Nations Unies

CRC/C/DEU/CO/3-4

Convention relative aux droits de l ’ enfant

Distr. générale

25 février 2014

Français

Original: anglais

Comité des droits de l ’ enfant

Observations finales concernant les troisième etquatrième rapports périodiques de l’Allemagne,soumis en un seul document *

Le Comité a examiné les troisième et quatrième rapports périodiques de l’Allemagne, soumis en un seul document (CRC/C/DEU/3-4), à ses 1866e et 1867e séances (voir CRC/C/SR.1866 et 1867), tenues le 27 janvier 2014, et a adopté à sa 1875e séance, le 31 janvier 2014, les observations finales ci‑après.

I.Introduction

Le Comité accueille avec satisfaction les troisième et quatrième rapports périodiques de l’État partie, réunis en un seul document (CRC/C/DEU/3-4) ainsi que ses réponses écrites à la liste de points à traiter (CRC/C/DEU/Q/3-4/Add.1), qui lui ont permis de mieux comprendre la situation des droits de l’enfant dans l’État partie. Le Comité se félicite du dialogue constructif qu’il a eu avec la délégation multisectorielle de haut niveau de l’État partie.

II.Mesures de suivi adoptées et progrès réalisés par l’État partie

Le Comité salue l’adoption des mesures législatives suivantes:

a)La loi du 4 juillet 2013 visant à renforcer les droits des pères biologiques, sans lien juridique avec l’enfant;

b)La loi du 16 avril 2013 visant à réformer les droits de garde des parents non mariés;

c)La loi du 29 juin 2011 portant modification de la loi sur la tutelle et la garde;

d)La loi fédérale du 22 décembre 2011 relative à la protection de l’enfant;

e)La loi du 16 décembre 2008 relative à la promotion des droits de l’enfant;

f)La loi du 12 juillet 2008 visant à favoriser l’intervention du juge aux affaires familiales lorsque l’intérêt supérieur de l’enfant est menacé;

g)La loi fédérale du 1er janvier 2007 relative aux allocations familiales et au congé parental;

h)La loi du 1er octobre 2005 relative au renforcement de la protection sociale des enfants et des jeunes.

Le Comité note aussi avec satisfaction que l’État partie a ratifié:

a)Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant établissant une procédure de présentation de communications, en février 2013;

b)Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, en juillet 2009;

c)La Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, en septembre 2009;

d)La Convention relative aux droits des personnes handicapées, en février 2009;

e)La Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains, en décembre 2012.

Le Comité accueille en outre avec satisfaction les mesures institutionnelles et politiques suivantes:

a)Le lancement, en 2012, de l’Initiative fédérale pour l’intervention précoce;

b)L’élaboration, en 2008, de la Stratégie du Gouvernement fédéral visant à promouvoir la santé de l’enfant;

c)Le Plan national d’action 2005‑2010 intitulé «Für ein kindergerechtes Deutschland» (Pour une Allemagne adaptée aux enfants).

Le Comité se félicite que l’État partie ait levé les réserves qu’il avait émises au sujet des alinéas ii) et v) du paragraphe 2 b) de l’article 40 de la Convention.

III.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

A.Mesures d’application générales (art. 4, 42 et 44, par. 6,de la Convention)

Recommandations antérieures du Comité

Le Comité salue les efforts déployés par l’État partie pour mettre en œuvre les observations finales du Comité concernant le deuxième rapport périodique de l’État partie (CRC/C/15/Add.226), mais regrette toutefois que certaines de ses recommandations n’aient pas été suffisamment prises en compte.

Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour donner suite aux recommandations contenues dans les observations finales concernant le deuxième rapport périodique qui n ’ ont pas été mises en œuvre dans toute la mesure voulue, en particulier celles qui se rapportent à la coordination, à la création d ’ un mécanisme de surveillance indépendant, aux enfants demandeurs d ’ asile et aux enfants migrants.

Statut juridique de la Convention

Le Comité note avec satisfaction que la plupart des Länder ont reconnu expressément les droits de l’enfant dans leurs constitutions. Il demeure toutefois préoccupé par le fait que les droits de l’enfant n’ont pas encore été expressément reconnus dans les constitutions de Hambourg et de Hesse ni dans la Constitution fédérale (Loi fondamentale). Le Comité note en outre que le paragraphe 2 de l’article 59 de la Loi fondamentale confère à la Convention le rang de loi fédérale ordinaire.

Compte tenu de ses précédentes recommandations ( CRC/C/15/Add.226, par .  10), le Comité engage l ’ État partie à prendre toutes les mesures nécessaires pour que la Convention ait la primauté sur les lois fédérales, en l ’ incorporant dans la Loi fondamentale ou selon toute autre procédure.

Politique et stratégie globales

Le Comité note que le Plan national d’action pour 2005-2010 a suscité un large débat sur la question des droits de l’enfant. Il regrette toutefois que les organisations de la société civile et d’autres acteurs à l’échelon local ne participent pas suffisamment à son application pratique. Il prend acte de la nouvelle politique nationale de la jeunesse qui met l’accent sur les adolescents et les jeunes adultes, mais demeure préoccupé par le fait qu’elle ne semble pas couvrir tous les aspects des droits de l’enfant.

Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre des mesures pour définir une politique globale concernant les droits de l ’ enfant, d ’ allouer aux organes compétents les ressources humaines, techniques et financières nécessaires à l ’ élaboration de programmes et de projets , et d ’ établir des systèmes permettant de les suivre et de les évaluer en déterminant clairement les rôles et les responsabilités de ces organes aux niveaux tant fédéral que des Länder.

Coordination

Le Comité note avec préoccupation que l’absence d’organisme central chargé de coordonner la mise en œuvre de la Convention dans l’État partie aux plans fédéral, des Länder et des municipalités entrave la mise en place d’une politique globale et cohérente en faveur des droits de l’enfant.

