Nations Unies

CCPR/C/JAM/Q/3

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

3 décembre 2010

Français

Original: anglais

Comité des droits de l’homme

Centième session

Genève, 11-29 octobre 2010

Liste des points à traiter à l’occasion de l’examendu troisième rapport périodique de la Jamaïque (CCPR/C/JAM/3)

Cadre constitutionnel et juridique de l’application du Pacte (art. 2)

1.Quelle est la place du Pacte dans le droit interne? Les dispositions du Pacte peuvent-elles être directement invoquées devant les juridictions nationales? Dans l’affirmative, donner des informations détaillées sur toutes les affaires dans lesquelles elles l’ont été en précisant les résultats. Indiquer si la Charte des libertés et des droits fondamentaux, destinée à remplacer le chapitre III de la Constitution, a été promulguée et incorporée dans la Constitution. Expliquer quels sont les droits consacrés par le Pacte qui sont garantis dans la Charte. Donner de plus amples renseignements sur les exceptions au principe de la non-discrimination et sur l’application de ces exceptions.

2.Donner des renseignements sur les recours ouverts aux individus qui se disent victimes d’une violation des droits consacrés dans la Constitution et dans le Pacte. Donner de plus amples renseignements sur les obstacles qui peuvent rendre inopérants les recours existants et sur les mesures prises pour y remédier. Le Comité rappelle que le 23 octobre 1997 le Gouvernement jamaïcain a notifié au Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies sa dénonciation du Protocole facultatif se rapportant au Pacte. La Jamaïque a-t-elle l’intention d’adhérer de nouveau au Protocole facultatif?

3.Donner des renseignements sur les institutions nationales, autres que les tribunaux, chargées de surveiller le respect des droits de l’homme dans l’État partie ainsi que sur leur mandat. Ces institutions ont-elles été établies selon les Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris)? S’il n’existe pas de mécanisme de ce type, est-il prévu d’en créer un?

Non-discrimination, égalité des hommes et des femmes(art. 2 (par. 1), 3 et 26)

4.Indiquer les mesures d’ordre législatif et administratif ainsi que les décisions judiciaires récentes, s’il en existe, qui portent sur la protection contre la discrimination dans tous les domaines, qu’elle soit fondée sur la race, la couleur, le sexe, la langue, la religion, les opinions politiques ou autres, l’origine nationale ou sociale, la fortune, la naissance ou toute autre situation.

5.Donner des renseignements sur l’application de la politique nationale d’égalité des sexes et sur l’effet qu’elle a eu pour ce qui est d’améliorer la condition de la femme. Apporter des informations sur: a) la place de la femme dans la vie politique, économique et sociale du pays; b) le taux d’emploi des femmes et la proportion de femmes qui occupent des postes à responsabilité dans le secteur privé comme dans le secteur public; c) la question de savoir si les hommes et les femmes perçoivent un salaire égal à travail égal; d) le taux d’alphabétisation et de scolarisation des femmes par rapport aux hommes. Indiquer toutes les mesures d’ordre législatif et autre qui ont été prises pour faire disparaître les attitudes patriarcales persistantes et les stéréotypes profondément ancrés dans la société et ceux qui sont véhiculés dans les manuels scolaires, et les mesures visant à faire cesser les pratiques discriminatoires qui portent atteinte à l’égalité des hommes et des femmes dans l’exercice des droits, dans le secteur public et dans le secteur privé.

6.D’après les renseignements dont le Comité dispose, les homosexuels sont l’objet d’une discrimination et de mauvais traitements dans l’État partie. Indiquer si l’État partie a l’intention de revoir la définition de la discrimination qui figure dans la Charte des libertés et des droits fondamentaux de façon à interdire que l’identité de genre et l’orientation sexuelle soient des motifs de discrimination. En outre, la loi relative aux atteintes à la personne érige en infraction pénale les relations sexuelles consenties entre personnes du même sexe et ces actes sont passibles d’un emprisonnement pouvant aller jusqu’à dix ans. Indiquer le nombre de cas, s’il y en a eu, dans lesquels cette disposition a été appliquée et si des initiatives ont été prises en vue de dépénaliser les relations homosexuelles.

