relative à la psychiatrie, pour veiller à ce que les personnes handicapées jouissent du droit à la liberté et à la sécurité de la personne. Il lui recommande aussi de faire en sorte que nul ne puisse être détenu dans un établissement, quel qu ’ il soit, sur la base d ’ un handicap réel ou supposé.

Droit de ne pas être soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (art. 15)

Le Comité est profondément préoccupé par le nombre de cas où des traitements sont administrés de force à des personnes admises en établissement psychiatrique et par les méthodes employées dans le cadre du traitement obligatoire et coercitif des personnes handicapées en psychiatrie, en particulier le recours aux sangles et ceintures pendant plus de quarante-huit heures, l’utilisation de moyens de contention chimiques ou l’administration non consentie d’électrochocs, qui serait une pratique fréquente.

Le Comité recommande à l ’ État partie de modifier ses lois et règlements de façon à abolir le recours, dans les établissements, à des mesures de contrainte physiques ou chimiques ou d ’ autres mesures médicales à l ’ égard de personnes présentant un handicap psychosocial, sans leur consentement. Il lui recommande en particulier de dispenser aux professionnels et aux personnels de santé des établissements de soins et autres institutions de même nature des formations sur la prévention de la torture et des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, comme le prévoit la Convention.

Droit de ne pas être soumis à l’exploitation, à la violence et à la maltraitance (art. 16)

Le Comité est préoccupé par les informations relatives au degré de maltraitance, d’exploitation et de violence, y compris la violence familiale, auxquelles différentes catégories de personnes handicapées sont exposées, ainsi que par le nombre limité de refuges accessibles aux victimes et par le manque de formation des policiers et des autres interlocuteurs. Le Comité s’inquiète aussi de l’absence de données ventilées sur les signalements de faits de maltraitance, d’exploitation et de violence par des personnes handicapées, et sur la suite qui y a été donnée.

Le Comité recommande aux Gouvernements du Danemark, des îles Féroé et du Groenland de faire en sorte que les violences et sévices à l ’ égard de toutes les personnes handicapées soient dûment signalés et fassent l ’ objet d ’ une enquête; que les dispositifs d ’ aide aux victimes nécessaires soient disponibles, notamment qu ’ il existe des permanences téléphoniques, des refuges, des services et des mécanismes de plainte accessibles; et que la question soit abordée dans le cadre des cours de formation nationaux à l ’ intention des personnes travaillant dans le secteur de la santé et des soins médicaux, dans les écoles, dans les services de police et dans le système judiciaire. Le Comité recommande également aux Gouvernements de collecter des données et d ’ établir des statistiques ventilées sur les signalements de faits de maltraitance, d ’ exploitation et de violence par des personnes handicapées, et sur la suite qui y a été donnée.

Autonomie de vie et inclusion dans la société (art. 19)

Le Comité est préoccupé par le fait que les municipalités construisent de plus en plus, à l’aide de prêts garantis par l’État, de grandes résidences pour personnes handicapées assimilables à des institutions, pouvant accueillir de trente à soixante résidents, voire davantage, souvent situées à la périphérie des villes. Il s’inquiète également des résultats d’enquêtes récentes dont il ressort que les personnes handicapées ont peu de possibilités de choisir librement le lieu où elles vont vivre, et qu’il arrive qu’elles soient relogées de force.

Le Comité recommande à l ’ État partie de mettre fin à la pratique consistant à recourir à des prêts garantis par l ’ État pour construire des résidences pour personnes handicapées assimilables à des institutions; de modifier la législation relative aux services sociaux de telle sorte que les personnes handicapées puissent choisir librement leur lieu de résidence et leur entourage, tout en bénéficiant de l ’ assistance dont elles ont besoin pour vivre de manière autonome; et de prendre des mesures pour fermer les résidences assimilables à des institutions qui existent et pour empêcher le relogement de force de personnes handicapées, afin d ’ év iter qu ’ elles ne soient isolées  socialement.

Liberté d’expression et d’opinion et accès à l’information (art. 21)

Le Comité est préoccupé par l’information selon laquelle certains groupes de personnes sourdes, en particulier les enfants sourds de naissance porteurs d’implants cochléaires, seraient empêchés d’apprendre la langue des signes danoise et de communiquer dans cette langue. Il s’inquiète également de ce que la modification apportée récemment à la loi relative au Conseil de la langue danoise ne promeut pas la langue des signes danoise à travers des activités de recherche ou de formation.