Compte tenu de son Observation générale n o  5 (2003) concernant les mesures d ’ application générales de la Convention, le Comité rappelle sa recommandation précédente (CRC/C/15/Add.226, par. 12) et engage l ’ État partie à mettre en place ou à désigner un organe national permanent et efficace, en veillant à ce qu ’ il soit pleinement compétent et qu ’ il dispose des ressources humaines, financières et techniques nécessaires pour assumer efficacement ses fonctions de coordination de la mise en œuvre de la Convention, en s ’ attachant notamment à des questions d ’ intérêt commun intéressant les différents organes ministériels au niveau fédéral, entre la fédération et les Länder et entre Länder.

Collecte de données

Le Comité note l’importance que l’État partie attache à la mise en place d’un système de collecte de données global. Il constate toutefois avec préoccupation que le fait que l’État ne dispose pas d’un tel système dans tous les domaines relevant de la Convention est un obstacle majeur à la planification, au suivi et à l’évaluation efficaces de politiques, de programmes et de projets en faveur des enfants, et en particulier pour ce qui a trait à la violence contre les enfants, aux enfants handicapés, à la justice pour mineurs et aux enfants réfugiés, notamment aux enfants réfugiés non accompagnés.

Rappelant son Observation générale n o  5 (2003) concernant les mesures d ’ application générales de la Convention, le Comité engage l ’ État partie à mettre en place un système intégré de collecte de données sur les enfants dans tous les Länder , portant sur la période qui s ’ étend de l ’ enfance jusqu ’ à l ’ âge de 18 ans et d ’ introduire des indicateurs des droits de l ’ enfant qui pourraient servir à analyser et évaluer les progrès enregistrés dans la réalisation de ces droits. Ces données devraient être ventilées par âge, sexe, situation géographique, origine ethnique et contexte socioéconomique afin de faciliter l ’ analyse de la situation de tous les enfants et de fournir des indications pour la formulation, le suivi et l ’ évaluation des politiques, programmes et projets en vue de la mise en œuvre effective de la Convention.

Mécanisme de suivi indépendant

Le Comité réitère sa préoccupation face à l’absence persistante d’organe central indépendant chargé de suivre les progrès accomplis dans la mise en œuvre de la Convention aux niveaux fédéral, des Länder et des municipalités, qui soit habilité à recevoir et à traiter des plaintes relatives à des violations des droits de l’enfant.

Compte tenu de ses précédente s recommandation s (CRC/C/15/Add.226, par. 16), le Comité recommande à l ’ État partie de donner pour mandat à l ’ Institut allemand des droits de l ’ homme de suivre les progrès réalisés dans l ’ application de la Convention au x niveau x fédéral , des Länder et des municipalités. Le Comité recommande en outre que cet institut soit doté de ressources humaines, techniques et financières suffisantes et qu ’ il soit habilité à recevoir, instruire et traiter efficacement les plaintes relatives à des violations des droits de l ’ enfant d ’ une manière qui respecte la sensibilité des enfants.

Diffusion, sensibilisation et formation

Tout en se félicitant des efforts déployés par l’État partie pour diffuser la Convention dans le respect de la sensibilité des enfants, le Comité relève avec préoccupation que les adultes et les enfants, en particulier les enfants en situation vulnérable, n’ont pas suffisamment accès à l’information relative aux droits de l’enfant. Le Comité se dit une nouvelle fois préoccupé par le fait que l’État partie n’entreprend pas, de manière systématique et ciblée, des actions de diffusion, d’activités de sensibilisation et de formation portant sur la Convention, notamment dans les écoles et à l’intention des professionnels qui travaillent avec des enfants.

Conformément à ses précédentes recommandations (CRC/C/15/Add.43, par. 26, et CRC/C/15/Add.226, par. 20), le Comité recommande à l ’ État partie:

a) D ’ inscrire dans les programmes scolaires des modules obligatoires sur la Convention et les droits de l ’ homme en général et de faire en sorte que les groupes vulnérables comme les demandeurs d ’ asile, les réfugiés et les minorités ethniques aient accès à une information dans ce domaine;

b) De mettre en œuvre, de façon systématique et continue, des programmes d ’ éducation et de formation aux dispositions de la Convention à l ’ intention de tous les groupes professionnels travaillant avec et pour d es enfants, tels que les juges, les avocats, les agents des forces de l ’ ordre, les fonctionnaires, les enseignants, le personnel de santé (y compris les psychologues) et les travailleurs sociaux;

c) D ’ encourager la participation des médias aux activités de sensibilisation à la Convention dans le respect de la sensibilité des enfants, en faisant davantage appel aux médias sociaux, mais aussi à la presse, à la radio, à la télévision et autres médias et en faisant participer davantage les enfants eux-mêmes aux activités de sensibilisation du public.

Coopération internationale

Le Comité se félicite de l ’ engagement pris par l ’ État partie, dans le cadre des objectifs d ’ aide publique au développement de l ’ Union européenne, de consacrer 0,7 % de son produit intérieur brut à l ’ aide extérieure au développement d ’ ici à 2015. Le Comité encourage l ’ État partie à atteindre cette cible et à veiller à ce que les réalisations des droits de l ’ enfant deviennent une priorité absolue dans les accords de coopération internationale conclus avec les pays en développement. Le Comité recommande à l ’ État partie de tenir compte pour ce faire de ses observations finales concernant les rapports soumis par les pays bénéficiaires concernés . En outre, il lui recommande également d ’ inviter l ’ Union européenne à s ’ assurer que l ’ application de mesures d ’ austérité dans les pays concernés n ’ ait pas de répercussions négatives sur l ’ affectation des ressources aux politiques en faveur de l ’ enfance.

Droits de l’enfant et entreprises

Le Comité note que l’État partie consomme une quantité importante de charbon pour produire de l’énergie et s’inquiète des répercussions négatives des émissions de carbone sur la santé des enfants. Il est aussi préoccupé par l’insuffisance des mesures prises par l’État partie contre les sociétés allemandes qui sont soupçonnées de violer les droits de l’enfant et d’autres droits de l’homme dans leurs activités commerciales à l’étranger.