État d’urgence (art. 4)

7.D’après les informations dont le Comité dispose, le 23 mai 2010, le Gouverneur général de la Jamaïque a proclamé l’état d’urgence à la suite des troubles civils survenus lorsque le Premier Ministre a annoncé l’intention du Gouvernement d’autoriser l’extradition vers les États-Unis de Michael Christopher Cooke (Dudus). Commenter les informations indiquant que pendant l’état d’urgence au moins 73 personnes ont été tuées par les agents de l’État et 4 000 ont été placées en détention. Décrire les mesures qui ont pu être prises pour enquêter sur la cause de ces morts et poursuivre les auteurs présumés. Indiquer dans quelle mesure l’exercice de droits garantis par le Pacte a pu être suspendu licitement pendant l’état d’urgence et expliquer comment cela était compatible avec les dispositions du Pacte.

Droit à la vie (art. 6)

8.D’après les renseignements dont le Comité dispose, en 2009 il y a eu au total 253 personnes tuées par des policiers. Commenter cette allégation.

9.Expliquer les mesures qui ont pu être prises pour que la nouvelle Commission d’enquête indépendante créée pour remplacer le Bureau des enquêtes spéciales (BSI) et l’Autorité d’examen des plaintes visant la police (PPCA), qui avaient pour mandat d’enquêter sur les cas de violence et d’homicide imputables à la police, soit indépendante et dotée de ressources suffisantes pour s’acquitter de son mandat. Fournir des données montrant le nombre de policiers qui ont: a) fait l’objet d’une enquête pour exécutions extrajudiciaires, en précisant le nombre des enquêtes menées et achevées; b) été traduits en justice; c) été acquittés; d) été condamnés; e) été sanctionnés, en précisant la nature des sanctions.

10.D’après les renseignements dont le Comité dispose, des bandes criminelles (gangs) puissamment armés qui se livrent au trafic de stupéfiants et d’armes sont également responsables d’une grande partie de la violence qui fait des morts dans les «quartiers pauvres» et dans les communautés dites «garnisons». Donner des renseignements sur les mesures prises pour s’attaquer à la violence entre gangs, qui fait des morts. Exposer les mesures qui ont été prises, le cas échéant, pour a) démanteler ces gangs, b) les désarmer et c) traduire en justice et punir tous les responsables.

11.Donner des renseignements sur les mesures qui ont été prises, le cas échéant, pour protéger les droits des défenseurs des droits de l’homme contre la violence et les actes meurtriers. Expliquer aussi ce qui a été fait, éventuellement, pour enquêter sur les personnes qui ont tué deux militants des droits de l’homme, Brian Williamson et Lenford «Steve» Harvey, et pour les traduire en justice.

12.Indiquer si, à la suite du moratoire de fait sur les exécutions capitales, l’État partie a l’intention de ratifier le deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte et de modifier la Constitution, en vue d’abolir la peine capitale. Préciser tous les crimes qui emportent la peine de mort.

13.D’après les renseignements dont le Comité dispose, il y a un taux élevé de grossesses d’adolescentes, dont un grand nombre aboutit à un avortement pratiqué dans des conditions dangereuses. De plus, le Comité note que l’avortement est une des principales causes de mortalité maternelle. Expliquer les mesures qui ont pu être prises pour promouvoir l’accès aux services de planification familiale et aux contraceptifs et la fourniture de ces prestations. Donner également des renseignements sur les services disponibles pour les femmes qui souhaitent avorter.

Interdiction de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (art. 7)

14.D’après les renseignements dont le Comité dispose, l’usage des châtiments corporels est légal à l’école et au foyer, et il figure toujours dans les lois de l’État partie. Expliquer les mesures qui ont été prises pour supprimer toutes les formes de châtiments corporels dans tous les contextes. Expliquer ce qui a été fait pour que soit voté le projet de loi visant à abroger la loi de 1903 portant réglementation de la flagellation et de la loi de 1942 sur la lutte contre la criminalité.

15.Donner des informations sur: a) le nombre de plaintes relatives à des cas de torture et de mauvais traitements imputés à des membres de la force publique et des agents pénitentiaires reçues par le parquet et sur les enquêtes menées; b) les chefs d’accusation retenus contre les agents de la force publique; c) le nombre d’affaires rejetées et les motifs du non-lieu; d) le nombre d’agents qui ont fait l’objet de mesures disciplinaires et les sanctions prononcées; e) les mesures concrètes prises pour la réadaptation et l’indemnisation des victimes de torture.