Le Comité recommande à l ’ État partie de reconnaître le droit pour toute personne devenue sourde ou sourde de naissance d ’ avoir la possibilité d ’ apprendre la langue des signes danoise et de communiquer dans cette langue, quels que soient les traitements médicaux qu ’ elle a subis; de prendre des mesures efficaces pour promouvoir la langue des signes danoise en tant que moyen de communiquer, sans devoir obligatoirement recourir à l ’ orthophonie; de mener des travaux de recherche sur la langue des signes danoise, notamment d ’ élaborer un dictionnaire de cette langue; et de promouvoir l ’ utilisation de la langue des signes danoise par les personnes sourdes dans tous les domaines de leur vie afin de leur permettre de participer à l ’ emploi, à l ’ éducation et à la vie culturelle, notamment. Le Comité recommande en outre au Gouvernement des îles Féroé de reconnaître la langue des signes féroïenne en tant que langue officielle.

Le Comité a conscience que le braille constitue pour les personnes aveugles un outil de communication important dans l’éducation et l’emploi. Il observe toutefois avec préoccupation que l’enseignement en braille n’est pas systématiquement offert à tous les élèves aveugles, du fait qu’ils sont peu nombreux et dispersés sur le territoire. Le Comité juge préoccupant également que la structure et la responsabilité décentralisées des municipalités font qu’il peut être difficile de préserver un tel outil spécialisé, et que l’État perçoive, dans l’éducation avec support spécialisé, un risque de dilution des connaissances, comme il est ressorti du dialogue avec la délégation.

Le Comité recommande à l ’ État partie de créer un conseil chargé de promouvoir, préserver et renforcer la connaissance et l ’ utilisation du braille en tant qu ’ outil de communication pour les personnes aveugles, y  compris dans le cadre de  l ’ éducation.

Le Comité constate avec préoccupation que l’État partie ne garantit pas de manière effective la fourniture d’informations aux personnes présentant un handicap intellectuel ou mental selon des modes de communication alternative et améliorée et dans des formats qui soient accessibles.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ accorder une égale importance à l ’ élaboration et à la promotion de modes de communication améliorée et alternative qui soient accessibles aux personnes présentant un handicap intellectuel ou mental. L ’ État partie devrait prendre les mesures voulues pour faire en sorte que tous les acteurs aient connaissance des normes établies relatives à l ’ utilisation des modes de communication améliorée et alternative, et mettre en place des procédures de surveillance efficaces qui empêchent tout usage abusif de l ’ information et de la communication au nom d ’ autrui, en particulier dans le cadre des mécanismes de prise de décisions concernant les personnes atteintes d ’ un handicap intellectuel ou mental.

Respect de la vie privée (art. 22)

Le Comité juge préoccupant que les hôpitaux psychiatriques soient autorisés, en vertu de la loi relative à la psychiatrie, à communiquer à des tiers des informations strictement privées et confidentielles sans le consentement de la personne concernée.

Le Comité recommande à l ’ État partie de modifier la loi relative à la psychiatrie de telle sorte qu ’ elle interdise de communiquer à des tiers les données privées et confidentielles des patients hospitalisés en établissement psychiatrique, sans le consentement de l ’ intéressé, afin de se conformer a u principe du respect de la vie privée.

Éducation (art. 24)

Tout en prenant acte d’une réforme du Gouvernement visant à promouvoir l’intégration des enfants handicapés dans le système éducatif général, le Comité est préoccupé par le fait qu’il est difficile de déterminer exactement dans quelle mesure les élèves handicapés peuvent bénéficier du soutien et des aménagements nécessaires pour faciliter leur éducation, ainsi que par les écarts dans les taux de réussite des élèves selon qu’ils sont handicapés ou qu’ils ne le sont pas, à l’école élémentaire, dans le cycle secondaire et dans l’enseignement supérieur.

Le Comité recommande à l ’ État partie de modifier sa législation de façon à assurer l ’ intégration de tous les enfants handicapés dans le système d ’ éducation ordinaire, en prévoyant à leur intention le soutien et les aménagements voulus, en particulier par la fourniture d ’ une formation appropriée aux enseignants et aux autres personnels scolaires de l ’ ensemble du territoire du Royaume du Danemark, afin de garantir aux élèves handicapés une éducation de qualité. L ’ État partie devrait prendre des mesures pour combler les écarts entre les taux de réussite des élèves handicapés et ceux des élèves non handicapés, à tous les niveaux de l ’ enseignement.