Compte tenu de son Observation générale n o  16 sur les obligations des États concernant les incidences du secteur des entreprises sur les droits de l ’ enfant (2013), le Comité recommande à l ’ État partie:

a) D ’ établir un cadre réglementaire clair, applicable à toutes les entreprises qui opèrent sur son territoire, de manière à garantir que leurs activités ne portent atteinte ni aux droits de l ’ homme , ni aux normes relatives à l ’ environnement , ni à d ’ autres normes, en particulier celles qui ont trait aux droits des enfants;

b) De prendre en considération l ’ intérêt supérieur de l ’ enfant lorsqu ’ il adopte des mesures budgétaires telles que l ’ octroi de subventions à des entreprises qui violent les droits de l ’ enfant;

c) D ’ examiner et d ’ adapter son cadre législatif, civil, pénal et administratif afin de s ’ assurer que les entreprises commerciales et leurs filiales qui exercent des activités ou qui sont basées dans l ’ État partie sont tenues juridiquement responsables de toutes violations des droits de l ’ enfant et des droits de l ’ homme auxquelles auraient donné lieu ces activités;

d) De se conformer aux normes internationales et nationales relatives aux entreprises et aux droits de l ’ homme en vue de protéger les communautés locales, en particulier les enfants, contre tout effet néfaste de l ’ activité des entreprises, conformément aux Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l ’ homme: mise en œuvre du cadre de référence «protéger, respecter et réparer» des Nations Unies, adopté par le Conseil des droits de l ’ homme en 2011.

B.Principes généraux (art. 2, 3, 6 et 12 de la Convention)

Non‑discrimination

Le Comité se félicite des mesures adoptées par l’État partie pour lutte contre la discrimination, et en particulier de celles qui visent à promouvoir une culture de la compréhension et de la tolérance. Il demeure toutefois préoccupé par le fait que les enfants handicapés et les enfants issus de l’immigration sont toujours victimes de discrimination dans l’État partie, en particulier dans les domaines de l’éducation et des soins de santé.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ intensifier ses mesures destinées à lutter contre la discrimination, en particulier celle qui est exercée à l ’ égard des enfants handicapés et des enfants issus de l ’ immigration, en menant des programmes et des politiques visant à réduire les inégalités d ’ accès à l ’ éducation, à la santé et au développement. Il lui recommande aussi de continuer à sensibiliser la population à la discrimination et à favoriser la création d ’ un environnement propice à l ’ ouverture et à la tolérance en milieu scolaire comme dans d ’ autres espaces pour enfants.

Intérêt supérieur de l’enfant

Tout en notant l’intérêt croissant porté à la protection de l’enfance, qui est un principe directeur de l’ordre juridique interne de l’État partie, le Comité note aussi avec préoccupation que le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant n’a pas encore été incorporé dans la législation fédérale et que son caractère prioritaire n’est pas encore reconnu par tous les secteurs du pouvoir législatif, exécutif et judiciaire. Ce principe est même bien souvent négligé dans les affaires relatives à des enfants issus de familles défavorisées sur les plans éducatif ou socioéconomique, notamment les enfants réfugiés et demandeurs d’asile.

Le Comité appelle l ’ attention de l ’ État partie sur son Observation générale n o  14 (2013) sur le droit de l ’ enfant à ce que son intérêt supérieur soit une considération primordiale. Conformément à ses précédentes observations finales (CRC/C/15/Add.226, par.  27) , il lui recommande de redoubler d ’ efforts pour que ce droit soit dûment intégré et systématiquement appliqué dans toutes les procédures législatives, administratives et judiciaires ainsi que dans l ’ ensemble des politiques, programmes et projets qui présentent un intérêt pour les enfants ou qui ont une incidence sur leur situation. À cet égard, il encourage l ’ État partie à élaborer des procédures et des critères pour aider toutes les personnes compétentes à déterminer l ’ intérêt supérieur de l ’ enfant dans tous les domaines et à s ’ assurer qu ’ il est une considération primordiale. Il engage à porter ces procédures et ces critères à la connaissance des institutions privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives et des organes législatifs ainsi que du grand public.

C.Liberté et droits civils (art. 7, 8 et 13 à 17 de la Convention)

Enregistrement des naissances

Le Comité se félicite des progrès réalisés dans l’État partie en matière d’enregistrement des naissances de tous les enfants nationaux et étrangers, y compris des enfants de réfugiés et de demandeurs d’asile. Il relève toutefois avec préoccupation les difficultés pratiques auxquelles se heurtent les personnes n’ayant pas le statut de résident qui demandent un certificat de naissance pour leurs nouveau-nés, difficultés découlant du fait que les officiers d’état civil chargés de délivrer ces certificats sont tenus de contrôler le statut de résident de ces personnes et de transmettre ces informations aux autorités d’immigration.

Le Comité engage l ’ État partie à prendre les mesures nécessaires pour que toutes les naissances puissent être enregistrées, indépendamment du statut légal des parents et/ou de leur origine. Il lui recommande à cet effet de dispenser les officiers d ’ état civil de l ’ obligation d ’ informer les autorités d ’ immigration, comme il l ’ a fait en 2011 pour les fonctionnaires de l ’ éducation.

Droit à l’identité

Le Comité prend note de la décision de l’État partie de renoncer à l’installation de nouvelles «boîtes à bébés» et de son intention de réglementer les naissances anonymes, ainsi que de fournir un soutien aux femmes enceintes ou ayant récemment accouché, afin de réduire le nombre de nouveau-nés abandonnés. Il relève toutefois que l’absence de réglementation et l’utilisation continue des boîtes à bébés constituent des violations notamment des articles 6 à 9 et 19 de la Convention.

Le Comité engage instamment l ’ État partie à prendre toutes les mesures nécessaires pour mettre fin aux abandons anonymes et pour renforcer et promouvoir d ’ autres solutions sans plus attendre. Il l ’ exhorte également à redoubler d ’ efforts pour étudier et combattre les causes profondes de l ’ abandon de nourrissons. Il devrait notamment fournir des services de planification familiale et de santé génésique, des conseils et une aide sociale adéquats en cas de grossesse non désirée, prévenir les grossesses à risque et apporter un soutien aux familles dans le besoin, en faisant de la possibilité d ’ accoucher sous X à l ’ hôpital une mesure de dernier ressort. À cet égard, et compte tenu de son devoir de respecter pleinement toutes les dispositions de la Convention l ’ État partie devrait établir un dossier confidentiel sur les parents , auquel l ’ enfant pourra it avoir accès plus tard.