16.D’après les renseignements dont le Comité dispose, la violence sexuelle contre les femmes et les filles est très répandue dans l’État partie, au point que pendant la seule année 2009, la Police nationale a signalé 610 cas de viol et 511 cas d’atteintes sexuelles. En outre, des travaux de recherche indiquent que, durant l’année 2009, sur les 750 filles âgées de 15 à 17 ans qui ont été étudiées, 49 % avaient subi des contraintes ou des violences sexuelles. Il est également signalé que les femmes et les filles qui vivent dans les quartiers pauvres sont particulièrement exposées à la violence des gangs, par représailles, parce qu’elles sont soupçonnées d’avoir dénoncé les activités criminelles de leurs membres. Donner des informations sur les mesures concrètes qui ont été prises, le cas échéant, pour: a) encourager le signalement des cas de violence sexuelle à la police; b) combattre toutes les formes de violence visant les femmes et les filles; c) enquêter sur les cas de violence sexuelle, notamment de viol, poursuivre les auteurs et prononcer des peines appropriées.

17.Donner des informations sur l’ampleur du problème de la violence au foyer. Quel est le cadre juridique national applicable pour combattre la violence dans la famille et en particulier quelles sont les mesures visant à garantir que les actes de violence au foyer fassent véritablement l’objet d’enquêtes et que leurs auteurs soient poursuivis et sanctionnés? Donner également des informations sur toutes autres mesures qui peuvent avoir été prises pour lutter contre la violence au foyer, telles que la formation des juges, procureurs, fonctionnaires de police et personnels de santé ou l’organisation de campagnes d’information à l’intention des femmes sur les droits qui sont les leurs et les voies de recours dont elles disposent. Donner en outre des informations sur: a) le nombre de plaintes reçues; b) les enquêtes menées; c) les peines prononcées; d) l’indemnisation des victimes; e) le nombre de refuges sûrs et toutes autres ressources prévues pour venir en aide aux victimes de la violence au foyer.

18.Donner des informations sur le cadre juridique qui régit la protection des personnes contre l’extradition ou le retour forcé dans des pays où elles risquent d’être soumises à la torture ou à des peines ou traitements inhumains ou dégradants, ou faire l’objet de graves violations des droits de l’homme.

Élimination de l’esclavage et de la servitude (art. 8)

19.Donner des renseignements sur: a) le cadre juridique en place pour lutter contre la traite des êtres humains, en particulier des femmes et des enfants; b) l’ampleur du phénomène, en fournissant des données statistiques ventilées par sexe, âge et pays d’origine; c) le nombre de poursuites engagées contre les personnes impliquées dans la traite, et de condamnations et de peines prononcées; d) tout programme de formation organisé à l’intention des professionnels qui participent à la mise en œuvre des mesures adoptées par l’État partie pour lutter contre la traite, notamment les membres de la police, de l’appareil judiciaire, des organes de poursuite et des services sociaux; e) la façon dont les droits fondamentaux des victimes de la traite sont protégés.

Droit à la liberté et à la sécurité de la personne et traitementdes personnes privées de liberté (art. 9 et 10)

20.Expliquer les motifs pour lesquels une personne peut être privée de liberté et décrire les mécanismes de réparation qui existent en cas d’arrestation ou de détention illégales. Commenter les informations selon lesquelles, pendant l’état d’urgence déclaré le 23 mai 2010, la police a procédé à l’arrestation et à la détention d’environ 4 000 personnes. Fournir des données statistiques détaillées sur les motifs des arrestations. Expliquer en quoi elles étaient nécessaires aux fins du régime d’état d’urgence.

21.Donner des renseignements sur les conditions fixées par la loi pour placer un individu en garde à vue et en détention avant jugement, en précisant notamment la durée maximale de la garde à vue et de la détention avant jugement. Expliquer quels sont les droits des personnes en garde à vue, notamment en ce qui concerne l’accès à un avocat, et préciser quel est le délai maximal de déferrement devant un juge. En outre, commenter les informations portées à la connaissance du Comité selon lesquelles le Gouvernement a proposé de porter à soixante jours la durée de la détention sans libération sous caution.

22.Donner des renseignements sur les dispositions législatives et réglementaires qui régissent le traitement des personnes privées de liberté et sur les mesures concrètes prises pour surveiller leur application dans les faits. Expliquer aussi quelles sont les procédures pour porter plainte en cas de mauvais traitements de la part du personnel pénitentiaire ou d’autres autorités dans les lieux de détention, notamment dans les établissements psychiatriques, et de faire en sorte que ces plaintes fassent l’objet d’une enquête diligente, que les responsables soient traduits en justice et que les victimes reçoivent réparation et indemnisation.