Le Comité est préoccupé par les informations selon lesquelles les enfants ayant besoin de plus de neuf heures d’enseignement spécialisé par semaine peuvent adresser des plaintes au Conseil chargé des écoles spécialisées, tandis que les enfants ayant besoin de moins de neuf heures d’enseignement spécialisé par semaine ne peuvent se plaindre auprès d’une autorité indépendante de l’absence d’un accompagnement pédagogique suffisant.

Le Comité recommande à l ’ État partie de modifier sa législation pour faire en sorte que tous les enfants handicapés puissent adresser des plaintes à une autorité indépendante s ’ ils estiment qu ’ ils ne bénéficient pas d ’ un accompagnement pédagogique suffisant.

Santé (art. 25)

Le Comité s’inquiète des informations selon lesquelles les personnes présentant un handicap psychosocial ont une espérance de vie de quinze à vingt ans plus courte que les autres personnes.

Le Comité recommande à l ’ État partie de faire en sorte que les personnes handicapées, en particulier celles qui sont atteintes d ’ un handicap psychosocial, aient accès dans des conditions d ’ égalité au meilleur état de santé possible, notamment en assurant la prestation des services de santé appropriés et accessibles dont les personnes handicapées ont besoin et en dispensant une formation aux professionnels de santé et aux responsables des autorités sanitaires publiques, notamment sur le droit au consentement libre et éclairé.

Travail et emploi (art. 27)

Le Comité note avec préoccupation que, si la loi relative à l’interdiction de la discrimination sur le marché du travail interdit bien l’inégalité de traitement directe et indirecte pour des motifs liés au handicap, ni la législation générale du travail ni les conventions collectives n’énoncent clairement l’obligation pour l’employeur de procéder à des aménagements raisonnables sur le lieu de travail, ce qui peut expliquer en partie les disparités observées en matière d’emploi entre les personnes handicapées (taux d’activité de 44 %) et les personnes non handicapées (taux d’activité de 78 %).

Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour relever considérablement, dès que possible, la proportion de personnes handicapées sur le marché du travail ordinaire, notamment de modifier la législation générale du travail de façon qu ’ elle impose clairement aux employeurs l ’ obligation de procéder aux aménagements raisonnables requis pour les employés handicapés.

Participation à la vie politique et à la vie publique (art. 29)

Le Comité relève avec inquiétude que, selon la Constitution, la loi relative aux élections législatives et d’autres lois électorales, et la loi relative à la tutelle (art. 6), les personnes sous tutelle ne sont pas autorisées à voter ni à se présenter aux scrutins législatifs, municipaux et régionaux et aux élections au Parlement européen, ni à participer aux référendums. Il note aussi avec préoccupation que, d’après certaines informations, les matériels électoraux sont rarement accessibles aux aveugles ou aux personnes présentant des troubles de l’apprentissage ou un handicap intellectuel, que, souvent, les bureaux de vote ne sont pas physiquement accessibles, que les bulletins de vote ne sont pas toujours accessibles aux aveugles et que les personnes sous tutelle n’ont pas nécessairement la possibilité de choisir librement le type d’assistance au vote qu’elles souhaiteraient utiliser.

Le Comité recommande à l ’ État partie de modifier les lois pertinentes, notamment la loi relative aux élections législatives et les lois régissant les scrutins municipaux et régionaux et les élections au Parlement européen, de façon que toutes les personnes handicapées puissent exercer leur droit de voter et de se présenter aux élections, même si elles sont soumises à la tutelle ou à tout autre régime. Il recommande également à l ’ État partie de garantir, par des mesures législatives et autres, l ’ accessibilité des bulletins de vote et des matériels électoraux, et celle des bureaux de vote, et de veiller à offrir aux personnes qui en ont besoin l ’ assistance appropriée nécessaire qu ’ elles auront librement choisie, afin de faciliter l ’ exercice du droit de vote par tous.

Participation à la vie culturelle et récréative, aux loisirs et aux sports (art. 30)

Le Comité note avec préoccupation que l’État partie n’a pas ratifié le Traité de Marrakech visant à faciliter l’accès des aveugles, des déficients visuels et des personnes ayant d’autres difficultés de lecture des textes imprimés aux œuvres publiées, qui permet à ces différentes catégories de personnes d’accéder aux œuvres publiées.