D.Violence à l’égard des enfants (art. 19, 24 (par. 3), 28 (par. 2), 34, 37 a) et 39 de la Convention

Châtiments corporels

Le Comité note avec satisfaction que le droit des enfants à une éducation exempte de violence est inscrit dans la loi. Il demeure cependant préoccupé par le grand nombre d’enfants soumis à diverses formes de violence dans le cadre de la famille.

Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir une application plus rigoureuse du droit à une éducation exempte de violence. Il lui recommande en outre de renforcer et de développer les programmes de sensibilisation visant à promouvoir des méthodes d ’ éducation et des formes de sanction positives, non violentes et participatives en lieu et place des châtiments corporels.

Exploitation et sévices sexuels

Le Comité est préoccupé par l’insuffisance des mesures visant à prévenir l’exploitation et les abus sexuels et de l’aide et du soutien apportés aux victimes de délits sexuels, et il relève notamment:

a)L’insuffisance des mesures de prévention adoptées dans les écoles et autres établissements fréquentés par des enfants;

b)L’insuffisance des services d’orientation dans certaines régions et le manque de services spécialisés dans le traitement des enfants victimes de sévices sexuels, en particulier dans les Länder orientaux et les régions rurales;

c)L’insuffisance des moyens financiers dont disposent les services spécialisés;

d)L’inégalité d’accès aux services de soutien et d’orientation, qui touche en particulier les garçons, les enfants handicapés et les enfants migrants qui ne connaissent pas l’allemand ou ne sont pas à l’aise dans cette langue;

e)L’absence de statut permanent du Commissaire indépendant chargé des violences sexuelles commises sur des mineurs.

Le Comité demande instamment à l ’ État partie d ’ améliorer la coordination entre tous les acteurs impliqués dans le système de protection et de leur allouer les ressources humaines, techniques et financières nécessaires pour garantir:

a) La prévention de la violence sexuelle à l ’ égard des enfants, notamment dans les écoles et institutions pour enfants handicapés, et dans les foyers d ’ accueil et les structures religieuses, sportives et culturelles;

b) Le libre accès aux services d ’ orientation et de traitement des enfants qui ont été victimes d ’ exploitation et de violences sexuelles;

c) L ’ allocation de ressources aux services spécialisés;

d) L ’ accès universel aux services d ’ orientation et de traitement grâce à des services d ’ interprétation en langue étrangère et en langue des signe;

e) L ’ octroi d ’ un statut permanent du Commissaire indépendant chargé des violences sexuelles commises sur des mineurs.

Tout en prenant note des mesures adoptées par l’État partie pour enquêter sur les cas de violences à l’encontre d’enfants commises par des ecclésiastiques, le Comité relève avec inquiétude que plusieurs cas n’ont pas fait l’objet d’enquête.

Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour accélérer les enquêtes et les poursuites dans les cas de sévices à enfant imputés à des ecclésiastiques.

Pratiques néfastes

Le Comité constate avec préoccupation qu’un grand nombre de jeunes filles résidant dans l’État partie ont subi des mutilations génitales, ou qu’elles risquent soit d’être envoyées un certain temps dans un pays où ces mutilations sont pratiquées soit de les subir sur le territoire de l’État partie. Il note aussi avec préoccupation que bien souvent les médecins, les sages-femmes et le personnel hospitalier ne sont pas en mesure de dispenser des conseils et de venir en aide aux victimes de ces mutilations, par méconnaissance de ces pratiques et des mesures de prévention et de protection.

Le Comité rappelle ses précédentes recommandations (CRC/C/15/Add.226), par. 47) et engage l ’ État partie à élaborer une politique et une stratégie nationales de lutte contre les mutilations génitales féminines et à:

a) Di spenser à tous les groupes professionnels concernés, tels que les médecins, les sages-femmes, le personnel hospitalier, les enseignants, les travailleurs sociaux et les personnes qui travaillent dans les services d ’ assistance téléphonique destinés aux enfants , une formation axée sur la prévention des mutilations génitales et les mesures d ’ intervention;

b) Améliorer la diffusion de l ’ information et organiser des campagnes de prévention dans ce domaine, en faisant notamment appel à la société civile et aux médias. Ces activités devraient cibler en priorité les jeunes filles exposées afin de les informer des possibilités d ’ aide et de conseils qui leur sont offertes;

c) Renforcer encore les mesures destinées à éliminer les mutilations génitales féminines dans ses programmes de coopération internationale, en offrant une assistance financière et technique aux pays dans lesquels ces mutilations sont pratiquées.

Droit de l’enfant d’être à l’abri de toute forme de violence

Le Comité note avec préoccupation que les enfants sont toujours confrontés à la violence, à l’école et dans d’autres institutions, notamment sous forme de mauvais traitements, de brimades ou de, plus en plus, de harcèlement en ligne. Il s’inquiète aussi de constater que dans certaines écoles les enseignants et les travailleurs sociaux qualifiés pour faire face à ces problèmes ne sont pas suffisants et que d’autres établissements ne disposent pas de personnel qualifié.

Rappelant les recommandations de l ’ Étude sur la violence à l ’ encontre des enfants réalisée en 2006 par l ’ ONU (A/61/299) et son Observation générale n o  13 (2011) sur le droit de l ’ enfant d ’ être protégé contre toutes les formes de violence, le Comité recommande à l ’ État partie:

a) D ’ élaborer une stratégie nationale globale pour prévenir et réprimer toutes les formes de violence à l ’ encontre des enfants,

b) D ’ adopter un cadre national de coordination pour lutter contre toutes les formes de violence à l ’ encontre des enfants;

c) De sensibiliser la population à la violence dirigée contre des enfants et de former les enseignants et les travailleurs sociaux pour leur apprendre à reconnaître les cas de violence et y réagir de façon efficace;

d) De coopérer avec le Représentant spécial du Secrétaire général sur la violence à l ’ encontre des enfants et les différents organismes compétents des Nations Unies.