23.Selon les renseignements dont le Comité dispose, les cellules de garde à vue de Spanish Town, qui mesurent 10 pieds sur 10 (3 m sur 3) ont été conçues pour 50 détenus mais aujourd’hui en moyenne 138 détenus y sont placés. Préciser les mesures qui ont été prises, le cas échéant, pour s’attaquer au problème de l’aggravation des conditions carcérales, la surpopulation, les tentatives de suicide et les sévices dans les lieux de détention et dans les prisons, en particulier dans les cellules de garde à vue des postes de police à Spanish Town et à Hunts Bay, où les détenus sont entassés dans des cellules sombres, sans aération, humides et sales.

24.D’après les informations dont le Comité dispose, dans les centres de détention et les prisons, les mineurs ne sont pas séparés des adultes ni les prévenus des condamnés. Les mineurs sont souvent victimes de sévices, de violence et de viol. Expliquer les mesures qui ont été prises, le cas échéant, pour garantir que les suspects en détention provisoire et les condamnés soient séparés, de même que les mineurs et les adultes, dans les centres de détention et dans les prisons. Fournir un complément d’information sur les initiatives prises pour que des mesures de substitution à la privation de liberté soient appliquées dans le cas des mineurs délinquants, telles que la déjudiciarisation, la mise à l’épreuve, l’orientation et les conseils, les travaux d’intérêt général et le sursis.

25.D’après les informations dont le Comité dispose, le 22 mai 2009, sept filles détenues dans l’établissement pénitentiaire pour mineurs d’Armadale sont mortes dans un incendie. Selon le rapport de la commission d’enquête, l’incendie a éclaté lorsque la police a lancé sans précaution une capsule de gaz lacrymogène dans le dortoir fermé à clef, les filles ayant tenté de s’échapper. Expliquer ce qui a été fait pour que les policiers responsables de la mort des sept filles et des blessures subies par d’autres pendant l’incendie répondent de leurs actes. L’État a-t-il indemnisé les familles des victimes? Expliquer en outre les mesures qui ont été prises, le cas échéant, pour donner suite aux recommandations formulées dans le rapport Keating sur la réforme des foyers et lieux de refuge pour enfants.

Accès à la justice (art. 14)

26.D’après les informations dont le Comité dispose, l’appareil judiciaire est surchargé, avec un arriéré de plus de 400 000 affaires à juger, ce qui entraîne des retards excessifs dans l’administration de la justice. Expliquer les mesures qui ont été prises pour appliquer les recommandations du rapport sur la réforme de la justice jamaïcaine, visant à éliminer un certain nombre de facteurs négatifs qui pèsent sur le fonctionnement du système judiciaire dans l’État partie. Exposer aussi ce qui a été fait, le cas échéant, pour améliorer le système de l’aide juridictionnelle, qui souffre du manque d’avocats disponibles pour être commis d’office.

Liberté d’opinion et d’expression, et incitation à la violence(art. 19 et 20 (par. 2))

27.Donner des renseignements détaillés sur: a) la façon dont la liberté d’opinion et d’expression est garantie en droit et dans la pratique, notamment sur tous les aspects de la diffusion de l’information sous quelque forme que ce soit; b) l’existence de médias non contrôlés par l’État; c) le régime juridique applicable à la censure de la musique. Indiquer aussi les mesures qui ont été prises, le cas échéant, en ce qui concerne l’expression par des «célébrités» et des artistes de manifestations d’appui de la violence, qui inciteraient à la violence contre les gays et les lesbiennes.

Droits des personnes appartenant à des minorités (art. 27)

28.En ce qui concerne les Marrons, donner des renseignements sur les mesures qui sont prises, le cas échéant, pour améliorer leur accès à l’éducation, à l’emploi et leur participation politique dans tous les organes de décision, en particulier ceux dont les décisions ont une influence directe sur l’amélioration de leurs conditions de vie, et expliquer, de façon plus générale, comment les droits garantis par l’article 27 sont protégés.

Diffusion d’une information sur le Pacte et le Protocole facultatif (art. 2)

29.Donner des renseignements sur les mesures prises pour diffuser une information sur le Pacte, sur la soumission du troisième rapport périodique de l’État partie et son examen à venir par le Comité. Donner également des renseignements sur la participation à l’élaboration du rapport de représentants de groupes ethniques et minoritaires, de la société civile, d’organisations non gouvernementales et de l’institution nationale des droits de l’homme.