Le Comité encourage l ’ État partie à prendre toutes les mesures appropriées pour ratifier et appliquer dès que possible le Traité de Marrakech.

C.Obligations spécifiques (art. 31 à 33)

Statistiques et collecte des données (art. 31)

Tout en prenant acte des efforts entrepris pour recueillir des données statistiques sur les personnes handicapées au Danemark, notamment l’utilisation d’un dispositif informatique de collecte de données sur l’assistance et les prestations fournies aux personnes handicapées au Groenland, et la collecte de données générales dans les îles Féroé, le Comité regrette le manque de données ventilées sur les personnes handicapées.

Le Comité recommande à l ’ État partie de systématiser la collecte, l ’ analyse et la diffusion des données ventilées par sexe, âge, handicap et région; d ’ accentuer les efforts de renforcement des capacités en la matière; et d ’ élaborer des indicateurs modulés en fonction du genre et de l ’ âge, en tenant dûment compte de la nécessité d ’ abandonner l ’ approche médicale du handicap au profit d ’ une approche fondée sur les droits de l ’ homme.

Application et suivi au niveau national (art. 33)

Le Comité prend acte des activités du Comité interministériel de l’État partie, mais il observe avec préoccupation que cet organe ne sollicite qu’occasionnellement la contribution des organisations qui représentent les personnes handicapées au Danemark et qu’il y a absence de concertation avec les organisations de ce type existant dans les îles Féroé et au Groenland. Le Comité est également préoccupé par l’absence d’un dispositif de coordination et d’un mécanisme de surveillance indépendant dans les îles Féroé.

Le Comité recommande à l ’ État partie de permettre aux acteurs de la société civile, notamment aux organisations qui représentent les personnes handicapées, de participer pleinement et de façon régulière à la surveillance de l ’ application de la Convention. L ’ État partie devrait aussi prendre les mesures nécessaires en vue d ’ établir ou de désigner un mécanisme de coordination, ainsi qu ’ un mécanisme de surveillance indépendant, dans les îles Féroé. Le Comité recommande également au Gouvernement des îles Féroé de créer une institution pour la promotion et la protection des droits de l ’ homme conforme aux Principes de Paris.

Suivi et diffusion

Le Comité demande à l’État partie de soumettre, dans un délai de douze mois et conformément au paragraphe 2 de l’article 35 de la Convention, des informations sur les mesures prises pour donner suite à la recommandation figurant au paragraphe 21 des présentes observations finales, qui concerne le recours, pour les enfants, à l’hospitalisation forcée et au traitement forcé en établissement psychiatrique.

Le Comité demande à l’État partie de mettre en œuvre les recommandations contenues dans les présentes observations finales. Il lui recommande de transmettre ces observations finales, pour examen et suite à donner, aux membres des Gouvernements et des Parlements, aux responsables des différents ministères, aux autorités locales et aux membres des professions concernées, tels que les professionnels de l’éducation, de la santé et de la justice, ainsi qu’aux médias, en utilisant pour ce faire les stratégies de communication sociale modernes.

Le Comité encourage vivement l’État partie à associer les organisations de la société civile, en particulier les organisations de personnes handicapées, à l’élaboration de ses rapports périodiques.

Le Comité prie l’État partie de diffuser largement les présentes observations finales sous des formes accessibles, notamment auprès des organisations non gouvernementales et des organisations qui représentent les personnes handicapées, ainsi qu’auprès de ces personnes et de leurs proches, dans les langues nationales et minoritaires, notamment la langue des signes. Il lui demande aussi de les diffuser sur les sites Web des Gouvernements consacrés aux droits de l’homme.

Prochain rapport

Le Comité demande à l’État partie de soumettre ses deuxième et troisième rapports périodiques en un seul document au plus tard le 24 août 2019, et d’y faire figurer des renseignements sur la mise en œuvre des présentes observations finales. Il invite l’État partie à étudier la possibilité de soumettre ces deux rapports selon la procédure simplifiée. Dans le cadre de cette procédure, le Comité établit une liste de points à traiter, au moins un an avant la date prévue pour la soumission du ou des rapports attendus. Les réponses de l’État partie à cette liste constituent son rapport.