E.Milieu familial et protection de remplacement (art. 5, 9 à 11, 18 (1 et 2), 20, 21, 25 et 27 (par. 4) de la Convention

Tout en se félicitant des réformes décisives engagées par l’État partie en matière de réglementation des relations parentales et de la tendance croissante à attribuer aux parents la garde partagée de leurs enfants, le Comité note que le terme de «garde» est toujours utilisé dans la législation de l’État partie alors même que l’expression choisie dans la Convention relative aux droits de l’enfant et reprise dans certains instruments internationaux adoptés après son entrée en vigueur est celle de «responsabilité parentale».

Le Comité recommande à l’État partie d’étudier la possibilité de remplacer le terme de «garde» par l’expression «responsabilité parentale», conformément à l’objet et au but de la Convention.

Enfants privés de milieu familial

Le Comité prend note avec préoccupation de la réglementation très stricte applicable au regroupement familial, en vertu de laquelle les enfants qui ne sont pas citoyens d’un pays de l’Union européenne ne sont autorisés à rejoindre leurs parents dans l’État partie que s’ils sont âgés de moins de 16 ans et si ces derniers peuvent assurer leur subsistance.

Compte tenu de son Observation générale  n o 14 (2013) sur le droit de l’enfant à ce que son intérêt supérieur soit une considération primordiale, le Comité recommande à l’État partie de relever à 18 ans la limite d’âge en deçà de laquelle les enfants de ressortissants étrangers installés sur son territoire peuvent être autorisés à rejoindre leurs parents.

Tout en se félicitant des mesures législatives adoptées par l’État partie pour aider les parents à s’acquitter de leurs obligations parentales, le Comité se déclare préoccupé par:

a)Le nombre croissant d’enfants privés de milieu familial et placés sous la garde d’une autorité publique;

b)Les moyens insuffisants dont disposent les services de protection de la jeunesse pour venir en aide aux familles en situation de risque et le petit nombre de municipalités qui peuvent fournir des services dans la langue des parents ou avec l’aide d’un interprète;

c)La pratique tendant à placer les enfants ayant des difficultés comportementales dans des foyers d’autres pays de l’Union européenne sans surveillance ou évaluation appropriées.

Le Comité recommande à l’État partie:

a) D’améliorer son système de soutien aux familles et de veiller à ce que le recours au placement familial ne soit utilisé que dans l’intérêt supérieur de l’enfant;

b) De doter les services de protection sociale des ressources humaines et financières suffisantes pour qu’ils soient accessibles à toutes les familles confrontées à des difficultés sociales et économiques, y compris aux familles de migrants qui ont beaucoup de mal à surmonter les obstacles linguistiques;

c) De reconsidérer la pratique du placement d’enfants dans d’autres pays de l’Union européenne et d’instaurer une surveillance, un suivi et une évaluation des enfants faisant l’objet de cette mesure.

Le Comité se félicite des mesures prises par l’État partie pour développer les services d’enseignement préscolaire et de prise en charge de la petite enfance, mais il est préoccupé par le fait que ces services sont toujours insuffisants dans certains Länder, notamment pour les enfants de moins de 3 ans, et par l’écart constaté entre les normes de qualité en vigueur dans les différents Länder dans ce domaine. Le Comité note aussi avec préoccupation que les familles en situation vulnérable, et en particulier les familles de migrants, ont difficilement accès à ces services.

Le Comité recommande à l’État partie d’adopter une politique nationale globale concernant l’éducation et le développement de la petite enfance, en accord avec la Stratégie de croissance Europe 2020, et de faire en sorte que tous les enfants aient accès sans discrimination à des services d’enseignement préscolaire et de prise en charge de la petite enfance de qualité.

F.Handicap, santé et protection (art. 6, 18 (par. 3), 23, 24, 26, 27(par. 1 à 3) et 33 de la Convention)

Enfants handicapés

Le Comité salue les initiatives prises par l’État partie pour analyser et améliorer la situation des enfants handicapés. Il constate toutefois avec préoccupation que les enfants handicapés ne sont généralement pas scolarisés dans le système ordinaire, en particulier au niveau de l’enseignement secondaire. À cet égard, le Comité note aussi avec préoccupation:

a)Que la coopération entre les instances fédérales et celles des Länder dans le secteur de l’éducation laisse à désirer, que les programmes ne sont pas adaptés à une éducation intégratrice et que les enseignants et le personnel scolaire ne reçoivent aucune formation systématique dans ce domaine;

b)Que la nécessité d’une assistance individuelle et d’aménagement raisonnables dans le secteur de l’éducation n’est pas reconnue et que la réglementation relative à la langue des signes n’est pas la même dans tous les Länder;

c)Que, dans certains Länder, les enfants handicapés sont scolarisés dans le système éducatif spécialisé au niveau de l’enseignement primaire, contre l’avis de leurs parents et qu’un grand nombre d’enfants handicapés n’ont pas de diplôme à l’issue de leur scolarité.

Compte tenu de l’article 23 de la Convention et de son Observation générale  n o  9 (2006) sur les droits des enfants handicapés, le Comité engage l’État partie à adopter une approche du handicap fondée sur les droits de l’homme et recommande expressément à l’État partie:

a) De poursuivre la mise en place d’une éducation intégratrice à l’échelon national d’y consacrer les ressources nécessaires, notamment en faisant appel aux ressources disponibles dans les écoles spéciales;

b) D’entreprendre toutes les réformes législatives et structurelles nécessaires pour garantir aux enfants handicapés le droit à l’insertion scolaire qui englobe le droit à une assistance individuelle et à des aménagements raisonnables en matière d’éducation;

c) De veiller à ce que l’avis des enfants handicapés et de leurs parents soit pris en compte dans le choix du type d’établissement dans lequel ils seront scolarisés.

Le Comité est préoccupé par les conclusions d’une étude récemment publiée dans l’État partie, selon laquelle les filles handicapées sont fréquemment exposées à la violence, y compris à la violence sexuelle.

Le Comité recommande à l’État partie de prendre les mesures nécessaires pour prévenir toute forme de violence à l’égard des enfants handicapés, en prêtant une attention particulière à la sécurité des filles handicapées. À cet égard, il lui recommande de mettre en place des mécanismes de protection et d’examen des plaintes destinés aux enfants handicapés qui ont été victimes de violences.

Le Comité note avec préoccupation que les enfants handicapés issus de l’immigration n’ont pas accès aux mesures d’assistance dans des conditions d’égalité avec les autres enfants handicapés, faute d’une information suffisante, parce que leurs parents ne savent pas comment se procurer les formulaires nécessaires ou par méconnaissance de leur handicap.

Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour veiller à ce que les familles des enfants handicapés issus de l’immigration soient dûment informées et conseillées en ce qui concerne les possibilités d’assistance auxquelles elles peuvent faire appel.

Santé et services sanitaires

Le Comité exprime sa préoccupation concernant:

a)Le manque d’intérêt suscité par les nouvelles pathologies observées chez les enfants, liées à des troubles de l’attachement qui pourraient s’expliquer par le recul de l’allaitement maternel exclusif et à l’augmentation des troubles psychologiques et comportementaux consécutifs à la pression qu’ils subissent en termes de résultats scolaires;

b)Les difficultés rencontrées par les enfants demandeurs d’asile et les enfants migrants en situation irrégulière pour avoir accès aux services de santé, y compris au traitement des maladies aiguës, à des soins préventifs et à une thérapie sociopsychologique.

Le Comité recommande à l’État partie de mettre en place, à l’intention des écoles et des familles, des programmes de promotion et de sensibilisation soulignant l’importance de l’exercice physique ainsi que d’une alimentation et d’un mode de vie sains. Il l’engage en outre à prendre les mesures nécessaires pour remédier aux inégalités existantes en matière d’accès à la santé. Une attention particulière doit être portée aux enfants et aux jeunes en situation vulnérable, notamment à ceux qui appartiennent à des groupes soci aux défavorisés ou qui sont issus de l’immigration. Le Comité rappelle en outre à l’État partie son Observation générale n o 15 (2013) sur le droit de l’enfant de jouir du meilleur état de santé possible et il lui recommande de prendre toutes les mesures législatives et structurelles nécessaires pour lutter contre la commercialisation des substituts du lait maternel et d’encourager les mères à allaiter leur enfant afin de renforcer la relation mère-enfant.

Santé mentale

Le Comité est préoccupé par le nombre croissant d’enfants auxquels sont administrés des psychotropes et de ceux qui sont diagnostiqués comme souffrant de troubles de déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH ou TDA) et notamment par:

a)La surprescription de methylphenidate;

b)Le fait que les enfants auxquels on a diagnostiqué (parfois à tort) des TDAH ou TDA sont éloignés de force de leur famille et placés en famille d’accueil ou en hôpital psychiatrique, où on leur administre bien souvent des substances psychotropes.

Le Comité recommande à l’État partie:

a) De veiller à ce que le placement de ces enfants en famille d’accueil ou leur internement psychiatrique ne soit qu’une mesure de dernier recours ou adoptée sur la base d’un diagnostic sérieux;

b) De faire en sorte que les familles aient accès à des services de conseil et de soutien psychologique;

c) De mettre en place un système de contrôle par des experts des diagnostics de TDAH et de TDA et de la prescription de médicaments aux enfants ainsi diagnostiqués;

d) De charger les autorités sanitaires compétentes de déterminer les causes profondes des troubles de l’attention à l’école et d’améliorer le diagnostic des problèmes de santé mentale chez les enfants;

e) De faire cesser la pratique qui consiste à déclarer des enfants «atteints de troubles psychiatriques» en l’absence d’un dossier médical complet.

Santé des adolescents

Tout en se félicitant du recul du tabagisme chez les adolescents, le Comité demeure préoccupé par l’augmentation considérable de la consommation d’alcool dans cette catégorie de la population.

Rappelant son Observation générale  n o  4 (2013) sur la santé et le développement de l’adolescent, le Comité recommande à l’État partie de veiller à fournir aux enfants des informations précises sur les dangers de la consommation de drogues, d’alcool et d’autres substances. Il lui recommande d’intégrer davantage dans les programmes scolaires une information sur les effets délétères de ces habitudes afin que les enfants apprennent à éviter ces abus, et d’encourager les médias à relayer cette information. Le Comité recommande en outre à l’État partie de faciliter l’accès des enfants à des services confidentiels de conseil et de traitement des toxicomanies.

Allaitement maternel

Le Comité prend note du recul du taux d’allaitement maternel dans l’État partie mais se félicite des initiatives visant à promouvoir ce mode d’alimentation infantile, notamment de l’adoption par la Commission européenne de la Directive 2006 relative aux préparations pour nourrissons et aux préparations de suite. Il craint que les efforts déployés pour relever le taux d’allaitement maternel exclusif les six premiers mois de la vie d’un enfant ne soient insuffisants.

Le Comité recommande à l’État partie de renforcer ses efforts visant à promouvoir l’allaitement maternel exclusif et prolongé en assurant l’accès à la documentation pertinente et en menant à l’intention du grand public des activités d’information et de sensibilisation sur l’importance de l’allaitement maternel et les risques liés à l’alimentation artificielle. Le Comité engage l’État partie à respecter scrupuleusement le Code international de commercialisation des substituts du lait maternel.

Niveau de vie

Le Comité est préoccupé par l’augmentation du taux de pauvreté et le relèvement du seuil d’exposition à la pauvreté chez les enfants, les plus touchés étant les enfants de familles monoparentales, de familles nombreuses et de familles issues de l’immigration, en particulier lorsque les adultes sont chômeurs ou occupent un emploi précaire. Il se déclare en outre préoccupé par les répercussions possibles que les sanctions prévues par la loi infligées aux chômeurs qui ne se conforment pas aux obligations liées à l’assistance chômage peuvent avoir sur le niveau de vie des enfants de chômeurs ou des adolescents chômeurs.

Le Comité recommande à l’État partie d’allouer les ressources nécessaires et de redoubler d’efforts pour s’attaquer aux causes profondes de la pauvreté chez les enfants, et de procéder à une évaluation complète des secteurs dans lesquels les familles sont particulièrement vulnérables à la pauvreté en vue de concevoir et d’appliquer des stratégies efficaces visant à remédier à cette situation. Il lui recommande en outre d’accroître l’assistance et le soutien matériels en faveur des familles économiquement défavorisées afin de permettre à tous les enfants d’avoir un niveau de vie satisfaisant.

G.Éducation, loisirs et activités culturelles (art. 28, 29, 30 et 31de la Convention)

Éducation, y compris formation et orientation professionnelles

Le Comité note que l’éducation relève presque entièrement de la responsabilité des Länder. Il constate toutefois avec préoccupation l’absence d’harmonisation entre les différents systèmes en vigueur dans chacun d’eux, ce qui engendre des inégalités dans d’importants domaines. Le Comité note en outre que, dans la plupart des Länder, le système scolaire propose trois niveaux de formation: inférieure, intermédiaire et supérieure parmi lesquels le choix doit être fait à un très jeune âge et qu’il est difficile de changer d’orientation par la suite. Le Comité constate aussi avec regret que les résultats scolaires des enfants issus de minorités ethniques sont nettement plus faibles et que ces enfants sont deux fois plus nombreux que les autres à quitter l’école sans diplôme.

Compte tenu de son Observation générale n o 1 (2001) sur les buts de l’éducation et des recommandations qui ont été formulées par le Rapporteur spécial sur le droit à l’éducation dans son rapport sur la mission qu’il a effectuée en Allemagne en 2006 (A/HRC/4/29/Add.3), le Comité recommande à l’État partie:

a) D’adopter les mesures nécessaires pour harmoniser davantage les programmes scolaires des différents Länder de manière à faciliter la mobilité des étudiants;

b) D’entreprendre une révision du système éducatif actuel qui impose aux étudiants une orientation précoce et de le rendre plus ouvert;

c) D’allouer suffisamment de ressources humaines, techniques et financières pour que les enfants issus de minorités ethniques aient accès à des possibilités de soutien plus nombreuses dans les établissements scolaires.

H.Mesures spéciales de protection (art. 22, 30, 32 et 33, 35 et 36, 37 b) à d), 38, 39 et 40 de la Convention)

Enfants demandeurs d’asile et enfants réfugiés

Le Comité relève avec satisfaction que l’État partie a retiré la déclaration qu’il avait faite à propos de l’article 22 de la Convention et constate que des milliers d’enfants demandeurs d’asile et d’enfants réfugiés venus de nombreux pays ont été accueillis dans l’État partie. Le Comité évoque néanmoins plusieurs aspects qui continuent de le préoccuper:

a)La loi sur la procédure d’asile prévoit que les enfants âgés de 16 ans ont la capacité juridique d’engager seuls une procédure d’asile. De ce fait, bien souvent les enfants âgés de 16 ans et plus ne sont pas pleinement protégés par les services de protection de la jeunesse et sont placés dans des centres destinés aux demandeurs d’asile adultes;

b)La procédure d’évaluation de l’âge dans l’État partie peut comporter des pratiques dégradantes et humiliantes et n’est pas très fiable de sorte qu’un grand nombre d’enfants demandeurs d’asile et d’enfants réfugiés sont recensés comme des adultes;

c)Les enfants soldats ou ceux qui ont échappé à l’enrôlement forcé ne sont pas toujours repérés et lorsque leurs demandes d’asile sont rejetées, il n’est pas possible d’évaluer correctement leurs besoins de protection et de leur accorder l’attention qu’ils méritent;

d)La durée du placement des enfants demandeurs d’asile en attente d’expulsion dans des centres de rétention peut aller jusqu’à dix-huit mois ce qui est en totale contradiction avec le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant.

Le Comit é recommande à l’État partie:

a) De traiter tous les enfants de moins de 18 ans dans des conditions d’égalité et en respectant leurs besoins;

b) De veiller à ce que la procédure d’évaluation de l’âge appliquée aux enfants demandeurs d’asile et aux enfants réfugiés repose sur des méthodes scientifiquement prouvées et respectant pleinement la dignité de l’enfant, conformément aux recommandations figurant dans son Observation générale  n o  6 (2005) sur le traitement des enfants non accompagnés et des enfants séparés en dehors de leur pays d’origine;

c) D’améliorer la procédure permettant de repérer les enfants soldats et les enfants qui risquent d’être enrôlés et de s’assurer qu’ils obtiennent le statut de réfugié afin que leurs besoins de protection puissent être mieux évalués et qu’ils puissent bénéficier de l’assistance psychologique et sociale dont ils ont besoin;

d) De veiller à ce que le placement en détention d’enfants demandeurs d’asile ou migrants soit toujours une mesure de dernier ressort et d’une durée aussi brève que possible, conformément à l’article 37 b) de la Convention, et que cette mesure soit limitée dans le temps et fasse l’objet d’un contrôle juridictionnel.

Enfants migrants

Le Comité se déclare préoccupé par les dispositions de la législation fédérale qui font obligation à différents services de l’État partie de signaler aux autorités d’immigration toute personne qui, à leur connaissance, n’a pas de permis de résidence, y compris les enfants. Ces dispositions dissuadent les enfants migrants en situation irrégulière de s’adresser à ces services, de crainte d’être dénoncés, ce qui pourrait notamment leur valoir l’expulsion.

Le Comité engage l’État partie à abroger les dispositions qui obligent tous les services à dénoncer aux autorités d’immigration tous les enfants migrants en situation irrégulière.

Traite

Le Comité note avec préoccupation que la loi sur la résidence prévoit la possibilité d’accorder des permis de résidence aux victimes de la traite, y compris aux enfants, sous réserve qu’elles collaborent avec les forces de l’ordre.

Le Comité recommande à l’État partie de réviser la loi sur la résidence afin d’en abroger les conditions dont est assorti l’octroi d’un permis de résidence aux enfants victimes de la traite.

Administration de la justice pour mineurs

Le Comité accueille avec satisfaction l’amendement législatif interdisant que les enfants placés en détention ou en garde à vue puissent se trouver en compagnie de personnes qui peuvent avoir jusqu’à 24 ans. Il regrette toutefois que la privation de liberté ne soit pas utilisée dans tous les Länder comme mesure de dernier recours.

Conformément à ses observations finales précédentes (CRC/C/15/Add.226, par. 61), le Comité recommande que la privation de liberté soit toujours une mesure de dernier recours et d’une durée aussi brève que possible. À cet égard, le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour promouvoir des mesures de substitution telles que la mise à l’épreuve et les travaux d’intérêt général.

Suite donné aux observations finales concernant le rapport initial présenté par l’État partie au titre du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés (CRC/C/OPAC/DEU/CO/1)

Le Comité accueille avec satisfaction les efforts déployés par l’État partie pour appliquer les recommandations qu’il lui avait faites s’agissant de son rapport au titre du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés. Le Comité évoque cependant plusieurs sujets de préoccupation:

a)L’âge minimum de l’engagement volontaire dans les forces armées pour y suivre une formation militaire est de 17 ans. De surcroît, les enfants qui se sont engagés volontairement et décident de quitter l’armée après l’expiration de leur période d’essai s’exposent à des poursuites;

b)L’armée organise des campagnes publicitaires qui ciblent surtout les enfants et des représentants des forces armées se rendent parfois dans les écoles pour s’entretenir avec les élèves et organiser des activités;

c)Il n’existe aucune disposition juridique interdisant expressément la vente d’armes lorsque leur destination finale est un pays où des enfants sont notoirement enrôlés ou utilisés dans des hostilités ou pourraient l’être.

Le Comité rappelle ses précédentes recommandations (CRC/OPAC/DEU/CO/1) et recommande à l’État partie:

a) De relever l’âge minimum de l’engagement volontaire dans les forces armées à 18 ans;

b) D’interdire toute forme de campagne publicitaire pour les forces armées allemandes qui cible les enfants;

c) De garantir la plus grande transparence dans les transferts d’armes et d’en interdire expressément la vente dans la législation lorsque leur destination finale est un pays où des enfants sont notoirement enrôlés ou utilisés dans des hostilités ou pourraient l’être.

Le Comité prend note avec satisfaction des dispositions relatives aux crimes de guerre qui figurent à l’article 8 du Code pénal de l’État partie et des déclarations de l’État partie selon lesquelles celui-ci peut exercer sa compétence extraterritoriale pour ce qui est de l’enrôlement d’enfants âgés de moins de 15 ans dans les forces armés ou dans des groupes armés. Le Comité note qu’une telle compétence peut également être établie s’agissant d’enfants âgés de 15 à 17 ans, mais il regrette qu’elle soit soumise à la condition de la double incrimination.

Le Comité recommande à l’État partie de renforcer encore les mesures internationales visant à prévenir l’enrôlement d’enfants et leur utilisation dans des hostilités. Il lui recommande en outre d’envisager d’étendre sa compétence extraterritoriale aux crimes d’enrôlement et d’implication d’enfants dans des hostilités sans la soumettre à la condition de la double incrimination.

I.Ratification des instruments internationauxrelatifs aux droits de l’homme

Afin de renforcer encore la réalisation des droits de l’enfant, le Comité recommande à l’État partie d’adhérer aux instruments internationaux auxquels il n’est pas encore partie, en particulier le Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et à la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.

J.Coopération avec les organismes régionaux et internationaux

Le Comité recommande à l’État partie de coopérer avec le Conseil de l’Europe en vue de la mise en œuvre de la Convention relative aux droits de l’enfant et d’autres instruments internationaux dans l’État partie ainsi que dans d’autres États membres du Conseil de l’Europe.

K.Suivi et diffusion

Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour mettre en œuvre pleinement les présentes recommandations, notamment en les transmettant au chef de l’État, au Parlement, aux ministères compétents, à la Cour suprême et aux autorités locales, afin qu’elles soient dûment examinées et suivies d’effet.

Le Comité recommande en outre que les troisième et quatrième rapports périodiques présentés en un seul document, les réponses écrites de l’État partie et les présentes observations finales soient largement diffusés dans les langues du pays, notamment, mais non exclusivement, sur Internet, parmi le grand public, et auprès des organisations de la société civile, des médias, des associations de jeunes, des associations professionnelles et des enfants, afin de susciter un débat général et de faire connaître la Convention, et les protocoles facultatifs s’y rapportant, leur application et leur suivi.

L.Prochain rapport

Le Comité invite l’État partie à soumettre ses cinquième et sixième rapports périodiques présentés en un seul document avant le 4 avril 2019 et à y faire figurer des informations sur la mise en œuvre des présentes observations finales. Le Comité appelle l’attention de l’État partie sur les directives harmonisées concernant l’établissement de rapports sur l’application de chaque instrument, qu’il a adoptés le 1 er  octobre 2010 (CRC/C/58/Rev.2 et Corr.1) et lui rappelle que les prochains rapports devront y être conformes et ne pas dépasser 60 pages. Le Comité demande instamment à l’État partie de soumettre son rapport en tenant compte des directives. En application de la résolution 67/167 de l’Assemblée générale, en date du 20 décembre 2012, si l’État partie soumet un rapport excédant le nombre de pages requis, il sera invité à le remanier et à le soumettre à nouveau conformément aux directives susmentionnées. Le Comité rappelle à l’État partie que, s’il n’est pas en mesure de remanier son rapport et de le soumettre à nouveau, la traduction de ce rapport aux fins d’examen par le Comité ne pourra pas être garantie.

Le Comité invite aussi l’État partie à présenter un document de base actualisé qui soit conforme aux prescriptions énoncées en la matière dans les directives harmonisées pour l’établissement de rapport approuvé en juin 2006 à la cinquième réunion intercomités des organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme (HRI/GEN/Rev.6, chap. I).